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POUR UNE LINGUISTIQUE DE EENONGIT T.3 de solutions. san de représentation re: meétalingustique sans ns, en particulier sans catégorisation sans transeatégorialité, Duns 'étude pe svons vu que notion, termination, aspectalit, mada Nous avons vu aussi qu'il n’existe pas de ins dey rps pyc culls on pura ne sico-culturell Extrait de Qu’est-ce qu'un probléme en linguistique ? ‘A. Cilio cocmans I POUR UNE LINGUISTIQUE DE VENONCIATION TOME 3 A. CULIOLT Antoine CULIOLI POUR UNE LINGUISTIQUE DE LENONCIATION Domaine notionnel Tome 3 OPHRYS Collection Lhomme dans la langue aanimée par Janine Bouscaren Déja parus 1. Danon-Boileau Le Sujet de Ménonciation, Peychanalyse et linguistique (Preface de R. Diatkine) Enonciation et référence L. Danon-Boileau G. Vignaux Le scours acteur du monde. Enonciation, argumentation et cognition. 1B. Grive LLogique et langage. J. Franckel et Les figures du suet D. Lebaud |A propos des verbes de perception, A.Caliol Pour une linguistique de I'énoncation. Opérations et representations. Tome | Subjecthood and subjectivity, the status of M. Yaguello(ed.) the subject in linguistic theory. ©. Pachs Paraphrase et énonciation LL. Danon Boileau Du texte littéraire & ate de fiction A.C. Berthoud Paroles & propos. Approche énoncative ct interactive da topic ©. Fuchs Diversité des langues eS. Robert (eds) ct représentations cognitives, C Rividre et La nation M-L. Groussier (eds) S. Fisher Enonciation, manigres ettrtitoires A. Deschamps et Les opérations de détermination 4. Guillemin-Flescher (eds.)_quantification/qualification A. Cull Pour une lingustique de I'énonciation Formalisation et opérations de repérage. Tome 2 A paraitre : D. Paillart Alkérité et déformation e1 8. de Vogtle ‘Théorie des reperes énonciatif A. Culioli Pour une linguistique de ’énonciation. Acces, Déour, Obstacle. Tome 4 Cove es popit neletue Waster, seks ees de Fa. 1.122.582 $4. pn que en copes ception semen esr &Fusge pve copie on ), lors du par- ‘outs sur le domaine de validation, c”est-a-dire un point a la Frontire, le mi- imum done, n'est pas validé ; d’0i Ia sortie en E, c’est-2-dire I'inexistence. 11, Ceci n'empéche pas les déformation (an contrat! hétoriques: Le pro jet commence a existe Je voudrals exter wn peu plus dans ce bureat. 30 Pour une linguistique de Vénonciation 3 Ce jeu a la fois simple et complexe permet de rendre compte de phé- nomnes variés que je signale au passage, en vrac : que l'on pense au un peur de Viens un peu !, od un pew marque simplement la localisation en |; comme donner un coup de baiai ne signifie pas que vous donner un coup de balai, 4 peu, ici, ne s‘oppose pas & beaucoup. Ce marqueur de seuil se retrouve dans Vanglais just, V'allemand mal, le néerlandais eens (vertel eens se trae dduira par racontez-nous un peu et non racontez-nous une fois). Que Von Pense aussi a In substitution possible au moins/seulement dans si seule- ‘menv/au moins, ow méme/seulement dans sans seulementinéme (...). Au ‘moins se passe de tout commentaire supplémentaire, Quant & méme, is anale qu’un terme escompté en I (resp E) est, en fait, en E (resp 1): *méme tun simple « au revoir », le minimum de courtoisie, que l'on attendait (I) n'a pas €t¢ prononcé (E)'. C’était pourtant la moindre des choses, IV. Seulement comme coordonnant Voici quelques énoncés qui nous serviront de base de raisonnement Crest un excellent apparel ; seulement, i est cher Je viendrat sans faut. Seulement, je serai un peu en retard, Leer est un pe Tong; seulement, i comient beaucoup de re Grice & seulement, on atire attention sur une opposition, le plus sou- vent une réserve, une restriction, qui met en lumigre une propriété supplé- ‘mentaire. Ce faisant, on modifi ce que l'on vient d’avancer : dans la plupart des cas ils‘agit d'une mise en garde (ainsi, dans les deux premiers énoncés, ‘on peut tes aisément insérer une incise, tele que je vous préviens, wild, at. tention, ec. (etc. sera développé plus bas) Peut-on ramener cet emploi de seulement 3 “non-nul'Pnul‘et“pas-plus’, ‘comme nous "avons fait dans les analyses précédentes ? Commengons par “non-nul'/ nul’ (1) d'un cOté seulement introduit une certaine caractérisation supplémentare (d’oi “non-nul") & propos dun appareil, de ma venue, d'un livre, Ainsi, on est, d’embiée,&I'Intérieur du domaine de validation, (2) D'un autre cOté, on voit que les proprigtés ainsi conjointes ne sont pas co-orientées d'un point de vue téléonomique (dans une formulation grossiére = “Bon’ /"Mauvais'; “Normal, ‘Attendu’ / “Anormat’, “Inatendu’). Le premier terme de la relation (constitutive de I"énoncé) fournit orientation de la propriété initiale (‘excellent appareil’, “venir sans faute’ livre un peu long” ), On obtient ainsi une occurrence de propriété stabilisée (ell est orieniée vers le centre onganisateur, qu'il s'agisse de type ‘ou d’attracteur). La propriété peut ete dordre favorable ou défavorable, peu A propos de ta motion 31 est qu'elle fournisse une orientation (vers le centre du Importe. 'essenti ‘domaine notionnel). Le sovond terme (‘éue cher’, ‘Etre (un peu) en retard’, ‘contenir beau coup de révélations’, done “Etre intressant’) signale que, par rapport a Ia premitre propriété, il existe une seconde propriété, désavantageuse (‘cher’, ‘on retard”) ou avantageuse (“intéressant). Ainsi, la catégorie téléonomique ‘comporte une orientation opposée celle du premier terme, d’ol la construc lion ['Intérieur du domaine d'un versant contraire: a ‘étre excellent (‘Bon’) s"oppose “étre cher’ (‘Mavvais’), ete. On a done, de ce fait, consult une zone qui appartieat a la fois au ‘non-nul (on reste en I) eta in verse-de"(désigné aussi par “pas-plus’). Notons p la premiere propriété (d°od orientation +p) et q la seconde propriété (d’0i T'orientation q —>). On ‘oit que 'on obtient la représentation suivante : , pour noter une lexis Pour une linguistique de Vénonciation T,3 3 ‘A propos de la notion (On pourrait multiplier les exemples = (scription et théorisation), on se contraint & conserver la complexité ; on ‘contre les réductions qui accompagnent tout travail métalinguistique ; on Felie des domaines que la tradition spare, et l'on se donne les moyens de ne Is se restreindre au séquenticl, au pré-ajusté d'une forme simplifige de ‘communication Dans son Avant-propos & The Logie of Life. The Challenge of Integra- tive Physiology “Sir James Black, éminent spécialiste en pharmacologic (Prix Nobel 1988) oppose la conception linéaire de la biologie moléculaire, |i conception de activité biochimique comme un ensemble d'événements ‘nussivement en paralléle, I! remargue : « Explanatory models for such pa rallel-coupled systems are likely to involve the kind of non-linear dynamics needed to expound the eddies and currents ofa stream. » Plus loin, il ajoute ‘In the current hegemony of molecular biology, with splitters having afield slay lumpers like me often get gloomy about the future. Like Kipling's Just Sv Story “How the Camel Got its Hump" 'S Je ne suis pas contre le projet en tant que projet: seulement, je ‘m incerroge sur sa viable. (on oppose idéalité (hors réaisation) et fasabilité (r€alisation), et seulement ‘marque cette inguiétude) ‘90 ke pour I m 70, c'est énorme ; seulement, il es tout en muscle, ‘avec le travail de force qui est le sien ! (on trouve anormal le rapport tille/poids, mais on le ramne @ la normalité ‘'une explication rationnelle) Jaime les romans, seulement je manque de temps. (on oppose le temps nécessaire pour la lecture d'un roman au manque de temps effect) We all get dhe Hany — Cametious Hump ‘The Hump that is black and blue ! However, ‘The cure for this il isnot to sit still, (Or frowst with a book by the fire ! But to take a large hoe and a shovel also, And dig till you gently perspire, » 1M jowe eres bien au tennis; seulement, iL entraine tous les jours. (te un us bon joueur est valorisant, agréable, bref “Bon; cela a un coot lun entrainement quotidien, assujettssant, bref pénible, donc inverse de “Bon’. On peut gloser : ‘sa réussite s’explique’, avec le retour & la chine «attendus : ‘on na pas de réussite sans peine") (On aura, au passage, constaté que seulement peut éte, le plus souvent, ‘emplacé par mais, andis que mais ne peut pas étre remplacé, dans certains schémas, par seulement Il existe, en effet, d'un c6t6, une parenté formelle entre les deux marqucurs (construction d'une altérité dans un domaine), ‘mais, d’un autre c6té, une différence qui porte sur les opérations (et leur en- cchainement) & I'euvre. Seule, une étude beaucoup plus fine que ce survol ‘permettait de montrer comment fonctionnent les équivalences modulées, en particulier lors de la substitution seulemenv/mais, Wot elle est possible, analyser les conditions qui bloguent cette substitution. On peut aussi tendre la recherche aux autres marqueurs d’altérité, adversativité, conces- sion, et, de fagon spécifique, comparer seulement et ne... que.... On peut (on doit) en outre effectuer des analyses semblables pour d'autres langues (an- lais : only, just, et. ; allemand nur, blo, allein, et. ; suédois : bara, blot, ‘endast; néerlandais : maar, slechts, pour ne donner que quelques exemples de langues germaniques). ‘oil un programme scientifique qui allie Pempirique sous sa fore la plus fine et le raisonnement métalinguistique. En se fixant de tels objects 14, Baited by CAR. Boyd and D. Noble, O.UP, 1993, 15. Ici, hump signife “la bosse (du chameau)’, mais dans le potme hump sic mifie ‘cafani, dépresion’. Frowstsignifie “se reezequevller, se blot. (note de MLG et CR). 