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La Réduction husserlienne

Author(s): Jules Bednarski


Source: Revue de Métaphysique et de Morale, 62e Année, No. 4 (Octobre-Décembre 1957),
pp. 416-435
Published by: Presses Universitaires de France
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40900152
Accessed: 31-08-2017 12:53 UTC

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La Réduction husserlienne

1. Motivation de la réduction
par la théorie de la connaissance

L'hétérogénéité des choses par rapport à la conscience


tion épistémologique fondamentale : comment le vécu peut
soi-même ? « Wie kann das Erlebnis sozusagen über sich
L'acte de connaissance est donc inintelligible dans sa référe
transcendant.
De même, en posant la chose comme en soi, on ne comprend jamais
comment elle peut devenir pour moi. La solution de ce problème dépasse
le préjugé transcendant de l'attitude naturelle. L'objet posé au delà
de la conscience est aussi frappé d' « inévidence ». Toute séparation entre
le sujet et l'objet suppose en effet, une distance qu'on ne dépasse que
par un appel à des éléments présupposés, non explorés dans l'évidence.
L'objet est toujours supposé, il n'est jamais intuitionné, et comme tel,
il est douteux.
Inéluctablement, la question critique se pose : comment la connais-
sance peut-elle poser avec validité quelque chose qui n'est pas donné
immédiatement 1.
Cependant, le constant progrès des sciences ne prouve-t-il pas que
l'attitude naturelle est malgré tout la bonne voie ? Pourquoi donc mettre
en question sa validité ? Personne ne nie que les sciences ne parviennent
dans leur domaine à des résultats incontestés et ce, en supposant la
transcendance de leurs objets. Néanmoins la possibilité de saisir le trans-
cendant n'est pas fondée dans l'évidence, elle n'a pas de caractère « rigou-
reux ».

Il ne faut pas se contenter de « constater » la connai


un fait ; ce n'est qu'en droit qu'elle peut être valab
question de droit fonde la question de fait ; il faut d'
ment la saisie de l'objet transcendant est possible.
L'attitude naturelle, en présupposant la validité
toute possibilité de justification. Tout effort critique

1. E. Husserl, Die Idee der Phânomenologie, fünf Vorlesung


1950, p. 35.

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La réduction husserlienne

de l'attitude naturelle, est contraint à se soumettre à un ordre qui est


déjà là, d'opérer avec ces mêmes éléments incompréhensibles qu'on
veut éclairer. Confiné donc dans l'attitude mondaine du sujet, on explique
l'origine de l'objectivité par l'influx causal d'un agent extérieur : on
explique l'existant par l'existant, le factice par un autre factice. Que
toute tentative de solution du problème de la connaissance entreprise
au niveau de l'attitude naturelle se heurte à des énigmes insolubles,
montre que nous devons renoncer à l'attitude naturelle. Il nous faut
recourir à un autre type de connaissance - l'analyse reflexive - sus-
ceptible de répondre aux exigences épistémologiques, de nous fournir
une certitude absolue.

Immanence : un nouveau champ de connaissance.


En suivant la démarche cartésienne, Husserl découvre dans l'imma-
nence de la conscience le premier donné indubitable, immédiat et absol
« Chaque vécu en général, pendant qu'il se réalise, peut devenir l'ob
d'une intuition pure, et dans cette intuition, il est une donnée absolue.
Il est donné comme un existant ; un celui-ci, et douter de son existenc
ne présenterait aucune espèce de sens *. »
Cette première certitude découverte nous fournit un absolu à qu
on peut mesurer « ce que être et être donné peut et doit signifier » *. O
voit que toute transcendance doit être écartée en tant qu'incapable
de résoudre le problème de la connaissance. La réduction de tout ré
lisme naturel, de toutes les positions transcendantes est donc exigé
par la théorie de la connaissance.

Réduction des facteurs psychiques.

Cependant, les données immanentes découvertes doivent être pré


servées de toute interprétation psychologiste. Il est nécessaire de l
épurer des éléments mondains : de mettre hors circuit le phénomèn
psychique.
C'est précisément la réduction qui, en réduisant les facteurs psychiques
du donné, permet de nous livrer le phénomène immanent dans toute sa
pureté 8.
Conclusion.

Ainsi l'exigence de notre recherche d'une connaissance absolue nous


a fait parcourir les étapes suivantes :
Io Reconnaissance de l'incompréhensibilité de l'attitude naturelle,
1. Ibid., p. 31, trad. : Tran-Duc-Thao, Phénoménologie et matérialisme dialectique,
Paris, éd. Minh-Tan, 1951, pp. 52-53.
2. E. Husserl, Die Idee der Phänomenologie, p. 31. ... « diese Wahrnehmung ist
und bleibt solange sie dauert ein Absolutes, ein Dies-da, etwas, das in sich ist, was
es ist, etwas, an dem ich messen kann als an einem letzten Mass, was Sein und Gegeben-
sein besaßen kann und hier besaßen muss »....
3. Ibid., p. 44.

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Revue de m£ta. - N° 4, 1957. 27

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2° Abstention de toute attitude d'affirmation transcendante,


3o Thématisation des vécus dans leur immanence,
4° Purification du vécu, exclusion de tout élément psychologique,
toujours considéré comme mondain,
5° Thématisation des vécus purs dont l'exploration relève de la réduc-
tion phénoménologique.
Ce procédé peut sembler à première vue manquer de rigueur : la réduc-
tion doit être répétée après le dévoilement des données indubitables.
Sans doute doit-on le justifier en tenant compte du caractère, provisoire
de chaque étape de la pensée phénoménologique. La réduction ne se
laisse pas introduire d'un coup. Chaque point d'arrivée nous invite à
poursuivre la démarche, puisque chacun ne devient clarifié qu'au terme
du procédé total.

2. Motivation de la réduction par les significations authentiques.

Croyance existentielle.
L'objectivisme naturaliste n'est pas seulement entaché du préjugé de la
chose en soi, mais encore du préjugé de la croyance existentielle. Cette
croyance qui semble d'abord une évidence - selbsverständlich - appa-
raît, dans une analyse plus poussée, immotivée, non intuitive, naïve.
Dans l'attitude naturelle, la connaissance de toute réalité particulière
est acquise, vérifiée, modifiée ou mise en doute sur le fond d'une croyance
existentielle - Seinsglaube - d'une foi exercée et inéluctable en l'exis-
tence de cette réalité. Chaque acte de connaissance est « emprisonné »
dans la croyance ; on ne peut jamais l'objectiver, sans l'impliquer, sans
être compris en elle. Tout effort pour supprimer la croyance la met déjà
en œuvre. « Je peux mettre en doute et récuser les données du monde
naturel : cela ne change rien à la position (à la thèse) générale de l'atti-
tude naturelle 1. »
Cette croyance contamine non seulement les objets, mais aussi les
actes de connaissance qui leur sont corrélatifs. Chaque attitude de con-
science, en référant aux choses par les sensations, est posée dans l'exis-
tence mondaine. De plus, l'idée même de réalité empirique est « mon-
daine », puisque portée par la subjectivité empirique.
Non seulement les sciences de la nature, mais aussi celles de l'esprit
sont portées par la croyance existentielle. En effet les essences elles-
mêmes comme, par exemple, l'idée d'homme, d'esprit, de nature sont
posées dans une attitude de foi en leur existence.
La croyance ne se limite pas à l'objet actuel, tel que je le perçois main-
tenant, elle s'étend à tout horizon qu'il soit ou non conscient. On sait
comment des connaissances passées peuvent, à titre d'arrière plan, exer-
1. E. Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie, trad, de l'allemand par
Ricœur, Gallimard, 1950, p. 95.

