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Capricci & Bobi Lux présentent

Distribution Karim Leklou Vimala Pons


CAPRICCI FILMS
contact@capricci.fr
www.capricci.fr
VINCENT
Programmation
CAPRICCI FILMS
programmation@capricci.fr
DOIT
01 89 16 93 51
MOURIR
Relations presse
Monica Donati
monica.donati@mk2.com
un film de Stéphan Castang
06 23 85 06 18
AU CINÉMA LE 15 NOVEMBRE

MATÉRIEL PRESSE ET PHOTOS TÉLÉCHARGEABLES SUR :


www.capricci.fr France - 2022 - 1h48 - 2.39 - 5.1
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Synopsis 7
Entretien avec le réalisateur
Stéphan Castang 8

Biographie et filmographie 14
Entretien avec le scénariste
Mathieu Naert 16
Les acteurs 20
Fiches artistique et technique 23

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Synopsis
Du jour au lendemain, Vincent est agressé à
plusieurs reprises et sans raison par des gens
qui tentent de le tuer. Son existence d’homme
sans histoires en est bouleversée et, quand le
phénomène s’amplifie, il n’a d’autre choix que
de fuir et de changer son mode de vie.

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Entretien avec Stéphan Castang bizarre, d’un mélange de genres qui l’absurdité qu’elle peut créer. Ce que
Réalisateur me plaisait. Surtout, je voyais qu’il j’aime dans l’absurde c’est qu’il per-
restait de l’espace pour conjuguer met de rire des choses graves, sans
mes névroses avec celle de Mathieu. déjouer le tragique des situations ni
Je sentais qu’il fallait rester loyal avec rendre dérisoire le propos du film.
Vincent doit mourir, mais pour- laisser place à une autre plus cruciale : les codes du genre, et qu’en même
quoi ? « Combien de temps il me reste ? » Et temps ce n’était pas vraiment un Êtes-vous parti de références de
c’est à travers cette nouvelle question, film de genre. Il fallait jouer avec ce films précises ?
C’est bien la question que se pose et dans une forme de survie, qu’il trou- mélange, trouver un juste équilibre
Vincent pendant tout le film et à vera du sens. pour accorder ensemble les diffé- On est toujours un peu le produit de
laquelle il n’arrive pas à trouver d’ex- rents genres du film. Car chacune sa cinéphilie. Il y a George A. Romero
plication. Du stagiaire au facteur, on des tonalités découle directement bien sûr, mais celui des débuts, de
cherche à le tuer au premier regard « L'ironie du film montre des situations dans lesquelles se Martin ou de The Crazies. Par exemple
sans aucune raison apparente. Pour- trouve Vincent et de la violence gra- Romero n’explique pas pourquoi les
tant Vincent est un personnage banal,
que cette violence, c'est tuite qui s’abat sur lui. À un moment morts sortent de terre ou comment
un graphiste citadin qui vit à Lyon, ni aussi celle de notre société » elle produit naturellement de la para- de braves gens deviennent fous, c’est
sympathique ni antipathique, certes noïa, à un autre un film d’enquête, à très vite éludé, l’important est de mon-
content de lui mais c’est tout. Du jour un autre encore un film d’action ou trer comment les humains réagissent
au lendemain il se retrouve au centre Le film est très original par sa de zombies. Et comme tous ces gens à ces situations. Luis Buñuel est
de toutes les attentions et subit une tonalité. Il mélange différents lambda ne savent pas se battre, les une autre référence aussi. D’ailleurs
multitude d’agressions de la part d’in- genres, film paranoïaque, survi- combats deviennent souvent mala- le film démarre comme un de ses
connus ou de gens familiers. Pourquoi val, film burlesque, moments de droits et sales, à la frontière du films, c’est-à-dire par un personnage
lui ? Est-il le seul ? Qu’a-t-il fait pour comédie. C’était une intention burlesque. On ne peut pas parler véri- qui raconte un rêve. Et je tenais à ce
mériter cela ? Pourquoi une telle vio- dès le départ ? tablement de comédie. Je dirais qu’il que cette scène soit filmée comme
lence irrationnelle ? On ne sait pas, y a une ironie qui parcourt l’ensemble un rêve : avec un très gros plan qui
libre à chacun de se faire son idée. Et Cet aspect était déjà présent dans le du film. Une ironie qui montre sans fait qu’on ne sait pas très bien où l’on
rapidement, pour Vincent, la question scénario de Mathieu Naert. Il y avait le surligner que cette violence, c’est se situe avant que le cadre ne s’élar-
« Pourquoi on cherche à me tuer ? » va la promesse de quelque chose de aussi celle de notre société et de gisse dans ce drôle d’open space.
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Mais la figure tutélaire reste certai- à priori un corps qu’on imagine pour Et concernant Vimala Pons ? on dit vite que ce sont des « gueules ».
nement Carpenter. Je pense surtout un film d’action. Karim est un acteur C’est comme lorsque des journalistes
à Invasion Los Angeles ! Le film où il formidable pour ça, car il peut aussi C’était une évidence ! Je trouve parlent des gilets jaunes en disant « ils
explique que le capitalisme est le fruit avoir quelque chose d’un burlesque qu’avec Karim ils forment un merveil- sont moches ». Mais, en fait, ce sont
d’une invasion extraterrestre. Son côté entre un corps tout en réaction et un leux duo d’amoureux. J’ai vu de des gens qu’on trouve dans n’importe