153. On ne fit référence ei qu’aux schémas de coordination, naturellement. QNT / QLT et détermination NOTE SUR « DETERMINATION » ET « QUANTIFICATION » : DEFINITION DES OPERATIONS D’EXTRACTION ET DE FLECHAGE* (On présentera ci-dessous une definition prétiminaite d’opérations fon- slamentales portant sur les catégories de détermination et de « quantifica- ‘ion/qualification » ; objectif est de montrer comment, & partir d’observa- tions (angues diverses, acquisition d'une langue), on est contraint de ‘construire une catégorie grammaticale (au sens de « en produire une repré- sentation métalinguistique explicite »), sans se borner soit & utilisation (uitive d'un terme tel que « determinant » soit & emploi d'un déterminant [propre A une langue, tel l'article défini, soit encore au recours& un opérateur logique, tel que « iota » (Russel!) ou « epsilon » (Hilbert et Bernays), est peu de termes aussi vagues que le terme de détermination : 'or- naire, on emploie, sans se préoccuper d'en préciser I'acception, des mots comme défin (article defini; article indsfini: pronoms indéinis), détermi- nants (articles; possessifs; etc), comme si I'on appréhendaitintuitivement le sens de ces termes. Cette illusion a une triple origine (1) d'un bt, Fillusion « morphologiste », qui est une version sim- pliste de la relation entre « signifiant » et « signifié ». Les déterminants existent que dans la mesure od ils ont une forme (ainsi des articles, y eom- ‘is article 2éro dans une analyse plus raffinée des phénoménes),et étude se leur valeur se ranibne & des probiemes classiques d’incidence (ainsi Iar- Uiele frangais est incident au Groupe nominal et de quantification (article «fink est emplayé soit de fagon générique ~ilelasife sot de fagon par- "ERA 642, université de Paris 7, 1977. 38 Pour une linguistique de Uénonciaion T. 3 ticulidre ~ il spécitie -). Que se passe-til dans les langues sans articles par exemple ? Comment traiter de fagon comparée le classificateur « ny » en mal- gache, trop souvent assimilé& article defini francais (sans que T'on precise Te statut de.ce demier),’anticle arabe, ot 1a encore on pose que : article arabe = article défini frangais ? Bien plus, comment relier les phénomines de dé- {ermination et I'agencement linéaire de I'énoneé (ainsi, en chinois od il n’y a pas d'article, un terme a gauche du prédicat est nécessairement détermin€ ; il est nécessairement a droite soit du prédicat principal jie de localisation). De méme, comment waiter, avec quelques espoirs de généralisation, des partcules japonaises « wa » et « ga, du tagalog « ang/ng » ou du coréen « fou ka/mun » (2) On woit done quelle est la seconde origine de 'illusion mentionnée plus haut : parce qu'on s'est habitué & travailler sur quelques langues pproches, on lie Ia détermination a un ordre de phénoménes arbitrairement les déterminants appartiendront a une classe syntaxique qui le des articles, pour la simple raison qu’en frangais, anglais (3) Au fond, on procéde par classification d'unités superficielles, aux- ‘quelles on rattache un « signifié ». En fait, la seule démarche qui permette rigueur et généralisation doit se fonder sur un changement radical du point de vue : on considérera que la ) to denote the definite expressions, thus (23) X, (lion) 5X, (grow!) » ‘On raméne ainsi le probléme de la détermination 3 une simple notation ‘sans justification aucune. La position des logiciens est plus satisfaisante, mais n’est pas d'un ‘stand secours pour le linguiste. Ainsi, G. Frege, dans les « Grundgeserze der Arithmek » écrit au paragraphe Il consacré a ce que Frege appelle « Wert. verlauf » (« parcours des valeurs d'une fonction »). « Wenn sich die Gleichsetzung von « € (A=€)» mit « A "allgemein hte aufrecht erhalten lassen, so hitten wir in der Form « € & (e)» einen Er- satz fir den bestimmten Artikel der Sprache ». “intuition juste est que Pantie défnt allemand provient dune ope ration anaphorique d'identiication, mais il est dificile de relier cette constatation & une analyse linguistque. len va de méme pour B. Russell dui, dans les « Principia Mathematica » et dans « Introduction to Mathema tical Philosophy » établitune distinction entre les descriptions indfinies (a such and such) et les descriptions defines (the such and such). A la suite de Frege il propose de noer, pour une propriété P symbolisée par un préicat une place A(x), individu mui de la propriété P’, A(x) On sait que D. Hil bert et P. Bernays ont introduit dans le tome 2 des « Grundlagen der Mathe mmatik» un opérateur e, descendant de Frege par Russell, dont is nous disent qu'il pourrait représenierIaticle din On le voit, que 'on se tourne vers les études linguistiques ou vers es «tudes logiques, on ne trouve aucune presentation saisfalsante de ces ope rations élémentares de détermination auxquelles nous fuisons allusion plus haut, D’od la nécessité (1) de dégager partir d'une observation empirique 1.08 A représente un objet (« Gegensiand ») 40 Pour une linguistique de V'énonciation 7.3 cc qu’est la catégorie du nombre en linguistique (observations sur diffe renies langues ; observations sur ontogenése de la eatégorie du nombre chez les enfants de deux & quatre ans); 2) de construire une représentation {es opérations de détermination (on se restrindra ici & deux opérations, dé ‘nommées respectivement « extraction » et « fléchage »).. La catégorie du Nombre Le Nombre est une catégorie grammaticale fondée sur un jew de cor- respondances entre d'un e6té un ensemble de marques morpho-syntaxiques et, d'un autre c6té, un systéme d’opérations et un systdme classificatoire ‘Systéme d'opérations ‘On peut, en simplifiant ramener tout systéme aux opérations fonda- ‘mentales suivantes : * opérations portant sur la « quantité » (dans un cas particulier, on parle d’opérations en extension). Divers cas peuvent se présenter selon que ‘Yon a affaire a du discontinu (en frangais: livre, pomme) ou du continu (en anglais: luggage (bagages), en frangais : beurre). Dans le premier eas, on est en présence de collections d’éléments énumérables (1, 2,10...) dans le se- ‘cond cas, on a du non-énwmérable, qui fera objet d'opérations de préleve ‘ment (emploi de classificateurs : a piece of luggage (litéralement « un mor cecau de bagages »), « head of cattle » ((éte de bétal), en anglais, ou opérateurs différenciés : peu de livres, peu de beurre, un peu de beurre, ‘mais un peu de livres étant impossible); selon que la quantté est dStermi- née on trouvera ainsi des cas divers 1,2, 3 livres, quelques livres, beaucoup, de livres, des livres, pas de livre(s), ‘opérations portant sur la relation enure « compréhension » (qualité, propriété) et « quanti» : ‘on distinguera les problémes complexes de relation entre compréhen- sion et nombre si l'on dit « des beurres », cela ne signifie pas « plusieurs ‘quantités, une grande quantité de beurre » ; mais « plusieurs qualités de beurre » ; dde méme en anglais: there isn't any butter signific « il n'y a pas la 'moindre quantité de beurre », mais : any butter is good signifie « n'importe uelle variété de beurre est bonne, tout beurre est bon » ; Note sur « détermination » et « quantification » 4l les operations de sotalisation (tous les canards ont les pieds palmés : ‘out homme est mortel ; rows les éleves ont eu la grippe ; tout le Deurre a fondu; les opérations enchainées : ainsi, Memploi de « certains » implique une double opération : j'aime lire certains romans signifie : « parmi les romans, ily a des romans (possédant une propriété particuligre) que j'aime lire. ‘+ opérations de référence au générique (8 ta classe) : le canard a les eds palmés, les canards ont les pieds palmés ; un arbre a des racines, wt tone et des feuilles mais non * des arbres ont des racines, un tronc et des euilles. En anglais : the duck, a duck, @ (article 2ér0) ducks, mais non * the ‘ducks. ‘Systeme classificatoire 1 s'agit d'un systéme qui implique deux ordres de classification (a) d'un e616 il peut s‘agir d'une répartition arbitraire pour un état de langue donné, sans explication autre que diachronique, méme si évolution cst, elle-méme, partiellement explicable. Ainsi, en italien, il existe des plu- ricls en « ~ a » dont Iétendue a varié au cours des siteles ; en frangais, on dit des ossements, des gravats sans singulier