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Il y a cinquante ans, le 16 octobre 1968, les sprinteurs américains Tommie Smith et

John Carlos faisaient scandale en tendant leurs poings gantés de noir sur le podium
de la finale du 200 m des Jeux olympiques de Mexico. Leur geste a connu un écho
planétaire qui leur a coûté très cher. Mis au ban de la société, ils ont été réhabilités
depuis mais leur combat continue.

C’est l’une des photos les plus célèbres du XXe siècle, celle du podium du 200 m des
JO de Mexico, deux poings gantés de noir qui transpercent la nuit olympique, ceux
des athlètes américains Tommie Smith et John Carlos respectivement médaillés d’or
et de bronze sur la distance, ce mercredi 16 octobre 1968.

C’est une photo iconique, car symbole d’un combat qui prend le monde à témoin et
trouve encore, on le lira plus loin, un écho certain cinquante ans plus tard : la lutte
des Afro-américains pour plus d’égalité et de justice dans une Amérique qui n’est pas
encore débarrassée de ses démons d’autrefois. Comme toujours dans ce type
d’événement, tout est affaire de contexte et celui de 1968 est explosif aux États-
Unis : la guerre du Vietnam où les Américains s’enlisent, les campus universitaires où
la contestation s’étend et des tensions raciales toujours vives, exacerbées par
l’assassinat de Martin Luther King le 4 avril, à Memphis.

De Prague à Paris, de Belgrade à Varsovie en passant par Londonderry et Tokyo, une


partie de la planète est atteinte d’une poussée de fièvre en 1968 et Mexico n’est pas
en reste. Dix jours avant l’ouverture des Jeux, programmés du 12 au 27 octobre, les
militaires tirent sur les manifestants place des Trois-Cultures, une répression
sanglante du mouvement étudiant qui fait 44 morts d’après le bilan officiel, mais
environ 300 selon les médias étrangers présents à Mexico, dont la célèbre journaliste
italienne Oriana Fallaci, blessée lors de l’affrontement.

Sur les pistes aussi, ça chauffe en cette année 68 et particulièrement dans le sprint.
Le 20 juin, lors des championnats des États-Unis d’athlétisme à Sacramento, le record
du monde du 100 m est égalé ou battu à cinq reprises en l’espace de deux heures et
demie, une soirée baptisée depuis « The Night of Speed » à laquelle participe le
Français Roger Bambuck bref corecordman du monde avec un temps de 10 secondes
sur 100 m, temps battu un peu plus tard par Jim Hines, Ronnie Ray Smith et Charlie
Greene, tous trois crédités de 9 secondes 9 dixièmes au chronométrage manuel. La
barrière mythique des 10 secondes sur 100 m est franchie pour la première fois !

Un climat électrique

Du coup, la victoire de Tommie Smith sur John Carlos en finale du 200 m (en 20
secondes 3 dixièmes contre 20 secondes 4 dixièmes) passe relativement inaperçue ce
soir-là, car Smith est déjà recordman du monde de la distance depuis 1966, dans un
temps de 20.0 réalisé sur cette même piste du John Hughes Stadium de Sacramento.

Durant une carrière somme toute météorique, celui qui est alors étudiant en
sociologie à l’Université de San José détiendra simultanément entre 1965 et 1968
neuf records du monde individuels ou collectifs [200 mètres et 220 yards avec virage,
200 m et 220 yds en ligne droite, 400 m et 440 yds, relais 4x200 m, 4x220 yds et
4x400 m ; ndlr], la performance la plus époustouflante pour beaucoup de spécialistes
étant ses 200 m et 220 yards en ligne droite bouclés en 19 secondes 5 dixièmes le 7
mai 1966 à San José, soit une demi-seconde de mieux que la précédente marque sur
cette distance rectiligne aujourd’hui tombée en désuétude.

