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Introduction
Oenone prend de l’ampleur dans cette scène parce qu’elle ne se contente pas de
recevoir des sentiments, elle analyse et elle propose. Le texte de Racine est un texte
argumentatif qui repose sur 5 arguments :
Le premier est un argument chrétien. Oenone montre que la mort est une
faiblesse. Avec habileté, elle va jusqu’à dire que la mort équivaudrait à un aveu
au grand jour. La lâcheté est implicitement évoquée grâce à la figure du
redoutable Thésée au vers 874. La fuite des responsabilités (la mort) amplifierait
un discours accusateur. Si Hippolyte accuse Phèdre et si Phèdre se tue, Thésée
conclura que sa femme est coupable (notez le « on dira que… » du vers 873
terrible pour une femme qui a le souci de son honneur)
Le second argument qu’Oenone emploie la dépeint comme incapable de restituer
seule la réputation de Phèdre. Phèdre morte, Oenone serait désemparée, « trop
facile à confondre », c’est-à-dire qu’Oenone n’est pas sûre de son attitude.
Le troisième argument s’appuie sur le premier dégoût de Phèdre : puisque la
reine déteste son beau-fils, qu’elle le considère désormais comme un monstre,
pourquoi ne pas se débarrasser des scrupules qui l’empêche de l’accuser ?
Oenone s’emploie à renverser la réalité : on doit pouvoir montrer que c’est
Hippolyte le coupable. Elle élabore un mensonge plausible : les vers 889 (la pièce
à conviction qu’est l’épée), 890 (la douleur actuelle de la reine et son irritation
passée qui avait déjà permis l’exil) font de Phèdre une innocente.
Le quatrième argument s’appuie sur le deuxième dégoût de Phèdre : puisque la
reine se révolte à la pensée d’une fausse accusation, il faut qu’elle pense que cela
se passe en famille. Thésée, en bon juge, sera clément. Au vers 902, elle utilise
un oxymore (supplice léger) pour atténuer la colère d’un juge qui est avant tout
père. Ainsi, Oenone minimise les conséquences de son mensonge.
Le cinquième argument est l’argument le plus convaincant pour une âme affolée
et passive (notez le mot « silence » du vers 894 opposé au verbe « je parlerai »
du vers 899) : Oenone parlera à la place de sa maîtresse (« mes avis » au pluriel
renforce son désir d’éloquence). Celle-ci n’aura rien à dire elle-même. Oenone
prend en charge l’action.
Bien sûr, Racine nous dit déjà, dans cette scène, qu’Oenone est un personnage punissable.
Elle devra payer pour cette odieuse machination.
Conclusion
Le nœud fait de Phèdre un être affolé, en proie à un désarroi qui la livre à l’instinct.
Elle a celui de faire confiance à Oenone. Elle se trompe, évidemment. Est-elle le jouet des
Dieux ? Et Oenone est-elle un double de Phèdre, capable (et coupable) par désir de perdre le
sens des réalités ? Pour répondre à la question que vous m’avez posé, je veux dire que…
[ Réponse individuelle]