correspondant (on appelle de tels substantifs des « pluralia tantum », littéralement « seulement pluriel »), ‘ce qui peut s‘expliquer par une relation entre pluralisation et désignation 4un ensemble complexe appréhendé globalement. Mais en anglais, il existe la relation symétrique (singulier et désignation d'un ensemble complexe ap- Préhendé globalement) : luggage (bagages), fruit (fruits). En allemand, on ‘utiisera un préfixe sociati « ge » : Gewasser (les eaux A ce propos, il importe de remarquer qu'il existe de nombreuses langues ot ta distinction de nombre (unique/multiple) ne se marque pas en surface (ainsi en japonais, malas, etc), ce qui ne signifie pas que l'on ne pas, sur le plan cogniti, opposition « unique/multiple » ou les car- dinaux 1, 2, 3,.. D'um autre cdte, certaines langues distinguent, & ¢Oté du singulier (marqueur de unique) et du pluriel (margueur du multiple) une forme qui se situe hors de U'opposition « singulier — pluriet ». Ainsi en ‘basque & e6t€ de hirian (dans la ville), hirietan (dans les villes), on trouvera Zorn hiritan (dans quelle) villes)) ; des phénomenes analogues existent en persan. Certaines langues distinguent, en outre, un duel (objets qui vont par deus ; le duel est encore vivant en eskimo, par exemple, et, dans le domaine indo-curopéen, dans quelques langues tees le slovene ou le lithuanien). On trouve dans certaines langues un tril, voire un quadril, En russe, il existe des numéraux collectifs (deux : dvo'e ; wois : tre). 2 Pour une linguistique de Vénonciation 7.3 Tous ces problémes se situent a la fro du linguistique. ‘Comme pour le genre, on prendra soin de ne pas confondre la catégo- rie du nombre ct \e probleme cognitif de la perception des proprietés et des quanttés. Mest évident que organisation des classements pourra vatier selon des « tiltrages », qui dépendent eux-mémes de facteurs psycho-socio- logiques (cultures, technologie, mythes). on peut ramener toute classification au systéme suivant: ~ discontinu/continu : (livre, erayonfbeurre, eau) s | = quantité/qualité : 2, 3, 100, (un) peu, quelques, beaucoup, y compris, ‘ce qu'on appelle le parti; ~ toialité (voir plus haut) ; relation entre Ie générique et la quamtité (voir plus haut) ; relation entre quantité et propriéés (voir plus havt); = regroupements notionnels : paires, collections ; ensembles appré- hhendés globalement ; collections od l'on peut individualiser les éléments ; = relations, plas ou moins claires selon les langues, entre la catégorie ‘du « nombre » et celle du « genre » (relation entre singulier, pluriel et animé, de méme qu’entre collectif et féminin ou neutre), entre la catégorie du nombre et celle de déterminé : le pluriel est, d'un c8t6, associé @ la valeur da «détermin »: ainsi, quand on pluralise, pour marquer la multiplicité ce qui. ‘on le comprendra aisément, n'est possible que pour des substantifs désignant des classes (collections) dérres physiquement distincts (voir plus haut sur opposition « discontinu/continu »). Or, le discret (c'est a-dire le discon- ina) apparait és souvent comme déterminé (Iui-méme le plus souvent as- soci 4 'animé), a la différence du « massif» non-individué (contin, dense) ‘qui est, lui, associé au neutre et l'indéterminé ; d'un autre c6té, le pluiel a tune valeur d’indétermination par rappor au singulier: que 'om pense a « il» (0 la référence anaphorique implique une identification claire (Jean... if) et «ids » qui peut référer vaguement 2 un groupe de gens (ils nous prennent tout...) ; de méme en anglais, od des pronoms tels que everybody (tout le ‘monde), anybody (quelqu’un, nimporte qui) peuvent éire repris par un pro- ‘nom personnel pluriel (« they »). Rappelons, pour compléter ce tableau schématique que, dans les langues oi il existe une opposition de nombre, le singulier semble constituer 1a forme fondamentale d’od le pluriel est dérivé, d’ob certaines dissymétries (on dit parfois que le singulier est le terme non-marqué et le plurie le terme ‘marqué de opposition « singulier/pluric!»)- ainsi, on peut dire : «je ne sais ‘Pas qui est venu » et non * je ne sais pas qui sont venus, Des facteurs d’ondre pragmatique (relations entre les sujets locuteurs ainsi qu'entre les sujets et I"énonciation) ou d'ordre rhétorique viennent re de Mextr-linguistique et [Note sur « détermination » e « quantification » 4B ‘compliquer le systéme classificatoire. Ainsi pour ne prendre qu’une langue, cen frangais, le singulier et le pluriel ne s'emploient pas indifiéremment. De ‘méme, Futtisation du pluriel 3 des fins de modulation est bien connue: le luriel rend souvent plus « floue » Vacception du substantif et estompe les ‘« bores » de la référence sémantique ; ainsi le sable du désert renvoie & tune matiére et les sables du désert aux étendues sablonneuses avec des connotations d’espaces illimités (voir de méme : l'eau du lacfles eaux du ac, ou encore les lointains bleutés). Dans d'autres ca, la pluralistion marquera des acts par rapport & une propriété (Ja faiblesse de Paulfes fablesses de Paul) ou des objets distinets Par rapport a un objet composite appréhend& collectivement (ainsi, en grec ancien : au singulier Keramos signifie «tot de tiles », et au pluriel Kera- ‘moi « uiles» ou « vases dangle» La pluralisation pourra aussi étre utlisée pour amplifier (voir plus haut. dans des emplois métaphoriques tels que le langage honorifique (ainsi dans le pluriel de majesté Nous,... ou le plutiel de politesse). Inversement, le singulier pourra Gre utilisé par rapport au pluriel& des fins emphatiques: ‘ow pour des modulations de type divers (en frangais : la tripe et les tripes : ‘ow encore : il ya de la voiture aujourd'hui — ily a beaucoup de voiture; it a Teil fourbe 8 e046 de : ila des yeux fourbes). Ce dernier emploi se distin- _guera soigncusement du singulatif employé dans des langues comme le ga8~ Tique ou le hongrois oi on dit « un demi-ceil, un demi-soulier ete.» pour dé signer un élément constituant d'un couple ou d'une paire. ei, il n'y a pas ‘modulation, mais contrainte. Tout ceci forme un domaine dune grande sub- Uilité qui pose des problemes complexes lors du passage dune langue & autre car les contraintes et les effets sont fort variables. Ensembles de marques morpho-syntaxiques Ces marques se raménent toujours 2 un phénomdne de reprise dans la cchaine, & partir de la variation morphologique d'un terme de base. Ainsi, ‘tant donné fe cheval est grand, jobtiens : les chevawx sont grands. la plu ralisation a'effectue grice & des rogles, morpho phonologiques telles que + Toiseau a chanté/les oiseaux ont chanté (regles portant sur le changement de la forme, les élisions, les liaisons, etc), des régles de substitution : oiseau 4 chanté ~ il a mangéfes oiseaux ont chanté ~ ils ont mangé ; des regles accord: le chat et fa souris sont heureu ensemble (oii masculin + fémi- rnin = masculin pluie}. “4 Pour une lingustique de Vénonciation T. 3 ‘Chacun de ces phénoménes souléve de nombreux probiémes tech- niques et thSoriques qui ne seront pas abordés ici et leur étendue est fort va Fiable selon les langues. ‘Au cours de I'évolution d'une langue, le systéme du nombre peut se transformer : ainsi, en anglais, en relation avec une transformation du sys- {me morphologique il s'est er6é une sous-classe des substantifs de mesure cu des substantifs désignant des collections, ise, pour une bonne part, des anciens neutres ; cette sous-classe s'est maintenue, voire élargie, en anglais contemporain, bien que certains de ces éléments en soient sorts : ne dit plus : 20 year mais 20 years, on a 20 bob (mot familier pour « shil- ling ») et des pluriels & marqueur2ér0 pour de nombreux noms animaux (trout « trite» ; duck « canard (sauvage) » cc.) De m&me, le duel a disparu dune bonne partie des parlers arabes et Ton voit en gree ancien, le duel disparaitre rapidement dés le premier quart du quatre sige. On conservera en mémoire cette complexité des données empiriques lors des études formelles. La présente note s‘insére dans une théorie générale de l’énonciation, dont on donne ci-dessous les linéaments. Le probleme de repérage de tout énoncé ou, pour étre plus précis, le probléme que pose Iajustement des syst#mes de repérage par des énoncia- ‘urs, implique nécessairement (1) que I'on définsse le domaine de I'énon- ciation, (2) que V'on ne sépare pas, dans les regles métalinguistiques, les ‘opérations prédicatives des opérations énomciatves. Enoncer, c'est consinuire un espace, orienter. déterminer, abl un réseau de valeurs référentielles, bref, un systtme de repérage. Tout énoncé ‘est reper par rapport a une situation dénonciation qui est définie par rap- Port & un premier sujet énonciateur Sf (un des deux sujets énonciateurs sans lesquels il n'y a pas d’énonciation) et & un temps dénonciation 7, Si Fron symbolise par des majuscules bovclées ce qui est du domaine de l’énon- ciation et par des majuscules droites ee qui est du codomaine (énoncé ou texte), on