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THOMAS D'AQUIN ET LES TRANSCENDANTAUX: RETOUR SUR UN LIVRE DE JAN A.

AERTSEN
Author(s): Carlos Bazán
Source: Revue des Sciences philosophiques et théologiques , Janvier 2000, Vol. 84, No. 1,
SOURCES ET EFFETS DE LA "LOGIQUE DE PORT-ROYAL" (Janvier 2000), pp. 93-104
Published by: Librairie Philosophique J. Vrin

Stable URL: https://www.jstor.org/stable/44408603

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Rev. Sc. ph. th. 84 (2000) 93-104

THOMAS D'AQUIN
ET LES TRANSCENDANTAUX

RETOUR SUR UN LIVRE DE JAN A. AERTSEN*

par Carlos Bazán

La publication de cet ouvrage fut saluée comme un événement important


en raison du vide qu'il remplit dans l'historiographie, de l'emphase qu'il me
sur la doctrine des transcendantaux comme clé d'interprétation de la
philosophie médiévale, et de la synthèse que l'auteur réussit à présenter de
pensée de Thomas d'Aquin sur la base d'une analyse exhaustive des sources e
des textes. Le contenu du livre fut présenté en de nombreux comptes rend
et il serait superflu d'en faire un autre dans le même style. Qu'il suffise do
de dire que J. Aertsen dresse (ch. 1) un tableau historique précis du début d
la doctrine des transcendantaux au xme siècle, en mettant en valeur les
contributions de Philippe le Chancelier, Alexandre de Halès et Albert
Grand, pour passer ensuite à la présentation doctrinale de la pensée d
Thomas d'Aquin, appuyée toujours par une analyse historique qui perm
d'apprécier dans sa juste mesure l'originalité de Thomas et de la pens
médiévale par rapport aux sources grecques et arabes. L'A. expose d'abo
(ch. 2) les principes généraux de la doctrine thomasienne des transce
dantaux, tels qu'ils découlent de trois textes clés (/ Sentences 8. 1.3 ; De vent
1.1 et 21. 1), il examine ensuite l'impact de la doctrine sur la question
l'objet de la métaphysique (ch. 3) et, finalement, il procède à l'analyse détai
toujours fidèle au reste des textes pertinents, des divers transcendant
selon l'ordre de leur priorité cognitive : l'être (ch. 4), l'un (ch. 5), le vrai (ch.
le bien (ch. 7), et le beau (ch. 8), qu'Aertsen finit par éliminer de la list
véritables transcendantaux. Au chapitre 9 il aborde le rapport entre
doctrine des transcendantaux et celle des noms divins et soulève la délicate
question de la portée de nos premières conceptions (sur laquelle nous allons
revenir). Le chapitre 10 synthétise les conclusions acquises, et propose son
interprétation de la philosophie médiévale comme « pensée transcendantale ».

* Jan A. Aertsen, Medieval Philosophy and the transcendentais. The case of Thomas
Aquinas. Leiden-New York- Köln, 1996, 468 p.

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94 CARLOS BAZAN

Mais comme l'impact d'une œuvr


certain temps, il m'a paru justifié
raient contribuer au processus de
listes et qui pourraient surtout en
auteur dont le travail mérite mon
rai en deux étapes. Dans la premiè
sure où un compte rendu le perm
tales de l'ouvrage, en mettant l'ac
l'auteur. J'espère que cette partie pe
vaise lecture des présupposés doct
trine de saint Thomas - et de met
ouvrage. Dans une deuxième part
des points qui ont retenu plus par
terprétation générale de la pensé
l'intention d'entamer avec lui un
poursuivre dans un autre cadre.

I. Lignes théoriques fondamentales

1. La nature des transcendantaux. La théorie que J. Aertsen pré


concerne les premiers concepts de l'intellect : prìmae intentiones (Philip
Chancelier), primae impressiones (Alexander de Halès), intentiones , predic
(Albert le Grand), primae conceptiones (Thomas). Ces notions sont exprim
par des termes dont la prédicabilité est la plus grande (maxime commun
remarque semblerait banale, elle est pourtant nécessaire pour évite
malentendus. Car s'il s'agit de concepts, la priorité des transcendanta
cognitive (p. 125, 162, 289), et il faut d'abord les comprendre à partir
analyse reflexive de la connaissance humaine, tout comme le fit T
(p. 106, 125, 161, 427), plus précisément à partir d'une perspective
explique la résolution de notre connaissance dans ses premières no
obtenues par simple appréhension ainsi que le sens de leur portée « trans
dantale ». La théorie exige aussi une étude des modes de prédication p
aux termes qui expriment des concepts de portée transcendantale.
lement, elle requiert une compréhension adéquate du rapport entr
premiers concepts et les choses à partir desquelles ils sont abstraits
fundamentům in ré). Les transcendantaux, comme tous nos concepts,
hélas, abstraits. C'est cela qui différencie, comme le met bien en év
Aertsen, la pensée transcendantale thomasienne, non seulement de
conception extrinséciste de l'origine de nos premiers concepts (p. 173
aussi de la philosophie transcendantale kantienne : même si, en tan
prima intelligibilia, les transcendantaux sont présupposés par tout
connaissances (y comprise celle des premiers axiomes de la démonst
scientifique, p. 149-150) et en sont, par conséquence, leur conditio
possibilité, ils sont néanmoins connus par l'intermédiaire d'espèces abstr
à partir du sensible, tandis que les formes transcendantales de Kant
priori (cf. p. 79, et le rejet de l'interprétation avancée par le « transcend
thomisme inspiré de Maréchal, 182, 421, 427). C'est aussi parce que n
intellect est réceptif que les premières notions dans lesquelles se résout
pensée sont des moyens par lesquels notre intelligence saisit les modes d
transcendantaux et constituent des connaissances portant sur la réal
méthode de résolution n'est pas une simple analyse logique de concepts, e

