Vous êtes sur la page 1sur 114

Chapitre 4 : fusion nucléaire dans les étoiles et

fusion nucléaire contrôlée


Réactions de fusion nucléaire dans les étoiles
Historique

On comprit aussi dans les années 1930 que la production d’énergie


dans les étoiles est d’origine nucléaire, cette fois par un processus de
fusion de noyaux légers en noyaux plus lourds.

On se doutait auparavant du rôle de l’énergie nucléaire dans les


étoiles, mais on croyait que la radioactivité seule était en cause. C’est
le physicien germano-américain Hans Bethe (1906-2005) qui proposa,
en 1939, le cycle de réactions nucléaires (dit cycle du carbone) par
lequel s’effectue la production d’énergie dans les étoiles chaudes.

Cette découverte permit aussi d’élaborer une théorie très


satisfaisante sur la formation des éléments dans les étoiles et dans
l’Univers ancien (nucléogenèse).

On dit que Bethe, peu après sa découverte, contemplant un soir les


étoiles en compagnie de sa femme, lui dit : « et dire que je suis la
seule personne au monde qui sait pourquoi elles brillent ».
Fusion de l'hydrogène

Le noyau d'hélium est plus léger que les 4 noyaux


d'hydrogène qui l'ont produit (il y a un défaut de
masse). L'énergie par nucléon a augmenté, au
détriment de la masse. La masse par nucléon a
diminué.

Nous allons considérer la fusion de l'hydrogène, telle qu'elle se produit dans les étoiles.

Deux noyaux d'hydrogène (protons) portant chacun une charge électrique positive, se
repoussent très fortement. Mais ils possèdent aussi une autre force, qui agit de très près
comme une colle. Si on rapproche deux protons assez près l'un de l'autre, malgré la répulsion
électrique, on arrive à les coller, et ils le resteront. Mais il faut pour cela qu'ils soient vraiment
très, très proches... C'est l'interaction forte qui les attache. Cette force est beaucoup plus
intense que la répulsion électromagnétique, mais elle est de portée très courte, elle ne s'exerce
que pratiquement au contact.
La répulsion électromagnétique des protons agit comme une barrière qui les empêcherait de
se rapprocher. On la nomme barrière de potentiel. Considérons un proton au repos, et un
autre qui s'en approche. Pour qu'il franchisse la barrière de potentiel dressée autour du
premier, il faut qu'il ait une grande vitesse, et donc qu'il soit à très haute température. Ceci
n'est pas réalisé dans les conditions qui règnent sur Terre, c'est pourquoi il est si difficile de
construire un réacteur de fusion comme ITER.
Et malgré les 15 millions de degrés qui règnent au centre du Soleil, la vitesse des protons est
encore trop faible pour les rapprocher suffisamment. Mais un phénomène de mécanique
quantique, qui ne se produit pas dans le monde à notre échelle (macroscopique), permet à
un proton de franchir la barrière parfois, sans disposer de la vitesse qui serait nécessaire.
Tout se passe comme s'il avait traversé la barrière. Pour cette raison, ce phénomène est
nommé effet tunnel.
Ce schéma montre, en rouge, le puits de
potentiel attractif de l'interaction forte. Pour
que les deux protons soient collés, il faut que
le second tombe dans le puits de potentiel du
premier. Si le second arrive de la droite, avec
l'énergie E0 (correspondant à sa vitesse, donc
à sa température), il ne pourra pas franchir la
barrière, qui est trop haute. A l'énergie E1,
c'est encore impossible. Cependant, il arrive
qu'un proton puisse passer, même si son
énergie est trop faible. Il traverse la barrière
de potentiel par effet tunnel.
Hélium 2
Lorsque deux protons réussissent à se coller, ils forment un noyau ayant deux charges positives.
Il n'aura donc pas les mêmes propriétés chimiques que l'hydrogène. Il s'agit d'un élément
nouveau : c'est un noyau d'hélium. Comme il n'est constitué que de ces seuls protons, on dit
qu'il s'agit d'hélium 2, et on le note 2He. Le 2 en haut à gauche indique le nombre total de
particules qui constituent le noyau, et celui placé en bas représente le nombre de protons. Cet
hélium est donc constitué de deux nucléons, dont deux protons.

La répulsion électromagnétique, bien que moins intense que l'interaction forte, agit
suffisamment sur les deux protons pour faire éclater le noyau au bout d'un temps très bref
(quelques milliardièmes de seconde...). Aussi le noyau d'hélium 2 tout juste formé se brise, et
on retrouve les deux protons de départ (deux noyaux d'hydrogène). Comme si rien ne s'était
passé !

La fusion de deux noyaux d'hydrogène (protons) ci-dessus se note :

1H + 1H→ 2He
Les deux protons sont notés 1H (puisque ce sont des atomes d'hydrogène 1), et le noyau produit
est un 2He (hélium, constitué de deux protons).

La désintégration qui se produit très rapidement redonne les deux protons :

2He → 1H + 1H

Ces deux réactions se produisent en permanence dans le Soleil, et le très faible intervalle de
temps entre les deux permet d'entretenir en permanence une très faible proportion d'hélium 2.
Deutérium

Mais un autre phénomène se produit parfois : l'un des deux protons se débarrasse de sa
charge électrique, en émettant un électron positif (nommé positron) avant que le noyau
n'éclate ; il devient alors un neutron.

Le mécanisme en cause s'appelle radioactivité béta.

Un positron est exactement semblable à un électron, mais porte une charge positive et non
négative. C'est l'antiparticule de l'électron, ou anti-électron.

La réaction qui se produit dans le noyau d'hélium 2 s'écrit :


2He → 2H + e+ + ν

où ν est un neutrino électronique (particule neutre de très faible masse).


Ainsi, l'assemblage 2H obtenu comporte maintenant un proton et un neutron. Entre eux, pas
de répulsion électromagnétique, et donc l'assemblage est stable. Ce noyau va pouvoir vivre
longtemps.
Ayant le même nombre de protons que l'atome d'hydrogène (un seul), il aura les mêmes
propriétés chimiques. C'est donc un nouveau noyau d'hydrogène, mais de plus grande masse.
Il est appelé deutérium, ou hydrogène lourd.

