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Karl Marx et la question de l'État


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Publié le 21 Janvier 2021
zones.subversives@gmail.com

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Le marxisme reste associé à la défense de l'État. Pourtant, les écrits de Karl Marx Sociologie critique
Révolution sexuelle
se révèlent plus nuancés. Il semble important de redécouvrir la dimension libertaire
Ressources
des analyses marxiennes pour ouvrir de nouvelles perspectives révolutionnaires.

ARCHIVES
Le marxisme reste associé à des régimes autoritaires et totalitaires, comme l’URSS. 2022
Même dans sa version réformiste et social-démocrate, le marxisme insiste sur le Décembre (2)
renforcement de l’État. Mais ces idéologies semblent éloignées de la pensée de Karl Novembre (4)
Marx dont elles prétendent s’inspirer. Au contraire, Marx défend un véritable projet Octobre (4)
d’auto-émancipation des exploités. Sa théorie repose également sur des débats et Septembre (5)
des confrontations avec d’autres penseurs de son époque. Août (4)
Juillet (4)
Il semble donc indispensable de revenir aux écrits de Marx qui se distinguent d’une
Juin (5)
idéologie marxiste frelatée. La revue Etudes de marxologie permet d’alimenter la
Mai (4)
réflexion et la réappropriation critique de la pensée marxienne. Louis Janover et
Avril (4)
Maximilien Rubel ont publié des articles « État » et « Anarchisme » pour revenir sur
Mars (5)
ces concepts centraux dans la pensée de Marx. Ces textes sont réédités dans
Février (4)
Lexique Marx – I.
Janvier (4)
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ARTICLES RÉCENTS

Analyse de classe de l’Etat

Hegel reste la référence philosophique incontournable pour penser l’État. Mais, à


partir de 1830, des penseurs réfléchissent sur cette notion de manière moins
conceptuelle. La révolution de Juillet en France est confrontée à la réalité de l’État et
de la répression. Ces révoltes permettent l’émergence du socialisme comme théorie
et courant politique.

Marx est confronté à la réalité de l’État, avant de l’aborder de manière


philosophique. En effet, le jeune journaliste subit la censure de l’Etat prussien. Sa
réflexion s’appuie sur la pensée de Hegel. Mais il insiste sur une critique de la
représentation et de la délégation. « Être représenté, c’est toujours un état passif ;
seules ont besoin d’une représentation les choses matérielles, inintelligentes, vivant
dans la dépendance et sous la menace », indique Marx. Il se démarque d’une
LIENS
philosophie hégélienne trop abstraite. L’État n’est pas qu’un esprit. La « police », la
Working Class Hérault
« justice » et « l’administration » apparaissent comme des délégations de l’État.
Le Pressoir
Marx oppose la société civile à l’État. Mais il observe également un conflit entre les
Scalp / No Pasaran 34
intérêts des différents groupes sociaux.
Le Poing
L’observation de l’émergence de la société industrielle et des révoltes ouvrières Nadarlana sur Infokiosques
permet d’affiner l’analyse de l’État. La production industrielle remplace les formes Alternative libertaire Montpellier
artisanales. Une classe ouvrière puissante se développe. Ces prolétaires « se Benoit Bohy Bunel
trouvent en opposition directe avec la forme dans laquelle les individus de la société Sous la plage les pavés
se sont donnés jusqu’ici une expression d’ensemble, c’est-à-dire avec l’État, et ils Syndicat de combat universitaire de
doivent renverser l’État pour affirmer leur personnalité », observe Marx. Son livre sur Montpellier
Le Dix-huit brumaire de Louis Bonaparte propose une analyse du coup d’état de Autres liens
1852. Cette restauration de l’État met un terme à la révolte ouvrière.
Émeutes en Iran

Napoléon III s’appuie sur les divergences entre les classes sociales pour s’emparer
du pouvoir. Il défend l’intérêt général des différentes fractions de la bourgeoisie. La
machinerie d’État repose sur la bureaucratie et la centralisation. « Toutes les
révolutions perfectionnèrent cette machine au lieu de la briser. Les partis qui se
disputèrent à tour de rôle le pouvoir considéraient la mainmise sur cet énorme
édifice d’État comme le butin principal du vainqueur », analyse Marx. Mais la
bureaucratie reste avant tout l’instrument de la classe bourgeoise.

