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Nrp - Houellebecq, La Carte et le


Territoire - NRP HS lycée
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 Carrière  Français

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Le personnage de roman, entre humanité et monstruosité SÉQUENCE COMPLÉMENTAIRE Séances 9, 10, 11

Entrée dans le monde dans le temps où, fille encore, à fait trompé, ni entièrement rempli ; la crainte de me
j’étais vouée par état au silence et à l’inaction, j’ai su en trahir m’empêchait de m’éclairer : mais le bon Père me fit
profiter pour observer et réfléchir. Tandis qu’on me croyait le mal si grand, que j’en conclus que le plaisir devait être
étourdie ou distraite, écoutant peu à la vérité les discours extrême ; et au désir de le connaître, succéda celui de le
qu’on s’empressait de me tenir, je recueillais avec soin goûter.
ceux qu’on cherchait à me cacher. Je ne sais où ce désir m’aurait conduite ; et alors
Cette utile curiosité, en servant à m’instruire, m’apprit dénuée d’expérience, peut-être une seule occasion m’eût
encore à dissimuler : forcée souvent de cacher les objets perdue : heureusement pour moi, ma mère m’annonça
de mon attention aux yeux qui m’entouraient, j’essayai de peu de jours après que j’allais me marier ; sur-le-champ la
guider les miens à mon gré ; j’obtins dès lors de prendre certitude de savoir éteignit ma curiosité, et j’arrivai vierge
à volonté ce regard distrait que depuis vous avez loué si entre les bras de M. de Merteuil.
souvent. Encouragée par ce premier succès, je tâchai de Choderlos de Laclos, Les Liaisons dangereuses, lettre 81, 1782.
régler de même les divers mouvements de ma figure. Res-
sentais-je quelque chagrin, je m’étudiais à prendre l’air
de la sécurité, même celui de la joie ; j’ai porté le zèle Texte 2
jusqu’à me causer des douleurs volontaires, pour chercher
pendant ce temps l’expression du plaisir. Je me suis tra- Renée est la femme de Saccard, spéculateur immobilier et flam-
vaillée avec le même soin et plus de peine pour réprimer beur, toujours en quête d’argent. Elle a eu une liaison avec le fils de
les symptômes d’une joie inattendue. C’est ainsi que j’ai son mari. Quand ce dernier l’apprend, il ne condamne pas sa femme
su prendre sur ma physionomie cette puissance dont je mais en profite pour lui extorquer une grosse somme.
vous ai vu quelquefois si étonné.
J’étais bien jeune encore, et presque sans intérêt : mais
je n’avais à moi que ma pensée, et je m’indignais qu’on Elle s’aperçut dans la haute glace de l’armoire. Elle
pût me la ravir ou me la surprendre contre ma volonté. s’approcha, étonnée de se voir, oubliant son mari, oubliant
Munie de ces premières armes, j’en essayai l’usage : non Maxime, toute préoccupée par l’étrange femme qu’elle
contente de ne plus me laisser pénétrer, je m’amusais à me avait devant elle. La folie montait. Ses cheveux jaunes,
montrer sous des formes différentes ; sûre de mes gestes, relevés sur les tempes et sur la nuque, lui parurent une
j’observais mes discours ; je réglais les uns et les autres, nudité, une obscénité. La ride de son front se creusait
suivant les circonstances, ou même seulement suivant mes si profondément, qu’elle mettait une barre sombre au-
fantaisies : dès ce moment, ma façon de penser fut pour dessus des yeux, la meurtrissure mince et bleuâtre d’un
moi seule, et je ne montrai plus que celle qu’il m’était utile coup de fouet. Qui donc l’avait marquée ainsi ? Son mari
de laisser voir. n’avait pas levé la main, pourtant. Et ses lèvres l’éton -
Ce travail sur moi-même avait fixé mon attention sur naient par leur pâleur, ses yeux de myope lui semblaient
l’expression des figures et le caractère des physionomies ; morts. Comme elle était vieille ! Elle pencha le front, et,
et j’y gagnai ce coup d’œil pénétrant, auquel l’expérience quand elle se vit dans son maillot, dans sa légère blouse
m’a pourtant appris à ne pas me fier entièrement ; mais de gaze, elle se contempla, les cils baissés, avec des rou-
qui, en tout, m’a rarement trompée. geurs subites. Qui l’avait mise nue ? Que faisait-elle dans
Je n’avais pas quinze ans, je possédais déjà les talents ce débraillé de fille qui se découvre jusqu’au ventre ?
auxquels la plus grande partie de nos politiques doivent Elle ne savait plus. Elle regardait ses cuisses que le mail-
leur réputation, et je ne me trouvais encore qu’aux pre- lot arrondissait, ses hanches dont elle suivait les lignes
miers éléments de la science que je voulais acquérir. souples sous la gaze, son buste largement ouvert ; et elle
Vous jugez bien que, comme toutes les jeunes filles, je avait honte d’elle, et un mépris de sa chair l’emplissait de
cherchais à deviner l’amour et ses plaisirs : mais n’ayant colère sourde contre ceux qui la laissaient ainsi, avec de
jamais été au couvent, n’ayant point de bonne amie, et simples cercles d’or aux chevilles et aux poignets pour lui
surveillée par une mère vigilante, je n’avais que des idées cacher la peau.
vagues et que je ne pouvais fixer ; la nature même, dont Alors, cherchant, avec l’idée fixe d’une intelligence qui
assurément je n’ai eu qu’à me louer depuis, ne me don- se noie, ce qu’elle faisait là, toute nue, devant cette glace,
nait encore aucun indice. On eût dit qu’elle travaillait en elle remonta d’un saut brusque à son enfance, elle se revit à
silence à perfectionner son ouvrage. Ma tête seule fermen- sept ans, dans l’ombre grave de l’hôtel Béraud. Elle se sou -
tait ; je n’avais pas l’idée de jouir, je voulais savoir ; le désir vint d’un jour où la tante Élisabeth les avait habillées, elle et
de m’instruire m’en suggéra les moyens. Christine, de robes de laine grise à petits carreaux rouges.
Je sentis que le seul homme avec qui je pouvais parler On était à la Noël. Comme elles étaient contentes de ces
sur cet objet sans me compromettre, était mon confesseur. deux robes semblables ! La tante les gâtait, et elle poussa
Aussitôt je pris mon parti ; je surmontai ma petite honte ; les choses jusqu’à leur donner à chacune un bracelet et un
et me vantant d’une faute que je n’avais pas commise, je collier de corail. Les manches étaient longues, le corsage
m’accusai d’avoir fait tout ce que font les femmes. Ce fut montait jusqu’au menton, les bijoux s’étalaient sur l’étoffe,
mon expression ; mais en parlant ainsi, je ne savais, en ce qui leur semblait bien joli. Renée se rappelait encore que
vérité, quelle idée j’exprimais. Mon espoir ne fut ni tout son père était là, qu’il souriait de son air triste. Ce jour-là, sa

MARS 2018 HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE HORS-SÉRIE NRP LYCÉE 29

