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BAR S2787 Styles, techniques et expression graphique dans l’art sur paroi rocheuse

(Styles, Techniques and Graphic Expression in Rock Art) Edited by Marc Groenen and Marie-Christine Groenen.
British Archaeological Reports Ltd; 9781407314464; £41; 2016. Order Online: www.barpublishing.com

DES ANIMAUX ET QUELQUES SIGNES À LA MAIRIE ET À L’ABRI MÈGE À TEYJAT (DORDOGNE,


FRANCE)

ANIMALS AND A FEW SIGNS IN LA MAIRIE CAVE AND MEGE SHELTER AT TEYJAT (DORDOGNE,
FRANCE)

Patrick PAILLET & Elena MAN-ESTIER

Résumé

L’art pariétal et mobilier gravé des sites de Teyjat (la Mairie et l’abri Mège), attribué au Magdalénien supérieur
ancien et récent, vers 13-14.000 ans avant le présent en âges calibrés, fait actuellement l’objet d’une révision
exhaustive dans le cadre du Projet Collectif de Recherche « Peuplements et cultures à la fin du Tardiglaciaire dans le
nord du Périgord, entre Dronne et Tardoire » dirigé par l’un des auteurs (PP). Les œuvres figuratives produites dans
ces deux sites, sur les parois d’un édifice démantelé de calcite blonde et translucide dans la grotte et sur des armes, des
outils ou des objets en apparence non fonctionnels extraits des différentes couches d’occupations magdaléniennes, ont
été amplement commentées depuis leurs découvertes au début du XX e siècle. Certaines œuvres, comme les aurochs ou
les rennes pariétaux, ont irrigué les conceptions les plus académiques du réalisme et ont servi l’unilinéarité des
premières chronologies stylistiques, que ce soient les « délicats graffites de Magdaléniens 5 et 6 » (Breuil, 1952 : 40)
ou les « meilleurs témoins datés de cette évolution qui a laissé de grande œuvres jusque dans le Magdalénien VI »
(Leroi-Gourhan, 1971 : 72). Selon Leroi-Gourhan les œuvres de la Mairie étaient débarrassées des conventions de
modelés propres aux figurations animales plus anciennes, remarquablement flexibles dans leur forme,
photographiquement fidèles dans leurs proportions et extrêmement sensibles dans leurs aplombs et leurs mouvements.
Elles étaient propulsées au sommet de la trajectoire évolutive de l’art pariétal paléolithique. Quant aux œuvres
mobilières, elles témoignaient pour certaines de l’inspiration féconde et originale de leurs auteurs dont l’imaginaire se
déployait dans deux directions contraires, celle des registres géométriques ornementaux et celle des registres figuratifs,
entre animal réaliste et « diablotins » surréalistes. Tout cela n’est pas inexact et on ne saurait dénier à l’art gravé de
Teyjat sa profondeur figurative et même une certaine excentricité symbolique. Mais le regard aiguisé que nous jetons
aujourd’hui sur ces œuvres invite à plus de nuance. La lecture renouvelée des supports pariétaux et mobiliers permet
une analyse critique des représentations figuratives ou non et de leurs enregistrements anciens (relevés notamment).
Elle offre également l’opportunité de nouvelles découvertes et ouvre un champ large à l’analyse technique et stylistique
des représentations replacées dans leur environnement et leur contexte archéologique. Enfin, elle ambitionne de situer
les productions symboliques magdaléniennes de Teyjat dans leur territoire et dans le cadre des réseaux de circulations
et de contacts ou d’échanges structurés à plus ou moins longue distance, vers l’Atlantique ou l’Aquitaine intérieure.

Abstract

Parietal and portable art from the sites of Teyjat (La Mairie cave and Mège shelter), attributed to the ancient and
recent Magdalenian, around 13-14.000 years BP cal, are currently subject of a general review in the frame of a
Collective Research Project « Peuplements et cultures à la fin du Tardiglaciaire dans le nord du Périgord, entre
Dronne et Tardoire » directed by one of the authors (PP). Figurative works produced in these two sites, on the walls of
a dismantled blonde and translucent calcite structure in the cave and on weapons, tools or non-functional objects,
apparently extracted from different Magdalenian layers were widely discussed since their discoveries in the early
twentieth century. Some works, such as parietal aurochs or reindeers irrigated the most academic conceptions of
realism and we used for the first unilinearity stylistic chronologies, whether they were « délicats graffites de
Magdaléniens 5 et 6 » (Breuil, 1952: 40) or the « meilleurs témoins datés de cette évolution qui a laissé de grande
œuvres jusque dans le Magdalénien VI » (Leroi-Gourhan, 1971 : 72). According to Leroi-Gourhan the piece of art of
La Mairie were cleared of the graphic conventions of oldest animal figures, remarkably flexible regarding their form,
photographically faithful in their proportions and extremely sensitive in their positions and movements. They were
considered as the top of the evolutionary path of the Palaeolithic cave art. The portable art was showing the fertile and
original inspiration of the authors whose imagination was displayed in two opposite directions, ornamental geometric
patterns and of figurative registers, between realistic animal and surreal « devils ». Thus this is not incorrect and one
cannot deny in the engraved art of Teyjat its figurative depth and even some symbolic eccentricity. But the precise look
we have nowadays of these works invites to more nuances. The new reading of the parietal and portable supports
allows a critical analysis of figurative (or not) representations and on their old records (tracings in particular). It also
give us the opportunity of new discoveries and opens therefore a wide field of technical and stylistic analysis of
representations, placed in their environment and their archaeological context. Finally, it aims to locate the
Magdalenian symbolic productions of Teyjat in their territory and within the network of circulations and contacts or of
structured trade on short or long distance, towards the Atlantic or inside Aquitaine.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Mots-clés : art mobilier, art pariétal, Magdalénien, bestiaire, signes


Keywords : portable art, rock art, Magdalenian, bestiary, signs

LA GROTTE DE LA MAIRIE ET L’ABRI MÈGE À TEYJAT, l’instituteur du village, Pierre Bourrinet, régulièrement
HISTORIQUE ET CONTEXTES assisté par Denis Peyrony.

Teyjat est une petite commune située au nord-ouest de la Auparavant, entre 1880 et 1888, Édouard Perrier du
Dordogne, à quelques kilomètres de la Charente, dans les Carne, notaire à Angoulême, avait fouillé à une dizaine
vallées du Bandiat et de l’un de ses petits tributaires, la de mètres de l’entrée de la grotte et découvert des
Marcourive. Parmi les sites archéologiques identifiés sur vestiges lithiques et osseux, ainsi que quelques pièces
le territoire de la commune, deux ont été occupés au d’art mobilier attribuées au Magdalénien lato sensu. Ses
Magdalénien supérieur. Distants d’à peine une centaine recherches sont publiées en 1889 (Perrier du Carne,
de mètres, ils sont bien connus des préhistoriens. Il s’agit 1889). En 1903, Pierre Bourrinet débute ses travaux à
de la grotte ornée de la Mairie et de l’abri Mège [fig. 1]. l’entrée de la cavité. Il met progressivement au jour deux
niveaux d’occupations du Magdalénien supérieur
La grotte de la Mairie s’ouvre au sud-ouest à 160 m (Couche A - Magdalénien supérieur ancien [ex. Magda.
d’altitude et à mi-hauteur d’un rebord de versant. C’est V] ; Couches D-E – Magdalénien supérieur récent [ex.
vers 1880, lors des travaux de terrassement réalisés pour Magd. VI]). Dès 1903, Denis Peyrony reconnaît les
la construction de l’ancienne mairie du village que gravures de la partie supérieure de la cascade
l’entrée de la grotte est dégagée. La cavité est creusée stalagmitique fragmentée en trois parties (panneaux
dans les calcaires oolithiques et dolomitiques du Bajocien actuels D, E et F). Lors des fouilles, P. Bourrinet
(Jurassique) et est orientée selon un axe principal Est- découvre trois autres dalles gravées (panneaux actuels A,
Ouest. L’entrée bénéficie d’un excellent ensoleillement B et C) recouvertes par la couche supérieure D et E. Il
naturel. dévoile ainsi le lien ténu établi entre l’art (pariétal et
mobilier) et les occupations magdaléniennes (Capitan et
Le réseau est composé de deux galeries plus ou moins al., 1908). Au moment de la découverte de la grotte et
perpendiculaires. La galerie de gauche, d’une vingtaine lors des premières fouilles, on accède dans la galerie par
de mètres de développement, conduit à un niveau un étroit boyau dégagé au-dessus des remplissages
inférieur actif, parcouru par une rivière souterraine qui stériles qui scellent les niveaux magdaléniens. Les
s’écoule du nord-ouest vers le sud-est. La galerie de premiers mètres sont entièrement recouverts de
droite, qui abrite dans sa partie vestibulaire le secteur sédiments, et avec eux les trois premières dalles gravées
orné, s’étend sur une soixantaine de mètres. Dans sa (panneaux A, B et C actuels). La partie sommitale de la
partie profonde, elle donne accès, après un long laminoir, grande cascade qui constitue la partie droite du décor
à un petit abri surbaissé ouvert à flanc de falaise (cave à (panneaux D, E et F actuels) émerge partiellement, mais
Marion), qui constitue une seconde entrée. Le réseau les gravures sont sans doute masquées par des dépôts
comprend également plusieurs accès vers des niveaux argileux. Elles ne sont pas remarquées par É. Perrier du
actifs peu explorés jusqu’à présent et vers la surface du Carne qui fouille à droite de la cascade et par les visiteurs
plateau par une cheminée [fig. 2a et 2b]. occasionnels qui fréquentent la grotte dès le début du
XIXe siècle et qui laissent de nombreux graffitis et
À proximité immédiate, une vingtaine de mètres vers l’est gravent parfois leur patronyme à la pointe métallique.
et une dizaine de mètres sous le porche d’entrée actuel de
la grotte de la Mairie, nous avons localisé une autre Vers 1904, P. Bourrinet fouille à l’abri Mège, un petit
cavité, de développement modeste (une trentaine de abri voisin situé plus à l’Est et ouvert dans le même
mètres), qui offre un regard sur un niveau aquifère et qui rebord de versant. Il découvre, sous d’importants niveaux
conserve sur les sols et les parois des plages de tracés stériles, une épaisse couche du Magdalénien supérieur
digités et de prélèvements sur d’épais placages d’argile ancien (couche 2), synchrone de la première occupation
de décalcification. Cette grotte (grotte Francillon), de la Mairie. Les industries lithiques et osseuses sont
brièvement évoquée en 1903 par G. Chauvet pour ses similaires à celles identifiées dans le niveau inférieur
aménagements troglodytiques médiévaux, ne semble pas (couche A) de la grotte. Le lien entre les deux habitats
communiquer avec la grotte de la Mairie. semble établi (Capitan et al., 1906).

