832/217 à Bagdad ne fit qu'accentuer la diffusion de la pensée grecque
et hellénistique. Son équipe officielle de traducteurs, nestoriens pour la plupart, contribua à répandre les oeuvres d'Aristote et de ses com- mentateurs, les trois dernières Ennéades de Plotin, appelées par mé- prise Théologie d'Aristote, et de nombreuses oeuvres apocryphes de Platon. Le rationalisme mu`tazilite, devenu doctrine d'État sous le règne des trois califes Al-Ma'mûn, Al-Mu`taçim et Al-Wâthiq, et qui imposa par une véritable inquisition (mihna) la croyance au caractère créé du Coran, est à l'origine à la fois de la faveur dont jouirent les philosophes dans les milieux « humanistes » et de la réaction sunnite, à partir du calife Al-Mutawakkil (mort en 861/247), sous la forme hanbalite d'un retour au pur fidéisme et au littéralisme traditionniste et sous la forme d'une théologie apologétique usant de la dialectique, le Kalâm, illustrée par Ach`ad. Quand Ghazâlî résolut de s'attaquer aux philosophes, la période des traductions, du grec en arabe ou du syriaque en arabe, avait fait place à celle de la production d'oeuvres originales. La falsafa était née et s'était développée, d'abord avec Al-Kindî (mort en 873/260), l'auteur d'un célèbre petit traité sur l'Intellect, puis surtout avec Al-Fârâbî (mort en 950/339), surnommé « le second Maître », le premier étant Aristote, et Ibn Sînâ (Avicenne ; mort en 1037/429), dont le renom en médecine et en philosophie s'étendit en Occident jusqu'à la Renais- sance. L'encyclopédie philosophique des Ikhwân al-Çafâ (« les Frères de la Pureté »), rédigée par des ismaéliens entre 961 et 986 sous forme d'épîtres, représentait également un danger pour la foi sunnite aux yeux de Ghazâlî, davantage, semble-t-il, que l'humanisme éthique de Tawhîdî et Miskawayh, contemporains d'Ibn Sînâ. Par souci de méthode, Ghazâlî commença, avant de critiquer et de réfuter les positions philosophiques contraires à l'enseignement de l'Islam, par exposer impartialement les Intentions des philosophes (Maqâçid al-Falâsifa), avec une telle fidélité que, lorsque l'ouvrage fut traduit en latin, les théologiens chrétiens du mir siècle considérè- rent tous « Algazel » comme un simple disciple d'Avicenne. La réfu- tation, rédigée en un deuxième temps, restera en effet inconnue de la