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Gaston 

Leroux naît le 6 mai 1868 à Paris. 
Il obtient son baccalauréat en 1886 puis sa licence 
en droit en l889.
À partir de l897, il fait partie de la rédaction du journal " Le matin ", pour lequel il 
va devenir par la suite un grand reporter.
C'est aussi cette année­là qu'il commence sa carrière littéraire. Il crée d'abord le 
personnage de Rouletabille, jeune reporter parisien, qui apparaît dans " Le mystère de
la chambre jaune"  (1907), " Le parfum de la dame en noir " (1907), " Rouletabille chez 
le tsar " (1912), etc. puis le personnage de Chéri­Bibi, un forçat accusé d'un crime qu'il 
n'a pas commis, qui apparaît à son tour dans divers romans: " Chéri­bibi ", " Chéri­bibi
et Cécily ", " Palas et Chéri­Bibi ", etc. Il est également l'auteur du célèbre roman " Le 
Fantôme de l'Opéra " (1910).
Il meurt le 15 avril 1927, à Nice.
***
" Le Fantôme de l'Opéra " est un roman populaire qui paraît d'abord en feuilleton 
dans " Le gaulois " à partir de l909, avant d'être publié comme roman en 1910.
Lors de la publication de son ouvrage, Gaston Leroux déclare que  son personnage  
n'est pas  uniquement sorti  de  son imagination mais qu'il s'est inspiré d'une légende 
née en 1873. Cette légende raconte qu'un jeune pianiste du conservatoire de la rue 
Peletier, à Paris, avait été défiguré pendant un incendie et s'était réfugié dans les 
sous­sols de l'Opéra Garnier qui était encore en construction et que c'est là qu'il avait 
fini ses jours. Certains événements tragiques ­ comme la chute du lustre ­, narrés par 
l'auteur dans son roman, ont réellement eu lieu au XIX siècle à l'Opéra Garnier.
Ce roman fantastique a fasciné et continue à fasciner de nombreux metteurs en 
scène et cinéastes. Plusieurs interprétations ont été réalisées tant au théâtre qu'au 
cinéma et également sous forme de comédie musicale.
Chapitre 1

C'était le soir où MM. Debienne et Poligny, les directeurs de l'Opéra, donnaient leur
dernière soirée de gala avant leur départ.
La Sorelli — une des plus grandes figures de la danse — préparait son discours 
d'adieu quand, soudain, plusieurs demoiselles du corps de ballet, très excitées, 
entrèrent dans sa loge.
— C'est le fantôme, s'écria la petite Jammes.
La Sorelli, qui était superstitieuse et était la première à croire aux fantômes et à 
celui de l'Opéra en particulier, demanda:
— Vous l'avez vu ?
— Comme je vous vois, répondit la petite Jammes en se laissant tomber sur une 
chaise.
— Et, si c'est lui, ajouta la petite Meg Giry, il est bien laid !
— Bah, dit une autre, vous voyez le fantôme partout.
Et c'est vrai que, depuis quelques mois, on ne parlait, à l'Opéra, que de ce fantôme 
vêtu de noir, qui se promenait dans tout le bâtiment, qui ne parlait à personne et qui 
disparaissait toujours d'une façon mystérieuse.
Mais tout cela était­il sérieux ? La vérité est que toute cette histoire était née de la 
description que Joseph Buquet, le chef machiniste, avait faite du fantôme car, lui, il 
l'avait réellement vu. Voici ce qu'il avait raconté:
" Il est très maigre et porte un habit noir. Ses yeux sont si profonds qu'on ne 
distingue pas bien les prunelles immobiles. Son nez est si petit qu'il est invisible de 
profil. On dirait une tête de mort, c'est une chose horrible à voir ! "
Joseph Buquet avait poursuivi l'étrange créature mais elle avait disparu comme par
magie.
— Mes enfants, dit la Sorelli, ça suffit ! Le fantôme, personne ne l'a peut­être jamais
vu !
— Si ! Si ! Nous l'avons vu tout à l'heure ! dirent les petites. Il avait la tête de mort 
et son habit était noir, comme le soir où il est apparu à Joseph Buquet.
— Ma mère dit qu'il ferait bien de se taire, Joseph Buquet, dit la petite Meg.
— Et pourquoi elle dit ça, ta mère ?
— Parce que... parce que...
— Allons, parle, lui dit Jammes.
— C'est... c'est à cause de la loge...
— Quelle loge ?
— La loge du fantôme !
— Le fantôme a une loge ?
— Oui, dit tout bas Meg. C'est la loge numéro 5.
— Pas possible !
— C'est comme je vous le dis... c'est maman l'ouvreuse... eh bien... personne n'y est 
venu depuis plus d'un mois, sauf le fantôme, et on a donné l'ordre de ne jamais la 
louer...
— Si le fantôme y vient, il y vient donc quelqu'un !
— Mais non ! Le Fantôme y vient et il n'y a personne !
— Meg, tu te moques de nous !
— Non, c'est vrai. Mais on ne voit pas le fantôme. Il n'a ni habit ni tête. Il n'y a rien 
du tout... On l'entend seulement quand il est dans la loge. Maman, qui lui donne le 
programme, ne l'a jamais vu mais l'a entendu. C'est pour ça qu'elle dit d'arrêter de 
dire des bêtises sur le fantôme.
A ce moment­là, on entendit des pas dans le couloir et une voix qui criait:
— Cécile ! Cécile ! Tu es là ?
— C'est Mme Dubois, dit la petite Jammes.
Et elle ouvrit la porte. Une honorable dame entra.
— Quel malheur ! dit­elle. Quel malheur !
— Quoi ? Quoi ?
— Joseph Buquet est... mort !
La loge s'emplit aussitôt de cris.
— On vient de le trouver pendu mais, le plus terrible, continua la dame, c'est que 
les machinistes qui ont trouvé son corps ont dit qu'on entendait, autour du cadavre, un
bruit qui ressemblait au chant des morts !
— C'est le fantôme, s'écria la petite Giry.
Puis tout le monde sortit dans le couloir. C'est alors qu'apparut le comte de Chagny.
— Je venais vous voir, dit­il à la Sorelli. Ah! Sorelli, quelle soirée ! Et Christine 
Daaé, quel triomphe !
— Pas possible ! dit Meg Giry. Il y a six mois, elle chantait comme une serinque.
Le comte de Chagny avait raison. Le gala avait été, magnifique. Mais tout le 
triomphe avait été pour Christine Daaé qui avait chanté le trio final de "Faust". Elle 
avait remplacé la Carlotta qui était malade et jamais on avait entendu une si belle 
voix, une interprétation aussi extraordinaire. La salle avait applaudi à tout rompre. 
Christine pleurait d'émotion et, défaillante, elle avait dû être transportée dans sa loge.
Le comte de Chagny avait assisté au spectacle avec son jeune frère Raoul. Ce 
dernier avait vingt et un ans et était assez timide. Il était marin et disposait de trois 
mois de permission avant de partir pour une expédition au pôle nord. Le comte de 
Chagny avait donc décidé de lui montrer Paris et tous les actes artistiques qui s'y 
déroulaient.
Ce soir­là, après avoir applaudi la Daaé, le comte s'était tourné vers son frère et 
l'avait vu si pâle qu'il en avait été effrayé.
— Vous ne voyez donc pas, avait dit Raoul, que cette femme se trouve mal ?
En effet, sur la scène, on soutenait Christine Daaé.
— C'est toi qui vas te trouver mal...,  dit le comte à Raoul. Qu'est­ce que tu as ?
Mais Raoul était déjà debout et, d'une voix tremblante, il dit :
— J'y vais.
Puis il se précipita vers les loges, uniquement préoccupé par le désir de voir celle 
qui lui avait pris son cœur. Christine était en effet une amie d'enfance mais il ne 
l'avait pas revue depuis longtemps. En l'entendant chanter, il avait ressenti une 
émotion très douce... qui ressemblait à l'amour.
Il finit par trouver la loge de la jeune fille et y entra en même temps que le médecin 
qu'on avait fait venir. Le médecin s'occupa aussitôt de Christine qui ouvrit enfin les 
yeux dans les bras de Raoul. En le voyant, la jeune fille tressaillit.

— Monsieur, demanda­t­elle à ce dernier, qui êtes­vous ?
— Mademoiselle, répondit Raoul en déposant un baiser sur sa main, je suis le petit 
garçon qui est allé ramasser votre écharpe dans la mer.
Christine se mit à rire.
— Mademoiselle, continua Raoul. Je vois que vous ne voulez pas me reconnaître, 
mais je dois vous dire quelque chose de très important.                                 
— Quand j'irai mieux, monsieur, voulez­vous ? et sa voix tremblait. Vous êtes très 
gentil... mais j'ai besoin d'être seule... merci à vous, docteur. Je commence à me sentir 
bien.