L’entrée originelle de la Mairie a été modifiée au début


du XXe siècle lors des fouilles et des travaux de NOUVELLES RECHERCHES À TEYJAT
construction de la porte d’entrée. Toutefois, la présence
de deux niveaux d’occupations du Magdalénien supérieur Depuis 2012 une révision scientifique exhaustive des
dans les dix premiers mètres de la galerie principale séries de la Mairie et de Teyjat et de l’art pariétal dans
permet de supposer que les habitats bénéficiaient d’un son contexte géologique, géomorphologique et
excellent ensoleillement. archéologique a été entreprise dans le cadre d’un Projet
Collectif de Recherches intitulé Peuplements et cultures à
Les principaux travaux de recherche dans les deux sites la fin du Tardiglaciaire dans le Nord du Périgord, entre
(la Mairie et Mège) ont été conduits de 1903 à 1929 par Dronne et Tardoire (Paillet dir., 2012 ; 2013 ; 2014). Il

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

situe ses problématiques au cœur des transitions paléo- de plancher stalagmitique issu de la grotte [fig. 4a],
environnementales et des transformations techno- conservé au Musée national de Préhistoire (Les Eyzies-
économiques, sociales et culturelles opérées entre les de-Tayac, Dordogne)1. Par ailleurs, H. Breuil avait relevé
techno-complexes magdaléniens et azilo-laboriens qui ont en octobre 1904 et septembre 1905 un cheval complet
marquées la deuxième partie du Tardiglaciaire (vers (aujourd’hui réduit à son arrière-main) et un petit renne
13.000-14.000 ans cal BP). Dans ce cadre (aujourd’hui disparu sous un dépôt de calcite opaque) sur
géochronologique limité nous cherchons à mesurer les le bloc ou panneau A [fig. 4b] : (long. 0m, 15) marchant
conséquences techno-culturelles de la transformation et à droite, à fanon poilu, bouche laissant passer la langue,
de la différenciation des milieux. En d’autres termes, bois non ramifiés (Capitan et al., 1912 : 513), et un autre
nous souhaitons savoir si les cloisonnements territoriaux animal que nous n’avons pas retrouvé malgré nos
supposés de la fin du Tardiglaciaire ont entraîné une prospections : gravé sur un petit glacis stalagmitique en
parcellisation culturelle avec, sur le temps long, des face l’entrée de la grotte ; c’est un petit renne (long. 0m,
ruptures, des continuités ou des évolutions et des 125), fort mal venu [fig. 4c], dont le principal intérêt est
transformations technologiques et palethnologiques. Par de porter de menus vestiges de couleur ; il était enfoui
le biais d’une analyse générale des comportements dans le niveau supérieur (Capitan et al., 1912 : 514).
sociaux, tels qu’ils se reflètent dans les activités
techniques, de subsistance ou symboliques, nous pensons Le corpus des représentations abstraites ou géométriques
accéder à une meilleure compréhension des occupations (signes) est d’une extrême indigence.
humaines dans leur territoire et dans leur dynamique
sociale et spatiale. On peut également préciser la nature Les séries d’objets d’art mobilier et de parure provenant
des liens et des échanges possiblement établis à plus des fouilles P. Bourrinet et D. Peyrony à l’abri Mège et
longue distance, vers le Sud, avec les foyers dans la grotte de la Mairie sont conservées pour une
contemporains des vallées de l’Isle (Chancelade- partie essentielle au Musée d’Archéologie Nationale
Raymonden) et de la Dordogne-Vézère (La Madeleine, (Saint-Germain-en-Laye). D’autres séries ont été
Laugerie-Basse, Limeuil, etc.) et vers le Nord-Ouest signalées au Muséum national d’Histoire naturelle (Paris)
charentais tout proche (vallée de la Tardoire – (fouilles et collection A. Darpeix) et au Field Museum of
Montgaudier, Le Placard, etc.). Certains sites étudiés ont Natural History (Chicago) (de Beaune et al., 1988) et
livré des occupations qui montrent une continuité entre le seront étudiées ultérieurement. Le corpus d’art mobilier
Magdalénien supérieur et final et le complexe Azilo- actuellement recensé (et publié) est modeste. Il compte au
Laborien (abri de Pont-d’Ambon et grotte de Rochereil). total 48 pièces (y compris les objets disparus) qui
Ce n’est pas le cas à Teyjat où aucune occupation correspondent à des supports très variés : supports
postérieure au Magdalénien n’a été identifiée. Nous lithiques (calcaire, calcite, lignite, fossile de spongiaire),
raisonnons ici dans le temps contracté des ultimes supports osseux (côtes, os d’oiseau, scapula, bois de cerf,
chasseurs-collecteurs du Paléolithique. bois de renne, etc.) et même coquillages (parure en
pecten). Les types d’objets transformés ou d’objets
techniques (armes et outils) ornés sont également
L’ART GRAVÉ DE LA MAIRIE ET DE L’ABRI MÈGE diversifiés. Il s’agit de baguettes demi-rondes, de sagaies,
d’outils intermédiaires, de bâtons percés, de pointes
Le corpus iconographique se compose de représentations barbelées – harpons à un et deux rangs de barbelures, de
pariétales et mobilières à la Mairie et mobilières foënes et de lissoirs. On signalera également trois
uniquement dans l’abri Mège. L’art pariétal de la grotte pendeloques. Quant au contenu iconographique, il
de la Mairie est exclusivement composé de gravures fines possède des caractéristiques remarquables du point de
exécutées sur les fragments de plancher et du dôme vue des thématiques, des traitements formels et des
stalagmitiques démantelés dont nous avons parlé plus techniques d’expression. On rencontre aussi bien des
haut, datés pour leur dernière phase d’édification du stade animaux rares du bestiaire paléolithique comme les
isotopique 7c (environ 207.000 ans). La brèche karstique phoques et les cygnes, que des représentations
encaissante, de piètre qualité est riche en rosettes de composites mi-humaines mi-animales, des figures
calcite et mal cimentée. Elle n’a pas été utilisée par les féminines schématiques ou supposées telles, des animaux
artistes magdaléniens qui lui ont préférée les surfaces vus de face et des motifs géométriques élaborés.
plus ou moins lisses de la calcite. Si l’on considère, Gravures, légers bas-reliefs et rondes-bosses constituent
suivant en cela l’avis de Henri Breuil, que les auteurs des la panoplie des techniques d’expression. Ces caractères
gravures pariétales étaient les premiers occupants originaux ont été signalés et décrits par Louis Capitan,
magdaléniens de la cavité (Magdalénien supérieur Henri Breuil, Pierre Bourrinet et Denis Peyrony dans
ancien), une grande partie du champ orné était accessible leurs deux principales publications (1906 ; 1908).
de plain-pied. Seule la partie haute de la cascade, à droite
(panneaux D, E et haut du F,) pouvait être plus difficile Dans les deux couches d’occupations de la grotte de la
d’accès sans pour autant être vraiment hors de portée. Mairie (fouilles Bourrinet-Peyrony) ce sont 302 objets

Le dispositif pariétal conservé, segmenté en 6 panneaux 1 Ce bloc découvert dans les déblais des fouilles anciennes
(A à F), compte 53 unités graphiques figuratives [fig. 3], remonte avec une partie du panneau A.
auxquelles il convient d’ajouter, en l’état actuel de notre 2 Auxquels il faut ajouter les trois objets découverts par E.
étude, deux rennes récemment identifiés sur un fragment Perrier du Carne, dont deux ont disparu durant la seconde

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

ornés (14 dans la couche inférieure et 16 dans la couche grand rapace diurne ou encore neuf animaux et un motif
supérieure) qui ont été découverts et 10 dans l’unique géométrique sur le seul bâton percé de l’abri Mège,
couche de l’abri Mège. évoqué ci-dessus. La fréquence relative de certains
animaux, comme les phoques, les cygnes et les figures
composites habituellement rares ou exceptionnels dans
ICONOGRAPHIE PARIÉTALE ET ICONOGRAPHIE l’iconographie paléolithique doit être soulignée. Les
MOBILIÈRE autres représentations font partie du cortège animalier
classique comme les chevaux (11), les bisons (7), les
Les représentations figuratives cerfs (5 cerfs et une biche), les animaux indéterminés (8),
le renne (1 renne gravé sur un fragment de stalactite qui
L’iconographie pariétale et mobilière de Teyjat, dans le s’ajoute aux 18 individus gravés sur l’ulna de grand
temps étriqué du Magdalénien supérieur, oscille rapace), le bouquetin (1) et le poisson (1 probable
largement entre représentations réalistes, figurations salmonidé). Quant à la représentation humaine, elle reste
schématiques, images fantastiques ou composites et art très discrète et même sujette à discussion (4 entités
géométrique, abstrait, voire ornemental. En cela, elle ne graphiques possibles). Il s’agit de figures segmentaires
se distingue guère de l’iconographie connue dans la (visage, vulve, profil schématique et phallus probables)
plupart des sites d’art contemporains. [fig. 5d]. Au total l’art mobilier de Teyjat compte 70
entités graphiques figuratives.
En majorité, elle est composée d’animaux dont certains
sont de nature zoologique indéterminée [fig. 5a]. D’autres Les motifs géométriques, les signes
sont intégrés à des assemblages graphiques composites,
comme les trois « diablotins » (Capitan et al, 1909 : 68, L’acception sémiologique du terme « signe » recouvre
fig. 11)3. Ces créatures mi-homme mi-chamois ont été des motifs présentant une typologie formelle, stable et
gravées sur le fût du bâton doublement percé, en bois de récurrente. Parmi les innombrables fouillis de stries et de
cerf, de l’abri Mège (Tymula, 1992) [fig. 5b]. traits rectilignes ou curvilignes, isolés ou assemblés en
gerbes ou en paquets serrés qui couvrent la plupart des
L’iconographie pariétale figurative de la Mairie est supports pariétaux de la Mairie, peu de motifs
dominée par les rennes. Ils sont au nombre de 18 véritablement organisés surgissent. On signalera
auxquels il faut ajouter 2 individus identifiés par H. simplement en tant que possibles « signes » quelques
Breuil mais non retrouvés. Les chevaux forment un tracés rectilignes simples, en forme de bâtonnets allongés,
second groupe (10). Les autres thèmes présents sont les associés au premier aurochs gravé du panneau F [fig. 6a].
cerfs ou la biche (8), les animaux indéterminés (8), les Cela est peu et ressemble bien à une exception dans
aurochs (6) et les bisons (3). Les ours ferment la marche l’univers des grottes ornées magdaléniennes où les signes
avec deux individus, mais leur situation est conforme à sont légion, surtout au Magdalénien moyen ou au
leur place quantitative dans l’art de la fin du Paléolithique Magdalénien supérieur, comme l’atteste le dispositif
supérieur [fig. 5c]. On connaît en effet cinq ours pariétal de la grotte de Fronsac, située non loin de la
pariétaux dans le Magdalénien supérieur, sur 48 pariétaux Mairie.
recensés pour tout le Magdalénien (76 pariétaux pour
l’ensemble du Paléolithique supérieur). L’animal est un En revanche, les signes sont présents dans l’art mobilier
peu plus fréquent dans l’art mobilier (96 pour tout le de la Mairie et de l’abri Mège. Un premier décompte
Paléolithique supérieur) (Man-Estier, 2011). encore approximatif montre même l’importance des
motifs géométriques (une quarantaine). Il s’agit de
Le corpus mobilier (48 objets) rassemble environ 110 séquences de tracés linéaires simples, rectilignes ou
entités graphiques figuratives et non figuratives, dont 18 curvilignes disposées dans l’axe du support, de bâtonnets
rennes gravés en file très schématique 4 sur une ulna de ou de tirets disposés transversalement et de motifs plus
élaborés en rythme et organisation spatiale (motifs
curvilignes à remplissages linéaires, etc.) détaillés plus
guerre mondiale (Saint-Périer, 1948), les deux objets découverts loin. Certaines représentations originales semblent
lors des dernières fouilles de P. Bourrinet (1929) et conservés à pouvoir être considérées à mi-chemin entre l’abstrait (ou
Chicago (lampe et stalactite gravées), ainsi que 3 objets de
le géométrique) et le figuratif [fig. 6b], donnant ainsi
parure.
3 Salomon Reinach y voyait des génies fécondateurs, les l’impression de conserver un peu de leur potentielle
ratapas (1912). origine figurative.
4 Le radius d’aigle a été découvert très haut dans la couche