C'est avec lui qu'on fabrique l'eau lourde : puisque c'est un vrai atome d'hydrogène, il peut
parfaitement se combiner avec l'oxygène (réaction chimique, il a le même cortège
électronique), pour donner de l'eau. Mais une telle molécule contient un neutron en plus,
donc sa masse est un peu plus élevée, ce qui justifie le nom d'eau lourde.
Toujours plus lourd... Une molécule d'eau
ordinaire est constituée de deux atomes
d'hydrogène et d'un atome d'oxygène. Dans la
deuxième fiole, l'hydrogène est remplacé par
l'un de ses deux isotopes, le deutérium. Tous
les atomes d'hydrogène ont été remplacés par
des atomes de tritium dans le troisième flacon,
qui est le plus lourd. En mai 1950, Life
Magazine a utilisé cette photo pour faire
comprendre la notion d'isotope « lourd » à ses
lecteurs.
Le bilan de cette première phase est donc :

1H + 1H → 2H + e+ + νe + 0,42 MeV
Hélium 3

Les réactions ne s'arrêtent pas là. Le noyau de deutérium obtenu va capturer un nouveau
proton, qui restera chargé (qui restera proton). Le nouvel assemblage comporte donc deux
protons et un neutron ; c'est donc un noyau d'hélium, mais qui comporte un neutron de plus
que celui qu'on a vu plus haut. Comme il existe plusieurs isotopes de l’hydrogène, il existe
plusieurs isotopes de l’hélium : celui-ci est l'hélium 3 (car il comporte 3 nucléons), noté 3He.
La réaction s'écrit :
2H + 1H → 3He + γ

La réaction produit, en plus du noyau d'hélium 3, un photon gamma de haute énergie. Ce


photon constituera une partie de l'énergie produite dans le Soleil.

2H + 1H → 3He + γ + 5,49 MeV


Hélium 4 enfin

Et les réactions continuent, mais de façon un peu différente. Deux noyaux d'hélium 3
nouvellement formés se rencontrent, et fusionnent en se débarrassant de deux protons :

3He + 3He → 4He + 1H + 1H

Le résultat est un noyau comportant maintenant deux protons et deux neutrons ; c'est de
l'hélium 4 (car il comporte 4 nucléons) 4He. On l'appelle aussi particule alpha (pour des raisons
historiques). Ce noyau est très stable, et ne subira plus d'autre réactions, sauf si la température
s'élève très fortement (100 millions de degrés). La raison est simple : le noyau possède
maintenant deux charges électriques, qui vont repousser vivement tout autre noyau candidat à
la fusion.

3He +3He → 4He + 1H + 1H + 12,86 MeV


On peut résumer tout ceci dans une
animation, qui montre comment
l'hydrogène fusionne en hélium. Les
protons sont représentés par de petites
boules rouges, les neutrons par de
petites boules bleues. Le positron est
représenté en rouge également,
puisqu'il porte la même charge
électrique que le proton, mais en plus
petit car c'est un lepton (léger). Enfin, le
neutrino est représenté en jaune.

En bas à gauche apparaît la dernière réaction produite. A droite, deux indications différentes
sont données. Pour la première réaction, il s'agit de la durée de vie du noyau formé : l'hélium 2
ne subsiste que 10-20 seconde. Pour que le noyau ne se brise pas, il faut qu'une réaction béta
transforme l'un des deux protons en neutron, pendant ce si bref intervalle de temps. Aussi,
pour un proton donné, la transformation ne se fera en moyenne qu'au bout de 14 milliards
d'années, plus que la durée de vie du Soleil. C'est le nombre extraordinaire de protons qui
composent son noyau qui permet de réaliser suffisamment de réactions pour assurer l'énergie
de notre étoile.
Ces réactions se produisent à partir de 4 millions de degrés, mais le taux de réaction dépend
de la température : plus c'est chaud, plus c'est efficace. Dans le cœur du soleil, la
température est de 15 millions de degrés, et les réactions de cette chaîne sont très efficaces.

Toutes ces réactions ne se produisent pas à la même vitesse ; remarquons tout d'abord que
la première n'est possible que par effet tunnel, dans une aile de l'onde associée au proton. La
probabilité pour que le proton se trouve dans cette aile est très faible, et par suite la réaction
ne se produit presque jamais. Pour un proton donné, dans le centre du Soleil (14 millions de
degrés), l'attente est de 14 milliards d'années, en moyenne, avant que la réaction ne se
produise. C'est dire que très peu d'hélium 2 est produit à chaque instant.
Vous n'avez sans doute jamais entendu parler de l'atome d'hélium 2 produit (2He). C'est
parce qu'il est excessivement instable, et se désintègre en moins de 10-8 seconde en deux
noyaux d'hydrogène (les deux protons de départ). C'est tout juste si le noyau d'hélium 2 a été
produit. Cette réaction, très rare, permet cependant d'avoir à chaque instant un petit
nombre de noyaux 2He présents dans le Soleil.
Dans les 10-8 secondes de vie de ce noyau, il est possible qu'une réaction béta désintègre l'un
des protons en un neutron, pour donner le noyau de Deutérium qui permettra la réaction
suivante (2H est noté D). Là encore, la probabilité est très faible (caractéristique des
désintégrations béta), et presque tous les noyaux d'hélium 2 se brisent en noyaux
d'hydrogène. C'est cette désintégration béta qui va ralentir énormément le processus de
transformation de l'hydrogène en hélium. Heureusement, car sans cela, il y a longtemps que
le soleil aurait fini de briller !
Les deux réactions qui suivent, et achèvent la chaîne, sont rapides (un petit million
d'années...), et ne posent pas de problème.
Au total, 4 atomes d'hydrogène ont fusionné pour former un atome d'hélium 4. L'ensemble de
ces réactions se résume à l'écriture simplifiée suivante :

4 1H → 4He + e+ + γ + ν

On nomme cet ensemble de réactions chaîne proton-proton, d'après la première des réactions
qui combine deux protons.

En voici le résumé :

Ce n'est pas la seule possibilité pour former un atome d'hélium à partir de l'hydrogène, nous
le verrons plus loin.
Les 4 réactions qui composent
cette chaîne n'ont pas toutes la
même probabilité de se produire :
Cet ajout représente l'énergie produite par la réaction ! Elle est évacuée sous la forme d'un
photon gamma, et de l'énergie emportée par le neutrino et le positron (énergie cinétique) :

4 1H → 4He + e+ + γ + ν

La différence de masse correspond à l'énergie libérée.


