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Texte publié dans :

« L’ethnologue Emile Kemlin », p. 13-64, in. Émile Kemlin, Les Reungao. Rites agraires, songes et
alliances. Une société proto-indochinoise du Vietnam au début du xx e siècle, suivi de « Au
Pays Jaraï » (1909) et de « L’Immigration annamite en pays Moï » (1925). Textes réunis et
présentés par Pierre Le Roux , Paris, École française d’Extrême-Orient (“Réimpressions”, n° 11), (1re éd. en
articles disparates : 1909-17), introduction de Pierre Le Roux, préface de Georges Condominas, 328 p.

Version originale, non mise en forme, ne pas citer en l’état sans permission écrite de l’auteur (se reporter à la
parution de 1998 de l’EFEO pour le foliotage)

© Pierre Le Roux 2010


INTRODUCTION
“ L’ETHNOLOGUE ÉMILE KEMLIN ”

par
Pierre Le Roux

« [Celui] qui veut faire des observations religieuses


doit connaître et connaître parfaitement, la langue du pays
où il opère ; – il doit se montrer respectueux pour les
diverses manifestations du sentiment religieux qu’il étudie,
et étudier les faits avec sympathie (…) ; – il ne doit pas
influencer, ni par voie d’autorité, ni moralement, ceux
qu’il interroge, en interprétant tendancieusement leurs
réponses, ou en leur faisant dire ce qu’ils n’ont pas dit ; il
devra acquérir la confiance des autochtones ; – il sera
constamment attentif à l’objet de ses recherches, tirant de
chaque catégorie d’hommes qui l’entourent les
renseignements qu’elle saura devoir lui fournir plus
avantageusement ; – il s’observera grandement pour ne
pas scandaliser (…). ” (R.P. Léopold Cadière,
« Instructions pratiques pour les missionnaires qui font des
observations religieuses », Anthropos, VIII, 1913, p. 593-
606, p. 928).

On associe volontiers le missionnaire à l’aventurier en lui reconnaissant en outre un


exotisme pimenté d’altruisme, ou, au moins, d’érudition. Plus rarement on associe le
missionnaire à l’ethnologue tant la recherche anthropologique paraît empêchée d’une foi
monothéiste et, par essence, subjective. Pourtant, avec le père Kemlin, on a la démonstration du
fait inverse. Au début du siècle, en France, l’ethnologie en était à ses premiers balbutiements,
sous l’heureuse impulsion de “ l’École sociologique ” d’Émile Durkheim et Marcel Mauss1 pour
ne citer qu’eux. A la même époque, en Asie du Sud-Est, limitée alors pour l’horizon de recherche
français à l’Indo-Chine orientale (c’est-à-dire l’Indochine française de l’époque), il était à peine
question d’ethnologie. Tout au plus, de la fin du XIXe siècle à la première moitié du XXe siècle,
quelques explorateurs, tel Henri Maitre, auteur du fameux Les Jungles Moïs, ou le Marquis de
Barthélémy, quelques administrateurs tel Adhémard Leclère ou J. Moura pour le Cambodge,
Etienne Aymonier pour le Cambodge, le Laos et les Chams, Auguste Pavie pour le Laos, quelques
officiers des troupes coloniales comme Auguste Bonifacy, Etienne Lunet de La Jonquière,
rapportaient-ils une encore bien maigre moisson de faits ethnographiques2. Ultérieurement,
l’étude scientifique de l’Indochine, notamment en ce qui concerne l’ethnologie, fut surtout
l’affaire de quelques militaires (M. Ardant du Picq, M. Baudesson, Jean-Marie Boucher de
Crèvecœur, Paul Huard, Albert Marie Maurice, Georges-Marie Proux, entre autres), des
administrateurs (Paul Guilleminet), des médecins (les docteurs L. Gaide et Bernard-Yves Jouin),
des enseignants (Marcel Ner). En ce qui concerne l’agronomie et la géographie humaine, trois
grands noms émergèrent tardivement et simultanément dans les années trente : René Dumont,
Pierre Gourou et Jeanne Cuisinier.
Mais l’ethnologie de l’Indochine française puis de l’Asie du Sud-Est continentale ne prendra
véritablement son essor qu’après la Deuxième Guerre mondiale, avec la publication des travaux
de Georges Condominas, Pierre-Bernard Lafont, Jacques Dournes et Jean Boulbet pour ne citer
que quatre ethnologues concernés par la même région que celle où officiait Émile Kemlin3, sous
l’impulsion et à l’exemple dynamiques de l’Ecole française d’Extrême-Orient, prémisses
fameuses des structures françaises de recherche actuelles et première institution de recherche
concernant cette aire culturelle. L’EFEO, créée à Saigon en 1898, à l’instigation de l’Académie
des inscriptions et belles-lettres, sous le nom de Mission archéologique de l’Indochine, prit son
nom définitif en 1901. Depuis cette date, c’est à l’EFEO principalement, en effet, que revint le
mérite d’encourager, réaliser, et bien souvent publier les recherches en sciences humaines
entreprises en Indochine. D’autres associations ou instituts locaux jouèrent cependant, en
Indochine, et en France concernant les études extrêmes-orientales, un rôle actif mais cependant

1
Cf. l’étude consacrée par G. Condominas à Marcel Mauss (1972) et, pour l’“ oncle ”, cf. Emile Durkheim, Journal
sociologique, Introduction et notes de Jean Duvignaud, Paris, Presses Universitaires de France, (“Bibliothèque de
philosophie contemporaine”), 1969.
2
Cf. G. Condominas (1980, p. 106).
3
En effet, pour ne parler que de l’Indochine, on trouve, concernant l’époque de l’après-guerre, des travaux
dequalité dus à des chercheurs étrangers tel que le Suédois K.-G. Izikowitz (1951) ainsi que, ultérieurement, ceux
d’A. Ferreiros (1971), de R. Legay (1971), de G. martel (1975), de J. Matras-Troubetzkoy (1983), de B. Wall (1975),
de J. Lemoine (1972), de R. Pottier pour ne citer que quelques exemples. Concernant l’ensemble de l’Asie du Sud-
Est, la liste est beaucoup plus longue, quelle que soit l’époque, et on pourra se reporter à la bibliographie proposée
par G. Condominas en annexe de “ L’Asie du Sud-Est ” (1978).
secondaire par rapport à l’EFEO : l’Institut indochinois pour l’étude de l’homme à Hanoï, la
Société des études indochinoises à Saigon, l’Association des amis du vieux Hué, entre autres. En
métropole, il faudra attendre le début des années 60 pour voir apparaître le premier grand
laboratoire du Centre national de la recherche scientifique consacré à l’Asie du Sud-Est et au
monde insulindien, le CeDRASEMI4, fondé par Georges Condominas avec l’appui d’André-
Georges Haudricourt et Lucien Bernot5.
Ainsi, alors que les travaux des chercheurs anglo-saxons et hollandais brillaient de tous
leurs feux, à la même période, en Indochine, seules trois figures françaises émergeaient
suffisamment pour soutenir avantageusement la comparaison avec les précédents : Léopold
Cadière, Auguste Bonifacy et Émile Kemlin. Comme le dit Georges Condominas (1991, p. 4354)
à propos de ce dernier :

“ Au cours de son long séjour chez les Bahnars Reungao le père Kemlin, des Missions
Étrangères de Paris, a réuni une remarquable documentation dont il a tiré trois essais qui
constituent la première œuvre vraiment scientifique consacrée à un groupe proto-indochinois du
Vietnam central. ”

Pourtant, ces trois figures, quasi oubliées aujourd’hui, étaient pour ainsi dire méconnues,
non seulement des étrangers mais encore des Français, et le demeurent hors le petit cercle de
spécialistes de la région. Paradoxalement, mais c’est peut-être là ce qui compte, les travaux de
ces trois personnalités sont reconnus des Vietnamiens eux-mêmes. L’appréciation positive que
ceux-ci portent de nos jours sur ces chercheurs français d’une époque controversée est récente :
l’extraordinaire Léopold Cadière, qui a consacré sa vie au Vietnam et à la société vietnamienne,
de 1895 date de son arrivée au Vietnam, à 1955, date de sa mort, a cependant été interné
pendant six années et demi par les forces révolutionnaires Viet-minh, alors qu’il était âgé de 76
ans… A sa libération, en 1953, le père Cadière refusa d’être rapatrié en Europe. Plus récent, le
cas de Jacques Dournes (alias Dam Bo) est également remarquable : ce spécialiste des Jörai et
des Srê (ou Köho) du Vietnam central, ayant passé 25 ans parmi eux, prêtre des Missions
Étrangères de Paris devenu ethnologue au Centre National de la Recherche Scientifique sur le

4
Centre de Documentation et de Recherches sur l’Asie du Sud-Est et le Monde Insulindien. Tout d’abord Recherche
Coopérative sur Programme 61 du Centre National de la Recherche Scientifique, puis Laboratoire Associé 183 du
CNRS, avant de se transformer en Laboratoire mixte 682 du CNRS et de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, VIe
section, devenue l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales.
5
En ce qui concerne A.-G. Haudricourt, l’ampleur de son œuvre est telle que je n’indiquerai que son ouvrage co-
rédigé avec Pascal Dibie proposant une vision complète de ce savant à la fois agronome, botaniste, technologue,
linguiste et ethnologue, et la biographie que lui a consacré G. Condominas (BEFEO, 84, p. 7-64, 1997) complétée
par sa bibliographie exhaustive établie par Andrée Dufour (ibid.) Sur Lucien Bernot, je renvoie à son œuvre
maîtresse publiée en 1967 portant sur les Marma du Pakistan oriental, ainsi qu’à la réédition en volume de ses
principaux articles (sous presse aux Editions ERC).
tard, a été obligé de quitter contre son gré le pays qu’il aimait, à cause de la guerre et, sans
doute, de l’avancée des troupes révolutionnaires. Ce sont pourtant les villageois jörai qui
transformèrent naguère l’ancienne maison de l’ethnologue Dam Bo en musée ethnographique6.
Au début réticentes les autorités provinciales de la République démocratique du Vietnam finirent
par suivre l’exemple de ces villageois. Cette reconnaissance, tardive, du Vietnam n’a cependant
pas son équivalent en France, pays d’origine, tant de Jacques Dournes que de Kemlin.
Le père Marie Joseph Émile Kemlin (1875-1925) est ainsi l’auteur de trois articles majeurs
consacrés à la société des Reungao, Proto-Indochinois du Vietnam central. Ces “ Rites
agraires… ”, ces “ Songes et leur interprétation… ” et ces “ Alliances… ” chez les Reungao
ont paru dans le Bulletin de l’École française d’Extrême-Orient, de 1909 à 1917, et constituent
en fait une monographie exceptionnelle sur la société des Reungao et une œuvre
d’anthropologie, plus que de simple ethnographie, tant l’analyse, approfondie, est comparative
et moderne dans ses réflexions.

Genèse

En 1983, lors de l’une de mes premières rencontres avec Georges Condominas, celui-ci me
parla incidemment de l’œuvre du père Kemlin, aspirant après sa réédition en volume ; œuvre
que j’ai à l’époque abondamment utilisée (1985). Les années suivantes, G. Condominas
continua périodiquement de me parler de cette œuvre d’ethnologie de première qualité comme
il la qualifie, ainsi que des travaux de quelques autres ethnologues oubliés un peu trop vite.
Mais Kemlin revenait toujours sur la scène comme l’un des capitaines de cette armée de cendres.
Quelques dix années après que Georges Condominas l’ait souhaité, c’est chose faite, Kemlin
est réédité. Ceci a été rendu matériellement possible grâce à la compréhension et à l’obligeance
de l’ancien directeur de l’École française d’Extrême-Orient, Monsieur Denys Lombard.
Les trois articles sont présentés sous le titre global Les Reungao, dans la mesure où, réunis,
ils forment bien une monographie sur cette société particulière qui en est le dénominateur
commun. D’ailleurs Georges Condominas indiquait en 1978 (p. 355), en introduction à la
bibliographie de sa synthèse de l’Asie du Sud-Est pour l’Encyclopédie de la Pléiade : “ quant aux
œuvres du P. Kemlin, de G. Morechand ou de Telford, citées ici, il est évident qu’il s’agit en fait
de monographies dont l’ampleur est comparable à bien d’autres qui ont eu le privilège d’une
publication sous forme de livres ”. A ce titre a été ajouté ce sous-titre, Rites agraires, songes et
alliances. Une société proto-indochinoise du Vietnam Central au début du XXe siècle, pour des
raisons pratiques : en effet il m’est apparu nécessaire, d’une part, d’indiquer la teneur de cet
ouvrage en rappelant dans le titre le thème des articles qui le constituent et, d’autre part, d’y
proposer des renseignements complémentaires, à savoir que les Reungao, groupe ethnique

6
Comm. person. de G. Condominas (1996).
relativement peu connu, vivent au Vietnam et font partie de l’ensemble proto-indochinois ;
enfin, et c’est sans doute le plus important, il était nécessaire de préciser que les travaux de
Kemlin ont été réalisés à une époque donnée, d’ailleurs ancienne.
L’ordre d’apparition des articles suit à la fois la chronologie réelle de leur publication
initiale, une logique ethnographique, et le point de vue de l’auteur lui-même qui indiquait dans
la note 1 (p. 1) de “ Alliances chez les Reungao ” :

“ Cette étude est le complément d’un article paru dans le BEFEO, t. X, n° 3, juillet-septembre
1910 sous le titre : Les Songes et leur interprétation chez les Ro˛ngao. Ces deux essais seraient
mieux réunis sous le titre suivant : Songes et alliances chez les Ro˛ngao. Les lecteurs sont donc
priés de se reporter à l’article précité qui forme comme la base de cette seconde partie. ”