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Séances 9, 10, 11 SÉQUENCE COMPLÉMENTAIRE Le personnage de roman, entre humanité et monstruosité

sœur et elle, dans la chambre des enfants, s’étaient prome-


Questionnaire
1. Madame de Merteuil vous semble-t-elle monstrueuse ? En
nées comme de grandes personnes, sans jouer, pour ne pas
quoi sa conduite pouvait-elle faire peur au xviii e siècle ?
se salir. Puis, chez les dames de la Visitation, ses camarades
2. Dans le texte de Zola, qui est le monstre ? Pourquoi ?
l’avaient plaisantée sur « sa robe de Pierrot, » qui lui allait
au bout des doigts et qui lui montait par-dessus les oreilles.
Elle s’était mise à pleurer pendant la classe. À la récréation, Éléments de réponse
pour qu’on ne se moquât plus d’elle, elle avait retroussé les 1. Au xxi e siècle, madame de Merteuil ne semble pas un
manches et rentré le tour de cou du corsage. Et le collier monstre. En effet, elle revendique essentiellement le droit de penser
et le bracelet de corail lui semblaient plus jolis sur la peau par elle-même : « je dis mes principes, […] ; ils sont le fruit de mes
de son cou et de son bras. Était-ce ce jour-là qu’elle avait profondes réflexions ; je les ai créés, et je puis dire que je suis mon
commencé à se mettre nue ? ouvrage ». En effet, par l’observation, l’expérience et la réflexion
Sa vie se déroulait devant elle. Elle assistait à son (« observer et réfléchir », « ma tête seule fermentait »), elle décide
long effarement, à ce tapage de l’or et de la chair qui de comprendre le monde et la société, au lieu de s’en tenir au rôle
était monté en elle, dont elle avait eu jusqu’aux genoux, de gentille idiote et de femme stupide qu’on lui réserve. Pourtant,
jusqu’au ventre, puis jusqu’aux lèvres, et dont elle sentait sa conduite de libertine fait bien d’elle un monstre au xviii e siècle,
maintenant le flot passer sur sa tête, en lui battant le crâne monstre qu’il convient de punir à la fin du roman. Tout d’abord, elle
à coups pressés. C’était comme une sève mauvaise ; elle lui revendique un pouvoir quasi démiurgique (« Je suis mon ouvrage »,
avait lassé les membres, mis au cœur des excroissances de « Je me suis travaillée ») qui remet en cause la toute-puissance de
honteuses tendresses, fait pousser au cerveau des caprices Dieu et s’en prend à l’Église en se servant de son confesseur pour
de malade et de bête. Cette sève, la plante de ses pieds en apprendre davantage sur l’amour charnel. De plus, elle place le
l’avait prise sur le tapis de sa calèche, sur d’autres tapis corps au centre de ses préoccupations et s’intéresse au plaisir de
encore, sur toute cette soie et tout ce velours, où elle mar- la chair. En cela, elle est une parfaite libertine. Enfin, elle se révèle
chait depuis son mariage. Les pas des autres devaient avoir parfaite comédienne (« dissimulée », « cacher », « regard distrait »,
laissé là ces germes de poison, éclos à cette heure dans son « régler les divers mouvements de ma figure »), susceptible de
sang, et que ses veines charriaient. Elle se rappelait bien s’intégrer parfaitement à la société, de faire croire qu’elle se plie
son enfance. Lorsqu’elle était petite, elle n’avait que des aux règles qu’on lui impose alors qu’en réalité, elle rejette toute
curiosités. Même plus tard, après ce viol qui l’avait jetée contrainte et fait preuve d’une liberté d’esprit inattaquable. Elle
au mal, elle ne voulait pas tant de honte. Certes, elle serait met donc en péril la société du xviii e siècle et en particulier la place
devenue meilleure, si elle était restée à tricoter auprès de réservée aux femmes.
la tante Élisabeth. Et elle entendait le tic-tac régulier des 2. Dans un premier temps, on pourrait croire que le monstre
aiguilles de la tante, tandis qu’elle regardait fixement dans est Renée. En effet, quand elle se regarde, elle semble très laide
la glace pour lire cet avenir de paix qui lui avait échappé. (« ride de son front », « barre sombre », « yeux […] lui semblaient
Mais elle ne voyait que ses cuisses roses, ses hanches roses, morts », « vieille »). Mais en réalité, c’est la honte qui l’enlaidit,
cette étrange femme de soie rose qu’elle avait devant elle, la honte de s’être dénudée (« débraillé de fille qui se découvre
et dont la peau de fine étoffe, aux mailles serrées, semblait jusqu’au ventre »). C’est sa faute qui transforme cette femme que
faite pour des amours de pantins et de poupées. Elle en tout le monde juge magnifique en monstre obscène. Mais la faute
était arrivée à cela, à être une grande poupée dont la poi- en revient à son mari, Saccard. Et c’est lui qui apparaît comme le
trine déchirée ne laisse échapper qu’un filet de son. Alors, véritable monstre lors même qu’il vient de surprendre sa femme
devant les énormités de sa vie, le sang de son père, ce sang dans les bras de son fils. Dans un premier temps, il prend l’appa-
bourgeois qui la tourmentait aux heures de crise, cria en rence de Vulcain (« elle le voyait dans la forge, dans les éclats du
elle, se révolta. Elle qui avait toujours tremblé à la pensée métal rougi, la chair brûlée, haletant, tapant toujours, soulevant des
de l’enfer, elle aurait dû vivre au fond de la sévérité noire marteaux vingt fois trop lourds pour ses bras, au risque de s’écra-
de l’hôtel Béraud. Qui donc l’avait mise nue ? ser lui-même ») : il a l’apparence du monstre, mais la grandeur du
Et, dans l’ombre bleuâtre de la glace, elle crut voir se dieu. Mais dans un second temps, il perd cette grandeur pour être
lever les figures de Saccard et de Maxime. Saccard, noi- ramené à un vulgaire spéculateur, un être qui est prêt à toutes les
râtre, ricanant, avait une couleur de fer, un rire de tenaille, compromissions pour s’enrichir (« roulant en pleine boue, et ne
sur ses jambes grêles. Cet homme était une volonté. prenant pas le temps de s’essuyer pour arriver avant l’heure, ne
Depuis dix ans, elle le voyait dans la forge, dans les éclats s’arrêtant même pas pour jouir en chemin, mâchant ses pièces d’or
du métal rougi, la chair brûlée, haletant, tapant toujours, en courant »). C’est donc l’appât du gain qui ferait de Saccard un
soulevant des marteaux vingt fois trop lourds pour ses bras, monstre, au mépris de toute droiture morale.
au risque de s’écraser lui-même. Elle le comprenait main- La différence avec madame de Merteuil, c’est que là où l’une
tenant ; il lui apparaissait grandi par cet effort surhumain, s’oppose à la société, l’autre en semble l’émanation, l’expression du
par cette coquinerie énorme, cette idée fixe d’une immense Second Empire triomphant.
fortune immédiate. Elle se le rappelait sautant les obs-
tacles, roulant en pleine boue, et ne prenant pas le temps Prolongement
de s’essuyer pour arriver avant l’heure, ne s’arrêtant même On peut proposer aux élèves de lire La Mère aux monstres de
pas à jouir en chemin, mâchant ses pièces d’or en courant. Maupassant, qui pose la question de la relativité de la monstruosité.
Émile Zola, La Curée, chapitre 6, 1872.

30 HORS-SÉRIE NRP LYCÉE HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE MARS 2018

FICHE ÉLÈVE 1 Analyse d’image

Un portrait de Michel Houellebecq


Les photographies qui représentent Michel Houellebecq sont Application
nombreuses. Il s’agit d’acquérir une méthode pour les analyser
et porter un regard distancié et critique.