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THOMAS D'AQUIN ET LES TRANSCENDANTAUX 95

théorie de leur prédication n'a pas pour objet d'établir de simple


d'expression ». Il y a, comme le dit clairement Aertsen « une relation
sèque entre la méthode de résolution et la métaphysique » (p. 1
doctrine des transcendantaux est « littéralement une onto-logie
Pour comprendre cette portée de la méthode de résolution, il faut f
au modèle sémantique utilisé par Thomas, que J. Aertsen met en reli
clarté et cohérence. Il s'agit du modèle nomen-ratio-res.
2. Les instruments méthodologiques. L'ouvrage d'Aertsen met
trois instruments utilisés par Thomas, tous les trois nécessaires
prendre la théorie des transcendantaux. Il y a d'abord le modèle
que (élaborée par Aristo te) nomen-ratio-res : les mots (nomina) ne s
pas directement les choses (res), mais le font par l'intermédiaire des
tions (radones) de l'intellect (p. 94). On a ensuite la théorie des modi
candi : on doit tenir compte non seulement de la chose signifiée
mode de la signifier (p. 95). Finalement, il y a la méthode de rés
la pensée dans des principes connus per se (p. 74-75), car, comm
science procède à partir du préalablement connu, il n'y a pas lieu
un processus régressif à l'infini : il faut en arriver à des connaissanc
la vérité s'impose de soi à la pensée (1 'anhypothetoń). Le mode p
connaissance humaine est la connaissance rationnelle, qui procèd
sivement et dépend de l'expérience sensible. La résolution de cett
sance dans ses principes premiers suit deux modes : il y a d'abord la
do secundum radonem, qui procède par analyse des causes intrins
choses et arrive à la considération de l'être en tant qu'être et des pro
qui lui appartiennent en tant que tel, et dont la connaissance, par dé
ne saurait être démonstrative (ratio), mais immédiate (intellectu
ensuite la resoludo secundum rem, qui procède par analyse des c
trinsèques et arrive à l'Être subsistant, cause de l'être. La relation
deux types de résolution est intime : c'est dans la mesure où l'in
s'élève à la considération de l'être en tant qu'être qu'elle peut s'é
considération proprement métaphysique d'une première cause
(p. 152-155). Ces deux formes de résolution ne s'opposent pas com
analyse logique à une analyse naturelle, comme on l'a prétendu,
la résolution secundum radonem renvoie aux principes intrinsèqu
tutifs des choses et atteint le principe le plus intime par leque
chose est. Elles se distinguent plutôt par deux types de commun
prédication et de causalité, et rejoignent, chacune à la façon qu
propre, le sujet de la métaphysique et le principe de ce sujet (p.
Mais le fait reste que la résolution secundum radonem atteint d
tions qui s'expriment par des termes. Le premier d'entre eux, en
« ce qui est » et transcende les modes particuliers d'être signifié
genres suprêmes (les catégories). Lorsque quelque chose est sais
« ens », on comprend qu'elle a l'être ; la formalité que le terme expr
l'acte d'être (p. 180). Il faut donc examiner le rapport métaphys
termes, concepts et réalité, ainsi que la portée transcendantale
concepts.
C'est ici qu'intervient le modèle nomen-ratio-res. Les transcen
sont, en premier lieu, des termes qui renvoient aux choses par
diaire de concepts premiers que notre intelligence conçoit.
concept d'être est le tout premier, Thomas le considère comme l

