La plupart des humains comprennent peu de chose et s'il est
vrai qu’ils sentent un peu plus qu’ils ne raisonnent, ils ne congoi-
vent guere ce qui les émeut, ils n'ont pas les moyens de passer de
Vimpression @ Vart d’exprimer clairement ce quiils éprouvent et
méme avec force. Quand nous les aidons @ se retrouver, ils tom-
bent dans l'étonnement et beaucoup se refusent &@ nous suivre, nos
révélations ne persuaden le
facultés tat , nous ne
les autres, la.
grand intérét 3
, : n'est donc pas mer-
ménent et si leurs idées
f, sauf a Végard des
effets. Il est certain
quiil met souvent de
Ml n'est rien de plu: z gine de ce Droit, qui parait
assommer les étres par c e sec, d'aride et de glacé. Le
r rasque. et Von présume qu'il est
nécessaire, le Droit a beaucoup a cacher et principalement deux
choses : Vune, la force dont il se dérive, et autre, la justice qu'il
trahit. C’est que le Droit se situe a distance égale de la source la
moins pure et de beaucoup, et du projet de beaucoup le moins
accessible, il prétend ignorer Vabus, qui Vavait suscité, comme il
nous promet Vidéal, qu'il ne saurait atteindre, il ment deux fois, il
mentira sur Vorigine et sur la fin, et s'il disait la vérité, nul ne lui
préterait obéissance. Le philosophe se permet de pousser une pointe
en Vun et l'autre sens, il a trop le respect des lois pour ne se donner
quelque liberté, tres nécessaire d son état de philosophe et qui, chez46 PREFACE
hommes, engendre le mépris de Vordre, it fait
saa, ne se paye de raisons touchant la pos ice peat
Putopie, il considere les humains et ne les croit pas susee
daller plus outre que les bornes les plus resserrées ni de ge ee
‘mer longtemps dans les domaines quiils disputent a leur finite.
Ton croyait autrefois a Véducation du genre Iumain et Yon
sait un progrés moral, l'on allait jusqu’a juger impossible te
ces institutions abolies selon Vapparence, que sont a moy
ou la théocratie, la féodalité, les castes, le rétablissement et
peine capitale et des supplices, la responsabilité collective et tg
Femoactivité des lois... nous n'avons plus ces belles ass
hrous touchons au moment oi ce qui fut, se désassemble et ce guj
se réforme, nous échappe, nous n’osons plus nous demander a quoi
nous nous acheminons, nous éprouvons soudain que les énormités,
dont souriaient nos peres, sont en possession de redevenir actuelles.
Mes hypotheses ne sont pas inconsistantes et les événements du
siécle achévent de nous révéler & quel point nos structures sont
fragiles. Notre légalité ne saurait subsister dans un repos, dont it
nest pas d'exemple ailleurs et qui, partant, n'a plus de raison d'étre,
tout s'est remis d fermenter et rien ne persévére en sa démarche,
notre évidence n'est plus qu’un dédale oi nous nous consumons &
nous interroger et sur nos fondements d'abord, ces fondements se
‘meuvent sous nos pieds au moment oit nos sitretés nous désempa-
rent. L’heure est venue d'aller au bout de ce que l'on n’osait exa-
miner, Vesprit de profanation gagne de proche en proche et Von
ne rendrait pas service au Droit, si 'on cherchait a l'y soustraire,
Les hommes étant voués @ la servitude et ne sortant de leur malheur
habituel que pour y retomber, malgré tous les moyens capables de
les affranchir et de les rendre heureux, il est loisible de se deman-
der si nul reméde n'est en vue et si notre justice n'est a méme de
pieien. za cette humanisation du monde, apres laquelle on a tant
~ Car dans un avenir, qui parait tout proche, nous vivrons
dans un monde uni,
, que nous désespéror
limage a de quoi rentoncr ‘pérons de concevoir, tant cette
nos habitudes. Nul ne prévoit au juste
‘ce que nous ferons lors et posé que Von veuille préluder par fePREFACE 1
de Vaccumene, a je ne sais quoi d’impensable et, nonobstant, it y
songer.
