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DÉMÉTER, DÉESSE ACROPOLITAINE

Author(s): Y. Béquignon
Source: Revue Archéologique, T. 2 (juillet-décembre 1958), pp. 149-177
Published by: Presses Universitaires de France
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41753777 .
Accessed: 14/09/2013 00:30

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITM

Les études qui ont été consacrées à Déméter depuis plu-


sieurs décades ne se sont guère attardées à considérer rempla-
cement choisi pour les sanctuaires de la déesse. Elles les ont
décrits parfois, mais incidemment et sans y attacher autre-
ment d'importance1, et on peut dire que l'aspect topogra-
phique des sanctuaires a presque toujours été laissé de côté2.
Il est vrai que nos informations, assez maigres, n'incitaient
guère à y prêter attention. Les indications de Pausanias, si
précieuses soient-elles et qu'il est facile de décrier pour
quelques bévues, restent parfois trop peu explicites à notre
gré ; les inscriptions ne sont pas plus instructives sur ce point
particulier, et les recherches archéologiques elles-mêmes n'ont
pas toujours apporté les précisions souhaitées, soit qu'elles
n'aient pas abouti, soit que les fouilleurs n'aient pas songé à
nous fournir,des détails auxquels ils étaient excusables de
n'attacher pas d'importance.
Si nous nous permettons de revenir sur une observation
publiée en un ouvrage paru il y a plus de vingt ans3, c'est
qu'elle nous semble maintenant fortifiéepar d'autres exemples
et surtout par les découvertes faites au cours des dernières
années. Il nous apparaît en effetde plus en plus que Déméter
était acropolitaine et qu'elle gardait les passages.
Pareille qualité s'accorde bien avec le caractère chtonien
de Déméter, encore qu'on y puisse d'abord trouver quelque

1. AinsifaitO. Kern,danssonexposéd'ensemble derGriechen


dela Religion ,
I, Berlin, 1926,pp.213,214,etc.
2. Saufexception : Ch. Picard,Rev. Hist.,GLXVI,1931,pp. 15 et 22 du
d'Athènes
t. à p. : Lesluttesprimitives et d'Ëleusis.
, Pans,1937,pp. 194sqq.
3. La valléedu Spercheios
T.ti 10

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150 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

incompatibilité1. La meilleure preuve nous est fournie par le


sanctuaire d'Êleusis auquel nous ferons d'abord reférence.
Comme on sait, les fouilles du regretté K. Kourouniotis ont
établi que, contrairementà l'hypothèse de F. Noack, il existait
à Éleusis un sanctuaire mycénien qui avait précédé les sanc-
tuaires de l'époque historique et ce sanctuaire se présentait
sous l'aspect d'un véritable mégaron : c'est un enclos rectan-
gulaire qui s'inscrit entre deux escaliers d'accès et qui se
distingue du naos , servant à des sacrifices secrets2. Pareille
disposition répond exactement aux exigences de YHymne à
Démêler, texte capital et qui nous donne l'explication-clef,
si l'on peut dire, ainsi que l'a rappelé M. Ch. Picard à plusieurs
reprises3. Il nous sera permis de citer à nouveau ce texte
(vers 268-273) : « Et moi je suis Déméter, pleine de gloire, qui
est joie et sujet de richesses pour les Immortels et les mortels.
Mais allons ! que tout le peuple me bâtisse un grand temple
avec un autel en contrebas, sous l'Acropole et sa haute
muraille, au-dessus du Callichoros, sur l'éperon de la colline.

1. Ainsi,sansdoute,E. Kirsten estime que le sanctuairede Déméter Ëleusi-


nienne prèsde Platéesnepeutêtresituésurunehauteur au Nordde Kriékouki,
«niemals Eleusinia »,P. W.,s.v.Plaiaiai, col.2271; enrevanche, O. Kern,Rei.der
Griechen, I, p. 42 : « dassderBergzurErdegehört, ist nichtzu vergessen » et
W. K. G.Guthrie, Les Grecs etleursdieux, tr.fr.,Paris,1956,p. 235,n. 1 : « Aux
temps archaïques, oncroyait à desdieuxdessommets quiétaient enmêmetemps
despuissances du sol...»
2. Voirlesarticles de K. Kourouniotis, Archaiol. Deltion
, 1930-1931, Parar-
lima, pp.17-30avec,p. 4,le plandumégaron mycénien etdesonmurdepéribole ;
ibid.,1931-1932, pp. 1-30et fig.3 : plandel'étatactuel; ibid.,K. Kourouniotis
et J. Travlos,1933-1935, pp. 54 sqq. Enfin,J. Travlos,Tò áváxTopov T7jç
'EXeuaïvoç, Archaiol. Ephimeris , 1950-1951,pp. 1-16,avec,à la p. 3, la fig.2 qui
montre clairement la placedumégaron mycénien dansla sériedesédifices succes-
sifs.Voiraussil'articlebienconnude K. Kourouniotis, Das Eleusinische
Heiligtum vondenAnfängen biszurvorperikleischen Zeit,Archiv,f.Religionswiss .,
XXXII,1935,pp.52-78, etnotamment lespp.53-56, etJohn Travlos,TheTopo-
graphy ofEleusis, Hesperia, XVIII, 1949,138-147 (avecplanset figures) ; Karl
Deichgräber, Eleusinische Frömmigkeit und homerische Vorstellungswelt im
Homer.Demeterhymnus, Ak. d. Wiss.u. Lit.,Abh.d. geistes- u. sozialwiss. Kl.,
Mayence, 1950,6, p. 520,a simplement signaléle fait,sanss'y attarder et sans
en tireraucuneconclusion.
3. La prédiction de Déméter auxËleusiniens, Revuedephilologie , t. 57,1930,
pp.257-265, etn.p.259; Diegrosse MuttervonKretabisEleusis, Eranos- Jahrbuch
1938(paruà Zurich, 1939),pp.91-119 etnotamment pp. 109-112.

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 151

Alors moi-même je vous enseignerai mes orgia (mystères),


afin qu'à l'avenir, sacrifiant selon le rite, vous apaisiez mon
esprit1. » D'après ces prescriptions, on peut attendre que les
sanctuaires démétriaques soient non pas juchés au sommet
d'une acropole, mais placés de préférence sur le versant de
quelque hauteur, soit sur une petite colline, soit même sur
une butte. Telle était V « hypothèse de travail », pour parler le
jargon actuel, qui nous avait jadis guidé dans la recherche du
sanctuaire d'Anthèla, après que les sondages exécutés d'abord
auprès de la caserne turque ruinée se fussent révélés vains. On
se rappellera pourtant qu'un sanctuaire consacré à Déméter
ne se présente pas nécessairement sous la formed'un temple ;
il peut n'être qu'un hiéron, sanctuaire limité par un mur de
péribole facile à détruire, surtout par qui cherche du matériau
à bâtir, ou encore un mégaron et ce mot peut ne s'appliquer
qu'à un simple tertre2,ou encore un alsos , « lieu saint chtonien
par excellence »3.
En nous fondant sur ces prémisses, nous pourrions consi-
dérer successivement les sanctuaires de Déméter d'après leur
ordre géographique. Mais pareille méthode aurait l'inconvé-
nient de recopier, avec quelques additions, l'inventaire soi-
gneusement dressé jadis par 0. Kern dans son article de la
Pauly-Wissowa ou encore le tableau présenté par R. Farnell4.
Nous pourrions aussi classer les sanctuaires de Déméter en
trois groupes : dans le premier figureraient les sanctuaires

1. Nousavonstranscrit la traductionde M.Ch.Picard, quinousparaîtpréfé-


Budé.L'édition
rableà celledel'édition anglaisedeT. W.Allen-W.R. Halliday-
E. E. Sikes,TheHomeric Hymns , Oxford, noteà proposdu
1936,pp. 162-163,
vers270quesesindications nes'accordent décrit
pasavecl'étatdesfouilles parla
publication de F. Noack.Elleneferait plusmaintenant remarque,
pareille alors
fortjustifiée.
2. Surle motmégaron , voirles observationsde F. Robert,Thymélè , Paris,
1939,pp.210-227 deCRAI, 1936,
(repris pp.87-89),etlesremarquesdeH.Metzger,
BCH,LXIV-LXV,1940-1941, p. 16,et de O. Rubensohn, Jahrbuch
, 70,1955,
pp. 23 sqq.
3. Ch.Picard,Rev.arch.,1938,I, 100-102, 104et II, 245-247.
4. TheCultsoftheGreek States,vol.Ill, Oxford, en fin
1907.Les références,
de volume, de chacundeschapitres, sontsuiviesd'unGeographical Registerqui
rendservice, maisquinefaitpasétatdesdonnées archéologiques.

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pour lesquels nous possédons seulement la mention du culte,


mais dont, par ailleurs, nous ignorons tout ; dans le second
prendraient place les sites pour lesquels nous disposons d'une
indication précise sans que toutefoisnous puissions la contrôler
sur le terrain ; enfin le troisième groupe serait formé des
sanctuaires que nous connaissons bien grâce aux fouilles
archéologiques. A ce classement, artificiel comme toutes les
répartitions de cette sorte, nous avons préféré une autre
méthode, plus dangereuse il est vrai, mais qui tient compte des
différentsaspects de Déméter. Gar il ne faut pas l'oublier : il
existe dans la religion grecque, non pas une Déméter comme
on Técrit communément pour simplifier, mais au contraire
sous ce nom ont été vénérées des divinités parfois différentes
et qui résultent d'une ancienne confusion avec des divinités
locales, ou d'une substitution violente ou pacifique. On le
dirait de Déméter comme de bien d'autres divinités grecques,
elle apparaît sous des visages divers. Il faut donc éviter
d'en faire une abstraction, de lui donner une figurefigée,mais
essayer de lui rendre vie en tenant compte des circonstances
de ses « pérégrinations » en telle ou telle région1.
La Béotie est l'un des lieux de prédilection de Déméter.
Le centre le plus important était celui de Thèbes, où Déméter
avec Yépiclèse de Thesmophoros, avait son temple sur la
Gadmée (Paus., IX, 6 et 16, 3)2, et elle passait pour y avoir
été installée par Cadmos3. Elle s'est substituée là, peut-être,
à une déesse Europè, dont elle a parfois adopté le nom4, et
nous trouvons à Lébadée un hiéron de Déméter-Europè
(Paus., IX, 39, 3), en montantvers l'oracle installé, nous ne
savons où, sur une montagne dominant le pays ; un autre
sanctuaire se situe à Copai, bâtie sur une colline dominant la
plaine (Paus., IX, 24, 1), alors que jadis c'était une île au

1. Pourlespérégrinations
de Déméter,
termequenousempruntons à l'article
deM.Ch.Picard,voirREG, XL, 1927,pp.320-369.
2. Cf.Valléedu Spercheios
, p. 195.
3. Gh.Picard,REG, l. p. 334.
4. P. de La Coste-Messelière,
Au musée
deDelphes
, Paris,1936,pp.92sqq.