Méthode
L’analyse se déroule en deux temps : 1. faire l’inventaire
objectif des composantes de la photographie, décrire l’image le
plus rigoureusement possible ; 2. interpréter ce qu’on a observé,
s’interroger sur l’impression que l’image donne et sur ses signi-
fications.
I. Identier l’image
Avant de commencer l’analyse d’une photographie, il faut
essayer d’en établir la carte d’identité. La photographie ne
s’identifie pas seulement par ce qu’elle représente mais aussi
par ses conditions de production et de diffusion : auteur, titre,
date, format, technique (photographie argentique ou numé-
rique, photogramme, etc.), lieu de diffusion (magazine, livre,
exposition).
II. Décrire précisément l’image (la dénotation)
On prendra notamment en compte :
– le format : format carré, rectangulaire horizontal (format
paysage) ou vertical (format portrait), rond, ovale ;
– le cadre : gros plan, plan poitrine, plan américain, etc. ;
– le point de vue : contre-plongée (l’appareil est plus bas Michel Houellebecq à son domicile, dans une tour
que la personne ou l’objet photographié), frontal (au même d’immeuble, Paris 13 e arrondissement, photographie
niveau), plongée (plus haut) ; de Philippe Matsas, 2015.
– les plans : du premier plan au plan lointain. Attention à la
profondeur de champ (le photographe peut jouer sur le flou et
Analysez ce portrait de Michel Houellebecq.
le net, en mettant en évidence le premier plan net, par exemple,
Quelques questions pour guider votre analyse:
sur un arrière-plan flou) ;
– la composition : lignes qui organisent l’image : elles 1. Quelle contrainte technique impose la présence d’un
peuvent être plutôt verticales ou horizontales, introduire une miroir derrière le romancier ?
idée de symétrie et de stabilité ou au contraire de désordre ;
– l’éclairage : source et nature de la lumière. Pensez qu’un 2. Quelles sont les lignes de force créées par le décor (biblio-
éclairage peut accentuer ou créer une ambiance dramatique, thèque, montant du miroir, etc.) ?
souligner les formes ; 3. Comment s’associent les couleurs ?
– Les couleurs : sont-elles chaudes ou froides, harmo-
nieuses ou contrastées, réalistes ou symboliques ? On s’inter- 4. La photographie a été utilisée avec ce cadre, mais aussi
roge aussi sur l’intérêt de la photographie en noir et blanc, avec un gros plan sur le visage de l’auteur. Quelle différence cela
qui relève du choix esthétique et non plus, aujourd’hui, de la engendre-t-il ?
contrainte technique.
5. Pourquoi le photographe a-t-il choisi de ne donner à voir
III. Interpréter l’image (la connotation) le décor de la pièce que par son reflet dans le miroir ?
Interpréter une image, c’est tenter de comprendre et d’ex-
primer ce qui est derrière, ce que sous-entend l’image. 6. Quel effet produit le regard de Michel Houellebecq ? Pour
Pour cela, il faut : répondre à cette question, vous pouvez comparer cette photo-
– faire le lien entre ce que vous avez observé et les réflexions graphie à une autre, de la même série, dans laquelle le romancier
que vous pouvez mener (ex : le jeu des couleurs suggère…, le regarde droit devant lui, sans un regard pour l’objectif.
personnage isolé au premier plan donne l’impression de…) ; 7. Quelle impression suscite la posture de l’auteur, sa manière
– être attentif à la légende : s’il y en a une, apporte-t-elle des
de s’asseoir et de fumer ?
informations qui modifient le sens de la photo ?
– faire confiance à ses émotions. 8. Que suggère la couleur de la pièce ?

MARS 2018 HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE HORS-SÉRIE NRP LYCÉE 31

Revoir

FICHE ÉLÈVE 2 Exposé sur une thématique de l’œuvre

Le personnage
Lire un conte philosophique
de Jean-Pierre
: Martin
L’Ingénu de Voltaire, 1767
Méthode Il venait d’un milieu pauvre et quand des gens riches
l’invitaient, il avait l’impression de leur faire un honneur
1. On peut distinguer deux sortes d’exposés : en allant les voir. J’ai certainement hérité de cette forte
– Les exposés sur l’œuvre : il s’agit d’étudier un thème, un per- arrogance, de cet orgueil. Je le voyais peu. Mais il m’a dit
sonnage, non pas seulement sur un extrait (lecture analytique) qu’il était content de moi. Quelque chose m’a vraiment
mais sur toute l’œuvre. Ce type d’exposé prépare à l’entretien au frappé dans ma jeunesse : sa réticence physique à se mêler
cours duquel on peut vous poser des questions transversales. à un groupe. Et encore, le mot réticence s’avère faible, je
– Les exposés culturels ou informatifs : on va puiser dans parlerais plutôt de répulsion. J’ai certainement hérité de
les ressources que l’on a à sa disposition pour éclairer tel ou tel ça. Beaucoup de choses ont évolué dans les siècles précé-
point de l’œuvre. dents mais pas le rapport à la vie sociale. On lit Molière
ou Saint-Simon et c’est d’une actualité foudroyante : la
2. Pour les exposés sur une thématique de l’œuvre, il faut
microsociologie n’a pas bougé. Depuis longtemps je le
varier les points de vue. sentais arriver, mais c’est pendant ma correspondance
– Première étape : on cherche d’abord à comprendre l’inté- avec BHL que j’ai pris conscience du danger imminent de
rêt ou les enjeux de la question qui nous est posée. basculer dans cette misanthropie. Dans La Carte…, j’ai
– Deuxième étape : on relit l’œuvre en diagonale, en es- beaucoup exagéré, ça m’arrive souvent. J’ai fait du père de
sayant de faire un relevé exhaustif des extraits qui ont un lien Jed un être irréprochable professionnellement. Les rela-
avec le thème. tions humaines sont inquiétantes, pas le travail. On sait
– Troisième étape : on prend du recul, on cherche le sur- quand on fait bien. Et la pensée qu’on fait son travail de
plomb. On fait apparaître des lignes de force, on synthétise les son mieux – ça vaut aussi pour moi en tant qu’auteur – est
informations. une pensée bien réconfortante…

Application
Deuxième étape
Présentez Jean-Pierre Martin, le père de Jed Martin.
1. Commencez par essayer de vous remémorer les scènes les
Première étape plus importantes avec le père (le dîner de Noël chez Papa ? Le
1. Cherchez sur Internet des informations sur le propre père dîner de Noël chez Jed ? L’euthanasie en Suisse ? La découverte
de Michel Houellebecq et sur les relations qu’ils entretiennent. des cartons à dessins dans la maison du Raincy ?). Pourquoi vous
ont-elles marqué ? Que révèlent-elles ?
2. Lisez ces extraits de l’entretien de Michel Houellebecq
avec Nelly Kaprièlian dans Les Inrockuptibles le 8 novembre 2010. 2. Procédez ensuite à une lecture en diagonale du roman à
Pourquoi le romancier décide-t-il de placer les relations père-fils la recherche des réponses aux questions suivantes :
au centre de son roman ? – Quel est le métier du père de Jed ? Quelle a été sa car-
rière ? Comment appréhende-t-il sa retraite ?
– Quel père a-t-il été pour Jed ? S’est-il beaucoup occupé de
J’avais envie de revenir sur cette relation qui représente lui quand il était enfant ? Et quand le roman commence, quelles
pour moi l’essentiel du livre. C’était important de parler de
sont leurs relations ?
mon père : je découvrais chez moi ses propres caractéris-
– Quel mari a-t-il été ? Quelles ont été ses relations avec sa
tiques, en particulier le grand bonheur à passer des heures
femme, la mère de Jed ?
en voiture sur une autoroute. Mon père a fini par s’acheter
un camping-car pour ne plus avoir à sortir de l’autoroute – Pourquoi a-t-il acheté la maison du Raincy ?
pour dormir. J’ai senti que cela me gagnait, et du coup ça a – Quel était son rêve quand il était jeune ?
réactivé un truc qui m’avait jusque-là peu marqué dans ma Troisième étape
carrière littéraire mais qui m’impressionnait quand j’étais Organisez votre exposé selon un plan :
jeune : le destin. Dans le livre, Jed, quoi qu’il fasse, finit par – Réfléchissez aux caractéristiques essentielles du père de
ne plus s’intéresser qu’au travail, comme son père, même Jed. Pour son fils, il s’est toujours défini comme un homme d’af-
s’il a pleinement conscience que celui-ci a raté sa vie. C’est faires consciencieux, un architecte sans âme, juste capable de
un thème fondamental de la tragédie grecque : on tombe faire des stations balnéaires clés en main. C’est ainsi que Houel-
fatalement dans ce qu’on a voulu fuir, quels que soient les lebecq le définit : « un être irréprochable professionnellement »
efforts pour l’éviter. Le destin est une idée très déplaisante,
(et non un artiste).
effrayante même, mais forte car elle a une part de justesse.
– Montrez ensuite ce que cet homme cache, ou révèle pro-
[...]
gressivement. Allez du plus évident au plus subtil.
L’écriture manifeste peut-être une forme de liberté par
– Enfin, puisque Houellebecq évoque la figure du « destin »,
rapport au destin. Mon père était bizarre. Avec le recul, ce
qui me frappe le plus chez lui, c’est une espèce d’arrogance. demandez-vous en quoi Jed ressemble à son père, sur quels
motifs s’établit la filiation.