supérieure la plus élevée, presque en contact avec la petite


concrétion gravée déjà notée en face de la porte actuelle. C’est RÉFLEXIONS SUR LE CORPUS FIGURATIF
un très remarquable objet, long de 0m.20 dont un bout est
soigneusement usé et sectionné. Les gravures qu’il porte sont Le corpus figuratif actuellement recensé des sites de la
assez effacées par l’usage, du moins au bout inférieur (à Mairie et de l’abri Mège s’élève donc à 127 unités
droite) ; il faut une réelle attention pour y apercevoir trois
graphiques réparties entre art pariétal (57) et art mobilier
minuscules petits rennes aux bois extrêmement exagérés ; un
tout pareil existe à gauche de l’objet, et entre les deux, 14 bois
de rennes sans corps ont été dessinés, ainsi qu’une série l’interprétation décorative d’un élément figuré, le bois de renne.
continue d’incisions juxtaposées. On saisit là merveilleusement (Capitan et al., 1908 : 213-214, fig.97).

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

(70). C’est relativement peu si on le compare à d’autres stylisés et la nature de l’animal ne surgit alors que par un
grottes ornées ou d’autres séries mobilières détail de contour, un caractère anatomique spécifique ou
magdaléniennes. Mais ici c’est la diversité des thèmes la courbe de la ramure [fig. 8b]. La plupart des animaux
figuratifs représentés qui frappe en premier lieu, mais ont en commun un œil ovale, large et doublement cerclé,
aussi l’originalité de certains d’entre eux, présents en prolongé vers l’avant par la caroncule lacrymale ou le
nombre alors qu’ils sont rares, voire exceptionnels larmier [fig. 8c].
ailleurs.
Le rendu du pelage est exceptionnel. À deux reprises il
Chevaux et cervidés : deux thématiques dominantes est traduit de manière réaliste par une multitude de
courtes hachures. Une fois, on le retrouve de façon plus
En raisonnant sur la globalité du corpus, ce sont les conventionnelle, exprimé par une séquence de tirets
rennes (39) et les chevaux (21) qui dominent le bestiaire. alignés sur le thorax [fig. 8d], là où chez l’animal vivant,
Du cheval il n’y aurait pas grand-chose à dire, tant le notamment à la fin de l’été, on voit parfois des marques
thème est commun dans l’iconographie paléolithique, si de pelage sous forme de hachures ou de taches plus
ce n’était le caractère résolument exceptionnel des claires alignées parallèlement en bord d’échine.
supports mobiliers utilisés (jais, os d’oiseau, sacrum, bois
de cerf) [fig. 7a] et de certains traitements formels ou Les rennes sont présents et répartis de manière homogène
techniques (chevaux macrocéphales, ronde-bosse, dans l’ensemble du dispositif pariétal et entretiennent des
palimpsestes de gravures sur scapula). Dans le dispositif relations thématiques directes (par juxtaposition ou
pariétal de la Mairie les chevaux sont moins nombreux superposition) avec tous les autres animaux du corpus.
que les rennes mais ils se répartissent de manière très Sur deux panneaux (B et C) ils s’associent directement
homogène sur l’ensemble des panneaux. La plupart sont aux cerfs et ne sont pas en situation d’opposition comme
complets et jouissent d’un traitement réaliste abouti on a pu le penser parfois ou en situation de non-
(position, animation, pelage, extrémités, etc.). Leur taille contemporanéité.
varie de 11 cm pour le plus petit à 42,6 cm pour le plus
grand [fig. 7b]. Les rennes recensés dans l’art mobilier de la Mairie
appellent également quelques commentaires. Hormis le
Le renne (et le cheval dans une moindre mesure) petit individu galopant finement gravé sur un fragment de
constituent également les principales espèces de grands stalactite [fig. 9a] récolté dans la couche supérieure de la
mammifères consommées pour toute la séquence Mairie, et mal interprété par Henri Breuil qui voyait une
magdalénienne de la Mairie et de l’abri Mège. La tête de bison très fruste (Capitan et al., 1908 : 216), les
fréquence du renne dans les cortèges fauniques est autres rennes (18 probables) sont tous réunis sur une
presque naturelle, même si les effectifs se réduisent unique pièce, un os d’oiseau déterminé comme une ulna
considérablement à l’extrême fin du Magdalénien (début de grand rapace diurne (aigle ?)5. Parfois qualifiée de
de l’Alleröd), vers 14000 ans Cal BP. Mais sa forte harde ou de troupeau, il s’agit plus simplement d’une file
présence dans l’iconographie n’est pas habituelle, d’individus coiffés de bois disproportionnés [fig. 9b].
notamment dans l’art pariétal où il ne représente Seuls les trois premiers animaux et le dernier de la file
qu’environ 4 % de la thématique animalière, toutes sont figurés au complet. Les autres individus sont
périodes confondues. En revanche, il est un acteur suggérés par leurs ramures alignées, schématisées et
symbolique beaucoup plus important dans l’iconographie dupliquées en série ornementale rythmée par la courbure
mobilière, le deuxième après le cheval (environ 16 % des des perches et les digitations des empaumures. Des corps,
thèmes figuratifs). Nous avons recensé 162 dont les contours ne sont pas figurés, ne subsistent que
représentations de rennes dans l’art pariétal paléolithique des alignements d’incisions obliques et parallèles en lieu
dont plus de la moitié en Périgord (88), une trentaine dans et place du pelage clairement indiqué sur les 4 animaux
les Pyrénées, 17 en Quercy, 14 dans la grotte Chauvet et complets, y compris au niveau du fanon. Le support
13 en Espagne cantabrique. Après les grottes de Gabillou osseux sélectionné et le traitement formel de la frise
(Dordogne, 28 rennes) et des Trois-Frères (Ariège, 21 donnent à ces rennes un caractère singulier, pour ne pas
rennes), la Mairie est la grotte ornée la plus riche en dire très original. Il fait écho à la file de dix oreilles de
représentation de rennes (18 + les deux animaux disparus cervidés gravées sur le tube en os de grue (appeau
vus par Breuil). Relativement à la modestie du corpus probable) découvert dans les couches du Magdalénien « à
figuratif général, la place de cet animal à la Mairie est navettes » de l’abri de la Garenne (Indre) (Allain et al.,
réellement capitale. Il constitue ici un protagoniste 1985 : 96-97).
symbolique majeur mais également très original dans son
traitement formel. Huit individus sont complets, dont un La famille des cervidés est également bien représentée
faon probable [fig. 8a]. Leur taille varie de manière assez par les cerfs (5 mobiliers et 7 pariétaux) et les biches (1
significative (de 4,5 cm pour le plus petit à 35,5 cm pour
le plus grand). Les autres spécimens sont réduits à la tête,
l’encolure et/ou l’avant-train. Le réalisme du trait est
5 L’objet est conservé au Musée d’Archéologie Nationale.
Après avoir été accidentellement brisé il a fait l’objet d’une très
extrêmement variable et tous les animaux ne sont pas
importante restauration qui rend difficile la lecture des motifs et
exécutés avec force détails, ce qui relativise d’une leur relevé. Un autre os d’oiseau gravé de trois chevaux
certaine manière le caractère « naturaliste » attribué à macrocéphales (aujourd’hui disparu) provient des fouilles de
l’art gravé de la Mairie. Certains rennes sont même assez Perrier du Carne à la Mairie.