voit que toute relation énoneiative se présente comme un paquet de relations = # (oonciaton) 5 E(noncé) (aot énoeiateuy 5 S (ut de Vénoned) (emp de Ménoncation) $5 (emps de 'Evdnemeat sega Efe Vénoneé) La relation de repérage est notée grice 4 l'opérateur «dont on donne Jes propriétés: dans tout acted énonciation, on a une relation orientée, issue [Note sur «détermination » et « quantification » 45 {une opération de repérage qui, dans un schéma,assigne un terme la place de repére et 3 un second terme la place de repéré ;opération de repérage & prendra deux valeurs : valeur identification, par exemple : a €.; valeur de localisation : on localise un terme «par rapport & un terme 6, par exemple : a € b, qui comport une lecture duale B > a (se lit « b epsilon- miroir a»). S'ilexiste entre le terme a gauche et le terme a droite une el tion composée,d'ideniication (partielle) et de localisation (ainsi: ce livre est un dictionnaire: (1) identification entre ce livre et un dictionnare (2) lo- calisation, lire est repéré par rapport ala classe Dictionnaire, ola clase Dictionnaire comprend ce livre), on parlera de teation d'ppartenance. On a ainsi la formule générale de constitution d'un énonc€ : & Sit GF), ov symbolise une lexis. A partir de cette formule, on peut construire des catégories complexes, tells que la modalitéet aspect aque son dérivé le temps, considéré comme une relation Word : antériorté concomitance, postérorté) Quant la localisation, elle est inhérene au mo- de puisque lopérateur « est un opérateur de localisation, Videntifi Sant un cox particulier de localisation, eeste\.ire de repérage pat rapport 4 soi-méme ou un autre considéré comme identigue. Ainsi, pour ne donner «qu'un exemple, on tera la valeur existenielle du verbe éee d'une operat de localisation avee auto-repérage: Diew et (« Dieu est qui ilest »a a, ce gui est le nom propre par excellence), De méme qu'exiter sera analysé comme « x est & 'endroit oil est», €'est-t-dire: ——— BEC eS (VEC Mine i ainsi : Diew existe, d’oi les regles de comportement du verbe francais exister (il en va de méme pour l'anglais « exist »): Les fantimes existent; les fantémes nexistent queydans les chateaux hamtés, plutGt que : les fan- témes existent dans les chateaux hantés. En effet, puisque exister implique ‘une localisation, on ne peut I'uiliser avec une localisation explcite sans une ‘modulation sur cette localisation, ici 'opérateur de restriction ne... que. La lexis elle-méme sera consttuée de fagon similaire : un repere et un repéré, «oi, entre autres, la catégorie complexe de la diath@se (orientation de la re- lation prédicative), Texiste enfin une opération de « quantification » (notée Qt) qui porte sur I'un des termes constiuants de la relation prédicative & Vinisrieur de la lexis, ainsi dans : « r 6, Qt pourra porter sur a ow sur b, soit sur la relation prédicative :() r (), Sot sur la relation : Evénement ~ E (noncé) ~ Sit (ua tion). ~ Le premier cas se rencontre dans des énoneés tels que : (1) «le renard a mangé deux poules » ou encore (2) « combien dois-je en acheter, de billets?» ; Pour une lingustique de Uénonciation T. 3 ~ Le second cas est, de fagon classique, représenté par : (3) « tous les livres de ta bibliotheque ont été lus par quelqu’un » & e018 de: (4) «ily a quelgu un qui atu tous les livres de ta bibliothéque » ‘i I'on voit nettement que tous en (3) porte sur la relation prédica- tive :() ont éxé lus () (ceci est particuligrement clair en chinois oi « DOU » ‘modifie le prédicat; en frangais: « rous les gens sont sorts » et « les gens ‘sont en totalité sorts » ;« Jean a mangé tout le gdteau » et « Jean a totale: ‘ment mangé te gateau »). De plus, on remarque qu'il existe une relation centre « thématisation » et « quantification » : en effet, en (3), tous s*inter- prete comme « chacun d’entre eux » :« les livres de la bibliotheque ont eu ‘chacun entre eux, un lecteur (vraisemblablement différent) » alors qu'en (4) tous sinterpréte comme « en toralité» et quelqu'un renvoie & une seule ‘et méme personne, « une certaine personne » ‘On posera que Qt est une opération qui associe éventuellement & une ‘operation sur la quantité, une opération sur la qualité ; bref, Qt est un ops rateur complexe qu'on écrira (Ont, Qlt). Ainsi, dans : « ily a des aliments (qui m’écarurent », des aliments s"inwerpréve comme « quelques » et/ou « des varidtés de », ~ Le toisitme cas concere ce que I'on appelle souvent le spécifique ‘ou le particulier par rapport au générique : ainsi dans «le renard aime les poules » (génétique strict); «le renard s'est fait prendre au piege » (particulier); << c’est encore le renard qui aura fait ¢a » (situation intermédiaire que Yon trouve aussi dans: « les sangliers ti abtment réguliérement sa vigne », «les choux-fleurs viennent bien cette année »), On voit que le troisiéme cas associe aspect, quantification et modalité, Nous présenterons ii, de fagon schématigue, trois opérations fonda- amentaes: « erraction »et« le fléchage » d'un cts, le « pareours» de autre. Pour ce faire, nous considérerons un cas simple, elu d'une notion Ade npe discret (done érumérable). Nous effecterons une premiére opé- ration qui servira a localiser,repéer A pat rapport la situation dénoneta tion, Cette opéation sera rprtsentée par expression (I) = Ae Siy et cor- respond dans la langve usuele& peu prét 4: « Soit A», « A propos de A», «Parlons de A ». (On remarquera que cette opération dlimite um domaine A par contraste avec tout ce qui n’est pas A et que nous noterons X : en «Pants termes, poses A, c'est en méne temps poser la fermeture da com plémentare de A. Dans certains as, il sera wile écrire la notion sous forme complite : (A.A). En outre, la notion étant un prédicat, elle sera re- eésentée comme un opérateurunaite: (4, ou, sous la forme complete: () (aay ‘Note sur « détermination » e « quantification » 47 (On effectuera alors une seconde opération (opération de prélévement) dont le domaine est la notion et le résultat est un objet dans une classe (cet ‘objet peut éire une quotité ou un ensemble) dans le cas particulier que nous ‘considérerons (notion de type discret). Cette opération sera notée Coe ( As sit, ° fe 3% LF 3 od les accolades marquent que Sit, prend la valeur Sit, dans , la valeur Sit, dans : <( ) ¢ <( JA Sit». Selon les langues, Ja parenthése se réalisera par exemple comme un classificateur ou « zéro », La toisitme opération attribue une détermination quantitative & Vob- Jet 2), quill s‘agisse de cardinalité (numéral) ou d'une quantité indéfinie ‘elle sera note Nous appellerons « exiraction » Vopération complexe représentée par expression (3), Sur un objet extrait, on peut effectuer une operation Q, didentification (identtication quantitative evou identification qualitative) telle que : She coro arp hehe gsr peer egies ph lee Nh aie ad I aepeI* Comme on te voit, Videntification est de ‘ype anaphorique, qu Sagisse d'une anaphore contextuelle ou situationnelle, d'une identifi simple (un../ee...) ou d'une identification contastive (un... un./le, te). Cote operation sera notée Pour une lnguistique de Vénonciation 7.3 Z eC )aesi ¢ 2s AEC eC DAs Sit, pooP ES ff Los tL ® % Lacie Si, et sera apple « fléchage ». : On poutra itérer I opération extraction et on pourra donc composer les opération, ainsi: EYPE A ct de FE. Lopération de « parcours» consiste& parcourie toutes les valeurs as- signables a 'itérieur d'un domaine sans pouvoir s'aréter a une valeur dis tinguée (ainsi: « tot chien a quatre partes» ; «any dog barks »). 1 put de ces opérations, on effectuera un calcul qui endra compe rPhénomines tls que utilisation des determinants dns les ilferetes mgues, les propositions relatives, empl de « ify» en Prangais, pour ne citer que ces problémes, Bibliographie (DAH-69)-DAHL Osten ~ « Topic and Comment : A Study in Russian and General Transformational Grammar » ~ Acta Universitatis Gothobur- 1 sgensis (Slavica Gothoburgensia 4) ~ Stockholm 1969. (p, 22) (KRA-72)-KRAMSKY Jifi ~ « The Aticle and the Concept of Definiteness in Language » ~ Mouton 1972. (p. 44) (KUN-73)-KUNO Susumo ~ « The Structure of the Japanese Language » ~ Cambridge ~ MALT. Press 1973. (p. 39) APROPOS DE QUELQUE* Introduction A partir d’un ensemble d observables traités dans un premier temps de fagon distributionnelle, on se propose de construire une problématique qui porte sur la catégorie linguistique de la détermination. Ceci de manire &re- lier des phénoménes différents en apparence, a donner un contenu opératoi des concepts trop souvent imprécis (cf. dénombrable/indénombrable, dis crev/dense/compact) eta faciliter les travaux comparatfs. Cette étude permet finalement articuler les opérations de détermination, d'une part, et les opé- rations d’ordre aspeetuel et modal, ’autre par. Préliminaires Lorsqu’on étudie l'opération complexe de détermination, il est diffi- cile de s'en tenir aux classifications traditionnelles, telles que