Invincible sur le demi-tour de piste, le grand Tommie (1,91 m) se fait pourtant


devancer et même déposséder de son record du monde du 200 m trois mois plus
tard par John Carlos qui signe, le 12 septembre, un 19.92 (on est passé au
chronométrage électrique au centième de seconde) lors des sélections américaines
pour les Jeux qui se déroulent à Echo Summit, localité de la Sierra Nevada située à 2
249 m d’altitude, un site volontairement haut perché pour préparer au mieux les
athlètes US à l’oxygène raréfié de Mexico City (2 240 m). C’est donc une équipe
américaine d’athlétisme bien préparée – la meilleure de tous les temps dira John
Carlos (vingt-huit médailles dont quinze en or, assorties de huit records du monde
dans la cité aztèque) – qui se présente un mois plus tard à Mexico, mais pas
forcément la plus homogène.

Comme dans le pays, des tensions existent entre les Noirs et certains Blancs de
l’équipe, lesquels sont d’ailleurs totalement absents des épreuves de sprint. L’idée de
boycotter les Jeux en signe de protestation germera un moment dans l’esprit de
quelques-uns, sensibles au discours du mouvement révolutionnaire des Black
Panthers et révoltés aussi par différents événements survenus durant l’année,
notamment l’exclusion de l’université d’El Paso (UTEP) de onze athlètes noirs – dont
le sauteur en longueur Bob Beamon – qui avaient refusé d’affronter les mormons
ségrégationnistes de l’université Brigham Young (BYU), quelques jours après
l’assassinat de Martin Luther King, au mois d’avril. Boycotter les Jeux de Mexico,
Tommie Smith y a déjà pensé avant en rejoignant, dès octobre 1967, l’Olympic
Project for Human Rights fondé par Harry Edwards, un jeune enseignant en sociologie
qu’il a rencontré sur le campus de l’université d’état de San José.

L’action plutôt que le boycott

Ce « projet olympique pour les droits de l’homme » est une organisation destinée à
protester contre la ségrégation et le racisme dans le sport. Elle émet quatre
revendications en particulier : que l’Afrique du Sud et la Rhodésie (futur Zimbabwe)
soient bannies du mouvement olympique, que Mohammed Ali récupère le titre de
champions du monde poids lourd qui lui avait été retiré, qu’Avery Brundage
démissionne de son poste de président du CIO et que davantage d’Afro-américains
soient embauchés comme assistants dans les sports scolaires et universitaires.

Lui-même ancien lanceur de disque et aujourd’hui sociologue reconnu, Harry


Edwards signera d’ailleurs en 1969 The Revolt of the Black Athlete, un ouvrage de
référence dans lequel il fait intervenir Smith et Carlos, mais également le boxeur
Mohammed Ali et le basketteur Kareem Abdul-Jabbar, autres légendes du sport.
Plutôt que de boycotter les Jeux, Smith, Carlos, mais également leur ami Lee Evans,
futur champion olympique sur 400 m, ont une autre idée en tête : se servir de cette
superbe plate-forme que leur offre des JO désormais retransmis en Mondovision
pour exprimer leur colère à la face de la Terre. À condition bien entendu de monter
sur les podiums, ce dont ils ne doutent pas un seul instant.
Envoyé spécial du quotidien L’Équipe à Mexico, lui-même ancien sprinteur
international et futur écrivain, Guy Lagorce est l’un des premiers journalistes à se
douter que quelque chose se trame, comme il le relate a posteriori dans un article du
Monde publié en septembre 2000 : « Les athlètes africains, écrit-il, me préviennent le
premier jour : 'Viens vite au village olympique, il se passe des trucs. D'habitude, c'est
à peine si les Noirs américains nous adressent la parole ; cette année, ils nous
appellent "frères", nous achètent nos boubous, nos colliers, et ils portent tous un
macaron avec écrit dessus "Project for Human Rights "'. »

« Au village, poursuit Guy Lagorce, je vais trouver John Carlos, un sprinter que je
connais bien, et qui me confie : 'Nous allons protester contre le sort fait aux Noirs,
contre l'indignité dans laquelle ils sont tenus aux États-Unis et dans bien d'autres
pays du monde. Les États-Unis d'Amérique n'ont d'uni que le nom, puisque tous les
citoyens ne sont pas traités de la même manière. C'est pourquoi ici, nous ne
représentons pas les États-Unis, mais le peuple noir des États-Unis.' »