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milieu du Copaïs1. Plus près de Thèbes, à vingt-cinq stades


(Paus., IX, 25, 5), le bois sacré de Déméter Cabiria et de Corè
semblait pouvoir être déterminé2 : déjà Frazer proposait
(V, 135) de le placer au lieu où se rencontrait l'iconostase,
ruiné, de Hagh. Nicolaos ; depuis lors, P. Wolters et G. Bruns,
dans la publication du Cabirion3, ont noté que cet iconostase
s'élève sur un édifice ancien, « antike Baukomplex », et qu'il
est visible de loin : il serait donc établi sur une butte4. En
fait, les sondages exécutés (1957) en vue de le découvrir,
n'ont donné aucun résultat5. A Anthedon (Pausanias, IX,
22, 5), cité bâtie au pied du mont Messapion, où un sanctuaire
des Cabires était installé en pleine ville, il y avait tout auprès
un temple de Déméter, et un sanctuaire de Dionysos. Ces
voisinages n'ont rien qui nous surprennent. Mais Frazer
(V, 92 sqq.) signale que la ville ancienne était bâtie sur le
versant Nord d'une des pentes du Messapion (même donnée
de Hitzig-Blümner,Des Pausanias Beschreibung, Berlin, 1896,
199, III, 1, p. 455) et l'on a jadis découvert un temple sur une
acropole (?) à Anthedon : ce temple serait celui de Dionysos6.
Nous n'en sommes pas très sûr : outre que le texte de
Pausanias parle d'un hiéron et non d'un naos de Dionysos,
tandis qu'il note un naos de Déméter, que l'édifice jadis
exhumé est de dimensions réduites (long. : 10,47 x 6,05),
il a été découvert là des objets qui rappellent ceux qui ont
été mis au jour au sanctuaire de la Malophore à Sélinonte7.
Il serait possible que ce fût le temple de Déméter. Nous ne
pouvons situer avec précision les sanctuaires béotiens de

1. Copai= aujourd'hui Topolias ; P. Guillon, La Béotieantique , Paris,


s. d. (1948),endonneunephotographie, Die griechische
pl.VIII, 1 ; Philippson,
Landschaften , I, 2, Francfort-sur-le-Main, 1951, p. 486, définitCopai :
Kalkhügel.
2. Contrairement à A. D. Ure,JHS, LXIX, 1949,p. 24,quirenvoie à trazer,
Pausanias ' Description
ofGreece,Londres, 1898.
3. Das Kabirienheiligtum beiTheben , I, Berlin,1940,pp.8-9.
4. Voir,op.laud.,le planI, fig.du bas.
5. BCH, LXXXI,1957,Chron ., p. 585.
6. J. C. Rolfe,AJA, 6, 1890,pp. 90-107: Discoveries at Anthedon.
7 Monumenti antichi
, XXXII, 1927-1928, p. 371,fig.163.

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Mycalessos (Paus., IX, 19, 4-5), de Platées1, de Potniai


(Paus. IX, 8, l)2, et celui de Scolos (IX, 4, 4), connu par ses
statues de Déméter et de Corè, inachevées ou émergeant à
mi-hauteur3. Nous ne savons rien du sanctuaire de Scarphée
en Locride, mais, en Phocide, Pausanias atteste l'existence
d'un sanctuaire démétriaque à Drymaia (Paus., X, 33, 12)
et la ville est bâtie sur une petite acropole4. Au Sud du
Céphise, à Kato-Souvala, un peu au Nord de Lilaia, un
sanctuaire de Déméter avait été découvert en 19285, mais
il n'a jamais été publié, à notre connaissance, et les seuls
rapports qui le signalent, indiqués en note, sont nécessaire-
ment insuffisants. Enfin, plus au Sud, à Stiris, Pausanias
signale (IX, 35, 10) le sanctuaire de Déméter Stiritis, avec un
vieux xoanon entouré de bandelettes : l'identification fut
longtemps discutée ; on s'accorde aujourd'hui à placer Stiris
sur la hauteur de Palaiochora, au Sud-Est du monastère de
Hosios Loucas6. Bornons-nous à faire observer dès maintenant
que tous ces sanctuaires sont placés conformémentà l'exemple
éleusinien.
Même observation quand nous abordons la Mégaride.
Inutile de rappeler ici les relations de Mégare avec Thèbes

1. Cf.ValléeduSpercheios , p. 196.Nousavonsrappelé ci-dessusqueM.Kirsten


rejette l'idéequ'ilaitétéplacésurunehauteur. La discussionn'estpasterminée ;
il se peutque M. Kendrick Pritchettla reprenne (cf.AJA,62, 1958,p. 211).
2. M. K. Kerenyi,EranosJahrb., XI, 1944(Zurich, 1945),p. 40,le placerait
au Sud-Sud-Ouest de Thèbes, prèsde la fontaine Dircé,à Tachi?
3. Selonla correction de Schubart ou selonle textedes mss.défendu par
P. Guillon,Rev.phil. , 27,1953,pp. 135-140. Onenpromène l'emplacement dans
les paragesde Darimari, soità l'Ouestsurun petitplateaurocheux (Frazer,
V, 21),soitau Nordà Néochori (selonKirsten,Die gr.Landschaften , /./.,I, 2,
n° 201et p. 506,717; ibid.,p. 506et n.2). Rappelons quele sanctuaire étaiten
ruines à l'époquedePausanias.
4. Fr. Schober,Phokis,diss.,léna, 1924,p. 28 ; Valléedu Spercheios,
p. 194.
5. ParM.Chr.Karouzos,BCH,LII, 1928, p.484; Arch.Anz., 1928,col.576-7 ;
voiraussiG. Klaffenbach, Bericht übereineReisedurch Mittelgriechenland...,
SB Pr.Akad.Wiss.Berlin, PhHKl., 1935(XIX),p. 701.
6. Fr. Schober,Phokis, l. /.,p. 40; P. Amandry, BCH, LXIV-LXV,1940-
1941,p. 272; ErnstMeyer,P. W.,s. v. Stiris, col.2548,11.48-55et2549,11.18-22
(1929); G. Klaffenbach, /./.,p. 704.

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ou de Mégare avec Eleusis1. Chacune des acropoles de Mégare


possède son temple de Déméter, et de même encore Nisaia
(Paus., I, 39, 5 ; 40, 5 ; 42, 6 ; 44, 4). Jusqu'à une époque
récente, il nous fallait nous contenter de croire l'indication
de Pausanias, tandis que les fouilles de M. Threpsiadis nous
ont rendu peut-être le mégaron de Déméter sur la colline
de l'Alcathos2.
De Béotie et de Mégaride, nous passerons en Argolide.
Nous n'oserons pas affirmerque nous suivons ainsi, au rebours,
le chemin que dut suivre Déméter. Car il existait en Attique
des ports d'arrivée sur la côte orientale3,et l'hymne à Déméter
n'exclut pas une pénétration directe4. Mais il est exact aussi
que le port d'Asinè possède des relations avec la Crète et
qu'en Argolide Déméter occupe une place importante et domi-
nante. Déjà à l'Héraeon d'Argos, où le vieux temple date
peut-être de la première moitié du vne siècle5, on rencontre le
site de Prosymna, lieu dit d'après l'une des trois nourrices
d'Héra (Paus., II, 17, 1) ; or le même nom devient Yépiclèse
de Déméter qu'elle partage avec Héra6 dans le Sud-Ouest de
l'Argolide, à Lerne (Paus., II, 37, 1), et la région semble
comme envahie par des sanctuaires où Déméter est venue
s'installer comme pour faire concurrence à Éleusis : d'abord
sur la route de Mycènes à Argos, le sanctuaire de Déméter
Mysia (Paus., II, 18, 3) avec un xoanon de Déméter, de Pluton
et de Corè, qui devait son nom à un certain Mysios qui,
d'après les Argiens, aurait offertl'hospitalité à Déméter7 ;

, pp.195-196.
1. ValléeduSpercheios
2. I. Threpsiadis,Praktika. 1936,pp.52-53; BCH, 1936,p. 461.
3. F. H. Stubbings, BSA, XLII, 1947,1-75,not4.2-9surles Mycéniens en
Attique.
4. Hymne homérique à Démêler, vers123-124et vers125-126, indiquantle
débarquement à Thoricos.Cf.aussiCh.Picard,REG, l. /.,p. 352.
5. P. Amandry, Hesperia,XXI, 1952,p. 273.
6. Ch. Picard, R. H. Rei., XCV, 1927,p. 22b, n. à et jvuvi, îyzv,
387,n. 1.
7. En dépitdeshypothèses d'ARVANiTOPOULOS, Praklika, 1916,pp.88-89,ce
sanctuaire ; à Mycènes
n'a pas été retrouvé même,le groupe desdeux
d'ivoire
femmes et de l'enfant a été exhumépar Wace, en 1939,en contrebas du

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156 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

puis, à Argos même, un sanctuaire de Déméter Pélasgis


(Paus., II, 22, 1) érigé par le fils de Triopas, Pélasgos, qui
avait donné l'hospitalité à Déméter, lors de ses errances à la
recherche de sa fille (Paus., I, 14, 2) : nous en ignorons
l'emplacement1. Près d'Argos encore, au lieu dit Charadra
(cf. le cours d'eau homonyme indiqué par Pausanias, II, 25, 2),
un sanctuaire de Déméter Libyssa2 ; près de Lerne enfin,
on montrait un péribole voisin du cours d'eau Chimarros, et
c'était l'endroit où Pluton avait entraîné Déméter dans les
lieux souterrains ; on célébrait à Lerne des mystères en
l'honneur de Déméter, et son bois sacré se trouvait sur les
pentes du mont Pontinon (Paus., II, 36, 7-8) et dans ce bois
sacré on peut voir une statue de Déméter Prosymna et une
statue de Déméter et de Dionysios, assis (Paus., II, 37, 2).
Le processus, on le voit, rappelle celui d'Éleusis : disparition
de Corè, enlevée par Pluton ; « quête » de Déméter, qui reçoit
l'hospitalité d'un personnage important,non pas d'un roi, mais
d'un vieil habitant de la région, Pélasgos d'après une tradition,
Mysios d'après une autre. L'un des sanctuaires, sur lequel les
fouilles de Lerna ne nous ont pas appris grand chose3, est,
tout comme celui d'Éleusis, placé sur les flancs d'une butte4.