La mise en volume de ces articles va donc dans le sens désiré par l’auteur à cette nuance près
que l’ouvrage débute par l’article consacré aux rites agraires, point non précisé par Kemlin.
Mais ce premier article paru en 1909 se présente naturellement comme une introduction, dense,
à la société des Reungao, et bien au-delà du fait des nombreuses comparaisons locales proposées
par Kemlin, dans la mesure où il est cohérent d’aborder une société par l’un de ses aspects
matériels les plus significatifs et les plus remarquables, surtout si, comme c’est le cas pour la
culture du riz, cet aspect amène à pénétrer, via un vecteur technique et rituel, au sein du
système de pensée, préface à une analyse ultérieure plus intime, voire plus complexe ; type
d’analyse que l’on retrouve, pour ce qui concerne les Reungao, dans les deux articles suivants
consacrés aux songes et aux alliances.
A la réédition de ces trois travaux parus dans le BEFEO, ont été ajoutés plusieurs documents :
tout d’abord, deux articles rédigés par le père Kemlin et désormais introuvables : “ Au pays Jarai
(Cochinchine orientale) ”, édité en trois parties dans la revue Missions catholiques en mai 1909,
et L’immigration annamite en pays Moï, en particulier dans la province de Kontum, publiée à
l’imprimerie de Quinhon en 1925 ; cette dernière brochure, particulièrement, est inaccessible.
Deux articles critiques, sans doute les seuls, portant sur une partie de l’œuvre du père Kemlin
consacrée aux Reungao, sont également proposés dans ce volume : le premier, dû à Paul
Guilleminet, publié en 1951 dans le BEFEO (XLV, 1, p. 209-212), s’intitule : “ Remarques
suggérées par des rapprochements entre l’article du capitaine Maurice relatif à Trois fêtes
agraires rhadé ” ; le second, dû à Auguste Bonifacy, a été publié en 1911 dans la Revue
d’anthropologie, et s’intitule : “ Critique des Songes et leur interprétation chez les Reungao ”.
Il m’est apparu utile en effet de présenter autant que possible l’ensemble des textes
disponibles de Kemlin, guère nombreux, et indépendamment de leur pertinence scientifique et
de leurs différences de qualité. Il est certain que l’article de 1909 sur les Jörai est de moins bonne
facture que ceux portant sur les Reungao, pourtant rédigés par le même homme. A titre
documentaire sur la vie et la personnalité du père Kemlin la réédition en annexe de cet article
me semble nécessaire. De même, les conclusions de son article de 1925 sur l’immigration
annamite peuvent paraître étonnantes, elles n’en sont pas moins dues à un grand connaisseur
de ces sociétés, et qui leur a dévoué sa vie. A ce titre, et parce que c’est un document rare, il m’a
paru juste de le présenter intégralement, sans devoir pour autant avaliser chacun des arguments
spécifiques de Kemlin. C’est aussi une façon d’éviter le piège hagiographique à l’évocation de ce
personnage somme toute remarquable et plutôt sympathique.
Durant le cours de mes études, je n’ai guère pu obtenir d’informations précises sur la vie de
cet auteur souvent cité. C’est la raison qui m’a poussé, en rééditant l’œuvre de Kemlin, à
rechercher le maximum d’informations sur sa vie privée. Mon enquête s’est logiquement dirigée
vers le lieu de naissance de Kemlin et ses descendants indirects supposés que j’ai réussi à
retrouver grâce à l’aide des services municipaux de la commune de Lusse. Les membres de sa
famille m’ayant aimablement communiqué les originaux de nombreuses lettres que le père
Kemlin écrivit à sa famille durant son long séjour à la Mission de Kontum, j’ai estimé que les
renseignements qu’elles contenaient éclairaient d’un jour utile la vie et le caractère de
l’ethnographe des Reungao. C’est ainsi que j’ai cité certains extraits qui concernent plus son
travail d’évangélisation que son action d’ethnologue : les deux activités sont indissociables. Cet
homme, qui était à la fois chercheur et missionnaire, il fallait bien le découvrir simultanément
sous ces deux éclairages. La censure, voire l’incompétence, eût consisté pour moi à taire sa
réalité missionnaire pour ne parler que de son travail ethnographique. Certains n’apprécieront
pas, mais d’autres, j’espère les plus nombreux, conviendront que les différents actes constitutifs
de la vie de Kemlin ayant été, il ne servirait à rien de passer sous silence certains d’entre eux au
nom d’une éthique, ou plutôt d’une morale, toute relative et asujettie à l’air du temps. Ma
démarche est sereine, sans parti-pris et toute documentaire. Je suis convaincu de l’excellence des
travaux ethnographiques de Kemlin et admiratif face à une vie de dévouement. Quant au reste,
j’en prends et en donne simplement acte car si j’essaie de ne pas juger ni de tenter influencer le
lecteur apte à se forger sa propre opinion, je me dénie surtout le droit de le faire : sommes-nous
meilleurs ethnographes, et même meilleurs hommes, étant ou n’étant pas missionnaires ? Et
peut-on affirmer qu’un ethnologue, aujourd’hui comme hier, n’est jamais en mission,
politique, religieuse, scientifique ou sociale ?
De l’œuvre complète du père Kemlin ne manque donc, dans le présent volume, outre sa
correspondance, qu’un seul article, qui n’a malheureusement pu être retrouvé, publié en 1919
dans la revue Ami des enfants : “ Règlement de l’Œuvre des chu giao phu ”, si l’on excepte
l’ébauche du coutumier reungao, commencé à la fin de sa vie et qu’il n’a pas eu le temps
d’achever. Paul Guilleminet (1952, p. 91-94) indique à ce propos qu’“ en 1923, la Résidence
supérieure en Annam demanda que fussent notées et recueillies les coutumes en pays moï. […]
Au reçu des instruction du Résident supérieur en Annam, le résident Fournier, en fin 1923,
demanda au P. Kemlin, Supérieur de la Mission de Kontum, d’établir une documentation “ en
vue de l’élaboration de la codification projetée7 ”. Le P. Kemlin, qui était dans le pays depuis
plus de vingt ans, avait en effet une grande connaissance de la question ; malheureusement, il
était déjà très malade et dut aller peu après se reposer à Dalat, puis rentrer en France en 1924.
De la “ Convention passée entre le Protectorat et le P. Kemlin, Supérieur de la Mission de
Kontum ”, il ne subsiste qu’un plan incomplet et tronqué de coutumier écrit de la main du Père
Kemlin que le P. Jeannin, en 1925, fit parvenir à M. Ferrand, Résident de Kontum8 et dont voici
le texte9 :

Des personnes.
Droits de la personne au point de vue du village.
De la jouissance de ces droits.
De la privation de ces droits.
Du domicile.
Changement de domicile.
Du domicile de la femme mariée.
Des absents.
Présomption d’absence.
Des effets de l’absence relativement aux biens.
Des effets de l’absence relativement au mariage.
Des effets de l’absence relativement aux enfants.
Du mariage.
Qualité et conditions pour contracter mariage.
Des formalités relatives à la célébration du mariage.
Des obligations qui naissent du mariage.
Des droits et devoirs respectifs des époux.
De la dissolution du mariage.
Des seconds mariages.
Du divorce.
Des causes du divorce.
Des formes du divorce.
Des effets du divorce.
De la paternité.
Des enfants nés dans le mariage.
Des enfants naturels.
De l’adoption.

7
Lettre du Résident de Kontum au Résident Supérieur en Annam n° 1574 du 30 octobre 1923 (note de P.
Guilleminet, 1952, p. 92, note 2).
8
Ces textes furent joints à la lettre 2489 que M. Ferrand adressa le 4 septembre 1925 au R. P. Hutinet, Missionnaire
à Kon Hóring (note de P. Guilleminet, 1952, p. 92, note 3).
9
Copie aimablement communiquée par J. Matras-Guin, d’après Guilleminet (1952).
Des formes de l’adoption.
De l’adoption et de ses effets.
De la tutelle.
De la minorité et de la tutelle.
De la majorité.
Des biens et de la propriété.
Des biens meubles.
Des biens immeubles.
De la propriété.
Caractères de la propriété.
Des successions.
Des qualités recquises pour succéder.
Des successions des descendants.
Des successions des ascendants.
Des successions collatérales.
Des droits des enfants légitimes ou naturels.
Des droits du conjoint survivant.
De l’acceptation et renonciation à la succession.
Des successions vacantes.
Du partage et de sa forme.
Des donations entre vifs et testaments.
De la capacité de disposer ou de recevoir.
De la donation entre vifs.
De la forme des donations.
Des dispositions testamentaires.
De la forme des testaments.
Des legs.
Des exécutions testamentaires.
Des partages faits par père, mère ou autres ascendants,
entre leurs descendants.
Des donations faites hors du mariage.
Des contrats et des obligations conventionnelles en général.
Des conditions pour la validité des conventions.
De la capacité des parties contractantes.
De l’objet et de la matière des contrats.
De l’effet des obligations.
Des dommages-intérêts résultant de l’inexécution des obligations.
De l’interprétation des conventions.
De l’effet des conventions à l’égard des tiers.
Des obligations diverses.
Du payement.
De la perte de le chose due.
De la preuve des obligations ou du paiement.
Des délits et quasi-délits.
De la vente.
De la nature ou forme de la vente.
Des choses qui peuvent être vendues.
Des obligations du vendeur.
Des obligations de l’acheteur.
De la nullité de la vente.
De l’échange.
Du contrat de louage.
Du louage des choses.
Du louage des services (domestiques, ouvriers).
Du capital.
Du prêt.
Des diverses formes du prêt.
Des obligations du prêteur.
Des engagements de l’emprunteur.
Du dépôt ou du séquestre.
Du mandat.
Du cautionnement.
Du nantissement.
Des privilèges sur les meubles et immeubles.
De la prescription en matière de possession. ”

D’après le père Daniel Léger, Kemlin aurait cependant rédigé quelques chapitres de ce
coutumier ; chapitres qui se trouveraient aux Missions Etrangères dans les Archives de Kontum,
cote MX 50210. A ce sujet, il faut rappeler qu’en 1940, durant le cours de sa “ mission au pays du
droit maternel ” Marcel Ner indiquait :

“ Le Kontum présente un intérêt tout spécial, d’abord au point de vue ethnographique […].
Par ailleurs ces populations ont déjà été étudiées par divers auteurs et tout spécialement par le P.
Kemlin dont on ne saurait trop rappeler la valeur. […] C’est avec le plus grand intérêt que je
trouvai à la résidence avec M. Jerusalémy qui a une longue et précieuse expérience des pays moï
la vivante tradition de Guénot. Je retrouvais de même à la Mission, dont je visitais le provicariat
de Kontum ainsi que divers établissements secondaires, la tradition vivante des P. Dourisboure,
Guerlach, Kemlin.[…] J’appris d’autre part l’existence de manuscrits inédits du P. Kemlin et me
permis d’insister pour que fût publié tout ce qu’a laissé cet admirable savant. ” (p. 536-7).

Il semble bien, vu les dates de parution des derniers textes édités de Kemlin, que ce vœu n’ait

10
Comm. personn. de Jacqueline Matras-Guin (Lettre du 14 mai 1996).
pourtant pas été suivi d’effets. Il apparaît donc assez probable que les fameux chapitres déposés
aux archives des Missions Etrangères11 soient les textes inédits mentionnés par Marcel Ner.

Reungao ou Bahnar… mais Proto-Indochinois

Le père Kemlin parle des Reungao mais le lecteur pourrait se demander, à juste titre, qui
sont ces mystérieux “ sauvages ” parmi lesquels le missionnaire vécut plus de douze années. Il
s’agit d’une société à espace social restreint, un groupe ethnique minoritaire, vivant – au moins
à l’époque – dans les Hauts-Plateaux du Vietnam central, dans la région située en amont de
Kontum.
Les habitants de cette région étaient et sont encore principalement des Proto-Indochinois,
connus autrefois sous le nom de “ Montagnards ” ou de “ Moï ”. Ce dernier terme provient du
mot vietnamien m!i, péjoratif, qui veut dire “ sauvage ” et qui fut repris par les Français, mais
sans forcément cette nuance péjorative qu’on y trouve en vietnamien12 :

“ Autochtones môn-khmèrs et envahisseurs malayo-polynésiens appartenaient au même


niveau technique, et cette longue acculturation qui s’est établie entre eux, au cours de leur
voisinage prolongé, a accentué leur ressemblance. Celle-ci a pu faire croire à de nombreux
voyageurs qu’il s’agissait d’une seule population, impression renforcée par cette dénomination
de m"i par laquelle les Vietnamiens désignaient l’ensemble des populations proto-indochinoises
vivant dans leur hinterland. Bien que ce mot signifiât sauvage, il a fini par atténuer, dans l’esprit
de ceux qui l’employaient, la profonde diversité qui règne entre ces tribus au profit d’une unité
globale créée par ce vocable, au point que de nombreux chercheurs ont pensé à un peuple
“ moï ” d’origine indonésienne, dont une partie aurait été chamisée et l’autre khmèrisée,
voulant expliquer de cette manière l’existence de deux familles de langues au sein de
populations relevant d’un même niveau technique et culturel. ” (G. Condominas, 1980, p. 233).

Dans un document ultérieur (1974, p. 159), le même auteur signalait aussi :

“ La plupart des historiens ont tendance à présenter l’indianisation comme s’effectuant sur
des Proto-Indochinois demeurés à l’état “sauvage”, aux espaces sociaux limités. Or les traditions
thaïes suggèrent l’existence des royaume “kha” (c’est-à-dire proto-indochinois) dans les régions
actuelles de Louang Phrabang, Xieng Khouang ou Bassak… ”

11
Cf., à propos de ces archives, F. Mantienne (1995).
12
De même, les minorités du nord, immigrants récents, tels que les Yao, étaient le plus souvent connues sous
l’appellation Man (cf. les monographies d’A. Bonifacy citées en bibliographie), terme qui, comme Moï, provient du
même caractère chinois signifiant “ barbare, sauvage ”. Cependant, il faut préciser que, dans la bouche de nombre
de Français de l’époque, le terme “ moï ” n’était nullement péjoratif mais était plutôt simplement considéré
comme un terme commode pour désigner des sociétés différentes de celle des Vietnamiens à proprement parler.
Ces “ royaumes ” sont à entendre en relation avec la croyance longtemps répandue, tant
parmi les souverains d’Annam, du Laos, du Cambodge voire du Siam, que parmi les autorités
coloniales, en une “ principauté ” générale des Moïs soi-disant dirigée par les “ rois de l’eau, du
feu ” – et, découvert plus tardivement, le “ roi du vent ” – : les sadets, pötao, ou “ maîtres des
états ” des Jörai13.
L’existence de tels royaumes a également à voir avec la plus sérieuse tentative de
“ confédération Bahnar-Sedang ” de 1888 puis, plus tardivement, en 1957, avec l’apparition du
mouvement politique Bajaraka – mot composé des initiales des trois tribus Bahnar, Jörai,
Rhadé, et de celles d’un groupe linguistique Kaho ou Köho – enfin avec, en avril 1964,
l’émergence du mouvement FULRO (Front Unifié de Libération des Races Opprimées)14.
Ce dernier était largement inspiré par les services spéciaux occidentaux, notamment
américains, dans une tentative sécessionniste sans lendemain, à l’exemple et à la suite de la
politique menée après-guerre par la France ; politique exprimée en termes de “ Populations
montagnardes du Sud-Indochinois ”, à différencier des Vietnamiens à proprement parler15.
Quant à savoir pourquoi les missionnaires catholiques des Missions Étrangères de Paris sont
allés s’intéresser à de telles populations, perdues et surtout minoritaires, alors que l’immense
société vietnamienne était cible plus tentante sans doute et en tous cas plus aisée d’accès, il faut
rappeler qu’au tout début du XVIIe siècle, les missionnaires chrétiens et notamment catholiques
– Augustins, Dominicains et Franciscains pour la plupart – furent chassés du Japon et se
rabattirent sur l’Asie du Sud-Est. Ce furent pourtant les Jésuites qui parvinrent en 1615 à
installer une congrégation dans le royaume du Dai Viêt ; royaume qui deviendra, après la
colonisation et l’indépendance, le Vietnam. C’est d’ailleurs l’un de ces Jésuites missionnaires, le
père Alexandre de Rhodes, un Avignonnais en charge de la première congrégation installée au
Tonkin – nord de l’actuel Vietnam – qui mettra au point, avec son équipe, la romanisation de
la langue vietnamienne, le qu”c ng!˛ ou actuelle “ écriture nationale ” du Vietnam et qui,
souhaitant implanter durablement le christianisme en Annam, fut aussi, pour partie, à
l’origine, de façon posthume, de la création de la Société des Missions Étrangères en 1663 –
dont fera partie le père Kemlin. Spécialisée pour ainsi dire sur l’Asie du Sud-Est dès sa naissance,