Les deux hommes sortirent mais Raoul resta devant la porte de la loge. Soudain, il 
entendit une voix d'homme, venant de la loge et qui disait d'un ton autoritaire:
— Christine, il faut m'aimer.
Et la voix de Christine, douloureuse, répondait :
— Comment pouvez­vous me dire cela ? Moi qui ne chante que pour vous ! Ce soir, 
je vous ai donné mon âme et je suis morte.
— Ton âme est bien belle, mon enfant, a repris la voix grave de l'homme et je te 
remercie ! Les anges ont pleuré ce soir.
Puis Raoul n'entendit plus rien. Il décida cependant de rester caché près de la loge 
car il désirait voir l'homme qu'il commençait à détester. Soudain, la porte s'ouvrit et 
Christine sortit, seule. Raoul remarqua qu'elle ne fermait pas la porte à clé. Il attendit
qu'elle soit partie, puis il s'approcha de la loge, ouvrit la porte et entra. Tout était 
obscur à l'intérieur.
— Il y a quelqu'un ici ? demanda Raoul.
Seul le silence lui répondit.
— Vous ne sortirez d'ici que quand je le permettrai ! dit de nouveau Raoul.
Puis il alluma une allumette et la flamme éclaira la loge. Il n'y avait personne.
— Ah, ça, dit­il, est­ce que je deviens fou ?
Il resta encore un moment puis il décida de partir.
Pendant ce temps, avait lieu la cérémonie des adieux.
À la fin, les directeurs démissionnaires se réunirent avec les nouveaux directeurs: 
MM. Moncharmin et Richard. Ils commentèrent d'abord la mort de Buquet puis les 
nouveaux directeurs parlèrent du fantôme.
— Qu'est­ce que c'est que cette plaisanterie ? demandèrent­ils.
M. Poligny prit alors un air grave et montra un papier à ses remplaçants.
— Voilà ce que demande le fantôme et je vous conseille de faire ce qu'il dit si vous 
voulez que tout fonctionne comme il se doit.
MM. Moncharmin et Richard lurent le texte suivant:
"La mensualité que les directeurs de l'Opéra doivent verser au Fantôme de l'Opéra 
est fixée à 20 000 francs par mois ­ 240 000 francs par an. D'autre part, la loge numéro 
5 sera mise, à toutes les représentations, à disposition du Fantôme de l'Opéra."
— Naturellement,  dit M.  Debienne,  tout ceci est fort désagréable mais si on ne fait
pas ce qu'il demande... de gros problèmes peuvent arriver... c'est pourquoi nous avons 
décidé de partir.
Les nouveaux directeurs ne savaient que penser de cette histoire.
Sur ce, ils se séparèrent.
Les premiers jours que les nouveaux directeurs passèrent à l'Opéra furent très 
agréables et ils oublièrent complètement la curieuse et bizarre histoire du fantôme 
mais il se produisit un incident qui leur prouva que rien n'était terminé.
Ce matin­là, en effet, le secrétaire de M. Richard lui apporta une lettre. Voici ce 
qu'il lut:
"Mon cher directeur,
J'ai remarqué que vous avez fait quelques changements en ce qui concerne les 
spectacles. Certes, vous êtes libres d'administrer votre affaire comme bon vous semble. 
Cependant, je désire profiter du fait que vous avez gardé Christine Daaé, dont le génie 
est certain ­ ce qui n'est pas le cas de la Carlotta qui chante comme une casserole ­ pour
l'entendre ce soir dans le rôle de Siebel et je vous prierai de ne pas disposer de ma loge 
aujourd’hui ni les jours suivants, comme vous l'avez fait récemment. Je n'ai pas 
protesté mais, ayant vérifié que vous saviez que la loge n°5 m'était réservée, je vous 
demande de me la redonner si vous voulez que nous vivions en paix.
D'autre part, je vous écrirai bientôt pour les  240 000 francs que vous devez me 
verser cette année.
Votre très humble serviteur
F. de l'Opéra "

Naturellement, M. Richard prit cette lettre pour une plaisanterie et l'oublia 
aussitôt.
Le soir même, la loge n°5 fut occupée par des spectateurs. Ils firent un tel vacarme 
que la police les fit sortir. On leur demanda la raison de leur attitude. Ils répondirent 
qu'ils entendaient une voix qui disait qu'il y avait quelqu'un et qu'ils ne voyaient 
personne dans la loge. C'est pourquoi ils s'étaient un peu énervés. M. Richard 
interrogea l'ouvreuse sur cet incident. Elle répondit que cette voix était, de toute 
évidence, celle du Fantôme de l'Opéra.
Chapitre 2

Christine Daaé ne retrouva pas tout de suite, à l'Opéra, le triomphe de la soirée de 
gala. Elle n'apparaissait nulle part. Raoul essaya en vain de la revoir. Il finit par lui 
écrire pour lui demander la permission de se présenter chez elle. Un matin, il reçut le 
mot suivant:
" Monsieur,
Je n'ai pas oublié le petit garçon qui est allé chercher mon écharpe dans la mer. Je 
vous écris ce mot aujourd'hui car je pars pour Perros. C'est demain l'anniversaire de la
mort de mon cher papa, que vous avez connu et qui vous aimait bien. Il est enterré là­
bas, avec son violon, dans le cimetière qui entoure la petite église de la colline, là où 
nous avons tant joué quand nous étions enfants."
Quand il reçut ce mot de Christine, Raoul courut se renseigner sur les trains qui se 
rendaient à Lannion. De là, il prendrait la diligence de Perros­Guirec et logerait à 
l'auberge du " Soleil­Couchant ", où devait être Christine.
Il partit donc le lendemain matin. Pendant tout le voyage, il pensa à Christine et à 
leur enfance.
Christine était d'origine suédoise. Son père, un paysan, jouait merveilleusement du 
violon. Il passait la semaine à cultiver la terre et, le dimanche, il jouait du violon dans 
les fêtes et les noces. Sa femme mourut jeune et il s'occupa seul de sa fille, à qui il 
donna la passion de la musique.
Un jour, il rencontra le professeur Valérius. Séduit par sa musique, ce dernier 
décida d'aider le père et de s'occuper, avec sa femme, de l'éducation de la fillette. Les 
Valérius s'installèrent en France avec Christine et son père. Ils passaient leurs étés à 
Perros­Guirec.
Un jour que Christine et son père se promenaient au bord de la mer, le vent se leva 
et emporta l'écharpe de la fillette dans la mer. Christine poussa un cri. C'est alors 
qu'elle entendit :
— Ne vous inquiétez pas, mademoiselle. Je vais aller chercher votre écharpe.
Et elle vit un petit garçon qui courait, courait, malgré les protestations indignées 
d'une dame vêtue de noir. Il entra dans la mer tout habillé et lui rapporta son écharpe.
Le petit garçon et l'écharpe étaient dans un bel état ! Christine, heureuse, embrassa le
petit garçon. C'était Raoul, vicomte de Chagny. Pendant tout l'été, ils se revirent 
régulièrement et jouèrent ensemble. Le père de Christine apprit même au jeune 
garçon à jouer du violon. Il parlait beaucoup avec les deux enfants et leur racontait des
légendes des pays du nord. Dans toutes ces histoires, apparaissait l'Ange de la 
musique. Le père Daaé prétendait que tous les grands musiciens et artistes  recevaient
un jour la visite de l'Ange. Il disait qu'on ne le voyait pas mais qu'il se faisait entendre 
aux gens élus.
La petite Christine demandait à son père s'il avait entendu l'Ange mais son père 
secouait tristement la tête et disait à la petite:
 — Non, mais toi, mon enfant, tu l'entendras un jour ! Quand je serai au ciel, je te 
l'enverrai, je te le promets !
Quand l'automne vint, les enfants se séparèrent. Ils se revirent trois ans plus tard. 
Le professeur Valérius était mort mais sa femme vivait toujours en France avec 
Christine et le père Daaé. Enfin, Raoul avait revu Christine à l'Opéra et avait compris 
qu'il l'aimait à jamais.
Raoul arriva à l'heure du déjeuner à l'auberge du Soleil­Couchant. Il s'installa à une
table en attendant d'être servi. C'est alors que Christine apparut. Raoul se leva, il 
voulut parler mais aucun son ne sortit de sa bouche. 

Elle était là, souriante devant lui. Ils se regardèrent longuement puis Christine 
parla enfin :
— Vous êtes venu et cela ne m'étonne pas.
Raoul prit sa main:
— Oh, Christine, savez­vous que je vous aime et que je ne peux pas vivre sans 
vous ?
Christine rougit et dit d'une voix tremblante:
— Moi ? Vous êtes fou, mon ami.
— Ne riez pas, Christine, c'est très sérieux.
Mais Christine baissa les yeux et ils restèrent tous les deux face à face sans se dire 
un mot. Puis, rompant le silence, Raoul demanda d'un ton dur:
— Dans votre loge, vous m'avez reconnu, n'est­ce pas ? Mais vous avez fait comme si
de rien n'était à cause de l'autre, c'est bien cela ?