Energie produite par la transformation de l’hydrogène en hélium

Ceci est équivalent à 26,72 MeV (4,281 10-12 Joule), qui sont dégagés pour chaque noyau
d'hélium produit.
Pour être complet, il faudrait mentionner deux variantes du cycle proton-proton.

La chaîne de réactions donnée ci-dessus se nomme alors PPI, et les deux autres PPII et PPIII.
Elles font intervenir le lithium et le berylium, qui sont des noyaux très fragiles, qui en fait se
brisent en général avant de pouvoir intervenir dans une autre réaction.

Pour cette raison, l'efficacité de ces variantes est beaucoup plus faible que celle du cycle
principal.

Ces variantes de la chaîne proton-proton nécessitent la présence de noyaux d'hélium dans le


plasma. Elles passent par des noyaux plus lourds, Bérylium 7 et même Bore 8 :

Variante PPII

Variante PPIII
On visualise bien sur ce schéma les différences entre les trois branches :
entre PP1 et (PP2, PP3), on trouve la fusion avec un hélium 3 pour le premier, un hélium 4
pour le second (il doit donc déjà exister, cette réaction sera donc de plus en plus probable quand
la concentration en hélium 4 augmentera).
entre PP2 et PP3, on ajoute au béryllium 7
soit un électron qui va annuler la charge d'un proton et donc produire un noyau de
lithium (le précédent dans la table de Mendeleïev) ;
soit un proton de charge positive, qui va produire un noyau de bore 8 (le suivant dans la
table de Mendeleïev).
Chaîne pp avec variantes
Cas des étoiles massives : cycle du carbone, ou cycle CNO, ou cycle de Bethe
Le cycle du carbone utilise des atomes présents dans le milieu pour permettre certaines
réactions. Il ne peut donc se produire que si la métallicité de l'étoile est non nulle (si elle
contient des éléments plus lourds que l'hélium). Les atomes utilisés sont reproduits à la fin du
cycle, aussi on les nomme catalyseurs, par analogie avec les catalyseurs chimiques.

Il y a deux variantes de ce cycle. Toutes deux consistent en une succession d'absorptions de


protons par un noyau de carbone (au départ). Ce noyau se transforme successivement :
par réaction nucléaire pure, en un élément supérieur du tableau de Mendeleïev ;
par réaction béta, un proton se désintégrant en neutron.
La masse du noyau croissant ainsi, il devient instable, et se désintègre par radioactivité alpha,
en émettant un noyau d'hélium.
La première variante restitue le carbone utilisé dans la première réaction, alors que la seconde
produit de l'azote dans la dernière réaction. En fait, l'azote produit peut intervenir dans la
quatrième réaction de la première forme, et donc redonner du carbone au bout du compte.
Le cycle du carbone se produit à plus haute température que la chaîne proton-proton, puisqu'il
met en jeu des atomes plus lourds. A une température de l'ordre de 18 millions de degrés, les
deux mécanismes produisent la même quantité d'énergie, chacun contribuant donc pour la
moitié de la production totale. C'est pourquoi le moteur du Soleil, de température inférieure,
est alimenté essentiellement par le cycle proton-proton, qui produit 77 % de son énergie totale.
Par contre, dans des étoiles plus massives, la température centrale est plus élevée, et le cycle de
carbone devient prédominant. La masse pour laquelle ceci se produit est de l'ordre de 1,5
masses solaires.

Le bilan global de toutes ces réactions peut s'écrire :

4 1H→ 4He ;

en effet, tout le reste est restitué à la fin de la réaction. Seul l'hydrogène a été transformé. C'est
pour cette raison qu'on dit que les étoiles transforment l'hydrogène en hélium.
Une des variantes du cycle CNO
A basse température, au-dessous de 10 millions de degrés, le cycle proton-proton présente un
bon rendement, et le cycle CNO n'a pas la température suffisante pour produire beaucoup
d'énergie. Lorsque la température augmente, les rendements s'inversent, et le cycle CNO
devient prépondérant. Le schéma ci-dessous montre l'efficacité des deux cycles, et la courbe
résultant de leur combinaison :

Par conséquent, puisque la température centrale dépend de la pression, qui dépend de la


masse, les étoiles les moins massives fusionnent essentiellement par le cycle PP (courbe verte),
les plus massives par le cycle CNO (courbe bleue). Pour le Soleil, la masse est juste en-dessous
du coude, et le cycle PP est prépondérant. La courbe rouge est la résultante des deux, qui
s'applique dans une étoile réelle où les deux cycles coexistent.
La fusion de l'hélium est le moteur de la phase la plus longue de la vie d'une étoile, la
Séquence Principale.

Lorsque tout l'hydrogène (possible) a été consommé, l'étoile est en panne ; mais elle peut le
plus souvent utiliser un carburant de secours, tout simplement l'hélium qu'elle vient de
produire. Cet élément-là est aussi capable de fusionner, mais à une température beaucoup
plus élevée, qui n'était pas atteinte auparavant.
Fusion de l'hélium

Il n'est pas possible d'ajouter un proton (noyau d'hydrogène) à une particule alpha (noyau
d'hélium), car ceci produit un noyau de masse atomique 5. Or aucun n'est stable : 5Li et 5He ont
une durée de vie de 10-21 s... C'est bien trop peu pour qu'ils capturent un autre proton et
passent à Z = 6.

Pour fusionner l'hélium, il reste alors la fusion de deux particules alpha, qui donnent un noyau
de masse atomique 8 (les noyaux plus légers étant tous hautement instables) :

4He + 4He→ 8Be

Mais le Berylium 8 n'est pas non plus stable. Il se désintègre en 10-16 s. C'est très rapide, mais
tout de même 100 000 fois moins que pour le lithium 5 ou l'hélium 5.

En fait, dans les conditions qui règnent au centre des étoiles assez massives, les chocs entre
atomes sont assez fréquents, pour que quelques atomes de Be 8 fusionnent, avant de se
désintégrer, avec des particules alpha. Cette nouvelle réaction s'écrit donc :

8Be + 4He → 12C + γ

Ces deux réactions doivent se faire dans un temps très bref, sous peine de ne pas se réaliser du
tout. Ce qui fait que c'est (presque) une réaction à trois particules alpha qui se produire. Pour
cette raison, on appelle cet ensemble de deux réactions simultanées : réaction triple alpha.
Le résultat est un atome de carbone, produit dans un état excité, et qui doit donc se désexciter.