13
Sur la question des rapports entre Proto-Indochinois et Vietnamiens, les dominant numériquement, se reporter
aux trois synthèses de G. Condominas portant, la première sur l’Indochine (1953), la seconde et la troisième sur
l’Asie du Sud-Est (1978, 1991b et c), ainsi qu’à l’ouvrage de J. Dournes (1977). Sur la question des pötao, cf. J.
Dournes (1977). Sur la question des principautés moïs autres que la souveraineté, légendaire, des Jörai sur les
autres nations proto-indochinoises, notamment une principauté maa’, cf. J. Boulbet (1967) et H. Maitre (1912).
14
Cf. D. Léger (1977). Sur le FULRO, ayant pris naissance chez les Rhadé, et l’impact des militaires australo-
américains dans cette société, cf. J. Dournes (1979) et A. Maurice (1995).
15
L’indépendance du Vietnam et donc l’imposition de ce nouveau nom datant d’août 1945. Avant cette date, les
Vietnamiens étaient connus sous le terme d’“ Annamites ”.
elle deviendra la plus importante congrégation missionnaire d’Indochine.
Mais, au commencement, bien que l’empereur du Vietnam acceptât que les missionnaires
européens s’installent en son pays, la politique de ses successeurs changea et les persécutions ne
tardèrent pas, entraînant en 1858 une expédition navale franco-espagnole sur l’ordre de
Napoléon III. Celui-ci , sous l’influence de sa pieuse épouse, l’espagnole Eugénie, était en quête
d’un prétexte pour intervenir. Il souhaitait surtout suivre le modèle anglais d’expansion
coloniale illustré par la prise de Hong-Kong ouvrant potentiellement à l’Empire britannique le
très désiré, énorme, et, à l’époque, presque mythique, marché chinois.
Ces premiers missionnaires furent aussi jusqu’à la fin du XVIIIe siècle quasiment les seuls
représentants du commerce français et de la “ diplomatie ” française16. Du fait de ces
persécutions, une partie de ces missionnaires fuirent notamment la région de Hué, capitale
impériale, pour se réfugier dans les hautes-terres de la région de Kontum, en plein pays “ moï ”,
alors inexploré et délaissé des Vietnamiens qui ne contrôlaient pas cette zone peuplée de sociétés
minoritaires17.
Le terme “ Proto-Indochinois ”, forgé par Georges Condominas et André-Georges
Haudricourt (1952, p. 19)18, désigne ces sociétés autochtones de l’Indochine, c’est-à-dire du
Vietnam, Cambodge, Laos, voire au-delà, celles de la Péninsule indochinoise au sens large :

“ Nous employons ce mot pour désigner les “ Moï ” que l’on appelle souvent Indonésiens,
expression fausse à tous égards, ou Pemsiens (d’après les initiales P.M.S.I. : populations
montagnardes du Sud-Indochinois). ”

Il a été construit sur le modèle “ Proto-Malais ” qui désigne les habitants indigènes de
l’Insulinde. S’il n’est pas esthétique, il a le mérite d’être juste, beaucoup plus que les
appellations précédentes, telles que “ Montagnards ” et même si cette dernière expression est
encore utilisée de nos jours19.
Les habitants autochtones de cette région des hauts-plateaux, Moïs, Monta-gnards ou Proto-
Indochinois possèdent, outre leur origine et leurs langues, différentes de celle des Viets, des
Khmèrs et des Lao, une autre particularité – à quelques exceptions près – qui consiste en la

16
Pour plus de détails, cf. Lê Thanh Khoi (1955 et 1981) et Ph. Devillers et al. (1971), l’ouvrage de G. Taboulet
(1955), ainsi et surtout que l’ouvrage en préparation de G. Condominas (1996, ms).
17
Sur l’histoire particulière de l’implantation des missions chrétiennes, cf. N.-D. Lê (1975), l’Histoire générale de la
Société des Missions Etrangères, du père A. Launay (1894), l’article de J. Guennou, et G. Taboulet (1955).
18
Cependant, comme le fait remarquer A. M. Maurice (comm. personn., 1996), Goloubew écrivait dès 1938 (“ La
maison dongsonienne ”, BEFEO, XIV) : “ Très peu de choses sont connues sur les maisons des Proto-Indochinois
[…] ”.
19
Pour plus de détails, cf. P. Le Roux, “ Avec ou sans trait d’union. Note sur le terme “Indo-Chine” ” (1996). Pour
l’utilisation moderne du terme “ montagnards ” cf. l’ouvrage dirigé par C. Hemmet (1995) et celui de W. Dessaint
et Ngwama Avounado (1994).
pratique de l’essartage ou agriculture itinérante sur brûlis avec longue friche forestière20. En
effet, si la quasi-totalité d’entre-eux cultivent le riz, ils le font pour la plupart en abattant la forêt
primaire ou de repousse, en général sur fortes pentes, difficiles ou impossibles à mettre en
culture selon les techniques de riziculture inondée des plaines et deltas (et à ce titre, il s’agit
bien d’une innovation technique puisque l’on sait que la riziculture de rizière a précédé celle de
l’essart). Cela contribue à renforcer leur image de “ montagnards ”. Les parcelles obtenues de
vive force sont amendées avec les cendres de la mise à feu. Cette agriculture relève de la
riziculture sèche car les plants de riz sont généralement arrosés des seules précipitations
naturelles sans avoir recours à des techniques d’irrigation ou même d’inondation. Cette
caractéristique est importante et va de pair avec d’autres spécificités, relatives, par rapport aux
populations des plaines littorales : les Proto-Indochinois consomment fort peu de saumure, à
l’opposé des Viets par exemple, et ont plutôt tendance à assaisonner leur riz d’essart avec le seul
sel cristallisé21. Les différences sont donc tout autant culturelles qu’écologiques, le deuxième
aspect découlant du premier. Les Proto-Indochinois, dans leur ensemble, offrent une culture
matérielle relativement homogène et nettement démarquée de celle de leur voisins des basses-
terres, tant pour l’outillage, les techniques de production, l’habillement, l’alimentation et
l’habitat22. Celui-ci, le plus souvent sur piliers (cas des Bahnar), plus rarement posé au sol (cas
des Mnong) de même que la maison vietnamienne, va – du moins avant les transformations
issues du contact avec les missionnaires tendant vers des maisons individuelles23 – de la longue
maison découpée en appartements familiaux (cas des Rhadé), aux cases individuelles groupées
autour d’une maison commune (cas des Brou).
Les Proto-Indochinois du Vietnam se divisent, linguistiquement en deux grands groupes : les
Austronésiens (ou Malayo-Polynésiens) et les Austroasiatiques (ou Môn-Khmèrs). Dans le
premier groupe se trouvent notamment les Jörai, surtout connus par les travaux de Jacques
Dournes et de Pierre-Bernard Lafont, les Rhadés, étudiés par Léopold Sabatier et D. Antomarchi,
puis par Albert Marie Maurice et Georges-Marie Proux, et enfin par Anne Howe de Hauteclocque,
les Churu, les Röglai, les Hödrung etc. Le second groupe comprend les célèbres Mnong Gar
popularisés par les travaux de Georges Condominas, les Mnong Biat, Cil ou Rlam étudiés par
Albert Marie Maurice, les Cau Maa’ dont le chantre est Jean Boulbet, les Srê étudiés – encore –

20
Concernant l’essartage, pour une définition claire cf. J. Barrau (1972) et R. Portères (1956) et, pour une
illustration concrète, les travaux de G. Condominas (1957, 1983) et J. Boulbet (1966) ; pour une vue d’ensemble
sur les hauts-plateaux du Vietnam synthétisant les données ethnographiques disponibles, cf. G. Lenclud (1969).
21
Cf. J. Boulbet (1975), A. M. Maurice (1993b) et P. Le Roux (1993).
22
Cf. P. Clément et S. Clément Charpentier (1974, 1975), A. Maurice et P. Huard (1939), et H. Parmentier (1951).
23
Ce qui est le cas dans l’île de Bornéo, pour la même raison, parmi les populations dayak et punan, à la culture
matérielle proche de celle des Proto-Indochinois, par exemple chez les Kenyah de la Malinau (Kalimantan Timur,
Indonésie), les mêmes que ceux visités par P. Pfeffer dans les années cinquante (observation personnelle, 1990).
par Jacques Dournes, les Sedangs étudiés entre autres par G. Devereux24, et enfin – mais cette
liste n’est pas exhaustive – les Bahnars, parmi les plus connus grâce aux nombreux travaux qui
leur ont été consacrés notamment par l’administrateur P. Guilleminet et, avant lui, par les
RR.P. Dourisboure, et Guerlach. Georges Condominas note ainsi (1954, p. 589) que : “ c’est le
bahnar qui, grâce aux Missionnaires installés à Kontum, a été la première langue proto-
indochinoise transcrite (en qu”c ng!˛) et dans laquelle ont été traduits les premiers
catéchismes du Haut-Pays ”.
Dans la branche bahnare du groupe austroasiatique se trouve le groupe reungao, de même
que, chez les Austronésiens, les Hödrung sont apparentés aux Jörai dont ils relèvent. Les
Reungao sont principalement connus grâce aux travaux de Kemlin25. Georges Condominas
(1977, p. 137) souligne :

“ Le groupe proto-indochinois le plus favorisé sur le plan de la recherche demeure sans


conteste la tribu Bahnar. Il le doit à la présence continue, pendant un siècle, sur son territoire, de
la fameuse “ mission de Kontum ”. J’ai dit plus haut l’intérêt que présente la documentation
fournie par les P. Dourisboure, Guerlach et surtout Kemlin. Le travail de celui-ci sur les Reungao
demeure un modèle du genre ; personne n’a pénétré aussi profondément et avec une telle
richesse la mentalité des Montagnards. Ses études constituent le complément indispensable à
l’ouvrage de Maitre, qui, malgré ses qualités, ne peut cependant pas rivaliser avec elles pour la
connaissance de ces groupes humains. ”

Les Reungao possèdent un système de parenté indifférencié. Dans les groupes


austroasiatiques du Nord (Bahnar, Röngao, Sédang…), le système originel des clans a disparu,
remplacé par la famille nucléaire, alors que, dans les groupes austroasiatiques du Sud, les clans
existent encore mais varient dans leur forme d’un système à résidence patrilocale et filiation
patrilinéaire, comme chez les Maa’ et une partie des Mnong, au système opposé emprunté aux
Austronésiens tels les Rhadés dont le système de parenté est sur un régime harmonique à
filiation matrilinéaire et à résidence matrilocale dans lequel les clans sont groupés en deux
phratries exogames (cf. G. Condominas, 1955, rééd. 1980, p. 232 et 1980, p. 196).
D’après l’ouvrage de Franck Lebar et. al. (1964) les Reungao auraient compté près de 3000
individus en 1960 contre environ 6000 en 1947, mais les sources paraissent assez peu fiables.
Notons que cet ouvrage ne mentionne, dans la rubrique bibliographie consacrée aux Reungao,
que le seul article “ Alliances chez les Reungao ” de Kemlin oubliant tant les “ Rites agraires ”

24
Le célèbre sociologue, formé au Musée de l’Homme, a en effet effectué une enquête chez cette société du Vietnam
mais il n’a publié que très peu sur les Sedang (1937, 1947), ayant très tôt tourné son attention vers la psychanalyse
et les Etas-Unis… (cf. G. Condominas, 1977, p. 138).
25
Si l’on excepte, outre l’œuvre de Maitre (1912), quelques travaux de moindre importance comme ceux de Mestre
(1935) et Devereux (1937), ainsi que la mention des Reungao dans les travaux consacrés aux Bahnar par les
devanciers de Kemlin, en particulier Guerlach et Dourisboure.
que les “ Songes ”. Quoi qu’il en soit, il est de fait que les Reungao ne constituent pas l’un des
plus gros groupes de la région, ne serait-ce que par rapport aux Bahnars (estimés à près de
100 000 individus en 1950 par Guilleminet) ou encore par rapport aux nombreux Jörai
(comportant une population s’élevant à la même époque à plus de 200 000 individus). Les
rédacteurs de l’article consacré à la “ collaboration des missionnaires catholiques aux travaux
de l’École française d’Extrême-Orient ” paru dans le Bulletin des Missions Étrangères, indiquent
(p. 554) que “ les Reungao (branche de la tribu des Bahnars) […] [constituent] un groupe
restreint ne comprenant que dix villages ”. Le père Kemlin, en note 3 de la première page de son
essai consacré aux rites agraires des Reungao (1909, p. 493), précise que ces dix villages sont
ceux de Kon Gung, Dak Lô, Dak Mut, Dak Drei, Dak Drang, Hamong Keuta, Hamong Keutôl,
Kon Heungo, Peulei Krong et Peulei Deudrâp.
La question est posée par F. Lebar et al. à propos de l’existence des Reungao en tant que
groupe : l’ouvrage rappelle que si Kemlin, puis Guilleminet26 (1941, 1952), les perçoit en tant
que sous-groupe bahnar27, George Devereux (1937) considère que les Reungao sont issus d’un
mélange bahnar-sedang, alors que Jacques Dournes (1950) penche pour la spécificité du groupe
reungao par rapport au groupe bahnar. Le père Daniel Léger, missionnaire ayant vécu vingt
ans, de 1947 à 1967, parmi les Sedang et les Bahnars, et qui a consacré une partie de sa vie à
l’étude des Bahnar-Jölöng, écrit (1977, p. 59) :

“ La tribu bahnar comprend sept principaux sous-groupes ethniques : les Bahnar de


Kontum, les Bahnar-Röngao, les Bahnar-Jölöng, appelés Bahnar de l’Ouest ; les Gölar, les Hagu,
les Tölo et les Alakông, nommés Bahnar de l’Est ; s’y ajoutent quelques groupuscules situés entre
le col de Mang-Yang et la province du Binh Dinh ; 85 000 habitants environ composent
l’ensemble de tous ces groupes humains ”.

