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Il est 18h30. Il fait nuit, ce qui n’est pas anormal pour une journée de novembre.

Je rentre chez moi, après cette harassante journée, à me faire chier à satisfaire les demandes
toujours plus incongrues de ces clients. A l’informatique n’est plus ce qu’elle était, maintenant il faut
ruser pour pouvoir vendre ses produits.

Je suis fatigué. J’arrive à la maison. Personne. Normal, la plus grande finie ses cours vers 19h30, et la
petite l’attend. L’école, maintenant, avec les nouveaux programmes, c’est vraiment le bagne.

Ma femme ne finie que vers 23 heures.

Je suis donc tout seul pour la soirée.

J’ai mal au dos. L’ultime effort pour tourner la clé dans la serrure m’est presque insupportable.

Je ne rêve que d’une bouffe bouffée de ma pipe, un bon Amsterdamer, bien parfumé, et d’un bon
verre de rhum.

Cela me détendra enfin.

Je sors de mon frigo un quartier de citron vert, je prends mon verre, y fait délicatement couler le
sirop de canne. La couleur brune nappe les parois, et le liquide étreint la tranche de citron.

Quel rhum vais-je prendre ?

Des 5 cubis ramené de mes derniers voyages, il ne m’en reste que 3. Martinique, Guyane. J’hésite.

La douceur du rhum de Martinique, son fruité ou alors le cachet particulier de la « Belle Cabresse ».
Je me laisse tenté par le guyanais.

Vide. Plus une goutte.

Ma main tremble un peu. C’est le rhum que je préfère, et il n’y en a plus.

Soit, allons voir le cubi de « Trois Rivières ».

Aussi sec que le désert.

Ma gorge se sert, ma langue devient sèche et râpeuse. Pourvu qu’il en reste dans le dernier.

Pas de chance, il est tout aussi vide.

J’ai une défaillance. Je ne sais plus ou je suis. Mes pensées s’embrouillent. Ma raison me quitte.

A la cave. Il doit m’en rester une ou deux bouteilles.

Chancelant, ayant du mal à mettre un pas devant l’autre, je descend l’escalier qui doit me mener vers
le paradis.

Une marche ratée. Merde, je saigne du nez. La douleur est sourde, mais je ne la sent pas. Je suis
obnubilé.

J’arrive au stock de bouteilles.


Du pinard, du pinard, que du pinard. Je fais voler les bouteilles dans ma rage. Elles se fracassent sur
le sol avec un grand bruit, me coupant tout chemin de retraite. Merde, je suis pieds nus.

Et toujours pas une bouteille de rhum.

Mes jambes se dérobent. Je chois lamentablement sur le sol, le regard hagard.

Depuis cette loi qui interdit l’importation de ce précieux breuvage, il est interdit d’en vendre en
métropole.

C’en est trop, je m’évanoui.

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