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UNIVERSITE DE DOUALA AC 

: 2020-2021
ENSPD - DEPT HSSI
MASTER PROFESSIONNEL EN HYDROCARBURES ET DEVELOPPEMENT DURABLE

UE :
EC : Communication en milieu professionnel

ETUDE DE CAS
Note de synthèse

Votre chef vous a demandé de vous informer sur la problématique de la révolution numérique en Afrique. Vous avez lu les articles
ci-après pour lui en faire une note de synthèse de 3 pages (maximum), afin de lui donner un état des lieux de cette problématique
en Afrique et au Cameroun.

DOSSIER A SYNTHETISER

TEXTE N°1 : L’Afrique, nouveau laboratoire de la révolution numérique mondiale


Par Houcine Ben Achour publié dans “AA” Tunis le 25/12/2017
https://www.aa.com.tr/fr/afrique/l-afrique-nouveau-laboratoire-de-la-r%C3%A9volution-num%C3%A9riquemondiale-/
1014429
Il y a 30 ans, la Chine était considérée comme un pays «en voie de développement». Aujourd’hui, l’Empire du Milieu est devenu la seconde
puissance économique mondiale. Ce constat vaudra-t-il pour l’Afrique dans une trentaine d’année ? Il ne faut pas en rire. Car, certains indices
montrent que le continent africain, certes à des degrés divers entre Etats, a le potentiel d’un développement économique qui promet d’être
exponentiel plus qu’arithmétique.
Une récente étude de l’Institut français d’études démographiques (INED) indique que l’un des grands changements à venir est l’accroissement de
la population d’Afrique. De 1,2 milliards d’habitants en 2017, le continent africain recenserait 2,5 milliards d’âmes en 2050 et devrait atteindre 4,4
milliards en 2100. C’est dire du gigantisme de ce marché qui souffre d’une sous-industrialisation manifeste.

La plupart des pays du continent tire l’essentiel de leurs revenus des exportations des matières premières. Il est clair qu’une stratégie de
croissance inclusive est la seule, à même de répondre aux besoins d’un marché aussi important. D’ailleurs, toutes les études économiques
concernant le développement du continent s’accordent sur le fait que les facteurs intérieurs ont et continueront à avoir une influence considérable
sur la croissance africaine, en particulier la consommation privée. Mais pas seulement, puisque la consommation publique, particulièrement celle
orientée vers les investissements d’infrastructure, joue également un rôle clé dans la croissance économique du continent.

-Creuset de la croissance mondiale de demain


«En 2016, ces deux composantes ont contribué ensemble à plus de 60% à la croissance», indique le rapport sur les Perspectives économiques
en Afrique, édité par la Banque africaine de développement (BAD), l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) et le
Programme des Nations Unis pour le Développement (PNUD). Le rapport ajoute que «l’un des principaux facteurs de la vigueur de la
consommation en Afrique est à rechercher dans l’accroissement démographique du continent».
Ce dynamisme démographique devrait propulser les dépenses de consommation du continent de 680 milliards de dollars en 2008 à environ 2
200 milliards de dollars en 2030. Les besoins d’investissement sont par conséquent considérables. Autant dire, l’Afrique constitue le creuset de la
croissance mondiale de demain. Une croissance qui, pour le continent, s’appuiera sur l’innovation technologique et l’économie verte.
Christine Lagarde, directrice général du Fonds monétaire international (FMI) l’a d’ailleurs opportunément signalé lors d’une récente réunion de la
Commission économique des Nations-Unis pour l’Afrique (CEA), tenue au début de la semaine dernière à Addis Abeba en Ethiopie, au cours de
laquelle elle a mis particulièrement l’accent sur «l’impact de la technologie dans les pays africains dans l’ouverture de nouvelles perspectives
pour la génération à venir».