— Que dites­vous ? dit Christine. De qui parlez­vous ?
— De celui à qui vous avez dit: "Je ne chante que pour vous !"
Christine prit le bras de Raoul et le serra très fort.
— Vous écoutez donc derrière les portes ?
— Oui... parce que je vous aime... et j'ai tout entendu.
— Vous avez entendu quoi ?
— Il vous a dit: "Il faut m'aimer !"
A ces mots, Christine devint très pâle et dit d'une voix nerveuse:
— Dites, dites tout ce que vous avez entendu.
— J'ai entendu: "Les anges ont pleuré ce soir !"
Christine fixa Raoul avec une émotion indescriptible et deux larmes coulèrent sur 
ses joues puis elle partit en courant dans sa chambre.
Raoul était très malheureux. Il ne comprenait pas l'attitude de Christine. Pourquoi 
s'était­elle enfuie ?
Il refusa de déjeuner.
Le soir, il alla se promener sur la lande et là, à sa grande surprise, Christine vint le 
retrouver.
— Écoutez­moi, Raoul, je suis décidée à vous dire quelque chose de grave, de très 
grave. Vous vous rappelez la légende de l'Ange de la musique ?
— Naturellement, dit Raoul. Personne ne chante comme vous avez chanté l'autre 
soir sans qu'intervienne quelque miracle. Vous avez sûrement entendu l'Ange de la 
musique.
— Oui, dans ma loge.
Raoul la regarda, inquiet.
— Dans votre loge ?
— Oui, c'est là que je l'ai entendu et je n'ai pas été seule à l'entendre... vous aussi, 
vous l'avez entendu.
Devant l'air étonné de Raoul, elle ajouta:
— Oui, l'autre soir. C'est lui qui m'a dit: "Il faut m'aimer !" 
Raoul éclata de rire.
— Pourquoi riez­vous ? demanda Christine. Vous croyez peut­être avoir entendu 
une voix d'homme.
— En effet ! répondit Raoul. Mais quand vous êtes partie... j'ai ouvert la porte et je 
n'ai trouvé personne dans la loge.
—Vous voyez, il n'y avait personne... c'était lui, l'Ange de la musique !
— Allons, Christine, je pense vraiment qu'on se moque de vous !
La jeune fille lui dit d'une voix irritée:
— Ah ! Laissez­moi ! Laissez­moi !
Elle s'enfuit. Raoul courut derrière elle mais elle disparut.
Raoul retourna à l'auberge triste et découragé. Là, il apprit que Christine venait de 
monter dans sa chambre. Il dîna seul près de la cheminée puis il alla se coucher. Mais 
il ne parvenait pas à dormir.
À onze heures et demie, il entendit des pas légers dans le couloir. Intrigué, il 
s'habilla rapidement et ouvrit sa porte. Il vit Christine qui commençait à descendre 
l'escalier. Une fois en bas, elle parla avec la propriétaire de l'auberge qui lui dit de ne 
pas perdre les clés. Puis il entendit la porte d'entrer s'ouvrir et se refermer. Le calme 
revint aussitôt. Il se précipita dans sa chambre et ouvrit la fenêtre. Il vit alors la forme
blanche de Christine qui traversait la place. A l'aide d'un arbre qui était près de la 
fenêtre, il parvint à sortir dehors et suivit Christine.
Le lendemain matin, quelle ne fut pas la surprise de l'aubergiste quand on lui 
apporta le jeune homme presque mort de froid. Elle courut apprendre la nouvelle à 
Christine qui descendit rapidement aider la brave dame. Raoul ouvrit bientôt les yeux 
et se sentit très vite mieux en voyant le joli visage de son amie.
Que s'était­il passé ? Voici ce que Raoul raconta quelques jours plus tard à son frère:
" J'ai suivi Christine jusqu'au cimetière de la colline. Elle s'est dirigée vers la tombe 
de son père et là, elle s'est mise à genoux dans la neige pour prier. Quand minuit a 
sonné, elle a levé la tête, fixé le ciel et a tendu ses bras vers la lune. Elle paraissait en 
extase. A mon tour, j'ai levé la tête et, tout à coup, j'ai entendu une musique... et quelle
musique ! Celle que nous jouait son père. Jamais cette musique ne m'avait semblé 
aussi belle. Mais personne ne jouait d'un instrument. La musique s'est bientôt arrêtée 
et j'ai entendu un bruit du côté des têtes de morts de l'ossuaire. J'ai frissonné. J'ai tout
de suite pensé que le musicien était caché derrière l'ossuaire et je me suis mis à 
observer attentivement. Je n'ai pas vu Christine partir. J'ai couru jusqu'à l'ossuaire et 
là... tout est allé très vite... une tête de mort a roulé à mes pieds... puis une autre... et 
encore une autre: on aurait dit que j'étais la cible d'un funèbre jeu de boules. Puis, tout
à coup, j'ai vu une ombre glisser sur le mur de l'église. J'ai couru vers elle. L'ombre 
était déjà dans l'église. Elle avait un manteau. J'ai saisi le manteau, l'ombre s'est 
retournée et, grâce aux rayons de la lune qui passaient à travers le grand vitrail, j'ai 
vu une effroyable tête de mort qui fixait sur moi un regard où brillaient les feux de 
l'enfer ! Puis je me suis évanoui. "
Chapitre 3

MM. Richard et Moncharmin, refusant de croire à cette histoire de fantôme, avaient
de nouveau loué la loge n° 5.
Un samedi matin, en arrivant à leur bureau, ils trouvèrent cette lettre:
" Mes chers directeurs,
C'est donc la guerre ?
Si vous tenez encore à la paix, voici mon ultimatum. Il comporte trois conditions.
1) Me rendre ma loge ­ et je veux qu'elle soit à ma libre disposition dès maintenant.
2) Le rôle de " Marguerite " sera chanté, ce soir, par Christine Daaé. Ne vous occupez
pas de la Carlotta qui sera malade.
3) Faites­moi savoir par une lettre donnée à Mme Giry, qui me la fera parvenir, que 
vous acceptez, comme vos prédécesseurs, de me verser mon indemnité mensuelle.
Sinon, vous donnerez Faust, ce soir, dans une salle maudite.
F de l'O. "
— Eh bien, il m'embête celui­ci !... Il m'embête ! cria Richard.
À peu près à la même heure, la Carlotta reçut chez elle une lettre anonyme où l'on 
disait:
"Si vous chantez ce soir, il vous arrivera un grand malheur au moment où vous 
chanterez... un malheur pire que la mort."
Après avoir lu la lettre, la Carlotta se sentit très mal. Elle ne put même pas avaler 
son petit déjeuner. Puis, elle s'assit sur son lit et réfléchit longuement. Ce n'était pas 
la première fois qu'elle recevait ce genre de lettres. Les gens sont si jaloux ! Et elle 
finit par se dire: " On verra bien. "
Au début de l'après­midi, le secrétaire de M. Richard vint la voir pour savoir si elle 
allait bien. Elle lui répondit qu'elle se portait à merveille.
A cinq heures de l'après­midi, elle reçut une nouvelle lettre anonyme. Elle disait 
simplement:
" Vous êtes enrhumée, soyez raisonnable, c'est une folie de chanter ce soir. "
La Carlotta se mit à rire et haussa les épaules. Puis elle chanta deux ou trois notes 
pour se rassurer. Tout allait bien. Non, elle ne laisserait pas la petite Daaé chanter à 
sa place, car c'est cela que l'on voulait.
Ce soir­là, à l'opéra, il y avait tous les amis de la Carlotta et énormément de monde.
La seule chose qui paraissait étrange, c'était la présence de MM. Richard et 
Moncharmin dans la loge n° 5.
Lever de rideau. Le spectacle se déroulait très bien. Les directeurs plaisantaient sur
le fait qu'ils n'entendaient aucune voix étrange dans la loge. La scène résonnait 
maintenant de chants joyeux. Étudiants, bourgeois, jeunes filles, dont Christine Daaé, 
dansaient. Puis apparut Marguerite et des bravos accueillirent la Carlotta. Sûre d'elle,
de sa voix et de son succès, elle chanta avec ardeur et enthousiasme. On l'applaudit 
avec ferveur quand,  soudain...  quelque chose d'horrible se produisit... Faust chantait 
et Marguerite devait répondre. À ce moment donc... de sa bouche s'échappa un horrible
couac ! Un crapaud. La salle se leva, médusée. La Carlotta, désespérée, jeta un regard 
autour d'elle comme pour chercher une protection. Ce fut affreux.
Puis, bravement, héroïquement, elle recommença. Le crapaud réapparut.
La salle fit un bruit épouvantable. Dans la loge n° 5, les  directeurs étaient  très  
pâles. Cet épisode inexplicable les emplissait  d'angoisse....  et, tout à coup, ils 
sentirent une présence... quelqu'un était dans la loge... ils étaient effrayés... Oui, le 
fantôme était là... autour d'eux... derrière eux... à côté d'eux ils ne le voyaient pas 
mais, aucun doute, il était là !