définis/indéft- nis :cellesci n'enseignent rien dautre que ce que nous fourit une réparti- ion intuitive fondée sur une analyse distributionnelle. En outre, intuition S‘appuie, elle-méme, sur une conception naive de la référence, congue ‘comme une correspondance, en dernier ressort, immédiate entre un texte et ‘un fragment de réalité. D'oi bien des confusions & propos des valeurs de vé itd, et le recoure A dee termes sane assise théorique tels que connwinconna, * Actes du premier Colloque franco-bulgare de Linguistique. Contrastve Lin- ‘guises, Sola, 1-2, 1982, * a i 50 Pour une tnguistique de U'énonciation 1.3 (9 encore ancien/nouveau, c’est-2-dire information ancienne (Aéja donnée) ar rapport a information nowvele Le probleme qui va étre abordé dans le présent exposé révile les ine suffisances de flles procédures (en effet, on ne peut se contenter d’étiquettes, cconjointes & un commentaire approximatif) : il contraint le linguiste a se construire une démarche autre, s'il veut & la fois tenir compte, et rendre ‘compre, de la complexité des observations, Position du probléme On partira de Ia distribution diigrenticlle de quelgu’un, quelque chose. dune part, et quelque N, d°autre par, oi N représente un substantif (y compris te substanaif feminin chose, alors que chose dans quelque chose st éert sur Venveloppe n'est ni Féminin ni pluralisable, etn’ appartient done pas la classe des termes symbolisés par N). On notera que nous ne traitons ‘que des cas ob quelque est singulier!, Avec quelgu un, quelque chose, on peut produite une assertion (qu'il S‘agisse du présent, du passé composé, etc), sans autre valeur modale. En particulier, queiqu’un et quelque chose peuvent éire sujets, dans un énoncé Strictement assertif: quelqu un va passer pour prendre le paquet : quelqu'un n'a pas mangé sa soupe ; (il ya) quelque chose (qui) bouche le tuyau. Avec quelque N, le tableau est foncigrement différent : une analyse approximative montre que l'occurrence de quelgue dans quelque N est né= cessairement lige & la présence d’un marqueur modal, qui introduit une va- leur modale supplémentaire, En d'autres termes, quelque N est incompatible avec I'assertion strict. Ainsi, en dehors de la métalangue des logiciens (oi quelque tend le latin aliquis), il n'est pas possible de dire en frangais ‘quelque employé a oublié de fermer la fendtre, alors que \'on peut avcit (id 4) un employé/quelqu'un (qui) a oublié de fermer la fenétre. Mais, i Yon introduit, par exemple, une modalité supputative, on obtient quelque em- pployé aura oublié/a da oublier/a pu oublier de fermer la fenétre, qui est bien formé. De méme, en faisant varier la forme verbale, on vérifiera que un en- 1, Pour micux center Ia discussion, je laisse de oSt6 quelque pardsortehna niérefeomps, cat cela ne change rien au risonnement. En out, je ne m'occupe pas ‘a probleme stlistique, qui nest pas pertinent ich Enfin, on consttera, 2 Ta eure ‘de article, que le comportement de quelques est ruler et ne mévite pas un dive. Toppement spare. A propos de quelque 31 caisseurfquelqu'un viendra, un de ces jours, pour la facture, est acceptable, la difference de *quelque encaisseur viendra, un de ces jours, pour la fac” ture I sufitd’ajouter une valeur modale pour que lénoncé soit 4 nouveau bien formé : quelque encaisseur finira bien par veni, un de ces jours, en caisser la facture. Queltes sont les valeurs ans iniroduites ? Pour plus de clané, nous en ‘dressons ci-aprés un inveniaire sommaire mais suffisant, sans distinguer ‘entre Ia fonction de sujet? (ou, eomplément de rang 2éro) et la fonction de ‘complément (c'est de Complément de rang n, oi n est différet de 2610). 1) Eventualité (que Fon pourrait gloser par tel ox tel, si ga se trowe), supputation (probablement, vraisemblablement, etc), existence hypoth tigue (imaginaie, conditionnelle, interrogation se produira bien quelque miracle ! Si quelque mésaventure devait lui survenir. ‘Que quelque tempéte s’éleve, et je ne dorme pas cher de ces voliers, Que feras-nu si quelque incident perturbe le vol ? Est-ce que, par hasard. quelque voteur se serait enfa? imagine quelque colonel anglais, tout raide, au milieu de ce désordre Rien qu’a entendre ce nom, je m'imagine quelque bu ‘reaucrate, plein de sa personne. Tout ce que je erains, ees que ces dames ne nous fassemt quelque ‘méchante ajfaire (Nols) Tats-toi, de peur que quelque étranger ne Ventende, J'aurai vu quelque chat et l'aurai pris pour un renard. 1H aurait vu quelque fantdme que cela ne m'étonnerait pas, "Vous prendre: quelque mesure en sa fave est itapossibe, mais on peut avoir: vous prendre: bien quelque mesure en sa faveur, Ow en- core : vous prendre: quelque mesure en sa faveur, vous vous agite rez, et pus tout retombera dans Voubli Supposons que quelque obstacle surgisse, qu ferez-vous ? “Imaginons que quelque monarque décide de vendre ses biens, quelle ‘serait, votre vis, la réaction de ses ministres ? Quelque ruse se cache lardessous ly a quelque histoire de femme Raedessous. Je soupconne quelque machination. 2. Chaque fois que ce sera possible 'uliserai la terminologe courant afin de ne pas géner le lecteur : sin, je parle desu de phrase alors que, dordinaie, je parle Ge complément de rang’ zé% ou de terme de départ ou Se repere const, sel les ea, réserant le vocabe sujer su suet énonciateursujet de "énonce. Mais, sei, emploindifférencié du mot sger selon un usage bien install ne pte ps confusion. Couree done voir ceute représentation, avant daffronter quelque ti- Dural votre tour 2) Iération (répétition, habitude, enchainement régulier) Chague jour je buais sur quetque (nouveau) probleme. (Méme énoncé au présent:.. je bute.) Tous les jours, en allant a Uécole, je rencontrais, prés du russeau, ‘quelque clochard endormi. IY a toujours quelque mulot, ou quelque auire eee qui rongeur réussit se glisser sous les tales, este tout de méme te chemin de Racine, cetui que Wéleve le plus ddoue des messieurs de Port Royal emprantat en suivant la vale pour gagner Chevreuse et dela, Paris par quelque diligence. Le voila qui nous raméne encore quelque animal ‘abandonné /Quand it revient le soir it raméne, le plus souvent, ‘quelque chien perdu. On te voyait hiver,emmitouflé dans sa jaguette, sortird’Aix en bax ‘vardant avec quelque fllete et chercher dans la campagne, un abri bien esposé au soleil et protégé du ven, sa « cheminge » Ainsi se déroulait dans notre salle & manger, sous la lumigre de la Jampe dont elles sont amies, une de es eauseries ot la sagesse non des nations mais des families, s'emparant de quelque événement, mon. fiancailies, heritage, ruine, et le glissant sous le verre gros sissant de la mémoire, tui donne tout som relief, dissocie, rece vt Site en perspective... (M. Proust), ‘Aussi, si sortant de mon lt, jallaisécarter un instant le rideau de ‘ma fenéire, ce n’était pas seulement comme un musicien owe un {instant som piano et pour verifier si, sur le balcon et dans ta re, la lumiére du soleil état exactement au méme diapason que dans mon Souvenir était aussi pour apercevoir quelque blanchisseuse, por {tant son panier @ linge, une boulangere & tablier blew, une latigne en baveite et manches de toile blanche, tenant le crochet oi sont suspendues les carafes de lait, quelque fire jeune fille blonde sui ‘ant son institutrice, une image enfin... (MI. Proust, Mexiste toujours quelque eété par oi approcher la vérité. Une riviere mene towjours & quelque endroit habité (Voltaire). 3. Llest clair qu'il sagt de phénoménes qu ne peuvent se ramenerd une stcte contrainte distrbutioanelie entre termes cide son rouve que A valeur hypo thétiqe, le fur antérieur, le conditionnel, bien, une ConcatGnation de propositions, des lextmes tls que imoginer,supposer soupyonner, ar dessous. Pour une linguistique de lénoncition 7.3 A propos de quelque Ma tonjours quelque gante du corps ses cévés 3) Indtnon (elo tN ou quelque chose appochat, {ft (35 lege, js eed pasa ed) 3 ‘Sallam ‘endormir quand quelque imbécile s'est mis a vociférer {ci er la om entend ire que des ordres, par rafles, ont jail despa lais nationaux ; que les condamnations ont éié,en leur sein, préc- sement fixées avant toute audience : que le tout a éé transmis par ‘quelque jeune homme palichon et ambitiewx, plus ou moins techno crate, occupant quelque cabinet de quelque ministre (Le Monde). ‘On raconte que, tout jeune bambin, son amusement principal dans les jeux de sable du Trergarten était d'aplairsystématiquement les ites de ses petits camarades. Enfant. confia sa mere & quelque Joumaliste, i avait demande... [Ne Vavait-it pas taité dans quelque feuille opposition, d'« obsédé seesuel de la ligne trove ? » (Le Mone). Dire que la corruption est towalement absente serait évidemment beaucoup s'avancer, ett! est plus d'un ministre pour cumuler ses ‘activités officielles avec la qualité de « sponsor » de quelque grosse cenireprise éirangére (Le Monde). eelgue vague genre, qu se trea sponte, ev confer