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cer leur influence sur le présent de notre vie. C'est ainsi que la croyance
existentielle, fût-elle actuellement inhibée, peut contaminer tout le plan
sous-jacent de notre conscience.
La croyance, comme le terme l'indique, est d'ordre dogmatique. Cela
résulte de sa nature mondaine et de son irrationnalité. Cette croyance,
étant d'ordre psychique - psychisches Erleben - est la foi qui porte
les éléments inexplorés intuitivement et qui, par conséquent, ne jouissent
pas de l'évidence première. La position des objets comme existant, im-
pliquée dans toute conscience objectivée, bien qu'incontestée dans l'at-
titude naturelle, n'est pas elle-même un objet d'intuition.
La croyance - comme le montre la réflexion sur l'acte de connaissance
- présente encore un défaut plus grave. Tout entière polarisée par
l'objet, elle le met en relation avec la conscience à la manière des êtres
entre eux. Elle « passe sur » les facteurs déterminants de la conscience,
elle les masque, en ne s'arrêtant qu'aux éléments qui nous déterminent.
En raison de son caractère transitif, de geradehin, elle laisse inaperçue
l'activité opérante, la source originaire de toute transcendance et de la
croyance elle-même.
Dans cette perspective, l'accès aux données absolues est fermé. On ne
perçoit pas que « la chose pensée » est sous-jacente à la chose admise
comme en-soi par la croyance.

Le monde.

Aveuglément captif de la réalité admise, l'acte de croyance soutient


l'objet sur « fond de monde » ; l' affirmation du monde est un autre pré-
supposé dogmatique.
L'objet de la perception est conditionné dans sa structure par son
horizon. Or le monde, horizon dernier, est la totalité des significations.
Comme tel, il est le terrain nourricier de la compréhension de chaque
chose particulière. Le connu ne peut être posé comme objectif qu'à par-
tir d'une expérience liée au monde. Étant toujours co-présent dans la
saisie de l'objet, ce monde lui assure sa familiarité ; il l'incorpore dans
une totalité commune. Il détermine toujours l'orientation de nos expé-
riences. Parce que le monde dépasse sous la forme d'un horizon indéter-
miné chaque fait expérimental et qu'il appartient à son sens, Husserl
qualifie le monde de transcendant. Ainsi, une perception actuelle n'est
pas auto-suffisante, définitive et limitée à l'objet seul ; au contraire,
« ce qui est actuellement perçu et plus ou moins clairement co-présent
et déterminé (ou du moins déterminé par quelque côté) est pour une part
traversé, pour une autre part environné par un horizon obscurément
conscient de réalité indéterminée 1 ».

1. Ibid., p. 89.
Manuscrit (Ms). 1930, BI 5 II, p. 3 ... ♦ jede Einzelmeinung schon i die » Welt als
unthematische Geltung voraussetzt ».

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« Cet horizon brumeux, incapable à jamais d'une totale détermination,


eat nécessairement là K »
Étant à chaque instant dans chacun de mes actes, toujours présent
pour moi, ce monde, dans lequel je suis moi-même incorporé, est variable
dans son contenu ; « ce monde n'est pas là pour moi comme un simple
monde de choses, mais selon la même immédiateté, comme monde de
valeurs, comme monde de biens, comme monde pratique » a.
Puisque ce monde exerce son influence de motivation sur chaque
contenu particulier, chaque objet perçu est saisi d'emblée comme moda-
lise dans sa structure. Je saisis immédiatement les choses comme maté-
rielles, belles ou utiles.
Le monde comme totalité, n'étant jamais thématisé dans un acte
individuel, accède à la conscience dans la perception d'un objet parti-
culier. Il n'a d'existence que dans la pensée qui le pose. Il ne jouit pas
d'une indépendance absolue, il fait intrinsèquement partie de ma vie
perceptive comme une manière de comprendre les choses. Son caractère
propre ne se laisse interpréter que par la structure de nos perceptions.
Celles-ci ne se développent que par le moi qui, en s'aliénant dans le monde,
ne les perçoit que sur un fond commun du monde. Ce fond commun
n'est pas une catégorie subjective qui imposerait ses exigences à Pacte
de connaissance, mais un donné impliqué qui permet de structurer les
choses perceptibles.
Il est difficile de dire d'où provient ce monde. Selon l'interprétation
sartrienne - qu'on peut aussi appliquer à Husserl - on dira que « la
conscience en sa nature la plus profonde est rapport à un être transcen-
dant » 8. Il est donc toujours là, il sert de fondement pour l'objectivité.
Il faut être attentif dans l'emploi du terme monde, car sa signification
n'est pas univoque ; il désigne tantôt la totalité - comme dans notre
ca8 - tantôt la somme des choses qui persévèrent dans leur entrecroise-
ment causal *, tantôt un ensemble particulier de significations. Dans ce
dernier sens, on définit par monde des unités de signification qui en-
globent et synthétisent une multiplicité de significations particulières
présentes ou passées. C'est ainsi qu'on parle du monde de la physique.
Signalons enfin que le mot monde est employé aussi pour signifier la
réalité pure et simple, comme le corrélat objectif de la conscience.
Bien que le monde ne soit jamais le thème de notre perception elle-
même, il est cependant présent en chacun des faits particuliers que nous
percevons : puisque c'est de lui que ceux-ci tiennent leur validité trans-
cendante. On comprend donc que la présence réelle du monde demeure