Il dispose pour cela de deux moyens :

la réaction inverse, qui redonne le Be 8 (qui se désintègre à son tour en deux particules
alpha) ;

la désexcitation par émission d'un photon gamma

C'est le premier mentionné des deux mécanismes qui est le plus probable. Mais les quelques
désexcitations réalisées par des rayons gamma sont suffisantes pour qu'au fil du temps le
carbone, stable, s'amoncelle dans l'étoile.
La réaction de fusion de Be 8 est donc peu probable en général, et ne justifierait pas
l'abondance du carbone observée dans l'univers. Ceci a été longtemps un problème
insurmontable. Il a été résolu par Edwin Salpeter dans les années 50.
La deuxième réaction, produisant l'atome de carbone, est une réaction résonnante. Ceci signifie
que sa section efficace (fixant le taux de réaction, comme la surface d'une cible fixe le nombre
de fléchettes qui l'atteignent) dépend fortement de la température : lorsque celle-ci augmente,
la section efficace croît très vite, passe par un maximum, puis décroît. Au maximum, le taux de
réactions est très élevé, et l'hélium fusionne très vite en carbone.
Dans certains cas, cette réaction est même explosive : c'est le flash de l'hélium, qui se produit
lorsque la température, augmentant, atteint la température de résonnance.

Ces réactions ne sont possibles que lorsque la barrière électrostatique des protons est vaincue.
Puisqu'elles mettent en jeu trois noyaux d'hélium, soit 6 protons, l'énergie cinétique des noyaux
doit être très grande, et donc aussi leur température. Une température de 100 millions de
degrés est nécessaire, et la densité doit être d'au moins 100 kg/cm3 pour assurer un taux de
réaction suffisant. C'est pourquoi la fusion de l'hélium est impossible pendant celle de
l'hydrogène (Séquence Principale).
La répartition des rayons stellaires dans le diagramme HR ne relève pas du hasard. La relation
luminosité-rayon :

implique que, dans un diagramme HR en coordonnées log T, log L, les lignes d'isorayon
stellaire sont des droites de pente -4.
Autres réactions
Dans les mêmes conditions de température et de pression, d'autres réactions sont possibles.
Le carbone fusionne avec une particule alpha, et donne de l'oxygène 16 ; l'azote 14 produit de
l'oxygène 18 :
12C + 4He→ 16O + γ
14N + 4He → 18F + γ et 18F → 18O + e- + γ

Ce sont aussi des réactions résonnantes. L'ensemble conduit à un cœur constitué de 49 % de


carbone, 49 % de 16O et 2 % de 18O, à la fin de la fusion de l'hélium. La fusion de l'hélium assure
l'équilibre de l'étoile dans sa phase de géante rouge. Mais l'hélium étant plus lourd que
l'hydrogène, l'énergie produite à chaque réaction est inférieure à celle produite par la fusion de
4 hydrogènes. Donc, pour produire une même quantité d'énergie, il faut un taux de réactions
bien plus élevé. De plus, l'étoile est plus contractée, donc la gravité plus forte. Pour l'équilibrer,
il faut bien plus d'énergie. Ces deux phénomènes, agissant dans le même sens, donnent une
durée de vie considérablement plus courte dans la phase géante rouge, que dans la Séquence
Principale.
L'oxygène 18 peut aussi fusionner avec une particule alpha, pour donner soit du néon 21, avec
émission d'un neutron, soit du néon 22 avec émission d'un photon γ. Le néon 22 à son tour,
donne par des réactions analogues, du magnésium 25 ou 26. Enfin, ce dernier peut donner du
silicium 28 ou 29. Ces réactions seront importantes par leur émission de nombreux neutrons,
qui ont parfois un grand rôle à jouer.

Si on s'intéresse à des noyaux plus lourds encore, on comprend bien que la température doit
être de plus en plus élevée. Les fusions ne pourront pas se produire dans la même zone et au
même moment. Ceci aura de grandes conséquences sur la constitution interne des étoiles de
grande masse.
Évolution d’une étoile massive
La supernova 1987A observée en direct en février 1987
Le télescope spatial Hubble a photographié ce magnifique secteur de la Nébuleuse des
Dentelles du Cygne, qui constitue ce qu'il reste de l'explosion d'une supernova s'étant
produit il y a plusieurs milliers d'années.
Nébuleuse du Crabe, restes de la Supernova observée le 4 juillet 1054 par les Chinois
et les Indiens Anasazi
Évolution d’une étoile de type solaire
Notre étoile en chiffres…
Températures et densités au sein du Soleil
Evolution schématique du Soleil ...
Le cœur, de masse inférieure à 1,4 M , est stabilisé par la pression de dégénérescence
électronique. Il se refroidit lentement par rayonnement pour devenir une naine blanche.
Les naines blanches sont constituées en majeure partie de carbone
(et d'un peu d'hydrogène), à un état extrêmement condensé. Une
naine blanche d'une masse solaire a un rayon de l'ordre de
grandeur de celui de la Terre. Par conséquent, la densité d'une
naine blanche est très élevée (environ une tonne par centimètre
cube de matière). Donc, si l'on compare, une cuillerée à soupe de
la matière d'une naine blanche pèse ainsi plusieurs tonnes sur
terre.
En raison des phénomènes quantiques, le diamètre de la naine blanche ne dépend alors presque
plus de sa température, contrairement à ce qui se passe dans les étoiles en activité ; il dépend
principalement de sa masse mais bizarrement, plus la masse de la naine blanche est élevée, plus
son diamètre est faible en raison de la gravitation.

Une naine blanche possède une masse inférieure à 1,4 masse solaire (limite de Chandrasekhar),
car sinon, la pression de dégénérescence des électrons n'est pas suffisante pour contrecarrer la
gravitation : les électrons se combinent alors avec les protons pour former des neutrons (le
principe d'exclusion de Pauli n'est donc pas violé), qui provoquent eux-aussi l'apparition d'une
pression de dégénérescence, pouvant maintenir l'astre sous forme d'une étoile à neutrons, ou
même, si l'astre initial est trop massif, rien n'empêche son effondrement et l'on obtient un trou
noir
On pense que la naine blanche est le terme de l'évolution des étoiles de masse initiale inférieure
à environ 4 M.
Comparaison d'images entre le télescope Hubble et un télescope
terrestre de l'amas globulaire M4, montrant des naines blanches.
Vers les centrales à fusion
Rappel : fission et fusion

Pour produire de l'énergie, il faut réaliser une transformation dans laquelle, entre l'état initial
et l'état final, un peu de la masse des corps en jeu a disparu. Ce défaut de masse se retrouve
alors sous forme d'énergie par la formule bien connue E=mc2 où E est l'énergie produite, m la
masse disparue et c la vitesse de la lumière.

