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Fiche EL4 : Francais

Violence sexiste L.1-23


- La première didascalie de l’extrait est violente car elle est extrêmement sexiste : Max, le
père septuagénaire « siffle et sourit » (l.1). Il siffle parce qu’il trouve Ruth (qui va s’avérer sa
belle-fille) séduisante.

- La violence est langagière : Ruth devient « ce genre de traînée » (l. 4) qui connaît des variations
« ce genre de sale traînée » (l. 6), puis « cette foutue pute » (l. 10), puis « cette foutue pute
vérolée » (l. 10). « putain » (l. 17) « une pute » (l. 18), « une roulure » (l. 13), « cette pourriture »
(l. 19), « leurs saletés » (l. 19). Ruth que l’on n’a pas eu le loisir de présenter encore est désignée à
la troisième personne, personne du tiers-exclu, réifiée, par métaphore et synecdoque.

- Or, le dialogue qui était censé « faire les présentations » devient un dialogue de sourds. On le
remarque par les questions oratoires fermées de Max. Au théâtre, celui qui pose les questions a le
pouvoir et c’est bien ce qui se passe puisque Teddy en est réduit à faire des phrases assertives
courtes, que son père Max n’écoute qu’à moitié.

Violence physique l.24-30

- La situation est absurde et le langage, qui à la différence du théâtre de Beckett ou de Ionesco,


reste réaliste ne parvient pas à redevenir logique, à faire raison. L’extrait montre que le contexte
culturel agit sur les représentations.. Dès lors, l’opposition entre la réplique à la modalité
exclamative de Teddy « C’est ma femme ! Nous sommes mariés ! » (l. 15) et Max qui continue
après une « pause » (l. 16), « j’ai jamais eu de putain sous mon toit » (l. 17) crée un effet
burlesque. Ce qui est paradoxal car Lenny est proxénète et pourtant il n’aurait jamais amené une
prostituée ici…

- La violence de Max passe aussi par son racisme social. « Ils arrivent d’Amérique et ils
apportent leur à sac à ordures avec eux. » (l. 18)

- La violence de ce premier moment du texte tient enfin au fait que Max tyrannise l’espace de
parole et que ni l’oncle, ni les frères, ni surtout Ruth, ne parlent. Il les prend à partie grâce à des
apostrophes que manifestent les didascalies « A Joey », « Lenny », « A Teddy » (l. 17-19) sans
que ses interlocuteurs puissent répondre.

- La situation absurde explose dans une pantomime décrite en 8 lignes de didascalies.


C’est absurde car on ne sait pas pourquoi ils se battent.
C’est comique car tout le monde reçoit des coups. Même Joey qui est apprenti-boxeur se fait
terrasser par son père de 70 ans. « De douleur Joey se plie en deux et traverse la pièce en
titubant. » (l. 25)

- La pantomime est burlesque dans la mesure où Max est réellement vieux et que cette petite
rixe met en danger physiquement les personnages : « Max semble sur le point de tourner de
l’œil. » (l. 26) tandis que c’est finalement Joey, qui a pris le plus, qui « s’effondre » (27). Max a
triomphé de ce petit duel, de ce petit tournois de boxe, ce qui est également comique,
renversement de la situation où le fils, plus jeune, devrait triompher du père, d’autant qu’il est
apprenti-boxeur.

- La tradition littéraire fait que les chevaliers se battent pour une dame . On remarque que tous
les mouvements des personnages convergent vers Ruth. On remarque le jeu des prépositions :
« s’effondre au pied de Ruth » (l. 28), « elle baisse les yeux sur lui » (l. 28), « il est tout proche
de Ruth » (l. 29), « s’avance vers Ruth » (l . 30). C’est comme une sorte de duel entre Max et
Joey sous le regard de Ruth. Mais on ne sait pas si ce duel avait pour but de sauver l’honneur
de la demoiselle insultée, s’il s’agit de se venger de l’affront fait au père, où s’il s’agit de
manifester aux yeux de tous, une force virile. Tout se passe comme si ces deux hommes
luttaient pour séduire la dame

Une relation ambigües L.32-44

- Le ton de Max change : il devient poli. Il appelle Ruth « Madame » (l. 32), il la vouvoie « vous
êtes mère » (l. 34). Il parle des enfants. Il pose des questions toujours construites de manière
familière car c’est un homme du peuple (il n’y a pas d’inversion verbe-sujet dans la syntaxe des
questions, juste une inflexion de voix montante), mais il semble écouter, pour une fois, les
réponses.

- Cependant, on remarque de la tendresse, à la fois dans les mots et dans les gestes. «  un petit
câlin et un petit baiser  » (l. 39). «  embrasser  » (l. 41), «  prendre ton vieux père dans tes bras.  »
(l. 41) «  tu l’aimes toujours ton vieux père  » (l. 43).
Max convertit l’insulte de Teddy « Il est vieux » (l. 23) en expression figée, affectueuse, « ton vieux
père » (l. 43). L’échange donne l’impression que le retour du fils prodigue se fait ici. « comme au
bon vieux temps. » (l. 39) Le temps n’a pas été discontinué et les êtres sont tels qu’ils se sont
quittés, semble-t-il.

- C’est bien ce qui se passe dans l’extrait où Max apparaît, au-delà de la figure partriarcale,
comme un petit tyran domestique dont tout le monde à peur. Ted ne parle pas pour défendre
sa femme, Lenny n’intervient pas, Joey se laisse terrasser, de même que l’oncle Sam se laisse
frapper par une canne.

- La menace vient également de quelque chose de plus profond. Chez Pinter, « la menace émane
des sous-sols et des profondeurs du moi dans une double acception topographique et
psychanalytique. » (Aloysia Rousseau). C’est la présence d’un élément féminin dans la « maison »
qui immédiatement a généré toute cette violence chez Max. Cette violence est le résultat de
sentiments complexe : désir (il siffle, semble attiré par Ruth), tabou et interdit (« j’ai jamais eu de
putain sous mon toit, auparavant. Depuis la mort de votre mère. » (l.17)). De cette tension naît
l’échange tel que nous l’avons décrit.

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