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96 CARLOS BAZÂN

pre de notre intellect (p. 184). Il es


ratio du terme « être » et de dissip
abstrait du concept. La position de
des interprétations qui ont proposé d
d'un jugement, il insiste sur le fait
Ce premier intelligible est saisi par
à l'intelligence l'aspect formel sur
bles et qui inclut, sous cet aspect,
plexité du concept provient du fai
est » et l'« acte d'être ». Mais, pou
« ens » est « être en acte » : ens sumitur ab actu essendi ; la « ratio » du
« nomen » est l'actualité d'être. C'est le trait fondamental qui distingue
Thomas (p. 186) d'Aristote (qui conçut l'être comme quiddité) et de Duns
Scotus (qui le conçut comme possibilité logique). La dualité « ens » (nom) et
« esse » (verbe à l'infinitif) doit être comprise à l'aide des modi significando
Et la première chose qu'il faut rappeler, c'est que « diversitas non est hic
referenda ad res de quibus adhuc non loquitur, sed ad ipsas rationes seu inten-
tiones » (In Boet. De hebdom . II, p. 270 v. 37-39). Car ce que l'on essaie de
comprendre, c'est la diversité conceptuelle (« ratio ») de termes (« nomina »)
qui signifient diversement ce qui est leur fondement dans la réalité (« res »),
où la différence conceptuelle cède la place à l'unité de la structure de l'être
réel (laquelle est parfaitement compatible avec la distinction de ses compo-
santes). Comme l'explique à satiété Aertsen, les transcendantaux diffèrent
ratione, ils ne diffèrent pas re (ce qui permet leur convertibilité). Au sujet de
« ens » et « esse », Thomas explique que ces termes diffèrent par leur mode
de signifier : « esse significatur in abstracto sicut et albedo [...] ens et currens
significatur in concreto velud album » (Thomas, ibid. p. 27 1 v. 43-45 ; Aertsen,
p. 95, 187-188). Le propre des termes concrets est de signifier le suppositum
comme un tout, raison pour laquelle ils peuvent être prédiqués de leur
supposita; les termes abstraits, par contre, ne se prédiquent pas de leur
supposita. Saint Thomas en a donné souvent comme exemple les termes
« homo » (concret) et « humanitas » (abstrait). « Homo » signifie indistincte-
ment tout ce qui essentiellement appartient à l'être humain (et sa forme et
sa matière), et peut par conséquent être dit des individus humains;
« humanitas » ne contient dans sa signification que ce qui fait de l'être hu-
main un humain, id unde homo est homo, cum praecisione de ce qui, tout en
faisant partie de sa réalité essentielle, ne le fait pas pour autant être hu-
main. Le terme abstrait signifie seulement la partie formelle (actuelle) de
l'essence humaine, et, en tant que partie, elle ne se prédique pas des indivi-
dus (Thomas, De ente et essentia, 2, p. 373 v. 292-304; cf. Aertsen, p. 95). On
peut appliquer ce schéma sémantique au couple ens-esse (l'exemple album-
albedo, donné par Thomas dans le texte précédent le justifie). J. Aertsen
montre (p. 175, 191) que saint Thomas a poursuivi la resolutio secundum
radonem (celle qui concerne les causes intrinsèques) jusqu'aux composan-
tes les plus intimes, mais réellement distinctes, de l'être fini (ens) : l'acte
d'être (esse) et l'essence (essentia). Le terme « ens », en tant que terme
concret, renvoie à ces deux composantes de l'être fini, et signifie la totalité
de sujet et acte d'être (p. 187). C'est pourquoi on peut prédiquer « ens » des
sujets existants concrets, tandis qu'on ne peut pas le faire avec le terme
« esse ». Bien que la « ratio » du terme « ens » sumitur ab actu essendi, c'est-à-
dire, du principe d'actualité (p. 185, 190, 429), le terme « esse » n'exprime

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THOMAS D'AQUIN ET LES TRANSCENDANTAUX 97