Dans un document antérieur (1974, p. 27), le père Léger avait publié des extraits inédits du
Dictionnaire bahnar-français de P. Guilleminet et J. Alberty, comportant, outre une partie
alphabétique, un regroupement des termes en tableaux et une troisième partie exposant les
principales activités des Bahnars. Dans ce document consacré à la maison bahnare, Guilleminet
et Alberty parlaient de Bahnars de l’est et de Bahnars de l’ouest, et D. Léger y précisait en note :

“ Les Bahnar de l’est comprennent les sous-tribus Hagu (à la place de Bönöm, de Bahnar de
Kon Jiri), les Gölar, les Alakông et les Rölo […]. Les Bahnar de l’ouest englobent les sous-tribus

26
En 1951 (p. 209) il écrivait dans le BEFEO que les Reungao sont “ un groupe peu nombreux situé au nord-ouest
de Kontum constituant une sous-tribu bahnar apparentée aux Sedang ”. En 1952 (p. 92), dans son Coutumier de
la tribu bahnar…, il écrivait en note : “ [Les] travaux scientifiques [de Kemlin] sont les plus précis qui aient été
publiés sur les populations de la région (les Ro˛ngao sont une tribu très proche des Bahnar par les mœurs) ”.
27
Mais cela ne l’empêche pas de les spécifier comme Reungao dans ses articles…
Bahnar Röngao, Bahnar de Kontum-ville et les Jölöng. ”

Sans doute, le père Léger entendait-il principalement cette appartenance sur le strict plan
linguistique et non sur celui de l’identité à proprement parler ; lui-même ayant ethnographié,
non pas les Bahnars mais les Bahnars-Jölöng, que l’on pourrait nommer aussi Jölöng, voisins
immédiats des Reungao (cf. carte 2, annexe).
David Thomas (1962), linguiste américain du Summer Institute of Linguistics, ayant
travaillé sur la langue reungao, place celle-ci dans le sous-groupe bahnar du sous-groupe
bahnarique relevant du groupe austroasiatique. Ce que l’ouvrage de Lebar ne précise pas c’est
que tant Guilleminet, Dournes, Léger que Kemlin ont passé un temps très long sur le terrain,
avec la pratique de la langue et que les suivre dans leur hypothèse paraît donc la voie la plus
sûre ; d’autant que les travaux linguistiques de Thomas viennent appuyer celle-ci, ainsi que les
travaux de l’équipe de l’Atlas ethnolinguistique de l’Asie du Sud-Est, notamment ceux de Michel
Ferlus. Celui présente (1974, p. 21, cf. carte 1 en annexe) au terme de longs travaux collectifs de
comparaison, une carte fort éclairante sur la question et qui, pour l’heure, fait autorité, plaçant
les Reungao en tant que sous-groupe distinctif de l’ensemble “ Bahnar-Sedang ” ou north-
bahnaric. Par conséquent, il est plus que probable que les Reungao constituent un sous-groupe
bahnar suffisamment différencié pour être connu sous son propre nom, mais suffisamment
apparenté aux Bahnars pour que la relation étroite, au moins sur le plan linguistique, qui existe
entre les deux groupes, soit énoncée.

Le R. P. Kemlin

Fils d’Édouard Kemlin et de Thérèse Philomène Deschamps, Marie Joseph Émile Kemlin
naquit à Lusse, canton de Provenchères, dans le département des Vosges, sur la frontière de
l’Alsace alors annexée par l’Allemagne, le 17 juin 1875 à 20 heures, à domicile, dans une
famille modeste et honorable (Photographie n° 5, vue de Lusse).
Les prénoms du père Kemlin posent un problème puisque, tant ses travaux scientifiques,
pour ne parler que d’eux, que les écrits d’autres auteurs parlant de sa vie ou de son œuvre, font
référence indifféremment soit à Émile soit à Joseph, soit à Joseph-Émile, soit à Marie, soit à
Marie-Joseph, ou à un simple J. E. voire M. J.
Pour simplifier, j’ai préféré me reporter au prénom choisi par le premier intéressé, Kemlin
lui-même, dans la forme de sa signature usuelle retrouvée au bas de ses lettres à sa famille,
c’est-à-dire Émile (Illustration. Fac-similé d’une lettre autographe de Kemlin à son oncle, en
date du 4 août 1914).
Très tôt orphelin de sa mère, c’est pourtant d’elle qu’il confie tenir sa vocation dans une
lettre à sa cousine Maria Marquaire-Deschamps, le 15 février 1910 :
Ma chère mère est morte, j’avais 7 ans, et je me regarde cependant comme redevable à elle de
ma vocation. Aussi loin que remontent mes souvenirs, il me semble avoir de tout temps rêvé aux
missions.

Bien des années après, le 4 mars 1920, dans une lettre adressée à Paul Deschamps, l’un de
ses cousins, le père Kemlin confiera sa douleur muette :

J’ai reçu un mot qui m’annonçait qu’Élise était atteinte d’une nouvelle fluxion de poitrine.
Comme derrière je n’ai rien reçu, j’en conclus que cette fois encore elle s’en est relevée. J’en
remercie le Bon Dieu pour toi et surtout pour tes fillettes. C’est si dur d’être privé de mère de
bonne heure.

Ordonné prêtre le 26 juin 1898, au terme d’une enfance et d’une jeunesse studieuses,
marquée – déjà – par une puissance de travail peu commune, le père Émile Kemlin
s’embarquait en août pour la Mission de Cochinchine orientale (Photographie de Kemlin, n°
4). Il commença par l’apprentissage du vietnamien, près de Saigon, puis fut emmené quelques
mois après, par le père Vialetton, Supérieur de la Mission des Sauvages, qui l’avait choisi, s’y
connaissant en hommes. Le père Kemlin qui s’était vite attaché à ses premières ouailles
vietnamiennes ressentit quelque peine à les quitter et des témoins mentionnent qu’il en eut les
larmes aux yeux. Un autre jeune prêtre, le père Jeanningros, s’offrit alors pour partir à sa place
mais Kemlin se reprit et s’en fut vers son nouveau secteur. Il passa quelque temps chez le père
Irigoyen, à Kon-Trang, à apprendre la langue des Reungao puis, du fait de ses étonnants progrès
dans cette langue – l’une des conditions de son excellent travail futur d’ethnographie –, on lui
confia le nouveau district de Hamong, réputé comme l’un des plus difficiles de la mission, dont
il fut le premier titulaire, et dans lequel il resta jusqu’en 1912. Il s’employa de tout l’élan de sa
jeunesse, avec zèle et entrain, à son nouveau poste et très vite en recueillit les fruits.
Mais c’était aussi l’époque où l’administration française s’implantait dans sa relativement
nouvelle colonie, à la suite des missionnaires à qui elle avait jusqu’alors laissé le défrichage
pionnier de ces régions insoumises des hauts-plateaux. Les autorités coloniales envoyèrent tout
d’abord le Garde principal Robert chargé de créer un poste de milice au nord du district du père
Kemlin, sans porter véritablement attention au contexte local, notamment la fragilité de
l’équilibre existant dû à la seule action missionnaire, et sans préjuger des conséquences de cette
politique qui eut été mieux inspirée d’être menée avec plus de précautions.
Les Reungao, libres jusque-là, furent réquisitionnés par Robert pour fournir travaux de force
et matériaux de construction ; situation qui engendra un vif mécontentement parmi la
population indigène. Les villageois en voulurent non seulement à Robert et à son escorte mais
également aux missionnaires, pour ce que ces derniers ne s’opposèrent pas à cette entreprise,
convaincus et partisans de cette politique ou bien contraints et forcés.
L’hostilité ne fit que croître, s’étendant au-delà de l’aire des Reungao christianisés pour
atteindre celle des Reungao restés animistes jusqu’au pays des Sedangs insoumis28, plus au
nord. C’est ainsi que le 17 mai 1901, une centaine de Sedangs attaquèrent le poste tenu par
Robert, tuant celui-ci à coups de lance et quelques uns de ses miliciens vietnamiens, saccageant
tout avant de se replier. Le père Kemlin porta secours à Robert mourant, l’évacuant et sauvant ce
qui restait intact des installations du poste.
Ce premier succès les ayant enhardis, et les Proto-Indochinois restant, comme toujours,
farouchement attachés à leur liberté et à leur indépendance, les Sedangs menacèrent également
Kontum, le centre de la Mission des Bahnars. La résidence du père Kemlin, lequel habitait à ce
moment-là le village reungao de Dak Drei, fut attaquée par trois fois sans succès. Le
24 novembre 1901, les Sédangs pénétrèrent à nouveau dans la place mais se heurtèrent à un
détachement de trente miliciens venus à marches forcées de Quinhon pour protéger la Mission.
L’attaque fut arrêtée par la ferme résistance de Kemlin et des miliciens, et les Sédangs – qui
comptaient dans leur rang des Reungao dont le chef du village de Dak Drei lui-même –
refluèrent après un échange de coups de feu. Cette réaction des Sédangs, des Reungao et, plus
largement, des Proto-Indochinois, ne doit pas nous leurrer : loin d’être des “ méchants et
sauvages ” ingrats envers leurs bienfaiteurs missionnaires, ils se battaient d’abord pour préserver
leur dignité et leur liberté.
Les princes siamois, laotiens, cambodgiens et vietnamiens n’avaient jamais réussi à
soumettre ces populations de l’Hinterland à leur autorité sinon par le moyen, bien ténu, des
tributs annuels, plus virtuels que réels. Cette réaction des Sedangs et des Reungao exprime par
ailleurs la qualité de ceux qu’on tentait de soumettre et qui, bien longtemps après, allaient
former le fer de lance de la Garde indochinoise, en étant présentés comme les meilleurs et les
plus fiables alliés des Occidentaux, tant Français qu’Américains, au même titre que les fameux
Méos du nord – les Hmongs –, dans la lutte contre le Vietminh puis le Vietcong, tant sur le plan
de la loyauté politique que sur celui de la valeur militaire29.
De même, le père Kemlin, contre-attaquant avec les miliciens, préservait sa propre vie. A
situation exceptionnelle attitude exceptionnelle et s’il est vrai qu’on attend d’un prêtre qu’il
bénisse plutôt qu’il ne pourfende, on ne lui impose généralement pas – au moins pour nos
contemporains – de risquer sa vie pour simplement dire la messe. Comme en témoigne le père
Thomann, l’un des successeurs du père Kemlin à la mission de Kontum, en réponse à l’Abbé
Marquaire qui lui demandait s’il était vrai que le père Kemlin avait dû dire sa messe avec le fusil

28
C’est-à-dire au tout début de la pacification, laquelle ne fut accomplie qu’au milieu des années trente, époque de
la révolte du Yen-Bai (6 février 1930) considérée – en tous cas par R. Dumont (1995, p. XXXIV) – comme le
symbole du début de l’insurrection vietnamienne pour l’indépendance, ironie du sort. Rappelons que l’expédition
d’Henri Maitre, premier explorateur européen de l’Hinterland, n’eut lieu que plusieurs années après. Maitre fut
assassiné en août 1914, chez les Mnong, autre groupe proto-indochinois (cf. A. Baudrit, 1936, 1941, 1943 ; M.
Gerber, 1943 ; A. M. Maurice, 1983, 1991 ; P. Le Roux, s.p.).
29
Cf. A. M. Maurice (1995).
auprès de l’Autel :

Kontum, le 13 juillet 1967


[…] Ce que tu m’as dis est juste en gros. Mais il faut savoir que ces fusils missionnaires
faisaient plus de bruit que de mal. Ici, chez moi, à Kon-Bolan, on a longtemps adoré un “ fusil
missionnaire ” ramassé dans je ne sais quelle bataille où le père annamite d’alors tirait en l’air
et se sauvait à toutes jambes […].
Durant toute cette période trouble et dans une relative insécurité, le père Kemlin, outre ses
enquêtes ethnographiques, poursuivait son œuvre d’apostolat et se présentait aussi comme un
bâtisseur, construisant sa résidence centrale qui faisait l’admiration des visiteurs, envisageant
aussi la construction d’une église ; projet pour lequel il réunit les matériaux, notamment des
pièces de bois, qu’il entreposa dans l’espace libre sous les pilotis de sa résidence. Aux alentours
de mars 1902, une expédition punitive fut organisée par les autorités coloniales ; colonne à
laquelle se joignit le père Kemlin pour tenter de raisonner les villageois et d’éviter une effusion
de sang. Dans le même temps, et en représailles, sa résidence et tous les matériaux entreposés
pour la construction de l’église étaient incendiés par un parti rebelle, comme en témoigne Sœur
Eugénie, sa tante, dans une lettre adressée à Justin Marquaire, cousin de Kemlin, après la mort
de ce dernier :

Le 22 novembre 1925
M. Descrouils ne relate pas dans la petite notice qu’il a faite dans la Semaine religieuse de St-
Dié comme on a fait brûler sa maison parce qu’il avait fait bâtir une maison pour un Résident
français. Il m’a envoyé le croquis. Elle était magnifique celle qu’on lui a brûlée. Elle ne lui
coûtait que 1000 francs parce qu’il ne payait que les ouvriers pour couper le bois. On a la
permission de couper ce que l’on veut. Ici pour en faire une semblable, elle aurait coûté 100 000
francs. Il avait les planches dessous la maison car elle était bâtie sur pilotis. Pour une église.
Pour cette raison, on l’a emmené pour être interprète afin d’y mettre le feu. Tout a été brûlé. Il
n’avait plus rien pour dire sa messe. Il allait chez ses confrères pour célébrer.
Le père Kemlin a essayé de faire comprendre à ses gens qu’il n’y était pour rien (lui un
blanc) dans la venue d’un blanc. Le pays devenu colonie française, on devait lui faire une
habitation. Ce sont ceux de la tribu voisine qui ont pris la défense en venant tuer le Résident et
brûler la maison du père et son église.