A la faveur de la métamorphose, il est non seulement permis,
mais nécessaire de déterminer & quoi les définitions engagent et
persuadons-nous @ ce propos que le refus, que d’aucuns leur oppo-
‘sent, est un engagement @ sa maniére et non moins lourd de consé-
quences. Tout nous engage désormais et rien n'est illusoire, @ la
réserve de la transcendance, la transcendance va mourir et Chomme
libre ne sera plus désormais qu'un orphelin, un orphelin commis &
régenter le troupeau des esclaves, qui cherchent dans le Ciel un
Pére et trouvent ici-bas un Maitre. Pris a la gorge et n’ayant d’autre
asile que cet univers, que les vivants accablent, en attendant qu'ils
soient exterminés par milliards, nous devons a présent approfondir
ce qui ne peut s'étendre : ainsi nous échapperons @ ce tout, ce tout
devenu consubstantiel @ quoi que ce puisse étre et que n'importe
quoi réfléchit a cette heure. Nous dominerons sur le tout en par-
venant a l'expliquer et nous nous confondrons avec nos idées claires
et distinctes, pour planer au-dessus du gouffre, nous nous enfon-
cerons jusques aux bases et la nous porterons sur leur anatomie un
regard sacrilége, Vespece de terreur, dont elles nous affectent, se
dissipera comme par enchantement et nous nous retrouverons libres.
L’on nous objectera que cette liberté n'existe qu’en Vopinion des
rares, qui Vont prétendue et parjois obtenue. Je réponds a cela qu'il
ne mimporte et que le philosophe fut toujours un homme libre,
parmi des hommes qui ne Vétaient pas et d’abord de ce quils
wavaient souci de Vétre, la liberté découlant du souci, du souct
méme que la plupart fuiront dans Vivresse autant que dans la servi-
tude, le propre de la servitude étant l'insouciance. Tous les croyants
sont des esclaves et que les prétres méneront a la glandée, le philo-
sophe n'a rien de commun avec ces avortons, il aime mieux le
néant que Uespece de bonheur immonde et siégeant dans le bas
du ventre, que la foi départ a ses adeptes, pareils aux compagnons
d'Ulysse-métamorphosés en porcs sous la baguette de Circé. Le
philosophe a choisi la vertu, la foi n'est qu'une volupté, le philo-
sophe a choisi la lumiére, la foi n'a jamais été qu'un orgasme, le
Philosophe ne mesure la valeur de V'idée au plaisir quelle lui donne,
oit le croyant ne sollicite que la jouissance. En vérité, le philosophe
est chaste et c'est pourquoi lui seul est admis & comprendre, ott le
croyant s'approuve de subir ce quil refuse de déterminer. Nul
_— eroyant rentrera dans Vunivers futur, si ce nest en marchantune etaon, dont le carnage
le fruit ron a i
., seront esclaves et Ton ép
or ndnage les simples, que OS Problemes
aw moyens nous forcent désormais & ley
wos On tons 2 faire, plus leur solution nous
ide larmes et de Sank. iamais, tout se transf 4
resprit des lois Te | ‘apable d'assommer esprit Ta
‘autour de nous ipa mie mystore et rout — par contradiction —
plus vivace, il rntiable, ‘es explications deviennent tellement sub.
se perd dans I’ patent plus ce quelles définissent et que nous ne
sles quelies mclaren’ vant incroyablement les choses de beau
sorts ds yee on on dira que nous vivons dans le crépuscule
coup les plus Piers font le jour, un jour que nous ne parvenons @
a phases ‘quit nous aveugle, un jour on la plupart des notions,
que Von tenait pour ‘évidentes, ont cessé de Vétre et d’autant plus
que les mots nous trahissent, ces mots dont on aura tant abusé,
quil faut se rejeter sur la philologie et sur la sémantique, avant
@amorcer un débat quelconque. Or, la plupart n’en veulent méme
pas, le vague est trop propice a leurs menées et quand nous les
‘sommons d'étre objectifs, ils nous accusent de mauvaise foi, la
subjectivité leur parait une marque de sincérité, ces hommes sont
‘tous intraitables et d’autant plus que lordre, qu'ils maintiennent,
repose sur une imposture et qu'en cédant sur Vobjectivité, le proces
de leur imposture serait Vinévitable conséquence. Au milieu des
ae ee potas (et qui, dans leur aveuglement, gardent un
den, Mile pour se savoir menteur), Vesprit des lois se perd
‘iques, nimporte quoi devenant tour a tour
a Gen de la divinité terrible de V'Histoire et de Vempire sans
o ee essere. Cette solution remonte a la Philosophie
sme le paracheva, nous Wavons plus de recours
i
il
“ill
Port dans la tempét
itnadarerns oePRAPACE 13
devant de V'absence, Vabsence de ses raisons d’étre la simulta-
‘nbité de sex raisons de mort. ora
Au bout de ce déferiement est le triomphe de la mort, car nous
ne présidons @ ce que nous mettons en branle, nous amorcons au
jour le jour une fatalité nouvelle et nous en subissons — & Vim-
irvu — Ueffet le plus souvent indiscernable, puisqu'il figure au
miliew d'autres et qui remontent a des causes éloignées. Que sont
Jes lois auprés de ces énormités ? les sujets les plus minces. Telle
est la nouveauté, les lois ne sont plus rien, seul compte le Pouvoir
et le Pouvoir immédiat, en possession de les imposer. Le probleme,
A cette heure, consiste a s'emparer de la puissance, non de pardttre
lkgitime, Vabsolutisme est notre dénominateur commun et nous
nous en accommodons : dans les hauteurs régne une simplicité de
mauvais aloi, mais dans les projondeurs tout se diversifie et se
contond, prenant une figure de chaos organisé pour harasser les
hommes, au Pouvoir absolu de fait — qui régne sur les cimes —
répond, dans la vallée obscure, une bureaucratie de cauchemar, oit
tout Vabsurde se ramasse, afin que Vabsolu domine sans partage
et que nul ordre ne parvienne a Voffusquer. La crise du Droit, amor-
cée depuis des générations, se continue, irréversible, et pour ne
prendre fin qu’avec le Droit, le Droit se désassemble avec les restes
de la cohérence.