1. Ibid., p. 89.
2. Ibid., p. 90. ^ _

3. Sartre Jean-Paul, L'Etre et le néant. Essai d'ontologie pnenomenoiogiquc i-ans,


Gallimard, 1943, p. 27. _ . _. _

4. E. Husserl, Erfahrung und Urteil, Hamburg, Laaassen & covens, ivw», p. ia/.

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La réduction husserlimnc

cependant une présence confuse. Le monde n'est donc pas l'objet d'une
perception évidente, d'une intuition. La croyance existentielle, qui l'ad-
met, contient donc des éléments qui ne sont pas rationnellement effectués.
Mais l'homme, dans son orientation vers les choses, est insensible
aux difficultés théoriques qu'elle cache, car la structure de l'ego est telle
qu'il est porté à admettre les objets dont la réalité suppose toujours le
monde.
Puisque donc le monde prête sa validité aux choses au moment de
leur perception, et que lui-même ne porte pas le caractère d'évidence,
il s'ensuit que si la perception veut accéder aux choses elles-mêmes,
dans leur authenticité, avant toute contamination par une réalité étran-
gère, le monde doit être suspendu.
Une autre raison motive encore la réduction du monde. Si toute validité
objective ne se peut détacher du monde, si tout objet doit être compris
dans sa référence au monde, le moi dans son acte de connaissance est
aliéné de sa fonction active. Enfoncé dans l'orientation chosiste, absorbé
et oublié au profit de la validité mondaine, le moi vit uniquement pour
comprendre les choses. 11 doit se soumettre à l'horizon qui confère avant
lui son apport de significations. Ce qui est donc en jeu, c'est la capti-
vité (Befangenheit) du pouvoir de l'Ego retenu par la pression qu'exerce
la validité du monde K
II n'y a qu'une solution pour libérer le moi de son état latent : suppri-
mer la validité mondaine, faire un détour réflexif radical et regarder
l'objectivité à partir du moi avant qu'elle ne soit influencée par les élé-
ments transcendants.

3. Motivation de la réduction par le caractère


DOUTEUX ET COTINGENT DE LA CHOSE OPPOSÉ A l'iNDUBITABILITÉ
ET A LA NÉCESSITÉ DE LA CONSCIENCE.

L'épochè comme mise hors circuit de l'attitude naturelle est préparée


dans les chapitres II et III de la première section des Idées I par l'ana-
lyse phénoménologique (au sens large) de deux sphères d'existence : la
sphère de l'être comme chose et la sphère de l'être comme vécu. La chose
transcendante, étant douteuse et contingente, n'a pas de nécessité d'exis-
tence et comme telle, peut être suspendue. Par contre, la conscience
forme un être indubitable et absolu, qui persiste même dans la ruine des
déterminations concernant le monde. Étant indépendante de toute
influence causale exercée par les choses, la conscience est douée d'une
nécessité ontologique exceptionnelle.
La valeur objective des qualités sensibles constitue le point de départ

1. E. Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie, trad, par Ricœur, f 28.

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de l'affirmation de la transcendance de l'objet *. Les qualités sensibles


ne sont ni de pures apparences, ni les signes d'un être véritable qui se
cacherait derrière elles, ni des facteurs purement subjectifs par opposi-
tion aux qualités géométrico-physiques 2. C'est la réalité elle-même qui
se livre directement dans les qualités sensibles : tout être transcendant
se manifeste dans la présence corporelle du sensible.
Il n'y a pas lieu d'isoler des déterminations objectives, considérées
comme seules authentiques du phénomène sensible rejeté comme pure-
ment subjectif : c'est au contraire, la transcendance du phénomène sen-
sible qui constitue la réalité véritable. Les qualités sensibles, comme élé-
ments réels de la chose, ne sont perçues qu'à travers des profils ou des
esquisses. Les esquisses, comme data de sensation, « sont les sensations
vécues en moi et animées d'un sens d'appréhension qui les rapporte à
l'objet »8.
A l'opposé de « matière » - toter Stoff - les esquisses portent une
signification.
L'objet de la perception sensible, ce qui est esquissé (das Abgeschat-
tete), se montre au moyen des data de sensation (Abschattung).
Les données de la sensation animée, les esquisses, sont totalement
différentes de la chose esquissée. Bien que le mot esquisse désigne indif-
féremment ce qui esquisse et ce qui est esquissé, « il est exclu par prin-
cipe que l'esquisse soit de même genre que ce qui est esquissé. L'esquisse
est du vécu » *.
L'esquissé est un transcendant. L'esquisse seule relève de la connais-
sance et non l'esquissé, c'est-à-dire la chose. Celle-ci n'est pas une com-
posante réelle de la conscience. Elle n'est atteinte que comme le nœud
où converge et se lie la diversité des esquisses. Visée par la conscience à
travers les esquisses, elle lui demeure transcendante.
Les esquisses sont ainsi subjectives, mais non l'objet. La couleur se
montre dans les esquisses, mais elle ne les est pas. Par rapport à la chose,
les esquisses n'exercent qu'un rôle figuratif 6 ; cela ne veut pas dire que
la chose ne soit pas atteinte, mais que la perception ne donne qu'une
certaine figure, un contenu partiel, et qu'en réalité la chose est plus 6.
Exclue de la conscience, la chose se profile à travers les esquisses et
celles-ci la déterminent de différents côtés, mais toujours de façon uni-
latérale et inadéquate.
« Par principe une chose ne peut être donnée que sous une face, ce qui
signifie non seulement incomplètement, imparfaitement, en tous les

1. Ibid., § 40.
2. Ibid., p. 128.
3. Tran-Duc-Thao, Phénoménologie et matérialisme dialectique, Paris, éd. Minh-
Tan, p. 68.
4. E. Husserl. Idées directrices pour une phénoménologie, trad, par Ricœur, p. 134.
5. Ibid., p. 133.
6. Ibid., p. 141.

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sens du mot ; le mot désigne une forme d'inadéquation requise par la


figuration au moyen d'esquisses 1. »
Chaque intuition, malgré son évidence, doit se limiter à un aspect du
noyau. Toujours déterminable, le noyau n'est jamais donné dans aucune
perception comme un absolu. Il n'est jamais effectué dans sa présence
parfaite et complète. Esquissé et figuré, il n'est qu'une objectivité dou-
teuse et relative qui renvoie perpétuellement à un nouvel horizon d'expé-
riences. Dans cette situation, « il est toujours possible que le cours ulté-
rieur de l'expérience contraigne d'abandonner ce qui antérieurement
a été posé sous l'autorité de l'expérience » 2.
En effet, le caractère inaccompli et figuratif de la perception implique
que, grâce à l'apport d'esquisses toujours nouvelles, le noyau soit sus-
ceptible d'un perfectionnement continuel bien qu'inachevé ; cette déter-
minabilité de la chose est commandée par la nature du sens de la chose
et aussi par l'horizon des significations déjà possédées. Chaque contenu
particulier implique la totalité des expériences précédentes qui forment
un horizon motivant chaque perception. Un élément peut entrer dans
l'unité de l'objet, dans la mesure où il n'entre pas en conflit avec la tota-
lité des significations déjà acquises.
L'horizon peut manquer de stabilité. Il dépend en effet des expériences
effectuées, et de nouvelles expériences sont toujours susceptibles de
modifier sa forme 8. La présence de la chose devant moi signifie précisé-
ment cette possibilité d'effectuer de nouvelles perceptions à partir du
noyau déjà déterminé. Mais la présence ainsi conçue n'est pas dans sa
totalité immédiatement accessible à l'attention.