La lettre de Sœur Eugénie nous donne une précision importante : quelqu’un, militaire ou
rebelle, aurait convaincu le père Kemlin d’accompagner l’expédition punitive dite Mission
Castanier chargée d’établir la paix avec les Moïs, en tant qu’interprète, capacité qu’il possédait
assurément, de manière à l’éloigner volontairement de sa maison. La question reste de savoir si
cette ruse avait pour objectif de permettre l’incendie en éloignant le maître de maison dont
l’autorité naturelle aurait alors empêché l’action, ou bien si elle avait pour souci de protéger sa
vie… Quoi qu’il en soit, ce témoignage d’un proche parent de Kemlin indique le peu
d’implication dans l’expédition punitive du père sinon comme une victime, au moins pour
apporter son secours de médiateur et d’interprète. Mais, à la manière du fameux poème de
Rudyard Kipling, le père Kemlin, loin de se décourager, recommença patiemment l’ouvrage
défait et la première pierre de l’église de Kontum cette fois – autres lieux, autres mœurs, il est
vrai – fut bénite solennellement à Pâques 1913 par Mgr Jeanningros, évêque coadjuteur de
Kontum – le même homme qui, vers 1898, se proposait à la place de Kemlin pour la Mission des
Sauvages.
La paix revenue, le père Kemlin continua son œuvre d’évangélisation, sans être menacé,
preuve comme quoi la cause des attaques était extérieure à son état et à son œuvre
missionnaires. Il obtint la conversion des villages de Kon Gung, de Dak Kang et de Polei Arang.
Dépassant sa circonscription, il élargit son champ d’action au-delà de la rivière Bla, qui,
délimitait son district au sud, et fonda en 1909 le village chrétien de Polei Dodrap qui allait
devenir le centre d’un nouveau district de la Mission de Kontum. Le village voisin de La Klau,
dont les habitants l’avaient mis au défi de les convaincre, se convertit lui-aussi la même année.
Mais, comme le rappellent les écrits des témoins de la Mission de Kontum, la conversion des
habitants des Hauts-Plateaux ne signifiait pas l’abandon immédiat, pur et simple, des croyances
animistes traditionnelles. C’est pourquoi, considérant la conversion comme un commencement
de dialogue, le père Kemlin, de même que les autres prêtres, consacrait énormément de temps à
l’écoute et à la compréhension des Moïs, et donc au décryptage de leurs croyances et de leur
structure sociale. C’est ainsi, tous les témoignages concordent, que le père Kemlin parvint à
synthétiser et à rédiger ces trois articles formant monographie sur les Reungao (Photographie
de Kemlin, n° 3). C’est aussi la seule méthode possible de l’ethnologie laïque et scientifique
pour prétendre à une connaissance minimale d’une société exotique et différente. La qualité des
résultats acquis relevant principalement d’une question de degrés dans l’implication, dans la
participation et dans la compréhension des mécanismes et institutions structurant cette société,
que l’on soit ethnologue de profession ou ethnographe d’occasion comme le furent tant
d’officiers ou de missionnaires. Pour exemple de ce type de décryptage, écoutons cet éclairant
propos rapporté de façon humoristique par un témoin chez les Moïs au début des années vingt :

“ Je vois un courrier qui s’en va, les lettres dans un sac et tenant à la main une drôle de
baguette. Intrigué, je regarde. On a attaché à ce bout de branche une braise, une plume et un
piment. Pourquoi ?… Je m’informe. Cela veut dire que les lettres sont urgentes et que les
courriers, qui se passent le sac et la baguette de relais en relais jusqu’à la côte, devront se presser,
comme s’ils marchaient sur des charbons ardents, voler comme l’oiseau, courir comme si…
comme si un piment les y poussait.
Et, contraste extravagant, il y a le bureau du télégraphe à trois pas. D’un côté Morse, et de
l’autre le Dernier des Mohicans… ” (Roland Dorgelès, 1925, rééd. 1994, p. 229).

C’est là que l’œuvre du père Kemlin doit être entendue non pas tant comme celle d’un prêtre
missionnaire, ni même d’un ethnologue, mais plutôt comme celle d’un individu particulier
prénommé Émile, doué de patience, possédant un don pour les langues et une réelle curiosité
ainsi qu’un certain talent d’écrivain puisqu’en ethnologie, ce n’est pas tout d’apprendre, il faut
aussi rendre à la communauté scientifique sous la forme de textes imprimés qui sont autant la
présentation des données brutes que celle des synthèses et analyses résultantes.
En effet, si Kemlin ne fut pas le seul missionnaire à s’essayer à l’ethnologie, et c’est un bien,
il fut l’un des rares à en sortir, nous l’avons vu, une œuvre de grande qualité. L’un des
directeurs de l’École française d’Extrême-Orient lui rendit cet hommage :

“ Nous étions fiers de compter parmi nos correspondants cet esprit remarquable qui avait
analysé avec tant de pénétration la mentalité confuse et compliquée des populations sauvages au
milieu desquelles il accomplissait son ministère. Ses travaux sur les Reungaos publiés dans notre
Bulletin ont recueilli les suffrages des meilleurs juges et peuvent être proposés comme modèles à
ceux qui entreprendront à l’avenir des études de ce genre. ” (cité dans [Anonyme], s.d., Le Révé-
rend père Émile Marie Joseph Kemlin, Provicaire de la Mission des Bahnars (1875-1925),
Quinhon, Imprimerie de la Mission, p. 4 et p. 5).

L’activité inlassable du père Kemlin vint une première fois à bout de sa résistance. Une
dysenterie intraitable l’obligea à quitter Kontum et le Vietnam en 1904 pour Hong-Kong où la
Société des Missions Étrangères de Paris possèdait un sanatorium. Il y demeura jusqu’en juin
1905 mais ce séjour ne fut pas suffisant et Kemlin revint à Kontum à moitié guéri seulement
(Photographie de Kemlin, n° 2). Peu après son retour il s’installa, en 1909, toujours parmi les
Reungao, de son propre chef, à Polei Dodrap, secteur redouté des autres missionnaires, où il fit
bâtir sa première église. Il y demeura jusqu’en 1912 :

Sans cette offre, à cause de ma petite santé, jamais mon Supérieur n’aurait pensé à moi.
Seulement je voyais que ce poste effrayait un peu mes confrères, à cause de la multiplicité des
langues (quatre) dont pourtant la connaissance est nécessaire. Quelquefois je me prends à le
regretter car mes anciens paroissiens sont mécontents de mon départ et, avec mon successeur, ils
font presque la grève. J’espère qu’avec le temps, ils s’habitueront à leur nouveau curé. Pauvres
gens, notre point de vue surnaturel les dépasse : quitter une belle maison, une petite chapelle, un
beau jardin pour un taudis ; ils n’y voient goutte et crois que je leur en veux. J’aime à croire
qu’avec l’aide du Bon Dieu, aide qui ne saurait manquer, tout s’arrangera. (Lettre à Justin
Marquaire, 15 février 1910).

[…] La journée est tellement occupée, j’ai tellement de soucis ; ma bâtisse, mes chrétiens,
des affaires que, le soir, je n’en puis plus et je me jette sur mon lit aussitôt la prière faite. Pour
comble voilà que, par défaut de personnel dû à la rareté des missionnaires qui sortent de Paris et
qui ne suffisent pas à remplacer les décès, on vient de me charger de mon ancien district en plus
de celui que j’ai. Cela me fait 35 kilomètres à parcourir. Quand je suis à un bout, je puis être
appelé aux malades à l’autre bout. Comme un malheur n’arrive jamais seul, juste mes quatre
chevaux sont emportés par une épidémie […]. (Lettre à Maria Deschamps-Marquaire, 3
septembre 1910).

C’est à cette époque que le père Kemlin rencontra, nous en sommes sûrs, l’explorateur Henri
Maitre lors du deuxième séjour en Indochine de ce dernier. Henri Maitre avait en effet organisé
une expédition au pays des Bahnars après la traversée du plateau occidental des Jörai. Après
avoir atteint Plei Tur, poste récemment implanté dans le pays jaraï, Maitre s’orienta vers l’ouest
pour rejoindre Plei Ku, vérifiant au passage l’exactitude des relevés de 1891 du capitaine Cupet
dans le cadre de la Mission Pavie. Le délégué de Plei Ku, un certain Cologon, accompagna
Maitre et son groupe jusqu’à Kontum où les pères Guerlach et Kemlin le reçurent pendant douze
jours. Maitre profita pleinement de ce séjour pour recueillir le maximum de données sur la
géographie et l’ethnographie de cette région. Le père Kemlin accompagna ensuite Henri Maitre
dans son voyage de retour à travers le pays des Halang et des Jörai du nord-ouest. Ils obliquèrent
vers le Laos, franchissant un labyrinthe de massifs montganeux et prirent au sud-ouest. Arrivés à
Plei Rman, Henri Maitre fit des adieux émouvants au père Kemlin, qui s’en retourna lui vers le
pays reungao, et poursuivit sa route30. Henri Maitre écrit ainsi dans son ouvrage majeur, Les
Jungles Moï :

“ C’est à Pl. Rmam que me quitte le Père Kemlin ; depuis huit jours que nous vivons
ensemble, j’ai pu goûter tout le charme de son attrayante compagnie ; sa merveilleuse
connaissance des dialectes et des mœurs en fait un compagnon étonnamment précieux et, en
même temps qu’un charmant ami, j’ai le regret de perdre en lui un inappréciable collaborateur.
Il me laisse, comme guide, un Halang de P. Meo, fort intelligent, parlant sédang, jaraï, divers
dialectes intermédiaires, laotien et quelque peu annamite ; il connaît, en outre, très bien le
district et me conduira jusqu’à la Sé San. Une dernière fois, j’embrasse le Père Kemlin, très ému
de cette séparation pourtant prévue ; nos destinées nous entraînent ; lui va retrouver ses chrétiens
et ses sauvages chez lesquels il vit depuis une douzaine d’années ; moi, je m’en vais vers
l’inconnu, vers de nouvelles populations, vers de nouvelles aventures. Le torrent de la vie roulera-
t-il à nouveau côte à côte, dans le tumulte de son cours, les galets de nos destinées ? Dieu seul le
sait ! Et, très attendris, nous nous éloignons chacun dans la forêt pour nous perdre bientôt dans
les fûts noirs… ” (1912, p. 243).

Il est d’ailleurs intéressant de noter que ces deux fortes personnalités de l’Indochine,
partageant le même amour de ces autochtones proto-indochinois et donc étant logiquement
tous deux intéressés à leur bien-être futur, et en tous cas motivés pour tenter de répondre à cette
question, ont ultérieurement à cette rencontre proposé chacun une solution différente voire
complètement opposée. En 1914, dans son dernier rapport, Henri Maitre indiquait :

30
Cf. A. M. Maurice (1983, p. 11).
“ Pour ce qui est des Annamites, fléau de la région moï, j’ai pris de concert avec M. Le
Délégué de Djiring, les mesures propres à enrayer leurs déprédations ; tout Annamite trafiquant –
et par conséquent pillard, voleur et esclavagiste – sera reconduit à mon collègue qui s’en
chargera. Car, les méfaits dont se rend coupable le Cambodgien dans l’hinterland, ne sont que
péchés véniels à côté de ce qu’y perpètre l’Annamite. Toute région moï ou s’infiltre ce dernier est
vouée à une désorganisation prochaine ; l’Annamite est le ver rongeur qui s’insinue ; il vend à
crédit en tentant la naïve faiblesse du Moï, prend à caution hommes et enfants et arrive en peu de
temps à endetter des villages entiers, à semer la discorde, à amputer les familles, voleur ou
receleur, instigateur et complice de piraterie à main armée, il sème la ruine, la corruption avec
son alcool et sa syphilis et il vaut mieux pour un canton moï recevoir la visite d’un typhon ou de
la peste que celle d’un commerçant annamite d’Annam ou de Cochinchine. L’on a vu à quel état
le lent, mais sûr, envahissement annamite de l’hinterland de Cochinchine a réduit les
malheureux Stieng de la haute rivière de Saigon.
Aussi, suis-je décidé à protéger, coûte que coûte, ma circonscription contre cette lèpre dont
elle est d’ailleurs, jusqu’ici, heureusement préservée. ”

Alors que le père Kemlin écrivait, lui, en 1925 (p. 3) :

“ En fait, le Moï, pris dans sa nature et dans son milieu, est incomparablement plus loin que
l’Annamite de notre civilisation. Plus on l’étudie de près, plus on s’aperçoit que le tréfonds de sa
mentalité est encore bien inférieur à ce qu’il paraît. […] Espérer qu’il atteindra d’un bond le
sommet de l’échelle des valeurs humaines, c’est pure utopie ; vouloir l’y contraindre, c’est le
condamner au sort du Peau-Rouge, de l’Iroquois et autres, écrasés lentement mais sans arrêt,
par le “ rouleau compresseur ” de la colonisation américaine. Or telle n’est pas la méthode qui a
valu à la France une place hors pair parmi les nations colonisatrices Les écoles de toute nature,
salutaires à quelques individualités, n’empêcheront pas la masse d’être épouvantée par la
hauteur du but à atteindre ; il faut au Moï une main amie qui l’élève vers les degrés
intermédiaires… Il lui faut la collaboration de l’Annamite. […] [Les avantages] se résument
dans la mise en valeur économique du pays par l’agriculture, le commerce, l’industrie, dont
découlent d’autres bienfaits de moindre importance dont il sera question plus loin. Or cette mise
en valeur, la colonisation annamite peut seule la procurer. […] [La conclusion] s’impose avec
la force de l’évidence, toute en faveur de l’immigration annamite. […] Que l’Annamite
s’implante dans le pays et l’on verra disparaître en peu de temps l’état presque continu de disette,
et ces années si fréquentes de vraies famines, durant lesquelles, pendant 5 à 6 mois, le
malheureux indigène n’a plus, pour sustenter une mourante vie, que les racines et tubercules de
la forêt et les glands de certains arbres. ”

Kemlin, dont la vue est ici pragmatique, n’était peut-être pas pour autant si en désaccord
avec l’avis romantique et moral de Maitre, énoncé en 1914, qui raisonnait principalement d’un
point de vue culturel. Le père Kemlin, dans sa brochure et à sa manière semble avoir aussi pour
souci le bien-être futur de ces populations poussées de force dans le système de valeurs imposé de
l’Occident. Qui de Maitre ou de Kemlin est le plus naïf ? Difficile de répondre.
A Kontum, et plus largement dans toute l’Indochine de l’intérieur, les conditions matérielles
de vie étaient éprouvantes, surtout pour des prêtres qui ne rentraient jamais au pays, sinon pour
n’en plus repartir, et les rares colis de vivres venus de France apparaissaient donc bienvenus :

Kontum, le 15 septembre 1922


J’attendais toujours le fameux colis, enfin il est arrivé il y a 3 semaines. Mais dans quel état.
Les colis postaux de 10 kilos ne circulent pas dans l’intérieur, ils n’arrivent qu’aux ports de
débarquement et là où il y a des chemins de fer. Nos convois sont acheminés de Quinhon à
Kontum tous les mois.
Pour cette fois, notre convoyeur étant malade, on a attendu 2 mois si bien que le colis est
resté 2 mois et 1/2 en souffrance à Quinhon. Les colis de 5 kg sont eux acheminés dans tous les
bureaux de poste, on les a donc aussitôt. Je me hâte de vous dire que le jambon était en parfait
état et que la bouteille de kirsch était délicieuse. On a ouvert le tout juste un jour de réunion et
tous ont bu à notre santé. Mais les sucreries hélas ainsi que le beurre il ne fallait plus y penser
Le voisinage du jambon avait tout ranci à tel point que même mes petits sauvageons n’ont
pu y toucher. Les gâteaux et les gaufrettes ne traversent la mer que dans des boîtes soudées. […]
Donc merci. On va arriver à la saison du café, je me propose bien de vous rendre les dragées.
[…]. (Lettre à Paul et Élise Deschamps).