qu'une composante de l'être fini : ce par quoi ils sont des êtres, cum
sione de ce qui les fait être de tels êtres. On ne peut donc pas dir
est esse » (on ne peut même pas dire « esse est » : ipsum esse nondum
raison en est qu'aucune « partie » ne se prédique du tout (cf. De e
sentia 2, p. 371 v. 103-104 : cum nulla pars integrālis de suo toto pre
Quelque chose de semblable arrive avec le transcendantal concr
(cf. p. 98, 109), dont la « ratio » sumitur ab essentia. Quoiqu'ils d
conceptuellement, ens et res signifient le même tout concret, qui es
« ens » lorsqu'il est envisagé sous l'angle de l'acte d'être, et « res
l'est sous l'angle de l'essence qui détermine Yactus essendi comm
sance détermine l'acte. Ainsi, la différence conceptuelle entre les deu
concrets est basée sur la différence réelle des composantes de la
ontologique des étants, ces composantes, à leur tour, sont exprim
termes abstraits (p. 193-194). Ainsi, comme le remarque Aertsen
qui est fondamental pour comprendre cette résolution et ce sché
tique est de ne pas oublier, lorsqu'on analyse le « nomen » et la
qu'ils renvoient à la « res ». Si on le fait, on commettra la faute
impute à tort. Le mode de signification du terme « ens » est concret
« esse » est abstrait (raison pour laquelle Thomas parle d'« esse co
mais ce qu'ils signifient, par l'intermédiaire des concepts transce
est la réalité la plus concrète et l'acte le plus intime de l'étant, d
est assurée par le rapport acte-puissance qui relie ses composante
3. L'être est l'objet (the subject matter) de la Métaphysique. On
la priorité dont jouit le transcendantal « ens » est fondée sur un
tologique, l'acte d'être, car n'importe quelle chose est intelligib
mesure où elle est en acte (p. 169 avec n. 23, 429). Mais c'est «
« esse », qui est premier (p. 187). Pour toute intelligence humaine, le
« ens » est la première compréhension du réel; seulement le mét
reconnaît sa « ratio » (actus essendi) et procède ultérieurement à
résolution, métaphysique cette fois-ci, de l'étant en ses composantes
giques esse-essentia. Seulement le métaphysicien reconnaît que
cendantaux expriment des modes généraux d'être et ne sont pas
suprêmes comme les catégories qui, elles, expriment des modes p
d'être (à noter : ni les transcendantaux ni les catégories exprimen
des d'expression, mais des modes d'être, p. 107). Les transcenda
sont pas « au-delà » des catégories, ils les traversent toutes (p. 9
n'échappe à leur extension. Est-ce qu'ils réussissent une telle univ
prix de leur contenu? Est-ce le concept d'être le plus vide de nos
P. Aubenque l'a soutenu à propos de la notion d'être d'Aristote :
serait même pas un genre et, par conséquent, il ne se remplit d
intelligible que lorsqu'il s'articule avec les catégories (p. 86-87).
premier d'être est « substance », et le sens de celle-ci doit être r
dernière analyse, à la forme. La métaphysique d'Aristote est ains
liste et n'échappe pas à l'« oubli de l'être » dénoncé par Heidegg
d'Avicenne non plus, par l'accent qu'elle met sur la priorité du trans
tal res, auquel l'être s'ajoute comme un « accident » (p. 194). Et
pourrait être dit de celles d'Henri de Gand et de Duns Scotus (p.
Pour Thomas, par contre, rien ne saurait être compris sans l'être, ca
est inclus (includitur) dans la compréhension de toutes les autre
tions de l'intellect, et celles-ci sont incluses (includuntur) dans celle

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98 CARLOS BAZÁN

unite et indistincte (« distincte », ed


p. 86). Et l'acte d'être (esse), sur le
« ens », est l'actualité de chaque es
« ens », pas « res », est le premier
tout concret (id quod est), le fait c
signifier un mode déterminé d'êtr
demande « qu'est-ce que c'est », et dé
partir de l'essence. D'un point de
(p. 198), la doctrine aristotélicienne
dantal « res ». Elles expriment les m
des autres transcendantaux (un, vr
généraux d'être impliqués, mais pas e
L'accent mis par Aertsen sur l'acte
tent de comprendre non seulemen
vide, mais aussi comment tous les autres transcendantaux s'articulent avec
ce concept. Puisque rien ne tombe en dehors de l'actualité que l'être signi-
fie, l'addition que d'autres concepts peuvent faire à cette intelligibilité pre-
mière ne saurait être conçue sous le mode d'un ajout réel, mais comme une
explication du contenu implicite de l'être. La détermination de l'être ne se
fait pas par voie de différenciation externe, mais par explicitation des mo-
des d'être (p. 87-88). Les transcendantaux expriment les modes généraux;
les catégories expriment les modes spéciaux. La contraction de l'être ne se
fait pas à la façon dont un genre est spécifié et enrichi par une différence
dont la signification lui est externe. Dans les cas des catégories, la contrac-
tion de l'être se fait selon les modes de prédication, qui, à leur tour, dépen-
dent des modes d'exercer l'acte d'être : « oportet quod ens contrahatur ad
diversa genera secundum diversum modum predicanti [...] quot modis aliquid
predicatur, toties esse significatur, idest tot modis significatur aliquid esse »
(p. 89, n. 45). Tous les modes particuliers qui peuvent contracter l'être ne
sont compréhensibles qu'à la lumière de l'actualité qui est la source de leur
intelligibilité, et qu'ils limitent. Pour ce qui concerne les modes transcen-
dantaux, c'est-à-dire les modes qui appartiennent à tout être en tant qu'être
- modes dont la clarification est un dépassement de la doctrine aristotéli-
cienne des catégories (p. 93) - l'addition qu'ils apportent à « ens » ne saurait
être conçue sous la forme de contraction, car cela leur ferait perdre leur
caractère transcendantal, mais comme une addition purement concep-
tuelle : les transcendantaux ne diffèrent pas re, mais ratione. L'identité réelle
explique leur convertibilité; la différence conceptuelle explique que leur
distinction ne constitue pas redondance (nugatio), comme Kant l'a soutenu
(p. 97). La « ratio » des transcendantaux et leur ordre de priorité sont tou-
jours fondés, en dernière analyse, sur la notion d'actualité. C'est le rapport
direct de « ens » à l'acte d'être qui justifie qu'il soit le primum cognitum
(p. 169, 429); « res » lui est subordonné car il est fondé sur le principe qui
contracte l'actualité (p. 198); « unum » ajoute à « ens » l'indivision de l'acte
d'être : la convertibilité de « ens » et « unum » est fondée sur l'esse comme
acte (p. 208); « verum » est convertible avec « ens » parce que la vérité est
fondée sur l'esse plutôt que sur l'essence (p. 264); lorsque l'être est conçu
comme actualité, il n'y a pas de « bonum » en dehors de l'acte d'être (p. 315
et p. 318 avec n. 79). C'est l'actualité de l'être qui constitue le fil conducteur