templede l'acropole (A. J. B. Wace,Mycenae , Princeton,1949,fig.101,102d


et 103)et il est éleusinien (Wace,op.laud., p. 86) : cf.aussiCh.Picard,Epi-
tymbion Tsountas , Athènes, 1941,pp.446-451 et pl. I.
1. Pausaniasmentionne aussiun sanctuaire de Déméter là où futenseveli
Pyrrhos ; d'aprèsM. P. Lévêque,Pyrrhos , Paris,1957,p. 628,ce sanctuaire qui
n'a pas été retrouvé, est à distinguer du précédent. Ajoutons que M. Lévêque
n'accepte pasla traditiondutombeau dePyrrhos à Argos. - Enfin, nousneferons
pasétatdel'autelconsacré à Damater Pylaiaqui a été découvertà l'extérieur
du
sanctuaire d'Apollon Pythéen à Argos, surVaspis: W. Vollgraff,Le sanctuaire
d'Apollon Pythéen à Argos, Et.péloponn ., I, p. 27,Paris,1956; ainsiquel'a fait
justement observer M.JeanPouilloux,Ant.class.,XXVI,1957,p. 561,il s'agit
là d'uneDéméter Propylaia ouPylaiaveillant surla porte etnonpasdela Déméter
des Pyles.
2. Polemon, ap. F.H.G., III, p. 119,n° 12.
3. Voircependant la plate-forme dite« montPontin» surla plancheI, a de
Hesperia , XXIII, 1954;M.J.L. Caskeynote,ibid.,p. 3, quel'importance stra-
tégique decettehauteur estmanifeste etil citeunexemple historiquequiremonte
à centvingt-cinq ans,ibid.,n. 3.
4. Voiraussilesremarques de K. Kerényisurces sanctuaires démétriaques
d'Argolide, Eranos- Jahrbuch, 1944,t. XI (paruà Zurich, 1945),p. 42.

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Dans la partie Sud-Est de la presqu'île d'Argolide, nous


atteignons la région d'Hermionè, qui ne compte pas moins de
huit sanctuaires de Déméter ; elle a fourni bon nombre
d'inscriptions qui confirment en partie les indications de
Pausanias ; mais elle n'a pas été encore l'objet d'une explora-
tion systématique, tandis que les recherches partielles étaient
encourageantes. En suivant la route de Trézène à Hermionè,
par les montagnes, on rencontre au village d'Eileioi un
sanctuaire de Déméter et de Corè (Paus., II, 34, 6) ; puis, à la
limite du territoire d'Hermionè, un sanctuaire de Déméter
Thermasia en direction de la mer (Paus., II, 34, 6), sans doute
au cap Thermasia1. En allant par mer du cap Skyllaion à
Hermionè, sur une montagne dominant la mer, et nommée
Bouporthmos, est situé un sanctuaire de Déméter et de sa
fille, près du sanctuaire d'Athèna Promachorma (Paus., II,
34, 8) ; à Hermionè même, il y a un autre sanctuaire de
Déméter Thermasia ; sur la pente du mont Pron, à 65 m
au-dessus du niveau de la mer, qui domine le bras de terre
séparant Hermionè du continent, se trouvait le sanctuaire
de Déméter Chtonia, que l'on situe à l'emplacement de
l'église de Taxiarchis2, donc un peu à l'Ouest d'Hermionè
moderne. En cette région, il semble que Déméter s'est subs-
tituée à une ancienne divinité chtonienne, Hermionè3. A
l'appui de cette hypothèse viendrait le récit local d'une
hospitalité refusée : suivant la tradition d'Hermionè, le temple
de Cérès sur le mont Pron (èm tou IIp&voç, Paus., II, 35, 3)
aurait été bâti par Clyménos et par sa sœur Chtonia, un
nom significatif; mais les Argiens rapportaient que, au
contraire de Mysios, un certain Colotas avait refusé l'hospi-
talité en Argolide à Déméter ; ce geste impie avait été châtié :
tandis que Colotas avait péri dans sa maison incendiée, sa

1. Le Guidebleude1891,t. II, p.206,croyaitpouvoirsituer surla


cesanctuaire
hauteur à doublesommet quiportait unechapelleenruines.
2. Telleestl'identification,
probable, de A. Frickenhauset de W. Müller,
A. Miti., XXXVI,1911,p. 37 etpl. I.
3. VoirAlexander HaggertyKrappe,Hermione , Rhein.Mus.,LXXXIV,
1935,pp. 276-288, et notamment p. 278.

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158 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

fille Chtonia avait été transportée(KofjuaOsïaav)à Hermionè


par Déméter et qu'elle y bâtit le temple (Paus., I. ibid.).
On notera également que Déméter Thermasia doit peut-être
son nom aux sources chaudes qui se trouvent dans la région
et Ton se rappelle qu'aux Thermopyles, du haut de son
sanctuaire d'Anthéla, Déméter surveille en quelque sorte les
sources1. Non loin d'Hermionè, à Trézène, grâce aux fouilles
exécutées jadis par Ph. E. Legrand, nous arrivons à des
précisions plus grandes encore : si l'on se dirige de Trézène
vers Hermionè, après avoir traversé la Trézénie, on rencontre,
en dehors des murs de Trézène, le sanctuaire d'Apollon Phy-
talmios, et, au-dessus, le temple de Déméter Thesmophoros,
que G. Welter a pu situer sur les pentes de la hauteur qui
domine le village de Damala : on a trouvé là, et on trouve
encore, une grande quantité de terres cuites féminines dont
certaines remontentà la findu viie ou au début du vie siècle, la
plupart datant de la période comprise entre les vie-ive siècles2.
Non loin de là, le village de Didymoi, entre Asinè et Hermionè,
échelle d'Hermionè (Paus., II, 36, 4), possédait un sanctuaire
d'Apollon et un autre de Poséidon, et, au-dessus d'eux , un
sanctuaire de Déméter. Le village moderne de Didyma, qui
a conservé le nom ancien, et qui est bâti sur une hauteur, a
fournides dédicaces à Déméter trouvées en l'église de Haghia
Marina3.
Lorsqu'on passe d'Argolide en Arcadie, en suivant la
vieille route, on traverse la plaine de Korytheis où Pausanias

1. L'importance du cultede Déméter dansla région d'Hermionè estattestée


parl'abondance desdédicaces
à la divinité.
Sil'inscription parAd.Wilhelm,
publiée
Anz.Oest.Akad.Wiss., Phil.-Hist. Kl., LXXXV,1948,pp.57-80,relative à une
contestation defrontières,nenousapporte rienpourla topographie dessanctuaires,
ontrouvera desdédicaces à Déméter Chtonia dansles articles
de P. Orlandini,
Arch, class.
j III, 1951,pp.94-98(correction à uneinscr.p. parPeek); J.Marcadé
et P. Lévêque,BOH, LXXIII, 1949,p. 537,onttrouvé, remployée,unedédicace
à Déméter surunebasedestatuedemarbre ; cetextea étérepubliécomme inédit
parMichael Jameson, Hesperia, XXII, 1953,pp.148-154.
2. G. Welter,Troizen undKalaureai , Berlin,1941,pp.20 sqq. et pl.2 et 9.
3. Michael Jameson, ofthePeloponnesos,
Inscriptions , XXII, 1953,
Hesperia
pp. 161-162, et croquistopographique de la planche 49.

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 159

avait vu le temple de Déméter èv Kopoöeuai (Paus., VII,


54, 5) et tout près de là le temple de Dionysos Mystès. Or,
en 1890, Victor Bérard annonçait la découverte « à l'Est
d'Haghiorgitika, près de l'église d'Haghia Trias, à moitié
chemin environ entre le village et le khani que l'expédition de
Morée indique sur la vieille route de Parthénion » de deux
soubassements très ruinés qu'il pouvait identifier,l'un avec
le temple de Déméter - grâce à une statue en calcaire que
l'on peut voir au Musée national d'Athènes1 - et l'autre avec
celui de Dionysos2. Bérard ne donnait pas de précision sur la
situation du sanctuaire, mais, d'après Fougères, il se trouve en
plaine : en fait, il garde le passage entre les deux régions et
telle est bien l'impression de quiconque a parcouru la région.
Avant de parler de l'Arcadie, nous signalerons brièvement
que nous connaissons mal les sanctuaires laconiens où le culte
éleusinien de Déméter est attesté par des inscriptions et par
Pausanias, mais non par la topographie3. Cependant, une
inondation survenue en octobre 1947 a mis au jour, dans la
région du Sud-Ouest de Sparte, les restes d'un Eleusinion à
Kalyvia Sokhas. A vrai dire, l'emplacement en était soup-
çonné depuis longtemps4, là où se trouvait l'église détruite
de Haghia Sophia, mais le cataclysme a révélé qu'il s'agissait
bien du sanctuaire mentionné par Pausanias, III, 20, 5 : il est
situé sur une hauteur au pied du Taygète5.
L'Arcadie était célèbre par ses cultes de Déméter et l'on
a souvent cité le texte d'Hérodote disant (II, 171) que les
rites de Déméter ont été apportés par les filles de Dañaos et

1. Ch.Picard,Manuelď archéologie.La sculpture , I, p. 500,fig.158.


archaïque
2. V. Bérard,BCH, XIV, 1890,pp. 382-384 ; cf.G. Fougères,Mantinée et
VArcadie , Paris,1898,p. 269,n. 5.
orientale
3. VoirO. Kern,Religion derGriechen, op.laud.,I, pp.218-219, etCh.Picard,
REG,1./.,p. 356.
4. H. v. Prott,Ath.Mitt ., XXIX, 1904,pp.8 etsqq.; R. M.Dawkins,BSA,
VI, 1909-1910,pp. 12-14; H. A. Ormerod, ibid.,pp. 64-65.
5. J.M.Cook,Laconia,KalyviaSokhas, BSA, XLV,1950,pp.261-262, avec
desphotographies; le croquisdela page262nedonne, malheureusement, aucune
cotehypsomé trique.Pourlestextesdécouverts etpubliés parM.Cook,voiraussi
M. N. Tod, ibid.,XLVII, 1952,pp. 118sqq.