« Le discours est ferme, mais calme, continue Guy Lagorce. Pas l'once d'une
excitation. C'est ce qui me frappe le plus. Je demande à Carlos à quel type de
manifestation ils vont se livrer, lui et ses amis. Il sourit et se contente de dire : 'Tu le
verras bien, vous serez des millions à la voir.' »

Au départ de la finale du 200 m pourtant, Tommie Smith n’en mène pas large. Dans
la première demi-finale, John Carlos a réalisé un temps légèrement meilleur que le
sien – 20.12 contre 20.14 –, mais c’est surtout une douleur au niveau de l’aine et du
haut de la cuisse droite survenue une fois passée la ligne d’arrivée de la deuxième
demi-finale qui le tracasse. Il songe même à renoncer avant que son coach, Bud
Winter, le rassure et lui applique des poches de glace sur la zone endolorie. « À la
sortie du virage si je suis indemne, il faudra venir me chercher. Ils peuvent toujours
rêver » se dit-il, comme le raconte l’ancien journaliste à la radio Europe 1, et écrivain,
Pierre-Louis Basse dans 19 secondes 83 centièmes, son essai de 130 pages consacré à
cette seule course et aussi à ses propres souvenirs d’enfant.

Le plus proche d’Usain Bolt

Conforté dans son espoir de conquérir l’or après sa belle demi-finale, en finale John
Carlos part comme un dragster au couloir numéro 4 et sort même assez nettement
en tête du virage à mi-course. Rassuré pour sa part que sa cuisse ait tenu dans la
courbe, Tommie Smith peut alors, comme il l’avait prévu, placer son accélération. Il
est au couloir numéro 3 et a Carlos juste devant lui, en ligne de mire. De sa longue
foulée magnifique, il passe devant son compatriote sans se désunir à 50 m de
l’arrivée et se relève à quinze mètres de la ligne en levant les bras au ciel. Il est
champion olympique !

Désarçonné, John Carlos n’a même pas vu venir l’Australien Peter Norman au couloir
numéro 6, Norman qui le coiffe dans les derniers mètres pour la médaille d’argent en
20 secondes 06 centièmes, chrono qui reste, à ce jour, le record d'Océanie de la
discipline. Carlos devra se contenter du bronze en 20.10. La course a été superbe et
le temps du vainqueur ne l'est pas moins : 19.83, nouveau record du monde !
Immédiatement ou presque va commencer à bruisser la question qui taraudera les
statisticiens durant des décennies : quel temps aurait réalisé Tommie Smith s’il ne
s’était pas relevé à quinze mètres de l’arrivée ? Même le grand spécialiste français de
la technique du sprint Pierre-Jean Vazel, que nous avons joint au téléphone, a du mal
à se prononcer. « C’est difficile à dire au centième près. Mais ça lui a bien fait perdre
entre 10 et 15 centièmes. Donc je pense qu’il était un petit mieux que le record de
Mennea » avance-t-il, par référence aux 19.72 réalisés onze ans plus tard par l’Italien
Pietro Mennea, sur cette même piste de Mexico, le 12 septembre 1979. En
extrapolant un peu, on est donc en droit de penser que Smith aurait couru en 19.70
s’il ne s’était pas relevé et que son record aurait sans doute tenu près d’une trentaine
d’années, sans doute jusqu’aux 19.66 réalisés le 19 juin 1996 à Atlanta par Michael
Johnson, lors des sélections américaines pour les Jeux.

Grand admirateur de Tommie Smith, Pierre-Jean Vazel se laisse même aller, quand
on l’y pousse un peu, au jeu des comparaisons pour estimer : « Oui, on peut le
comparer à Usain Bolt. C’est celui dont il se rapproche le plus. Pas au niveau du
palmarès bien sûr, car Tommie Smith a arrêté de courir à 24 ans. Mais au niveau du
style et de la foulée, oui. Lui et Bolt sont vraiment très proches. » Bolt étant la
référence ultime, l’avis de Pierre-Jean Vazel situe l’athlète et la performance.

