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Mathieu DEMANGE
6 mai 2020
CC BY-SA
(Creative Commons, Attribution-ShareAlike 4.0 International)
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Préambule
Mais comment s’assurer de la qualité d’un enregistrement lorsque l’on ne dispose de rien
d’autre qu’un smartphone ? Est-il seulement possible d’obtenir un résultat satisfaisant ?
Contexte
Nous nous mettrons ici en situation de réaliser une vidéo de candidature à un concours ou
examen de musique, où l’on doit donc se filmer en train de jouer, avec un smartphone
pour seul appareil d’enregistrement.
La qualité du son est l’aspect qui retiendra donc toute notre attention afin qu’elle rende
justice à celle du moment musical.
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Un outil. Libre.
Avec un ordinateur (si cela est possible), nous utiliserons pour seul outil, un logiciel libre (et,
par effet de bord, gratuit) disponible pour Windows, macOS et Linux : l’éditeur audio
Audacity. Celui-ci va nous permettre de mieux “entendre avec les yeux” et comprendre
certains phénomènes.
https://www.fosshub.com/Audacity.html
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Pour FFmpeg, rendez-vous ensuite sur la page :
https://lame.buanzo.org
Cette page est longue. Faites-là défiler vers le bas tel que sur la capture d’écran ci-après.
Puis choisissez également l’archive à télécharger en fonction de votre système
d’exploitation :
`De même, procédez ensuite à l’installation en vous laissant guider par l’installeur, comme
traditionnellement, en veillant à ce qu’Audacity ne soit pas déjà lancé pendant cette étape.
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Apprendre à connaître son matériel
L’organe du smartphone qui nous intéresse ici est son microphone embarqué. Nous
devons en savoir plus sur son comportement.
En effet, la palette du musicien s’exprime notamment par les nuances (pianissimo, mezzo-
forte, fortissimo, etc). Or nous voulons nous assurer que notre enregistrement soit
respectueux de toute cette gamme d’intensités sonores. Il n’est pas question de subir les
caractéristiques du microphone et de devoir adapter notre jeu. Il nous faut au contraire
trouver les conditions dans lesquelles le microphone peut opérer avec fidélité et
transparence.
Nous allons pour cela faire quelques essais pour observer et contrôler ce que l’on appelle la
dynamique.
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Nous appliquons donc notre protocole au piano avec un premier positionnement du
smartphone à courte distance de l’instrument.
Une fois notre première vidéo enregistrée, nous récupérons son fichier sur notre ordinateur
et l’ouvrons avec le logiciel Audacity.
Nous nous focaliserons sur la partie centrale de l’affichage que l’on appelle la forme d’onde.
C’est un graphique qui représente l’amplitude de notre signal audio, en fonction du temps.
On y voit notamment quatre zones distinctes en formes d’entonnoirs qui correspondent à
nos quatre accords joués au piano.
Mais en y regardant de plus près, il semble que les troisième et quatrième accords
“dépassent” du cadre de la forme d’onde. Cela s’appelle un écrêtage. Sans entrer
davantage dans les explications techniques, cela signifie que l’intensité du son à cet instant
était trop forte. Cette intensité dépend bien entendu de la distance entre ce qui émet un
son et ce qui le reçoit. Dans le cas présent, la distance est trop courte ; le microphone est
trop près. À l’écoute, cet écrêtage produit une distorsion plutôt désagréable.
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Faisons un deuxième essai, en plaçant cette fois-ci notre smartphone à bonne distance du
piano, et observons le résultat :
On distingue toujours nos quatre accords, et dorénavant, la forme d’onde n’est plus
écrêtée. Nous avons ainsi atténué le signal, par le simple effet de la distance entre notre
piano et notre smartphone.
Mais il semble à présent y avoir un autre problème. Les deux premiers accords sont à peine
perceptibles et se confondent presque avec la ligne située à hauteur zéro : ils sont hélas
trop faibles et seront difficilement audibles à l’écoute. Cela obligerait un auditeur à monter
excessivement le volume de son appareil d’écoute.
Par ailleurs, les appareils électroniques ne sont pas parfaits : ils produisent malgré eux leur
propre bruit. Or, un signal trop faible risque de se perdre et se confondre avec ce bruit.
Enfin, notre accord fortissimo a cette fois-ci la même amplitude que notre accord
pianissimo de notre premier essai. Verticalement, on constate que beaucoup de place est
inexploitée. À ce stade, nous commençons intuitivement à comprendre que notre objectif
est de trouver un équilibre ; d’exploiter cette plage au maximum, sans toutefois en sortir.