Possibilité de la destruction du monde.

L'existence de la chose et du monde est non seulement douteuse, elle


est aussi contingente. Les esquisses qui conditionnent notre position des
objets ne sont pas nécessairement convergentes. Si les diverses inten-
tionnalités particulières apparaissent discordantes ou se contredisent
entre elles, il est évident qu'elles ne peuvent se rapporter au même objet.
Comme la réalité des choses dépend, dans son existence, de conditions
contingentes et qui peuvent cesser d'exister, l'existence du monde ne
pourra elle-même être que présumée. Donc la chose corporelle, même
constatée selon les exigences de la rigueur scientifique, demeure contin-
gente. « Toute chose donnée corporellement peut également ne pas
être *. »

1. Ibid.. v. 140-141
2. Ibid., p. 150.
3. Ms. 1933, B I 22 IV, pp. 16-26 ; p. 19 « Die Wahrnehmung ist das Evidenzbe
wusstsein, Bewusstsein von dem Selbstdasein, aber in einer in ihr selbsbeschlossenen
Relativität von Vorausgesetztem und Darufhingesetztem ».
4. E. Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie, trad, par Ricœur, p. 151

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En passant du niveau scientifique, on doit se demander, au niveau de


la perception, si Tordre de la facticité tel qu'il est constitué par la con-
science empirique porte néanmoins le caractère de nécessité eidétique l.
Cette question, qui n'a pu être résolue au niveau de la science, pourra
être résolue à celui de la perception. Il nous faut chercher si la cohérence
intentionnelle de Tordre factice est nécessaire ou contingente, c'est-
à-dire déterminer si un invariant eidétique peut être dégagé au niveau
du perçu.
Or, « il est tout à fait pensable que l'expérience se dissipe en simu-
lacres à force de conflits internes... que l'expérience se rebelle tout d'un
coup contre toute prétention de maintenir constamment la concordance
entre les positions de choses ; que de son enchaînement disparaisse tout
ordre cohérent entre les esquisses, les appréhensions, les apparences ;
bref, qu'il n'y ait pas de monde » a.
La conscience empirique implique la possibilité d'une pluralité d'en-
chaînements, et même leur destruction au cas où les expériences se mon-
treraient contradictoires. L'ordre que nous disposons n'est pas néces-
sairement unique ou permanent. Il est seulement un des ordres possibles.
Ainsi l'être du monde, puisqu'il est douteux et contingent, peut être
mis en suspens. La structure ontique nous dispense de lui accorder notre
adhésion inconditionnée et nécessaire.

Le cogito opposé à la thèse du monde.


En face du caractère douteux et contingent de la thèse du monde,
l'existence du cogito est nécessaire et indubitable ... « la thèse de mon moi
pur et de mon vécu personnel... est nécessaire et absolument indubitable,
... nul vécu donné corporellement n'a la possibilité de ne pas être également »*.
Saisi immédiatement et directement dans la réflexion « le vécu ne se
donne pas par figuration » 4, il ne présente pas un analogon de la chose,
par une multiplicité de formes de correction qui pourraient détruire
son contenu. Toujours prêt à la réflexion, il est tel qu'il se donne et il
se donne en tant qu'absolu ; ... « la perception du vécu est la vision simple
de quelque chose qui dans la perception est donné (ou peut être donné)
en tant qu'absolu » *.
Conclusion.

La distinction entre la conscience indubitable et nécessaire d'une part,


et la chose douteuse et contingente d'autre part, conduit à poser que si
la nature mondaine est susceptible d'une èpoche, la conscience constitue
1. Nécessité eidétique - le terme envoie à la fonction révélatrice de la fiction qui,
au moyen des variations arbitraires, laisse tomber les aspects accidentels de l'exemple
choisi et délivre un résistant, un invariant eidétique, une essence.
2. E. Husserl, Idées directrices, trad, par Hicœur, pp. lbU-lbl.
3. Ibid., p. 151.
4. Ibid., p. 143.
5. Ibid., p. 143.

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La réduction husserlienne

la limite devant laquelle doit s'arrêter toute tentative de réduction.


La comparaison de deux êtres, dont l'un est douteux, l'autre indubi-
table, devrait, dans la pensée de Husserl, préparer l'èpoche. Il ne nous
semble pas qu'elle remplisse nettement ce rôle. En effet, elle incline à
penser que la réduction consiste dans un procédé négatif, qui se bornerait
à éliminer le douteux et le contingent. Or, même l'opération négative
de la réduction ne consiste pas dans une soustraction, mais à s'abstenir
de l'usage des contenus objectifs. Ce n'est donc pas l'acte de négation,
mais de neutralisation qui est décisif.
Par ailleurs, l'être indubitable, opposé à la chose douteuse, n'est que
la conscience psychologique. Cette conscience, qui peut être aussi bien
l'objet de la réflexion psychologique, s'oppose comme telle, à la notion
de la conscience pure, visée par la réduction.
Cependant, l'hypothèse du néant du monde relativement à l'époché
présente une signification profonde. En effet, l'époché opère la rupture
avec la foi prêtée à la réalité préexistante. Le caractère douteux de cette
réalité nous inclinait déjà à nous en détacher.
Dans l'hypothèse inventée par l'imagination, on va plus loin : on ne
trouve pas d'éléments dans l'ordre effectif de la réalité qui puissent résis-
ter à la dissolution. Tout ordre factice peut être brisé et il ne reste que la
ruine des déterminations. Si donc on peut imaginer le non-monde, on se
soustrait en même temps au prestige de l'ordre qui est là. L'époché,
comme abstention de collaborer avec le monde, ne se distingue de la
destruction imaginative du monde que par le comportement réel.

4. Motivation de la réduction par l'idée d'évidence première.

L'idée cartésienne d'indubitable, présenté dans les Idées /, est


fondie dans les Méditations Cartésiennes sous la forme de l'évid
dictique.
Chaque philosophie tente de s'enraciner dans un principe évident et
de se constituer en système à partir de lui. Husserl, en suivant ce mou-
vement primitif de toute philosophie, essaie de dégager une première
évidence qui servirait de fondement apodictique au savoir philosophique
et scientifique.
L'exigence de radicalité du point de départ a pour contre-partie la
mise en suspens des évidences insuffisantes. Seules seront maintenues
les évidences fondées sur l'apodicticité du cogito. On pourrait demander
pourquoi prétendre donner un fondement radical à des sciences dont les
résultats brillent d'une évidence incontestée. Les affirmations expri-
mant les résultats des sciences sont évidentes en raison des motifs qui
les justifient. Ce qui est en jeu, ce sont les fondements des sciences :
ils ne sont pas apodictiques. Les évidences des expériences particulières
et de leur ensemble n'excluent pas la possibilité du non-être de leur objet :

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elles n'ont pas une autorité inconditionnée *. La transcendance et la


contingence des objets en sont la preuve suffisante.

