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LE CONSEIL D'ETAT. SECTION DU CONTENTIEUX.

4ème et 1ère sous-sections réunies Sur le rapport de la 4ème sous-section

M. MULLER
Nº 188586 9 avril 1999

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 23 juin et 23 octobre 1997 au


secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe MULLER, demeurant au lieu-
dit `Le Champ` à Saint-Régis-du-Coin (42660) ; M. MULLER demande au Conseil d'Etat :

1º) d'annuler la décision du 20 mars 1997 par laquelle la chambre supérieure de discipline du Conseil
supérieur de l'ordre des vétérinaires a confirmé la sanction de suspension du droit d'exercer la
profession de vétérinaire pendant une durée de quatre mois que lui a infligée la chambre de discipline du
conseil régional de l'ordre de Bretagne et a mis à sa charge les frais de l'instance ;

2º) de condamner le Conseil supérieur de l'ordre des vétérinaires à lui verser la somme de 15 000 F au
titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique, notamment ses articles L. 610 à L. 613 et L. 617-6 ;

Vu le décret nº 90-997 du 8 novembre 1990 ;

Vu le décret nº 92-157 du 19 février 1992 ;

Vu l'arrêté du 21 novembre 1991 ;

Vu l'ordonnance nº 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret nº 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi nº 87-
1127 du 31 décembre 1987 ;

Considérant que l'article 4 du décret susvisé du 8 novembre 1990 relatif à l'ordre des vétérinaires prévoit
que le Conseil supérieur de l'ordre des vétérinaires `élabore son propre statut, celui des conseils
régionaux de l'ordre et des chambres de discipline et prend tous règlements relatifs à la discipline de la
profession./ Ces statuts et règlements deviennent exécutoires deux mois après leur dépôt au ministère de
l'agriculture et sauf opposition du ministre (...)` ; qu'il résulte des pièces du dossier soumis au juge du
fond que le règlement intérieur, sur le fondement duquel a été engagée la procédure de sanction contre
M. MULLER, a été déposé au ministère de l'agriculture le 15 février 1984 et n'a pas rencontré
d'opposition de la part du ministre ; que ni le décret du 8 novembre 1990 ni aucun autre texte de même
valeur n'exigeait que ce règlement fût pris sous la forme d'un règlement d'administration publique ;
qu'ainsi le règlement intérieur était devenu exécutoire le 15 avril 1984 ; que, par suite, le moyen tiré de la
nullité de la procédure engagée à l'encontre de M. MULLER, en raison de l'absence de force exécutoire
du règlement intérieur de l'ordre des vétérinaires, doit être rejeté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 53 du décret susvisé du 19 février 1992 portant code de
déontologie des vétérinaires : `Outre les sanctions pénales prévues à cet effet, la violation des
dispositions du code de la santé publique relatives à l'exercice de la pharmacie par les vétérinaires peut
donner lieu à des sanctions disciplinaires` ; qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 612
du code de la santé publique : `Les groupements reconnus de producteurs, les groupements
professionnels agricoles dont l'action concourt à l'organisation de la production animale et qui justifient
d'un encadrement technique et sanitaire suffisant et d'une activité économique réelle d'une part, les
groupements de défense sanitaire d'autre part, peuvent, s'ils sont agréés à cet effet par arrêté du ministre

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de l'agriculture, acheter aux établissements de préparation, de vente en gros ou de distribution en gros,
détenir et délivrer à leurs membres, pour l'exercice exclusif de leur activité, les médicaments vétérinaires
à l'exclusion de ceux contenant des substances ayant fait l'objet d'obligations particulières au titre de
l'article L. 617-6./ Toutefois, ces groupements peuvent également acheter en gros et détenir ceux des
médicaments contenant des substances visées à l'article L. 617-6 qui figurent sur une liste arrêtée
conjointement par le ministre de la santé et le ministre de l'agriculture et qui sont nécessaires à la mise en
oeuvre des programmes sanitaires d'élevage visés au quatrième alinéa du présent article. Ces produits
sont délivrés aux adhérents du groupement sur présentation d'un ordonnance du vétérinaire du
groupement, qui revêt la forme d'une prescription détaillée, adaptant aux caractéristiques propres de
chaque élevage, le programme sanitaire agréé` ; qu'aux termes de l'article L. 613 du même code :
`L'acquisition, la détention et la délivrance des médicaments détenus par les groupements visés à l'alinéa
1er de l'article L. 612 doivent être faits sous le contrôle d'un docteur vétérinaire ou d'un pharmacien
participant effectivement à la direction technique du groupement. En tous les cas, ce pharmacien ou
docteur vétérinaire est personnellement responsable de l'application des dispositions législatives et
réglementaires concernant les médicaments vétérinaires sans préjudice, le cas échéant, de la
responsabilité solidaire du groupement` ;