92
Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

mobilier et 1 pariétal), encore que l’identification qui semblent s’affranchir de relations scéniques sont trois
générique précise ne soit pas toujours évidente. Certaines aurochs (inédits). Le sujet acéphale du sommet de la
représentations possèdent en effet des caractères cascade est bien à cet égard un aurochs, identifié par son
composites (par exemple port de tête de cerf associé à des profil dorso-lombaire et la saillie de la hanche spécifique
bois de renne). Les cerfs « vrais » forment clairement une du genre Bos. Il affiche des détails anatomiques originaux
thématique complémentaire des rennes. Dans le dispositif comme cette ligne de pelage sur la fesse et la cuisse et
pariétal de la Mairie, ils sont localisés sur deux panneaux des pattes avant qui ressemblent davantage à celles des
(B et C). Ces ensembles sont dominés par deux grands bisons du panneau D voisin [fig. 11c].
cerfs très similaires (respectivement de 25 cm et 43,8 cm
de long), tournés vers la gauche, presque complets et Sur les 7 bisons mobiliers, 4 sont plus ou moins complets
plutôt statiques, (les pattes avant sont jointives et en et les trois autres réduits à leur arrière-train du fait de la
extension). L’un voisine avec une biche incomplète [fig. fracture du support (scapula) ou à un protomé (bison ?
10a], un bison et trois rennes (panneau B), l’autre [fig. gravé sur côte). Les individus complets sont les 3
10b] domine un cheval, quatre cerfs et quatre rennes animaux gravés sur côte7 [fig. 12] provenant des fouilles
(panneau D). Les liaisons thématiques engagées sur ces Perrier du Carne (malheureusement disparus) et un sujet
deux panneaux montrent les complémentarités très finement incisé sur une dalle de calcite fragmentée de
symboliques des deux genres de cervidés. même nature que les supports pariétaux8. L’origine
pariétale du support ne fait aucun doute. En revanche
Hormis un possible cerf qu’il faudra réétudier et relever nous pensons que ce bison a été exécuté sur un fragment
plus précisément, gravé sur bloc calcaire (couche déjà mobile du plancher. Il s’agit donc selon nous d’une
supérieure de la Mairie), les autres individus mobiliers, œuvre mobilière par définition et par destination, ce
provenant de la couche unique de l’abri Mège, qu’indique l’excellent cadrage de l’animal, dont le rachis
correspondent à quatre têtes vues de face gravées les unes dorso-lombaire épouse le contour naturel de la plaque, et
au-dessus des autres sur la face supérieure d’une longue ce que laisse également supposer la suite de la description
baguette demi-ronde. L’abréviation graphique, publiée en 1908 : La fracture est ancienne, usée, patinée
l’orientation des points de vue et le traitement en registre (p. 173).
vertical au-dessus d’un double alignement d’encoches
rappellent une baguette ornée de la couche inférieure de Les bisons complets de Teyjat (4 mobiliers et 3 pariétaux)
la Mairie portant deux têtes vues de faces, dont une ont en commun des caractères formels qu’il convient de
pourrait être un bouquetin. L’originalité de ces décors sur souligner. Le gabarit général des animaux est celui
baguettes demi-rondes qui associent art géométrique et d’individus puissants et bien campés, à forte disharmonie
figuratif est prégnante. antéro-postérieure. Les lignes de rachis (cervicales et
dorso-lombaires) dessinent une double convexité, celle du
Les aurochs et les bisons de Teyjat : des thèmes chignon élevé et couché en arrière, et qui se confond avec
secondaires ? la saillie du garrot, et celle de la bosse dorsale proprement
dite portée loin vers les reins et la croupe. Le fort
Les bovinés (10 bisons dans le corpus mobilier et pariétal décrochement de la ligne dorso-lombaire, en marche
de la Mairie et 6 aurochs exclusivement pariétaux) d’escalier, et la double délinéation du dos dans sa partie
constituent, avec les animaux indéterminés (16)6, le supérieure et inférieure contribuent à la massivité et la
troisième thème par ordre de fréquence. Les bovinés puissance des silhouettes. Le surlignage du bord antérieur
pariétaux (6 aurochs et 3 bisons) de la Mairie occupent de l’épaule ainsi que de la cage thoracique sont aussi des
une place particulière dans le dispositif. Les aurochs sont traits communs à la plupart des individus. Le traitement
exclusivement localisés sur la cascade stalagmitique graphique du pelage, en particulier de la barbe, par des
(panneau F) alors que les bisons occupent deux panneaux séquences de fines hachures, l’accentuation de la pointe
(B et D), dont un constitue le prolongement naturel de la de l’épaule et le dessin de l’œil en double ou triple ovales
cascade. Hormis l’individu isolé du panneau B [fig. 11a], ou dessins piriformes emboités, qui soulignent
les bovinés montrent une répartition spatiale l’ouverture palpébrale entre les apophyses orbitaires
préférentielle dans la moitié droite du dispositif pariétal.
Par ailleurs, ils sont systématiquement traités de manière 7 Le degré de complétude peut être diversement apprécié. Nous
réaliste et selon un excellent degré de complétude. Les
considérons que les trois bisons gravés sur cette côte, auxquels
principaux individus sont également mis en scène ou plus il manque tout ou partie des membres antérieurs et postérieurs,
précisément en situation éthologique. Certains se suivent sont complets car les détails formels sur lesquels nous
et semblent se flairer [fig. 11b]. A l’inverse des autres raisonnons sont localisés sur les corps et les têtes.
espèces (hormis peut-être les rennes), l’espace des 8 Aussi la découverte de deux fragments importants de gravures

bovinés est un espace plus narratif que strictement sur plaque stalagmitique provenant de la cascade est-elle une
symbolique ou abstrait. Les seuls individus incomplets et bonne fortune ; la figure 65 représente les deux portions
raccordées : le petit fragment comprenant la queue et les reins
du bison a été recueilli en pleine assise archéologique de la
6 Le nombre d’animaux de statut zoologique indéterminé couche inférieure ; le grand morceau a été recueilli dans le
dépend de plusieurs facteurs dont le propre état de conservation niveau stérile qui forme la partie supérieure de la couche
du motif, l’intention de l’artiste (critère difficile à mesurer) et le inférieure, et par conséquent notablement en dessous du dallage
degré d’exigence que l’on met à l’interprétation des qui indique la base des couches supérieures (Capitan et al.,
représentations figuratives. 1908 : 172-173).

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

frontales et zygomatiques prolongée par la caroncule Si le réalisme des formes n’est pas toujours irréprochable,
lacrymale, participent du style figuratif propre à la Mairie celui des attitudes est plus souvent au rendez-vous. Il
[fig. 11b et 12]. donne vie aux animaux. Hormis quelques chevaux, cerfs
et aurochs figés, aux pattes verticales, raides et serrées, la
plupart des figures pariétales et mobilières sont animées
LE RÉALISME DES REPRÉSENTATIONS FIGURATIVES DE de mouvements divers, discrets ou plus ostensibles, dont
TEYJAT À L’ÉPREUVE DE L’ANALYSE STYLISTIQUE certains sont rendus explicites par l’éthologie (scène de
pré-accouplement supposée des aurochs, typologie des
De très nombreux auteurs ont écrit sur le réalisme des allures, etc.). Cerfs, biches et rennes par exemple sont
œuvres pariétales de la Mairie, soulignant l’extrême véritablement mis en scène. Le lien entre la biche et le
qualité et la parfaite maîtrise du trait de gravure, le cerf du panneau B [fig. 10a] et entre les trois rennes
respect des formes, des attitudes et la richesse tout (deux mâles et une femelle couchée) et le faon du
comme l’exactitude des détails anatomiques des animaux panneau C ne sont pas des liens abstraits. Ils renvoient à
figurés, et plus particulièrement des rennes et des la vie quotidienne des cervidés et à leurs comportements
aurochs. On a qualifié ces œuvres de naturalistes et, pour sociaux. Les animaux de la Mairie ne flottent pas tous
les besoins d’une chronologie stylistique en construction, dans un espace abstrait, virtuel ou totalement symbolique.
on les a situées au sommet de la trajectoire supposée Ils sont ancrés parfois dans leur propre réalité
évolutive et linéaire de l’expression artistique comportementale et zoologique, ils reposent sur la pierre,
préhistorique9. sur ses propres reliefs ou sur des lignes de sol
volontairement tracées qui leur donnent une forte
Mais hors ce sentiment que l’on peut éprouver lors d’une matérialité.
rapide visite de la grotte, l’art gravé figuratif de la Mairie
ne constitue pas une copie fidèle de la nature. Même les D’autres attitudes relèvent des comportements
célèbres aurochs mis en scène sur le registre vertical du individuels. Le mouvement de godille caractéristique du
panneau F, les bisons plus discrets du panneau D ou les phoque [fig. 13] et les ondulations des longs cous courbés
rennes logés sur la gauche du panneau C témoignent des cygnes sont rendus avec beaucoup de réalisme à
d’une part plus ou moins large de liberté expressive. Si l’abri Mège. Les mouvements de la tête et de l’encolure
les animaux sont respectés dans leurs formes générales, sont fréquents. Ils peuvent être diversement interprétés.
ils ne sont pas toujours riches de détails anatomiques ou L’animal donne l’illusion de bramer (cerfs), de brouter
d’indication de pelage. Les yeux par exemple ne sont (cheval et renne) ou de flairer (aurochs ou bison). Les
figurés qu’à 29 reprises (20 fois sur les 70 figures mouvements des membres sont encore plus
animales mobilières) et les phanères ne sont traduits spectaculaires. Ils sont représentés en extension vers
partiellement que sur 6 individus (23 dans les séries l’avant et/ou l’arrière comme pour figurer un appui
mobilières). On ne compte également qu’une dizaine de dynamique, une phase de suspension, un cabré, un saut
figures animales totalement complètes ou détaillées (cheval du bâton percé de l’abri Mège) [fig. 14] ou un
jusqu’aux extrémités des membres dans l’art pariétal et galop (cerfs, bisons, rennes, aurochs, chevaux). Ils sont
13 dans le mobilier. Tous supports confondus, nous ne également beaucoup plus coordonnés avec des appuis et
connaissons que quatre aurochs, quatre bisons, cinq des flexions différentes sur un ou plusieurs membres. Ils
chevaux, six rennes et deux cerfs jusqu’au bout des traduisent les allures du pas (chevaux, rennes, cerfs,
sabots, un phoque et un salmonidé jusqu’au bout des bison, ours, aurochs) et peut-être du trot (cheval).
nageoires et les deux ours jusqu’au bout des pieds ou des
mains. C’est peu pour un art dont le réalisme est souvent La lecture des appuis pose souvent des difficultés du fait
qualifié de « photographique », mais suffisant pour nous de la non-représentation (quasi-généralisée) de ligne de
le faire admirer dans son élégance, parfois son sol dans l’art pariétal (Azéma, 2010 : 30). Ce n’est pas
excentricité, dans sa part de classicisme et dans sa vraiment le cas à la Mairie où les artistes ont représenté
modernité. Si l’art pariétal de la Mairie est bien du scrupuleusement les lignes de sol sous 16 animaux
Magdalénien supérieur, comme le contexte (chevaux, rennes, bisons, aurochs) quand ils n’ont pas
archéostratigraphique immédiat semble l’indiquer, il appuyé leurs bêtes sur des reliefs naturels du support
conserve encore beaucoup du style et des conventions (renne, aurochs, cheval). Deux rennes gravés sur l’os
propres au Magdalénien moyen. Il s’en différencie par d’oiseau de la Mairie reposent également sur une ligne de
l’absence de signes abstraits ou géométriques. sol. La représentation du sol mérite d’être soulignée par
son caractère très exceptionnel et sa récurrence sur la
calcite de la Mairie [fig. 15].
9 Le style des figures m’a servi de départ pour définir le style IV
récent. On y constate la disparition du remplissage Enfin, autre fait remarquable dans l’art pariétal
conventionnel de modelé, les formes acquièrent une flexibilité paléolithique, un renne est représenté couché, les
remarquable, les proportions atteignent la vérité membres repliés sous le corps. C’est une attitude peu
photographique. La notation des aplombs et du mouvement est commune, représentée ici avec de nombreux détails.
extrêmement sensible. Tous ces caractères se rencontrent dans
L’association avec un faon de renne probable donne à
les autres œuvres datées du Magdalénien, d’Allemagne en
Espagne, mais aucun ensemble ne les exprime avec la même penser qu’il s’agit d’une scène familiale (femelle et son
homogénéité (Leroi-Gourhan, 1971 : 282). petit) [fig. 8a]. À trois reprises dans le dispositif pariétal
de la Mairie et à deux reprises sur des objets du même

