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CHAPITRE PREMIER

LE CONTRAT DE TRAVAIL PROPREMENT-DIT


Avant d’étudier la conclusion du contrat de travail (SECTION II), il
convient de procéder à la détermination de ce contrat (SECTION I) car la
soumission du rapport de travail envisagé au droit du travail en dépend
largement.

SECTION I
LA DETERMINATION DU CONTRAT DE TRAVAIL
Il convient de définir le contrat de travail (PARAG 1), d'en dégager les
critères (PARAG 2) et de le distinguer en conséquence d'autres contrats
(PARAG 3) qui peuvent certes lui ressembler, mais restent en dehors du
domaine d'application du droit du travail.

PARAG 1 - Définition du contrat de travail

L'article 6 du Code du travail définit le contrat de travail comme étant la


une convention par laquelle l'une des parties appelée salarié s'engage, soit pour
un temps déterminé ou indéterminé, soit pour un travail déterminé, à fournir à
l'autre partie, appelée employeur, ses services personnels sous la direction et le
contrôle de celle-ci moyennant une rémunération.

Il résulte de cette définition que le contrat de travail :

- est un contrat à titre onéreux car chacune des parties recherche un


avantage. Le salarié cherche la rémunération et l’employeur tire profit des
prestations de travail.
- est un contrat synallagmatique dans la mesure où il existe des
obligations réciproques. Dans cette catégorie de contrat, la cause de l'obligation
de l'une des parties étant l'obligation de l'autre partie, il en découle qu'en cas de
grève, l'employé gréviste, en principe, n'a pas droit à une rémunération pendant
la durée de l'arrêt du travail.

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- est un contrat à exécution successive car les prestations des deux parties
sont étalées dans le temps. L'exécution des obligations s'étendant dans le temps,
il est impossible, en cas de nullité ou de résolution du contrat, d'effacer les
obligations qui ont déjà été fournies. Le contrat ne peut être que résilié.

- est un contrat intuitu personae : l'article 6 du Code du travail parle en


effet de la fourniture de services personnels ; aussi le travailleur ne peut se faire
remplacer sans l'accord de l'employeur. Il convient de souligner que cet aspect
personnel se vérifie plus du côté du salarié que du côté de l’employeur. En
effet, dans un souci de protection des travailleurs et pour assurer le maintien de
leur emploi, l'article 15 du Code du travail dispose que « Le contrat de travail
subsiste entre le travailleur et l'employeur en cas de modification de la
situation juridique de ce dernier, notamment par succession, vente, fusion,
transformation de fonds et mise en société».

PARAG 2 - Le critère distinctif du contrat de travail :


La subordination juridique
L’application des dispositions particulières du droit du travail dépend de
l’existence d’un contrat de travail laquelle est attachée aux critères distinctifs de ce
contrat. Plusieurs critères ont été envisagés l’un rejeté et l’autre retenu :

- Le critère rejeté est celui de la subordination économique Il s’agit dans ce


cas de savoir si une personne est ou non sous la dépendance économique d'une
autre personne pour conclure s’il y a contrat de travail ou non. Recevant son
salaire auprès de son employeur, le salarié est sous une subordination
économique. Ce critère présente l’avantage de faire bénéficier le plus de
personnes possibles des dispositions protectrices du droit du travail, Mais il a
l'inconvénient majeur d'être très imprécis car toute personne vivant en société
dépend économiquement des autres. Un médecin est certes payé par son patient
mais personne ne tente de soutenir que le médecin est l'employé de son client.

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- Le critère retenu est celui de la subordination juridique. Ce qui
importe, c'est de déduire qu'une personne agit pour le compte d'autrui en suivant
ses directives et en agissant sous ses ordres et sa direction. Telles sont les
caractéristiques essentielles du contrat de travail.