Considérant qu'il résulte des dispositions ci-dessus rappelées de l'article L. 612 du code de la santé
publique que le droit pour les groupements professionnels agricoles d'acheter et de détenir des
médicaments vétérinaires contenant des substances mentionnées à l'article L. 617-6 ne leur est ouvert
qu'à la condition que ces médicaments soient inscrits sur une liste spéciale arrêtée conjointement par le
ministre de la santé et par le ministre de l'agriculture et qu'ils soient destinés à la mise en oeuvre de
programmes sanitaires d'élevage approuvés ; que ces mêmes produits ne peuvent être délivrés aux
adhérents que sur prescription du vétérinaire du groupement ; qu'il résulte des constatations des juges du
fond que si les produits antibiotiques achetés par la coopérative Saint-Yvi Cornouaille, qui emploie M.
MULLER en qualité de vétérinaire salarié, figurent parmi les substances mentionnées par l'arrêté
interministériel du 21 novembre 1991 pris en application du deuxième alinéa de l'article L. 612
susmentionné, ils étaient destinés au traitement de vaches laitières non concernées par la mise en oeuvre
du programme sanitaire d'élevage approuvé de cette coopérative ; que, par suite, en estimant que les
dispositions de l'article L. 612 avaient été méconnues et que la responsabilité personnelle de M.
MULLER qui devait contrôler les achats du groupement était engagée sur le fondement de l'article L.
613, la chambre supérieure de discipline du Conseil supérieur de l'ordre des vétérinaires a fait une exacte
application de ces dispositions ;

Considérant que si l'activité de plein exercice de la pharmacie vétérinaire par un docteur vétérinaire lui
permet, en application de l'article L. 610 du code de la santé publique, de préparer, détenir et délivrer
personnellement les médicaments vétérinaires, dans les conditions qu'il prévoit, le manquement à ses
obligations par M. MULLER concerne non des médicaments acquis et détenus par lui mais par la
coopérative Saint-Yvi Cornouaille qui relèvent de l'article L. 612 précité du code de la santé publique ;
qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 610 du code rural est
inopérant ;

Considérant enfin qu'il ne ressort pas des pièces du dossier soumis à la chambre supérieure de discipline
du Conseil national de l'Ordre des vétérinaires que celle-ci aurait dénaturé lesdites pièces en relevant que
la coopérative Saint-Yvi Cornouaille délivrait à ses adhérents les produits litigieux sur simple demande
téléphonique ou message laissé au magasinier, sans prescription du vétérinaire, en méconnaissance de
l'article L. 612 précité du code de la santé publique ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. MULLER n'est pas fondé à demander l'annulation de
la décision du 20 mars 1997 de la chambre supérieure de discipline du Conseil supérieur de l'ordre des
vétérinaires ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle, en tout état de
cause, à ce que le Conseil supérieur de l'ordre des vétérinaires qui n'est pas, dans la présente instance, la
partie perdante soit condamné à verser à M. MULLER la somme qu'il demande au titre des frais engagés
par lui et non compris dans les dépens ;

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DECIDE :

Article 1er : La requête de M. MULLER est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe MULLER, au Conseil supérieur de l'ordre des
vétérinaires et au ministre de l'agriculture et de la pêche.
Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Japiot, Maître des Requêtes, - les
observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. MULLER et de Me Blanc, avocat de la
chambre supérieure de discipline de l'Ordre des vétérinaires, - les conclusions de Mme Roul,
Commissaire du gouvernement ; Président : Mme Aubin.
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