Deux grands types de réactions nucléaires faisant baisser la masse et libérant donc de l'énergie
sont possibles :
A partir de noyaux d'atomes très légers (exemple le deutérium et le tritium) pour construire
des atomes plus lourds, c'est la fusion.
A partir du noyau d'un atome suffisamment lourd (par exemple l'atome d'uranium) pour en
faire des atomes plus légers, c'est la fission.
Courbe d’Aston et stabilité des noyaux
Réactions de fusion

Pour obtenir une réaction de fusion, il faut rapprocher suffisamment deux noyaux qui, puisqu'ils
sont tous deux chargés positivement, se repoussent.

Une certaine énergie est donc indispensable pour franchir cette barrière et arriver dans la zone,
très proche du noyau, où se manifestent les forces nucléaires capables de l'emporter sur la
répulsion électrostatique.

Elle ne peut être obtenue qu’avec des conditions de température et de pression exceptionnelles
(plus de 100 millions de degrés).

A ces températures, les électrons ne sont plus liés au noyau. L’ensemble se trouve sous forme de
plasma, mélange d’électrons et de noyaux à une température extraordinairement élevée.

La vitesse des noyaux se traduit extérieurement par la température du milieu dans lesquelles
elles évoluent.

Atteindre les vitesses nécessaires revient donc à amener le gaz dont on souhaite obtenir des
fusions à une température correspondant à ces vitesses. Plus les éléments à fusionner sont
lourds et plus la température à atteindre est importante.
Comment forcer la fusion de deux noyaux légers
La probabilité de passage de cette barrière peut être quantifiée par la « section efficace ». La
variation en fonction de l'énergie d'interaction exprimée keV des sections efficaces de
plusieurs réactions de fusion est indiquée sur les courbes ci-dessous.

La réaction de fusion la plus accessible est la réaction impliquant le deutérium et le tritium


pour former de l’hélium. C'est sur cette réaction que se concentrent les recherches sur la
fusion contrôlée.
L’énergie cinétique totale libérée est de 17,6 MeV mais c’est le neutron qui en emporte la plus
grande partie.

Celui-ci sera, de plus, récupéré dans la couverture du réacteur pour réagir avec le lithium (Li) la
composant afin de produire le tritium nécessaire à la première réaction. Cette réaction n’est pas
à proprement parler une réaction de fusion mais elle permet de régénérer le tritium :
Le processus de fusion est (sur le papier) plus rentable que celui de fission
Unités et calcul de l’énergie liée au défaut de masse
Energie de quelques fusions
Le plasma, quatrième état de la matière

Les températures (qui mesurent l'énergie d'interaction) requises pour vaincre la barrière
répulsive du potentiel électrostatique et réaliser la fusion thermonucléaire dépassent la
centaine de millions de degrés !

A de telles températures, les électrons se sont détachés complètement du noyau ; on dit que
l'atome s'ionise et l'on entre alors, dans le quatrième état de la matière, l'état de plasma.
Le plasma existe dans l'univers sous des formes très diverses et avec des caractéristiques très
variables. Ainsi les températures vont d'un à dix mille électronvolts et les densités s'étagent
plus encore, allant de quelques particules par m³ dans les gaz interstellaires, jusqu'à 1030
particules par m³ au centre de certaines étoiles.
Dans certains domaines, comme la physique des plasmas, il peut être pratique d'utiliser
l'électron-volt comme unité de température. Pour effectuer la conversion, on utilise la
constante de Boltzmann kB :

Par exemple, une température typique de plasma dans une fusion par confinement
magnétique est de 15 keV, soit 174 MK (mégakelvin). La température ambiante (~20 °C)
correspond à 1/40e d'électron-volt (0,025 eV).
Les plasmas constituent la forme la plus répandue de la matière dans l'univers.
Le problème du confinement

La fusion est la source d'énergie du soleil et des autres étoiles. Une étoile commence à briller
quand la matière en son cœur atteint, sous l'effet des forces de gravitation, des densités et des
températures suffisantes pour déclencher des réactions thermonucléaires libérant de
l'énergie. Dans l’étoile, la tendance du plasma à se disperser, donc à se refroidir, est
contrebalancée par la force gravitationnelle.

Sur terre, le confinement gravitationnel est impossible. Deux voies sont étudiées pour
reproduire ces réactions :

porter à très haute pression et à haute


température un petit volume de matière
pendant un temps extrêmement court, on
parle alors de confinement inertiel. On
cherche ainsi à obtenir le plus grand
nombre possible de réactions de fusion
avant que le plasma ne se disperse.

piéger et maintenir à très haute


température un plasma. Ce plasma est
confiné dans une boîte immatérielle de
forme torique créée par des champs
magnétiques, on parle alors de
confinement magnétique.
Confinement gravitationnel au cœur du Soleil

Le Soleil présente toutes les caractéristiques qui permettent de satisfaire au critère de Lawson.
Il est en grande partie constitué de noyaux d'hydrogène (soit 70% en masse), et la température
de son cœur est de 15 millions de degrés.

Le plasma est très dense, car il est naturellement confiné par l'attraction gravitationnelle, qui
empêche le gaz de se disperser et qui attire les particules vers le centre.
Deux voies à l’étude pour reproduire en laboratoire la fusion thermonucléaire
Confinement induit par Laser

Il est possible de comprimer le plasma (deutérium et tritium) dans des micro billes de quelques
millimètres de diamètre, puis de les bombarder avec des faisceaux laser très puissants. Cette
irradiation provoque l'ablation de la couche de plasma extérieure (fig b), ainsi qu'une forte
compression de la partie centrale (implosion).