Le juge, avant de qualifier un contrat comme un contrat de travail, il doit


vérifier si le lien de subordination juridique existe. Dans sa démarche de
révélation de ce lien, le juge sera guidé par l'examen d'un certain nombre
d'éléments. Ainsi selon l'alinéa 2 de l'article 6 du Code du travail, la preuve de
l'existence d'un contrat de travail peut être rapportée par tous les moyens :
le comportement de l'employeur (délivrance d'un bulletin de paie, d'un
certificat de travail, le fait qu'il ait affilié le travailleur à la sécurité sociale; ...), le
lieu et les horaires de travail ( le travail en principe doit s'effectuer dans un lieu
désigné par l'employeur et selon un horaire fixé par lui), la fourniture des outils de
travail, l'exclusivité du travail promis par un travailleur à un employeur. C'est
de l'existence de ces différents éléments conjugués que le juge pourra asseoir
sa conviction.

Toutefois, l’application du critère de la subordination juridique est écartée


dans le but de faire bénéficier certaines catégories de travailleurs des
dispositions protectrices du droit du travail. En effet, certains travailleurs sont
assimilés à des salariés liés par un contrat de travail alors ce lien de
subordination juridique pouvait être discutable au regard des éléments
d'appréciation sus-indiqués. Cette assimilation a été l’oeuvre du législateur
notamment pour les journalistes même lorsqu'ils travaillent pour plusieurs
journaux (art. 397 à 408 fixant le statut des journalistes professionnels), les
voyageurs et représentants de commerce qui peuvent travailler pour le compte de
plusieurs entreprises (art. 409 à 419 du C.T. fixant leur statut professionnel).

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La détermination du critère du contrat de travail n'est pas une démarche
purement théorique. Son application permet de distinguer le contrat de travail de
contrats qui lui sont voisins mais qui ne sont pas soumis au droit du travail

PARAG 3- Distinction du contrat de travail des autres contrats voisins

De nombreux contrats ont aussi pour caractéristiques la prestation d'un


travail par une partie au profit de l'autre avec, pour contrepartie, une
« rémunération ». Pour savoir si l'on se trouve en face d'un contrat de travail ou
d'un autre contrat, il convient d’appliquer le critère de la subordination
juridique. Ce critère permet de distinguer le contrat de travail de trois contrats
qui peuvent apparemment présenter des ressemblances : le contrat de mandat
(A), le contrat de société (B) et le contrat d'entreprise (C).

A/ Contrat de travail et contrat de mandat

Le contrat de mandat est une convention par laquelle une personne appelée
mandant confie à une autre personne appelée mandataire de faire un ou plusieurs
actes juridiques en son nom et pour son compte.
Certains auteurs ont soutenu que ce qui différencie le contrat de mandat du
contrat de travail est que le mandataire fait des actes juridiques alors que le
salarié fait des actes matériels. Mais le critère « acte juridique - acte matériel »
n'est pas satisfaisant car un salarié peut être aussi amené à faire des actes
juridiques.

Le véritable critère de distinction est celui de la subordination juridique. En


effet, dans l'exécution de sa mission, le mandataire, pour la mener à bien,
dispose d'une liberté d'action. Il exécute le mandat de la manière qu’il juge utile
et conforme aux intérêts du mandant. Par contre, le salarié doit en général
exécuter des taches précises et obéir à des ordres et des instructions assez
précises.

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En application de ce critère, sont considérés comme mandataires, et non
comme salariés (donc ne relevant pas des dispositions du droit du travail.) les
notaires, les avocats, les présidents directeurs généraux des sociétés anonymes, les
gérants de S.A.R.L.. Notons en revanche que les voyageurs et représentants de
commerce ont été, sous certaines conditions, assimilés par la loi à des salariés.
Pour les représentants autres que les voyageurs et représentants de commerce
(courtiers, commissionnaires ...), pour déterminer s'ils sont mandataires ou salarié il
faut revenir au critère de la subordination juridique : ils seront considérés comme
des salariés que si la subordination à leur employeur est totale.