Marx se consacre surtout à la critique de l’économie. Mais, avec le soulèvement de


la Commune de 1871, il propose à nouveau une critique de l’État à partir de
l’exemple de la France. « L’appareil d’État centralisé qui, avec ses organes
militaires, bureaucratiques, cléricaux et judiciaires, omniprésents et compliqués, tel
un boa constrictor, enserre le corps vivant de la société civile, fut d’abord forgé au
temps de la monarchie absolue », décrit Marx. La centralisation de l’État doit
permettre d’affaiblir les pouvoirs locaux et les féodalités. Le bonapartisme ne fait
que renforcer l’emprise du pouvoir d’État sur la société civile. L’État apparaît
également comme l’instrument de la domination économique du capital. La
répression permet d’écraser les révoltes des exploités.

Débats avec les anarchistes

L’éthique anarchiste de Marx s’observe dans plusieurs de ces textes. Il révèle son
attachement à la liberté. Il dialogue également avec Proudhon. Marx semble plus
critique à l’égard de la propriété et même de l’État que l’anarchiste français. Marx
insiste sur l’auto-émancipation du prolétariat contre les institutions économiques et
politiques de la société bourgeoise. Le communisme de Marx insiste sur le
renversement de l’État pour permettre l’épanouissement de la personnalité. Le
prolétariat doit s’organiser pour devenir la classe dominante pour, ensuite, abolir la
société de classes et toute forme de domination.

Le Manifeste communiste de 1848 estime que le prolétariat doit ainsi s’emparer de


l’État et du pouvoir central. Mais cette étape doit permettre d’instaurer une société
communiste. « L’ancienne société bourgeoise avec ses classes et antagonismes de
classe fait place à une association où le libre épanouissement de chacun est la
condition du libre épanouissement de tous », clarifie Le Manifeste. Marx assume
l’utopie révolutionnaire. Il s’appuie sur les socialistes utopiques de son époque. Mais
il les critique pour leur valorisation des alternatives communautaires qui priment sur
l’organisation de la lutte. En revanche, les textes des socialistes utopistes
permettent d’envisager la société future avec l’abolition de la famille, de la propriété
privée et du travail salarié, pour proclamer l’harmonie sociale.

Néanmoins, Marx théorise la dictature du prolétariat comme une étape avant


l’instauration d’une société communiste. Ce qui provoque des débats vifs au sein de
la Première internationale, notamment avec Bakounine et les ouvriers anarchistes.
Marx participe activement à la direction de l’Association internationale des
travailleurs (AIT) à partir de 1864. Dans un contexte d’une multiplication de défaites
pour la classe ouvrière, Marx insiste sur la conquête du pouvoir politique dans son
Adresse inaugurale. Mais ce discours confus reste approuvé par l’ensemble de l’AIT,
y compris par les anarchistes. Ces ouvriers issus de différents pays d’Europe luttent
pour des améliorations immédiates de leurs conditions de vie, à travers des
revendications comme la limitation du temps de travail.

Bakounine partage les analyses économiques de Marx et envisage de traduire Le


Capital en russe. Néanmoins, il critique la participation aux élections comme
illusoire. Marx, qui aspire à construire un mouvement de masse, reproche à
Bakounine son sectarisme et ses intrigues de sociétés secrètes. Néanmoins, les
analyses des deux théoriciens se rejoignent souvent, notamment à propos de la
Commune de Paris.

L’Adresse sur la Commune valorise l’auto-organisation et la spontanéité. Pourtant,


Marx ne se proclame pas anarchiste. Il tient à se démarquer d’un courant qui repose
sur une rhétorique idéaliste déconnectée de la réalité historique. Ensuite, la
glorification de l’aventure individuelle semble éloignée du mouvement ouvrier.
Néanmoins, Marx valorise la Commune qui brise l’État comme appareil de la
domination de classe. « La Commune est la reprise du pouvoir d’État par la société,
dont il devient la force vivante, au lieu d’être la force qui la domine et la subjugue.
C’est sa reprise par les masses populaires elles-mêmes, qui substituent leur propre
force à la force organisée pour les opprimer », analyse Marx.