La température monte alors brusquement et la densité s'accroit d'un facteur 1000 : les réactions
de fusions s'amorcent. C'est sur ce principe que fonctionne le Laser Méga joule
Le laser Mégajoule utilise la technique du confinement inertiel par laser pour amorcer une
réaction de fusion nucléaire au sein d'une capsule de combustible de fusion (généralement
deutérium et tritium). Il présente cependant certaines caractéristiques particulières :

la longueur d'onde des lasers est convertie en cours de parcours grâce à des cristaux de KDP
(dihydrogéno-phosphate de potassium) de 1 053 nm (proche infrarouge) à 351 nm (proche
ultra-violet), ce qui permet d'obtenir un dépôt d'énergie plus efficace sur la cible (ce qui fut
démontré dans les années 1980). Les cristaux permettent de convertir 50% de l'énergie laser
dans l'harmonique 3, grâce à un couplage non linéaires d'ondes.
la technique utilisée est dite d'attaque indirecte : c'est une
cavité métallique, généralement en or (« hohlraum »),
entourant la capsule de combustible, qui sert de cible aux
faisceaux laser ; l'énergie calorifique ainsi déposée entraîne la
création d'un rayonnement X, le but recherché étant de
chauffer la capsule de façon plus homogène que si elle était
irradiée directement par les lasers. Pour cela, les impulsions
lasers durent 20 ns (avec un maximum de puissance pendant 3
à 5 ns), avec une précision de synchronisation de 15 ps et une
tâche focale de 600 µm par 1200 µm.

Ces deux opérations entraînant des pertes de rendement


importantes, l'énergie effectivement reçue par la capsule de
combustible est nettement inférieure aux 1,8 MJ d'énergie
nominale déclarée.
Fusion inertielle par faisceaux lasers
Confinement et boîtes magnétiques

Pour que le combustible, à l'état de plasma, puisse produire


suffisamment de réactions thermonucléaires, il faut le maintenir
dans un volume limité et l'éloigner de toute paroi matérielle afin
de maintenir sa température élevée : c'est le confinement.

Dans un plasma à l'état libre, la trajectoire des particules est


aléatoire (image 1 ci-contre) et les particules vont s'échapper
rapidement.
Comme le plasma est formé de particules chargées, les champs
magnétiques peuvent interagir sur celles-ci. Si ce même plasma
baigne dans un champ magnétique rectiligne (image 2), les
particules s'enroulent autour des lignes de champ et ne peuvent
plus atteindre les parois latérales.
Afin d'éviter les pertes aux extrémités, on referme la boite
magnétique en créant un tore (image 3). Le champ magnétique
ainsi créé par une série d'aimants entourant le plasma s'appelle le
champ magnétique toroïdal. Les aimants générant ce champ sont
les aimants toroïdaux.
On montre que ce confinement n'est pas tout à fait suffisant et
que pour minimiser encore les fuites de particules, les lignes de
champ doivent être hélicoïdales plutôt que circulaires (image 4).
Ceci est réalisé en ajoutant au champ toroïdal un autre champ
magnétique qui lui est perpendiculaire (le champ poloïdal).
Fusion par confinement magnétique
La méthode utilisée pour produire ces lignes de champ hélicoïdales a donné naissance à deux
types de machines :

Dans un « tokamak », un ensemble de bobines produit un champ magnétique dans la


direction du tore, auquel vient s'ajouter le champ magnétique créé par un courant intense axial
circulant dans le plasma lui-même, le courant plasma. Les deux champs génèrent la structure
hélicoïdale des lignes de champ (image 5). Cette configuration a fait des progrès considérables
depuis son invention dans les années 1960 par des chercheurs russes. C'est actuellement la voie
de recherche la plus étudiée (un exemple de tokamak : Tore Supra)

Dans un « stellarator », la configuration magnétique repose entièrement sur des courants


circulant dans des bobines en hélice (image 6).
La création du courant plasma dans un tokamak

Le moyen de base pour produire le courant plasma dans un tokamak consiste à le générer par
induction.

On place un bobinage constitué de couches horizontales au milieu de la configuration (le


bobinage est placé dans le « trou » du tore). Avec ce bobinage et à condition d'y faire varier le
courant, on engendre par induction, le courant du plasma exactement comme dans un
transformateur électrique (image 7). Ce type de fonctionnement peut s'effectuer sans noyau de
fer (image 8).
La stabilisation du plasma

L'équilibre du plasma, sa position, sa forme et le contrôle du courant sont assurés par un


ensemble d'aimants horizontaux appelés bobines poloïdales (image ci-contre).
Le chauffage du plasma

Quelle que soit la façon dont on a créé le plasma à


l'intérieur d'une structure de confinement, il n'a jamais
d'emblée la température requise pour les réactions de
fusion.

Trois méthodes sont possibles pour chauffer un plasma :


le courant qui circule dans le plasma sert également à chauffer le plasma par effet Joule. Ce
dernier reste efficace jusqu'à une température de l'ordre de 10 millions de degrés. Au delà, la
résistivité du plasma devient trop faible et l'efficacité de cette méthode décroît (la résistance
étant trop faible pour obtenir un chauffage par effet Joule). Dans un Stellarator, il n'y a pas de
courant central et donc pas de chauffage ohmique.

le chauffage par injection de neutres consiste à créer et accélérer un faisceau d'ions, en
dehors de la machine de confinement. Ce faisceau est ensuite neutralisé avant de pénétrer dans
le plasma où les particules sont ionisées et confinées par le champ magnétique. Les collisions
redistribuent l'énergie et la température du plasma augmente.

le plasma peut absorber l'énergie d'ondes électromagnétiques aux fréquences


caractéristiques du milieu. Ce chauffage par ondes électromagnétiques est transmis au plasma
par des antennes qui tapissent une partie de l'enceinte de confinement. Le choix de la
fréquence permet de définir l'espèce de particules (ions ou électrons) qui sera chauffée et la
région où se fera l'absorption de l'onde et donc le chauffage.
Dans un réacteur de fusion thermonucléaire à confinement magnétique, la température du
plasma pourrait être amenée au niveau adéquat par une combinaison des méthodes ci-dessus.

Lorsque les réactions de fusion sont en nombre important, l'énergie portée par les noyaux
d'hélium reste confinée dans le plasma et contribue à son chauffage. Si cette contribution
devient égale à l'énergie perdue par le plasma, alors les méthodes de chauffage ci-dessus ne
sont plus nécessaires. Le plasma thermonucléaire est alors autoentretenu : on dit qu'il est en
ignition. Si l'on définit le facteur d'amplification comme étant le rapport entre la puissance
totale générée par le plasma et la puissance de chauffage injectée dans le plasma, alors ce
facteur d'amplification est infini si le plasma est autoentretenu. Lorsque ce facteur est égal à
l'unité, le plasma fournit autant d'énergie qu'on lui en injecte. Cette dernière condition s'appelle
le « break even ». Le tokamak européen JET a réalisé des plasmas proches du break even.