«En adoptant la bonne stratégie, le dividende démographique peut conduire à la prospérité. Cette incroyable poussée démographique peut être
mise au service d’un cercle vertueux de croissance et de développement économique», a-t-elle avisés, elle peut devenir un outil puissant pour
construire des économies plus solides dans l’Afrique de demain».
En ce qui concerne la technologie et son utilisation en Afrique, il convient de les constater au Kenya, par exemple, qui avec d’autres pays du
continent détient un leadership mondial dans le paiement mobile. «La possession massive par un grand terminal comme infrastructure de base
pour déployer les services bancaires, avec en premier lieu la fonction paiement. Le classement économique du mobile money présenté par
l’experte anglaise Alix Murphy fin 2014 montrait d’ailleurs en n°1 continent selon Bill Gates. C’est en effet ainsi que se trouvent (sur)légitimés
et Internet et l’expert qui en fait la promotion. Si Madame Ouédraogo est si convaincante, c’est parce que l’expert l’a convaincue ! Et ce
dernier n’a pas dû déployer des trésors de rhétorique pour réussir : les médias, les élites politiques, les organisations internationales, etc.
répètent sans discontinuer le baratin promotionnel des marchands. La raison critique est partie en vacances !
Certains alimentent le mythe de la révolution numérique avec d’autant plus de zèle qu’il leur permet de manger. Il faut donc l’alimenter…
pour des raisons alimentaires. Et malheur à celui qui n’y croit pas. On est ici dans le domaine du « Crois ou meurs ». On est dans le
domaine du dogme.
Devant les montants faramineux d’argent en jeu, devant la ruée des opérateurs économiques internationaux dans le secteur des TIC, et
face à la faiblesse des États africains et des associations pour la protection des consommateurs à défendre l’intérêt des citoyens, notre
tâche en tant qu’intellectuels africains est de ramener la raison critique dans le débat. Il nous faut conjuguer fascination et lucidité critique
comme le suggère le philosophe Hervé Fischer dans ce livre fascinant, Le Romantisme numérique.

Dans cette optique, contrairement à ce qu’affirme Jean-Marie Blanchard, je n’ai jamais prétendu que les technologies numériques sont
inutiles, mais prétendre qu’elles vont aider les populations africaines à satisfaire leurs besoins essentiels relève de la manipulation
idéologique. Les quelques exemples glanés ça et là sur le continent n’autorisent pas à élaborer une théorie crédible sur les effets des
technologies numériques sur le développement. Sauf à penser que le fait que le téléphone mobile procure un revenu à un revendeur de
cartes suffit pour parler de révolution numérique !
Si on demande à notre expert de nous fournir des statistiques sur l’ampleur des bénéfices que les populations tirent de la révolution
numérique, afin que nous puissions juger si les incidences macroéconomiques du phénomène justifient qu’on parle de vraiment de «
révolution numérique », il nous rétorquera sûrement que ce sont là lubies d’intellectuels, que les plus modestes de nos frères africains
n’en font pas une question d’argumentation, mais qu’ils ont déjà embarqué dans le train. Et il nous renvoie à son blog, naturellement,
parce qu’il a déjà démontré l’ampleur du phénomène. Il ne pousse cependant pas l’immodestie jusqu’à dire qu’il y a 500 millions
d’Africains qui ont un téléphone mobile grâce à ses interventions.