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160 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

qu'ils se perdirent lors de l'invasion des Doriens, mais que


seuls les Arcadiens les ont conservés, parce qu'ils ne furent
pas contraints à l'émigration. Cependant, l'exploration archéo-
logique de l'Arcadie n'est pas encore achevée et, si elle a fait
de sensibles progrès au cours des dernières années, elle est
loin de nous avoir livré toutes les indications souhaitées.
Pour des sites célèbres et bien étudiés comme Mantinée
ou Mégalopolis, nous ne connaissons pas de sanctuaire de
Déméter : il en existait certes, mais qui ont disparu, et ils
doivent leur perte, soit à leur célébrité, soit au voisinage
des villes modernes, toujours avides de matériaux à bâtir.
Il faut aller en des régions moins fréquentées et moins
connues pour trouver parfois les précisions que nous cher-
chons. Sur la route de Mantinée à Tégée, le bois sacré de
Déméter que Pausanias mentionne (VIII, 10, 2) sur le mont
Alésion, devait, selon G. Fougères, « couronner un des derniers
mamelons de l'Alésion plutôt qu'un des sommets voisins de
Pikermi »x. A l'Est de Mantinée, on voyait un sanctuaire de
Déméter « après » les ruines de Nestáni (Paus., VIII, 8, 1),
dont l'emplacement est discuté. Tandis que Fougères2 parle
d'un « édifice» situé dans la plaine, Curtius plaçait le sanctuaire
sur la hauteur au Sud-Est de Tsipiana. Il semble que M. Ernst
Meyer se range à l'avis de Curtius, car il observe3 des restes
de murs et d'édifices de Nestáni sur un rocher calcaire à pic
près du village moderne de Tsipiana4. Au Nord de Mantinée,

1. G. Fougères,Mantinée..., I. p. 103.En fait,Fougères sembleavoir


hésité: il écrivait,
p. 102,n. 1, que le boispouvaitêtreencaissédansunpetit
ravincoupant l'extrémité de l'Alésion ; maisailleursFougèresestcatégorique :
p. 265,ilparledela présence deDéméter surunecollinedurefuge,- sialéasignifie
« le montdu refuge » ou de 1' « asile»; p.236,il écrit
que Déméter possède le bois
sacrésurla colline; il fautrappeler que Pausanias estnet: A-rçjrrçTpoç iv
"ocXctoç
Tcji"opei.Notonsau passagequele nomdeDéméter esticiassociéà celuideRhéa.
2. L. p. 93.
3. ErnstMeyer,Pausanias , Beschreibung Griechenlands
, tr. allemande et
notes, Zurich,1954,p. 648,n.2 dela p. 381.
4. Le Baedekerde 1910,p. 366,acceptait la même identification
; le Guidebleu
de 1891,pp. 379-380, situeégalement le sanctuairesurunehauteur. Pournous,
notons seulementque,d'aprèsPausanias, Nestániestsituéesur unehauteur :
VIII, 7,4 : "opoç... 'speíma"exovNeaTávrçç.

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 161

le site de Kleitor a été revu par M. Ernst Meyer qui a corrigé1


certaines erreurs de l'étude publiée par G. Papandreou2.
M. Papandreou croit avoir retrouvé, sur un lophiskos au Nord
du théâtre3 le temple de Déméter que Pausanias cite parmi,
les plus remarquables de la cité (Paus., VIII, 21, 3). Si cette
identification ne repose sur aucune découverte épigraphique
ou archéologique et reste sujette à caution, elle peut se
défendre si Ton tient compte de remplacement proposé.
Nous ne savons pas grand chose, en revanche, sur l'Eleusinion
de Phénée (Paus., VIII, 14, 12 et 15, 1), ni sur le Pétroma de
Déméter Kidaria (Paus., VIII, 15, 3). J. Baker Penoyre a
publié une carte de cette région pour accompagner son étude
sur Phénée4, mais les indications topographiques apportées
sont des plus sommaires. Pour le temple de Déméter Thesmia,
bâti au pied du mont Cyllène (Paus., VIII, 15, 4), nous ne
saurions rien dire de plus.
Dans l'Arcadie occidentale, Méthydrion était bâtie sur
une butte, KoXcovòç (Paus., VIII, 36, 1), entre les
rivières Mylaon et Maloitas, et elle était célèbre par la grotte
où Rhéa s'était cachée avant la naissance de Zeus, afin
d'échapper à Cronos. Cette grotte s'ouvre dans le mont
Thaumasion à l'Est de Méthydrion5. De la ville antique,
située au Sud de Vytina, dont l'emplacement avait été
déterminé par Hiller et Lattermann, il ne reste plus grand
chose, sinon les murs de rempart en médiocre état et, à
l'intérieur, au lieu dit Panaghia, les restes d'un temple, et, à
Palati, un autre temple plus petit6. Dans la vallée du Haut-

1. PeloponnesischeWanderungen , Zurich,1939,pp.109-110.
, 1920,pp.96-114.
2. Praktika
3. Voirsonplan,Z.Z.,p. 113,lettre r'.
4. Pheneus andThePheneatike, JHS, XXII, 1902,pp.228sqq.
5. Fr.Hiller vonGaertringen, etH. Lattermann, ArkadischeForschungen,
Abh.Ak.Berlin , 1911,p. 24; E. Meyer,Pausanias , Z./.,p. 659.
6. Planap. Hiller etLattermann, l. Z.,pl.III. Le petittemple parles
fouillé
mêmes savantsà Pétrovouni,prèsdePanaghia, p. 33etpl.IV,fig.7 et8 dela p.33,
seraitun temple d'Hermès. Il ne peutrépondre au temple de Déméter èv"eXei,
citéparPausanias(VIII, 36,4), ainsiqu'a bienvoulumele préciser M. Meyer
- queje remercie vivement - carce templede Déméter estreliéétroitement
de Mégalopolis
au territoire là d'uneDéméter
; s'agirait-il gardiennedepassage?

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162 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

Ladon, Pausanias a vu deux sanctuaires notables : le sanc-


tuaire de Déméter Éleusinienne, dans le voisinage de Tha-
liadès (Paus., VIII, 25, 2) et, au delà de Thelpousa, celui de
Déméter Erinnys, à Ongkeion. Cette région, assez mal connue
encore, et pour laquelle Pausanias n'indique pas moins de
six noms de lieux1, a été l'objet de recherches attentives de la
part de M. Meyer, qui est revenu à plusieurs reprises sur les
lieux et qui a fait connaître les résultats de ses études dans les
Peloponnesische Wanderungen déjà citées, et, dans un ouvrage
plus récent, Neue Peloponnesische Wanderungen2. Le site de
Thaliadès doit être situé au Palaeokastro de Vachlia3, acropole
antique, avec un mur en « pseudo-polygonal » et aussi isodome
dans la région méridionale : il ne sera pas inutile de rappeler,
qu'en 1891, Leonardos avait dégagé là un petit temple avec
pronaos et base de statue de culte. Mais deux autres sites
retiennent l'attention : près de Divritsa, Leonardos avait
exhumé un autre temple orienté Est-Ouest, en style polygonal
grossier, que Frazer alla voir, mais que M. Meyer n'a pu
visiter ; cet édifice était bâti sur un plateau qui surmonte le
fleuve, et Leonardos avait trouvé là, outre des terres cuites
faisant songer à Athéna, une tasse de bronze inscrite avec le
nom de Kora4. Mais M. Meyer a pu voir dans la vallée de
Klivoka, sur un éperon rocheux qui domine le Ladon d'en-
viron 50 m, au lieu dit Paleopolis, les restes d'un édifice
religieux avec ses dépendances. Le site passe pour VEleusinion
et cette croyance, enracinée comme un dogme, a fait donner au
village de Divritsa le nom officielde Démétra5, mais M. Meyer

1. ErnstMeyer,Peloponnesische Wanderungen , p. 60.


2. Zurich, 1957.
3. Peloponnesische Wanderungen , /. p. 73 et pl. XX b (photographie).
4. E. Meyer,Pelop.Wand., p. 76.
5. E. Meyer,Pelop.Wand ., p. 77; on trouve, surla cartede l'État-major
hellénique au 1/1000000,FeuilleDimitsana, le sitede Thaliadès surla plate-
forme dominant le Ladon,au Suddu villagede Vachlia,puis,plusà l'Ouest,le
villagede Divritsa bienplacéun peuavantl'infléchissement du Ladonversle
Sudetau-dessus dunomduvillagel'indication enrouge(= ruines anciennes)de
Eleusinion ; la carteindiquetrèsnettement unéperon rocheux
au Sud-Ouest de
Divritsa avecle signeconventionnel des ruines. Le sanctuaire de Klivokafait
l'objetde la fig.5 desPelop.Wand., p. 76 (plan).