paranoïaque et sa dimension ironique visage impassible, à la manière d’un nombreux projets de Vimala, que ce quel coin de France ; ce sont simple-
était très inspirante et aussi parce que Buster Keaton entrainé sur un train soit au cinéma ou au théâtre. Il y a ment des acteurs et actrices qui
l’acteur principal est un catcheur, il y à toute allure et qui va juste tenter quelque chose de lumineux chez elle, ressemblent au commun des Français,
a également à l’œuvre dans ce film la de s’adapter et de comprendre ce solaire et lunaire, c’est une actrice à des gens de ma famille ou à mes
question des combats et d’une cer- qui lui arrive. Au-delà de sa qualité très physique et en même temps elle voisins. C’est aussi l’image d’une
taine physicalité. incroyable d’acteur, si on le place porte une vraie profondeur. Avec elle France qui est celle que je connais,
dans un lieu banal, c’est quelqu’un comme avec Karim, pas besoin de vivant moi-même en province. J’ai
de banal ! Il devient un « Monsieur background ou de psychologie, ce choisi tous ces rôles parmi les acteurs
tout le monde », avec un corps de sont des artistes qui portent en eux que je connaissais car j’ai été acteur
« Karim est l'acteur idéal : « Monsieur tout le monde », comme une véritable poésie et rappellent que au théâtre pendant plus de vingt ans.
à la fois banal et singulier, d’ailleurs tous ceux qui l’affrontent, les actrices et les acteurs sont égale- Pour la plupart, j’ai déjà travaillé avec
du facteur au comptable en pas- ment des créateurs. eux, comme avec François Chattot,
extrêmement doux
sant par des enfants. C’est un peu Emmanuel Vérité ou bien Guillaume
et brutal. » ça aussi le burlesque ! Des person- Les acteurs qui les entourent Bursztyn, qui interprète le facteur,
nages ordinaires qui se retrouvent à ont des « gueules », ce qui avec qui j’avais joué dans La Nuée.
devoir affronter des situations extra- donne au film un côté décalé en
Cette physicalité elle est liée au ordinaires sans autre choix que de se même temps que « quotidien ».
choix d’un acteur comme Karim démerder. Et ça me plait qu’on puisse Comment les avez-vous choisis ? « La violence est déroutante
Leklou ? voir « Monsieur et Madame tout le
monde » dans la plupart des rôles. Il faut s’entendre sur ce qu’on appelle lorsqu’elle est portée par
C’était pour moi l’acteur idéal : Karim C’est un choix qui a aiguillé totale- « gueule ». Dès que ce sont des acteurs, quelqu’un qui ressemble
est à la fois banal et singulier, extrê- ment la tonalité générale du film. des corps qui sont moins lisses de ce
mement doux et brutal. Ce n’est pas qu’on a l’habitude de voir au cinéma,
à votre voisin. »
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Son combat dantesque dans une Vincent est doublement victime. Le film parle d’une société qui scène suivante. Ce « C’est qui lui ? »
fosse septique avec Karim est une Il est victime des coups qu’il devient de plus en plus violente va questionner Vincent tout le long de
extraordinaire performance. reçoit et victime de l’incrédu- et le film montre ça comme une son périple, va l’obliger à se cogner
lité des autres. Tout le monde le contamination, quelque chose à une réalité qu’il ne voulait peut-être
La plupart des combats mettent prend pour un fou… d’aveugle qui vient frapper au pas voir.
en scène des personnages qu’on hasard.
n’a pas l’habitude de voir se battre La violence la plus brutale du film est On a le sentiment dans Vincent
au cinéma : le stagiaire, le postier, sans doute la violence psychologique Oui, le film ne traite que de ça, il ne doit mourir que le salut ne peut
les enfants… et sociale qui s’abat sur Vincent. Le traite que de la violence. Mais pour venir que de la marge ?
fait de devenir une cible, une victime, moi, ce n’est pas tant la violence qui
C’est cet ordinaire et ce réalisme que le rend suspect et infréquentable est extraordinaire, c’est le fait qu’on C’est entre autres cela que Vincent finit
je recherchais. La violence est d’autant auprès de ses collègues comme de ne se foute pas tous sur la gueule par découvrir. Les seules personnes à
plus déroutante lorsqu’elle est portée ses voisins. Il suscite davantage l’in- qui tient du miracle. Si on prend la qui Vincent peut finalement parler sont
par quelqu’un qui ressemble à votre compréhension autour de lui que séquence actuelle en Occident on un SDF ancien professeur d’université
voisin. Elle emporte tout le monde, de l’empathie. C’est cette violence tein- peut avoir l’impression d’un temps de puis une serveuse un peu marginale
la grand-mère aux enfants. Ce sont tée de bienveillance qui est insup- paix immuable mais c’est une totale qui habite sur un bateau. C’est un
des corps presque tabous, que l’on portable. De ce point de vue, Vincent illusion qui est en train de nous rattra- grand classique du cinéma de complot
ne veut pas voir se battre à l’écran. doit mourir est l’histoire d’abord d’un per un peu, y compris en remettant en que de faire passer le salut par des
C’est pourquoi il ne fallait pas des naufrage personnel. Le film n’est pas cause l’exemplarité de nos démocra- personnages à la marge. C’est aussi