En échange, les missionnaires, qui ne voulaient pas être de reste, envoyaient au pays des
colis postaux de café, denrée rare en métropole. Comme le rappelle Roland Dorgelès dans Sur la
route mandarine à propos de la dureté de vie offerte aux premiers colons, à l’époque, non
seulement les missionnaires mais tous les pionniers européens en Indochine avaient une vie
plutôt frugale et risquée.
Dans une lettre à Paul Deschamps en date du 4 mars 1920, le père Kemlin, d’un bon mot,
résumait ce qui vient d’être dit : “ je ne te parle pas de ma vie. Je serais bien en peine de te la
décrire. Un mot la définit : 36 métiers, 40 misères… ”.
Le père Kemlin montra, tout au long de son sacerdoce, les mêmes qualités – que l’on
retrouve dans son œuvre scientifique – : une volonté ferme et une ténacité méticuleuse, basées
sur une compréhension lucide du contexte de l’objet considéré, société exotique à ethnographier
et à convertir ou au moins à soulager de ses maux, dans la mesure de ses moyens et selon les
vues d’un missionnaire français de cette époque, non dénué d’une certaine naïveté confinant
parfois à de l’ethnocentrisme ; attitude générale à l’époque et donc difficile à juger avec le
regard et la norme de notre temps. C’est ainsi qu’il confie, comme lassé, blasé, mais exprimant
cependant toujours sa révolte :

Kontum, le 15 septembre 1922


[…] En ce monde c’est toujours ceux qui grugent qui ont raison. Il faut en prendre son
parti. Cela se passe ainsi sur les deux hémisphères, par ici c’est encore plus vrai qu’ailleurs.
[…]. (Lettre à Paul et Élise Deschamps).

Les difficultés ne manquèrent pas. Pour illustrer la pertinence du jugement porté par
Charles Simonnet, comme quoi Kemlin était tant savant ethnologue, bon missionnaire
qu’habile politique, rappelons-nous son savoir-faire en cette dernière matière lors des
soulèvements de 1901-1902, mais surtout sa réaction lorsque, à partir de 1907, certains
administrateurs, suivant le courant anticlérical de l’époque, s’opposèrent par tous les moyens en
leur pouvoir à l’action missionnaire, cherchant à entraîner les ouailles indigènes de la Mission
de Kontum à l’apostasie, poussés en cela par leur propres croyances sans doute : l’un d’entre ces
résidents est mentionné dans l’un des documents cités comme appartenant aux Loges
d’Extrême-Orient31 ; un autre est présenté par Kemlin lui-même comme protestant dans une
lettre à son cousin Justin Marquaire, en date du 3 septembre 1910 :

[…] J’aime beaucoup en effet vous lire, on trouve chez vous une étoffe de lutteur que j’ai
rarement vu dans nos Vosges. On voit que vous êtes fils de zouave pontifical, bon sang ne saurait
mentir. Je suis complètement de votre avis sur le Parti progressiste. C’est le parti des timides. De
ces gens-là il n’y a rien à attendre. Ce qu’il nous faut ce sont des catholiques convaincus et qui
osent. […] Mais je parle comme si je comptais parmi vous. Hélas ! plus de 10 000 kilomètres me
séparent de vous. Cela n’empêche pas que l’esprit dans cette colonie est exactement à la même
température que celui de la métropole. Les ordres arrivent du ministère des Colonies. Ici on les
exécute. C’est ainsi qu’on vient d’appliquer les lois fiscales d’abonnement sur les biens des
missions. Puis, de France, nous arrivent chaque année une dizaine d’élèves administrateurs
sortant de l’école coloniale. Cette jeunesse a été éduquée spécialement contre l’œuvre des
missions. Ils sont tous de parfaits athées et comme ce sont ces gens que l’on place pour
commencer dans les postes excentriques comme là où je suis, il est facile de comprendre quelle
bienveillance nous pouvons attendre de ces gens. Le huguenot que nous avons ici est atteint
d’une vraie missiophobie. Il n’est pas de tracas qu’il ne nous suscite. Il a poussé nos catholiques
à l’apostasie et c’est le chef apostat qu’il a nommé grand homme dans tout le pays. Je dois dire
qu’à Hué, on en a plein le dos mais comme c’est un homme très actif, très habile et surtout qu’il
est solide sur le grand trépied ! on n’ose pas le lâcher. Heureusement que là on l’arrête plutôt.
C’est grâce à ce piano imposé qu’il ne nous a pas fait tout le mal qu’il voulait. Il avait parié nous
faire tous partir du pays et faire même expulser l’un d’entre nous de la colonie. J’étais
précisément la victime désignée. Là-dessus il a dû rester tranquille. […] Partout la vie est un
combat. Ce n’est pas pour rien qu’on nomme l’église de cette terre l’église militante et au ciel il
n’y aura de couronne que pour les vrais combattants comme vous.

Cette affaire, qui dura jusqu’en 1913, semble avoir beaucoup atteint le père Kemlin qui fit

31
[Anonyme], 1925b, p. 172.
cependant front jusqu’à obtenir gain de cause, tant du côté administratif puisque les pressions et
les actions cessèrent, que du côté indigène : de nombreux villageois ayant renié leur foi –
souvent poussés à le faire pour s’attirer les bonnes grâces du haut fonctionnaire et de son
administration, parfois car l’emprise catholique était superficielle – se présentèrent à nouveau
au baptême et à confession ; ainsi des villageois de Dak-Giar, Pklech, Dak-Drei et Kon-Bolok.
Cette complication supplémentaire imposa un surcroît de travail conséquent au père Kemlin et
aux autres missionnaires, épuisant leurs forces et leur santé déjà bien altérée par un si long
séjour au Vietnam dont le climat tropical est néfaste aux Européens et dans des conditions
sanitaires bien sommaires. A nouveau gravement malade, éprouvé par la lutte menée contre les
apostats, le père Kemlin partit en novembre 1912 pour un second séjour à Hong-Kong, dont il ne
revint qu’au printemps 1913 ; époque à laquelle il reprit sérieusement ses tournées en pays jörai
entamées les années précédentes. Ce problème des longs séjours avait été d’ailleurs abordé par
Kemlin, conscient de la condition difficile imposée aux missionnaires. Dans une lettre datée de
1920, il en parlait en ces termes à son cousin Paul Deschamps :

Qui-Nhon, le 4 mars
Merci de tes cartes. Ce sont les premiers documents de ce genre que je reçois. Je vois que mon
pauvre Herbeaupaire est en bien piteux état. Cela m’enlève le désir de le revoir. J’aurais trop mal
au cœur. On dit pourtant que nos évêques missionnaires se réunissent à Rome pour adoucir un
peu notre exil volontaire et nous donner les moyens de revenir une fois tous les dix ans. Que
décideront-ils ? Je n’en sais rien. Personnellement, je suis peu pressé d’en profiter car parmi mes
missionnaires j’en vois de plus jeunes à qui un retour en France ferait tant de bien. Il faudra leur
céder ma place. Dans 3 ans j’aurai mes 25 ans de mission. Or, dans ce pays, après 25 ans on n’est
guère plus bon qu’à manger les pissenlits par la racine.

En février 1912, le père Kemlin vint s’installer à Kontum, au centre de la Mission, dont il
venait d’être nommé Provicaire et Supérieur, succédant au père Guerlach, tout juste disparu32.

32
Le père Jean-Baptiste Marie Guerlach naquit le 14 juillet 1858 à Metz où, durant le siège de 1870, il fut volontaire
comme ambulancier. Sa famille ayant choisi de demeurer française, il termina ses études de philosophie et de
théologie à Paris. Entré au séminaire des Missions Etrangères de Paris il fut ordonné prêtre le 4 mars 1882 et partit
pour le Vicariat apostolique de la Cochinchine orientale, tout comme, plus tard, Kemlin. Après l’étude du
vietnamien, il se mit à celle de la langue des Bahnars en recopiant le dictionnaire du père Dourisboure de cette
langue. En janvier 1883, il rejoignit les Hauts-Plateaux et la Mission de Kontum. Il s’occupa de la protection de la
communauté chrétienne lors des troubles de 1883-86 organisés par les mandarins et lettrés annamites. La Mission
subit alors un blocus de 18 mois et ses trois prêtres des Missions Etrangères de Paris, dont Guerlach, furent donnés
pour morts. Après le retour au calme, il participa à la campagne de pacification des Bahnars, Sedangs et Jörai et son
charisme, reconnu, lui fit y jouer un grand rôle, permettant le développement de la Mission de Kontum à compter
de 1888. Un aventurier peu scrupuleux, le baron Marie de Mayréna, se servit de lui pour se prétendre un temps “ roi
des Sédangs ”, mystification sans lendemain mais ayant marqué les esprits de son temps. Guerlach, outre la gestion
Sous sa direction avisée, la Mission prospéra au point de susciter la visite d’un envoyé du Pape
(9 au 14 avril 1923) et surtout, pour la première fois depuis la fondation en 1850 de la Mission
des Bahnars de Kontum (comptant 16.000 catholiques à cette date33), celle du Gouverneur
général de l’Indochine, résidant à Saïgon, accompagné du Résident supérieur, chef de
l’administration locale, en mai 1923 ; les deux visites étant sans aucun doute motivées en partie
par le charisme du Provicaire fêtant son jubilé et recevant à cette occasion la bénédiction
papale.
En 1918, la province de Kontum comptait en effet cinq cantons et trente-huit communes
vietnamiennes, une sous-préfecture et 978 villages proto-indochinois, 210 000 habitants dont
environ 15 000 catholiques répartis en 153 chrétientés divisées en 19 districts, une école de
catéchistes, un couvent de religieuses et une imprimerie.
Cependant l’activité du père Kemlin ne s’arrêtait pas là puisque, non content de rédiger des
travaux ethnographiques, de baptiser et faire communier, d’entendre ses ouailles en confession,
il visitait aussi les écoles, les districts, les postes militaires, jusqu’aux lépreux qu’il n’oubliait
pas. En 1923, déjà fort affaibli physiquement, il fonda encore le nouveau poste de Mangiang en
pays jörai, au sud de Kontum, favorisant ainsi l’influence de la Mission dans la vallée de l’Aiun
chez les Austronésiens Jörai, société à laquelle il consacra également un essai ethnographique,
notamment en ce qui concerne leur organisation sociale, paru dès 1909 dans la revue Missions
catholiques. Un missionnaire anonyme de Kontum (1925a, p. 75) témoigne ainsi :

“ Peu de missionnaires ont parcouru comme lui leurs villages, catéchisant, prêchant,
baptisant, distribuant les sacrements, et se faisant l’arbitre, toujours écouté, dans les affaires
qu’on rencontre inévitablement en pays de mission. C’est qu’il connaissait à fond la langue et les
coutumes des sauvages : aussi, païens et chrétiens avaient-ils en lui une égale confiance et s’en
remettaient-ils à son jugement. ”

Un autre discret témoin (1925b, p. 173) nous confie un trait significatif de son caractère et
de son attachement aux habitants proto-indochinois :

de la Mission de Kontum, poursuivit l’évangélisation plus au nord. En 1891, il guida la Mission Pavie et en 1894
celle d’Alexandre Yersin, de l’Institut Pasteur, le génial vainqueur de la peste. En 1893, lors d’une épidémie de
variole à Kontum, il parvint à se procurer les vaccins et inocula lui-même plus de 7000 personnes. Mais sa santé
l’obligea à retourner sur la côte en 1903 et c’est en tant que curé de Tourane (actuel Danang) qu’il subit la
campagne anticléricale devant aboutir à la séparation de l’Eglise et de l’Etat. En 1908, il put retourner sur les
Hauts-Plateaux et, à la mort de Vialetton, le 11 novembre 1909, il fut nommé à Kontum comme Supérieur de la
Mission Montagnarde avec le titre et les pouvoirs de Provicaire. Ses deux dernières années furent assombries par la
campagne en faveur de l’apostasie de ses ouailles. Le père Kemlin, qui prit la relève subit et répondit au plus gros de
ces attaques mais ne put empêcher Guerlach d’être atteint moralement. Celui-ci s’éteignit d’un cancer, à Kontum,
le 29 janvier 1912 (cf. J. Vérinaud, 1988, p. 164).
33
Cf. le Discours de réception du père Kemlin au Gouverneur général de l’Indochine, 1923.
“ Ces bons sauvages, comme il avait coutume de les appeler, il les aimait d’un amour de
mère ; il s’ingéniait à cacher leurs misères, leurs faiblesses, leur inconstance, leur ingratitude
même : “ Pauvres gens, disait-il, ils ne comprennent pas, ils ne savent pas, ils ne sont pas assez
instruits… ”. Si l’on insistait, il se taisait et semblait s’absorber dans la lecture d’un livre, du
Pèlerin, d’un journal quelconque, qu’en tout autre moment il n’avait jamais le temps de lire.
C’est ainsi qu’il témoignait silencieusement sa désapprobation. ”

Vint la Grande Guerre. En 1914, quelques uns des missionnaires de Kontum parmi les plus
jeunes furent mobilisés, si les plus âgés furent épargnés, imposant un surcroît de travail :

La santé n’est pas de trop pour le moment car, avec quatre confrères mobilisés ce n’est pas le
travail qui manque. Je m’occupe toujours de continuer l’église de Kontum [commencée en
1914] que je fais traîner le plus possible car impossible de trouver des fonds en ces tristes temps.
(Lettre à Justin Marquaire, 14 août 1915).

Kemlin proposa alors de lui-même à ses supérieurs de quitter Kontum pour Kon-Trang, l’un
des districts les plus difficiles et les plus vastes de la Mission, de manière à soulager un confrère
de santé délicate, et reprenant – lui, le provicaire – le chemin du “ terrain ” et le genre de frugal
ministère qu’il avait exercé pendant ses quinze premières années de mission :

Kon-Trang, le 7 novembre 1918


Comme les cloches de la Toussaint sonnent le glas funèbre du Deutchland je me hâte de
t’écrire pour te féliciter tous de votre délivrance. Dès que j’apprendrai que l’armistice est signé je
célébrerai une messe d’actions de grâces afin de remercier le Bon Dieu de la protection toute
spéciale dont notre famille a été l’objet […] personne n’a été victime de la guerre. […] Oh
raconte moi en long et en large en profitant de tes veillées d’hiver les épisodes de votre long
martyr, l’histoire de vos espoirs et de vos déceptions […].
Ici comme je l’ai dit nous ne nous sommes guère ressentis de la guerre que par la
diminution des ressources que la baisse du change venait encore réduire de moitié et par le
renchérissement de tout ce qui venait d’Europe, farine, vin, pétrole, bougies, savons, étoffes, fers,
etc.
On a vécu comme on a pu, chacun s’est serré la ceinture, un peu moins que vous tout de
même. La mission s’est endetté mais nous n’avons fermé aucune œuvre. Les missionnaires ont,
sauf les plus jeunes, bénéficié d’un sursis. J’ai laissé les confrères malades et fatigués au centre de
Kon Tum et j’ai assumé l’administration du gros district de Kon-Trang que le Bon Dieu m’a
donné la consolation d’agrandir d’une chrétienté. (Lettre à Paul Deschamps).