Faisons alors un dernier essai, plaçant ainsi notre smartphone entre nos deux
précédentes positions et vérifions notre résultat :
Nos efforts sont fructueux ! Notre point de plus forte intensité avec l’accord fortissimo vient
frôler les limites de notre plage d’amplitude et notre son le plus doux est quant à lui
suffisamment perceptible.
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Débusquer un faux ami
Conçus pour être utilisés en toutes circonstances, les smartphones peuvent appliquer
certains traitements automatiques à l’image mais aussi au son, afin de faire face à toutes
sortes de conditions (intérieur/extérieur, bruit ambiant, conditions météorologiques, etc). Il
s’agit d’algorithmes de traitement numérique du signal (Digital Signal Processing) qui
peuvent, par exemple, servir à :
Il y a là une différence flagrante avec nos précédents enregistrements : les quatre accords
ont une forme d’onde quasiment identique. Plus précisément, elles semblent toutes de la
même intensité, ayant ainsi perdu tout rapport avec nos nuances initiales. Notre
pianissimo paraît aussi puissant que notre fortissimo : un comble !
Ce guide n’est pas l’endroit pour un cours théorique sur le compresseur, mais dans notre
contexte, on peut au moins caractériser naïvement son effet : l’amplitude de notre
enregistrement apparaît comme “écrasée”. Les sons faibles semblent exagérément plus
fort, tandis qu’a contrario, les sons forts semblent atténués. Dans un smartphone, ce
traitement sert en réalité à éviter un écrêtage. Il tente donc de nous rendre service, mais
s’avère en revanche désastreux avec des nuances délicates. La solution consiste alors à
éloigner davantage son smartphone. Cela atténuera naturellement l’intensité sonore
perçue par le microphone, et évitera de déclencher le compresseur.
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Et si l’on n’a pas d’ordinateur ?
Pas de panique ! Le fait de “voir le son” est certes un outil très utile dans le cas présent,
mais encore ne faut-il pas oublier le plus important : à la fin, ce devrait toujours être l’oreille
qui décide.
Le protocole proposé dans ce modeste guide, peut tout-à-fait être appliqué sans
ordinateur, sans regarder la moindre forme d’onde, rien qu’en écoutant et ré-écoutant
simplement les différentes prises, avec une oreille curieuse et attentive. Une oreille qui
discerne.
S’il s’agit d’une expérience nouvelle, tant mieux ! Former son oreille au son, c’est aussi
former son oreille de musicien.
Pour l’acoustique
Dans la pièce où a lieu l’enregistrement, toute surface rigide (sol, mur, plafond, vitre, porte,
bureau, plan de travail) peut engendrer des réflexions des ondes sonores et provoquer un
phénomène de réverbération ou d’écho. Selon la géométrie et la configuration de la pièce,
ces effets peuvent être plus ou moins désirables.
De la même façon que nous avons testé différents emplacements de smartphone pour
l’enregistrement, nous pouvons tester les effets de quelques outils de fortune (mais
efficaces) sur l’acoustique de la pièce.
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Et pour l’image
La plupart des smartphones et tablettes sont équipés de deux caméras : l’une à l’arrière, et
l’autre frontale. Privilégiez toujours la caméra arrière dont le capteur est généralement de
bien meilleure qualité, même si, par conséquent, vous ne voyez plus l’écran de votre
appareil. Par ailleurs, les caméras frontales peuvent engendrer une symétrie de l’image fort
déstabilisante : un violoniste pouvant par exemple se retrouver avec son violon à gauche
sur la vidéo.
Choisissez l’orientation du capteur en fonction de vos besoins : pour le piano, par exemple,
un format paysage sera probablement plus adapté, tandis qu’un format portrait
conviendra mieux à la clarinette. Selon votre appareil, vous pouvez aussi choisir le rapport
largeur/hauteur : le rapport 16/9 est le plus étiré, suivi du rapport 16/10 et enfin du rapport
4/3 qui se rapproche d’une forme carrée.
Évitez les pièges classiques comme le contre-jour ou une pièce insuffisamment éclairée. Si
vous le pouvez, utilisez un éclairage indirect, avec des sources lumineuses orientées vers
les surfaces claires de la pièce, plutôt que directement sur vous.
Sans oublier votre tenue, que vous jugerez bon d’adapter aux circonstances !
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