C'est alors qu'ils entendirent une voix qui disait : 
  — Elle chante ce soir à décrocher un lustre ! 
Ils levèrent tous les deux la tête et poussèrent un cri terrible. Le lustre, l'immense 
lustre bougeait dangereusement et il finit par tomber. Les spectateurs coururent 
comme des fous vers la sortie. Il y eut de nombreux blessés et une morte, une 
malheureuse femme qui était concierge et qui était venue à l'Opéra pour la première 
fois de sa vie !
Le lendemain, on put lire dans le journal le titre suivant: " Sept cents kilos sur la 
tête d'une concierge ! " Ce fut toute son oraison funèbre ! 
Chapitre 4
Cette soirée fut mauvaise pour tout le monde. La Carlotta était tombée malade et 
Christine Daaé avait disparu après la représentation.
Elle n'était pas venue au théâtre depuis maintenant quinze jours. Raoul, fort 
inquiet, se demandait où elle était. Il avait écrit à Mme Valérius pour avoir des 
nouvelles de Christine mais il n'avait pas reçu de réponse. Il parla avec les directeurs 
de l'Opéra qui lui dirent qu'elle était en congé. Il demanda combien de temps devait 
durer ce congé. On lui répondit sèchement qu'il était illimité et que c'était Christine 
Daaé qui l'avait demandé.
Raoul ne fut pas satisfait par ces réponses. Il voulait savoir ce qui se passait et il 
finit par se présenter chez Mme Valérius qui le reçut aussitôt.
— M. de Chagny, dit­elle joyeusement, c'est le Ciel qui vous envoie !... Nous allons 
pouvoir parler d'elle.
— Madame... où est Christine ? demanda Raoul d'un ton lugubre.
— Mais elle est avec son " bon génie " ! répondit tranquillement la vieille dame.
— Quel bon génie ? s'écria le pauvre Raoul.
— Mais l'Ange de la musique !
Raoul était consterné. Christine était avec l'Ange de la musique.
Madame Valérius lui sourit et mit un doigt sur sa bouche pour lui recommander le 
silence:
— Il ne faut le répéter à personne ! dit­elle.
— Vous pouvez compter sur moi ! répondit Raoul qui ne savait plus ce qu'il disait 
car il était trop troublé par l'attitude de Christine.
— Je sais ! Je sais ! dit Mme Valérius. Je vous aime bien, monsieur Raoul, et 
Christine aussi.
" Elle m'aime bien, se dit Raoul avec un soupir, et pourtant... " et il repensa à l'Ange
de la musique, à la tête de mort à Perros et aussi au Fantôme de l'Opéra, dont il avait 
entendu parler un soir où il était resté à l'Opéra. Il s'était retrouvé près d'un groupe de
machinistes qui parlaient de la mort étrange et tragique de Joseph Buquet et de la 
description que celui­ci avait faite du fantôme.
Il demanda à voix basse:
— Qu'est­ce qui vous fait croire, madame, que Christine m'aime bien ?
— Elle me parlait de vous tous les jours !
— Vraiment ? Et qu'est­ce qu'elle vous disait ?
— Que vous lui aviez fait une déclaration.
Et elle se mit à rire.
Raoul se leva, tout rouge. Il souffrait énormément.
— Mais, où allez­vous ? demanda la brave dame. Vous n'allez pas partir comme 
cela... Vous êtes fâché parce que j'ai ri, je vous en demande pardon... Après tout, ce qui
est arrivé n'est pas de votre faute... Vous ne saviez pas... Vous êtes jeune... et vous 
pensiez que Christine était libre...
— Et elle ne l'est pas ?
— Mais non ! mais non !... Vous savez bien que Christine ne peut pas se marier !
— Non, je ne le savais pas... Et pour quelle raison Christine ne peut pas se marier ?
— Mais à cause du Génie de la musique ! Il le lui interdit.
— Il lui interdit de se marier ?
— Pas exactement. Il lui dit simplement que, si elle se mariait, elle ne l'entendrait 
plus et qu'il partirait pour toujours ! Alors, vous comprenez, elle ne veut pas laisser 
partir le génie de la musique. C'est bien naturel.
— Oui, oui, dit Raoul, bien entendu.
— Mais je croyais que Christine vous avait raconté tout cela qand elle est allée à 
Perros avec son le " bon génie " ?
— En réalité, il lui avait donné rendez­vous là­bas, sur la tombe de Daaé ! Il lui 
avait promis de jouer sur le violon de son père !
" Ainsi, se dit Raoul, elle était à Perros avec lui." Puis il se leva et prononça ces mots
avec une grande autorité:
— Madame, je vous prie de me dire où il vit, ce génie­là.
— Mais, au Ciel, répondit la vieille dame avec candeur.
Raoul ne sut que dire. Comment pouvait­on croire qu'un génie descendait tous les 
soirs du ciel pour se retrouver dans les loges des artistes ! Puis il ajouta:
— Quand Christine a­t­elle fait la connaissance de ce " génie " ?
— Il y a trois mois, je crois... oui, je crois que ça fait trois mois qu'il a commencé à 
lui donner des leçons.
— Il lui donne des leçons mais... où ça ?
— Maintenant, je ne sais pas. Mais avant son départ, cela se passait dans sa loge. 
Ici, dans ce petit appartement, ce serait impossible. Mais à l'Opéra, à huit heures du 
matin, il n'y a personne, donc on ne les dérange pas... vous comprenez ?
— Je comprends, je comprends, dit Raoul.
Puis il fit ses adieux à madame Valérius et rentra chez lui.
Il était très fâché. Sous ses airs candides, Christine se moquait de lui, c'était 
évident! Mais il l'aimait, il l'aimait tant ! Pourquoi n'était­il pas aimé en retour ?
Le lendemain, il reçut une lettre. Christine lui écrivait:
" Mon ami, soyez, après­demain, au bal masqué de l'Opéra, à minuit. Habillez­vous 
en domino blanc, mettez un masque et placez­vous près de la porte du salon mais, 
surtout, qu'on ne vous reconnaisse pas. Christine. "
Chapitre 5

Après  avoir lu la lettre, Raoul était nerveux. Il se demandait à quel jeu Christine 
jouait. Se moquait­elle de lui ? Il était impatient de savoir.
L'heure du rendez­vous approchait. Déguisé et le visage couvert d'un masque, Raoul
se rendit à l'Opéra où il arriva à minuit moins cinq. Il pénétra dans le salon. Il y avait 
beaucoup de monde et tous portaient des costumes magnifiques.
Raoul se plaça près de la porte et attendit. Un domino noir passa et lui serra le bout
des doigts. Il comprit que c'était Christine et il se mit à la suivre pendant un bon 
moment. Il était heureux maintenant. Il aimait. Ils passèrent au milieu de la foule et 
Raoul remarqua qu'un groupe se pressait autour d'un personnage au déguisement 
macabre : il était vêtu tout en rouge et portait un immense chapeau à plumes sur une 
tête de mort... sur son manteau était écrit: Ne me touchez pas ! Je suis la Mort Rouge 
qui passe. Quelqu'un voulut le toucher... mais une main de squelette sortit du 
manteau et serra fortement le poignet de l'homme qui poussa un cri. 

En passant près du funèbre personnage, Raoul fut sur le point de crier: " C'était la tête
de mort de Perros." Il voulut se précipiter sur lui mais le domino noir, qui semblait 
troublé, lui avait pris le bras et l'entraînait loin de la foule.
Ils montèrent rapidement deux étages. Le domino noir n'arrêtait pas de regarder 
derrière lui. Puis ils arrivèrent devant une loge et entrèrent. Là, Raoul retira son 
masque mais Christine garda le sien. Puis elle mit son oreille contre le mur de la loge 
et écouta. Ensuite, elle ouvrit un peu la porte de la loge, regarda dans le couloir et dit 
à voix basse:
 — Il est monté à l'étage au­dessus puis, un peu plus fort, elle ajouta : il redescend !
Elle voulut fermer la porte mais Raoul l'en empêcha car il venait de voir sur la 
marche la plus haute de l'escalier un pied rouge, et puis un autre... et, lentement, 
majestueusement, la Mort Rouge descendit et il revit la tête de mort de Perros­Guirec.
— C'est lui ? s'écria­t­il... cette fois, il ne va pas s'échapper !
Mais Christine avait rapidement refermé la porte.
— Qui donc, lui ? demanda­t­elle d'une voix étrange.
— Qui donc ? fit Raoul avec colère. Mais l'homme qui se cache sous cette horrible 
image mortuaire !.. le mauvais génie de Perros !... la Mort Rouge !... votre Ange de la 
musique ! Je vais lui arracher son masque et nous nous regarderons, face à face, et je 
saurai enfin qui vous aimez et qui vous aime.