tes vines de UB. Souain, il m'est revenu que ce bane sur lequelj'éais asise avait ‘4d une pierre tombe, récupérée dans quelque hai. Enfin, par quelque filidre bénie, nous arriva un ennuyews préten- dant bien sous tous rapports. ‘Notre indignation es la mesure de 1a parodie de justice rendue ce Jour au nom de quelque obscure raison d Etat, On pourrait multiplier de tels exemples qui, tous, appartiennent aw style que l'on appelie parfois ehdvié, au sens de tenu, mais non guindé (ov {ivresque). On a pu constater que, dans les cas considérés, N dans quelque N Ainsi, 'énoncé & poriée générale je bois du café (« Qu’est-ce que tu bois, le matin/d’une fagon générale ? — Je bois du café ») est cobérent QNT entraine QNT. Méme dans une situation, & premitre vue, particuli fon retrouve le méme schéma : « Qu'est-ce que tu es en train de boire ? — Du café. ». i l'on analyse, maintenant, Je bois le café, le ne peut pas, on I'a vu, renvoyer au générique et est donc marqueur de féchage ; il implique qu'il y a une proprié diftérentielle (« le café qui est Id») ; « le café, pas le {thé », qui est 12) qualifiant un préconstruit. On peut, au demeurant, imaginer ‘autres manipulations avec fléchage (Je ne bois le café que trés chaud) ow avec une modulation qualitative (notionnelle) sur bvire (moi, je bois ('est- dire « je savoure »)l6 café je ne avale pas d’un trait. On constate que boire appartient 2 un répertoire dont la propriété est 'activer QNT (et done, le paramétre T, espace-temps). Par exemple, le ‘matin, je prends di café ; est-ce que tu as du lait éerémé, etc. Mais on peut ‘poursuivre étude en analysant d'autres verbes, A premigre vue différents. D. Désirer, vouloir, avoir envie, avoir besoin Ona ii affire des peédicats de visée: pani d'un certain état (ck Trabsence, le mangue). on se représente fitivement un état satisaisant, 0 ron posstde ce dont on regrettat Pabsenee, Ceci suppose que l'on constuise une occurrence (de ce qui est désiré, voulu, et), situge dans un ‘at de choses imagin ily aura done un hiatus entre les deux étts et une ‘valuation (ci, ils'agit de a bonne valeur) Doi, une fois de plus, activation de QNT : je désreveus/souhuite du café, 02, avec ’himination de du (de, deg ley = conservation de de, limination de de, d°od élimination de le) 3. Natuellement, la démarche esquissée ii exige que l'on rende compte de la construction dont le parities la trace, savoir Perigine de: @ DE LE café, origine formelle, mais aussi origin historique. 4, On aura reconnu le célébre passage du chap. VII dela Grammate générale ‘et raisonnde de Port Royal (Qu’es-ce qu'an probleme en linguistique ? Etude de quelques cas 65 ‘Jai enviefbesoin de café. It suftit de mettre en paralléle un prédicat d'affeet, tel que j'ai horreur, pour constater qu'avee ce demier, on aura fe: j'ai hor- reur du café. Enfin,il va de soi qu’avec le ou ce, on retrouve les cas analy 65 plus haut (je désire le café (qui est lafpas le thé), ce café 1 suffit de passer au conditionnel pour que le tableau se transforme, (On obtient en effet 1. j'aimerais (bien) du café (le ou ce produiraient les valeurs rétéeen- ticles décrites ci-dessus) ; je voudrais (bienvVje désirerais du café. Ainsi, la différence catégorille aimer/vouloir disparait. Pourquoi ? 2. je boirais du café, tel quel, n'est pas un énoneé bien formé. I faut ajouter bien, volontiers, facilement, sans probléme, avec plaisir, etc. : je boi- rais bien du café (ainsi, bien évidemment, que je bvirais bien un café). Powr- ‘quoi? Considérons dabord le premier cas. Le conditionnel est, en frangais| ‘comme dans les autres langues romanes, morphologiquement 1évélateus i= iti + avai (s...), soit: (a) une occurrence notionnelle (infinitf), (b) un manqueur de hiatus Cav-, dans la base avoir, lat. hab), (c) une forme mo- dale (mparfait ou prétért, selon les langues) qui marque (par une operation {que je ne peux pas décrre ici dans sa complexité) la construction d'un te pére fictt,& partir duquel on vise une occurrence qui est &la fois un possible (i etait un réalisé, il n'y aurait pas de hiatus) et (formellement) réalisé (le ‘marqueur -ais indique que le visé est atteint). Bref, le conditionnel active QNT, dod "apparition de du, marqueur de QNT prépondérant. Le second cas fait appel & un autre facteur, partellement lié a ce qui préctde. Nous venons de voir que le conditionnel marque la construction un repre fictif et d'un hiatus ; la relation au repére énonciatif qui sert ) soit comme un renvoi & Pinexistence (sortie du domaine) :« je ne ois pas de raisons)», od voir fonctionne comme un prédicat q\ ‘construit& la fols un point de vue subjectf et l'inexistence dun terme (ici tune relation prédicative) localisé par rapport un systéme de référence (ici espace énonciatif entre A et B). 2. le rencomtrer : sans entrer dans le détail des explications, on posera que T'on a affaire & une relation prédicative <{ ), le rencontrer>, ot la pa- renthése vide représente la place munie de la catégorie d’agentivité et la ‘classe des valeurs qui peuvent instancier cette place. Quant & infiniti, il in- dique que l'on n'a pas ici une relation prédicative assertée (ce qui suppri- ‘merait toute alternative, liminerait toute altérité, puisque asserter, c“est dis finguer une, et une seule, valeur) ®, mais une relation prédicative hors 1 positive ni négalive, doit une représentation ordre notionnel, ‘envisagée (visée) sans prise en charge assertive. On obtient done : « je ne vois pas de raison, propos de le rencontrer, ‘de choisir la branche positive (c’est-re de le rencontrer effectivement) ». On commence par la valeur postive parce que les deux valeurs p et autre que-p sont ordonnées (sur la structure en came, ef, « La Négation : mar- ‘queurs et opérations »). Inversement, je peux dériver, pour lautre branche : Pourquoi ne pas le rencontrer ? qui équivaut a « I n'y a pas de raison de ne pas le rencontrer » (rien ne s'oppose, il n'y a pas dobstacle) On aura, de méme, ii aller 2, Comment faire, ete. qui peuvent tre cemployés avec une valeur négative. Mais il existe une différence essentelle ‘entre Pourquoi ct les autres interrogatifs. Pourquoi rerwoie au déclenchement ‘méme du proces qu’implique la relation prédicative (on a done une relation ‘ordre agentif, qui porte sur les raisons, motifs, et autres causes, agi), Pourquoi marque que I’on construit I'existence possible de I'événement en- visazé . Formellement, avec pourquoi on est la pointe de la hifureation, dont les deux branches sont, d'un e8té « le renconter », et, de autre, « ne pas le rencontrer » (c'est 2. Le subjoncti dans (veuttu) que je le rencontre et le conditionnel (esc) ‘que je lerencontreraisjovent un re analogue. 0 Pour une lingustique de "énonciation T. 3 (le rencontrer) ? ; Pourquoi pas ? (ol pas est a trace de « absence/vide-de » ‘ou « autre-que »), Ceci permet de comprendre que Ion ait le carré suivant : pourquoi pourquoi pas comment *comment pas En effet, comment (ott, etc.) qualifie une relation (de quelle maniére, {de quelle fagon) dont on a préalablement consiruit I’existence (réelle ou fic- tive). Avec ces interogatifs, on n'est pas a la pointe (c'est-a-dire au point «indifférence), mais "on a choisi une des branches, que l'on qualifie. Avec pourquoi, au contaie, on esta la pointe de la bifurcation et Mon fait appa ‘ate Ia valeur possible que l'on souhaite dstinguer. Ceci explique que on accepte sans difficulté : Je souhaite le rencontrer: comment le rencon- ter ?, alors que Je soukaite le rencontrer:: pourquoi le rencontrer ? semble, dans une certaine interprétaion, reeéler une contradiction. On no- tera, de fagon similaire, que Manglais why est Te seul interrogatif qui se Cconstruse Sans 10 : Where 10 go ? How todo It 7, mals why go (at all) 7 ob absence de 10 marque que l'on n'a pas eonsteul une occurrence de procés (vee visée, et od at all indique bien que on parcour la totalité du domaine de validation et que ce qui est en cause ces I'in) existence de lévénement. En résumé, pourquot entraine une valeur négative et pourquoi pas une valeur positive J'ai introduit plus haut les concepts métalinguistiques de parcours et «issue. Ils ne concerment pas uniquement les interrogatifs, puisque I'on a aussi parcours avec les indéfins ('affinité entre interrogatifs et indéfinis est trop connue pour qu'il soit nécessaire d'insister). Voici done quelques cexemples complémentaires. En vietnamien, du est un interrogatif, ou un dé- !monstratifindéfini spatial (« en quelque endroit que ce sot », angl. « whe- rever »)*, qui peut Gare employé en position finale comme marqueur de gation modale (ainsi, on passe de « oi que ce soit», « nulle part», oi ‘ce n’est pas le cas »). Que I'on pense au frangais (a n'existe pas !, ou en- core Oi est-ce que tw as prishu ¢a ? dans un échange polémique. On rapprochera ces considérations d'observations. similares, par exemple, en suédois. La négation (désormais archaique) ¢/ est formée de e- (« durée'sans