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THOMAS D'AQUIN ET LES TRANSCENDANTAUX 99

de l'œuvre d'Aertsen et en assure sa remarquable unité. Cette actua


la base de la richesse et de la priorité intelligible de la notion d'« ens ».
Loin d'être le concept le plus vide, « ens » inclut toutes ses différ
(p. 86). En tant qu'objet premier de l'intelligence, il est évident per
accessible à tout être humain. Mais sa « ratio », son contenu et l'articula
de ses propriétés transcendantales (les modes généraux d'être) ne se
festent qu'à l'analyse métaphysique. L'être est le début et la fin de
naissance humaine : le début n'est rendu explicite que dans la scien
considère l'être en tant qu'être (p. 108. 159) et les propriétés qui, to
étant réellement identiques, sont conceptuellement différentes par rapp
au sujet connaissant (p. 1 45- 1 46). Sous l'influence d'Avicenne, saint Th
détermine que l'objet ( subiectum , subject matter) de la Métaphysi
l'être en tant qu'être, contre l'interprétation « théologique » de Boè
Bonaventure et du VIe livre de la Métaphysique d'Aristote (p. 116-1 17).
mas accorde ainsi priorité à la resolutio secundum radonem et la co
nauté de prédication sur la resolutio secundum rem et la communa
causalité (p. 199). Dieu (Ipsum Esse subsistens) n'est saisi par la Méta
que que comme « principe » de l'être, par une démarche qui va des e
leur cause (p. 120). C'est ici que la doctrine des transcendantaux ma
son importance, car l'effet dont il s'agit de trouver la cause et le pr
c'est l'être en tant qu'être (pas en tant que mobile), compris sous la « rat
d'actualité première (p. 200). La résolution de « ens » a montré qu'il
concept complexe qui inclut un sujet et un acte d'être, et a montré
que l'esse est le fondement premier du réel et la racine de son intelligib
Le « principe » que la Métaphysique cherche pour achever la connai
de son objet est donc la cause de Yactus essendi. La Métaphysique est
« ontologie » ; mais elle inclut aussi l'étude du divin comme cause de l'être
de Tétant (p. 123, 127 et n. 33). La resolutio secundum radonem arrive à l'esse
commune, celle qui procède secundum rem à l'Esse subsistens . Le premier est
commun par communauté de prédication, le deuxième, par communauté
de causalité. Les deux types de résolution arrivent à ce dont traite la Méta-
physique : l'être en tant qu'être et la cause de l'être (p. 133). Mais c'est parce
que la pensée est parvenue à résoudre l'être en ses principes internes (sujet
et acte d'être) que la question de la cause de l'être peut être posée de ma-
nière adéquate. C'est dans ce sens que les transcendantaux sont la voie vers
la connaissance philosophique de Dieu (p. 360). Thomas est conscient de
l'importance de cette résolution dans l'histoire de la philosophie (p. 156).
Elle oblige à distinguer soigneusement l'esse commune de l'esse subsistens
(cf. p. 387-395) et définit le rapport entre les deux par un type de causalité
méconnue d'Aristote : la causalité créatrice (p. 154, 377). Ce qui est conçu
d'abord par l'intellect est l'être commun par prédication, pas l'Être premier
par causalité (p. 428). Mais le principe qui est à l'œuvre dans les deux types
de résolution et de communauté est la compréhension de l'être comme
actualité. « La ratio de ens est prise de l'acte d'être (actus essendi) » (p. 429).