Évidence apodictique.
Par conséquent, pour radicaliser le savoir, il faut dégager le fonde-
ment rigoureux, incontestable et irréductible, qui justifierait la certi-
tude philosophique et la validité des sciences, qui fonderait toute affir-
mation sans exiger lui-même de fondement, qui serait libre de toute
énigme, de tout préjugé, du doute même fictif : bref, qui serait apodic-
tique. L'évidence apodictique se donne dans la conscience comme une
indubitabilité absolue *.
Elle ne peut pas être abolie puisqu'il n'y a aucun motif susceptible
d'annuler la certitude d'existence qu'elle donne.
L'impossibilité de nier, en raison de l'absence totale d'argument, est
donc le motif intrinsèque de l'évidence apodictique. L'inexistence même
d'un objet apodictique est inconcevable puisqu'il lui est intrinsèquement
nécessaire d'être posé ou pensé par la conscience.
Enfin, l'objet apodictique voit sa validité renforcée par l'intuition,
qui constate que tout converge vers son indubitable existence •.

Origine du principe apodictique.


L'idée de principe apodictique n'est pas une idée préconçue, elle est
tirée du mouvement des sciences dont les opérations sont soutenues par
l'exigence d'être fondées absolument. « II s'agit de s'abandonner d'abord
à la présomption, à la prétention qui anime les sciences, d'en revivre
l'impulsion et la visée et ainsi de ressaisir l'idée de science comme le
corrélat - « le noème » - de cette « intention » qui anime l'effort scienti-
fique. C'est-à-dire que la phénoménologie doit atteindre son point de
départ, en se situant d'abord comme un acte second par rapport à l'acte
primaire des sciences ; ainsi quelque chose déjà est décidé avant le point
de départ, puisque..., la philosophie situe son acte philosophique par rap-
port à une activité déjà fortement théorétisée, et non par rapport à un
pouvoir ou un agir plus primitifs » 4. Ainsi, au point de départ, Husserl
constate que nous possédons l'idée du fondement absolu. Naturellement,
dans l'attitude de critique radicale que Husserl reprend à Descartes, les
sciences sont devenues hypothétiques ; par conséquent, « l'idée de leur
fin générale est aussi hypothétique ». « Néanmoins, sous forme d'hypothèse

1. E. Husserl, Méditations Cartésiennes, trad, de l'allemand par G. Peiffer et E. Le-


vinas, Paris, Vrin, 1947, p. 15.
2. Ibid., p. 13.
3. Ms. 1923-1924, B I 22 II, pp. 8-y. _ _ _ __
4. P. Ricœur, Etudes sur les Méditations Cartésiennes de Husserl, Revue pnuoso-
phique de Louvain, 1954, février, p. 78.

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et à titre de généralité fluide et indéterminée, nous possédons cette idée » K


En suivant cette teleologie interne des sciences, Husserl va essayer
de découvrir les premières vérités « qui devront et qui pourront soutenir
tout l'édifice de la science universelle » 2.

Réduction du monde.

Dans sa recherche de l'indubitable premier, Husserl va se défier des


évidences qui ne remplissent pas l'exigence de l'apodicticité. Le champ
du savoir est encombré d'évidences naïves qui nous pressent de toute
part. La fonction de l'époché sera précisément de les éliminer.
L'évidence de l'existence du monde doit être supprimée puisqu'elle
n'est pas justifiable apodictiquement. L'œuvre d'élimination des évi-
dences insuffisantes s'arrête devant la découverte du cogito. Celui-ci
se pose dans la réflexion comme un absolu ; son sens n'a pas besoin de
preuve ; la certitude qu'il donne n'est pas le résultat d'une démonstra-
tion, mais elle jaillit directement et immédiatement. L'évidence incon-
testée dont il jouit résiste à toute tentative de doute. Je peux nier
le monde, douter de son existence, mais je ne peux jamais douter que
je doute. Aucune autre évidence entrant en conflit avec cette évidence
première ne peut l'abolir. L'affirmation première s'accomplit jusque
dans l'attitude du scepticisme le plus radical. Par conséquent, les connais-
sances seront valides dans la mesure où elles seront illuminées par l'évi-
dence absolue 3.

Le point de départ husserlien


par rapport à V intention philosophique originaire.
Le départ radical entrepris par Husserl conduit à réfléchir sur l'in-
tention philosophique originaire mise en œuvre dans la phénoménologie.
En effet, la philosophie est animée par l'exigence de parvenir au fonde-
ment dernier touchant le sens ultime de l'existence et de l'être en général.
Mais le fondement dernier présente un double aspect qui assigne
une double tâche à la recherche. D'une part, il signifie le fondement de
la certitude, l'immédiatement et absolument certain : il est alors fon-
dement du savoir - rationes cognoscendi. D'autre part, il signifie le
fondement absolu de tout l'ordre de l'être, la justification dernière de
tout ce qui apparaît, la racine de la possibilité de la vérité : il est alors
fondement ontologique - rationes essendi.

1. E. Husserl, Méditations Cartésiennes, trad, par G. Peiffer et E. Levinas, Paris,


Vrin, 1947, p. 7.
2. Ibid., p. 12.
3. Ms. 1925, B I 9 I, p. 13 «Mein Ich-bin, meine Subjektivität ist apodiktisch und
chstreichbar, und was ich von mir direkt wahrnehme, ist wahrend des Wahrnehm
absolut nicht präsumptif gegeben ».
Ms. 1923-1924, B I 12 V p. 1. « These : absolute Rechtfertigung der Empirie in ih
Gewissheit (Modalität « empirische Gewissheit ») und damit empirische Wissensch
setzt das Ego cogito voraus und ist bezogen auf das transzendentale Ich ».

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II est clair que Husserl en partant du principe cartésien du cogito


donne d'abord au fondement dernier son sens de fondement du savoir.
Cependant, la valeur radicale du cogito dans la pensée husserlienne
ne se limite pas à ce caractère épistémologique : elle comprend aussi
l'aspect de principe ontologique. Pour elle, le cogito n'est pas seule-
ment un noyau privilégié d'apodicticité, il est aussi le fondement on-
tologique de la vérité, puisque c'est lui qui fonde et contitue la réalité.
On peut maintenant mesurer avec quelle rigueur absolue la phéno-
ménologie prétend s'établir. Ses réductions successives visent à faire
surgir un noyau qui soit simultanément le fondement absolu du savoir
et de l'être. A son nivau transcendantal, la phénoménogie se déploiera
dans la coïncidence de l'ordre de la certitude et de l'ordre du réel.