Et il se précipita vers la porte. Christine l'empêcha de sortir.
  — Au nom de notre amour, Raoul, vous ne passerez pas !
Qu'avait­elle dit ?... Au nom de leur amour ? Elle l'aimait donc ! Non, elle mentait, 
c'est sûr !
— Vous mentez, Christine, lui dit­il. Vous vous moquez de tout le monde. Le seul 
être qui vous importe, c'est la Mort rouge ! Je vous méprise.
Christine se laissa injurier. Elle ne pensait qu'à une chose: l'empêcher de sortir.
— Vous me demanderez un jour pardon pour toutes ces horribles paroles et je vous 
pardonnerai, finit­elle par dire. Adieu.
— Puis­je savoir au moins pour quel enfer vous repartez, mystérieuse dame ?... ou 
pour quel paradis ? dit Raoul d'un ton ironique.
— J'étais venue pour vous le dire... mais je ne peux plus rien vous dire... vous ne me
croiriez pas ! Vous ne me faites plus confiance, Raoul, c'est fini !
Puis elle sortit rapidement de la loge.
Raoul retourna à la fête, le cœur brisé. Puis il se dirigea vers la loge de Christine. Il 
frappa à la porte. N'ayant pas de réponse, il entra. Sur le bureau, il y avait du papier à
lettres. Il pensa écrire à Christine mais c'est alors qu'il entendit des bruits de pas dans
le couloir... il se cacha dans le boudoir qui était séparé de la loge par un simple rideau. 
La porte s'ouvrit: c'était Christine.
Il retint sa respiration. Il voulait voir ! Il voulait savoir !... Quelque chose lui disait 
qu'il allait assister à une partie du mystère et qu'il allait commencer à comprendre... 
peut­être...
Christine entra, retira son Masque et le jeta sur la table. Elle semblait fatiguée. 
Elle soupira, laissa tomber sa belle tête entre ses mains... A quoi pensait­elle ?... À 
Raoul ?... Non ! car Raoul l'entendit murmurer: " Pauvre Erik ! " Qu'est­ce que cet Erik
venait faire dans cette histoire ? Et pourquoi Christine disait­elle " Pauvre Erik ! " et 
non " Pauvre Raoul ! "... elle le savait, pourtant, qu'il était très malheureux !

Puis, Raoul vit qu'elle se mettait à écrire. Soudain, elle leva la tête... Elle écoutait 
quelque chose... Raoul aussi écouta... un chant sourd semblait sortir des murs... le 
chant devenait de plus en plus clair... on distingua bientôt une voix très belle et très 
douce... la voix s'approchait toujours... elle entra dans la pièce devant Christine. 
Christine se leva et dit à la voix:
— Me voici, Erik, je suis prête.
Raoul ouvrit le rideau qui le cachait et il marcha vers la jeune fille qui se dirigeait 
vers le fond de la loge où il y avait un grand miroir qui lui renvoyait son image.
Christine marchait toujours vers son image et son image descendait vers elle. Les 
deux Christine ­ le corps et l'image ­ finirent par ne faire qu'une et Raoul tendit le bras
pour saisir son amie mais, par une sorte de miracle, il fut rejeté en arrière: il vit alors 
plus deux mais quatre, huit, vingt Christine qui tournèrent autour de lui avec légèreté
et qui semblaient se moquer de lui.
Puis tout redevint immobile et il se vit, lui, dans la glace. Mais Christine avait 
disparu.
Il se précipita vers la glace... rien, tout était normal. " Par où, par où Christine 
était­elle partie ? Et qui est cet Erik ? " se dit­il.
Le lendemain, Raoul se rendit chez Mme Valérius. Il trouva la vieille dame en train 
de tricoter et Christine, à ses côtés, qui faisait de la dentelle.
Christine se leva et, simplement, lui tendit la main. Son visage était calme et 
serein. Raoul, surpris, restait là, sans rien dire.
— Eh bien, M. de Chagny, s'exclama Mme Valérius, vous ne connaissez donc plus 
notre Christine ? Son " bon génie " nous l'a enfin rendue.
— Enfin, interrompit la jeune fille d'un ton sec, nous avions dit que nous ne 
reparlerions plus de cela !... Vous savez qu'il n'y a pas de génie de la musique !
— Ma fille, il t'a pourtant donné des leçons pendant trois mois !
— Je vous ai dit que je vous expliquerai un jour... tout cela n'intéresse pas M. de 
Chagny.
— Vous vous trompez, Christine... Je suis votre ami depuis longtemps et je 
m'inquiète. Vous vivez une étrange aventure dont, un jour, vous finirez par être 
victime.
— Que dites­vous ? s'écria Mme Valérius. Christine est donc en danger ?
— Oui, madame..., déclara courageusement Raoul.
— Mon Dieu ! dit la bonne dame. Et de quel danger s'agit­il, monsieur de Chagny ?
— Un imposteur est en train d'abuser de sa bonne foi.
— L'Ange de la musique, un imposteur ? fit Mme Valérius.
— Ne le crois pas... ne le crois pas, dit Christine en serrant Mme Valérius dans ses 
bras.
— Alors, dis­moi que tu ne me quitteras plus, répondit Mme Valérius.
Christine se taisait et Raoul dit:
— Voilà ce qu'il faut promettre, Christine... pour nous rassurer.
— C'est une promesse que je ne ferai pas, M. de Chagny, dit Christine avec fierté. 
Je suis libre de mes actions et vous n'avez pas à me contrôler. Il n'y a qu'un homme au 
monde avec qui j'accepterais de parler de ma vie, mon mari, or, je n'ai pas de mari.
En disant cela avec force, Christine tendit la main vers Raoul. Le jeune homme vit 
alors qu'elle portait un anneau d'or au doigt.
— Vous n'avez pas de mari et, pourtant, vous portez une alliance.
— C'est un cadeau, dit­elle en rougissant. Mais cet interrogatoire a assez duré, 
monsieur... je n'ai plus rien à vous dire.
— Christine, je sais le nom de votre Ange de la musique: il s'appelle Erik.
Christine devint très pâle.
— Raoul, dit­elle alors avec une grande douceur, il faut oublier cette voix et ne plus 
essayer de connaître ce mystère.
— Il est donc terrible ?
— Il est horrible. Jurez­moi que vous ne ferez rien pour savoir... jurez­moi que vous 
n'entrerez pas dans ma loge si je ne vous appelle pas.
— Vous promettez de m'appeler quelquefois ?
— Je vous le promets.
— Quand ?
— Demain.
— Alors, je vous le jure.
Et ils se séparèrent.
Chapitre 6
Le lendemain, il la revit à l'Opéra. Elle avait toujours l'anneau au doigt. Elle fut 
douce et bonne.
Il lui apprit que, dans un mois, il devait partir pour l'expédition polaire. Elle lui dit 
alors d'un ton triste:
— Alors, dans un mois, nous nous dirons adieu pour toujours !
— Non, Christine, nous pouvons attendre... puis nous marier. Elle lui mit la main 
sur la bouche:
— Taisez­vous, Raoul... vous le savez, nous ne nous marierons jamais!
Puis, l'air joyeux, elle dit:
— Mais nous pouvons nous fiancer !... Personne ne le saura !... Nous sommes 
fiancés, Raoul, pour un mois... Dans un mois, vous partirez, et je pourrai être heureuse
avec le souvenir de ce mois­là toute ma vie !
Elle était contente de son idée... puis d'un ton grave, elle ajouta:
— Cela est un bonheur qui ne fera de mal à personne !
Raoul accepta de jouer le jeu. Il prit les mains de Christine et lui dit:
— Mademoiselle, j'ai l'honneur de vous demander votre main !
— Mais, vous les avez toutes les deux, dit Christine en riant... Oh, Raoul, nous 
allons être heureux pendant ce mois­ci. Ce sera merveilleux !
Raoul sourit tout en se disant: " Pendant tout ce mois, j'aurai le temps de découvrir 
et de détruire le mystère de la voix et, dans un mois, Christine acceptera de devenir 
ma femme. En attendant, jouons ! "
Et ils passèrent un moment merveilleux.
Le lendemain, comme depuis l'histoire du " crapaud " la Carlotta était tombée 
malade, Christine Daaé la remplaça dans " La Juive ". Elle eut le même succès que 
pour la soirée de gala. Ce fut un triomphe.
Raoul assista au spectacle avec son frère. Il fut le seul à souffrir en l'entendant 
chanter car il vit que Christine avait toujours l'anneau d'or au doigt. Une voix 
lointaine murmurait à son oreille: " Ce soir, elle a encore l'anneau d'or, et ce n'est pas 
toi qui le lui as donné. Ce soir, elle a encore donné son âme, et ce n'était pas à toi. "
Il courut alors la retrouver dans sa loge. Ils s'embrassèrent puis Christine lui dit 
tout haut:
— Partez, Raoul, puis à l'oreille: demain, nous nous verrons, mon cher fiancé ! Et 
soyez heureux: ce soir, c'est pour vous que j'ai chanté.