II. Des questions pour entamer un dialogue

La synthèse qu'on vient de faire ne reflète pas l'énorme richesse th


tique de l'œuvre de J. Aertsen. Elle n'a d'autre but que d'en souligner
conducteur, tant sur le plan doctrinal que méthodologique, afin de di

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100 CARLOS BAZÁN

quelques malentendus qui pourraien


L'analyse des divers transcendantaux a
disciplines philosophiques et sur les
pouvoir s'étendre sur les rapports e
relation entre l'analyse du bien et la ph
beauté et la portée de la philosophie
cadre de cette Note bibliographique, dé
cependant, dans un article, sur le rapp
humain. Aertsen a mis en relief que le
conceptions de l'intellect est parallèle
humaine. Cet aspect « anthropocentr
doctrine des transcendantaux, et à l'in
l'anthropologie philosophique de Th
pour la philosophie contemporaine
attention particulière qu'on ne peut pa
cependant finir cette présentation
lecture de l'œuvre d'Aertsen a soulevée
1. Le transcendantal « unum » et le
riens ont eu des difficultés à détermin
selon Thomas. On sait que sa pensée
qui n'est qu'un signe des difficult
éprouvait à déterminer ce principe.
rique : on a du mal, comme le signa
nous distingue comme individus, c'es
tue (la matière) ou, encore, ce principe
quantitate signata). Les textes de Th
sont pourtant abondants. La question
J. Aertsen au sujet du transcendantal «
évidence que la première précision
duation est de distinguer (contre Avice
que de l'un qui est convertible avec l
gorial, lié à l'accident quantité. Initi
due), dont la division est à l'origine
crète, où l'un apparaît comme le prin
L'un transcendantal, par contre, con
essendi : en tant qu'acte, l'être est le
(p. 208). Le principe qui guide cette
Thomas : « secundum quod res habent
c. 71 ; cf. ScG IV, 38; Q. De spir.creat
utilise dans les Q. de anima, q. 1 perme
dantal et le principe d'individuation
esse et individuationem ». Appliqué
une affirmation étonnante : « esse su
esse individuatum eius a corpore depen
que lorsque « un » signifie indivisum,
lité ; il a remarqué aussi que Thomas
blables au transcendantal « un », et a s
de l'être comprendrait aussi celle d
justifierait l'inclusion de l'individual
permettant ainsi de la fonder sur le

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THOMAS D'AQUIN ET LES TRANSCENDANTAUX 101

êtres et de la concevoir comme une perfection qui leur revient


qu'êtres, et non comme une détermination subséquente enraciné
principe potentiel. La perspective traditionnelle, qui fonde l'indiv
sur la matière, s'avère ainsi comme étant non métaphysique. Il se
qu'elle répond à d'autres perspectives dont la nature aurait besoi
précisée. S'agirait-il de rendre compte de différences accidentelles
tatives) sur le plan de l'étendue? Répond-elle à une problématique
par une conception platonicienne de la forme, qui, présupposée «
mune », aurait besoin d'un principe externe de multiplication? Co
articuler la perspective métaphysique qui fonde l'individuation su
d'être et la traditionnelle qui la fonde sur la matière à la distinction «
numero/unum de numero » qui joue un rôle si important dans le De u
intellectus (ch. IV) ? Le livre de J. Aertsen, par les questions qu'il soul
par la perspective métaphysique qu'il apporte, renouvelle le prob
l'individuation et permet de l'examiner sous un jour nouveau.
2. Les transcendantaux et l'Être infini. Historiquement, les mêm
mes utilisés pour exprimer les transcendantaux ont été utilisés
comme des noms divins. Cela pose le difficile problème du rappor
transcendantalité et transcendance. Quelle est la portée des transc
taux? Peuvent-ils être appliqués à l'Être infini? Joseph Owens et Jorg
cia penchent pour l'affirmative (p. 111), et dans le cas de Owens ce
pair avec une conception différente de l'objet de la Métaphysique
La même position est soutenue par Josep De Vries, pour qui l'esse c
inclut logiquement non seulement l'être créé, mais aussi l'être d
effet, pour De Vries, l'esse commune signifie l'être comme tel, san
addition; par conséquent il n'est pas identique avec l'être créé, ma
« être » dans son extension illimitée, qui comprend aussi l'être div
Aertsen, p. 390-391). Pour Aertsen, les choses se passent autremen
lui, Thomas identifie l'esse commune avec l'être créé (p. 390). Cela
du fait que la résolution du premier intelligible (« ens ») dans la
sujet/acte d'être ne permet de saisir l'esse que comme inhaerens. Ou en
l'esse commune est le principe métaphysique par lequel chaque êtr
formellement; il est considéré strictement sous la ratio d'actualit
aucune addition; mais il est susceptible d'addition : seulement, tou
tion contractera l'esse à un mode déterminé d'être, à la manière où
sance contracte l'acte. Par cette voie, on n'arrive pas à l'Esse sub
(p. 392). Aertsen voit dans cette interprétation la manière correct
pondre à la préoccupation centrale de Thomas, qui est d'éviter tou
de panthéisme et de sauvegarder la transcendance de Dieu. La re
secundum radonem qui conduit à l'établissement des trascendentau
la communauté de prédication des premiers intelligibles à l'ordre
fini (composé de sujet et d'acte d'être). Elle permet cependant de
manière adéquate la resolutio secundum rem , qui arrive à l'affirm
l'Être infini comme cause de l'être des étants, et qui possède en
quence une communauté de causalité. Soit. Mais une fois posée cet
de quels termes pouvons-nous nous servir pour en parler? Est-el
point « tout autre » (Lévinas) que même les termes et les concepts
raffinés de notre intelligence sont entièrement inadéquats pour
qu'elle est? Si Dieu n'est pas inclu dans l'extension de l'être en gén
la cause n'est pas dans le même domaine que l'effet (p. 391, 395),