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 163

rejette cette identification, car le site proposé lui paraît trop


éloigné de Thelpousa et les restes antiques peu propres à
avoir supporté des statues hautes de 2 m. Il faut donc, actuel-
lement, nous résigner à ignorer l'emplacement exact de cet
Eleusinion , et il faut le regrettercar, si l'on fait abstraction
des raisons données, les sites proposés convenaient, du point
de vue des emplacements, dominant le cours d'eau. La région
de Thelpousa a été explorée, elle aussi, par M. Meyer, et à
deux reprises1. Le site de Thelpousa est connu : il est placé
dans le Nord-Ouest de Kalliani et il domine la rive gauche du
Ladon2. Le site d'Ongkeion se trouverait dans l'Ouest du
village de Bechru3, où de nombreux restes attestent une
installation antique ; la colline isolée de Haghia Paraskévi4,
répondrait au site du temple d'Apollon Ongkaiatas (Paus.,
VIII, 25, 11) ; elle est parsemée de tessons classiques et
hellénistiques et, un peu au Nord, sur le versant Nord-Ouest
de Bechru, avait été trouvée une tête de lion servant de
chéneau5, qui doit dater de la moitié du ve siècle ; il a été aussi
découvert une statuette de bronze figurant un cheval et un
cavalier. Cependant, M. Meyer, prudemment, n'affirme pas
que les identifications proposées soient certaines6.
Il n'est pas arbitraire de passer de Thelpousa à Phigalie
si l'on se rappelle le jugement de Pausanias (VIII, 42, 1) :
« Tout ce qu'on raconte à Thelpousa des relations entre

1. La Chronique du BCH, LXIII, 1939,p. 301, mentionne des sondages


exécutéspar l'Écolefrançaise d'Athènes dansla régionde Thelpousa et sur
l'acropole, maisilsn'auraient permisde retrouver « que des éléments antiques
rapportés et nonen place», et, notamment, un ihesauros qui,sauferreur, n'a
jamaisétépublié,pas plusquelesrésultats de cetterecherche, annoncés (BCH,
LXIV-LXV,1940-1941, p. 5) comme devant paraîtreprochainement.
2. Voirle croquis établiparM.ErnstMeyer,NeuePelop.Wand .,p. 13,flg.1,
où sontindiquées les fouilles de M. Meyer en 1954; ce croquis corrigeceluiqui
avaitparudanslesPelop.Wand.,p. 95,fig.6.
3. Cevillage,portésurla cartedel'état-major au Nordde Rénési,
hellénique
nefigure passurle croquis deM.Meyer : il fautle placersousla lettre
B, approxi-
mativement.
4. Photographies de M.Meyer,NeuePelop.Wand., pl.6 et 7.
5. Pelop.Wand.,pl. XXVI.
6. Il fautsouhaiterque desfouilles complémentaires, dirigées parM. Meyer,
viennent confirmerces hypothèses et,peut-être, donner d'importants résultats.

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164 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

Poseidon et Déméter, les habitants de Phigalie le croient


aussi. » A trente stades de Phigalie, le mont Elaïon renfermait
une grotte sacrée où s'était retirée Déméter Mélaina , la
Noire , à cause des vêtements qu'elle avait adoptés pour
marquer sa haine contre Poséidon et son chagrin d'avoir
perdu sa fille. Pausanias ajoute (VIII, 42, 4) qu'il y avait là
un xoanon représentant Déméter assise sur une pierre, avec
son vêtement noir, et une tête et une crinière de cheval ;
après l'incendie du xoanon, en bois, les Phigaliens avaient
négligé de le remplacer jusqu'au jour où, la région étant
frappée de stérilité, ils consultèrent l'oracle de Delphes et
s'adressèrent à Onatas d'Egine qui fit une statue de bronze1.
On s'accorde en général à situer cette grotte dans la vallée de la
Néda au lieu dit Stomion tis Panaghias , où la Néda franchit
une sorte de tunnel forméd'éboulis et où l'on a bâti, à l'époque
moderne, une chapelle de la Panaghia2. Mais, selon M. Valmin,
il faudrait chercher ailleurs ; à trente stades de Phigalie, dans
le Sud-Est, « on arrive au sommet de H. Ilias, qui est la
montagne la plus remarquable de toute cette région »3. Et
M. Valmin d'ajouter qu'il y a là une grotte qui n'a jamais été
fouillée. Nous ne pouvons trancher le différend: mais cette
hypothèse a sur l'autre deux avantages : elle présente une
véritable grotte au lieu d'un éboulis ; elle propose une grotte
placée avantageusement dans la montagne. Seule une explo-
ration faite sur place pourra décider.
Dans le passage cité précédemment,Pausanias (VIII, 42, 1)
indiquait l'accord des habitants de Thelpousa et de Phigalie,
sauf sur un point : tandis que les relations de Déméter et de
Poséidon avaient donné naissance à un cheval, selon la
version de Thelpousa, on disait à Phigalie que Déméter avait

1. Ch.Picard,Manuelď archéologie La sculpture


grecque. , t. I, p. 503et t. II,
p. 71.
2. C'estla tradition notamment,
rappelée, parHitzig-Blümner, III, 1,p. 269,
età laquellesontrestésfidèles
le Baedeker
(1910),p. 411,etle Guidebleu(1935),
pp.443-444 ; de mêmeErnstMeyer,Pausanias, p. 661.
3. N. Valmin,Étudestopographiquessurla Messénie ancienne , Lund,1931,
p. 121.

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 165

enfanté une déesse, « celle que les Arcadiens nomment Des-


poina » (Paus., VIII, 42, 2). Pausanias avait déjà parlé de
Despoina ; il avait écrit (VIII, 37, 6) que « de toutes les
divinités, c'est celle que les Arcadiens vénèrent le plus » ;
selon eux, Despoina était fille de Poséidon et de Déméter;
son vrai nom, Pausanias n'a pas osé le divulguer. Elle avait
son sanctuaire à l'Est du mont Lycée, près de Lycosoura, la
ville la plus ancienne. Or, le sanctuaire de cette Despoina est
bien connu depuis les fouilles de la Société archéologique1.
Les recherches de K. Kourouniotis ont établi que le mégaron
situé près du temple de Despoina où sont célébrés les mystères
se trouvait exactement placé comme l'avait décrit Pausanias,
dont les autres indications sur le péribole, le temple et l'autel
ont pu être vérifiées sur place et Kourouniotis a pu écrire2
que l'identité de l'édifice exhumé par la fouille répondait
sans aucune discussion possible à la description de Pausanias.
Nous l'avons rappelé plus haut à propos d'Éleusis, ce mégaron
est placé en avant du temple et il se compose d'une sorte de
plate-forme à laquelle on accède par deux escaliers latéraux3.
Deux précisions nous importent ici : le mégaron est bâti sur
le versant Nord d'une petite colline4, et cette divinité dont
Pausanias s'est refusé à dire le nom nous apparaît comme une
divinité locale de la terre que Déméter n'a pas osé évincer
publiquement ; elle l'a adoptée comme l'une de ses filles, par
la légende que nous avons relatée, mais, en fait, et M. Meyer
l'a fort bien reconnu5, Despoina est une déesse chtonienne à

1. Voirl'articlede ErnstMeyer,P. W.ys. v. Lykosura (1927); un plandu


sanctuairese trouve danslesPraktika ; enfin
, 1896,pl. I (planpartiel) de
l'article
K. Kourouniotis, Arch. Ephim., 1912,Tò èvAuxocroúpa Méyapov ttjçAeaîuoivrjç,
estcapital.
2. L. p. 143,colonne de gauche.
3. Voir,art.cit.de Kourouniotis, p. 147,fig.7,plandel'étatactuel, et ibid.,
p. 148,fig.9 la restauration.
4. Kourouniotis, l. /.,p. 143,col. de gauche: lo (xeyapov xeiTaiémtou
<XVOT(XTOU (iipODÇTY)Ç7UpÒÇ TOVVOCÒV T7)ÇAe(J7r0ÍV7)Çßopsi(X£ xXlTUOÇ TOU
u7iepxei(xévoutou lepou^juxpou XÓ90U, ôcrriç
orjfxepovòvo[xáÇeTai tou TepÇ?)
•PáxiQ...
5. Art.cit.de la P. W.,col.2427.
T.II 11

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166 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

peu près identique à Déméter. Tout porte à croire que les


mystères de Despoina sont semblables à ceux d'Éleusis, si
nous en jugeons d'après l'extérieur, d'après les édifices.
En revenant vers l'Est, au Nord-Ouest de Mégalopolis, le
petit village de Kyparissia, sur la rive droite de l'Alphée,
répond aux ruines de Basilis, déjà détruit à l'époque de
Pausanias (VIII, 29, 4), et où se trouvait un sanctuaire de
Déméter Éleusinienne1. Le site a été vu, avec une acropole,
par A. G. Bather et V. W. Yorke, dont l'étude reste trop
vague à notre gré2.A l'Ouest de Tégée s'étendait la plaine de
Pallante, avec un sanctuaire de Déméter et de Corè, et sur
l'acropole dominant la ville le sanctuaire des déesses pures
dont, ici encore, Pausanias n'a pas révélé le nom (Paus.,
VIII, 44, 5). De la ville ancienne, qui a servi à bâtir la ville
moderne de Tripolis, il ne reste rien, mais des fouillesitaliennes
exécutées en août-septembre 19403 ont exhumé sur l'acropole
située près de Batachi, à 7 km au Sud-Ouest de Tripoli et à
quelques kilomètres à l'Est de la route de Tripoli à Mégalo-
polis, un petit mégaron (10,45 m x 4,40 m)4, du vie-ve siècle,
avec des statuettes dont le type n'a pas été précisé dans le
rapport sommaire de la fouille, et sur le flanc méridional de la
même colline les restes d'un temple (21,40 m x 11,70 m)
orienté vers l'Est et daté du ~ve siècle. L'un des deux édifices
pourrait répondre au temple des Cabires, si l'on accepte
l'hypothèse de Immerwahr, signalée par Hitzig et Blümner5,
et le voisinage des Cabires n'est pas pour effrayerDéméter,
mais le second édifice ? Nous aurions été tenté d'y voir le
temple dont parle Pausanias, mais dans la description il
paraît appartenir à la ville, et il est distinct du lophos où est
installé le sanctuaire des « dieux purs ». Faute de précision,

1. Il estmentionné, ainsiqu'unautel,paruntextedeNicias,danssesArcadica
,
citéparAthénée,XIII, p. 609E = FHG, IV, p. 463,n° 1.
2. JHS, XIII, 1892-1893, pp.227sqq.
3. B.C.H., LXIV-LXV,1940-1941, Chron pp. 241-242; G. Libertini,
Annuario , n. s., I-II, 1939-1940,pp. 225-230.
4. Art.cit.deYAnnuario , p. 226,flg.A.
5. Éd. de Pausanias,III, 1,p. 281.