Il revint donc le lendemain dans la loge de Christine.
— Allons nous promener, mon ami, lui dit­elle, l'air nous fera du bien. Aujourd'hui, 
je n'ai rien à craindre.
Raoul pensait qu'elle allait lui proposer d'aller se promener loin de ce monument 
qu'il commençait à détester mais elle lui fit monter des escaliers et le conduisit 
rapidement sur les toits de l'Opéra, sans faire de bruit et en regardant à chaque 
instant derrière elle. Une fois là, ils s'assirent sous la statue d'Apollon. C'était un beau
soir de printemps et les jeunes gens étaient confiants, tranquilles... mais ils ignoraient
qu'une ombre les avait suivis. Ils restèrent un moment à regarder les nuages.
— Bientôt, nous irons plus loin et plus vite que les nuages, dit Christine, au bout du
monde et si, le moment venu, je refuse de partir, vous m'enlèverez de force, Raoul.
Et elle se serra contre lui.
— Vous voulez donc partir avec moi ?
— Oui, Raoul. Je rien peux plus, c'est un démon.
Et elle frissonna.
— Vous parlez d'Erik, n'est­ce pas ? Arrêtez de le voir, dit Raoul.
— C'est impossible, Raoul. Je dois retourner auprès lui, sous la terre, c'est là qu'il 
vit... sinon, de grands malheurs peuvent arriver, croyez­moi... Et puis, j'ai pitié de lui 
mais il est horrible, Raoul... je ne supporte plus tout cela.
— Alors fuyons, Christine, tout de suite..., dit Raoul et il lui prit la main pour 
l'entraîner.
Christine l'arrêta.
— Non, non, dit­elle, pas maintenant, ce serait trop cruel... Laissez­moi chanter 
encore demain soir, une dernière fois... et puis nous partirons... Je vous raconterai 
tout... vous ne pouvez pas comprendre... puis, elle se dressa, inquiète: vous n'avez pas 
entendu un bruit ?
— Non, je n'ai rien entendu, répondit Raoul.
— C'est trop affreux de trembler comme cela tout le temps !... Mais ici, nous ne 
courons aucun danger... il ne viendra pas. Il travaille sur un opéra et puis, les oiseaux 
de nuit n'aiment pas regarder le soleil. Je ne l'ai jamais vu à la lumière du jour... ce 
doit être horrible... Ah ! la première fois que je l'ai vu... j'ai cru que j'allais mourir !
— Pourquoi ? demanda Raoul, effrayé par le ton de Christine.
— Parce que je l'avais vu !
Cette fois, Raoul et Christine eurent l'impression d'entendre un gémissement. Ils se 
levèrent, regardèrent autour d'eux: rien ! Ils étaient seuls sur les toits. Ils se rassirent.
— Comment l'avez­vous vu pour la première fois ?
— Il y avait trois mois que je l'entendais sans le voir. La première fois que je l'ai 
entendu, j'ai cru que cette magnifique voix chantait à mes côtés, dans une loge voisine.
J'ai cherché, il n'y avait personne. Elle était dans ma loge et je ne comprenais pas 
comment je pouvais l'entendre. Alors, j'ai pensé ­ c'est stupide, je le sais ­ que c'était 
l'Ange de la musique dont parlait mon père et qu'il avait promis de m'envoyer. J'en ai 
parlé à ma mère adoptive qui m'a dit: " Ce doit être l'ange ; en tout cas, tu peux le lui 
demander. " C'est ce que j'ai fait et la voix d'homme m'a répondu qu'en effet elle était 
la voix de l'ange que j'attendais. À partir de ce moment, une confiance absolue s'est 
établie entre nous. Elle m'a dit qu'elle était venue sur terre pour m'aider à mieux 
chanter et elle m'a demandé la permission de me donner des leçons. J'ai accepté. La 
voix venait régulièrement dans ma loge et elle m'a appris à maîtriser ma voix pour 
devenir une grande soprano. Au bout de quelques semaines, je ne me reconnaissais 
plus quand  je chantais !... Je chantais avec un transport inconnu, j'étais   légère 
comme si on m'avait donné des ailes. J'étais heureuse ! Mais le soir du gala, quand j'ai 
ouvert les yeux et que je vous ai vu à mes côtés, j'ai eu peur... peur pour vous et je n'ai 
pas voulu vous reconnaître car la Voix aussi était là et elle est jalouse !... Les deux 
jours suivants, elle m'a fait des scènes atroces ! Elle ne cessait de dire que je vous 
aimais, qu'elle le sentait, qu'elle le voyait. " Si c'était un simple ami, a­t­elle dit, vous 
ne le chasseriez pas comme vous l'avez fait. "
" Assez ! lui ai­je dit; demain je dois aller à Perros, sur la tombe de mon père et je vais 
demander à M. Raoul de Chagny de m'accompagner... " 
" Parfait ! a répondu la Voix mais sachez que moi aussi j'irai, car je suis partout où 
vous êtes, Christine... et vous savez la suite... Puis un jour, dans ma loge, la Voix m'a 
dit d'avancer vers le miroir et j'ai obéi; c'était comme une force qui m'obligeait à 
avancer et... tout à coup, je ne sais pas comment, je me suis trouvée hors de ma loge...
Raoul interrompit Christine.
— Sans savoir comment ? Mais c'est impossible !
— Et pourtant, c'est vrai, Raoul... cet être est une sorte de magicien... J'étais donc 
devant la glace et puis... il n'y avait plus de loge... j'étais dans un couloir obscur... j'ai 
eu peur et j'ai crié. Un bras m'a alors pris par la taille, j'ai regardé l'homme: il était 
enveloppé d'un grand manteau noir et il portait un masque... et je me suis évanouie.    
— Mon Dieu, Christine, tout cela s'est passé après l'incident du lustre, quand vous 
avez disparu, n'est­ce pas ?
— C'est cela..., répondit Christine d'un ton triste.
— Mais continuez, je vous en prie, dites­moi tout...
— Quand je me suis réveillée, j'étais couchée sur un lit dans une pièce 
magnifiquement décorée. L'homme au masque était près de moi et il m'a dit:
— Christine, vous ne courez aucun danger, soyez tranquille. 
C'était la Voix. Ainsi, la Voix était un homme et j'étais sa prisonnière. Des larmes se
sont mises à couler sur mon visage et l'homme a dit: 
— Christine, je ne suis ni ange, ni génie , ni fantôme... je suis Erik ! 
Puis il a pris une harpe, a commencé à jouer et a chanté. C'était merveilleux ! 
J'étais depuis trois jours dans sa " maison sous terre ". Il me traitait très bien et nous 
chantions souvent. La musique était notre lien. Il portait toujours son masque. Le 
lendemain, je lui ai demandé de l'enlever. Il m'a répondu avec une grande sérénité:
— Vous ne verrez jamais le visage d'Erik ! Vous allez passer en tout cinq jours ici et 
après, vous serez libre, Christine. Pendant ces cinq jours, vous aurez appris à me 
connaître et alors, vous reviendrez, de temps en temps, voir le pauvre Erik qui vous 
aime. 
Le lendemain, nous avons chanté ensemble le duo d'Othello. C'était grandiose et, je 
ne sais pas pourquoi, j'ai voulu voir le visage de mon compagnon de chant. Mes doigts 
rapides ont arraché le masque et... horreur ! horreur ! Quelle image !... J'avais devant 
moi un visage épouvantable: le masque de la Mort. Erik a hurlé: 

— Apprends, apprends que je suis fait entièrement avec la mort... de la tête aux 
pieds ! C'est un cadavre qui t'aime, qui t'adore, Christine, et qui ne te quittera jamais. 
Je te garde car tu as voulu voir mon visage !
— Mais vous êtes revenue, Christine, dit Raoul.
— Oui, je l'ai tant supplié qu'il m'a redonné ma liberté. Il pleurait. Pauvre Erik ! 
Voilà mon histoire, Raoul, voilà pourquoi je ne peux pas vous épouser... j 'ai peur, peur 
de lui...
Raoul la serra contre lui et lui donna un baiser. Ils entendirent alors un cri, se 
levèrent précipitamment et virent, près d'eux, une ombre noire qui les regardait avec 
des yeux pleins de feu. Ils coururent, coururent. Ils ne s'arrêtèrent qu'au huitième 
étage. Les couloirs de l'Opéra étaient déserts.
Soudain, une silhouette bizarre se dressa devant eux et leur barra le chemin:
— Non ! pas par ici !
Et la silhouette leur indiqua un autre couloir.
Raoul voulait s'arrêter et demander des explications mais Christine l'entraînait et 
le forçait à courir.
— Mais qui est­ce ? demanda Raoul.
— C'est le Persan...
— Mais qui est­ce, le Persan ?
— On n'en sait rien... il est toujours à l'Opéra.
Ils arrivèrent dans la loge de Christine où elle prit quelques affaires.