Deux questions et une remarque


Deux dernières questions et une remarque. La première question a trait à l’Afrique du Sud. J’évoque ce pays parce que c’est un des
principaux lieux de production et de dissémination du discours sur les vertus rédemptrices des technologies et des réseaux numériques.
Ce pays se débat avec un problème hérité de l’histoire. En 1913, le Natives Land Act a privé de la terre la majorité de la population pour la
confier à une minorité blanche, réservant aux noirs 7% de la terre de leurs ancêtres. L’Afrique du Sud post-Apartheid se (dé)bat pour
corriger cette iniquité. La fracture dans l’accès à l’information, la fracture numérique, est-elle plus tragique que la fracture dans l’accès à la
terre ?
Deuxième question : en 2008, le monde a été secoué par une crise alimentaire d’une ampleur sans précédent. On se souvient des
émeutes de la faim qui ont suivi. Ce que l’on dit moins, c’est que des compagnies étrangères se sont ruées sur les terres africaines, non
pas pour aller à la chasse aux « bits », non pas pour produire des denrées destinées à nourrir les Africains, mais pour produire des
aliments à exporter, afin de nourrir les populations étrangères. Si Jean-Marie Blanchard aimait l’Afrique, il aurait appelé à financer des
projets de développement qui mettraient en valeurs ces terres africaines, pour le bénéfice des Africains, en disséminant au besoin de
l’information agricole grâce aux TIC, au lieu de prêcher qu’avec les TIC on va nourrir les populations, comme par enchantement.
Le fait que les agriculteurs se servent du téléphone pour écouler leurs marchandises n’en fait pas une arme miraculeuse pour résoudre ce
problème qui, avant d’avoir une solution technique, est un problème organisationnel.
Enfin une remarque : ma thèse a été évaluée par 6 professeurs d’université. Ils se sont donné la peine de la lire en long, en large et en
profondeur. Ils ont mis du temps pour en comprendre les articulations. Ils m’ont posé des questions pointues pour que je puisse expliquer
les aspects où il leur semblait que je devais préciser mon propos.
Toute modestie mise à part, j’estime que je me passerai d’un autre évaluateur, d’autant moins bien placé pour parler de cette thèse qu’il
ne l’a même pas lue. Si j’avais avancé des thèses idiotes, ils m’auraient sommé de me défendre devant le public : la soutenance était
ouverte à tout le monde.

Un délicieux paradoxe
Terminons par ce délicieux paradoxe : Jean-Marie Blanchard nous annonce que la révolution numérique a déjà eu lieu en Afrique, que le
Grand soir, c’est demain qu’il arrive. L’Afrique était à la traîne et il fallait absolument la connecter à l’évolution du monde, l’arrimer au
temps du monde. Les autres sont déjà arrivés sur les rives du virtuel et
la prospérité était au rendez-vous. Le pays d’origine de Jean-Marie Blanchard, la France, est déjà en train d’en tirer
les bénéfices. L’auteur de la critique de l’article « Le mirage de la révolution numérique en Afrique » avait donc
sûrement un emploi payant, stimulant, valorisant en France. C’est juste par amour pour les Africains, par amour pour
l’humanité souffrante, qu’il s’est sacrifié, qu’il a renoncé aux privilèges de la liberté et de la prospérité qu’offre une
société déjà installée dans l’ère numérique pour soulager la misère de ses frères humains. Même s’il ne nous dit pas
ce que cela coûte au continent.

Seigneur, préserve-nous de nos amis...consultants


Les consultants et experts de ce type sont tellement nombreux à être passés en Afrique que l’on se demande
pourquoi nous sommes toujours aussi pauvres. Mais peut-être que, comme le disait Axelle Kabou, les Africains
refusent le développement, malgré toutes les peines que se donnent les bailleurs de fonds et les experts. Il y en a
cependant d’autres – comme le professeur Serge Latouche - qui disent que la meilleure manière de permettre à
l’Afrique de se développer serait de lui foutre la paix… Jacques B. Gélinas, un sociologue québécois spécialiste du
développement international, allait plus loin. Pour que le Tiers-monde s’en sorte, soutient-il, il ne faudrait pas lui
donner plus d’argent, il faudrait lui en prendre moins.
Je ne sais pas quels montants l’Afrique perd en frais de consultations et en émoluments pour les experts, mais ce
montant pourrait soulager une partie de la misère que l’on espère éradiquer avec les technologies et les réseaux
numériques. La sagesse populaire nous dit que la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a. On
pourrait en dire autant : la plus performante et la plus belle des technologies numériques ne peut donner que ce
qu’elle a !

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