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102 CARLOS BAZÂN

quelle mesure pouvons-nous dire qu


(p. 431, 434)? Que veut dire la propo
vertu de son être » ? Quelle peut êtr
cendantaux aux noms divins (p. 4 1 2) ?
et l'Être infini est clarifiée à l'aide de t
té, causalité du maximum et analogie
dit pas de Dieu qu'il est Être, Un, Vr
cause des perfections signifiées par l
de la proposition «Dieu est bon» n'es
mais «ce que nous appelons bonté dan
en réalité, d'une manière plus haute
« le bien et les autres noms transcendan
des créatures » (p. 379). Il y a une tensi
réduisait au domaine des êtres finis l
les concilie pourtant : « Les noms tr
signifient concrètement, c'est-à-dire
propre aux créatures. Cependant, lors
il «transcende» (transcendit) le mode
seulement ce qui est signifié » (p. 387 e
que lorsqu'on dit que Dieu est l'Esse
commune (obtenue à partir de l'être f
par voie d'addition d'une négation d'a
Vries, car le propre de l'être de Dieu, c
voie d'une praecisio qui retiendrait d
tualité signifié et le dé-lierait de la f
cette notion à toute addition ou au
Aertsen clarifie davantage le sujet.
d'aborder sur une base solide le prob
dantaux à l'être fini et à l'Être infini,
avantageuse pour le faire.
3. La caractérisation générale de la
philosophie transcendantale. Cette th
de tous les recenseurs du volume. À jus
du point de vue alternatif qu'elle off
également générales proposées dans l
la Cambridge History, de Libera). L'i
théorie des transcendantaux est indé
de comprendre la pensée médiévale à
qui englobe, par la centralité de son
philosophie. Cette perspective coïnci
se faisait de l'histoire de la philosoph
comprenait cette histoire comme un
sième et dernière étape, à la résolutio
d'être », permettant ainsi de poser
question de la cause de l'être. Aertsen
tive, loin d'exclure d'autres conceptions
té de formes que la philosophie a as
(p. 434-438). Je suis d'accord avec Aer
la doctrine des transcendantaux repr
lution de la pensée métaphysique méd

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THOMAS D'AQUIN ET LES TRANSCENDANTAUX 103

de la distinguer de la métaphysique classique. J'ai pourtant une rés


Aertsen lui-même reconnaît qu'il n'y a pas une doctrine complète des tra
cendantaux jusqu'au xiii6 siècle. C'est par l'effort de penseurs comm
lippe le Chancelier, Alexandre de Halès, Albert le Grand et Thomas d
que les divers composantes de la doctrine sont synthétisées : ens et v
(Aristo te), res et aliquid (philosophie arabe), verum et bonum (contribut
proprement latine). C'est n'est qu'au XIIIe siècle que la réception d'Aristot
du Ps. Denys permet de poser le problème du rapport entre les tran
dantaux et les noms divins, et explique les efforts de justification du
platonisme sur un plan transcendantal. Jusqu'à quel point une doct
tellement propre au xme siècle latin peut servir pour caractériser l'ensem
de la pensée médiévale? Aertsen n'est-il pas ouvert aux mêmes crit
qu'il adresse à Gilson, dont la notion de « Philosophie chrétienne » ce
sur la primauté de l'être exclut non seulement les philosophies juiv
musulmane, mais aussi les formes chrétiennes de néo-platonisme qu
vilégient le Bien? L'accent que nous avons mis sur la resolutio secu
radonem ne fait que justifier encore plus la question posée. Mais la m
physique met en œuvre aussi la resolutio secundum rem, sur laquell
n'avons pas insisté suffisamment. Ce n'est que lorsque la pensée est a
à une compréhension adéquate de l'être sous la « ratio » d'actualité
question de la cause de l'être peut être posée rigoureusement par un
solution secundum rem et que la pensée peut arriver à ce qui est pr
par communauté de causalité. Le livre d'Aertsen abonde en passages
deux types de résolution sont mis en rapport étroit. Dans le dernier typ
résolution, la notion de création est la clé : c'est elle qui définit la ca
propre de l'Être infini et elle est à l'œuvre dans l'analyse de tous et c
des transcendantaux. La création n'est pas seulement l'explication de
gine de l'esse commune ; elle joue un rôle central dans la déterminat
verum (p. 251, 273, 370), du bonum (p. 287, 298, 302-303, 313, 371-3
du pulchrum (p. 341). La notion de création fait partie de la caractéri
de la troisième étape de l'histoire de la pensée telle que Thomas la co
(p. 154-156 et n. 109). De fait, selon Aertsen lui-même, le fondeme
« théologique » de la transcendantalité de l'être est le noyau de la co
tion que Thomas et ses prédécesseurs se faisaient de l'histoire de la
sophie (p. 376-377). Ce qui est plus : la cause finale de la doctrine th
sienne des transcendantaux est « théologique »(p. 431, 436); l'Être inf
la causalité qui lui est propre est la fin dernière de la recherche métaphy
que (p. 434). C'est dans la perspective de la resolutio secundum rem
s'achève par l'affirmation de la cause de l'être, que Thomas trouve une ju
fication à la perspective platonicienne sur la priorité du Bien (p. 191)
le caractère subsistant de l'Être (p. 374), et qu'il légitime le modèle pl
cien de prédication par participation (p. 380). La notion de création
présente et est centrale dans toutes les formes de la pensée médiéval
l'est dans les milieux juifs, musulmans et chrétiens, dans les forme
platoniciennes du Ps. Denys et du Liber de Causis, dans les systèmes s
tiqués nés au xme siècle sous l'influence d'Aristote et des sources a
elle est une préoccupation centrale depuis Augustin et garde cette
prioritaire tout au long de l'immense période de presque dix siècle
l'on met sous l'étiquette de « Philosophie médiévale ». La notion de cr
me semblerait plus adéquate pour caractériser cette période. Serait-i
sible d'adapter la thèse de J. Aertsen en disant que cette réflexion sur l'o