limite », valeur bien attestée en indo-européen) et de gi, qui marque le parcours, avec généralisation indéfinie. De méme, aldrig. «ja ‘mais » comporte une premigre partie (dont le sens est « ge, vie »), plus la particule gi. On retrouve ce méme gi dans la négation ioke (elle aussi dispa- rue de la langue courante, mais négation habituelle dans les autres langues scandinaves) 00 l'on a et « unité » ila forme neutre + gi; quant & la néga- 3. On purdonnera ia maladresse youlue de ce méta-6noned, 4. Sur out eee, e LC. Thompson, ch. 14.2, e surtout Nguyen Phu Phong, pp. 254 say, 278 aq, 543 sa. Esistetil une unité de la négation ? tion actuelle inte elle provient de intet, nom. ace. nt. de ingin (suédois ‘contemporain ingen), constitué de en « unite » + gi (n) La situation est, certes,dilférente en frangais, puisqu’on y trouve d'un COté un inverseur (ne), plus un marqueur de parcours, qu indique, en méme temps, la catégorie du domaine parcouru (dob pas : personne ; rien :ja- ‘mais ; aucun ; etc.) 2 e046 de marqueurs de parcouts qui incorporent la n= ation comme mullement, nulle part. Mais il est intéressant de constater ‘qu’avec absence, habituelle dans la langue courante, de ne, on retrouve une situation « la scandinave », od un marqueur de parcours prend une valeur négative (sortie du domaine); j'ai jamais vu personne dans ce magasin. Cette relation entre parcours, interrogation, exclamation, et sortie (pas- sage i 'Extérieur du domaine) permet de rendre compte de phénomenes thé {oriques, comme on peut en observer, par exemple, en frangais. Partons, pour fixer les idées, d'une citation, tinge du roman Indiana de G. Sand : (1) Pondant que Raymon travaillai 8 établir sa fortune, Indiana ap proctt des tives dela France. Mais quels furent sa surprise et son effi, en déharquant, de vir le drapeaw tricolore flote sur les murs de Bordeaux ! (Indiana, 6. Folio, p-290) ‘Quets marque le parcours sur la classe d occurrences abstraites de la notion en cause (ici, les degrés de la surprise et de Feffroi de I"héroine). Or, ‘out parcours doit abouti a une stabilisation énonciative, Dans le cas consi déré, i ne s'agit ni "interrogation strict, ni interrogation ehétorique & va leur négative (par exemple : « Tu pars en voyage ? ~ Quel voyage ? De quoi pparles-tu ? »); la stabilisation se fait par rapport a Iattracteur du systeme 8, «od la valeur dite de « haut degré », 5. De fagon révlatrce, le dictonnaire Islandas- Anglais de Clasby (complete ‘par Vigfusson) dome, pour-si, ois valeurs: « A. Ina postive sense j= B.In ane alive sense (.)»z«C. Inan indefinite sense». On naera en out qu Vile (ve + Ad, «bien» + gi) signife d'un cOté « very » et de autre « nota ll» 6, Tout domaine est centr, e'estire muni d'une representation régulatice gu assure identification de toute occurence queleongue, 3 travers les crconstances ‘nonciatives, 2 cette occurrence orgaisarie, Quand ce centre corespond a une re> presentation que I'on peut exhiber ou poiter (objets: condules), un e0t6 et qui par ailleurs, set de none, d'éalon, bet de erie de conforms on parera de Np Lorsqu’on nope ps sur des représentations en tout ou rien, mis que Von trvalle Ds ow moins tens; vation appécaon), Teccorenc glace es lans ce cas, ordre qualita et nest pas representable par rapport ane stance terete. Elle es inaccessible et fournit la valeur extreme, auto-eférée (occurrence ‘envoie& la notion dont elle eet occurronce, bla fois stable (lle s'spparene 8 point fixe) et produite par un processus dabstraction qui fait qu'elle ne se confond as avec un degre atime dans une échelle d'adéquation: On apellera attracteurcete eprésenation répulatrice. Ele permet en particulier, de dire Vindicible, de referer sans referent («les mots me manquent pour le dre » «une tere indescrptble» ‘ma surprise fut totale» ; ete) Latracteur peut, par tenversement,devenit« rp Sur» (4 c6té de « Quel (beau) temps !», on aura w Quel (mauvais) temps y de ime que « Tu pails » peut éte postf ou négatif. n Pour une linguistique de Vénonciation 7.3 (Or, &e6té du schéma de I'exemple 1, on trouve tne tournure compor- tant une négation, Ainsi : (2) Quetlene fut pas ma surprise! ‘ow encore (8) Quelle ne fur ma surprise ! Ces énoncés avec négation équivalent & un énoncé sans négation (et ‘sont, surtout I"énoncé 2, préférés par la plupart des locuteurs francophones {que jai imterrogés). Comment rendre compte de cette 6quivalence ? Pour ce faire, on adoptera le méme raisonnement que plus haut, En 2, Quelle marque {e parcours, comme dans I’exemple préeédent ; mais en 1, le parcours se sta- bilise, on I'a vu, par rapport & atracteur, alors qu’en 2, il se stabilise par rapport Extéricur (il ya soni, et T'on prédique done l'inexistence (Quel : «il nexiste pas ») de degrés d"intensité ames (ne fut pas) que ceux qui dé crivent ma surprise effective. Bref, on construitI"Extérieur (Quel) et on dit ‘qu'il est vide (ne fut pas). Autre fagon de dire : « ma surprise fut totale !», ‘00, naturellement, ioral ne renvoie pas plus & une totalité matérielle que tout dans Je ne fus pas surpris du tout ou dans en toute amitié. On pourrait aussi dire : «ma surprise fut extz8me » ot I'on voit que le « point fixe » de la ‘surprise surprise » (comme on dit « J'ai t€ surpris, ce qui s"appelle sur- pris») s'apparente au « point de fuite ». Quant & 3, il s'explique par une considération supplémentaire. On aura noté, dans le raisonnement précé- dent, le double mouvement de sortie (Extérieur), puis de retour & IIniérieur. Ce faisant, on produit un basculement, puisque I'on peut fournir le com ‘mentaire métalinguistique suivant : il n’existe pas de degré de surprise & Exterieurfen dehiors de/autre que ma surprise (effectivement et subjective- ‘ment ressentie), done & 'Intéreur, Ainsi, pour marquer Iintensité de mon émotion, je construis des de- ‘és fctfs extéricurs dont je dis qu’ilsn’existent pas. On aboutit done & une représentation complexe qui relie Valtsrité fictive (vide) et Imée (totale, comme dans torale surprise). On saute ainsi de « rien » & ‘tout » (s'il n'y a rien dehors, tout est dedans...!), Le marqueur de cette ‘opération est, comme en 2, V'inverseur ne (qui indique I'orientation vers Extérieur), mais on peut supprimer pas parce qu'il y a sau et non pas gra dient Ge rappelte que pas marque oceurrence imaginaire minimale qui, dans un parcours, siznale qu’au-dela on est &'Extériewr). Qn trouve une si ‘uation similaire dans un énone$ comme : Je serais resté chez moi, si je ‘avais (pas) été prévenu. En effet, la relation conditionnelle (que l'on sy isera par: p, sinon-q) indique, on le sat, que : (a) Si non-q alors p (fic ‘mais : (b) que ce qui a eu (en fait) lieu, c'est: q entraine non-p. On est done en présence du meme basculement de non-4 & q que précédemment. Existertil une unité de la négation ? B Ce ne (pas) n'a pas la méme origine que le ne (parfois appelé « explé- lif») rencontré dans des énoneés comme : (4) X est plus grand que ne Pest ¥. (5) X est entré avant que je nerve (©) Hest au magasin, moins qu'il ne soit chez a Dans ces exemples, on a, certes, 2 nouveau un basculement dans le re= pérage, mais les circonstances sont différentes. En 4, on pose que Y posséde ‘un degré de grandeur, dont on dit seulement (a) qu'il existe, (b) que, quel qu'il soit (il n'est pas autrement spécifié), le degré de grandeur de X le sur- passe, On constate que I'orientation X < ¥ est dirigée vers Iattracteur, et ‘que X —>Y est orienté vers 'Extérieur. En résumé, quel que soit le degré de Y, il n'est pas celui que posséde X (il est en-deg2), Y sert de repre (posiif), mais ¢"est de X qu'on parle pour dire qu’il excede Y. Ainsi la relation <¥ et ( ) grand> passe &. Ne marque ce saut de a . Passons maintenant a Pexemple 5, proche de 4. On constate que ce qui sert de repére,c"est mon arrivée (c'est par rap- port elle que l'on situeI'entrée de X), mais c’est de entrée effective de X ue I'on parle et, au moment od X est entré, mon arrivée n'avait pas eu lieu. Considérons enfin "exemple 6 : on pose un premier terme qui indique une supputation « Test au magasin » ;c“est une supputation, car I'on ajoute une seconde possibilité « A moins que (...)» qui signifie « si 'on écarte Péven- ‘walité qu'il soit chez ui ». Or, pour écarter, il faut envisager : on envisage donc , on Iécarte, et, dans la mesure of on I'écarte (2 ‘moins), c'est la supputation «il est au magasin » qui est mise en avant. On Pourrait surmodaliser et faire ainsi afMleurer les forces modales a 'ecuvre «ites, sans doute, au magasin, mais il est peut-étre chez lui», ou encore « il st, je pense, au magasin, sauf s'il est chez Iui ». Ce que & moins indique, C'est existence de ce double mouvement : poser-écarter, donc, ici encore, le passage du possible ({ietivement validé) : «il est chez lui » a son évietion (auguel cas « il n'est pas chez lui»), au profit de « il est au magasin ». On rencontre une autre varité de transition complexe dans les sché- ‘mas du type: Je crains qu'il ne vienne (pour ne prendre qu'un exemple fran- «ais !).Iei encore, on construit une relation entre I'événement dont on eraint qu'il ait lieu (ce qui risque d'érre le cas) et I'événement que Ion soulhaite ait voir se produire, mais dont on pense qu’il n'aura pas lieu (ce qui risque de ne pas etre le cas). Ne marque Vorientation subjective (le souhait) de >’, Le point essentiel est 1) que Ion ne peut nier directement une relation «identification, 2) que 'on doit passer par une construction modale, 3) que tion de Vexistence (Khdng cd) de la relation 7. Sur tout cee on consulta Nguyen Phu Phong, pp. 486.99, Existestil une unité de la négation ? 