5. Voies d'accès a la réduction par l'idéalité de l'objet.

L'objet, considéré comme enchaînement des expériences, dé


intrinsèquement de la conscience, il lui est relatif et subordon
n'a de consistance qu'à titre d'une unité intentionnelle; suspe
l'ordre de l'immanence, il renvoie au caractère absolu de la conscie
L'objet même, considéré comme chose dans sa structure réelle, v
étant une unité naturelle, dépendante des circonstances et f
leur causalité, ne s'explique que dans l'unité intentionnelle con
dans les synthèses subjectives.
Ceci demande quelques explications. Comment une unité inte
nelle peut-elle constituer le sens d'une chose, au point que la
renvoie nécessairement à la conscience ? Il nous faut partir de
riorité de la conscience à tout objet. Il ne faudra pas compre
par là que la conscience existerait séparément des choses, car
dans l'acte de connaissance lui-même que la puissance constit
du sujet précède les données objectives qu'il unifie.
« Ici il ne faut jamais perdre de vue que quoique les choses so
ces choses dont nous seuls faisons l'objet d'énoncés, sur l'être ou l
être desquelles seuls nous disputons et décidons rationnellem
elles sont telles en tant que choses de l 'expérience. C'est elle seule q
prescrit leur sens » 1.
Aussi n'est-il pas étonnant que l'unité intentionnelle renvoie au
voir synthétisant ou objectivant de la perception qui réunit les es
dans l'objet identique. La perception synthétise les esquisses en
vant l'ordre de leur enchaînement. Cette liaison motivée des esqui
exclut toute conception de la perception comme simple somm
impressions 2. La motivation implique que l'objet n'est pas fab

1. E. Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie, trad, par Ricœur,


2. Ibid., pp. 15Ö-1Ö7.

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mais justifié et intégré à partir du principe actif opérant sur les données
intuitives.
Les synthèses sont immanentes puisqu'elles sont constituées par la
conscience qui est le sujet actif de leur être. Elles ne peuvent non plus
être considérées comme des entités métaphysiques, telles que les idées
platoniciennes par exemple, puisque leur motivation est fondée sur
l'expérience.
Si la chose se réduit à une unité de sens, issue de la visée motivante,
il s'ensuit que l'objectivité de toute transcendance ne s'explicite et ne
se justifie que par son rapport au sujet qui la structure. « Le monde des
« res » transcendantes se réfère entièrement à une conscience, non point
à une conscience conçue logiquement, mais à une conscience actuelle » K
Le monde des choses ne peut prétendre à l'existence que dans la mesure
où il est incorporé dans une unité subjective dont je suis actuellement
l'auteur. Ce monde est inséparable du sujet concret, il vaut par moi,
et ne devient conscient que par le moi qui, d'une façon permanente,
se trouve dans la réalité objectivée 2.
La transcendance doit être expliquée comme l'unité idéale, réalisant
la connexion ordonnée des esquisses, que le moi effectue selon les lois
de signification. La structure intrinsèque de l'objet se résout dans l'unité
des intentions qui le visent. Sans cette unité de conscience, l'objet est
impensable.
Expliquer notre comportement cognitif par une référence à la chose
en soi est donc un non-sens. « Une réalité absolue équivaut exactement
à un carré rond»*. Toute chose qui ne serait pas susceptible d'être effec-
tuée dans une motivation perceptive doit être rejetée.
Il est évident que l'être transcendant n'étant valable que par l'unité
de la pensée et n'existant que par l'accomplissement des connexions
motivées, et fondé par la conscience, n'est qu'un être relatif, privé de
toute subsistance. ... « l'ensemble du monde spatio-temporel... a en vertu
de son sens un être purement intentionnel ; il a, par conséquent, le sens
purement secondaire, relatif d'un être pour une conscience » *. C'est
un être qui s'épuise dans l'unité d'identité des apparences. Au-delà
de cette unité intentionnelle, il est un Rien 5.

1. Ibid.. d. 162.
2. Ms 1931, B I 5 III, p. 10. « Gibt es aber irgend ein Seiendes, gibt es Welt
man will Ueberwelt, die Sinn fiir mich hatte... ohne mein eigenes Sein,
Bewusstseinsleben und meine Bewusstseinsvermügen, durch die es für mic
und gewonnen hat ? ■•.
3. E. Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie, trad, par Ricœu
4. Ibid., p. 164.
5. Ibid.

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Conclusion,

L'être transcendant, ainsi ramené à la pensée, est expliqué d'une


façon idéaliste. Cette théorie de la constitution par le moi de la valeur
idéale de l'objet décèle l'analogie avec Kant.
On sait que l'objet kantien n'a de validité que par les catégories que
la subjectivité lui impose. Le recours au sujet est donc nécessaire pour
justifier, à partir de lui, la valeur idéale de l'objet, sa consistance. Bien
que cette conception soit abstraite, théorique et apriorique au sens fort
du mot, Husserl considérait le sens de la révolution copernicienne comme
tout-à-fait justifiée, même s'il se déclarait déçu par la solution kantienne.
L'explication d'un objet par les synthèses subjectives est entreprise
à partir de la conscience psychologique. Le recours à un tel procédé
paraît étrange, si l'on se rend compte du caractère non mondain de la
phénoménologie.
Comme le dit Fink, ceci découle de l'indécision des Idées I *. C'était
la première forme d'opposition à la tradition philosophique ; on ne
pouvait sans préparation lancer les idées de la phénoménologie pure
qui n'aurait présenté aucune analogie avec le courant contemporain.
Ces considérations préliminaires acheminent lentement vers la conscience
transcendantale. C'est la liaison intime de la psychologie intentionnelle
avec la phénoménologie qui rend possible cet acheminement. « A chaque
constatation de fait ou d'essence dans l'une, répond une constatation
parallèle dans l'autre »2. « La psychologie pure forme, il est vrai, un
parallèle strict à la phénoménologie transcendantale de la conscience ». •
La psychologie intentionnelle, de façon latente, porte déjà des élément»
phénoménologiques. En réduisant l'objet à l'unité d'enchaînement des
expériences, la psychologie intentionnelle le justifie dans la conscience.
Mais celle-ci, liée au monde par son incarnation, est elle-même intra-
mondaine. On ne pourra donc passer à la phénoménologie transcendan-