32 HORS-SÉRIE NRP LYCÉE HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE MARS 2018

FICHE ÉLÈVE 3 Exposé informatif

Le Corbusier
Troisième étape
Rappel Commencez vos recherches. Comment procéder ?
On peut distinguer deux sortes d’exposés : – Choisissez les bons mots-clés : on s’intéresse plus aux
– les exposés sur l’œuvre : il s’agit d’étudier un thème, un œuvres de Le Corbusier ou à ses principes qu’à sa vie.
personnage, non pas seulement sur un extrait (lecture ana- – Ayez un regard critique. Ce n’est pas la peine d’ouvrir
lytique) mais sur toute l’œuvre. Ce type d’exposé prépare à toutes les pages : par exemple, on ne consultera pas les pages
l’entretien au cours duquel on peut vous poser des questions sur les cités scolaires Le Corbusier (même si on peut toutefois
transversales ; noter que c’est un architecte suffisamment important pour
– les exposés culturels ou informatifs : on va puiser dans les qu’on donne son nom à des établissements scolaires). Peut-
ressources que l’on a à sa disposition pour éclairer tel ou tel être est-ce une bonne idée de commencer par les sites « grand
point de l’œuvre. public » et d’aller voir ensuite les sites plus spécialisés. Par
exemple, on pourrait commencer par les deux journaux d’infor-
mation (20 minutes et Le Figaro) et finir par les deux sites dédiés
à Le Corbusier, même si ces derniers apparaissent en premier.
– Notez systématiquement toutes les adresses des sites
Méthode consultés (il faut être particulièrement attentif quand on clique
Pour préparer un exposé informatif, il est nécessaire de faire sur des liens hypertextes). Pour cela, il est recommandé d’ouvrir
des recherches : une page texte en parallèle de votre fenêtre Internet et d’y indi-
– pour mieux comprendre le roman ; quer systématiquement les adresses des sites consultés.
– pour répondre à des questions lors de l’entretien ; – N’hésitez pas à faire des copier-coller. Vous sélectionne-
– pour enrichir sa culture générale. rez ensuite : l’objectif, c’est d’obtenir une synthèse qu’on puisse
La recherche doit être liée à votre lecture du roman. mémoriser.
Par conséquent, il faut d’abord interroger le roman, avant Quelques sites que vous pouvez consulter :
de se documenter. • https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Corbusier
Première étape • www.fondationlecorbusier.fr
Relisez l’œuvre en diagonale et relevez les passages où sont • https://www.sites-le-corbusier.org/fr/
évoqués les thèmes sur lesquels vous êtes interrogé. • Le site d’informations 20 minutes :
Deuxième étape https://tinyurl.com/y9be5t7s
Cernez le sujet : analysez en quoi une bonne connaissance • Le site d’informations Le Figaro :
de ces thèmes peut vous ouvrir une nouvelle porte d’accès au https://tinyurl.com/y89pfub5
roman. Organisez votre présentation.
Troisième étape Pour classer vos informations et construire une synthèse
Commencez vos recherches. que vous pourrez mémoriser, vous pouvez ensuite présenter le
fruit de vos recherches sous la forme d’un tableau :

Application Quelques éléments


Œuvres Principes
biographiques
Faites un exposé sur Le Corbusier.
Première étape
Lisez et relevez les allusions à Le Corbusier. Proposez des pistes de réflexion.
Si vous avez lu attentivement le roman, vous savez que Le En guise de conclusion, demandez-vous :
Corbusier est un architecte. Vous devez donc chercher en prio- – si Le Corbusier est plutôt un architecte polémique ou
rité dans les passages qui évoquent l’architecte du roman, Jean- consensuel ;
Pierre Martin, le père de Jed. – si le roman rend bien compte des principes et des idées
Deuxième étape de Le Corbusier.
Cernez le sujet. Vous pouvez ensuite donner votre avis sur l’architecture de
Pour commenter ce relevé et cerner les enjeux du sujet, Le Corbusier et sur la manière dont elle a vieilli.
vous pouvez vous aider des questions suivantes :
1. À quoi ressemble un bâtiment Le Corbusier ?
2. Le roman en donne-t-il une présentation objective ou
subjective ?
3. Qui s’intéresse à Le Corbusier dans le roman ?

MARS 2018 HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE HORS-SÉRIE NRP LYCÉE 33

FICHE ÉLÈVE 4 Entraînement au commentaire : le plan

Le portrait de Patrick Forestier (1)


Deuxième étape
Support Construisez un plan nourri de procédés d’écriture.
Le portrait de Patrick Forestier (« Il ouvrit largement les La méthode proposée ci-dessous est destinée à vous faire
bras […] songea furtivement Jed », p. 113-114). éviter l’écueil de la paraphrase. En effet, commenter un texte,
ce n’est pas le reformuler, le traduire, mais repérer comment
Première étape il est construit et quels effets il est censé produire sur le
Lisez le texte et cherchez à en repérer les enjeux. lecteur.
Pour cela, nous vous proposons de construire un tableau
Quelques questions pour vous aider à repérer les enjeux
« citation / procédé / interprétation », dans lequel vous ins -
principaux du texte :
crirez un maximum de citations du texte.
1. À quel type de texte a-t-on affaire ? Rappel : un procédé n’est pas nécessairement une figure
2. Qui est Patrick Forestier ? de style. Il faut aussi être attentif aux champs lexicaux, aux
3. Le portrait est-il subjectif ou objectif ? temps verbaux, aux marques de l’énonciation, à la ponctua -
tion expressive, aux procédés musicaux.
4. Quelles relations Patrick Forestier entretient-il avec Jed
Martin ?

Remplissez et poursuivez le tableau commencé ci-dessous.