Dans La guerre civile en France, il clarifie même sa pensée. Il rejette la perspective


de la prise du pouvoir d’Etat, et préfère sa destruction. « La première condition pour
conserver le pouvoir politique, c’est de transformer l’appareil existant et de détruire
cet instrument de domination de classe », indique Marx. Pourtant, Bakounine
soupçonne encore son adversaire de rester un indécrottable partisan de la prise du
pouvoir d’État. Néanmoins, Bakounine adhère à tous les textes de Marx. Il reconnaît
même l’importance de sa démarche matérialiste qui part de la conscience et de
l’expérience du prolétariat plutôt que d’une idéologie abstraite.

Les critiques pertinentes de Bakounine visent surtout le Manifeste de 1848 qui


préconise un « programme de transition » avec des nationalisations imposées par
un gouvernement ouvrier. Mais Marx semble exprimer d’autres idées dans son
Adresse de 1871. Il insiste alors sur la destruction de l’appareil d’État, sur le refus
d’un État centralisé. Toutes les initiatives doivent être portées par les « producteurs
eux-mêmes ». Bakounine propose une fédération libre des associations ouvrières
qui ne se distingue pas du projet de Marx. Si Bakounine se méfie des partis ouvriers
jugés autoritaires, il valorise pourtant les sociétés secrètes particulièrement élitistes
et sélectives. Cet état-major anarchiste s’apparente à l’avant-garde préconisée plus
tard par les marxistes-léninistes.

Marx libertaire

Louis Janover et Maximilien Rubel proposent une belle introduction aux écrits de
Marx. Leur regard permet de sortir des vieux clichés issus du marxisme-léninisme.
Le premier, c’est la réduction de la pensée de Marx à sa dimension économique.
Certes, l’auteur du Capital propose une critique percutante de l’exploitation et de la
logique marchande. Mais ses textes politiques permettent également d’éclairer sa
démarche. Marx propose une véritable analyse de classe de l’État. Il esquisse
également des perspectives de rupture avec le capitalisme à travers l’auto-
organisation des exploités. Cette dimension révolutionnaire de Marx reste souvent
oubliée. Il passe pour un banal économiste qui veut encadrer le marché par l’État.

Surtout, Louis Janover et Maximilien Rubel montrent que la pensée de Marx reste
éloignée de ses récupérations staliniennes ou social-démocrates. Les deux
marxologues insistent surtout sur la dimension libertaire de Marx. Ils mettent en
avant les textes de Marx qui proposent une critique radicale de l’État. Cette machine
bureaucratique est perçue comme un instrument de la bourgeoisie pour maintenir sa
domination sur la classe ouvrière. Maximilien Rubel va même parfois plus loin
lorsqu’il présente Marx comme le seul véritable théoricien de l’anarchisme.

L’analyse de classe de l’État se démarque effectivement d’une simple dénonciation


morale qui prédomine chez les héritiers de Proudhon. Louis Janover et Maximilien
Rubel montrent également les proximités dans les réflexions de Marx et de
Bakounine. Ce sont uniquement des intérêts politiques opposés qui les séparent.
Cette lecture permet effectivement de briser les sectarismes et les guerres de
chapelles entre marxistes et anarchistes. Les points communs entre les deux
courants restent nombreux à l’origine.

En revanche, il est souvent reproché à Louis Janover et Maximilien Rubel de


repeindre Marx en noir et rouge pour en faire une pensée homogène. Leur
traduction de La Pléiade et des livres de poche reste la plus diffusée en France.
Avec d’importantes annotations, cette traduction impose un Marx libertaire. Elle a le
grand mérite d’énerver les marxistes universitaires plutôt éloignés de l’anarchisme.
Mais Louis Janover et Maximilien Rubel visent également à gommer les aspérités
de Marx, notamment lorsqu’ils relativisent ses écrits qui défendent
explicitement l’État.