B/ Contrat de travail et contrat de société

La société, telle qu'elle est définie par l'article 1249 du C.O.C., est un contrat
par lequel deux ou plusieurs personnes mettent en commun leurs biens ou leur
travail ou tous les deux à la fois, en vue de partager le bénéfice qui pourra en
résulter.

Ainsi défini le contrat de société apparaît comme présentant une certaine


similitude avec le contrat de travail dans la mesure où certaines personnes
peuvent obtenir la qualité d’associés en apportant leur travail. Cette situation ne
leur donne pas pour autant le statut de salarié parce que les associés sont placés
sur un pied d'égalité, alors que le salarié est dans une situation de subordination.

C/ Contrat de travail et contrat d'entreprise

Le contrat d'entreprise est une convention par laquelle une personne


s'engage envers une autre à effectuer un travail déterminé en contrepartie d’une
rémunération.

Ainsi défini, le contrat d'entreprise apparaît comme très proche du contrat


de travail. Toutefois, un certain nombre d'éléments les distinguent :

- Le contrat de travail a pour objet la force de travail fournie par le salarié au


profit de l’employeur alors que dans le contrat d'entreprise l’objet consiste dans

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le produit ou le service commandé c'est-à-dire le résultat qui doit être atteint par
l’entrepreneur. Le salarié est en général rémunéré d'après son temps de travail
alors que l'entrepreneur est payé d'après le résultat de son travail.

- Le salarié apporte sa force personnelle de travail alors que l'entrepreneur


fait généralement exécuter le travail par son personnel.

Mais le critère déterminant permettant de distinguer le salarié de


l'entrepreneur réside dans la subordination juridique. Le salarié travaille sous
l'autorité de son employeur alors que l'entrepreneur, même s'il reçoit des directives
quant au résultat escompté, conserve son indépendance dans l'exécution du travail.
C'est ainsi, par exemple, qu'on considère qu'un artisan n'est lié à son client que
par un contrat d'entreprise car s'il est redevable d'un résultat à l'égard de son
client, il garde son indépendance dans l'exécution du travail.

SECTION II
LA CONCLUSION DU CONTRAT DE TRAVAIL
L'étude de la conclusion du contrat de travail suppose la détermination des
parties en présence (PARAG 1), qui doivent respecter les conditions de validité
du contrat de travail (PARAG 2) et se convenir sur les modalités de ce contrat
(PARAG 3).

PARAG 1- Les parties en présence

Des deux parties au contrat de travail, l'une, le salarié, est aisément


identifiable (B). L'autre en revanche, l'employeur (A), est parfois difficile à
repérer.

A/ L’employeur

A priori, la détermination de l'employeur est chose facile. L’employeur est


celui à qui le salarié apporte sa force de travail, celui sous la direction et le
contrôle de qui il travaille, celui qui lui verse une rémunération. Mais, la
réalité montre que l’identification de l’employeur devient de moins en moins

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facile à cause de la diversification des structures juridiques des entreprises. Trois
exemples illustreront cette situation :

- D’abord, dans les entreprises individuelles, la détermination de


l'employeur est une démarche aisée car les qualités d'employeur et de chef
d'entreprise coïncident : l'employeur, c'est le chef de l'entreprise individuelle.
Mais lorsque l’entreprise est organisée sous forme de société, dans ce cas,
l'employeur se distingue alors du chef d'entreprise. En effet, juridiquement,
l'employeur est la personne morale qui l'emploie. Certes, le contrat de travail
sera, conclu par le chef d'entreprise, par l'organe dirigeant (président directeur
général d'une société anonyme ou gérant d'une société à responsabilité limitée,
S.A.R.L.) mais ceux-ci n'interviennent et ne signent le contrat de travail qu'en
tant que représentant de la société. Mandataires de la société, ils agissent en son
nom et pour son compte.