— Christine, êtes­vous décidée à fuir Erik ? demanda Raoul.
— Oui, demain.
Soudain, Christine devint très pâle et s'écria:
— Oh ! Mon Dieu ! Erik ! Erik, ayez pitié de moi !
— Mais qu'y a­t­il ? demanda Raoul.
— L'anneau.
— Quoi, l'anneau ?...
— L'anneau d'or qu'il m'a donné.
— Ah ? C'est Erik qui vous a donné cet anneau !
— Vous le savez bien, Raoul ! Mais ce que vous ne savez pas, c'est ce qu'il m'a dit en 
me le donnant: " Je vous rends votre liberté, Christine, mais c'est à la condition que cet
anneau sera toujours à votre doigt. Si vous l'enlevez, malheur à vous, Christine, car 
Erik se vengera ".
Ils cherchèrent l'anneau partout mais ne le trouvèrent pas.
— Christine, fuyons, fuyons tout de suite.
Elle hésita. Il crut qu'elle allait dire oui... et puis, elle dit:
— Non, demain.
Ils sortirent enfin de l'Opéra et se quittèrent.
Le lendemain soir, on jouait "Faust". Raoul assistait au spectacle avec son frère. 
Christine Daaé chanta de toute son âme. Au dernier acte, elle était sublime. Mais, tout
à coup, une brusque obscurité se fit sur le théâtre. Cela fut très rapide, si rapide que 
les spectateurs n'eurent pas le temps de crier. Quand la lumière revint, on découvrit 
que Christine Daaé avait disparu! On ferma le rideau. Le public s'énerva. Que se 
passait­il ? Puis on rouvrit le rideau. Le ténor s'avança sur la scène et annonça d'une 
voix grave et triste:
— Mesdames et messieurs, un événement incroyable et qui nous laisse dans une 
profonde inquiétude vient de se produire. Notre camarade, Christine Daaé, a disparu 
sous nos yeux sans que l'on puisse savoir comment !
Chapitre 7
Quand Christine disparut, Raoul pensa immédiatement que le coupable était Erik. 
Il était sûr que cet homme avait un pouvoir presque surnaturel. Après l'annonce du 
ténor, il se précipita sur la scène. Il l'appela, il avait l'air d'un fou. Il courut jusqu'au 
bureau des directeurs mais là, il sentit une main sur son épaule et il entendit ces mots
à son oreille: " Les secrets d'Erik ne regardent personne ! "
Il se retourna et se trouva face à face avec le Persan.
— Encore vous, dit Raoul d'une voix irritée. Mais qui êtes­vous donc ?
— Vous le savez très bien... Je suis le Persan ! Mais où allez­vous si vite ?
— Vous ne le devinez pas ? Au secours de Christine !
— Alors, monsieur, restez ici !... car Christine Daaé est ici !...
— Avec Erik ?
— Avec Erik !
— Comment le savez­vous ?
— J'étais à la représentation et il n'y a qu'un homme au monde capable de faire un 
enlèvement pareil... c'est Erik !
— Vous connaissez donc Erik ? lui demanda Raoul.
— Je sais que Christine est avec lui, répondit juste le Persan.
— Alors, monsieur, j'ignore qui vous êtes et quelles sont vos intentions mais je vous 
supplie de m'aider... ou plutôt d'aider Christine.
— Je suis ici pour cela. Je peux essayer de vous conduire auprès d'elle et de lui.
— Alors, courons, courons, dit Raoul.
— Silence, dit le Persan en écoutant les bruits lointains du théâtre... nous ne 
prononcerons pas son nom ici, nous dirons simplement Il, pour ne pas attirer son 
attention.
— Vous pensez qu'il est près de nous ?
— Tout est possible...
— Mais vous savez où il vit ?
— J'ai mon idée.
— Vous connaissez donc bien l'Opéra ?
— Moins bien que lui ! répondit modestement le Persan. Mais, assez parlé... en 
route !
Ils se rendirent rapidement dans la loge de Christine Daaé. Le Persan referma la 
porte. Raoul le vit sortir de sa poche deux pistolets, les examiner puis les remettre 
dans sa poche.
— Vous voulez vous battre en duel ? demanda le jeune homme, surpris.
— C'est bien, en effet, à un duel que nous allons, monsieur, et quel duel ! car nous 
serons deux contre un. Je dois vous dire que nous aurons à nous affronter au plus 
terrible adversaire qu'il soit possible d'imaginer. Mais vous aimez Christine Daaé, 
n'est­ce pas ?
— Je l'adore. Mais vous, qui ne l'aimez pas, pourquoi voulez­vous risquer votre vie 
pour elle ?... Vous détestez Erik ?
— Non, monsieur, dit tristement le Persan, je ne le hais pas. Si je le haïssais, il y a 
longtemps qu'il ne ferait plus de mal.
— Il vous a fait du mal ?
— Le mal qu'il m'a fait, je le lui ai pardonné.
— C'est incroyable, dit Raoul, il vous a fait du mal, vous semblez dire qu'il est 
capable de tout mais je retrouve chez vous une sorte de pitié que je vois aussi chez 
Christine.
Le Persan ne répondit pas. Il resta un moment silencieux puis il dit à Raoul en lui 
montrant le miroir :
— Bien, allons­y !
— Mais où allons­nous ? demanda Raoul.
— Chez le monstre, répondit le Persan.
Ils s'approchèrent du miroir. Le Persan toucha quelque chose sur le mur de la loge. 
Leur double image se troubla aussitôt. Le Persan attira le jeune homme contre lui et, 
soudain, la glace tourna, comme les portes des édifices publics... elle tourna, 
emportant Raoul et le Persan dans un mouvement irrésistible et les jetant 
brusquement de la pleine lumière à la plus profonde obscurité.
Le Persan alluma une lanterne et ils se mirent à descendre un escalier. Ils 
arrivèrent dans les souterrains de l'Opéra...
— C'est ici que nous allons entrer dans la demeure d'Erik... l'endroit qui nous en 
permettra l'accès se trouve entre une ferme et un décor abandonné du "Roi de Lahore",
exactement à l'endroit où est mort Joseph Buquet.
Ils cherchèrent pendant un bon moment et trouvèrent l'endroit... Le Persan tâtait le
mur entre les deux décors et soudain, une pierre bascula... il y avait maintenant un 
trou dans le mur.
— Il va falloir nous laisser tomber de quelques mètres sans bruit, dit le Persan. 
Vous êtes prêt ?
Le Persan commença à descendre bientôt suivi de Raoul.
Ils arrivèrent dans une petite salle.
Voici le récit que le Persan fit par la suite de cette aventure:
" Nous étions au centre d'une petite salle de forme hexagonale, entièrement garnie 
de glaces. Mais, chose étrange, nous étions totalement enfermés dedans. L'entrée avait
disparu par magie. Tout à coup, nous avons entendu un bruit qui venait d'une pièce 
située à notre gauche, une porte qui s'ouvrait puis un gémissement et enfin ces mots:
— C'est à prendre ou à laisser ! La messe de mariage ou la messe des morts.
J'ai reconnu la voix du monstre.
Puis il y eut un long silence. J'étais sûr que le monstre ignorait notre présence.
— La messe des morts, ce n'est pas gai ! reprit Erik, alors que la messe de mariage, 
c'est magnifique! Il faut prendre une décision et savoir ce que l'on veut. Je ne peux 
plus vivre comme ça, au fond de la terre. Je veux vivre comme tout le monde. Je veux 
avoir une femme et nous irons nous promener le dimanche. J'ai inventé un masque qui
me fait le visage de n'importe qui. Tu seras la plus heureuse des femmes. Et nous 
chanterons pour nous tout seuls, à en mourir. Tu pleures ! Tu as peur de moi ! Je ne 
suis pourtant pas méchant, au fond ! Aime­moi et tu verras!
Silence.
Chaque silence était pour nous un espoir. Il avait peut­être laissé Christine seule. Il
nous fallait son aide pour pouvoir sortir de la pièce. Soudain, nous avons entendu :
— Je reviens, j'en ai pour une minute.
Et des pas s'éloignèrent.
M. de Chagny a alors appelé Christine. Une voix faible a alors dit:
— Je rêve.
— Non, c'est moi, Raoul. Je suis ici, avec le Persan, pour vous sauver: mais pas 
d'imprudence!... quand vous entendrez le monstre, avertissez­nous.

Christine nous a alors dit de partir. Elle avait peur pour Raoul. Elle nous a appris 
qu'Erik s'était fâché quand il avait vu qu'elle ne portait plus son anneau, qu'il était 
devenu fou d'amour et qu'il était décidé à tuer tout le monde et lui­même avec si elle 
refusait de l'épouser. Voilà pourquoi elle devait choisir entre les deux messes.
— Pouvez­vous nous dire où est Erik ? ai­je demandé.
— Je ne sais pas... mais vous, où êtes­vous exactement ?