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 167

nous en sommes réduits aux conjectures et nous devons laisser


le problème sans solution1.
Kern avait déjà observé que les sanctuaires de Déméter en
Messénie sont rares2. La mention trop sèche à notre gré d'un
sanctuaire de Déméter révéré par les habitants de Messène
(Paus., IV, 31, 7) ne nous apprend rien, sinon qu'il est associé
aux Dioscures. Plus au Nord, Strabon indique (VIII, 3,
14 = p. 344) qu'à Pylos de Triphylie, non loin d'un sanctuaire
d'Hadès, un bois sacré de Déméter domine la plaine. La région
a fait l'objet d'une enquête récente menée par M. Ernst
Meyer3.Selon ce savant, le point le plus élevé de la Triphylie,
qui sert de point trigonométrique, se situe entre Alvaena et
Zurtsa (Feuilles Dimitsana et Andritsaena de la carte de
l'état-major hellénique au 1/100000, à 1 219 m4). Cette « pyra-
mide » d'Alvaena est occupée par la chapelle de H. Ilias et
dans le voisinage se voient des restes antiques attestant
l'existence d'un autel. Malgré l'indication de Strabon, M. Meyer
verrait là un autel consacré à Zeus et non pas à Déméter.
Il est vrai que le sanctuaire d'Hadès est situé non pas sur,
mais auprès de la montagne, tandis que le bois sacré de
Déméter domine la plaine. Cette donnée n'est pas inconci-
liable avec un autel de Zeus auprès duquel se serait étendu un
bois sacré qui pouvait couvrir les pentes menant au sommet.
A Lépréon, que l'on s'accorde à placer près de Strovitsi,
Pausanias n'avait rien vu qui soit digne d'intérêt, sinon un
sanctuaire de Déméter, où le temple était construit en briques
crues et sans statues. Rappelons qu'au Paleocastro de Stro-
vitsi - ce qui révèle une hauteur- Doerpfeld avait découvert
les restes d'un temple périptère qu'il n'avait pas identifié,
faute d'inscription5, tandis qu'en 1909 Boite ne trouva plus

1. Le décretd'Argos trouvélorsdes fouilles et publiéparMlleGuarducci,


, n.s.,1941-1943
Annuario (paruen1948),pp.141-151, rienpourla
nenousapporte
topographie.
2. ReligionderGriechen, I, p. 219.
3. NeuePeloponnesische Wanderungen , pp.53 sqq.
donnéparM. Meyer: surla carte,nouslisons1249m.
4. Tel estle chiffre
5. Ath.Mill., XVI, 1891,pp. 259sqq.

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168 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

traces de ruines antiques1. A Olympie, le sanctuaire de


Déméter Chamynè se trouvait à l'extrémité de la colline à
laquelle s'adosse l'un des côtés de l'hippodrome. La Déméter
d'Olympie a fait l'objet d'études approfondies qui ont fait
ressortir son caractère étranger à Olympie2, et il est inutile
d'y insister longuement.
Sur la côte septentrionale du Péloponnèse, en Achaïe,
les sanctuaires de Déméter ont un caractère tout différent,
plutôt aberrant : ils sont peu nombreux et ils ont subi
l'influence plus directe d'Éleusis3. A Patras, il y avait un
sanctuaire de Déméter situé près d'un bois sacré au bord de la
mer (Pausanias, VII, 21, 4) : il n'est plus question, ici, d'une
butte ou d'une hauteur quelconque ; mais il s'agit d'une
source, miraculeuse encore aujourd'hui4. Dans l'Antiquité,
c'était un oracle, comme l'a fort bien rappelé M. Ch. Picard,
où l'on pratiquait la catroptomancie5. On n'oubliera pas que
Triptolème était venu de l'Attique sur le site futurde Patras :
il y avait enseigné à Eumélos l'art de cultiver le blé et celui
de fonder une ville ; Eumélos avait fondé celle qu'il nomma
Aroè, mais le filsd'Eumélos, Anthéas, avait bien mal remercié
leur hôte de ses présents, car il avait profité du sommeil de
Triptolème pour tenter de lui dérober son char : il paya ce
vol de sa vie ; Triptolème ne se montra pas rancunier et en
mémoire d'Anthéas, il fonda avec Eumélos la ville d'Anthéia.

1. Cf.F. W. Waldbank,A historical Commentary onPolgbius , Oxford, 1957,


p.529,quidonne la bibliographie
récente; yajouter Jerome Sperling, Explorations
inElis1939,A.J.A. , XLVI,1942,p. 83,n° 19etp. 86,n°37,insiste surl'impor-
tancedel'acropole anciennevoisinede Strovitsi.
2. R. Vallois, R.E.A.,XXVIII, 1926,pp.305-322;cf.Gh.Picard,R.E.G.,
/./.,pp.356-358. O. Kern,Religion..., I, p. 219,n'admet pasj'origine crétoisede
cetteDéméter ; il voiten elleunevieilledivinité chtonienne,indigène, qui s'est
confondue ensuite avecDéméter.
3. Surl'origine desAchéens et surles traitscaractéristiques de leurscités,
voirJ. K. Anderson,B.S.A., XLIX, 1954,pp. 72-92: A Topographical and
HistoricalStudy ofAchaea.
4. Ce doitêtrela sourcede Saint-André, et O. Rubensohn, Alh.Mitt.,20,
1895,pp.360-367, y voituneDéméter guérisseuse ; voiraussiO. Kern,Religion ,
/./.,p. 220et n. 1.
5. Ch. Picard,R. H. Rei., CXXII, 1940,pp. 102-124 : Déméter, puissance
oraculaire,et notamment pp. 109-110.

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 169

Tout ce récit, nous le devons à Pausanias (VII, 18, 2) qui a


compilé des traditions locales ou érudites1. Plus à l'Est, à
Aegioîi, Pausanias signale le sanctuaire de Déméter et de
Corè (VII, 24, 1) et, après avoir expliqué le surnom de Zeus
Homagyrios, il ajoute que Déméter est Panachéenne (ibid., 3),
non sans manquer de rapprocher (ibid.) le synédrion des
Achéens, qui a son siège à Aegion, de celui des Amphictions
qui se réunit à Delphes et aux Thermopyles : il ne paraîtra
pas très téméraire d'attribuer à la Déméter d'Aegion un rôle
comparable à celui qu'elle joue à Anthéla. Enfin, suivant sa
description dans le sens Ouest-Est, Pausanias cite le temple
de Déméter à Boura (VII, 25, 8), non sans préciser que Boura
est située sur une montagne, et qu'elle possède aussi un
temple d'Aphrodite et de Dionysos, et un autre d'Eileithyie.
Le site de Boura, qui fit l'objet de discussions nombreuses, a
été maintenant retrouvé, au Sud de Diakophto, par M. Ernst
Meyer2,et ses recherches de 1954 lui ont permis de compléter
ses observations3. M. Meyer évalue, notamment, à 576 m
l'altitude de la colline où était établie Boura, mais il n'a pas
réussi à identifier les restes anciens, trop rares, qu'il a pu
relever4. La dernière des cités d'Achaïe est celle de Pellène,
bâtie sur une hauteur, et appartient aujourd'hui au nome
d'Argolide-Corinthie et non plus à celui d'Achaïe5, et Pausa-
nias nous signale, à 60 stades de Pellène, le sanctuaire de

1. OttoRegenbogen, P. W., Suppl.VIII , s. v. Pausanias , col. 1032-1033


(1956).
2. Pelop.Wanderungen , pp. 133sqq.
3.NeuePelop.Wanderungen , pp.81-85.M.J.K. Anderson quid abordn avait
pasaccepté la conclusionde M.Meyer, rangéà sonavis: B.S.A.,
s'estmaintenant
XLVIII, 1953,p. 154et n. 3.
4. Voirsonplan,NeuePelop.Wand., pl.VI,quiannuleceluidesPelop.wana.,
pl.X ; voiribid.,pp.81-85.M.Meyer a bienvoulumepréciser- etje l'enremercie
denouveau trèsvivement - quela recherche étaitrendue
archéologique à
difficile
Boura(auj. Kastri)parcequele siten'estguèrehabitéque pardesfemmes, des
enfants et desvieillards,et il estpratiquement d'y trouver
impossible la main-
d'œuvre nécessaireà desfouilles. Rappelons la donnéeinexacte de Strabon sur
Boura(VIII, 7, 5 = p. 386)qui auraitétéengloutie parla merà la suited'un
tremblement deterre : voirà ce sujetE. Meyer,NeuePelop.Wand., p. 85etn. 1.
5. La remarque, intéressante, estde J. K. Anderson, ts.b.A.,XL.1X,iy&4,
p. 74.

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170 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

Déméter Mysia (Paus., VII, 27, 9) : un bois sacré avec une


source abondante ; les fêtes en l'honneur de Déméter y durent
sept jours, et le soir du troisième les hommes sont exclus du
sanctuaire, ainsi que tous les animaux mâles, pour n'y être
admis de nouveau que le lendemain matin. L'emplacement
du sanctuaire est inconnu : il serait situé au Sud, dans la
région de Trikkala1. Ce culte de Déméter Mysia sera rapproché
de celui que nous avons rencontré en Argolide.
La ville de Sicyone, le fait est bien connu, a été rebâtie sur
une acropole par Démétrios Poliorcète (Paus., II, 7, 1) et on
rencontre, en descendant vers la plaine, le sanctuaire de
Déméter qui fut fondé par Plemnaios (Paus., II, 11, 2). Nous
ignorons son emplacement, mais il est intéressant de noter
qu'aussitôt après avoir mentionné ce sanctuaire, Pausanias
indique celui d'Apollon Carneios, « un peu au-dessous de celui
qu'Adraste avait bâti à Héra ». En racontant l'histoire de
Sicyone, Pausanias avait indiqué que l'ancienne ville avait été
fondée par Aegialeus, d'où son nom de Aegialéia (Paus.,
VII, 5, 5). Or, Déméter était apparue à Plemnaios, l'un de ses
descendants, et elle avait sauvé de la mort l'un de ses fils
nouveau-né (Paus., V, 8). Cette anecdote expliquerait la
fondation du sanctuaire de Déméter, par une reconnaissance
que Plemnaios devait bien à la déesse. Mais la présence, dans
le voisinage, du sanctuaire d'Héra, atteste ici encore la rivalité
d'Héra et de Déméter, Héra étant la vieille déesse achéenne,
comme l'a rappelé M. Ch. Picard2. Entre Sicyone et Phlionte,
par la route la plus directe, et à 12 stades à gauche de la route,
on rencontrait le bois sacré de Pyraea où était installé un
sanctuaire de Déméter et de Corè (Paus., II, 11, 3) qui présen-
tait deux particularités : d'abord on y avait dressé des statues
de Dionysos, de Déméter et de Corè, dont seuls les visages
étaient visibles - ce qui rappelle quelque peu les statues de
Scolos émergeant à mi-hauteur ; ensuite, on y célébrait des

1. C'estl'hypothèse de Hitzig-Blumner, par Ernst


II, 2, p. 846,reprise
Meyer,Pausanias, p. 378,1.
2. Rev.archéol.
, 1932,I, pp.226-227; p. 155.
ci-dessus,