Citation Procédé Interprétation
« Il ouvrit largement les bras pour l’accueillir » – Adverbe – Geste théâtral
– Verbe d’action au passé simple – Personnage dynamique, en mouvement
« c’est peu de dire qu’il rayonnait » Litote
« J’avais confiance… J’ai toujours eu confiance ! »
« au minimum exagéré »
« Maintenant… il va falloir transformer l’essai »
« il agita ses bras »
« Asseyez-vous »
« canapés », « table basse », « café »
« We are a team »
« Nos ventes […] nous ne le ferons pas »
« Il lui laissa le temps de mesurer la hauteur de vues
qui présidait à cette décision commerciale »
« funèbre », « sombrer », « méditation accablée »
« valeur », « argent », « valeur »
« En ce qui concerne vos… (il chercha le mot appro-
prié), en ce qui concerne vos œuvres »
« il faut frapper très fort ! »
« se redressa d’un coup »
« fugitivement Jed eut l’impression qu’il allait sauter à
pieds joints […] dans une imitation de Tarzan »
« c’est l’inconvénient… »
« Bref, nous avons conclu »

Une fois le tableau constitué, il s’agit de repérer les éléments Troisième étape
d’interprétation qui vont dans le même sens, les lignes de force, Construisez le plan à partir de votre tableau : à l’aide de
qui vont constituer les axes du commentaire. plusieurs surligneurs, faites apparaître les lignes de force de
votre analyse.

34 HORS-SÉRIE NRP LYCÉE HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE MARS 2018

Revoir

FICHE ÉLÈVE 5 Entraînement au commentaire : rédaction

Le portrait de Patrick Forestier (2)


1. Composition d’un axe d’étude rédigé quand il se réfère aux coutumes des peintres, employant
des modalisateurs de doute comme « je crois » ou « cru com-
Méthode prendre ». Ainsi, Forestier perd ses moyens quand il doit faire
Pour chacun des 2 ou 3 paragraphes de l’axe : des incursions dans ce domaine qu’il ne maîtrise pas, ce qui
1. Phrase d’introduction partielle qui indique l’objectif du rend difficile le dialogue entre les deux hommes.
paragraphe (de la sous-partie). Attention, elle doit contenir un b. Dans le paragraphe suivant, utilisez des synonymes
connecteur logique. IP pour éviter les répétitions.
2. Explication, développement de l’idée. DVT Patrick Forestier agit avec une grandiloquence qui affiche
3. Justifications : citations commentées (repérage des procé- son manque de sincérité et le rend ridicule. Ainsi, il a la ges-
dés d’écriture et de l’effet qu’ils produisent). CC tuelle d’un comédien qui veut être vu de loin et qui, de ce fait,
4. Transition = phrase de récapitulation et annonce de la à des gestes amples, comme le montre l’adverbe « largement »
sous-partie suivante (s’il y a lieu). T au début de l’extrait. De même, il parle d’une voix forte et trop
enthousiaste pour être parfaitement spontanée, comme le
montrent la ponctuation expressive et les répétitions (« J’avais
Rappel confiance… J’ai toujours eu confiance ! »). De plus, il semble
Quand une citation n’est pas incluse syntaxiquement dans la maîtriser les trucs des artistes, comme le montre son sens du
phrase (c’est-à-dire quand on peut la supprimer sans changer rythme (« Il lui laissa le temps de mesurer la hauteur de vues »).
le sens de la phrase), elle se place entre guillemets et entre Enfin, en parfait acteur, il passe en un instant d’une émotion à
parenthèses. Quand elle est incluse syntaxiquement dans la l’autre. En effet, il joue le deuil comme le montre le champ lexi-
phrase, elle se place seulement entre guillemets. cal de la tristesse (« funèbre », « sombrer », « méditation acca-
Enrichir son vocabulaire blée ») et se remet de son émotion soudainement comme le
montrent l’expression « d’un coup » et l’emploi du passé simple
– Une expression accentue, prend une connotation, dépeint,
(« il se redressa »). Forestier est donc un homme de scène et l’on
illustre, met en valeur, met en évidence, confirme, explique,
mesure ainsi toute l’ironie de l’adverbe « authentiquement »
souligne, met l’accent sur, rappelle, suggère, suscite,
employé à la fin de l’extrait.
suggère…
– Un procédé souligne, renforce, donne au lecteur l’impres-
sion, l’illusion, le sentiment, insiste sur, contribue à, met en 2. Rédaction de l’introduction
relief… du commentaire
– Un effet est perceptible, tient à, réside dans, est créé, est
rendu, est traduit… Méthode
– Un auteur critique, dénonce, met en garde, s’indigne, se L’introduction comprend 4 parties en un paragraphe :
révolte / fait l’éloge, célèbre, prône, esquisse / brosse / peint – présentation de l’auteur et de l’œuvre ;
un personnage… – présentation du passage ;
– problématique (il s’agit d’une question qui interroge les
principaux enjeux du texte. Elle commence par « comment ») ;
Application
– annonce des grands axes du plan.
Texte d’entraînement
Application
Le portrait de Patrick Forestier (« Il ouvrit largement les bras
[…] songea furtivement Jed », p. 113-114) Rédigez l’introduction du commentaire.

a. Dans le paragraphe suivant, repérez les différentes étapes.


En effet, alors que Jed va devenir extrêmement riche grâce à 3. Rédaction de la conclusion
son interlocuteur, on a ici l’impression que le monde de l’argent du commentaire
et le monde de l’art sont deux univers totalement distincts. Pa-
Méthode
trick Forestier est aussi à l’aise quand il parle de bénéfices qu’il
est maladroit quand il en vient à évoquer les artistes. Cela se La conclusion comprend deux parties en un paragraphe :
manifeste dans son discours par des hésitations marquées par – un récapitulatif de ce qui a été démontré ;
des répétitions et des interruptions matérialisées par des points – une ouverture qui permet de comparer l’extrait commen-
té à un autre texte du corpus.
de suspension (« En ce qui concerne vos… (il chercha le mot
approprié), en ce qui concerne vos œuvres, il faut frapper très Application
fort ! »). De plus, l’usage de l’italique (« œuvres », « galeries ») Rédigez la conclusion du commentaire.
suggère que le vocabulaire de l’art relève pour lui d’une langue
étrangère. C’est ce qui explique qu’il renonce à son aplomb

MARS 2018 HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE HORS-SÉRIE NRP LYCÉE 35