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

site, les mouvements sont décomposés en séquences spatiale : Cerf - Aurochs. Les Aurochs sont
graphiques et matérialisés par multiplication des contours exclusivement disposés à droite du dispositif (panneau F)
de tête (double contour pour le grand cerf du panneau C et les cerfs à gauche (panneaux B et C). La segmentation
et quadruple contour du profil pour le grand bison du naturelle du support, avec la lacune de l’édifice
panneau D), doublement de la queue (bison sur plaque de stalagmitique entre les ensembles A à C et D à F, nous
calcite) ou multiplication des membres (cheval du prive cependant d’une partie importante du support,
panneau A et cheval sur scapula) [fig. 16a]. Ces potentiellement ornée mais disparue à ce jour et non
exemples de décomposition graphique du mouvement retrouvée à la fouille. Cette opposition thématique est
sont peu fréquents dans l’art paléolithique. On pourrait soulignée ou plutôt encadrée par un troisième thème :
leur rapprocher la composition très rythmée et itérative de l’Ours. Isolé des cerfs sur le panneau A, mais associé à
l’ulna de grand rapace où les rennes disposés en file des chevaux, l’ours engage le dispositif. Isolé des aurochs
presque ornementale sont donnés à voir sur plusieurs sur le panneau D, mais associé à un renne, un cheval et
plans dans leur propre déplacement saisonnier, celui des un bison, il conclut en quelque sorte le dispositif.
migrations10 [fig. 9b].
Une deuxième opposition thématique structure le
Quant à l’utilisation des reliefs et accidents du support, dispositif, mais pourrait bien être perçue comme une
dont on connaît la fréquence dans l’art paléolithique, complémentarité symbolique : Bison - Aurochs. Les deux
notamment pariétal, elle se retrouve également à la genres de bovinés s’excluent spatialement (panneaux F et
Mairie. Les micro-reliefs et les ondulations naturelles des D). Ils ne forment aucune association thématique et sont
planchers stalagmitiques ont souvent été utilisés pour également orientés différemment. A l’inverse des
donner du relief à une patte (cerf, cheval), à un corps aurochs, les trois bisons regardent vers le fond de la
(aurochs) ou pour dessiner une tête (renne) [fig. 16b]. cavité et sont donc disposés en profil droit.

Par tous ces traits originaux (variété des formes Le dispositif pariétal est également construit autour d’un
d’expression, animation, décomposition du mouvement, couple animal dominant : le Renne et le Cheval. Les deux
matérialisation des lignes de sol, utilisation des reliefs thèmes, associés sur chacun des panneaux, sont dispersés
naturels, etc.), le réalisme de l’art animalier de la Mairie de manière homogène sur la totalité du dispositif
nous surprend. iconographique. De fait ils forment également des
liaisons avec tous les autres thèmes. Les rennes et les
Les techniques d’expression utilisées n’y sont pas chevaux constituent le lien qui unifie la construction
étrangères. La gravure fine à profil en V, plus rarement symbolique de la Mairie. Ils sont également disposés et
en U, parfois la technique du relief exhaussé par orientés dans tous les sens, sans cohérence par rapport au
affouillement du trait ou rectification de la lèvre cheminement naturel le long de la galerie. Ainsi, au
extérieure, mais aussi le raclage et le striage, les tracés moins 7 rennes et un cheval sont orientés latéralement
uniques et multiples se combinent dans la plupart des vers l’une ou l’autre des parois de la galerie. Ces
panneaux et donnent une réelle dimension esthétique aux orientations perpendiculaires ou obliques au
œuvres, rehaussée par les teintes blondes ou brunes et les cheminement sont presque exclusivement localisées sur
textures plus ou moins lisses ou rugueuses du support de les panneaux A, D et E, c’est-à-dire dans la partie
calcite. La matière de l’art de la Mairie est sommitale et subhorizontale du dispositif pariétal. C’est
exceptionnelle. Finalement, le réalisme de la Mairie se dans ces parties hautes que le champ graphique peut être
situe hors du champ classique de l’art pariétal potentiellement orienté dans toutes les directions, du fait
magdalénien et se rapproche d’une certaine manière de même de l’horizontalité des supports et de la variabilité
l’art mobilier. des positions prises par le ou les artistes. La verticalité ou
la légère obliquité des panneaux B, C et F impose la
linéarité du champ graphique qui se développe en toute
CONSTRUCTIONS SYMBOLIQUES DU BESTIAIRE logique dans l’axe du cheminement. C’est ce que nous
PARIÉTAL DE LA MAIRIE observons clairement sur le dispositif pariétal contrasté de
la Mairie [fig. 17].
À partir des observations sur la position et l’orientation
des figures animales de la Mairie, à partir d’une analyse Libertés et variabilité de l’expression réaliste :
structurale en quelque sorte, nous avons dégagé quelques l’exemple des cervidés
éléments relatifs à l’organisation du dispositif pariétal. Il
repose sur une première opposition thématique de nature Les cervidés (rennes, cerfs, biches et cervidés
indéterminés) constituent plus de 40 % du corpus
figuratif (53 entités graphiques). Comme nous l’avons
10 … les troupeaux de rennes traversaient alors le paysage de souligné plus haut, ils offrent d’intéressantes
nos magdaléniens. Ceux-ci ont représenté, sur un radius caractéristiques formelles. C’est le cas notamment des
d’Aigle de Teyjat, la forêt mouvante des grandes ramures trois animaux du panneau B de la grotte de la Mairie,
d’automne, comme barrant l’horizon. Si cette scène se situait au
interprétés par Henri Breuil comme des cerfs. Ces trois
printemps, les bois seraient fragmentaires ou inexistants (il est
cependant très possible que l’artiste ait vu aussi passer la harde représentations, d’une dizaine de centimètres de long
au printemps, les trajets aller et retour étant souvent les mêmes) chacune, ont été soigneusement positionnées sur leur
(Soubeyran, 1993 : 243). support par l’artiste, qui a mis à profit les micro-reliefs

95
Patrick Paillet and Elena Man-Estier

naturels en vaguelettes du plancher stalagmitique [fig. ainsi décompté dans le corpus des objets 4 phoques11
18]. Les trois animaux sont orientés vers la gauche. Ils gravés sur trois baguettes demi-rondes du Magdalénien
sont placés en file serrée, tête contre croupe. Le premier supérieur ancien (deux provenant de l’abri Mège et une
individu est acéphale. Le second est complet et le de la couche inférieure de la Mairie) et 3 cygnes gravés
troisième est coiffé d’une importante ramure. Sa tête et ainsi que 3 figures composites (les « diablotins ») sur le
son poitrail occupent un relief naturel. Peut-on interpréter bâton percé en bois de cerf de l’abri Mège. On peut
en termes naturalistes, c’est-à-dire éthologiques, cette file également y ajouter les deux ours bruns pariétaux de la
d’animaux ? L’association des trois individus renvoie-t- Mairie.
elle au scénario de la vie animale (scène de rut, brame,
intimidation des mâles, etc.) ou doit-on plutôt y voir une Les phoques
construction graphique de nature exclusivement
symbolique ? En d’autres termes, toutes les bêtes Les mammifères marins ne sont pas légion dans l’art
appartiennent-elles à la même espèce et sont-elles liées paléolithique. On connaît quelques Cétacés, peu
par narration ? Ces questionnements ne sont pas dénués nombreux, et des Pinnipèdes de la famille des Phocidés
d’intérêt car ils permettent de mesurer notre propre (Sonneville-Bordes & Laurent, 1983). Dans ce dernier
capacité à lire les images préhistoriques, à deviner les cas, la détermination zoologique est rendue délicate du
intentions de l’artiste et in fine à interpréter ou fait même de la morphologie et de l’allure générale de
comprendre ces figures et à leur donner une identité. Par l’animal (fusiforme) qui peut apparaître assez peu
là même ils apportent au réalisme supposé des œuvres diagnostique si elle n’est pas traitée de manière très
d’art de Teyjat une dimension plus sensible et subtile. Le réaliste ou à un niveau poussé de précision et de détails
sujet central, le plus complet, offre des caractères anatomiques. Les représentations pariétales de phoques
morphologiques composites. Si la ramure est bien celle les plus convaincantes sont gravées sur les parois de la
d’un cerf, avec son andouiller basilaire, le surandouiller grotte Cosquer (6 à 8 individus) et dessinées en rouge sur
et l’andouiller central projetés vers l’avant, l’encolure des colonnettes stalagmitiques de la grotte de La Nerja en
épaisse et horizontale fait penser au renne. Mais la Andalousie (6 individus), encore que dans ce dernier cas
morphologie de la ramure, associée au dessin de la tête la détermination ne soit pas totalement assurée. Les
constituent selon nous un critère décisif d’identification phoques de la Peña de Candamo en Asturies et de la
zoologique. En revanche, l’individu qui le suit et qui Pileta en Andalousie sont douteux. Un rapide tour
possède une ramure similaire, présente un garrot et une d’horizon du corpus mobilier, forcément incomplet, fait
tête (naturelle) épaisse qui n’appartiennent qu’au renne. état de 32 représentations certaines ou vraisemblables
L’allure générale de l’animal emporte notre jugement. provenant d’une quinzaine de sites principalement
Quant au premier individu, son corps évoque bien celui magdaléniens (surtout du Magdalénien supérieur) et
d’un cervidé, mais aucun élément ne permet d’affiner souvent éloignés du littoral du Tardiglaciaire. Outre les
l’identification zoologique. Le réalisme des animaux de représentations de Teyjat, dont une seule est
la Mairie est définitivement tout relatif. Il nous impose véritablement complète, on connaît 9 phoques gravés sur
également une extrême prudence dans nos approches plaquettes de schiste à Gönnersdorf (Allemagne), une file
naturalistes. Certaines représentations résistent de 7 têtes sur le fût d’un bâton percé de l’abri Morin
naturellement aux interprétations littérales. En témoigne (Gironde)12, deux individus à La Vache (Ariège) et deux
ce petit panneau qui donne plus à voir la diversité de la animaux complets très réalistes (un mâle et une femelle)
famille des cervidés (si l’on y associe la biche gravée gravés sur un long bâton percé de Montgaudier
dans la partie supérieure du bloc) que les comportements (Charente), qui sont associés à un salmonidé, deux
d’un genre particulier. reptiles, un bouquetin (vu de face) et des signes barbelés
pour constituer une composition symbolique
Un peu plus haut, sur le même panneau, ce sont d’autres exceptionnelle. Enfin des individus isolés sont à signaler
libertés qui ont été prises avec le vivant [fig. 8b]. La à Andernach (Allemagne), gravé sur plaquette de schiste,
représentation fuit le réalisme le plus académique pour à Lachaud (Dordogne), gravé sur os, à la Madeleine
rejoindre le vrai naturalisme, une traduction de la nature (Dordogne), gravé sur plaquette de schiste, à
profonde de l’animal, de son essence en quelque sorte. Brassempouy (Landes), gravé en relief sur la surface
Ceci est commun dans les corpus du Magdalénien articulaire d’une vertèbre de grand mammifère, à Duruthy
supérieur et l’on pourrait multiplier à loisir les exemples (Landes), gravé sur une canine d’Ursidé, à Isturitz
de schématisation des représentations figuratives comme
ce renne du panneau B qui ne ressemblent pas vraiment 11 Un seul animal est complet. Les trois autres individus sont
aux modèles des animaux plus classiques que l’on voit fragmentaires (têtes ou queues) du fait de la fracture des
ailleurs dans l’art pariétal de la Mairie, mais qui constitue supports dans deux cas et d’une intention délibérée de l’artiste
un portrait pour le moins fidèle. (« quartier » de phoque). Trois autres représentations possibles
peuvent être discutées.
12 L’identité zoologique de ces « animaux tachetés » provenant
Animaux rares et positions peu communes
du niveau AII (Magdalénien supérieur récent) est encore
largement discutée (phoques, chevaux, félins ?). L’absence
Le bestiaire mobilier et pariétal de Teyjat tire une part de
d’oreille, l’œil rond et les ponctuations sont en faveur de
son intérêt de la présence de thèmes rares. Nous avons l’hypothèse phoques contredite par la massivité des museaux, la
hauteur des cranes, l’implantation de la patte antérieure et
l’absence d’embonpoint.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