Quant à savoir pourquoi Tommie Smith s’est relevé si tôt, il faut revenir au livre 19
secondes 83 centièmes de Pierre-Louis Basse, auquel le champion s’était confié en
décembre 2005, lorsqu’un gymnase à son nom – le premier au monde – avait été
inauguré à Saint-Ouen, en Seine-Saint-Denis, près de Paris. C’est parce qu’en cette
soirée du 16 octobre 1968, Tommie Smith a constamment gardé la ségrégation à
l’esprit. Et cette barrière qui, dans les bus, séparait les Blancs et les Noirs.

« Tiens-toi bien, Pierre, a-t-il avoué à Pierre-Louis Basse ce jour-là à Saint-Ouen. J’y
pensais pendant la course. J’y pensais au départ, quand je me suis relevé. J’y pensais
dans le virage, avec, à mes côtés, ce voyou de John [Carlos ; ndlr], parti comme une
grenade dégoupillée. J’y ai pensé de bout en bout. Ils pouvaient même m’en rajouter.
Me bricoler un 220 yards en ligne droite, j’aurais continué à penser tout ça. Juste sur
la fin, quand j’ai compris, à 15 mètres du fil, que j’avais gagné, je n’ai vraiment pas pu
m’empêcher de me relever ».

Moment d’extase et point final, il le sait déjà, à sa carrière de sprinteur qui va


s’arrêter là, à 24 ans seulement. Il connaît déjà la suite, il en a imaginé le scénario,
mais peut-être pas saisi toutes les répercussions que vont entraîner son geste et celui
de John Carlos, tout à l’heure, sur le podium, et il ne sait pas encore que Peter
Norman, le médaillé d’argent australien, va se mêler à sa façon, à leur geste de
protestation.

Une heure et demie plus tard, les trois récipiendaires se retrouvent dans la chambre
d’appel, en préambule à la cérémonie de remise des médailles. Pierre-Louis Basse
raconte la scène dans son livre : « Peter Norman avait accroché à son survêtement
vert le fameux badge distribué par les coureurs américains : The Olympic Project for
Human Rights. La scène était assez unique. Tom et John se livraient à une sorte de
répétition de la remise des médailles. Ils étaient peut-être sur le point de se partager
les deux gants de cuir noir. Des gants achetés par Denise, la compagne de Tom, dans
un supermarché. Alors Peter s’est approché d’eux. John Carlos l’a regardé avec une
moue particulière – mélange bien connu de gouaille et de défi : 't’en mêle pas, mon
pote'. Puis, Tommie Smith l’a toisé gentiment du haut de son 1,91 m : 'T’es croyant,
Peter ?' 'Sacrément' lui a répondu dans la foulée l’Australien qui s’était déjà demandé
pourquoi dans son pays on avait liquidé plusieurs millions d’aborigènes. 'Les gants,
vous feriez bien de vous les partager'. 'Bonne idée, Peter'. Tommie a refilé le gant
gauche à John. Il a conservé le droit ».

Cette remise de médailles va rester dans l’Histoire, immortalisée par la fameuse


photo qui fera le tour du monde et qui persiste encore dans les mémoires, 50 années
plus tard. « Nous nous présenterons sur le podium en chaussettes pour dénoncer la
pauvreté des Noirs, a prévu Tommie Smith. Mon foulard noué autour du cou et le
collier de John évoqueront les lynchages opérés dans le Sud. Et nos poings gantés
représenteront la force et l'unité du peuple noir. »

Quand retentit l’hymne américain, Smith et Carlos tendent comme prévu leur poing
vers le ciel. Et ils se souviennent. Smith de son enfance en Californie où ses parents
ont émigré du Texas dans l’espoir d’offrir une vie décente à leurs douze enfants
(Tommie est le septième) tout en essayant de « ne jamais avoir l’air pauvres ». Carlos
de ses parents cubains qui l’ont élevé à l’autre bout du pays, à Harlem, où il a connu
les émeutes de 1964 : un mort, 118 blessés et 465 arrestations. Devant eux, au
garde-à-vous, Peter Norman ne peut rien voir de la scène. Mais il sait très bien ce qui
se passe dans son dos et il acquiesce à sa façon, en arborant le badge de l’Olympic
Project for Human Rights sur sa veste verte de survêtement. Désormais les trois
hommes seront liés à vie.