1. Eugen Fink, Die phänomenologische Philosophie Edmund Husserls in der


ge cniv ortigen Kritik, Kantstudien, XXXVIII, 3/4, Berlin, 1933, p. 361.
« Die Durchführung der Epoche dreht die ph momenologische Problematik aus
dem scheinbaren Problembezirk des Verhältnisses von psychischer Immanenz und
Transzendenz heraus in die Dimension des Geltungsbezugs zwischen Welt im Ganzen
(also Immanenz und Transzendenz) und transzendentaler Subjektivität. Ein solche»
Herausdrehen setzt aber voraus, dass zuvor der Einsatz bei der mundanen Korre-
lation von subjektiver Immanenz und objektiver Transzendenz selbst methodisch
gesic; ert ist. Nun sah sich Husserl in den « Ideen » vor die Aufgabe gestellt, allererst
die methodische Sicherung vorwegzunehmen und zwar durch die Kennzeichnung
des Unterschiedes von Immanenz und Transzendenz als eines solchen der Intentiona-
lität. Keineswegs sind diese Bestimmungen in den « Ideen » gemeint als phänome-
nologisch entgültige.... Weder um ein traditionell erkenntnistheoretisches Problem,
noch um eine Grundlegung der Psychologie geht es hier, sondern um eine Vollzug
der Epoche vorbereitende Auslegung des Wesens des Bewusstseins ».
2. E. Husserl, Nachwort dans : Ideen zu einer reinen Phänomenologie und pha-
nomenologischen Philosophie, E. Husserl, t. Ill, Haag, M. Nijhofï, 1952, p. 147.
« Jeder eidetischen wie auch empirischen Feststellung auf der einer Seite muss eine
Parallele auf der Gegenseite entsprechen ».
3. E. Husserl, Méditations Cartésiennes, trad, par G. PeiíTer et E. Levinas, Pans,
Vrin, 1947, p. 27.

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taie que par la réduction de tout ordre psychique. La réduction de cet


ordre permettra dès lors de dévoiler l'Ego dans la conscience qu'il a
de son objet et de sa propre autorité. L'hypothèse de la destruction du
monde par l'imagination nous a déjà montré la possibilité de cette ascèse ;
car, en anéantissant hypothétiquement le monde, on « annule » aussi
tout ce qui est empirique : corps, âme, homme *.

6. Motivation de la réduction par la crise des sciences.

La crise actuelle des sciences et l'échec des solutions qui o


d'y remédier exigent un retour à la Lebenswelt, au monde
qu'on ne pourra effectuer que par la réduction ».
Il est nécessaire de repenser d'un point de vue épistémol
sciences conçues comme activité culturelle et comme une sorte de
praxis théorique.
Reconstituer les sciences, c'est rechercher leur teleologie, percevoir
dans leurs premières fondations la motivation de leur développement
historique. Les sciences, dans leur état actuel, sont le produit d'une
longue histoire, et le germe de leur évolution historique se trouve dans
l'Urstiftung, dans leur premier fondement. Lorsque ce premier fonde-
ment est redécouvert, il rend intelligible la signification du développe-
ment scientifique.
Nous devrons donc éclaircir, dans ce paragraphe, comment se fondent
les sciences sur la Lebenswelt, quel est le « préjugé » des sciences dans
leur état actuel, pourquoi la réduction de toutes déterminations scien-
tifiques est nécessaire, quelle est cette Lebenswelt dégagée parla réduction.

La « Lebenswelt » fonde les sciences.


Les sciences sont expérimentales, non seulement en ce qu'elles dérivent
de l'expérience et sont vérifiées par elle, mais surtout parce qu'elles
s'enracinent dans l'évidence première de la Lebenswelt. « Die Lebens-
welt ist ein Reich ursprünglicher Evidenzen » 3. Tout énoncé prédicatif,
toute « conscience-de » prend son origine dans le contenu et dans la
forme du monde journalier. Jouissant d'une évidence originaire, la
Lebenswelt enracine les sciences dans un fondement commun et aussi
dans le monde réel. Les sciences ne s'élaborent que sur des éléments
de la Lebenswelt dont le rôle de fondement consiste à référer constam-
ment les concepts scientifiques au donné premier non encore contaminé
par leurs idéalisations.
La pomme tombe de l'arbre - voilà l'évidence première. Les lois

1. E. Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie, trad, par Ricœur, pp. 161,
182.
2. E. Husserl, Die Krisis der europâischenWissenschaften und die transzendentale
Phùnomenologie, Haag, M. Niihoff, 1954, §5 15, 28, 29, 30, 31, 34, 35.
3. Ibid., p. 130.

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scientifiques ne font qu'expliciter cette réalité primitive toujours pré-


supposée. Les sciences, n'étant rien d'autre qu'une explication de la
Lebenswelt, ne peuvent se développer que sur son fondement. Nour-
ries continuellement de la première évidence, les sciences, en s'enrichis-
sant de nouvelles intuitions, ajoutent des contenus fondés sur les conte-
nus précédents. Mais finalement, tous ces contenus, à divers degrés de
profondeur, impliquent comme horizon le terrain fondant de la Lebenswelt.

Le préjugé des sciences.


La Lebenswelt, véritable fondement des sciences, a été négligée par
elles, ou méconnue au cours de leur développement depuis Galilée.
L'Urstiftung n'est plus présente dans les sciences, que comme une sédi-
mentation incompréhensible et comme telle devient préjugé - Vorurteil1.
Et ce préjugé provoque la crise des sciences. Il se passe dans la sédi-
mentation - Sedimentierung - quelque chose d'analogue à ce qui
arrive dans la perception. Toute perception suppose toujours un horizon
impliqué, dont la nature ne se révèle pas exactement. Les sciences objec-
tives, en se fondant sur l'évidence de la Lebenswelt, l'utilisent pour
établir leurs lois et leurs concepts, mais oublient qu'il demeure l'horizon
permanent de toute science.

Nécessité d'éclairer la Lebenswelt.

Puisque la science, historiquement parlant, prend son point de départ


dans la Lebenswelt, et s'y réfère tout au long de son développement
- au point que le savoir préscientifique est toujours présent au savoir
scientifique - il faut dévoiler cette évidence préjugée - Selbstvers-
tändlichkeit - et enraciner en elle tout savoir.
Il est important de noter que l'exigence d'un retour à la Lebenswelt
est dictée par la nécessité d'expliquer, d'éclaircir le fondement même
de la science. L'activité scientifique du savant se fonde dès le début
sur l'acquis du monde journalier. Mais justement ce monde, dont tout
savoir tire sa validité objective comme de sa source évidente, dissimule,
en son état actuel, des préjugés et des incompréhensions.
Les savants scientifiques, éblouis par les découvertes modernes, s'at-
tachent uniquement aux déterminations qui concernent les choses.
Mais les sciences ne jouissent pas seulement d'une portée objective ;
elles renvoient aussi du côté de l'acte. Cette portée subjective est deve-
nue « préjugée » et c'est elle qui constitue le problème de la Lebenswelt.
Si nous voulons éclaircir le monde vécu, sur lequel reposent les sciences,
il faut réduire toutes les couches objectives de savoir, qui se sont accu-
mulées au cours du développement de l'humanité et de l'individu, pour
aboutir au monde quotidien.
1. Préjugé chez Husserl désigne ce qui n'est pas clarifié par l'intuition.