- Ensuite, les entreprises de travail temporaire qui ont pour activité de


mettre des travailleurs, rémunérés par elles, à la disposition d'une entreprise
utilisatrice, posent notamment un problème quant à la détermination de
l'employeur. La difficulté vient de ce que le travail temporaire présente la
particularité de faire naître une relation triangulaire entre un salarié, un
entrepreneur de travail temporaire et une entreprise utilisatrice : l’entreprise de
travail temporaire conclut avec l’utilisateur un contrat commercial de mise à
disposition, et avec le salarié un contrat de mission. Dans ce rapport triangulaire
qui apparaît ainsi, le salarié a donc un autre employeur que celui pour qui il
travaille. Qui est donc juridiquement l'employeur du travailleur temporaire ? Est-
ce la société de travail temporaire qui le rémunère ou est-ce l'entreprise
utilisatrice à la disposition de laquelle le travailleur temporaire a été mis et qui le
dirige dans l'exécution de son travail ? On s’accorde à considérer que, dans cette
hypothèse, l'employeur est la société de travail temporaire.

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Contrairement à son homologue français, le législateur tunisien n’a pas
réglementé le recours aux entreprises de travail temporaire.

- En outre, on retrouve une difficulté comparable dans le cas du groupe


de sociétés. À l'intérieur de celui-ci existe une certaine mobilité du personnel ;
celui-ci a normalement pour employeur la société sous l'autorité de laquelle il
travaille ; mais il peut se voir détaché ou transféré auprès d'une autre société du
groupe. La question se pose de savoir quel est dans ce cas l'employeur : est-ce
la société du groupe qui a conclu le contrat de travail ou la société dans
laquelle il travaille effectivement ou est-ce la société mère ou groupe de
sociétés ?

En Tunisie, le législateur ne reconnaît pas au groupe de sociétés la


personnalité morale. En conséquence, le travailleur qui est employé par une des
sociétés du groupe ne peut avoir pour employeur le groupe. La jurisprudence
utilise le critère de l’autorité. L’employeur n’est pas nécessairement la société
qui embauché ou qui a rémunéré le salarié mais plutôt celle qui exerce en fait
son autorité sur le salarié.

- Enfin, le salarié peut se voir aussi changer d'employeur. L’article 15 du


Code du travail prévoit que le contrat de travail subsiste entre le travailleur et
l’employeur en cas de modification de la situation juridique de ce dernier. Il en
est ainsi quand l'entreprise est vendue, louée, absorbée. Dès lors qu'il y a
véritablement transfert d'une « entité économique » conservant son identité et
dont l'activité se poursuit, la validité du contrat de travail est maintenue, par
l'effet de la loi, dans les relations avec le nouvel exploitant. Ainsi il en va par
exemple, en cas de cession ou de mise en location-gérance d'un fonds de
commerce ou en cas de changement de concessionnaire d'une exploitation.

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B/ Le salarié

Le salarié est un travailleur subordonné réalisant une tâche pour le compte


d'autrui (employeur) auquel il est subordonné, quelle que soit la profession.

Lorsque l’employeur envisage le recrutement de travailleurs pour répondre


aux besoins économiques de son entreprise, il y a un facteur qui est capital pour
son choix : c'est la qualification professionnelle des postulants.

La qualification professionnelle peut être définie comme : l'aptitude d'un


salarié à occuper un emploi déterminé. Cette aptitude peut résulter soit
objectivement de la formation qu'il a reçue et de son expérience professionnelle
qui est constatée par un certificat de travail, soit subjectivement de la convention
passée avec l'employeur en vue d'occuper un poste déterminé. On parlera
dans le premier cas de qualification individuelle, dans le second, de qualification
contractuelle.

- La qualification individuelle : Le Code du travail n'a pas pris le soin


d'édicter un texte de portée générale relatif à la qualification individuelle.