Panique au village olympique

Dès la fin de la cérémonie, les ennuis vont commencer. Smith et Carlos sortent sous
les sifflets. Guy Lagorce, l’envoyé spécial de L’Équipe, renoue le contact avec John
Carlos un peu plus tard et celui-ci lui déclare : « Nous avons gagné des médailles et
reçu des applaudissements, mais la majorité des Blancs estiment que nous, les Noirs,
sommes des animaux, des insectes qui ne pensent pas. Quand on fait ce qu'ils
veulent, les Blancs nous traitent de bons garçons. En fait, ils nous considèrent comme
des chevaux de course auxquels on donne un sucre de temps en temps. Nous
sommes fatigués de tout cela. Nous avons voulu dire aux Blancs : intéressez-vous à
l'ensemble de nos problèmes et pas seulement à la façon dont on court ou on saute.
».

Le lendemain, jeudi 17 octobre, à midi, Douglas Roby, président du Comité


olympique américain, annonce à Smith et Carlos qu'ils sont exclus des Jeux et qu'ils
doivent quitter la délégation américaine dans les 48 heures. Et il ajoute que si cette
décision n'est pas appliquée, le Comité international olympique, dirigé par
l’Américain Avery Brundage, va suspendre toute l'équipe des États-Unis.

Dès lors, la tension monte encore d’un cran. Certains athlètes noirs, raconte Guy
Lagorce, arrachent les lettres USA cousues sur leurs vêtements et décident de quitter
les Jeux. En réalité, deux camps s’opposent : ceux qui soutiennent l’action de Smith et
Carlos et ceux qui la condamnent, avec des Noirs et des Blancs dans les deux camps, il
faut le préciser. Jesse Owens, le héros des Jeux de Berlin en 1936, est appelé à la
rescousse pour calmer les esprits.

Finalement, seuls Smith et Carlos quitteront les lieux et les athlètes contestataires
vont poursuivre la compétition. Deux d’entre eux vont d’ailleurs se nourrir de leur
colère pour faire exploser avec rage deux records du monde qui tiendront deux
décennies : Lee Evans sur 400 m (43.86) et Bob Beamon au saut en longueur (8,90
m), des performances hallucinantes pour l’époque, même si on les a en partie
attribuées à l’altitude élevée de Mexico. En soutien à leurs camarades, Lee Evans,
Larry James et Ron Freeman montent sur le podium 100% américain du 400 m coiffés
d’un béret noir, tout en arborant un large sourire «, car on ne tire pas sur un homme
qui sourit » dira Evans, qui craint l’acte fou d’un illuminé.

Exclus du village, Tommie Smith et John Carlos errent dans Mexico sans un sou en
poche. Ce sont leurs épouses qui les récupèrent et paient hôtel et taxis. Pour eux, un
long chemin de croix commence. Au pays, la presse, même celle réputée
progressiste, leur tombe dessus en évoquant une « offense nationale ». Le Los
Angeles Times va par exemple jusqu’à comparer leur geste au salut nazi. Les insultes
racistes pleuvent à leur passage quand ils sont en public, ils reçoivent des menaces de
mort par courrier ou par téléphone et, comme ils sont suspectés d’œuvrer pour les
Black Panthers, le FBI les suit à la trace et interfère dans leur vie privée.

Tous deux vont quand même faire un bref passage par le football américain en 1969,
mais sans grand succès, car Smith se blesse à la clavicule et ne joue que deux matchs
avec les Cincinnati Bengals alors que Carlos, touché à un genou, n’en dispute aucun
avec les Philadelphia Eagles. Les deux médaillés de Mexico vont désormais devoir se
contenter de petits boulots, au hasard d’incessants déménagements.

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