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DÉMÉTER, DÉESSE ACROPOLITAINE 171

mystères où les hommes et les femmes étaient séparés1. Mais


nous ignorons tout de l'emplacement de ces sanctuaires.
La ville de Phlionte nous paraît avoir occupé une place
à part, et c'est pourquoi nous l'avons laissée de côté, en parlant
de l'Argolide. Pausanias nous dit qu'il y avait sur l'acropole
de Phlionte un sanctuaire de Déméter avec un temple et des
statues de Déméter et de Cérès (Paus., II, 12, 5) ; en descen-
dant de l'acropole, sous le temple d'Asclépios, se trouvait le
théâtre et non loin de là un autre sanctuaire de Déméter.
Les fouilles de . 1892 auraient permis de retrouver l'emplace-
ment du temple de Déméter au lieu dit To Palati 2, mais les
fouilles exécutées en 1924 n'ont guère confirmé ces données
optimistes. Tout au plus peut-on supposer qu'aurait été
retrouvée la fondation d'une construction archaïque sur le
plateau supérieur, avec une centaine de figurines de terres
cuites3. Non loin de Phlionte, un autre sanctuaire à Céléai,
où l'on célébrait tous les quatre ans les mystères de Déméter
(Paus., II, 14, 1). Ces deux sanctuaires étaient étroitementliés,
non seulement entre eux, mais avec Éleusis. Pausanias nous
raconte en effet que le premier habitant de Phlionte, Aras;
un autochtone, avait fondé une ville, Arantia, sur une colline;
Arantinè, peu éloignée de celle où s'élève Phlious. La ville
actuelle devait son nom à Phlias, fils d'Araithyréa, elle-même
fille d'Aras. Les anciens habitants avaient été chassés lors
du retour des Héraclides, mais le souvenir des héros fonda-
teurs s'était si bien conservé qu'avant de célébrer les mystères,

1. Cf.lesremarques de Ch.Picard,Rev.arch., I. pp.227-228.


2. HenryS. Washington, A.J.A. , XXVII, 1923,pp. 438-446: Excavations
at Phliusin 1892(p. 444).L'étudede A. G. Russel,Ann.Arch,andAnthrop .,
XI, 1924,37-47,Thetopography ofPhliusandthePhliasian plain, nefournitrien
surle sujetqui nousoccupe.
3. Renseignements empruntés à la Chronique, B.C.H., XLVIII, 1924,p. 464;
deG.W.Blegen,Excavations
l'article at Phlius,1924,ArtandArchaeology , XX,
pp.23-35, nousestdemeuré inaccessible.Lesinscriptions découvertesen1924ont
étépubliées parR. L. Scranton,Hesperia , V, 1936,pp. 235-246 (y ajouterles
remarques de G.A. Stamires, Hesperia, XXII, 1953,pp.57-58), et nefournissent
pas d'indicationssurle sujetqui nousoccupe.Voirenfin ErnstMeyer,P. W.,
s. v. Phleius(1941),col.275,1. 63 sqq.

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172 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

les habitants de Phlionte ne manquaient pas d'invoquer1


d'abord Aras et ses descendants. Il faut sans doute voir en
cet Aras, dont Pausanias fait un contemporain de Prométhée
(II, 14, 4), un vieux héros agraire, dépossédé par Déméter2.
Mais les Phliasiens avaient imaginé une autre explication.
A côté du tombeau d'Aras se trouvait celui de Dysaulès, qui
aurait institué les mystères de Géléai : ainsi les deux fonda-
teurs, dont l'un était antérieur à l'autre3, reposaient côte à
côte (Paus., II, 12, 5 et 14, 4). Mais ce Dysaulès, qu'était-il
au juste ? Le frèrede Céléos, et il aurait été chassé d'Éleusis.
Pausanias cite cette exégèse pour la rejeter, en invoquant,
notamment, YHymne à Déméter qui ne parle pas de Dysaulès
(II, 14, 3 = Hymne à Dém., 474 sqq.). Il l'avait attribué
(I, 14, 3), et sans dissimuler son scepticisme, à une tradition
orphique4 !
Si nous quittons la Grèce propre pour l'archipel, nous
serons conduits à des remarques analogues sur l'emplacement
des sanctuaires démétriaques. Et tout d'abord à Paros,
nommée dans VHymne homérique (v. 491). Le sanctuaire de
Déméter Thesmophoros à Paros était, selon Hérodote (VI,
134), un mégaron èizì tòv xoXcovòvtòv rcpòttjç toXioç sóvtoc,
protégé par une barrière ; on connaît la mésaventure de
Miltiade qui voulut y pénétrer,alors qu'il était naturellement
interdit aux hommes, et comment il en fut cruellement
puni5. On objectera que le sanctuaire n'a pas encore été
découvert; il est vrai, mais le détail concret rapporté par
Hérodote n'a pas été inventé, et c'est ce qui nous importe.

1. Je supposeque c'estparlapsusque M. LouisRobertqui citele texte


(Hellenica,V, 1948,p. 14etn.2) traduit xaXouatv par« oninvitait
»; voirl'expli-
cationde Hitzig-Blümner, I, 2, p. 545; O. Kern a bientraduit,
Religion...,I,
211: anriefen (anrufen et nonpas : einladen ).
2. Gh.Picard,R. H. Rei XGV,1927,p. 231.
3. La remarque estde Pausaniaslui-même, II, 14,4.
4. Surce personnage de Dysaulès, au rôleplutôtscabreux,cf.Ch. Picard,
Congrès ďhist.duchristianisme , avril1927= R. H. Rei.,XCV,1927,pp.220-255,
L'épisodede Baubôdansles mystères d'Éleusis,et notamment pp. 228-231.
5. Ch. Picard,Rev.arch ., 1950,II, p. 124.Récemment, O. Rubensohna
reprisla question,
Jahrb.,70,1955,pp.28sqq.; ila notéledétaildumégaron surla
hauteur, maissansentirer lesconséquences.

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 173

De Paros, nous passons à une île qui lui est apparentée, à


Thasos, où Cléobée apporta la première de Paros les mystères
de Déméter (Paus., X, 28, 3)1. Déméter semble bien avoir eu
à Thasos un sanctuaire hors les murs, établi sur une petite
éminence, à Archouda, dans l'Ouest de l'ancienne ville de
Thasos, ainsi que l'avait supposé dès 1913 M. Ch. Picard2.
Dans les Cyclades méridionales, nous mentionnerons,sans
nous y attarder, la grotte de Déméter et de Corè à Théra à
l'extrémité Nord de l'ancienne ville, auprès du lieu dit Christo3.
L'île de Cos possédait plusieurs et non pas un seul sanc-
tuaire de Déméter, ainsi que l'ont établi les fouilles italiennes.
En effet,elles nous en ont fait connaître un dans le dème de
Haléis, 'o "AXeiç, là où précisément étaient célébrées les
Thalysies (Théocrite, VII) ; un second se trouvait dans le
dème d'Isthmos dans la partie Sud de l'île : là s'élevait un
temple dorique in antis qui n'est pas antérieur au ive siècle,
tandis que le précédent semble avoir été rudimentaire ; près
du second, à Chiparissi, ont été exhumés en 1929 un sanctuaire
à cella rectangulaire avec de belles sculptures, enfin un dernier
à Cos même, près de l'église Sainte-Anne, avec des terres
cuites votives4. D'après les cartes et les photographies, tous

1. VoiraussiArchiloque, Fragments , éd.Fr.Lasserreettrad.André Bonnard,


Paris,1958,p. xi etpp.78-79.- Nousnedissimulons pas que le Thesmophoron
de Délosest situéenplaine: cf.R. Vallois, B.C.H., LUI, 1929,250-278, et
notamment 271,277; du même, Architecture à Délos, I, Paris,1944,
hellénique...
pp.77et140sqq.; orilprésente, pourle plan,desanalogies aveccertains locaux
des palaisachéménides (« Tatchara» de Persépolis), et M. Ch.Picard suppose
quel'édifice a reçu1'« appui»du MèdeDatislorsdela première guerre médique
(B.A.,1952,I, 108),ce qui expliquerait l'exception.
2. C.R.A.I., 1913,pp.365-368 ; voiraussi,du même, Monuments Piot, XXXII,
1932,p. 24 etRev.arch.,1950,II, p. 125; J. Pouilloux,B.C.!!., LXXV,1951,
pp.90-96et fig.2 et Recherches surVhisloire etlescultesde Thasos , I, Paris,1954,
p. 25etp. 330etn.3.
3. Voirla publication Thera...I, Berlin, 1899,pp. 200sqq.; pourunecarte
commode, il nousserapermis de renvoyer au Guidebleu , éd. de 1935,entreles
pages522et523.
4. VoirA. Neppi-Modona, Memorie Ist.archeol.Rodi, I, Rhodes, 1933; L'Isola
di Coonell'Antichità , pp.23,52 et n. 1, p. 96; Laurenzi,ClaraRhodos
classica ,
V,2, Rhodes, 1932,pp.157sqq.et,dumême, Historia,V,p.610: Chiparissi, pp.623-
625: Isthmos et la fig.16,p. 624,montrant la situationdu temple de Déméter.

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174 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

ces sanctuaires sont situés sur des hauteurs ou à flanc de côte.