C’est dans le cadre des conventions collectives qu’on trouve une


classification professionnelle de portée générale : d'une part, la première
oppose le personnel technique et le personnel administratif, distinction
recouvrant en partie l'opposition ouvrier- employé ; la seconde distingue à
l'intérieur de chacune des catégories les trois groupes de salariés suivants : les
agents d'exécution, le personnel de maîtrise et les cadres (moyens et supérieurs).

- La qualification contractuelle : est l’aptitude convenue entre les parties


pour exercer un emploi déterminé dans un poste déterminé. En général, la
qualification contractuelle coïncide avec la qualification individuelle. Mais
l'on peut rencontrer des cas de non coïncidence entre les deux qualifications.

- Il peut tout d'abord y avoir surclassement dans le cas où le salarié se voit


attribuer une qualification contractuelle supérieure à sa qualification véritable en

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cas de recrutement d'un salarié de haut niveau pour lequel l'employeur veut à tout
prix s'attacher les services et éviter qu'il ne soit recruté par un concurrent. Dans
ce cas l'employeur est tenu de lui verser la rémunération correspondant à la
qualification contractuelle.

- Inversement, et cette situation est assez fréquente dans les périodes de


chômage important, le salarié peut être sous-classé : dans ce cas, les fonctions
qu'il exerce effectivement correspondent à une qualification supérieure à celle
contractuellement établie. En principe, si le salarié apporte la preuve de son sous-
classement, le juge peut rectifier la qualification contractuelle.

Au cours de l'exécution du contrat de travail, la qualification retenue lors


de l'établissement du contrat peut être modifiée dans un sens ou dans un autre.

La qualification professionnelle pourra être abaissée et le salarié subi une


rétrogradation. Il y a en effet rétrogradation lorsque le salarié est affecté
définitivement dans un emploi nécessitant une qualification inférieure à celle
initialement prévue. II s'agit là d'une mesure aux conséquences graves pour le
salarié si bien qu'elle ne peut intervenir que dans des cas bien précis :

- La faute du salarié : la rétrogradation correspond dans ce cas à une mesure


de sanction disciplinaire.

- La réorganisation de l'entreprise : Le chef d'entreprise ne commet aucune


faute si, usant de son pouvoir de direction, il est amené à réorganiser son
entreprise et à modifier en conséquence la qualification de ses salariés.
L’article 15 de la convention collective cadre prévoit que tout travailleur peut
être requis par écrit pour assurer des fonctions d’une catégorie immédiatement
inférieur à celle où il est classé suivant les exigences du service et pour une
période n’excédant pas un moins une fois par année. Le travailleur gardera dans
ce cas le salaire et les avantages correspondant à son grade d’origine. Dans ce
cas, les salariés rétrogradés qui refusent la rétrogradation risquent le
licenciement, que l'on considère régulier et non abusif.

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Le salarié peut être appelé à exercer les fonctions d’une catégorie
immédiatement supérieure à celle où il a été classé. L’utilisation du travailleur
dans ces fonctions doit être faite par écrit et pour nécessité de service. Cette
situation ne doit pas dépasser la durée de trois mois, période à l’issu de laquelle
le travailleur est soit confirmé dans la nouvelle catégorie soit replacé dans sa
catégorie d’origine en ayant un droit de priorité pour accéder à cette catégorie
nouvelle en cas de vacance définitive. Durant cette période le salarié perçoit une
indemnité représentant la différence de salaire entre celui de l’échelle
correspondante à la catégorie à laquelle il accède provisoirement.
Au cours de sa carrière professionnelle, la qualification professionnelle du
salarié pourra être améliorée et on parle alors de promotion. Il y a promotion
lorsque le salarié est définitivement employé dans une catégorie supérieure à
celle où il avait été classé. La promotion est analysée comme un bénéfice
octroyé par l'employeur et c'est en ce sens qu'elle se distingue de l'avancement
qui est essentiellement lié à l'ancienneté et qui se réalise de façon automatique
en principe.
PARAG 2 -Les conditions de conclusion du contrat de travail

On distingue traditionnellement les conditions de fond (A) et les conditions


de forme (B).