— De l'autre côté du mur, dans la pièce des glaces, et nous ne voyons pas de porte, a
dit monsieur de Chagny.
— Y a­t­il une porte ? ai­je demandé.
— Oui et je sais où est la clé, a répondu Christine. A côté de l'orgue, dans un petit 
sac en cuir... mais je ne peux pas l'atteindre car je suis attachée.
— Pourquoi vous a­t­il attachée ? ai­je demandé.
— Car j'ai voulu me tuer... et je n'ai le droit de mourir que demain soir, à onze 
heures. Chut... j'entends du bruit... Allez­vous­en ! Allez­vous­en!
— Tu as crié, Christine, pourquoi ? a soudain dit le monstre.
— Parce que je souffre, Erik.
— Bien... je vais te libérer... puis nous allons chanter...
On a entendu l'orgue et leurs magnifiques voix ont commencé à s'élever. Puis 
l'orgue s'est soudain arrêté et Erik, d'une voix dure, a crié:
— Qu'est­ce que tu as fait de mon sac ? Je ne le vois plus... C'est pour le prendre que
tu voulais que je te délivre, n'est­ce pas ? Tu sais qu'il contient une clé. Que voulais­tu 
faire avec ?
— Visiter la pièce des glaces que vous ne voulez pas me montrer... une curiosité de 
femme.
— Je n'aime pas les femmes curieuses. Rends­moi mon sac !
Il a ricané et Christine a poussé un cri de douleur. À ce moment­là, M. de Chagny, 
fou de rage, a crié.
— On a crié, a dit Erik.
— Un cri ?... Vous devenez fou, Erik... c'est moi qui ai crié.
— Certes mais quelqu'un d'autre aussi... Tu trembles ! Tu es émue !... Tu mens !... 
On a crié !... Il y a quelqu'un dans la chambre des glaces !... Ah ! Je comprends 
maintenant !...
— Il n'y a personne, Erik !...
— Ton fiancé... peut­être !
— Je n'ai pas de fiancé... vous le savez bien !
— Nous allons voir, Christine.
— Non !.. Cette pièce ne m'intéresse plus... plus du tout !
Soudain, nous avons été inondés de lumière ! Puis la lumière s'est éteinte et, peu à 
peu, nous avons ressenti une immense chaleur. La température de la pièce était de 
plus en plus élevée.
— Vous ne trouvez pas qu'il fait chaud ici ? a demandé Christine.
— Un peu oui, a répondu Erik.
— Mais... que se passe­t­il ? a demandé la jeune fille, le mur de la chambre des 
glaces est brûlant...
— Je vais te le dire, Christine, ma chérie. C'est à cause de " l'Afrique ".
— L'Afrique ?
— Eh oui, j'aime donner une atmosphère aux pièces et, dans celle d'à côté, je viens 
de donner la chaleur africaine.
La chaleur était maintenant épouvantable. Je résistais moralement mais je sentais 
que M. de Chagny était de plus en plus mal. Il avait très soif et délirait. Il nous fallait 
sortir d'ici. Je devais oublier cette horrible chaleur et trouver une solution... M. de 
Chagny n'arrêtait pas de demander de l'eau.    
De l'eau... Il avait la bouche ouverte comme s'il buvait et parlait d'une source... il allait
devenir fou... je cherchais, cherchais le long des glaces et, soudain, j'ai trouvé un 
ressort. J'ai appuyé sur le clou et alors... ce n'est pas une porte qui s'est ouverte mais 
une trappe dans le sol. Aussitôt, de l'air frais est arrivé. Il y avait peut­être de l'eau en 
bas. Je me suis penché et j'ai vu un escalier. J'ai attrapé M. de Chagny et, avec 
difficulté, nous sommes descendus. Nous nous sommes retrouvés dans une cave. La 
fraîcheur nous a vite fait du bien et nous avons pu observer l'endroit. Il y avait des 
tonneaux partout. Nous les avons examinés l'un après l'autre. Ils étaient vides, sauf 
un ! Avec la lame d'un couteau, je suis parvenu à l'ouvrir. M. de Chagny a aussitôt mis
ses mains pour recueillir le liquide mais, à notre grande surprise, dans ses mains, ce 
n'est pas de l'eau tant attendue qui est tombée mais de la poudre. Je ne savais plus 
quoi penser.
Nous sommes remontés dans la chambre des glaces. Je devais parler à Christine.  
Nous étions perdus, nous ne comprenions plus rien. Nous avions même perdu la notion
du temps. Quel jour étions­nous ? Quelle heure était­il ?
Dans la pièce, il faisait moins chaud maintenant. J'ai mis mon oreille contre le mur 
de la pièce voisine mais je n'entendais rien.
Puis, tout à coup, il y a eu un bruit de pas légers. Quelqu'un a frappé contre le mur 
et nous avons entendu la voix de Christine:
— Raoul, Raoul.
Je lui ai aussitôt demandé:
— Christine, nous sommes perdus. Quel jour sommes­nous et quelle heure est­il ?
— Une journée est passée et il est onze heures moins dix, a­t­elle répondu d'une 
voix paniquée. Dans dix minutes, nous allons tous mourir. Il vient de me le dire... il est
horrible ! Il a retiré son masque et ses yeux jaunes lancent des fflammes... il rit comme
un fou. Il m'a donné une clé et m'a dit qu'elle ouvrait un coffre qui est sur la cheminée:
" Là, m'a­t­il dit, tu trouveras un scorpion et une sauterelle en bronze... ce sont des 
animaux qui disent oui ou non ! Oui, pour m'épouser, non, si tu ne veux pas. Si tu 
tournes le scorpion, cela voudra dire oui; si, par contre, tu préfères la sauterelle, c'est 
non... alors, tout sautera... comme elle, la jolie sauterelle... " Il veut tous nous tuer. 
Alors, je vais tourner le scorpion, Raoul, mon amour, il le faut !
— Christine, ai­je crié, n'y touchez pas. Je pense qu'il vous trompe... c'est peut­être 
le scorpion qui fait tout sauter...
— C'est lui ! a crié Christine.
Et on entendit la porte de la pièce d'à côté s'ouvrir.
— Alors, Christine, a dit le monstre, que tournes­tu ? Bon, tu ne réponds pas alors...
adieu, mademoiselle !... Saute, saute, sauterelle !
— Erik, j'ai tourné le scorpion, a dit courageusement Christine.
Mon Dieu, quelle horrible minute ! Je pensais que tout allait sauter, malgré tout. 
Mais il ne s'est rien passé. On a entendu des gargouillement, inquiétant... de l'eau 
montait de la trappe à une vitesse folle.
— Christine, Christine, a hurlé Raoul. L'eau monte... jusqu'à nos genoux.
Pas de réponse.

L'eau montait, montait toujours. Nous allions nous noyer... et nous avons perdu 
connaissance.
Ce qui s'est passé ensuite, je ne m'en souviens pas...
Quand j'ai ouvert les yeux, j'étais couché sur un lit dans une belle pièce. M. de 
Chagny n'était pas là.
Erik est entré. Il m'a dit:
— Vous êtes sauvés, tous les deux... Je vais te reconduire sur le dessus de la terre... 
et, tout cela, grâce à Christine... Oui, Christine est une belle personne... Quand elle 
m'a dit oui, je l'ai prise dans mes bras et je l'ai embrassée... et elle a répondu à mon 
baiser... JAMAIS, JAMAIS personne n'avait fait cela... ni ma mère qui m'a très vite 
abandonné à cause de ma laideur... alors mon cœur s'est empli d'amour et de bonté ! 
J'ai pleuré, pleuré des larmes de bonheur... Elle est restée là à sécher mes larmes... 
elle me disait: " Pauvre et malheureux Erik ! " ... Puis je lui ai dit: " Christine, je sais 
que tu aimes ce jeune homme... sois tranquille. " Elle m'a alors demandé ce que je 
voulais dire et je lui ai fait comprendre ­ et elle a tout de suite compris ­ que je n'étais 
pas un monstre, que j'allais vous sauver et qu'elle pourrait épouser ce jeune homme 
qu'elle aime tant. Et elle m'a embrassé sur le front... puis je vous ai sauvés... 
maintenant, ils sont partis tous les deux... Si Christine tient sa promesse, elle  
reviendra me voir de temps en temps...
Puis Erik s'est tu.
Plus tard, j'ai appris que Christine et Raoul s'étaient mariés et qu'ils étaient partis 
loin de Paris.
Un jour, j'ai reçu un mot de Christine, juste avec ces mots : ERIK EST MORT.
Voilà l'histoire du Fantôme de l'Opéra.
Pauvre malheureux Erik ! Faut­il le plaindre ?  Faut­il le maudire ? Il voulait juste 
être un homme comme tout le monde ! Mais il était trop laid ! Il a dû se cacher toute sa
vie et vivre sous terre, alors que c'était un génie. Vraiment, je le dis, il faut plaindre le 
Fantôme de l'Opéra !

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