15 ‘est ceite construction complexe qui sera nige soit directement, griice & ‘khong qui marque I'Extérieur(vide-de), soit par V'intermédiaire de la néga- tion de Vexistence (ce qui équivaut & la négation de l'affirmation). On voit ‘comment s‘entremélent ici existence et identification, la construction «une occurrence et la qualification (« vrai », « correct ») par un sujet 2. Jagomas en japonais, on rencontre, sous une forme en apparence for different, un phéroméne analogue de « détour ». Le japonais possede ume copute identification des: ans, on sura ono hon wa ce livre panicule dictionnaire cop. Ce live est un dietionnaize Pour nier cette relation, je dois passer par une construction complexe, faite de deux termes, pourvus de la particule (en gros, de thématisation) wa ‘et de la néyation du prédicat d’existence arimasen (ou, sous son autre forme, ‘nai), On aura done kono hon wa jbiki de wa ¥arimasen Ce livre nest pas un dictionnaire Le premier terme est kono hn wa « pour ce qui est de ce livre», le se- cond terme est composé de jibiki« dictionnaire » et (outre la particule wa) de la particule de. Cette deriere provient dela contration de ni (qu, dans 4a fangue actuelle, fonetionne comme un localisateur, spatio-temporel ou abstai) plus te que on apple parfois « aérondif», mais qui est, pour re prendre les termes de F. Dhorme (cf. Bibliographic) « une forme qui marque ‘une non-autonomie énonciative. Das lors, il est bien naturel que 1 fonc- tionne comme un relateur, au sens od il annonce (par son absence dautono- mie) que quelque chose va suivre » (F. Dhorne, p. 325). On peut done gloser W'énoncé négatif dela fagon suivante: « pour ce qui est de ce livre, pour ce aqui est du domaine en relation avec quelque chose (ici, ce livre), ga n‘existe pas ». Autrement dit: il n'existe pas de relation (de connexion) entre «ce livre» et « tre un dictionmaire ». 3. Tupuri: dans un article sur la négation en tupuri? (1990), $. Ruel land distingue les noncés a préicat verbal (négations : gd, pour marquer ce 4ui n'est pas (ou ne peut pas etre) le cas: we pour 'injoncif tle déontique) et les énoneés & prédicat non verbal (négation : bay... wa). Cest ce demier ‘marqueur qui nous conceme ii. Pour rendre négati ?d wd « il est chef», ‘on ext amené& utiliser by... wa doit? bay wa wa « i n'est pas chef». OF, la négation utilise est composée de deux parties: ay (« sans ») et wa 8. de wa se prononce [da 9 Langue Adamawa parle au sud-ovest du Tehad et a novd-est da Cameroun, 16 ‘Pour une lnguistique de lénonciation T. 3 {que l'on trouve avec I'injonctif et le déontique). Quant? d bdy waz, cela signifie «il est sans chef ». Comment se faitil que l'on passe de la valeur privative ala négation d’identifiation grace &I'adjonetion de wil ? L@ymologie du frangais sans (eroisement de lat. sine et absentia), da latin sine (séparation ; extérorté), de Panglais without (8 extéieur, dehors, au-de), du néeriandais buiten (dehors) ou zonder (séparé de), du suédois wian (dehors, 00 « sans », et « mais » comme ‘allemand sondern ou espagnol sino), sans compier le reste des langues indo-européennes, tout cela nous rap- pelle la connexion entre privation, extéiorté et séparation, Bay indique W'ab- sence ou la privation, mais aussi le déerochage, la sparaion (ei, absence de connexion entre « lui» et « tre chet»). Ce qui déclenche cette &é-connexion (S. Ruelland parle de « négaif suspensit»), ces la présence de we. Sans wd, ‘bay marque la privation et s’oppose & dé (« avec », « en compagnie de»); wd lui, marque 1) que l'on a affaire non pas un cas, repéré dans espace-temps (done, vaidable ou validé dans un espace référentil), mais & lun tat de choses vsé (c'est-aire d’ondre notionnel, hors detente assertion) : 2) €c que wa signal, c’est qu’ un sujet Enonciateur met en relation deux Gals ‘de choses (actuel ;visé) et, soit intendit autru I'accés 8 un état que l'on consi- dire comme mauvais (pour telle ou tlle raison), soit demande & auteui d'in- terrompre ce qui est en cours (et qui est jugé, ii encore, mauvais). De toute fagon, on parcourt le domaine des possibles pour faire obstacle, ou couper court, & ce qui ne doit pas étre. Bref, on construit I'inaccessibilité En résumé, on voit Paeuvre une double opération : d'un ed, on dé- croche les deux membres de Ia relation didentification ; de Mautre, on &limine toute accessibilité entre les deux termes dgconnectés. Ceci rappelle le vietna- ‘mien, ila fallu construire une relation désassertée avec pha pout pouvoir appliquer la négation. De méme, on a vu qu’en japonais, on pose deux termes ‘dans une relation dégagée de la prise en charge assertive, pour indiquer que identification est impossible, car il n’existe pas d’accés entre les termes, A titre de complément, on se eportrautilement& article sur la né- gation en moore (R. Kabore) : Iauteur y indigue qu'il est impossible de né- fatver le prédicatd'idenifiation ; i aut supprimer ce marqueur et ne Iai ser que la négation aqui est, &oriine, un prédieat de non-existence. Un autre complément nous est fourni par I"observation de S. Ruelland (ibid.) sur ia négation dans les énoncés focalisés, Soit I'énoncé suivant : 24 4 din yi (it. i, bore (accompli), identificateur, bitte ; « c'est de la bitre hws) Sian applique la procédure déerite plus haut, on obtient: 7 bay din yit wa «ce nest pas de la biere qu'il a bu ». Mais, sion emploie la ‘égation gd, on aura (avec un complément quantifiable comme bibre) : 74 j6 din yit gi, dont une glose litérale serait « ce n'est pas le eas que ce soit de la bigre qu'il a bu », « ce n’est pas simplement de la bitre qu'il a bu », ou, cn frangais courant « Qu’est-ce qu'il a pas bu comme biere ! » Existeteil une unité de la négation ? n Sans entrer dans le détail de operation de détermination, disons que boire de ta bitre peut recevoir deux interpréiations : l'une, qualitative, «il ‘agit de bitre, pas de vin, etc.» ; "autre porte sur la quantité « simplement boire de la biere », c’est-aire une certaine quantité (non nulle) sans rien dire de plus. Dans le premier cas, on aura I'Gnoneé négatif « ce n'est pas de la biere (..)» ; dans le second cas, « il n'est pas vrai que c'est de la igre qu'il a bu, sans plus». En rangais, le mécanisme peut éire représemté comme suit : c'est un pew de bidre qu'il a bu -> ce n'est pas vraille cas que c'est un peu de bire, sans plus, qu'il a bu > ce n'est pas qu'un peu de biére(..). On peut aussi, par un chemin un peu différent aboutir au méme résultat. On partira de c'est une certaine quantité (d'03 : pas rien, ot ‘quelque chose) qu'il a bu comme biére. On remplacera alors quelque chose a le marqueur de parcours quoi dol e'est quoi ; on applique la négation ila bu, d'o0 ila pas bu ®. Ce qui nous donne, en fin de compte, avec le schéma interrogatif: Qu’est-ce qu'il a pas bu comme bere ! ol nous retrou- vons nos vieilles connaissances du début de lexposé, le parcours, Ext uhértéet fe vide, Fatracteur, pour ne citer que quelques exemples de ‘ce travail d’abstraction que révele la complexité des phénomenes, ‘Terminons, comme nous avons commencé, par une citation de B. Rus- sell ; 4 1'époque oi il érit les lignes qui suivent, B. Russell na pas encore abandonné ses eritiques contre le « langage ordinaire ». Ea réponse & Max Black, il déclare : « But that does not prove that we ought, in our attempt at serious thinking, to be content with ordinary language, with its ambiguities and its abominable syntax. I remain convinced that obstinate addiction to o- dinary language in our private thoughts is one of the main obstacles to pro- ‘gress in philosophy » (Schilpp. p. 693-694). Et si lon inversait Ia Femarque ? La philosophic (et la linguistique) tireraient avantage dune né- flexion sur les langues tees qu’elles sont et non sur le langage tel qu’il de- wrait re. Bibliographie Linguistique aficaine, 4, 1990, numéro spécial consucré & la négation dans Tes langues afficaines, CLEASBY, VIGFUSSON and CRAIGIE, 1957 (2° 64), Ieelandic-English Dictionary ; Oxford University Press. 10. tha sans dire que chaque étape dot ére justifige: passage de ded comme valeur de haut degré de pus view ainsi que de quelque choses présence du marge ‘as sans Vinverseur ne dans It langue pales

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