Corrigés des fiches

l’on a le sentiment que c’est un homme affaibli qui présente Sou-


FICHE 1 mission. Enfin, c’est un écrivain qui s’installe entre les livres et la
fenêtre ouverte sur le monde (il vit en ville, comme le rappelle le
Un portrait de Michel Houellebecq titre de la photographie, et non dans un lieu désert), entre le savoir
Identification et l’observation. Ce serait peut-être là la clé de sa lucidité.
Cette photographie qui représente « Michel Houellebecq à son
domicile dans une tour d’immeuble Paris 13e » a été publiée dans FICHE 2
Le Monde, le 8 janvier 2015, le lendemain de la publication de son
roman Soumission, mais aussi le lendemain des attentats de Charlie
Hebdo. Elle avait toutefois été réalisée avant cet épisode drama-
Le personnage de Jean-Pierre Martin
tique. Philippe Matsas, le photographe, a pris beaucoup de pho- Michel Houellebecq et son père ont eu des relations conflictuelles
tographies de Houellebecq et, plus généralement, d’écrivains. On (« Je le voyais peu »), qu’il évoque déjà dans sa poésie. Il décide d’ex-
peut dès lors estimer qu’il prend Michel Houellebecq en photo non plorer les relations père-fils dans son roman en mettant en avant
pas en tant que personnalité médiatique mais bien en tant que l’idée de destin et l’inévitable ressemblance avec son propre père
romancier, puisque tel est son sujet de prédilection. (qui se manifeste aussi bien dans des choses anodines comme le
plaisir de conduire sur l’autoroute que dans des choses essentielles
Description
comme la difficulté à s’insérer dans un groupe). Jed, de même, se
Sur la photographie, on observe l’auteur, au premier plan. Il est en
met à ressembler à son père dans son rapport au travail.
effet assis sur un fauteuil, légèrement affalé, dos à un grand miroir
L’étude du père de Jed est donc l’occasion de s’intéresser :
mural (qui peut être la porte coulissante d’une armoire). Il est entiè-
– à son rapport au monde, à la société ;
rement vêtu de bleu, chemise et pantalon en jean, et fume. De la
– à son travail en tant que source de réconfort (quelque chose que
fumée sort de ses narines ajoutant un léger reflet bleu autour du
l’on maîtrise, que l’on sait bien faire).
personnage. Les cheveux décoiffés, les vêtements trop grands, la
posture donnent une impression de flou, de courbe, qui contraste I. Un dynamique chef d’entreprise
avec le décor. Le visage tourné vers la fenêtre, il jette pourtant un 1. La première fois que l’on parle du père, c’est à travers un tableau
regard vers le spectateur. Si vous consultez un gros plan de cette de Jed : « L’architecte Jean-Pierre Martin quittant la direction de son
photographie, vous verrez qu’elle a été prise légèrement en contre- entreprise ». Il est représenté dans l’open space, entouré de ses col-
laborateurs (p. 44-45). Son travail consiste à construire des stations
plongée, si bien que Houellebecq baisse les yeux, ce qui lui donne
un air arrogant. balnéaires clés en main. Il est devenu patron de son entreprise vers
40 ans (p. 236). Son premier succès, la station de Port-Ambarès, est
Le décor est quant à lui structuré par des lignes horizontales et ver-
décrit p. 74.
ticales. En effet, tout au fond de la pièce, on voit une grande biblio-
thèque, remplie de livres. Ce qui frappe, c’est la couleur des murs et 2. On sait qu’il a consacré sa vie à son travail : même s’il est un bon
père, progressivement, il s’éloigne de son fils, qu’il confie de plus en
de la moquette, rose framboise, une couleur soutenue, inhabituelle,
plus souvent à une baby-sitter (« Jean-Pierre avait été un bon père
qui contraste avec le bleu dont est vêtu l’artiste.
les premières années, maintenant il l’était un peu moins, il payait
Interprétation de plus en plus d’heures de baby-sitter », p. 64 ; cf. aussi p. 73). Par
La première impression que l’on a en découvrant cette photo- la suite, il consacre toute son énergie au travail : il trouve à peine le
graphie, comme souvent avec les portraits de Houellebecq, c’est temps de déjeuner une fois de temps en temps avec son fils dans
son caractère provocateur. Provocante est sa pause (il refuse de un restaurant de sushis près de son bureau. Les quelques mois où
poser pour le photographe ou tout au moins pose comme s’il s’en ils cohabitent sont « faciles et vides » (p. 69).
moquait, comme s’il refusait de faire attention au spectateur), pro- 3. Cet homme qui s’est entièrement consacré au travail ne sup-
vocante, sa manière de fumer à une époque où la cigarette est porte pas de ne plus travailler. Sur le tableau de Jed, déjà, il est
unanimement reconnue comme nocive, provocant, son regard d’une « tristesse absolue. Tristesse de quitter l’entreprise qu’il avait
qui semble nous toiser avec un certain mépris, provocante enfin fondée, à laquelle il avait donné le meilleur de ses forces, tristesse
sa pièce rouge. Pourtant, au-delà de la provocation première, d’au- de l’inéluctable : on avait de toute évidence affaire à un homme
tant plus visible qu’elle est attendue, que voit-on ? Tout d’abord fini » (p. 46). Cela devient de pire en pire quand sa santé se fragilise
un homme qui se montre et se dérobe tout à la fois. Ce n’est pas (« mais ce qu’il fallait qu’il se mette dans la tête c’est qu’il ne pouvait
seulement Michel Houellebecq qui est photographié mais aussi son plus être bien nulle part, qu’il ne pouvait plus être bien dans la vie
reflet, comme si l’individu ne se montrait qu’avec réticence. Alors en général »). Il décide donc d’en finir avec la vie. Remarque : Michel
que La Carte et le Territoire offre un jeu de miroirs et de reflets inat- Houellebecq condamne fermement l’euthanasie.
tendus avec le personnage de Michel Houellebecq, le romancier Jean-Pierre Martin est un personnage particulièrement déprimé et
cherche lui aussi à se soustraire à nos regards alors même qu’il se déprimant : « quelqu’un d’aussi profondément paralysé dans une
montre. Si l’on y regarde de plus près, c’est aussi un homme fra- routine désespérée et mortelle, quelqu’un d’aussi profondément
gile que l’on découvre, à la maigreur remarquable, mise en valeur engagé dans la voie sombre, dans l’allée des Ombres de la Mort »
par des vêtements trop grands. On sait que le romancier évoque la (p. 53). On note d’ailleurs que Jed et son père semblent particuliè-
souffrance et l’engagement que requiert l’écriture d’un roman et rement adaptés aux enterrements (p. 80).