Le livre de Louis Janover et Maximilien Rubel ne masque pas les contradictions


dans la pensée de Marx. Des textes insistent clairement sur la destruction de l’État.
Mais d’autres semblent plus confus. Certes, il existe un Marx libertaire qui doit être
redécouvert et valorisé. Mais il existe également un Marx autoritaire. Le Manifeste
de 1848 reste le texte qui a permis les interprétations les plus autoritaires de sa
pensée. Le concept de dictature du prolétariat, quelles que soient ses exégèses
marxologiques ou historiques, traduit une dimension autoritaire. Dans ce texte, Marx
envisage assez clairement une période de transition avec une prise de pouvoir
d’État.

C’est effectivement cette question de la période de transition qui reste au centre des
principaux débats entre communistes libertaires et gauchistes autoritaires. La
révolution doit balayer l’État et reposer sur l’auto-organisation du prolétariat. Sinon,
l’État communiste peut confisquer le pouvoir pour former une nouvelle classe
dirigeante bureaucratique. Le bilan des révolutions passées montre toutes les limites
de cette période de transition et de la perspective de la prise du pouvoir d’État pour
instaurer le communisme.

Cette question de l’État et de la transition apparaît donc comme un enjeu central qui
mérite la clarification. L’ambiguïté de Marx mérite d’être levée. Marx défend dans
certains textes la dictature du prolétariat et le parlementarisme. Les institutions
peuvent alors permettre des améliorations progressives et de construire un parti de
masse. Cette stratégie n’est pas clairement écartée par Marx. C’est celle qui sera
retenue par son ami Engels et qui va accompagner la social-démocratie. Cette
stratégie dévoile sa faillite avec la révolution allemande de 1918. Le parti social-
démocrate qui se prévaut du marxisme écrase dans le sang une révolte du
prolétariat. Les craintes d’une centralisation du pouvoir, exprimées par la Fédération
jurassienne au sein de l’AIT, soulèvent un point décisif.

Néanmoins, Louis Janover et Maximilien Rubel préfèrent insister sur les textes les
plus libertaires de Marx. C’est effectivement cet héritage qui doit nourrir la réflexion
dans les luttes actuelles. L’auto-émancipation du prolétariat et les perspectives
d’une société sans classe et sans État apparaissent toujours comme un objectif
incontournable.

Source : Louis Janover et Maximilien Rubel, État / anarchisme, Lexique Marx – I,


Smolny, 2020

Articles liés :
Karl Marx, théoricien et révolutionnaire

Marx penseur de l'anarchie

Le marxisme en France

La Première Internationale et ses luttes

Une critique radicale de la politique

Actualité de l'anarchisme

Pour aller plus loin :


Vidéo : Marx cent ans après sa mort, émission Apostrophes diffusée le 26 août 1983
et mise en ligne sur le site de l'Ina

Radio : Martin Quenehen, Karl Marx, l'horizon du monde, émission diffusée sur
France Culture le 30 mai 2015

Rubrique Études de marxologie (1959-1994) publiée sur le site Smolny

Maximilien Rubel, Karl Marx, un théoricien libertaire ?, publié sur le site Conseils
Ouvriers contre Capital le 26 août 2012

Ngo Van, Avec Maximilien Rubel… Combats pour Marx 1954–1996: une amitié, une
lutte, publié sur le site La Bataille socialiste

Lire Rubel aujourd’hui (Janover, 2003), publié sur le site La Bataille socialiste

Louis Janover, Pour Maximilien Rubel (Mars 1996), publié sur le site Smolny

Textes de Maximilien Rubel publiés sur le site Plus loin

Textes de Maximilien Rubel publiés sur le site l'Archive Internet des Marxistes

Entretien inédit accordé en 1979 par Maximilien Rubel au Socialist standard, publié
sur le site Critique sociale le 27 janvier 2011

Floran Palin, L’utilité de la critique marxienne pour les libertaires, publié sur le site de
l'Union communiste libertaire le 18 février 2018

Publié dans #Anarchisme révolutionnaire, #Marxisme anti-bureaucratique


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R Rubel 31/01/2021 23:12

Lisez-moi.

0 Répondre

L Lenine 31/01/2021 23:13

JAMAIS !!

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