A/ Les conditions de fond

Le contrat de travail est un contrat particulier. Deux séries de


conséquences découlent cette constatation : d'une part, s'agissant d'un contrat,
il est soumis aux conditions générales de formation de tout contrat posées
par l'article 2 du Code des obligations et des contrats, conditions relatives à la
capacité, au consentement, à l'objet et à la cause. Mais d'autre part, s'agissant
d'un contrat particulier, ces conditions sont assorties de spécificités qu'il
convient de préciser.

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1- La capacité

Les règles générales relatives à la capacité et qui sont posées par les articles 3
à 17 du C.O.C, sont applicables au contrat de travail. Seul les personnes ayant
atteint l’âge de majorité civile fixée à 20 ans peuvent conclure un contrat de
travail (art. 7 Code des obligations et des contrats et art. 157 Code de statut
personnel). S'agissant des personnes incapables doivent en conséquence et selon
le degré de leur incapacité (incapacité absolue ou incapacité limitée) soit être
représentées soit être assistées au moment de la conclusion du contrat de travail.

Mais il convient de préciser que le contrat de travail étant un contrat à


caractère personnel, mêmes les personnes atteintes d'une incapacité absolue
doivent donner leur consentement personnel.
Pour ménager la santé et les chances scolaires des enfants, le Code du
travail a édicté un âge minimum d'accès au travail qui est différent selon qu'il
s'agisse du secteur industriel ou du secteur agricole. Selon l'article 53 du Code du
travail, les enfants de moins de quinze ans ne peuvent être employés dans les
établissements industriels. L'âge minimum a été abaissé à treize ans dans le
secteur agricole pour les travaux non nuisibles à la santé et au développement
moral des enfants et à condition que la fréquentation scolaire n'en soit pas affectée
(article 55 C.T.). L’âge d'accès étant plus bas dans le secteur agricole où l'activité,
à caractère souvent familial, est réputée moins pénible.

2- Le consentement

Selon la théorie générale des obligations, le contrat n'est valablement formé


que si la volonté des cocontractants n'a été viciée ni par le dol, ni par la violence,
ni par l'erreur (art. 43 et s. du C.O.C). En raison du caractère intuitu personae du
contrat de travail, le salarié doit donner son consentement personnel même s'il est
mineur.

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L’employeur peut imposer au salarié sa mise à une période d’essai avant de
donner son de donner son consentement définitif. Cette période d'essai précédant
l'engagement de l'employeur permet de tester les aptitudes professionnelles du
salarié lequel aussi découvre les conditions de travail dans l’entreprise. Pendant
l’essai, il peut librement mettre fin au rapport de travail. C’est seulement si
l’essai est concluant que le rapport de travail est définitivement établi.
Le Code du travail ne réserve aucun régime particulier à la période d'essai
L’article 18 du Code du travail prévoit que la détermination de la durée de la
période d'essai doit être recherchée dans les conventions individuelles, les
conventions collectives, voir même les usages.

Certes certains textes particuliers prévoient le recours à la période d'essai tel


est le cas de l'article 410 qui autorise la stipulation d'une période d'essai qui ne
peut dépasser trois mois , mais cette disposition ne concerne que les voyageurs
et représentants de commerce.

La convention collective cadre, dans son article 10, dispose que la durée
de la période d'essai n'excédera pas six mois pour les agents d’exécution, neuf
mois pour les agents de maîtrise, et une année pour les cadres. Mais si l'essai n'est
pas concluant, le candidat pourra être soumis à un deuxième et dernier essai pour
une même période. La limitation du renouvellement de la période d’essai à deux
fois a pour objectif d'éviter que l'employeur, par un renouvellement infini de la
période d'essai, ne puisse tourner par cet artifice certaines dispositions
impératives du droit du travail, notamment celles relatives au délai-congé
(préavis) et à l'indemnité de licenciement car pendant la durée de la période
d'essai, l'article 10 de la convention collective cadre précise que le travailleur
peut recevoir ou donner congé sans préavis, sur simple signification.