En Asie Mineure, deux sanctuaires, entre autres, sont
célèbres, et leur emplacement bien établi répond exactement
aux exigences de YHymne homérique*. A Priène d'abord, où le
sanctuaire de Déméter et de Corè se trouve à la limite de la
zone habitée, donc un peu à l'écart, sur un éperon rocheux,
dominant peut-être des pentes boisées, et Fon en découvre
un panorama superbe sur la plaine2. A Pergame, le temple
de Déméter, qui date du 111esiècle av. J.-C., est bâti, lui aussi,
dans la partie inférieurede l'acropole où il occupe une place à
part, mais dominante3.
Nous passerons enfin dans l'Occident hellénique, en cette
Sicile où Déméter recevait un culte particulier (Diodore, V,
4-5). Les fouilles ont montré là que les sanctuaires de Déméter
occupent toujours des emplacements bien en vue, sur des
hauteurs. A Henna, où, au témoignage de Cicéron4, et de
Diodore (V, 3)5, Gérés avait un temple pulcherrimum et
magnificentissimum,Orsi avait découvert, au pied de la
fameuse Rocca di Cerere une dédicace incomplète6, que
M. Vollgraff a récemment proposé de restituer7,et sa resti-
tution semble confirméepar l'inscription publiée par M. Ber-
nabo Brea, qui nomme une prêtresse de Cérès8. A Agrigente,

1. Unrelevé desnombreux d'AsieMineure,


sanctuaires a étéfait: Arch.
Jahrb.,
46, 1931,Ariz.,col.430,flg.3.
2. Th.WiegandetH. Schräder,Prient, 1904,pp.147-163.
Berlin, Cf.,notam-
ment,p. 147: « Ein steiler, kahlerFels...erhebtsichhieram Fussedervom
Burgfelsen sichsteilabsenkenden wüsten »
Steinholde...
3. Les articlesde W. Doerpfeld sontles seulespublications parues: Ath.
Mill.,XXXV, 1910,pp. 355-384avec pl. XV-XVII; ibid.,XXXVII, 1912,
pp.235-256 etpp.351sqq.,avecpl.XIX-XX;voiraussiAlt.vonPergamon, I, 2,
176et fig.21 et pl. III ; EstherV. Hansen,TheAttalids ofPergamon, Ithaca,
N. Y., 1947,p. 223,n. 15.
4. Verrines,IV (DeSignis),XLVIII,107: «...estlocoperexcelsoatqueedito... »
(cf.aussi§ 108).On saitque Cicéron aux Mystères
s'étaitfaitinitier d'Ëleusis,
De Legibus , II, 14,36.
5. La source desinformationsdeCicéronetdeDiodore pourraitbienêtreTimée.
6. Not.Scavi,1931,pp.379sqq.
7. Mém.prés.Acad.Inscr.B. L. par divers savants, XIV, 2, Paris,1951,
pp.350sqq.
8. Not.Scavi,I, 1947,pp.241-242.

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 175

Déméter possédait un temple construit sur le versant méri-


dional de la Rupe Atenea, à l'emplacement duquel s'élève
aujourd'hui l'église S. Biagio1. A Sélinonte, non seulement
Déméter Malophoros possède son sanctuaire hors les murs,
sûr la colline dominant la petite rivière Modiono à l'Ouest de
l'acropole, avec un mur de péribole dont la hauteur dissimule
les mystères aux yeux des profanes2,mais encore un temple
lui est consacré sur l'acropole, car il semble bien que telle soit
la destination du temple C3. A Gela, les fouilles de M. Ada-
mesteanu ont mis au jour, au Nord de la ville, sur la petite
colline de la Madonna dell'Alemanna, un grand sanctuaire
extra urbem certainement consacré à Déméter4. Plus récem-
ment encore, les fouilles américaines qui ont découvert le site
de Morgantinè (aujourd'hui Serra Orlando), ont exhumé le
sanctuaire de Déméter, dûment identifié, sur une colline5.
Ainsi en Sicile, plus qu'ailleurs dans le monde hellénique,
il semble que ce soit presque une règle formelle: les sanctuaires
consacrés à Déméter sont placés sur des lieux élevés, en tout
cas bien en vue sur des collines ou à flanc de montagne.
Notre enquête n'est pas exhaustive ; elle ne voulait pas
l'être, « longum est et non necessarium commemorare quae
apud quosque visenda sint tota Asia et Graecia », serions-nous
tenté de répéter6. Elle a réuni un grand nombre d'exemples,
sans dissimuler nos ignorances. On pourrait pourtant lui
reprocher de n'avoir, en Attique, étudié que le seul site
d'Éleusis. Il faut donc parler d'Athènes qui possédait un
Eleusinion situé au-dessus de l'Ennéacrounos (Paus., I, 14, 1),

delleSiciliaAntica
1. B. Pace,Artee civiltà , II, Milano-Genova,1938,p. 226,
flg.13etp. 227.P. Marconi, Agrigento, Rome,1949; voirla reproduction dubloc
diagramme de Lehmann, ap. E. Kirsten,Die griechische Polis...,1956,p. 53,
flg.3.
2. MariaSantangelo,Selinunte , Rome,1952,pp.86 sqq.
3. Gh.Picard,Rev.arch ., 1936,II, p. 44 et MariaSantangelo,I. I., p. 68.
4. Adamesteanu, Not.Sc., sér.VIII, vol. X, 1956,p. 203 (plann° 28) et
pp.382-392 ; cf.aussiRev.arch.,1957,I, pp.29-30.
5. ErikSjoqvist,A.J.A.,62,1958,pp.158-160 etpl.31,flg.17; cf.Rev.arch.,
1958,I, p. 234.
6. CicÉRON, De signis,LX, 135.

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176 REVUE ARCHÉOLOGIQUE

d'après Pausanias, retenu par un songe d'en dire davantage.


L'indication de Pausanias soulève une question semper vexata,
et surtout depuis que les archéologues américains, après les
fouilles de l'agora, situent l'Héphaistion au Colonos agoraios
qui domine l'agora. Il ne nous plaît pas de reprendre ici la
controverse ni de considérer tout le problème, ce qu'il faudra
bien faire un jour. Tout récemment, M. R. E. Wycherley,
dans l'un des volumes de lá publication des fouilles de l'agora1,
a estimé que l'Eleusinion et l'Ennéacrounos sont liés. Liés, si
l'on veut. Or, l'emplacement de l'Ennéacrounos n'est pas
déterminé. Il est à peine besoin de rappeler qu'elle a été « pro-
menée » à travers l'agora : les plans successifs publiés dans
Hesperia le montrent clairement2. Il n'est pas surprenant que
son emplacement n'ait pas été découvert du premier coup de
pioche, et il serait aussi absurde que discourtois d'ironiser sur
des hypothèses successives. Mais les affirmationscatégoriques
présentent quelque danger. Actuellement, il serait « clair »
que l'Eleusinion était situé au Sud-Est de l'agora, et plus
exactement en dehors de l'agora, dans la région de l'église
Hypapanti3. Cette doctrine est en passe de devenir officielle,
car nous en retrouvons l'écho dans l'article de M. E. Van-
derpool sur l'itinéraire suivi par Pausanias ; ce savant écrit :
« The archaeological evidence forthe location of the Eleusinion
is thus conclusive4. » M. Wycherley en est moins sûr et
reconnaît qu'il y a là un problème non résolu. Pour nous, nous
nous étonnons que VEleusinion ait été si mal placé, à Athènes,
alors que les sanctuaires de Déméter occupent en général des

1. TheAthenian agora , II : Litterary


andEpigraphical testimonia, Princeton,
1957; voirpp.77,sub, n° 198.
2. Elleest.figurée
au Sud-Ouest del'agora,
donctoutà l'opposé del'Eleusinion
(selonlesarchéologuesaméricains) surlesplans: IX, 1940,pl.I ; ibid.,XVI,1947,
pl.XLIX ; ibid.,XVII,1948,fig.1 ; ibid.,XX,1951,p.47,fig.1; ibid.,XXI, 1952,
p. 87,fig.1. Elledisparaît desplans,pourn'êtreplusque « S W Fountain »,à
partirdut.XXII, 1953,pl.10et11(voiribid.,pp.34-35); voiraussiXXIII, 1954,
pp. 34-35(fig.1 et 2) et p. 37; voirsurcettefontaine, XXIV,1955,pp. 52-54.
3. Hesperia, IX, 1940,pp. 268 sqq,; voirdéjà VIII, 1939,pp. 207-212, et
surtout p. 211,haut.
4. Hesperia, XVIII, 1949,p. 134.De même, M. OscarBroneerétaitaussi
afilrmatif, XI, 1942,p. 261.
Hesperia,

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DEMETER, DÉESSE ACROPOLITAINE 177

emplacements bien en vue, et nous ne nous expliquons pas


cette exception1.
Une dernière question se pose, à laquelle nous pouvons
répondre brièvement.
D'où vient que les sanctuaires de Déméter soient en
général placés sur des hauteurs ? Point n'est besoin de longs
commentaires puisque VHymne homérique nous fournit les
éléments de la réponse. Il a indiqué en plusieurs passages
(v. 60, 75, 442) que Déméter est la fillede Rhéa et qu'elle arrive
de Crète (v. 123). En cette Crète, Rhéa est honorée comme
(jlyjtyjp et elle a gardé certaines des qualités de la Grande
opeiY)2,
Mère, déesse des montagnes, mais non des sommets3, tout de
même qu'elle a exercé à son tour une influence sur Déméter.
Ainsi la prédilection de Déméter pour les hauteurs s'inscrit
dans le sol même. A cette tradition, bien établie chez les
Grecs, les Romains étaient restés fidèles, comme en témoigne
le récit d'Apulée4. Dans son errance à la recherchede Cupidon,
Psyché aperçoit un temple « in ardui montis vertice » ; à cette
vue, elle espère soudain avoir découvert la retraitede son époux
divin et elle s'empresse de gravir les hautes crêtes, « naviter
emensis celsioribus jugis ». Las, c'était la demeure de Cérès...
Y. Béquignon.

1. Surce point,nousmarquons notredésaccord avecM. J.Travlos- dont


estd'ailleurs
l'article excellent - , lorsqu'il
acceptesansréserve l'hypothèse améri-
caine,Arch.Ephèm ., 1950-1951, p. 14,n. 4. - Il y auraitd'autres arguments :
n'est-cepasM.Broneer,art.cit.,quireconnaît, p. 263: « ... thewholeEleusinion
was certainly required to furnish spaceforthecelebrations
sufficient », ce qui
n'empêche pas M. Broneer d'écarter, commesans fondement (sic) la théorie
adverse de M. Ch.Picard.- Et la statuette de Déméter publiéeparle regretté
G. Oikonomos, B.C.H., LXX, 1946,pp. 402-417, qui n'avaitcertainement pas
beaucoup voyagé(voirlesremarques d'OiKONOMOs, l. /.,p. 414,dernier alinéa,et
p. 416,avant-dernier alinéa)?
2. Ëpithèterappelée à justetitreparO. Kern,Religion..., I, p. 217; cf.aussi
Ch. Picard,R.E.G., l. /.,p. 339; voirEuripide,Les Crétois , fr.472,vers13
(A. Nauck,Fr.,2e éd., Leipzig,1926).La dissertation, périmée et médiocre,
deC. Albers,De diisinlotiseditis cullisapudGraecos , Leyde,1901,nementionne
pasDéméter etaffirme quejamaisRhéanefutl'objetd'uncultesurlesmontagnes
de la partdes Grecs!
3. Voirles remarques de O. Kern,l. p. 34.
4. Métamorphoses, VI, 1.

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