(Pyrénées-Atlantiques), découpé et gravé sur côte Chancelade (Dordogne), soixante kilomètres plus au sud.
refendue, à Gourdan (Haute-Garonne), gravé sur baguette Les œuvres de Teyjat constituent un remarquable
demi-ronde) et enfin à Enlène (Ariège), sculpté sur un témoignage de la présence dans l’environnement des
outil intermédiaire. Le cou large et court de la plupart de derniers magdaléniens d’un animal peu figuré et de toute
ces figurations et leur corps volumineux en forme de évidence peu exploité.
torpille, terminé par une queue palmée, orientent
l’identification zoologique. Les museaux camus Les cygnes
(Gönnersdorf, La Madeleine, Duruthy, Brassempouy,
Gourdan) pourraient appartenir au phoque commun et les Si les oiseaux ne sont pas exceptionnels dans l’art
museaux effilés et pointus (Montgaudier, Teyjat, Isturitz, paléolithique (une centaine de figurations dont moins
La Vache) à l’espèce du Groenland. Le décor de la d’une vingtaine dans l’art pariétal), ils ne sont pas
baguette demi-ronde (en deux fragments) au phoque toujours identifiables du point de vue zoologique. On
complet a fait l’objet d’interprétations très naturalistes et considère que la moitié du corpus est constitué d’oiseaux
de commentaires imprégnés d’ethnographie, sur lesquels indéterminés. Pour les autres, il est assez rare de remonter
il est intéressant de revenir [fig. 19]. Ils confortent par là- à la famille, a fortiori au genre ou à l’espèce représentée.
même la force descriptive et narrative de certaines Tout au plus c’est au quatrième rang de la taxinomie,
associations thématiques et de leur traitement formel. celui de l’Ordre, que l’on peut apprécier la nature de
Une scène de la vie des phoques (phoques vivants) et de l’animal. Ce sont environ 80 individus qui sont recensés
leur exploitation possible par les magdaléniens (phoques dans l’art mobilier (en grande majorité magdalénien),
dépecés) est décrite en détails par Denise de Sonneville- dont la moitié dans des sites pyrénéens et à peine un
Bordes et Pierre Laurent (1983 : 76-79). Ils s’inspirent quart, soit une vingtaine, en Périgord (Badegoule, Les
partiellement de la description princeps d’Henri Breuil Eyzies, Laugerie-Basse, La Madeleine, Raymonden,
pour lequel l’animal principal est représenté … entier, au Recourbie, Rochereil, le Souci, l’abri Mège et
moment où il saute à l’eau, les pattes antérieures étalées, Rochebécude). L’ordre des Ansériformes (oies, canards
celles de derrière redressées au-dessus du bassin ; la tête et cygnes) et celui des Gruiformes (grues et outardes)
est fine, flanquée d’une longue paire de moustaches : le sont figurés dans 40 % des cas. Ce sont les
pelage est fait de multiples hachures très fines, qui, sur représentations majoritairement déterminables. Les
les flancs, se groupent en taches rangées symétriquement rapaces diurnes (Accipitridés) et nocturnes (Strigidés –
(Capitan et al., 1906 : 210). Cet animal précède un chouettes et hiboux) constituent environ 10 % du corpus.
congénère réduit à la tête et au cou du fait de la fracture Une dizaine de passereaux ou Passériformes (surtout des
du support. Les phoques du Groenland sont connus pour Corvidés), quatre ou cinq grands pingouins (Alciformes)
leur rapidité dans l’eau et leur déplacement à la file par et un nombre équivalent de Gallinacés ou Galliformes
bonds successifs hors de l’eau. À l’autre extrémité de la (Phasianidés) complètent l’inventaire auquel on peut
baguette, également fracturée, une tête incomplète est ajouter deux Grands Tétras. Dans le bestiaire
interprétée par Breuil comme un autre phoque. Mais la déterminable, les trois cygnes du bâton percé de l’abri
bouche fendue et les taches pigmentées de la robe font Mège [fig. 20] appartiennent donc à l’un des Ordres les
plutôt penser à un Salmonidé. Cette hypothèse, à laquelle plus fréquents, celui des Ansériformes, tout en étant son
nous souscrivons, renforce l’association thématique plus discret représentant iconographique (7 entités
phoque/saumon, également présente sur le bâton percé de graphiques en l’état actuel de nos recherches). En effet,
Montgaudier (Charente), qui constitue vraisemblablement nous ne connaissons que quatre autres cygnes figurés, un
une évocation du régime piscivore des Phocidés. Dans premier gravé sur les parois de la grotte Margot
l’interprétation des deux autres figures, Henri Breuil (Mayenne), un second gravé sur galet à Gourdan, un
hésitait entre un animal fantastique13, un trophée de troisième sculpté sur bois de renne (dit « à trois têtes »)
chasse ou une peau de bête pour la première et un quartier au Mas-d’Azil et enfin un quatrième sculpté sur ivoire à
de venaison ou une amorce de piège pour la seconde. Malta (Sibérie, Russie). L’extrême rareté du thème rend
Selon D. de Sonneville-Bordes et P. Laurent cette pièce la présence des trois spécimens du bâton de Mège
… constituerait une sorte de guide pratique illustré du absolument remarquable. Signalons également que le
dépeçage en trois épisodes (1983 : 77). Pour conforter cygne ne figure pas dans l’avifaune déterminée à Mège et
leur hypothèse, ils s’inspirent des opérations de à la Mairie par Sir E.-T. Newton. Une utilisation d’os de
préparation des peaux de phoques observées chez les Cygne (humérus) pour fabriquer des baguettes osseuses
Esquimaux par Jean-François Le Mouel et en Terre de est renseignée dans le site magdalénien de Pierre-Châtel
feu par Dominique Le Goupil. Leur démonstration est (Isère). Enfin, l’objet/support de ces œuvres n’en finira
convaincante et entraîne l’adhésion, même si l’animal est pas de nous étonner si l’on considère sa propre nature
absent des faunes magdaléniennes de la Mairie et de (andouiller de cerf), l’originalité de sa double perforation
l’abri Mège identifiées par Edouard Harlé. Mais une circulaire et en boutonnière et l’invraisemblance des
mâchoire de phoque est signalée dans les niveaux du associations de son quintette thématique, trois cygnes,
Magdalénien supérieur de l’abri de Raymonden- trois figures composites ou fantastiques (les
« diablotins »), deux chevaux, une biche et un motif
géométrique.
13 Alexander Marshack désignait ce motif comme une
interprétation évoluée de la déesse plus ancienne de Mézine,
déesse abstraite à tête minuscule, épaules doublement
angulaires et vulve doublement ovaloïde (1972 : 321-324).