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La réduction husserlienne

Mais il n'y a pas seulement intérêt à dégager la Lebenswelt dans le


seul but de fonder les sciences : elle constitue en elle-même un objet
digne d'études, puisqu'en définitive tout savoir humain repose sur elle.
Puisque la science utilise la Lebenswelt, chaque savant hérite des
déterminations objectives qui s'enracinent dans la Lebenswelt, mai»
il ne s'en occupe pas et la méconnaît. Il résulte de cette négligence des
sciences à clarifier leur fondement, que c'est à la philosophie qu'incombe
la tâche de le mettre en évidence et de résoudre par là la crise des sciences.
Tous les essais entrepris au niveau philosophique pour fonder les
sciences ont échoué, car on a laissé les présupposés inéclaircis, et, par
conséquent, les significations non fondées. La crise des sciences s'est
prolongée dans la pensée philosophique.
Descartes a bien vu le problème lorsqu'il a posé la nécessité de fonder
les sciences dans le principe évident de la subjectivité. Mais il a échoué
parce que, au lieu de considérer l'Ego comme fonctionnel, il Ta posé
comme déjà constitué, comme une substance.
Kant lutte contre un rationalisme qui voulait se fonder sur la rigueur
apriorique de la chose en soi, en oubliant le caractère subjectif de notre
savoir.

Initiateur de la philosophie transcendantale, Kant veut fonder le»


significations dans la subjectivité, mais il échoue à son tour pour avoir
considéré la Lebenswelt comme allant de soi - Selbstverständlichkeit.
Selon Husserl, Kant a indiqué la bonne direction : revenir à la sub
jectivité, mais ce qu'il a découvert demande de nouvelles analyses.
Kant reste trop éloigné du concret : il cherche l'ego transcendanta
dans l'abstrait, alors qu'il fallait le découvrir dans le concret. La voi
de Kant est donc trop régressive.
Cette subjectivité elle-même n'était pas vue dans sa nature authen
tique. En y renvoyant, Kant reste dans le style de l'intuition de Locke.
Il reste donc au niveau de la conception psychologique de l'âme et l
vrai transcendantal lui échappe.
D'autre part, Kant sépare la sensibilité de l'entendement. Il ne voi
l'activité transcendantale qu'au niveau catégorial. N'ayant pas perç
d'intelligibilité au sein du monde journalier, Kant le considère comm
une Selbstverständlichkeit.
Enfin, Kant oublie les intuitions fondamentales de la science, et explique
ses objets par les formes aprioriques. C'est pourtant la direction opposée
qu'il faut prendre. Il faut voir que ces intuitions et ces objets sont enra-
cinés dans la Lebenswelt comme dans leur source.
En résumé, Husserl adresse à Kant les critiques suivantes qui porten
sur le centre de sa philosophie. Kant présuppose, comme allant de s
le monde journalier qui est à expliquer : il n'aperçoit pas le caract
d'évidence préjugée - de la Selbstverständlichkeit - de la Lebenswe
Cette omission, jointe à sa conception empiriste de l'intuition, l'em-

433
Revue de méta. - N° 4, 1957. 28

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pêche d'atteindre le plan vraiment transcendantal de la subjectivité


et lui fait manquer la compréhension de 1' Anschaulichkeit, la véritable
théorie de l'intuition.

La réduction comme moyen de révéler la Lebenswelt.

Puisque les sciences méconnaissent leurs intuitions fondamentales


et la part de subjectivité qui y est toujours présente, puisqu'aucune
philosophie n'éclaircit la véritable nature du monde quotidien, il est
nécessaire que la phénoménologie reprenne entièrement l'examen de
cette question.
Mais la phénoménologie n'atteindra la source authentique et pri-
mitive de toute signification scientifique, elle ne pourra expliquer et
clarifier (erklären a ces deux sens) la pure nature du premier donné,
qui naît de la première rencontre de la conscience avec le factice, qu'à
la condition d'une ascèse radicale. Il faudra éliminer, réduire successi-
vement toutes les déterminations scientifiques, comme adventices et
dérivées, pour dégager le monde quotidien dans son état originaire.

CONCLUSION GÉNÉRALE

Les différentes voies d'accès à la réduction nous révèlent la lutte


acharnée de Husserl pour introduire la phénoménologie. En effet, Hus
recommence tout au long de sa vie, à plusieurs reprises et à différen
points de vue, le procédé d'amorçage de la réduction sans pourt
aboutir à des résultats décisifs. Les multiples orientations envisa
ne présentent qu'une des possibilités, sans que chacune d'elles ou tou
considérées ensemble puissent ouvrir la voie vers l'immanence de la
science de façon à convaincre l'auteur de la phénoménologie lui-mêm
L'introduction à la phénoménologie rencontre nécessairement d
difficultés dues à la possibilité naturelle de l'homme K Étant donné
la réduction consiste dans la conversion du sujet sur lui-même en vu
d'éclaircir l'origine du monde, il s'ensuit que ce sujet doit s'affranch
de la thématisation des choses qui s'imposent pour isoler une dimens
authentique de la conscience qui dépasse le plan de la nature.
Or, tant que nous vivons au niveau de l'attitude naturelle, nous
disposons pas de moyens qui puissent nous élever à une dimension dép
sant le monde. Immergé dans cette attitude, le phénoménologue
incapable de passer de la dimension mondaine à la dimension phé
ménologique, de saisir la signification originaire du monde. Tout ess
pour opérer la réduction à ce niveau ne fournit que des raisons toujo

1. P. Ricœur, dans Idées directrices pour une phénoménologie de E. Husserl, Gal-


limard, 1950, p. xxviii.

434

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La réduction husserliennc

approximatives. Dans cette lumière la réduction définitive n'est pas


réalisable. Les échecs husserliens trouvent ainsi leur explication.
Pourtant, quand Husserl arrive à voir la nécessité de la réduction
et la réalise, il procède par une espèce d'irruption dans la vie immanente :
en vainquant le moi humain et sa vie psychique, il découvre dans le
regard intuitif désintéressé, dans la réflexion phénoménologique les
possibilités transcendantales. C'est dans cette découverte que réside
la justification de la réduction. La nécessité de la réduction est donc
motivée par le dévoilement des facteurs qui de leur part la présupposent.
Les différents « motifs » d'accès à la réduction n'arrivent qu'à prépa-
rer une ascèse correspondante, pour briser le crédit que nous prêtons
aux choses, sans pourtant pouvoir les dépasser.
Jules Bednarski.

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