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104 CARLOS BAZÁN

gine de l'être est la clé de compréhen


en précisant qu'elle ne trouve son ach
té de sa solution que lorsqu'on est p
radonem, à poser la question de l'êt
goureuse? Cela reconnaîtrait l'impor
cendantaux et rendrait justice aux effo
qui l'ont précédée.
8, Birch Avenue
Ottawa (ONT) Cana

RÉSUMÉ DE LA NOTE. - Thomas d'Aquin


vre de Jan A. Aertsen. Par Carlos Bazán.

Dans un ouvrage fondamental publié en 1996, Jan Aertsen attira l'attention, d'une
manière systématique et comprehensive, sur la doctrine des transcendantaux au Moyen
Âge. La synthèse que les penseurs latins, particulièrement Thomas d'Aquin, ont réussi à
faire des sources gréco-arabes de cette doctrine et les innovations qu'ils y ont introduites
font d'elle un thème central de la philosophie au XIIIe siècle. La réflexion sur les transcen-
dantaux a eu un impact décisif sur la question des fondements et limites de la métaphysi-
que, et a permis de poser d'une façon rigoureuse le problème de la contingence et de
l'origine de l'être. Elle est par conséquent essentielle pour la compréhension de la philo-
sophie médiévale. Dans la « Note » on met l'emphase sur la distinction entre la résolution
de la pensée dans ses premières conceptions et la résolution métaphysique de l'étant dans
ses composantes ontologiques, distinction absolument nécessaire pour comprendre adé-
quatement la portée et la signification du livre de J. Aertsen. On met en relief aussi les
lignes théoriques fondamentales de l'œuvre et on soulève, dans le but d'entamer un dialo-
gue, quelques questions sur des points précis : le problème de l' individuation , de l'Être
infini et de la caractérisation générale de la pensée médiévale comme pensée transcen-
dantale.

Abstract. - Thomas Aquinas and the Transcendentais. By Carlos Bazán.


In a fundamental book, published in 1996, Jan Aertsen called the attention in a sys-
tematic and comprehensive way, to the doctrine of transcendentais in the Middle Ages.
The synthesis of Greek and Arabic sources achieved by Latin thinkers, particularly Tho-
mas Aquinas, and the innovations that they introduced in this doctrine, makes of it a
central theme in 13th Century philosophy. Reflection on transcendentais had a decisive
impact on the problem of the foundations and limits of Metaphysics and allowed for a
rigorous analysis of the contingency and origin of being. The doctrine is, consequently,
essential for the understanding of Medieval Philosophy. In this « Note » emphasis is put
on the distinction between the resolution that leads to the first conceptions of the intel-
lect and the metaphysical resolution of being into its ontological components, distinction
that is absolutely necessary to understand adequately Aertsen's book. The main theoreti-
cal lines of the book are underlined and some questions are raised, with a view of pur-
suing a philosophical dialogue, on some particular issues : individuation, transcendentais
and the Infinite being and the general characterisation of Medieval Philosophy as tran-
scendental philosophy.

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