97
Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Des animaux vus de face potentiel (chasseur, observateur). Ces animaux offrent
ainsi leur corps plus ou moins de face. Mais ce sont
Dans la nature les animaux s’offrent au regard du surtout la tête, les cornes (ou les bois pour les cervidés) et
chasseur (occasionnellement à celui de l’artiste) dans des les oreilles qui dominent la silhouette. L’animal fait alors
positions extrêmement variables, qui dépendent de la l’objet de traitements formels différenciés, parfois
proximité de l’observateur, de son comportement ou de réalistes, souvent extrêmement dépouillés. Mais le
ses intentions et du propre état de l’animal ou de son modèle général demeure toujours le même, notamment
niveau de stress. L’animal sauvage n’affiche pas en toutes pour les caprinés : les cornes sont traitées en longs tracés
circonstances son corps de profil. Ce serait l’exposer courbes divergents et les oreilles sont figurées de part et
facilement à la javeline du chasseur. Pourtant c’est très d’autre l’encornure par des traits plus courts, également
souvent ainsi, de profil, que les animaux sont représentés divergents. La tête est plutôt triangulaire et son dessin se
dans l’art paléolithique, là où ils sont les plus lisibles et confond ou se prolonge parfois sans interruption avec
peut-être les plus faciles à reproduire. Les animaux vus celui de l’encolure.
de face ou représentés dans d’autres positions (trois-
quarts, têtes retournées, etc.) sont plus rares. La
reproduction en vue frontale n’est pas l’exercice LE DISCRET CORPUS DES SIGNES ET MOTIFS
graphique le plus facile du fait de la mise en perspective GÉOMÉTRIQUES
et en raccourci du corps et/ou de la tête de l’animal.
Pourtant c’est ainsi que beaucoup d’entre eux se Dans l’état actuel de nos observations et de l’étude que
présentent dans la nature, en alerte. Deux baguettes demi- nous poursuivons depuis 2012, l’art pariétal gravé de La
rondes, provenant des couches du Magdalénien supérieur Mairie ne comprend pas, ou très peu, de signes non
ancien de la Mairie et de l’abri Mège, sont ornées de figuratifs selon l’acception sémiologique du terme, c’est-
plusieurs têtes animales vues de face. La baguette de la à-dire des entités graphiques conventionnelles, de formes
Mairie montre deux têtes assez schématiques [fig. 21a]. Il plus ou moins structurées, mais répétitives et de structure
s’agit d’un bouquetin dont les deux cornes sont figurées stable (Sauvet, 1990). Les raclages et les stries qui
par de longs traits courbes divergents encadrés par deux couvrent la plupart des supports et les paquets inorganisés
traits plus courts pour les oreilles et d’un animal de traits et de lignes qui se superposent aux animaux ne
indéterminé (peut-être un cheval ?) dont on voit deux peuvent être considérés comme des signes. Seules
grandes oreilles dressées qui sont séparées par un motif quelques séquences parallèles de longues lignes droites
triangulaire (crinière ?). Les têtes14 sont couvertes de ou courbes, verticales, obliques ou horizontales, parfois
petites incisions (pelage ?) et sont disposées l’une au- terminées par un crochet (signes « en flèche ») et
dessus de l’autre, autour de cinq lignes parallèles. Elles associées à la plupart des animaux, font hésiter. Leur
surmontent une série double de profonds chevrons grande simplicité formelle est leur caractère principal
emboités et orientés à sens inverse15. L’association de ce [fig. 6a].
type de motifs avec des figures animales est connue
notamment à La Vache, Gourdan, le Mas-d’Azil, Le corpus mobilier est plus intéressant. Il comprend une
Bruniquel et Laugerie-Basse. L’autre baguette demi- quarantaine d’entités graphiques16 disposées pour
ronde de l’abri Mège présente quatre belles têtes de cerfs l’essentiel sur le fût d’armes (9 harpons dont 3 à double
vues de face, d’un dessin très réaliste, nullement rang de barbelures, 8 baguettes demi-rondes, 7 pointes de
dégénéré (Capitan et al., 1906 : 210) [fig. 21b]. Mais sagaies et une foëne) et d’outils (un outil intermédiaire et
quoiqu’en dise Henri Breuil, les représentations un bâton percé). Une côte de grand herbivore, un bois de
d’animaux en vue frontale du Magdalénien supérieur (très renne et un fragment de stalactite complètent cette
souvent des caprinés ou des cervidés) sont modeste série. Les signes sont construits principalement à
conventionnelles, voire très schématisées (Tymula, partir de lignes (droites, brisées simples, courbes simples
1991). H. Breuil les considérait souvent comme des et courbes ondulées-géométriques), de plans élémentaires
figures dégénérées ou graphiquement altérées (Breuil, constitués de lignes droites et de lignes courbes et de
1905 ; 1907). Les cerfs de l’abri Mège, dont les oreilles et rares cupules. De ces éléments fondamentaux de la
les bois sont bien détaillés (andouillers basilaires, épois, grammaire des formes17 les artistes/artisans magdaléniens
etc.) échappent à cette appréciation subjective. On de Teyjat ont créé différentes compositions graphiques,
connait environ 70 représentations de ce type sur une peut-être décoratives, à partir de l’agrégation de
quarantaine de pièces mobilières. Les représentations bâtonnets (ou de cupules sur le bâton percé de Mège)
pariétales sont plus rares. La disposition en vue frontale autour d’une ligne (signe ramiforme sur stalactite de la
traduit peut-être un mouvement ou mieux encore une couche supérieure de la Mairie) [fig. 22a] ou à l’intérieur
attitude comportementale. C’est le cas notamment des d’un plan (ovale, losange et triangle sur une baguette
bouquetins, des chamois et des cerfs en alerte permanente demi-ronde, un harpon et une côte ; motif serpentiforme
dans la nature et dont le comportement d’attention
s’exprime ainsi en se tournant vers la source du danger 16 Dont 29 provenant des couches du Magdalénien supérieur
ancien (couche inférieure de La Mairie et Couche 2 de l’abri
14 Elles sont interprétées par H. Breuil comme deux jolies têtes Mège) et 11 du Magdalénien supérieur récent (couche
de face de cervidés (Capitan et al., 1908 : 171). supérieure de La Mairie).
15 A. Marshack y voyait un bloc de notation couvrant trois mois 17 Nous empruntons à Georges Sauvet (1990) l’ensemble des

lunaires (1972). éléments de vocabulaire et de grammaire des formes.

98
Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

sur le bâton percé) [fig. 22b]. En répétant certains Enfin, l’absence de figure féminine schématique dans sa
éléments de langage, ils ont donné du rythme à leurs typologie commune au Magdalénien supérieur, c’est-à-
compositions par duplication (bâtonnets doubles sur dire une femme disposée de profil, souvent sans sein, ni
baguettes demi-rondes) ou par alignement. Il en est ainsi bras, ni tête, plutôt mince et à ventre plat mais aux fesses
des lignes de chevrons sur plusieurs baguettes demi- proéminentes et à cuisse épaisse, est également
rondes [fig. 19, 21a et 21b] et sur une pointe de sagaie intéressante à souligner. Elle constitue un autre marqueur
provenant de la couche supérieure de la Mairie [fig. 22c], de ce magdalénien supérieur périgourdin très
des tirets obliques ou transversaux sur les pointes septentrional, et dont on souhaiterait étudier les
barbelées, quelques baguettes demi-rondes et sagaies et influences ou les contacts du côté des vallées de la
des lignes d’arceaux sur une sagaie. Un seul exemple de Tardoire et de la Charente.
concaténation (juxtaposition par contact) est donné sur le
fût d’une autre sagaie [fig. 22d]. Sur trois baguettes demi- Nos recherches actuelles dans le cadre du PCR
rondes les signes s’associent et s’organisent dans l’espace Peuplements et cultures à la fin du Tardiglaciaire dans le
du support par symétrie axiale et délimitation des nord du Périgord entre Dronne et Tardoire nous ont
registres. Les compositions graphiques de la baguette aux permis de découvrir de nouvelles entités graphiques
phoques et de celles aux têtes de cerfs et de bouquetin figuratives gravées sur l’édifice stalagmitique de la grotte
vues de face sont élaborées à partir d’une alternance de La Mairie. Elles montrent une forte segmentation
(peut-être d’une opposition) entre registres figuratifs et formelle. Ce sont des parties d’animaux isolées, des
registres non-figuratifs, strictement séparés et délimités membres, des têtes ou des rachis que Henri Breuil
par des lignes simples ou parallèles. Les symétries axiales n’avaient pas vu ou qu’il avait négligé et qui viennent
sont rendues et même accentuées par les doubles enrichir le corpus de la grotte et lui donner un cachet plus
alignements inversés de chevrons dans les registres conforme à ce que l’on connait de l’art au Magdalénien,
géométriques et par la symétrie frontale des têtes notamment dans ses périodes les plus récentes.
animales, du phoque vivant et de la peau de phoque en
train de sécher (Sonneville-Bordes & Laurent, 1983 : 78) L’étude des séries mobilières de La Mairie et de l’abri
dans le registre figuratif. Mège est à ce jour simplement esquissée. On l’aura
certainement vu ou ressenti à la lecture de l’article, et il
est indispensable qu’elle soit conduite de manière aussi
CONCLUSION détaillée que possible, comparée et mise en relation avec
les productions pariétales de proximité et bien entendu les
Par quelques exemples tirés de l’iconographie mobilière productions mobilières plus éloignées. Notre recherche
et pariétale de La Mairie et de l’abri Mège, et sous doit aboutir à la mise en corrélation de toutes les données
réserve de nouvelles découvertes toujours possibles lors comportementales (techniques, subsistance et
d’une recherche en cours, nous avons essayé de formuler symboliques) acquises sur les derniers magdaléniens dans
des réflexions générales ou plus particulières sur ces le nord du Périgord et à leur confrontation dans une
productions symboliques de la fin du Magdalénien dans perspective territoriale plus large, ouverte vers l’ouest, le
le nord du Périgord et aux confins de la Charente. On nord-ouest et le sud.
peut d’abord affirmer que le réalisme des représentations
animalières n’y est pas constant, contrairement à ce que
l’on dit souvent des représentations de Teyjat. Il BIBLIOGRAPHIE
s’exprime dans des manières de faire différentes.
Beaucoup de figures assez schématiques côtoient des ALLAIN J. et al., 1985. Le Magdalénien à navettes,
animaux réalistes. Elles sont dépouillées de détails Gallia-Préhistoire, 28, 1, p. 37-124.
superflus, mais elles expriment parfaitement l’essence AZÉMA M., 2010. L’art des cavernes en action. Les
même de l’animal. animaux figurés. Animation et mouvement, l’illusion de
la vie, Arles, Errance, 471 p. (coll. Les Hespérides).
Les représentations figuratives sont dominantes, mais le
BEAUNE S. DE, ROUSSOT A. & WHITE R., 1988. Une
corpus des signes et motifs géométriques n’est pas
lampe paléolithique retrouvée dans les collections du
négligeable, surtout dans l’art mobilier. Ce sont les
Field Museum of Natural History, Chicago, Préhistoire
cervidés, et plus particulièrement les rennes, qui occupent
ariégeoise, Bulletin de la Société Préhistorique Ariège-
la première place du bestiaire. Mais l’association du
Pyrénées, 43, p. 149-160.
renne et du cerf au sein des mêmes dispositifs pourrait
être mise en relation avec leur propre présence/absence BOURRINET P., 1929. Mes dernières fouilles à la grotte de
dans les environnements naturels du site. Il en est de la Mairie à Teyjat (Dordogne), Bulletin de la Société
même pour les bisons et les aurochs. La présence Historique et Archéologique du Périgord, 56, p. 239-244.
simultanée (?) d’animaux, dont les affinités écologiques BREUIL H., 1905. La dégénérescence des figures
sont différentes, en tous cas contrastées, dans les mêmes d’animaux en motifs ornementaux à l’époque du renne,
dispositifs pariétaux et mobiliers est connue par ailleurs, dans : Comptes rendus des séances de l’Académie des
mais elle prend à Teyjat une dimension presque inédite. Inscriptions et Belles Lettres, 49e année, 1, p. 105-120.
Elle est à mettre à l’actif d’une pensée symbolique libérée BREUIL H., 1907. Exemples de figures dégénérées et
des contingences naturelles et de la dictature du réalisme stylisées à l’époque du renne, dans : Compte rendu du 13e
comme acte de reproduction servile du réel.

99
Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Congrès International d’Anthropologie et d’Archéologie annexes.