36 HORS-SÉRIE NRP LYCÉE HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE MARS 2018

Corrigés des fiches

II. Un homme qui a eu des rêves sorte ; et des immeubles d’habitation à peu près identiques, avec
Pourtant, ce personnage d’hommes d’affaires englué dans le réel, quelques fonctions supplémentaires – garderie, gymnase, piscine ;
qui semble antithétique de Jed, l’artiste, a lui aussi eu des rêves. entre les deux, des voies rapides ». « Pour lui l’humanité devait se
1. Jean-Pierre Martin est un homme amoureux : il a été profondé- limiter à des modules d’habitation circonscrits au milieu de la
ment amoureux de la mère de Jed. S’il n’a pas eu d’autres femmes, nature, mais qui ne devaient en aucun cas la modifier ». « C’était
ce n’est pas parce qu’il n’en a pas eu le temps mais parce qu’il n’en a la vision d’un esprit brutal, totalitaire. Le Corbusier nous parais-
pas eu le désir (« Je n’ai connu aucune autre femme… » dit son père sait un esprit totalitaire et brutal, animé d’un goût intense pour
d’une voix atone. « Aucune autre, absolument. Je n’en ai même pas la laideur ; mais c’est sa vision qui a prévalu, tout au long du xx e
éprouvé le désir », p. 228). C’est donc un homme de sentiments qui siècle ». Houellebecq y revient p. 234, toujours à travers le regard
a également aspiré à une vie de famille épanouie. C’est dans ce but critique du père. « Nous y défendions l’idée qu’une société com-
qu’il a acheté la maison du Raincy (« où il avait essayé, ne serait-ce plexe, ramifiée, aux niveaux d’organisation multiples, comme celle
que quelques années, de construire une vie de famille », p. 387). proposée par Fourier, allait de pair avec une architecture complexe,
2. « Je voulais être un artiste », p. 230. L’homme d’affaires a eu des ramifiée, multiple, laissant une place à la créativité individuelle.
rêves artistiques. Sa conception de l’architecture va à l’encontre Nous y attaquions violemment Van der Rohe – qui fournissait
du fonctionnalisme et des théories de Le Corbusier. Les dessins des structures vides, modulables, les mêmes qui allaient servir de
que découvre Jed révèlent une « fuite en avant dans l’imaginaire » modèle aux open space des entreprises – et surtout Le Corbusier,
(« son père n’avait jamais cessé de vouloir bâtir des maisons pour qui bâtissait inlassablement des espaces concentrationnaires, divi-
les hirondelles », p. 392). sés en cellules identiques tout juste bonnes, écrivions-nous, pour
III. L’absence de communication une prison modèle ». « Interdit que Le Corbusier avait fait peser sur
Jed ne découvre cet aspect de son père qu’au moment de sa mort : toute forme d’ornementation » (p. 239) en rupture avec les dessins
durant la conversation de Noël (p. 225 sqq.) et à l’ouverture des du père, p. 392, qui ne cesse de « vouloir bâtir des maisons pour les
cartons au Raincy après sa mort (p. 387 sqq.). hirondelles ».
1. La communication est impossible avec son père. Le silence – Sur Dignitas : « avait son siège dans un immeuble de béton blanc,
s’impose dans presque tous les dîners qu’il partage avec son fils d’une irréprochable banalité, très Le Corbusier dans sa structure
(« rien n’indiquait qu’il souhaitât rompre un silence qui se prolon- poutre-poteau qui libérait la façade et dans son absence de fio-
geait », p. 51). Jed en vient même à envisager de louer les services riture décorative, un immeuble identique en somme aux milliers
d’une escort girl qu’il ferait passer pour sa femme. Au moment où d’immeubles de béton blanc qui composaient les banlieues semi-
Jed s’apprête à devenir artiste, son père lui donne un conseil (lié à résidentielles partout à la surface du globe » (p. 363).
sa propre histoire ? À ses échecs ?), mais sans l’expliquer. Il le pré- – P. 389 : « cette unité fonctionnelle d’habitation humaine » : reprise
sente comme un fait qui ne se discute pas. Ils sont devant le Tour de parodique du discours de Le Corbusier.
France : « Ce qui marche le mieux, ce qui pousse avec la plus grande Deuxième étape
violence les gens à se dépasser, c’est encore le pur et simple besoin 1. À quoi ressemble un bâtiment Le Corbusier ?
d’argent », p. 72. – béton ;
2. Pourtant s’établit une ressemblance entre les deux : entièrement – poutre-poteau ;
dévoués à l’art, incapables de mener à bien leur relation amou- – aucun ornement.
reuse. Jed pense d’ailleurs à son père au moment où il quitte Olga, 2. Un discours à charge contre Le Corbusier :
p. 258. – dimension politique : totalitarisme (idéologie unique, contrôle de
3. Le rôle de la littérature serait-il de créer du lien ? De bâtir la la vie économique comme de la vie intime) ;
mémoire de cette relation ? Jed en tant qu’artiste essaie de fixer – dimension esthétique : blocs de béton sans aucun ornement.
ce qui va disparaître. Non pas changer, expliquer, modifier (vs. psy- Pourtant, le roman reconnaît que Le Corbusier, au-delà des bâti-
chanalyse) mais fixer. Finalement, La Carte et le Territoire serait un ments qu’il a lui-même construits, a eu une énorme influence sur
imposant roman sur des individus qui ne peuvent pas parler. le xx e siècle. Il y a là un paradoxe à expliquer. Peut-être ne peut-on
comprendre ce qui semble contradictoire que par une vision plus
objective ? Il faudrait écouter l’autre côté !
FICHE 3 3. Qui tient ce discours ?
– Le père d’abord : il s’est opposé à Le Corbusier à ses débuts et
Le Corbusier a défendu une conception différente de l’architecture. Son oppo-
Première étape sition à Le Corbusier contribue à rendre son portrait émouvant.
– P. 66 : implicite : « Il [J.-P. Martin] était responsable en cas de dys- Derrière l’homme d’affaires froid, il y a un doux rêveur, un idéaliste.
fonctionnement grave de la machine à habiter – si un ascenseur – Parfois pris en charge par le narrateur avec une focalisation
s’effondrait, ou si les toilettes étaient bouchées par exemple » interne : regard de Jed. Manière dont il se met à ressembler à son
– P. 231 : rêves de J.-P. Martin. « Le courant dominant quand j’étais père ? Peut-être aussi manière de Houellebecq de se moquer (cf.
jeune était le fonctionnalisme, à vrai dire il dominait depuis plu- le bâtiment qui pratique l’euthanasie dans un bâtiment style Le
sieurs décennies déjà, il ne s’était rien passé en architecture depuis Corbusier).
Le Corbusier et Van der Rohe. Toutes les villes nouvelles, toutes les Quelle est la part de réalité dans ce qui est dit sur Le Corbusier ?
cités qu’on a construites en banlieue dans les années 1950 et 1960 Quelle est la part d’instrumentalisation narrative (joue un rôle dans
ont été marquées par leur influence ». Cette référence se poursuit le portrait du père et aussi dans la conception de la relation père-
ensuite. « Ce qu’il [Le Corbusier] imaginait pour l’homme, c’était des fils) ? Il faut faire la part des choses et essayer d’obtenir une vision
immeubles de bureaux, carrés, utilitaires, sans décoration d’aucune objective du travail de Le Corbusier.

MARS 2018 HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE HORS-SÉRIE NRP LYCÉE 37

Corrigés des fiches

Troisième étape

Quelques éléments biographiques Œuvres Principes


– Charles-Édouard Jeanneret-Gris – 17 de ses œuvres sont classées au – « Les éléments de l’urbanisme sont le ciel, les
– 1887-1965 patrimoine mondial de l’UNESCO arbres, l’acier et le ciment et cela dans cet ordre et
– Suisse depuis juillet 2016 (dont 10 en France). cette hiérarchie »
– Pas seulement architecte mais – A construit aussi bien des maisons ➞ importance de la lumière (fenêtres horizontales,
aussi peintre. A également conçu des individuelles (la maison de ses parents parois vitrées...) ; importance du ciment.
meubles. A beaucoup écrit sur ses sur le lac Léman ne fait que 64 m2) que – « Là où naît l’ordre, naît le bien-être » : dimension
œuvres et sa conception de l’architec- des « unités d’habitation ». utopique. Vise le bonheur.
ture. – A travaillé sur des bâtiments privés ou – 5 points : les pilotis, la fenêtre en longueur, le
publics (laïcs comme la Cité universi- toit-jardin, le plan libre, la façade libre.
taire ou religieux comme le couvent de – À Paris, jusqu’à la première guerre mondiale,
la Tourette). on continue à construire des édifices en pierre de
– Quelques monuments remarquables : taille, avec des ornements, comme sous le Second
la Cité radieuse à Marseille (1947), la Empire. Dans les années 1920 apparaissent des
villa Savoye (1928), les maisons La immeubles Art Déco, plus sobres, à tendance géo-
Roche et Jeanneret (1923-1925). métrique. En 1925, Le Corbusier construit le pavil-
lon de « l’Esprit Nouveau » pour l’exposition des
Arts décoratifs. C’est le début d’une ère nouvelle.

Trois polémiques au sujet des œuvres de Le Corbusier : Conclusion


– une polémique politique : ouvrages sur le fascisme de Le Corbu- – Le roman présente de manière assez précise les principes des
sier publiés lors de l’exposition Le Corbusier au centre Beaubourg ; constructions de Le Corbusier.
– une polémique esthétique : en particulier au début. Voir par – Le roman reprend à son compte des polémiques existantes. Il ne
exemple l’article en une du Figaro en avril 1833. On s’en prend à la fait pas spécialement dans la provocation et propose une approche
« cimentolâtrie » et à la laideur des constructions de Le Corbusier ; réaliste.
– une polémique sociale : les unités d’habitation n’ont pas toujours Vous pouvez ensuite donner votre avis !
bien vieilli. Problème des cités, magasins désertés, délinquance...