Tl ne subsiste, au miliew des malheurs 0% nous nous enfoncons,
qu'un privilege, c'est que nos fondements se voient & découvert,
Cest que la profanation y devient un devoir et c'est que esprit
dexamen parait le seul impératif catégorique, enfin ces temps sont
les délices de tout philosophe. Et quand Ventendement recut-it plus
impressions et de lumiéres ? jamais plus de trésors ne furent mis
au jour et jamais plus de vérités ne s'y montrérent a la fois, comme
pour étourdir les subalternes, en exercant les mattres. Aussi la
stupeur s'y rend-elle générale, Vexcés de moyens ne servant qwa
la répandre et qu’d mieux renfoncer les simples dans Vabjection,
leur lot, au milieu des jouets qu'on leur prodigue et des hochets
qu’on leur promet. Le philosophe laisse la les uns comme les autres,
il se dérobe a la communication, cette marotte et par laquelle le
‘mensonge trouve ses entrées dans tous les lieux ensemble, il fuit
les assemblées oit les problémes seront faussés a la base et discutés
selon des lignes rituelles, pour étre résolus moyennant quelque tour
de gobelet, il aime mieux ne pas étre a la mode que de préter son
assistance a Vimposture, il se retire dans sa tour et fit-ce au sein“ge ta mélée, ita choisi la mort én vie a seule fin de vivre en
Co de ye ‘en ombre, att creux des nuées idéologiques,
oom smunun sera toujours pipé, les gouvernants ourront
ial désormais, puisqu'il n'est plus de cohérence entre
‘choses et les hommes, pas PI
accord ne semblant pas en ee
chimérique,
est la chimére
ja philosophie de tous ceux qui ne sont pas philosophes, et les relj.
pions, qui seforcaient de le combatire, ne peuvent quielles ni
i i rest rien de plus simple que notre évidence : c'est ig
rweme de Platon @ la dimension de V'univers et nous n’en sortirons
jamais, saxj a changer de naturel. Quant aux prodiges de notre
‘science, ils n'affranchiront pas les étres, ils permettront aux plus
‘méchants de Saffermir dans leur malice et d'abuser impunémeni
de la simplicité de leurs victimes, en leur persuadant qu’elles ;
libres, Tel est le paradoxe des lumiéres et plus nous avon
lartés, mieux nous nous égarons parmi nos découvertes. Il pace
assuré gue nous ne nous concevons point et la lecon de notre
er ale pee phere incapables de se définir eux-mémes,
dus et pers sans resource, Vesprit de nos moyens 2
refusant ee eee arene veulent un supplément de
ere ee (é. Qui n'a Vesprit de ses moyens,
imayens ont da trop de fons, igs ue monde sans esprit, oit les
aia chrge de cessed ay aes ne pourraient survivre
vant les restes de ie i -il préférer ? De nous
ee i, re (é, dont nous mourrons,
les, en nous perpétuant
dimension de Veecu-
disciplinés et condi-
nO)
1 dans le ce mmant nos déchets
Passé 2
lus quientre les idées et les cho
e et V'art de rétablir un équitipy
'’@ moins de la mutation de notre eg
double. Dans ces conditions, le fatalisme exp
rele, sans Histoire et