Préhistorique (Monaco, 1906), p. 394-403. PAILLET P. (dir.), 2014. Peuplements et cultures à la fin
CAPITAN L., BREUIL H., BOURRINET P. & PEYRONY D., du Tardiglaciaire dans le Nord du Périgord, entre
1906. L’abri Mège. Une station magdalénienne à Teyjat Dronne et Tardoire. Rapport intermédiaire d’opération
(Dordogne), Revue de l’École d’Anthropologie de Paris, archéologique « Projet collectif de recherche », 203 p. et
16, p.196-212. Document Final de Synthèse, 135 p.
CAPITAN L., BREUIL H., PEYRONY D. & BOURRINET P., PERRIER DU CARNE É., 1889. La grotte de Teyjat,
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gisement magdalénien, Revue de l’École d’Anthropologie REINACH S., 1912. Le bâton de Teyjat et les ratapas,
de Paris, 18, p. 153-176 et 198-218. Cultes, Mythes et Religions, 4, p. 363-368.
CAPITAN L., BREUIL H., BOURRINET P. & PEYRONY D., SAINT-PÉRIER R. de, 1948. Les os gravés de la grotte de
1909. Observations sur un bâton de commandement orné La Mairie à Teyjat et leur destinée, Bulletin de la Société
de figures animales et de personnages semi-humains, Préhistorique Française, 45, 6-8, p. 250-252.
Revue de l’École d’Anthropologie de Paris, 19, p. 62-76.
SAUVET G., 1990. Les signes dans l’art mobilier, dans : J.
CAPITAN L., BREUIL H., PEYRONY D. & BOURRINET P., Clottes (dir.), L’art des objets au Paléolithique, les voies
1912. Les gravures sur cascade stalagmitique de la grotte de la recherche, tome 2. Actes des colloques de la
de la Mairie à Teyjat (Dordogne), dans : Congrès Direction du Patrimoine, Colloque de Foix-Mas d’Azil,
International d’Anthropologie et d’Archéologie 16-21 novembre 1987, Ministère de la Culture, p. 83-99.
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SONNEVILLE-BORDES D. de & LAURENT P., 1983. Le
LEROI-GOURHAN A., 1971. Préhistoire de l’art phoque à la fin des temps glaciaires, dans : La faune et
occidental, Paris, Éditions d’art Lucien Mazenod, 499 p. l’homme préhistorique, Mémoires de la Société
MAN-ESTIER E., 2011. Les Ursidés au naturel et au Préhistorique Française, 16, p. 69-80.
figuré pendant la préhistoire, Liège, Université de Liège, SOUBEYRAN F., 1993. La vie quotidienne des rennes
125 p. (ERAUL, 127). entrevue dans l’art magdalénien. Essai d’éthologie
MARSHACK A., 1972. Les racines de la civilisation, Paris, préhistorique sur quelques représentations, Bulletin de la
Plon, 415 p. Société Historique et Archéologique du Périgord, 120, p.
PAILLET P. (dir.), 2012. Peuplements et cultures à la fin 229-264.
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Dronne et Tardoire. Rapport intermédiaire d’opération Étude des représentations mobilières et pariétales
archéologique « Projet collectif de recherche », 162 p., pyrénéennes. Mémoire de Maîtrise, Université de Paris I,
annexes. 2 volumes, 85 p., annexes.
PAILLET P. (dir.), 2013. Peuplements et cultures à la fin TYMULA S., 1992. Figures composites de l’art
du Tardiglaciaire dans le Nord du Périgord, entre paléolithique d’Europe occidentale et orientale. Mémoire
Dronne et Tardoire. Rapport intermédiaire d’opération de DEA de Préhistoire, Université de Paris I, 254 p.
archéologique « Projet collectif de recherche », 288 p.,

Patrick Paillet
Muséum national d’Histoire naturelle, Département de Préhistoire
UMR 7194 Histoire naturelle de l’Homme préhistorique, Musée de l’Homme, Paris, France
paillet@mnhn.fr

Elena Man-Estier
Ministère de la Culture et de la Communication/Direction générale des Patrimoines/Service du Patrimoine/Sous-
direction de l’Archéologie, Paris, France,
UMR 5199 Pacea
elena.man-estier@culture.gouv.fr

100
Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 1. Carte de situation (DAO P. Paillet).


Localisation map.

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 2. Topographie géomorphologique de la grotte de la Mairie (relevé et DAO G. Dandurand).


Geomorphological topography of La Mairie cave.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 2b. Détail de la zone ornée.


Detail of the decorated area.

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 3. Relevé graphique général de la grotte de la Mairie (relevé P. Paillet).


General graphic overview of La Mairie cave.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 4a. La Mairie, relevé graphique du panneau A-bis (Musée national de Préhistoire) (relevé P. Paillet) – L. 42 cm.
La Mairie, graphic tracing of panel A-bis (Musée national de Préhistoire) – L. 42cm.
Fig. 4b. La Mairie, relevé graphique du panneau A (relevé H. Breuil) – L. petit cheval 13,5 cm.
La Mairie, graphic tracing of panel A – L. small horse 13,5 cm.
Fig. 4c. La Mairie, renne gravé et peint en rouge (relevé H. Breuil) – L. 12,5 cm.
La Mairie, engraved and red-painted reindeer – L. 12,5 cm.

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 5a. La Mairie, animal indéterminé du panneau C (relevé P. Paillet) – L. 21,6 cm.
La Mairie, underminated animal from panel C – L. 21,6 cm.
Fig. 5b. Abri Mège, « diablotins » sur bâton percé (relevé S. Tymula) – L. sujet central 4 cm.
Mège shelter, little devils on bored stick – L. central subject 4 cm.
Fig. 5c. La Mairie, ours du panneau A (relevé P. Paillet) – L. 21 cm.
La Mairie, bear of panel A – L. 21 cm.
Fig. 5d. La Mairie, tête humaine (?) sur fragment de calcite (relevé H. Breuil) – L. 5 cm.
La Mairie, human head (?) on calcite – L. 5 cm.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 6a. La Mairie, aurochs et signes linéaires du panneau F (relevé P. Paillet) – L. 49,9 cm.
La Mairie, aurochs and linear signs from panel F – L. 49,9 cm.
Fig. 6b. La Mairie, représentation schématique féminine (?) sur bois de renne (relevé H. Breuil).
La Mairie, schematic female representation (?) on reindeer antler.

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 7a. La Mairie, cheval (poney) sur sacrum (relevé P. Paillet) – L. cheval 8,5 cm.
La Mairie, horse (poney) on sacrum – L. horse 8,5 cm.
Fig. 7b. La Mairie, cheval du panneau E (relevé P. Paillet) – L. cheval 42,6 cm.
La Mairie, horse from panel E – L. horse 42,6 cm.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 8a. La Mairie, rennes du panneau C (relevé P. Paillet) – L. renne couché 18,4 cm.
La Mairie, reindeers from panel C – L. lying reindeer 18,4 cm.
Fig. 8b. La Mairie, renne schématique du panneau B (relevé P. Paillet) – L. petit renne 4,5 cm.
La Mairie, schematic reindeer from panel B – L. small reindeer 4,5 cm.
Fig. 8c. La Mairie, détail d’un renne du panneau D (relevé P. Paillet) – L. renne 16,2 cm.
La Mairie, detail of a reindeer from panel D – L. reindeer 16,2 cm.
Fig. 8d. La Mairie, renne avec détail de pelage conventionnel du panneau D (relevé P. Paillet) – L. renne 18,7 cm.
La Mairie, reindeer with detail of conventionnal hairs depiction from panel D – L. reindeer 18,7 cm.

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 9a. La Mairie, renne gravé sur stalactite (relevé sélectif P. Paillet) – L. renne 3 cm.
La Mairie, engraved reindeer on stalagtite – L. reindeer 3 cm.
Fig. 9b. La Mairie, rennes en file sur radius d’aigle (relevé H. Breuil) – L. objet 20,3 cm.
La Mairie, series of reindeers on eagle bone (radius) – L. object 20,3 cm.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 10a. La Mairie, cerf et biche du panneau B (relevé P. Paillet) – L. cerf 25 cm.
La Mairie, deer and doe from panel B – L. red deer 25 cm.
Fig. 10b. La Mairie, cerf, rennes et cheval du panneau C (relevé P. Paillet) – L. cerf 43,8 cm.
La Mairie, deer, reindeers and horse from panel C – L. red deer 43,8 cm.

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 11a. La Mairie, bison du panneau B (relevé P. Paillet) – L. 24,5 cm.


La Mairie, bison from panel B – L. 24,5 cm.
Fig. 11b. La Mairie, bisons se suivant du panneau D (relevé P. Paillet) – L. grand bison 48,5 cm.
La Mairie, bisons following from panel D – L. big bison 48,5 cm.
Fig. 11c. La Mairie, nouvel aurochs du panneau F (relevé P. Paillet) – L. 42 cm.
La Mairie, new aurochs from panel F – L. 42 cm.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 12. La Mairie, bisons en file sur côte (relevé H. Breuil) – L. bison central 12,5 cm.
La Mairie, bison following on a coast – L. central bison 12,5 cm.

Fig. 13: Abri Mège, phoque sur baguette demi-ronde (photo P. Paillet) – L. 4,7 cm.
Mège shelter, seal on half-rounded stick – L. 4,7 cm.

Fig. 14. Abri Mège, cheval sur bâton percé (relevé H. Breuil) – L. 16,4 cm.
Mège shelter, horse on bored stick – L. 16,4 cm.

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 15. La Mairie, aurochs reposant sur des lignes de sol (relevé P. Paillet) – L. aurochs mâle 55,1 cm.
La Mairie, aurochs with ground lines – L. male aurochs 55,1 cm.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 16a. La Mairie, bison à têtes multiples du panneau D (relevé P. Paillet) – L. bison 48 cm.
La Mairie, bison with multiples heads from panel D – L. bison 48 cm.
Fig. 16b. La Mairie, renne sur relief naturel du panneau B (relevé P. Paillet) – L. 11,7 cm.
La Mairie, reindeer of natural relief from panel B – L. 11,7 cm.

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 17. La Mairie, construction du dispositif pariétal (DAO P. Paillet).


La Mairie, construction of the graphic dispositive.

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Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 18. La Mairie, cervidés du panneau B (relevé P. Paillet) – L. cerf 10,9 cm.
La Mairie, cervids from panel B – L. red deer 10,9 cm.

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Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 19. Abri Mège, baguette demi-ronde au phoque (relevé H. Breuil) – L. grand fragment 15 cm et petit fragment
8,7 cm.
Mège shelter, half-rounded stick with seal – L. big fragment 15 cm and small fragment 8,7 cm.

118
Des animaux et quelques signes à la Mairie et à l’abri Mège à Teyjat (Dordogne, France)

Fig. 20. Abri Mège, cygnes sur bâton percé (relevé H. Breuil) – L. totale 22,5 cm.
Mège shelter, swans on bored stick – L. total 22,5 cm.

Fig. 21a. La Mairie, têtes vues de face sur baguette demi-ronde (relevé H. Breuil) – L. tête de bouquetin 3 cm.
La Mairie, heads seen in front view on half-rounded stick – L. ibex 3 cm.
Fig. 21b. Abri Mège, têtes vues de face sur baguette demi-ronde (relevé H. Breuil) – L. deuxième tête 3 cm.
Mège shelter, heads seen in front view on half-rounded stick – L. second head 3 cm.

119
Patrick Paillet and Elena Man-Estier

Fig. 22a. La Mairie, signe ramiforme sur stalactite (relevé P. Paillet) – L. objet 7 cm.
La Mairie, ramiform sign on stalagtite – L. object 7 cm.
Fig. 22b. Abri Mège, motif serpentiforme sur bâton percé (relevé H. Breuil) – L. 7,7 cm.
Mège shelter, serpent like pattern on bored stick – L. 7,7 cm.
Fig. 22c. La Mairie, lignes de chevrons sur pointe de sagaie (relevé H. Breuil) – L. sagaie 12 cm.
La Mairie, chevron lines on spear point – L. spear point 12 cm.
Fig. 22d. La Mairie, signe complexe sur pointe de sagaie (relevé H. Breuil) – L. sagaie 10 cm.
La Mairie, complex sign on spear point – L. spear point 10 cm.

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