chorégraphies magistrales mais des post-apocalyptique, plutôt pré-apo- ties. L’incroyable c’est d’arriver encore une leçon de l’Histoire qui montre sou-
combats maladroits, gauches, secs. calyptique, on pourrait presque dire à vivre ensemble. Le film raconte sur- vent que la résistance commence par
Je ne voulais pas que la violence soit qu’il s’agit d’une apocalypse intime. tout ça… Ainsi que notre indifférence à des parias, par celles et ceux qui n’ont
trop stylisée ou virile. Nous avons fait On peut penser pendant longtemps cette violence, ou notre capacité à en rien à perdre. C’est le cas aussi de nos
très attention avec Manuel Dacosse, que ce mec est fou, avant de réaliser détourner le regard. D’ailleurs la pre- Sentinelles du film qui ressemblent aux
le chef-opérateur, à ne jamais filmer que c’est le monde qui est en train de mière réplique de Vincent traduit bien membres d’un site complotiste. Pour
la violence comme quelque chose de devenir totalement taré. cet aveuglement, il demande à un de ce qui est du personnage de Margaux
fun. ses collègues « C’est qui lui ? » en par- qui habite sur un bateau, c’est une
lant du stagiaire qui va le frapper la réalité ! Il y a des gens qui n’ont pas
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assez d’argent et qui vivent sur des rences, on peut y voir Orphée, on peut Dans ce film quasiment mental, donne la promesse de quelque chose
petits bateaux ou ailleurs, enfin là où ils y voir Antigone, Tirésias… Il y a cette la musique joue un rôle impor- d’effrayant, de féroce mais qui serait
peuvent… L’idée n’est pas de jouer sur chose qui fait qu’ils sont là, l’un pour tant. Elle est le reflet de l’humeur contredite par la première scène du
le pittoresque social mais de montrer l’autre. Elle tombe amoureuse de lui de Vincent, de ses sentiments… film. C’est ce dialogue avec la musique
que quand on est dans la merde, on lorsqu’elle voit le désastre qu’est l’exis- qui m’intéressait. Je voulais qu’on tra-
continue de vivre. On vit même des his- tence de Vincent. C’est ce qui est char- La musique est arrivée extrêmement vaille sur des leitmotivs. Le phéno-
toires d’amour. On les vit d’autant plus mant dans le personnage de Margaux : tôt car effectivement je pressentais mène par exemple, il fallait qu’il ait
dans un contexte compliqué où on s’en normalement elle devrait être effrayée qu’elle jouerait un rôle crucial dans la son thème et sa fréquence. Certaines
tient à l’essentiel. C’est aussi ce que va mais c’est au contraire le fait que tout construction du personnage de Vincent scènes sont presque pensées comme
réaliser Vincent : en se trouvant subi- le monde veuille le tuer qui lui donne et dans l’architecture du film. Elle a été des scènes d’opéra. Si on enlève la
tement à la marge, il va retrouver ou l’envie de se jeter dans ses bras. Mais composée avant le tournage par John musique, on enlève une vraie dimen-
peut-être découvrir ses fondamentaux. est-ce que le film raconte que le salut Kaced qui a écrit la musique de tous sion au film. Prenez un texte d’opéra,
se trouve dans l’amour ? Oui et non… mes courts métrages. Nous avons c’est parfois très moyen, mais quand
Pickpocket de Bresson s’ouvre sur Car c’est compliqué d’aimer. Le film le commencé par écouter des musiques on ajoute la musique, ça devient tout
un carton disant « Le film est la montre bien : qu’est-ce que c’est que avec John : Mahler, Chostakovitch, autre chose. Dans Don Giovanni, la
rencontre entre deux âmes en de s’attacher à quelqu’un, au sens des musiques de Carpenter. Des réfé- phrase du commandeur quand il arrive
peine ». C’est un peu aussi l’his- propre comme au sens figuré ? La fin rences hétéroclites mais notre intui- à la scène finale c’est : « Don Juan je
toire de Vincent doit mourir ? est tout sauf une happy end, c’est une tion nous disait qu’il fallait faire avec t’ai invité à souper et tu es venu ». Dans
échappatoire, un moment de répit… tout ça. Comme le film allait tenter le genre terrifiant on a fait mieux ! Vous
Oui, tout à fait ! D’ailleurs Pickpocket Mais pour combien de temps ? de jouer avec différents genres, la rajoutez la musique de Mozart et tout
se termine aussi par une étreinte. Dans musique devait aussi travailler dans à coup ça devient quelque chose d’ef-
Vincent doit mourir ce qui me plaisait ce sens-là. La musique allait apporter frayant ! La musique de John apporte
beaucoup c’était de raconter une his- beaucoup dans la dramaturgie, dans une émotion et une compréhension
toire d’amour qui échappe aux codes « En se trouvant subitement la ligne narrative. La musique devait du film qui passe au-delà des mots, et
à l’eau de rose. Ce sont des naufra- à la marge, Vincent va porter le genre, la machine infernale raconte de manière sensible la plon-
gés. Il y a une dimension mythologique dans laquelle se trouve piégé Vincent. gée dans la nuit de Vincent doit mourir.
et je tenais à ce que l’image de fin y découvrir ou retrouver Ainsi dès le générique du début, John
fasse écho. Chacun y trouvera ses réfé- ses fondamentaux. » devait composer un morceau qui Entretien réalisé en avril 2023
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Stéphan Castang