Antennes de chauffage par ondes


électromagnétiques (Tore Supra)
Tore Supra, un tokamak supraconducteur
Tore Supra est un tokamak supraconducteur, en exploitation depuis 1988 à Cadarache.
Tore Supra est principalement dédié à l'étude de la physique et des technologies
permettant de réaliser des plasmas performants de longues durées.
Avec un grand rayon de 2,40m (au centre du plasma) et un petit
rayon de 0,72m, Tore Supra est l'un des tokamaks les plus grands
du monde.

Sa principale caractéristique est son système d'aimants toroïdaux


supraconducteur qui permet de générer un champ magnétique
toroïdal permanent. Cette potentialité associée à la présence de
composants face au plasma activement refroidis par une
circulation d'eau permet l'étude des plasmas en régime quasi
permanent.
Où en est-on avec la fusion contrôlée ?
Pour obtenir un plasma performant, celui-ci doit satisfaire à des critères de densité (il doit y
avoir un nombre suffisant de noyaux) et de température (ces noyaux doivent être à des
températures de plusieurs millions de degrés).

Il faut aussi que l'énergie portée par les noyaux d'hélium reste confinée dans le plasma
suffisamment longtemps. La durée pendant laquelle l'énergie reste confinée dans le plasma est
appelée « temps de confinement de l'énergie » et elle varie avec le carré du grand rayon du
plasma. Cette effet de taille est une des caractéristiques (intrinsèques) des installations de
fusion : les plasmas performants sont obtenus dans des installations de grande taille.

Les critères ci-dessus (densité, température, temps de confinement) ont été obtenus de façon
non simultanée dans les installations expérimentales actuelles.

La communauté des chercheurs et ingénieurs impliqués dans les études sur la fusion contrôlée
magnétique est maintenant prête à effectuer un pas supplémentaire : démontrer la maîtrise
de la combustion entretenue d'un plasma deutérium-tritium sur des temps longs.

Ce sera l'étape suivante et le principal objectif de la prochaine machine expérimentale


internationale (ITER).
Le critère de Lawson (1956)

Les noyaux de deutérium et de tritium étant tous les deux chargés positivement, leur tendance
naturelle à se repousser constitue un obstacle important à la fusion. Cependant, en fournissant
aux noyaux suffisamment d’énergie cinétique (par chauffage du plasma à plusieurs millions de
degrés), ce problème peut être surmonté afin de permettre le rapprochement des noyaux.

En outre, la probabilité de rencontre des noyaux est d’autant plus importante que la densité de
plasma (n) est grande et que le temps caractéristique de confinement est élevé (t).

Ainsi, température, densité et temps de confinement sont trois paramètres dont le produit doit
satisfaire le critère de Lawson, seuil où l’énergie libérée par la fusion est égale à l’énergie
fournie au système.

Critère de Lawson :

- T est la température du plasma (en eV). Elle est habituellement exprimée en degrés Kelvin.
Cependant, la température est exprimée dans une unité d’énergie (l’électron-volt) car elle est
aussi l’image de l’agitation des particules. Un eV correspond à 11604 K.
En pratique, la fusion est réalisée à des températures de 10 à 20 keV (soit 100 à 200 millions
de degrés) afin que la rencontre des noyaux soit la plus probable.
- τ est le temps caractéristique de confinement (en s) pendant lequel le plasma est maintenu à
la température T.
- n est la concentration des ions du plasma (en m-3).
Les progrès des recherches en fusion sont illustrées par l'augmentation du triple produit n
TtE , que l'on voit sur la figure ci-contre et qui a gagné trois ordres de grandeur depuis les
premières expériences dans la fin des années 60 jusqu'aux plus grandes machines actuelles
(comme JET en Europe, TFTR aux Etats-Unis et JT60U au Japon), qui frôlent la zone du
break-even. Il ne reste plus qu'un facteur 10 à gagner pour entrer dans le domaine du
réacteur.
Les grands résultats

Depuis l'avènement des tokamaks vers 1970, la puissance de fusion des plasmas générés par
les diverses installations de par le monde a été multipliée par 10 000 millions. De nombreux et
importants résultats ont été obtenus dans tous les domaines, que cela soit au niveau de la
physique ou des technologies utilisées.

Si l'on ne devait retenir que deux grands résultats, ce serait :

les plasmas de forte puissance réalisés en 1997 dans l'installation européenne JET
les plasmas d’une durée de 6minutes et 30 secondes réalisés dans Tore Supra en décembre
2003.
Progression de la puissance fusion au cours du temps
Le réacteur ITER
Countries participating in the ITER project.
The dots indicate fusion research institutes.
Des expérimentations au réacteur

Depuis longtemps la communauté Fusion a cherché à définir ce que pourrait être le réacteur
du futur. On dispose donc d'études, régulièrement remises à jour, qui fixent les contours et
parfois les détails de ce que pourrait être un réacteur de fusion. En plus de ces études
prospectives, il faut citer les études d'ingénierie détaillée du projet ITER qui tout en n'étant pas
totalement représentatives ont tout de même défini avec précision la majeure partie des
grands composants d'un réacteur.

Le schéma de principe du réacteur électrogène est indiqué ci-dessous.

Le mélange combustible deutérium-tritium est injecté (1) dans une chambre où, grâce à un
système de confinement il passe à l'état de plasma et brûle (2). Ce faisant, le réacteur produit
des cendres (les atomes d'hélium) et de l'énergie sous forme de particules rapides ou de
rayonnement (3). L'énergie produite sous forme de particules chargées et de rayonnement,
s'absorbe dans un composant particulier, la « première paroi » qui, comme son nom l'indique,
est le premier élément matériel rencontré au-delà du plasma. L'énergie qui apparaît sous
forme d'énergie cinétique des neutrons est, quant à elle, convertie en chaleur dans la
couverture tritigène (4) : élément au-delà de la première paroi, mais néanmoins à l'intérieur de
la chambre à vide. La chambre à vide elle-même est le composant qui clôt l'espace où a lieu la
réaction de fusion. Première paroi, couverture et chambre à vide sont bien évidemment
refroidies par un système d'extraction de la chaleur. La chaleur est utilisée pour produire de la
vapeur et alimenter un ensemble classique turbine et alternateur producteur d'électricité (5).
Si l'on exclut tous les composants chargés de la production d'énergie (couverture tritigène
par exemple), un réacteur sera assez proche de ce que pourrait être une installation
expérimentale de prochaine génération de type ITER.