L’employeur évalue discrétionnairement le caractère concluant ou non de la


période d'essai. En d’autres termes, c’est à lui seul d’estimer l'aptitude du
travailleur pris à l'essai et de décider de l'opportunité de soumettre le travailleur à

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une seconde période d'essai si la première période d'essai n'est pas probante. En
aucun cas le salarié ou le juge ne peuvent obliger l'employeur de faire recours à
une seconde période d'essai.

A la fin de l’essai, l’engagement doit être confirmé par une lettre précisant
les fonctions du travailleur ainsi que sa rémunération.

Si le travailleur continue l’exécution de la prestation du travail sans


opposition de la part de l’employeur et au-delà de la fin de la période d’essai, il
est considéré comme étant définitivement engagé dans le cadre d’un contrat de
travail.
La période d’essai fait partie intégrante du contrat de travail en cas de
confirmation du salarié dans son poste. Le salarié est réputé être recruté à partir
de sa mise à essai. Ce qui confirme l'idée c'est que les conventions collectives
calculent l'ancienneté dans l'entreprise, dès le début de la période d'essai.
3- L'objet

L’article 2 du C.O.C. prévoit que le contrat n'est valablement formé que s'il
porte sur un objet certain pouvant former objet d'obligation. Le contrat de travail
ne peut, par son contenu même, être attentatoire aux bonnes mœurs ou à l'ordre
public. L’article 834 du C.O.C. qui est relatif au contrat de louage de services
frappe de nullité toute convention qui aurait pour objet l'enseignement ou
l'accomplissement de pratiques occultes ou de faits contraires à la loi, aux
bonnes mœurs ou à l'ordre public ou des fait impossibles physiquement.

4- La cause

Le mobile qui anime la volonté des parties au contrat ne doit pas revêtir un
caractère illicite ou immoral. Par exemple serait illicite le contrat liant un
employeur à un salarié travaillant dans une entreprise clandestine fabriquant
de la fausse monnaie.

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Comme pour toutes les conventions, lorsque l'une de ces conditions de fond
fait défaut, la sanction est la nullité du contrat de travail.
B/ Les conditions de forme

Le contrat de travail est un contrat en principe consensuel en ce sens il se


forme valablement par le simple échange de consentement sans être soumis à
aucune formalité particulière. Le contrat de travail peut donc être écrit ou verbal.

Toutefois, le législateur et dans un but de protection des travailleurs a exigé


la forme écrite pour certaines catégorie de contrat de travail. C'est ainsi par
exemple que le contrat d'apprentissage doit en principe être constaté par écrit à
peine de nullité (art. 344 C.T.) ; l'article 410 du Code du travail exige également
un écrit en ce qui concerne les contrats de travail des voyageurs et représentants de
commerce.

Par ailleurs, on assiste à une tendance vers l’exigence de certaines


procédures au moment du recrutement des salariés. Ainsi, pour faciliter la preuve
de la relation du travail, les conventions collectives prévoient toutes que le
travailleur doit obligatoirement être informé par écrit lors de son embauchage de
la catégorie professionnelle dans laquelle il sera affecté et du taux de
rémunération correspondant.

Toutefois, la règle en droit du travail tunisien reste la liberté de la preuve du


contrat par tous les moyens légaux de preuve. Il y a là une dérogation
particulière au principe posé par l'article 473 du C.O.C. exigeant la preuve écrite
pour toute convention excédant la somme de 1000 D.

PARAG 3- Les modalités du contrat de travail


Selon l'article 6 du Code du travail, le contrat de travail peut être conclu soit
pour une période déterminée (A), soit pour une durée indéterminée (B).