Il demeura à Kon-Trang jusqu’en 1919, date à laquelle il revint s’installer définitivement à


Kontum. C’est pendant ce séjour à Kon-Trang que Kemlin mit à jour et rédigea ses notes
d’ethnologie qui allaient être publiées dans le Bulletin de l’École française d’Extrême-Orient, et
qui font l’objet du présent volume.
Son ardeur de missionnaire fut récompensée par les résultats à Kontum même : comme
nous l’indique le témoignage du rédacteur de sa nécrologie publiée dans La semaine religieuse
de St-Dié, pour une population de 1500 âmes répartie en 4 villages, il y avait à Kontum en 1919
le chiffre de 10 000 communions annuelles portées à 30 000 en 1924 grâce aux efforts du père
Kemlin. Mais son ouvrage fut aussi remercié, de manière plus personnelle, par une Bénédiction
du Pape (Pie XI) pour lui-même et sa famille. Le Saint Père tint à ajouter de sa main sur le
document, faveur exceptionnelle, la mention peremanter in Domino. Le père Kemlin adressa
ensuite cette bénédiction, nantie d’un beau cadre de bois sculpté, à Maria et Justin Marquaire
pour ce qu’elle touchait également ses parents34.
Cependant, ce labeur avait son prix. Le père Kemlin témoigna sobrement de ses efforts et de
sa fatigue, à l’automne de sa courte vie :

Kontum, le 15 septembre 1922


[…] Cette année, j’ai présenté pour ma petite part à Mgr une gerbe de 9000 confessions et de
16 000 communions, pour 1000 personnes pouvant se confesser. Voyez ce que cela représente
d’heures passées à la boîte. Enfin, je ne me plains pas, il est des jours où ma joie déborde […].
(Lettre à Paul et Élise Deschamps).

L’une des réussites dont le père Kemlin fut le plus fier et pour laquelle il reste célébré est
l’envoi au noviciat des Amantes de la Croix, à Gothi, en 1923, de quatre premières jeunes filles
bahnars. L’année suivante, elles étaient neuf et la Mission comptait aussi dix-neuf séminaristes
indigènes. Cependant, à côté de cette activité missionnaire, il demeura attaché à ses recherches
ethnographiques, exprimant tout à la fois sa vocation, son intérêt pour la recherche et son
amour des Bahnars, des Reungao et, plus largement, des populations locales. Dans une lettre
adressée en 1924 à Maria et Justin Marquaire, il indique :

Pour débuter, j’avais fait un choix de six petites Annamites et six petites Bahnar ; une chaque
jour, le dimanche non compté. Je leur expliquai bien ce que j’attendais d’elles. Ces bonnes
enfants s’y mirent de tout cœur. Le Bon Dieu les a récompensées : cinq des petites Annamites et
quatre des petites Bahnar y ont gagné la grâce de la vocation.
La veille de l’Ascension, je les embarquais en charrette à bœufs pour le petit noviciat que
nous avons à Gothi. C’est la première fois que des petites sauvageonnes y font leur entrée. On les
a fêtées et surtout on a été ravi de leur voix. Car ces enfants de la forêt ont un vrai don pour la

34
Cette bénédiction sera d’ailleurs portée en procession sur un brancard décoré, à l’entrée et à la sortie de la messe
célébrant les noces d’argent sacerdotales du Provicaire Kemlin et du père Boher, le mardi 26 juin 1923, à Kontum,
en présence du Résident de France (cf. M. Jeannin, 1923 ; E. Kemlin, Discours de réception au nouveau Résident,
1923).
musique ; elles connaissent un répertoire de plus de 80 de nos airs français. Chanter en duo est
un jeu pour elles. Les Annamites au contraire sont incapables de quoi que ce soit : leur langue les
fait chanter d’un nez et puis ils ont les cordes vocales brûlées par la chaux et le bétel. […] Je suis
aussi en train de préparer l’exposition missionnaire du Vatican, pour ce qui concerne notre petit
groupe Bahnar. Ma maison est un petit musée où l’on voit tous les ustensiles du pays ainsi que
tous les genres de vêtements fabriqués par eux. Je t’avoue que la vue de cette exposition
m’intéresserait énormément, mais je suis retenu ici. Si tu as des économies pour faire un voyage
à Rome à l’occasion du Jubilé, tu verras tout cela.

Le missionnaire anonyme rédacteur de l’article publié dans les Compte rendus des Missions
Étrangères de Paris (1925b, p. 174 sq.), proche du père Kemlin, témoigne ainsi :

“ A peine rentré chez lui, il était littéralement accaparé par les chrétiens, annamites ou
bahnars, qui venaient lui demander des services, lui compter leurs ennuis, chercher des
remèdes ; il les recevait tous avec une égale bonté, les écoutant sans lassitude, oubliant même
dans ses entretiens avec eux l’heure des repas, et aussi parfois les confrères invités à sa table.
Alors, il s’excusait humblement, mais sur ce point ne se corrigeait guère. […] Hélas ! pour ces
œuvres, les ressources lui faisaient défaut. Alors lui, jadis généreux jusqu’à l’excès, lui qui
jamais, lorsqu’il était simple missionnaire, ne congédiait un Moï sans lui donner une tasse de
sel, un collier de verroterie, une boîte d’allumettes, légers cadeaux qui n’en grevaient pas moins
à la fin de l’année son budget de missionnaire, il s’astreignit à réduire le plus possible ces
dépenses. […]
Pour remplir plus librement sa charge de Provicaire, il se donna par deux fois l’aide d’un
vicaire annamite ; mais, dès qu’un district manquait de pasteur, il se sacrifiait et envoyait son
vicaire occuper le poste vacant. Et seul, héroïquement, sans se plaindre, il continuait comme par
le passé son rude, mais fructueux ministère.
Le soir, accablé de fatigue, il prolongeait encore parfois ses veillées, pour mettre à jour sa
correspondance, ne laissant presque jamais les lettres, même les plus inopportunes, sans réponse.
C’est pendant les heures prises sur son sommeil, qu’il écrivit sa dernière brochure :
L’Immigration annamite en pays moï. Étude pleine d’actualité et d’à-propos, en un moment où
le pays moï, jusqu’alors fermé aux influences extérieures, s’ouvre enfin à la colonisation
française et à la pénétration annamite. ”

Mais, à cette époque, épuisé, comme il l’a écrit lui-même non sans humour, il n’est “ guère
plus bon qu’à manger les pissenlits par la racine ”. Sa santé, très altérée, était éprouvée par une
dysenterie rebelle depuis plus d’un an. Cela l’obligea, en septembre 1924, à un séjour de
convalescence de trois mois dans la région plus salubre de Dalat, lieu de villégiature privilégiée
des Européens en raison de son climat ; en vain (Photographie de Kemlin, n° 1). Et bientôt les
médecins lui imposèrent un rapatriement vers la France. Il était déjà trop tard. Usé, le père
Kemlin ne revint pas de ce dernier voyage. Au moment de son embarquement pour l’Europe, en
remerciement des services rendus et en hommage particulier pour ses vingt-cinq années
d’apostolat, l’empereur d’Annam de l’époque lui conféra le brevet d’officier de l’ordre impérial
du Dragon d’Annam.
Rapatrié trop tardivement, il fut admis, peu après son arrivée à Marseille le 13 décembre
1924, à l’hôpital Saint-Joseph, suite à un malaise survenu en pleine messe, le 7 janvier, qui le
laissa totalement paralysé. Un examen médical décela une obstruction du pylore par une
tumeur probablement cancéreuse. Le mal s’aggravant, les derniers sacrements lui furent
administrés l’avant-veille de sa mort par Mgr Chapuis qui recueillit ses dernières paroles : “ Mon
cher ami, je suis prêt à mourir. Jamais je ne serai mieux préparé. Si je vivais encore, qui sait si le
diable ne me reprendrait pas ”. Mais, demandant à voir le père Gaillard, un ami missionnaire
retour de Kontum, malade lui aussi (il devait mourir trois jours après Kemlin), le père Kemlin
ajouta : “ Dites bien que j’embrasse en vous toute notre chère Mission des Bahnars ”. Une légère
rémission redonna un vain espoir à ses médecins et à ses proches mais finalement il s’éteignit le
lundi 6 avril 1925, à 5 heures du matin.
Contrairement à ce que certains auteurs, tel Christian Simonnet (1977, p. 334), ont pu
écrire, le père Kemlin, s’il n’a pas réussi à revoir de son vivant son village natal y a cependant
été inhumé, à la différence d’autres missionnaires enterrés en terre d’Annam, au cimetière des
missionnaires de la Mission de Kontum comme les pères Combes, Dourisboure, Vialetton,
Guerlach, etc. (Photographie n° 6. Sépulture de Kemlin à Lusse). Cet enterrement d’un
personnage hors du commun a marqué les personnes qui, telle Cécile Munier, fille de Paul
Deschamps et d’Élisabeth Stouvenot, y ont assisté :

“ Je suis heureuse que vous rappeliez le souvenir du père Kemlin. J’eus le privilège de l’avoir
pour parrain. Il l’avait été aussi de mon père à l’âge de huit ans. Mes parents avaient de la
vénération pour ce cousin très ami qui, parti en mission à 25 ans, resta très attaché à sa famille
et à son pays natal : ses lettres en témoignent. Il espérait après 25 ans de labeur en Chine y
rentrer et célébrer la messe dans la chapelle de famille du hameau Les Merlusses où nous
habitions. Les desseins de Dieu étaient autres. Après une traversée pénible, il dut s’aliter à
Marseille, atteint d’un cancer du pylore. Après trois mois de souffrance, il fut rappelé à Dieu. On
le ramena à La Pariée dans la maison natale de sa mère puis à Lusse où il repose près de l’église
de son baptême depuis 1925. J’avais alors 11 ans et je fus frappée par la foule innombrable à son
enterrement qui se pressait pour toucher le cercueil de celui que l’on considérait comme un
Saint. ” (comm. person. François Munier, lettre du 24 octobre 1995).

L’Abbé Marquaire, né en 1916, témoigne à sa façon du retour de celui qui fut pour partie à
l’origine de sa vocation sacerdotale :

“ Arrivé à Marseille, il dut être tout de suite hospitalisé. Papa (Justin) et d’autres sont allés le
voir. Je n’avais que neuf ans, aussi mes parents ont renoncé à m’y laisser aller, bien qu’il fut
mon parrain. Mais je fus présent à son enterrement à Lusse. J’en ai retenu surtout, tout au long
de la montée vers l’église, le beau son des cloches, surtout qu’elles étaient sonnées à bras en volée
(et non en mort), par des hommes qui savaient les accorder. C’était vraiment très beau. ” (“ Le
retour en France ”, 27 novembre 1995).

Dans l’allocution prononcée à ses funérailles, le 13 avril 1925, l’archiprêtre de St-Dié


regrettait que le père Kemlin n’ait pas eu le temps, disparu à 50 ans à peine, d’atteindre à la
dignité épiscopale qu’il pensait, de même que ses pairs, méritée par l’“ extraordinaire ensemble
de qualités ” présenté par Kemlin.
En réalité, l’archiprêtre se trompait. Par deux fois auparavant, de son vivant, les autorités
ecclésiastiques lui avaient offert cette dignité :

Tu me demandes si Émile est évêque. Tu l’aurais vu dans les annales de la Propagation de la


Foi ou la Semaine religieuse de St-Dié. Il a refusé pour la deuxième fois. Il me dit qu’il s’est
débattu comme un beau diable dans un bénitier. S’il y est jamais, c’est qu’on l’y obligera. Il a
toujours plus de confessions tous les ans. L’an dernier, il en avait 9000. Cette année il a 10 à
25 000 communions. ” (Lettre de Sœur Eugénie à Maria Deschamps, 5 janvier 1924).

Si le père Kemlin, en tant qu’individu, apparaît modeste, généreux et courageux, qualités


requises pour un bon prêtre envoyé outre-mer, on peut cependant préférer son activité de
chercheur à son sacerdoce missionnaire pour ce que, sans juger ce dernier, on peut ne pas
l’approuver pour autant. Mais la mission de Kemlin en particulier appartient à une époque
antérieure à tout jugement que nous pourrions porter désormais. Était-elle utile, positive,
progressiste comme la majorité de la société française le pensait alors ? ou bien juste une forme
altruiste et bienfaisante de colonisation ou, plus simplement encore, un outil efficace au service
du pur fait colonial ? La question est à poser également, pour cette époque, en ce qui concerne
l’ethnologie, aussi n’est-il pas besoin d’y répondre, laissant au lecteur son opinion. En revanche,
que l’on approuve ou pas l’idée missionnaire, on peut juger, apprécier ou refuser l’action de ses
acteurs. Celle de Kemlin, en tant que membre des Missions Étrangères de Paris, peut être mal
fondée diraient certains, nécessaire diraient d’autres, mais elle fait l’unanimité sur sa manière :
désintéressée, humble, altruiste, emplie d’une curiosité aimable envers les habitants de la région
adoptive du missionnaire. Le père Kemlin a donné sa vie pour ce à quoi il croyait, de différentes
façons dont la recherche scientifique n’est pas la moindre. Le père Émile Kemlin, missionnaire
en Annam, a ainsi été nommé, pour son travail de recherche, correspondant de l’École française
d’Extrême-Orient pour une période de trois ans par décret du Journal Officiel de l’Indochine en
date du 1er mars 1920 (art. 3), en même temps qu’E. Lunet de Lajonquière, à l’époque
commandant d’Infanterie coloniale en retraite, que l’illustre George Cœdès, à ce moment-là
directeur de la bibliothèque Vajiranana à Bangkok, et qu’Auguste Bonifacy, lieutenant-colonel
d’Infanterie coloniale en retraite, entre autres personnalités. La même année, le 3 avril, par le
décret du 23 avril 1920 paru au Journal Officiel de la République Française et promulgué dans
le Journal Officiel de l’Indochine le 4 décembre 1920, la personnalité civile fut conférée à l’École
française d’Extrême-Orient. Louis Finot, à l’époque directeur de celle-ci, disait de Kemlin en
1925 :

“ Esprit exact et vraiment scientifique, préférant aux généralisations séduisantes, mais


vagues, des faits minutieusement observés, il porta ses recherches sur le groupe restreint des
Ro˛ngao. Jamais sans doute on n’a pénétré plus avant dans la psychologie singulière de ces
races, et analysé avec autant de pénétration les principes de leur vie mentale35. ”

Les faits parlent d’eux-mêmes et il n’est pas utile de s’étendre pour exprimer plus outre la
passion du chercheur, la pugnacité de l’enquêteur, la droiture et le courage du prêtre ouvert,
généreux et humble. Après cela, la lecture de ces trois articles formant monographie est le
meilleur avocat possible pour indiquer leur valeur en tant qu’œuvre d’ethnologue…
Il reste à souhaiter que cette réédition puisse contribuer à rétablir une injustice et, en tous
cas, une erreur : la méconnaissance d’un grand ethnologue et l’oubli d’un grand cœur ; le tout,
pour le plus grand bénéfice du lecteur. A celui-ci je cède la place, en lui souhaitant un voyage
agréable, érudit et passionnant au “ pays perdu ” des Reungao et de leur chantre modeste et
immense : Émile Kemlin.