Cette prochaine installation validera la faisabilité de la production d'énergie via la fusion


thermonucléaire non seulement au niveau de la physique mais aussi au niveau de la
majeure partie des grands composants d'un réacteur (bobines magnétiques
supraconductrices de grande taille par exemple).

Les performances en terme de confinement plasma demandées à un réacteur électrogènes


ne sont que 4 à 5 fois supérieures aux performances nominales du projet ITER.

On peut raisonnablement estimer que les premiers kW électriques produits par un


prototype de réacteur à fusion thermonucléaire puissent voir le jour à l'horizon 2050 soit
environ cent ans après le début des recherches sur la fusion thermonucléaire contrôlée.
Cent ans d'écart entre la découverte du concept et l'utilisation finale ne sont pas si
inhabituels que cela : la découverte du principe des cellules solaires date de 1839 (A.
Becquerel) et la découverte du principe de la pile à combustible date de 1839 (W.R. Grove).
Financement de Iter et de la fusion en général
Fusion et Sûreté
Les installations de fusion présentent de grands avantages en terme de sûreté et
d’environnement comme :

l’absence de risque d’emballement de la réaction


l’absence de déchet radioactif à vie longue
le très faible impact global sur l’environnement

L’absence de risque d’emballement de la réaction


Les conditions d’entretien de la réaction de fusion imposent l’utilisation d’un plasma très peu
dense (quelques grammes de combustible dans un volume de plusieurs centaines de m3), très
pur et à très haute température. La quantité de combustible présente dans la chambre de
combustion pendant la réaction est donc toujours très faible.

La moindre perturbation non contrôlée de ce milieu entraîne son refroidissement rapide et


l’arrêt automatique des réactions de fusion. L’emballement de la réaction est par conséquent
intrinsèquement impossible. Après l'arrêt du plasma, l'énergie résiduelle est faible. Aucune
détérioration majeure d'origine accidentelle portant sur les structures ne peut se produire. Il en
résulte que la fonction principale de sûreté à assurer est le confinement (pour un réacteur à
fission, il faut ajouter le contrôle de la réaction et l’évacuation de la puissance résiduelle).
La stratégie de confinement fait l'objet d'un soin particulier à cause de la présence de tritium
qui se caractérise par une diffusion élevée dans la plupart des matériaux. Cependant, il faut
souligner que des techniques éprouvées et qualifiées dans plusieurs installations au monde
ont montré leur efficacité concernant la gestion du tritium. Des études détaillées ont montré
qu’un dimensionnement adéquat permet d’éviter l’évacuation des populations même en cas
d’accident majeur.

L’absence de déchet radioactif à vie longue


Les combustibles utilisés dans un réacteur de fusion sont abondants, également répartis à
travers le monde et de grande densité énergétique. Le deutérium est extrait de l’eau de mer et
les réserves sont estimées à plusieurs millions d’années.

Dans un réacteur de fusion, le tritium sera fabriqué in-situ à partir du lithium qui est très
abondant dans la croûte terrestre et les océans.

Par conséquent, aucun des combustibles de base, le deutérium et le lithium, pas plus que le
produit de la réaction, l’hélium (un gaz neutre), ne sont radioactifs.

Si l’on excepte le premier démarrage qui nécessite une charge initiale en tritium, un réacteur
de fusion ne demandera pas de transport de matière radioactive.
A la fin de la vie du réacteur de fusion, les matériaux entourant le plasma et constituant la
structure du réacteur seront activés.

Sur le plan de l'impact environnemental, le choix pour ces éléments de structure de matériaux
à faible activation (ou plus exactement à temps de décroissance rapide) permet de minimiser
les quantités de déchets radioactifs. Après une période de 100 ans suivant l'arrêt définitif du
réacteur, la majorité (voire la totalité) des matériaux peut être soit considéré comme des
déchets de très faible activité (satisfaisant aux normes de déclassification des déchets
nucléaires définies par l'AIEA et recommandées par la Commission Européenne) soit recyclé
dans la filière nucléaire.
Cette qualité peut être illustrée par une image forte (cf. figure ) :
en moyenne après 100 ans de décroissance, la radioactivité
moyenne des matériaux d'un réacteur de fusion est plus faible
que celle des cendres du charbon qui aurait produit la même
quantité d'énergie.

L'élimination des déchets de fusion par la génération qui a


contribué à les créer est un objectif tout à fait réalisable.
Le très faible impact global sur l’environnement
Toute activité humaine agit directement ou indirectement sur l'environnement. La
sensibilisation croissante des opinions publiques aux questions environnementales a conduit à
s'interroger sur une méthode permettant de mesurer les impacts environnementaux de
l'utilisation de l'énergie. L'Union européenne étudie dans le cadre du programme ExternE
(Externalities of Energy) la notion d’externalité associée à la production d’énergie. Toute
conséquence (négative ou positive) d’une activité qui n’est pas prise en compte dans le coût de
cette activité génère une externalité (ou un coût externe).

Les externalités peuvent être assimilées à une unité de mesure permettant de quantifier
l'impact sur l'environnement d'une activité : une faible externalité indique un faible impact sur
l'environnement. Sommairement, la méthodologie d’évaluation des externalités d’un système
de production d’énergie est basée sur l’identification des émissions dues à ce système, puis sur
l'étude du transfert des polluants dans l’environnement et enfin sur l'évaluation et la
quantification en terme de coûts des impacts sur l’environnement et la santé. Cette analyse est
menée à tous les stades de la filière considérée (extraction du combustible, construction de la
centrale, exploitation, accident, démantèlement…). Cette analyse permet par exemple la prise
en compte des effets néfastes sur la santé de l'exploitation minière ou de la pollution liée à
l'utilisation des énergie fossiles (problèmes respiratoires,...).
Le résultats provenant d’une part de l’étude ExternE , et d’autre part des études socio-
économiques réalisées au sein du programme fusion montrent que les externalités de la filière
fusion sont les plus basses de toutes les filières considérées (figure). L'énergie de fusion est la
filière énergétique présentant les impacts sur l'environnement les plus faibles. Ceci est la
conséquence des avantages inhérents de la fusion : pas de pollution atmosphérique en
fonctionnement, filière produisant le moins de CO2, ....

Vous aimerez peut-être aussi