FICHE 4
Le portrait de Patrick Forestier (1)
Première étape
1. Un portrait.
2. Un cadre, qui travaille chez Michelin.
3. Un portrait subjectif, satirique, qui se moque du personnage.
4. Ils n’ont pas grand-chose en commun. Ils ne se comprennent pas bien.
Deuxième étape

Citation Procédé Interprétation


« Il ouvrit largement les bras pour – Adverbe – Geste théâtral
l’accueillir » – Verbe d’action au passé simple – Personnage dynamique, en mouvement

« c’est peu de dire qu’il rayonnait » Litote En dire peu pour signifier beaucoup : rayonnement excessif, manque
de sincérité. À noter : focalisation interne (regard de Jed sur Forestier)
➞ regard minimaliste, sobriété (emploi récurrent de la litote).
« J’avais confiance… J’ai toujours – Discours direct – PF aime parler (vs. Jed).
eu confiance ! » – Ponctuation expressive – Voix forte : théâtralité de la parole comme du geste
– Répétition – Effet d’insistance. Manque de sincérité.
« au minimum exagéré » Litote Dénonce l’hypocrisie de PF. Il parle de « confiance », mais il est en train de
proférer un mensonge.
« Maintenant... il va falloir transfor- – Ponctuation expressive – Manière de ménager des effets.
mer l’essai » – Métaphore sportive – Travail d’équipe : quel est son rôle ?
« il agita ses bras » Verbe d’action au passé simple Dynamisme ; cohérence par rapport à la métaphore sportive qui précède
« Asseyez-vous » Impératif PF se voit plutôt comme un chef d’équipe.

38 HORS-SÉRIE NRP LYCÉE HOUELLEBECQ, LA CARTE ET LE TERRITOIRE MARS 2018

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mars 2018

nrp
Nouvelle Revue Pédagogique

hors
N° 30 / 13,95 e / ISSN 1764–2116
www.nrp–lycee.com

L’histoire Les enjeux pédagogiq


Du Bellay, Malherbe, Régnier, La Fontaine,
Chénier, Lamartine, Hugo, Withman,
Baudelaire, Dickinson, Rimbaud,

Tsvétaïeva, Maïakovski, Eluard, Aragon,

Senghor, Char, Celaya, Césaire,


Granek, Glissant, Bianu…

L’écriture poétique est aus


une écriture politique

Retrouvez sur www.carresclassiques.com :


• des pistes d’exploitation pédagogique
• le livret de l’enseignant téléchargeable

Éditorial

La Carte et le Territoire,
de Michel Houellebecq
Par Anne Cassou-Noguès,
professeure agrégée de lettres modernes

Un auteur polémique
Incontestablement, le choix de ce hor
Houellebecq fera grincer des dents. Tantôt
pédophilie, dans Plateforme, tantôt taxé d
mission, souvent considéré comme déprimant
est tout sauf consensuel. Pourtant, il nou
La Carte et le Territoire avec des élèves
Si Michel Houellebecq est sans doute
de la France du xxie siècle, il est aussi
En effet, il n’a pas seulement obtenu le p
joue désormais sur plusieurs terrains (écr
tion). C’est surtout un personnage. Son ph
est reconnaissable entre tous ; sa parole,
matiquement provocatrice, est toujours sou
de commentaires enflammés. Certains élèves
connaître jusqu’à ce qu’ils le reconnaisse
tristement célèbre numéro de Charlie Hebdo
dier une de ses œuvres, c’est apprendre à
ce qu’il écrit et non pour son jeu avec le
ter nos jeunes, que l’on dit si familiers
sociaux et l’information en continu, à exe
De plus, Michel Houellebecq a le méri
qui parle du monde contemporain et met en
nages de notre société. Mû par une ambitio
cherche, comme les auteurs du xixe siècle
à faire le portrait de la société dans laq
celle dans laquelle sont plongés nos futur

Conformément aux dispositions sur le droit

Sommaire

Étapes

Découvrir le

roman

Analyser le roman
Problématique :
Michel Houellebecq

est-il un

personnage de
roman au même
titre que Jed
Martin ?

Étude de corpus

Séquence
complémentaire :
le personnage

de roman, entre
humanité et
monstruosité

Corrigés des fiches

Éditeur : Nathan, 25 av. P. de Coubertin 7


cation : Catherine Lucet – Directrice délé
nographie : Clémence Grillon – Marketing/D
– Création de la couverture : Christophe B
Alinéa, 40, rue des Bas-Bourgs 28000 Chart
Tél. : 05 55 24 14 03 – Code article : 115

Crédits photographiques :
Couverture : Michel Houellebecq à son domi
6 : Reuters/Hannah McKay ; 8 : Leemage/Pho
D.R. ; 13 : Coll. Christophel/© No Money P
22 : Leemage/Photo Josse ; 25 : Leemage/De
31 : Leemage/Opale/Philippe Matsas.

2 HORS-SÉRIE NRP LYCÉE houellebecq,

Séance 1

découvrir Le roman Rep

Découvrir Michel Houellebecq

Objectif
00 Découvrir un auteur singulier.
Support : L’entretien de Michel Houellebe
Trapenard sur France 24 : https://tinyurl

Durée : 1 heure (cette séance pourrait êt


en amont, avant la lecture, pour la lance

➔➔Questions pour guider le visionnage


1. Quelle image Houellebecq donne-t-il
2. Quelle conception du roman et de la
3. Quels sont les thèmes principaux de
4. Pourquoi crée-t-il un personnage qu
lebecq dans le roman ?

➔➔Éléments de réponse
1. Houellebecq surprend les élèves, q
toujours. D’une part, son débit est très l
rence est peu soignée. Sa chemise à carrea
on voit sa parka négligemment posée sur sa
en velours rappelle la tenue qu’il porte q
première fois à Shannon (p. 157). L’ensemb
comprise, est devenu une sorte de symbole
de sa provocation.
En complément, on peut commenter avec
tographies de Michel Houellebecq arrivant
pour recevoir le prix Goncourt. On retrouv
le même mépris du qu’en-dira-t-on.
De plus, les élèves seront peut-être
romancier. Si Jasselin estime dans le roma
Houellebecq « ne se prenait pas pour de la
teur affirme clairement qu’il était temps
court et qu’il contribue à la bonne santé
encore, il s’agit de se moquer des convena
polie et attendue. Michel Houellebecq affi
conventions et son anticonformisme.
On peut compléter cette première impr
autobiographie, que les élèves pourront co
On peut insister sur plusieurs points. Tou
l’enfance troublée de Michel Thomas (le vr
lebecq) et ses relations conflictuelles av
donnent chez ses grands-parents. Houellebe
de jeune fille de sa grand-mère paternelle
le fait que Michel Houellebecq est ingénie
qu’il a exercée pendant plusieurs années.

Séance 2

découvrir le roman

Un roman à l’architecture complexe

Objectifs
00Cerner les enjeux essentiels du roma
intégrale.
Support : Le roman tout entier.
Durée : 1 heure (pour la reprise en cl

Partie
Repère tem
du roman

Deux ans avant


au Beaux-Arts d
(p. 67)
« Le lendemain
diplôme » (p. 6
« un dimanche a
(p. 70)
Quelques mois a
emménagement
Première partie

« Début octobre
« Pendant presq
6 mois » (p. 87
« début du mois
28 janvier (p.
« dimanche 28 j
(p. 127)
Plusieurs semai

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