35
BEFEO (1925, p. 287).
RÉFÉRENCES DES DOCUMENTS CITÉS ET ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
SUR LES PROTO-INDOCHINOIS EN GÉNÉRAL ET LES BAHNAR-REUNGAO EN PARTICULIER

° TRAVAUX ETHNOGRAPHIQUES DU PÈRE KEMLIN


KEMLIN, Marie-Joseph-Emile, dit Emile (père)
1909 “ Au pays Jarai (Cochinchine orientale) ”, Missions catholiques, n° 7, n° 14, mai, p. 225-227,
p. 238-239, p. 246-248.

1909-10 “ Rites agraires des Reungao ”, Bulletin de l’Ecole française d’Extrême-Orient (BEFEO), IX (3 :
juil.-sept. 1909), p. 493-522 ; X (1 : janv.-mars 1910), p. 131-158.

1910 “ Les songes et leur interprétation chez les Reungao ”, Bulletin de l’Ecole française d’Extrême-
Orient (BEFEO), X (3), p. 507-538.

1917 “ Alliances chez les Reungao ”, BEFEO, XVII (4), p. 1-119.

1919 “ Règlement de l’Œuvre des chu giao phu ”, Ami des enfants (Cuddalore), juin.

1925 L’immigration annamite en pays Moï, en particulier dans la province de Kontum, Quinhon,
Imprimerie de Quinhon (Annam), 24 p.

° DOCUMENTS AUTOGRAPHES ET INÉDITS CONSULTÉS


1910 Lettre du père Kemlin à Justin Marquaire, Polei Do’drâp, 15 février.

1910 Lettre du père Kemlin à Maria Deschamps-Marquaire, Polei Do’drâp, 15 février.

1910 Lettre du père Kemlin à Maria Deschamps-Marquaire, Polei Do’drâp, 3 septembre.

1910 Lettre du père Kemlin à Justin Marquaire, Polei Do’drâp, 3 septembre.

1914 Lettre du père Kemlin à Justin Marquaire, Kontum, 14 août.

1914 Lettre du père Kemlin à Joseph Deschamps, Qui-Nhon (Annam), 4 août.

1918 Lettre du père Kemlin à Paul Deschamps, Kontum, 7 novembre.

1920 Lettre du père Kemlin à Paul Deschamps, Qui-Nhon (Annam), 4 mars.

1922 Lettre du père Kemlin à Paul et Elise Deschamps, Kontum, 15 septembre.

1923 Discours de réception du père Kemlin au nouveau Résident à l’occasion de sa venue pour la
célébration du Jubilaire, Kontum, 15 juin, dactylogr.

1923 Lettre du père Kemlin à Maria et Justin Marquaire, Kontum, 18 juin.


1923 Lettre du père Kemlin à Maria Deschamps-Marquaire, Kontum, 20 juin.

[1923] Discours de réception du père Kemlin au Gouverneur général de l’Indochine lors de sa visite à la
Mission de Kontum, 4 p. [ne reste que les 2 premières pages], dactylogr.

1924 Lettre du père Kemlin à Maria et Justin Marquaire, Kontum.

1924 Lettre de Sœur Eugénie à Maria Deschamps-Marquaire, s.l., 5 janvier.

1925 Lettre de Sœur Eugénie à Justin Marquaire, s.l., 22 novembre.

1967 Lettre du père Thomann à l’Abbé Marquaire, Kontum, 13 juillet.

Maria Deschamps-Marquaire, et Justin Marquaire son époux, sont les parents de l’Abbé Joseph Marquaire qui
précise que Maria était la cousine germaine du père Kemlin. Une vive amitié liait le père Kemlin à sa cousine
également élevée à Lusse. Ces deux personnes ont aidé à la fois leur cousin par leur correspondance et leurs envois,
mais aussi la Mission de Kontum, même après la disparition de Kemlin, par un soutien financier.
La Sœur Eugénie, née Marie Deschamps et religieuse de l’ordre de Saint Vincent de Paul à Rochefort, était la tante
maternelle du père Kemlin. Elle obtint notamment pour son neveu missionnaire une bénédiction papale pour lui et
sa famille, attention qui le toucha beaucoup. Le père Thomann est un missionnaire de la Société des MEP, qui fut
en poste à Kontum durant une bonne partie de la Guerre du Vietnam.
Joseph Deschamps est l’oncle maternel d’Emile Kemlin. Paul Deschamps, son fils, (14/11/1883-8/2/1941)et son
épouse Elise (Elisabeth) Stouvenot (11/12/1879-14/3/1951), cousins germains et amis intimes eux-aussi du père
Kemlin, sont les autres principaux destinataires des lettres citées. Copies de celles-ci, annotées, choisies comme les
plus significatives par la famille parmi de nombreuses autres lettres, m’ont été aimablement communiquées par
l’Abbé Joseph Marquaire (Maria et Justin) et par François Munier (Paul et Elise), que je remercie ici.

° AUTRES DOCUMENTS CONSULTÉS PORTANT SUR LA VIE ET L’ŒUVRE DU PÈRE KEMLIN


[Anonyme]
s.d. Le Révérend père Emile Marie Joseph Kemlin, Provicaire de la Mission des Bahnars (1875-1925),
Quinhon, Imprimerie de la Mission, 15 p. [1925] [document aimablement communiqué par le
Service des Archives des Missions étrangères de Paris].

[Anonyme, M. Descrouils d’après Sœur Eugénie]


1925a “ Nécrologie. Le Révérend père Kemlin ”, La Semaine religieuse de Saint-Dié, vendredi 8 mai
1925, p. 75-78. [Il est noté en exergue de cette notice : “ Quelques notes biographiques écrites par
un missionnaire qui fut en Annam le collaborateur et l’ami du père Kemlin ”. Document
aimablement communiqué par la famille Munier-Deschamps].

[Anonyme]
1925b “ M. Kemlin. Provicaire de Quinhon ”, Compte rendu des Missions étrangères de Paris, p. 170-
177. [document aimablement communiqué par le Service des Archives des Missions Etrangères de
Paris].

[Anonyme]
1925c Allocution prononcée aux funérailles du Révérend père Emile Kemlin par l’Archiprêtre de la
cathédrale de Saint-Dié, Saint-Dié, vendredi 8 mai, 5 p. [document aimablement communiqué
par la famille Munier-Deschamps].

ESCALERE, L. (R. P.)


s.d. “ La collaboration des missionnaires catholiques aux travaux de l’Ecole française d’Extrême-
Orient, 3, Le père Kemlin ”, Bulletin des Missions Etrangères de Paris, p. 553-562. [document
aimablement communiqué par le Service des Archives des Missions étrangères de Paris].

FINOT, Louis
1925 “ Le père Kemlin ”, Bulletin de l’Ecole française d’Extrême-Orient, XXV, p. 287.

JANNIN, Martial
1923 Programme de la célébration du Jubilaire. Noces d’Argent du père Provicaire E. Kemlin, Kontum,
Collège Bx Cuenot, 15 juin. [document aimablement communiqué par l’Abbé Marquaire].

[Archives d’Etat Civil de la Commune de Lusse, Arrondissement de Saint-Dié, Département des Vosges]
1875 Acte de naissance de Kemlin Marie Joseph Emile du 17 juin (facsimilé provenant des Archives de
l’Eglise de Lusse).

LESSEUX, Anould (de) [Vice-Président délégué du Conseil Général des Vosges, Maire de Lusse]
1995 Communication personnelle (lettre du 20 juillet).

MARQUAIRE, Joseph (Abbé)


1995 Communication personnelle (lettre du 28 novembre).

1995 “ Le retour en France ”, Communication personnelle (en date du 27 novembre).

MATRAS-GUIN, Jacqueline
1996 Communication personnelle (lettre du 14 mai 1996).

MUNIER, François
1995 Communication personnelle (lettre du 24 octobre).

° RÉFÉRENCES ET ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUES


ANTOINE, F. P.
1944 Sâp klabar pong rok nang, s. l. (lexique bahnar).

1949 “ Les Bahnar ”, Revue Education, 16, p. 11-15.

ANTOMARCHI, Dominique
1941 “ Le Bi Due (Recueil des coutumes Rhadé) ”, Revue indochinoise, n° 25, p. 5.

1955 “ Kley Khan Kdam Yi ”, BEFEO, XLVII (2), p. 569-615 (précédé d’une notice bibliographique sur
D. Antomarchi par F.P. Antoine, p. 549-554).

Voir aussi SABATIER (L.)


ABADIE, Maurice
1924 Les Races du Haut-Tonkin, de Phong-Tho à Lang-Son, Paris, Société d’Editions géographiques,
maritimes et coloniales, préface de Paul Pelliot, de l’Institut, 194 p.

ARDANT du Picq, M. (lt-col.)


1925 “ Monographie du pays Moï (Indochine, provinces de Kontum et de Ban Mê Thuôt) ”, Revue des
Troupes Coloniales, XIX (1925), XX (1926).

AYMONIER, Etienne
1890 “ Légendes historiques des Chams ”, Excursions et reconnaissances, 32.

1900-4 Le Cambodge, Paris, vol. I, Le Royaume actuel, 1900, vol. II, Les Provinces siamoises, 1901, vol.
III, Le Groupe d’Angkor et l’hsitoire, 1904.

AZEMAR, Henri (Père)


1886a “ Lexique Stieng-Français ”, Excursions et reconnaissances, n° 27-28, XII, p. 99-146.

1886b “ Les Stiengs de Brolam ”, Excursions et reconnaissances, n° 27-28, XII, p. 147-160.

BARADAT, R.
1941a Les dialectes des tribus sâmrê, Paris, Ecole française d’Extrême-Orient, manuscrit inédit, 250 p.

1941b “ Les Sâmre ou Peâr, population primitive de l’ouest du Cambodge ”, BEFEO, XLI (1), p. 1-150,
ill., cartes.

BARRAU, Jacques
1972 “ Culture itinérante, culture sur brûlis, culture nomade, écobuage ou essartage ? Un problème de
terminologie agraire ”, Etudes Rurales, 45, p. 99-103.

BARTHÉLEMY (Marquis de)


1903 Au pays moï, Paris, Plon, 256 p., photo., 2 cartes.

BAUDRIT, André
1936 “ Henri Maitre, explorateur de l’Indochine Sud-Centrale ”, Bulletin de la Société des Etudes
Indochinoises (BSEI), 3, p. 109-151.

1941 “ Une visite au tombeau de l’explorateur Henri Maitre ”, BSEI, XVI, p. 111-120.

1943 “ Deux lettres de l’explorateur Henri Maitre ”, BSEI, XVIII, p. 78-90.

BERNOT, Lucien
1967 Les Paysans arakanais du Pakistan oriental. L’histoire, le monde végétal et l’organisation sociale
des réfugiés Marma (Mog), Paris, La Haye, Mouton, 2 vol., 767 p.

BOCHET, G. et Jacques DOURNES


1953 Lexique polyglotte Vietnamien-Koho-Roglai-Français, Saigon, France-Asie, 135 p.

BONIFACY, Auguste (Cdt)


1904a “ La légende de Pèn-Hu d’après les chants sacrés des Man Lam-Diên. . Chants en l’honneur de
l’ancêtre Bôn-Vuong ”, Revue indochinoise, p. 636-640.

1904b Les Groupes ethniques de la Rivière-Claire, “ Revue Indochinoise ”, n.s. 12, 3 juin 1904, p. 813-
828 et n.s. II (1), 15 juillet 1904, p. 1-16.

1905 “ Monographie des Mans Cao-Lan ”, Revue indochinoise, p. 899-928.

1906a “ Les groupes ethniques du bassin de la Rivière-Claire (Haut-Tonkin et Chine méridio-nale) ”,


Bulletin et Mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris, VII, p. 296-330.

1906b “ Etude sur les coutumes et la langue des La-ti ”, BEFEO, VI, p. 271-278.

1906c “ Monographie des Máns Chàm ou Lam-±i!n ”, Revue indochinoise, I, p. 168-182 ; p. 257-
259.

1907 “ De certaines croyances relatives à la grossesse chez les divers groupes ethniques du Tonkin ”,
BEFEO, VII, p. 107-110.

1908a “ Monographie des Mans ±"i-B®n, C”c ou Sù˛ng ”, Revue indochinoise, I, p. 877-901 ; II,
p. 33-62.

1908b “ Etude sur les coutumes et la langue des Lolo et des La-Qua du Haut-Tonkin ”, BEFEO, VIII,
p. 531-644.

1911 “ Critique des Songes et leur interprétation chez les Reungao du père Kemlin ”, Revue
d’Anthropologie.

1919 Ethnographie indochinoise, Hanoï/Haïphong, Imprimerie d’Extrême-Orient, Gouverne-ment


Général de l’Indochine, 110 p. + V p. [réédition pirate vietnamienne récente].

BOUCHER de CRÈVECŒUR, Jean-Marie (général)


1938a “ Au pays mnong : les Biats du Haut Chlong ”, Revue des Troupes Coloniales, p. 320.

1938b “ La pénétration française chez les Biats ”, Revue des Troupes Coloniales, p. 547.

1938c “ L’œuvre française chez les Biats ”, Revue des Troupes Coloniales, p. 616.

BOULBET, Jean
1957a, “ Quelques aspects du coutumier (Ndri) des Cau Maa’ ”, BSEI, 32 (2), p. 3-178.

1957b “ Trois légendes maa’ ”, France-Asie, 139, p. 399-402.


1960a “ Description de la végétation en Pays Maa’ ”, BSEI, 35 (3), p. 545-574.

1960b “ Bördee au Rendez-Vous des Génies, BSEI, 35 (4), p. 627-650.

1965 “ Modes et techniques du Pays Maa’ ”, Bulletin de l’Ecole Française d’Extrême-Orient (BEFEO),
52 (2), p. 359-414.

1966 “ Le miir, culture itinérante avec jachère forestière en Pays Maa’ ”, Bulletin de l’Ecole Française
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