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A/ Contrat de travail à durée indéterminée

Le contrat de travail à durée indéterminée est le contrat dont le terme n'est pas
prévu lors de sa conclusion. C’est le contrat de travail de droit commun ; il peut
être rompu à tout moment par la volonté unilatérale de l'une des parties, sous réserve,
lorsque la rupture émane de l'employeur, de l'existence d'une cause réelle et
sérieuse de rupture et de l'observation de la procédure de licenciement.

B/ Contrat à durée déterminée

Le contrat de travail à durée déterminée est un contrat dont le terme, au


moment de sa conclusion, est déterminé (indication d'une échéance) ou
déterminable (contrat conclu pour effectuer un travail qui prend fin dès que le
résultat escompté est atteint).
Le contrat prend fin à l'échéance du terme ou à l'accomplissement du travail
convenu sans qu’il soit nécessaire d'avertir l'autre partie, donc il n'y a pas ici
obligation du préavis. Si, à l'échéance du terme, le salarié continue à travailler et
que son employeur ne s'y oppose pas, l'article 17 du Code du travail considère que
le contrat se transforme en un contrat à durée indéterminée.

On assiste aujourd’hui à un recours de plus en plus intensif à des contrats à


durée déterminée. La prolifération de ce type de contrat qui répond aux
nécessités du monde économique n’est pas sans danger pour les travailleurs. En
effet, l'employeur peut l'utiliser de façon abusive en maintenant le travailleur
dans une situation précaire en concluant des contrats de travail à durée
déterminée successifs.

La précarité de l’emploi s’étant développée, le législateur essaie de la


cantonner dans certaines limites. Pour limiter le recours abusif à ce type de
contrat de travail qualifié de contrat précaire, le législateur a dû intervenir par la
loi n° 96-62 du 15 juillet 1996 dans l'article 6-4 du Code du travail pour
réglementer notamment, les contrats de travail à durée déterminée. Il a donné

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une liste des cas où l'employeur peut recourir à la conclusion de contrats de
travail à durée déterminée. En effet le contrat de travail à durée déterminée peut
être conclu dans les cas suivants :

- l'accomplissement de travaux de premier établissement ou de travaux


neufs :
- l'accomplissement de travaux nécessités par un surcroît
extraordinaire de travail ;
- le remplacement provisoire d’un travailleur permanent absent ou
dont le contrat de travail est suspendu ;

- l'accomplissement de travaux urgents pour prévenir des


accidents imminents, effectuer des opérations de sauvetage ou pour
réparer des défectuosités dans le matériel, les équipements ou les
bâtiments de l'entreprise ;
- l'exécution de travaux saisonniers ou d'autres activités pour lesquelles
ne peut être fait recours, selon l'usage ou de par leur nature, au contrat à durée
indéterminée.

Mais cette énumération des cas où la conclusion du contrat de travail à durée


déterminée n'a pas un caractère limitatif. En effet, à coté de ces cas de recours
objectifs, l’article 6-4 du Code du travail, a envisagé des cas de recours
subjectifs c'est-à-dire sur accord des parties sans que le recours soit nécessité par
la tache, en disposant dans son second paragraphe, que « le contrat à durée
déterminée peut également être conclu dans des cas autres que ceux indiqués au
paragraphe précédent ». Toutefois, le recours au contrat précaire dans les cas non
énumérés par la liste est soumis à une double condition :

- d'une part, l’accord écrit des deux parties est requis : le contrat est rédigé en
deux exemplaires l’un est conservé par l’employeur et l’autre est délivré au
salarié.

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- d'autre part, le recours à ces contrats est limité à quatre ans : l'article 6-4

prévoit qu'au terme de quatre ans de contrats à durée déterminée, le contrat de


travail se transforme en contrat permanent. Il ne faut pas qu'il y ait continuité
dans cette période. Il suffit au salarié de totaliser quatre années de contrats à durée
déterminée pour qu'il puisse prétendre à un travail permanent. Lors de ce passage,
la rédaction, d'un écrit est nécessaire.

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