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4- Les sciences de la société, pour leur part, n’ont pas réussi à investir
pleinement leur objet parce qu’il ne s’est pas trouvé d’intérêts sociaux
suffisamment puissants et suffisamment organisés pour imposer leur
développement.
Aujourd’hui encore, les intérêts sociaux qui portent les sciences de la
société demeurent fragmentaires et contradictoires.
- Les curiosités intellectuelles qui se nourrissent d’histoire,
- l’exotisme postcolonial et touristique qui se repaît d’ethnologie,
- les soucis gestionnaires, publics et privés, qui fondent l’économie,
- l’art de gouverner les peuples qui fait prêter attention à la sociologie
Sont les vecteurs principaux de sciences parallélisées.
Celles-ci débordent, certes, les limites étroites où les cantonnaient les
commandes sociales auxquelles elles répondent, mais leurs
débordements sont vite endigués.
Car on atteint bientôt une limite qui n’a été franchie en aucune
société.
Une société ne peut promouvoir la connaissance scientifique de sa
propre nature, de son ordre établi, de ses idées reçues, de sa
dynamique inconsciente, que si la transformation de cette nature est
l’objectif principal des forces qui dirigent cette société.
Dans les sciences de la nature cette critique se nomme technologie,
industrie, thérapeutique ---
A l’endroit où l’histoire, la sociologie, l’ethnologie, l’économie,…
pourraient converger, conquérir leur objet commun et fonder en
raison une politique, leur tabou se dresse ---
Certes, on écrit plus que jamais, sur maints aspects de l’activité
sociale, présente ou passée, proche ou lointaine.
Certes, bon nombre de ces livres offrent toutes les garanties de la
scientificité.
Mais, il reste que, dans ce qu’elles ont de plus général et de plus
prometteur, ces recherches demeurent presque sans écho.
Aucune industrie ne s’empare des produits de cette science et n’incite
à son développement systématique.
Autrement dit, aucune coalition de forces sociales ne fait aux sciences
de la société un appel systématique et soutenu pour fonder son
action.
Ou, du moins, les forces sociales qui auraient cette tendance ou cette
tentation sont surclassées par d’autres forces de beaucoup
supérieures et qui n’ont que faire des sciences sociales, qui n’en
veulent à aucun prix.
L’exploitation économique, la domination politique et l’hégémonie
idéologique dont les sociétés sont le siège, peuvent varier
considérablement de l’une à l’autre.
Mais, elles ont toujours ce dénominateur commun : le dévoilement
critique des relations sociales leur est insupportable.
Aucun conservatisme –fut-il badigeonnée de marxisme- ne peut
s’accommoder d’un développement soutenu et méthodique des
sciences sociales.