Biographie
Né en 1973, Stéphan Castang est cinéaste et comédien. Au théâtre, il a joué
avec Marion Guerrero, Benoît Lambert, Ivan Grinberg ou Thomas Poulard.
Il a travaillé avec la compagnie L’Artifice en tant que comédien (Nam-Bok le
hâbleur, Aucassin et Nicolette) ou dramaturge (Lettres d’amour de 0 à 10,
Molière du spectacle jeune public 2005) et est auteur de textes pour le
théâtre : Boule de gomme, Le Défilé de César, Une divine tragédie (co-écrit
avec Sacha Wolff). Comme cinéaste il a écrit et réalisé plusieurs courts-
métrages dont Jeunesses françaises en 2011, Panthéon Discount en 2016
et Finale en 2020. Il est également chargé de cours à l’Université
Bourgogne-Franche-Comté et à Paris VIII. Lauréat 2021 de la Fondation Gan
pour le cinéma, Vincent doit mourir est son premier long-métrage.

Filmographie
2020 – FINALE 2015 – FIN DE CAMPAGNE
Sélectionné au festival International de Clermont- Sélection au Festival Côté court (Pantin)
Ferrand, Prix du Jury à Off-Courts (Trouville),
Prix du public au Festival Côté Court (Pantin), 2014 – SERVICE COMPRIS
Prix spécial du jury (Brussels Short Film Festival). Prix de la meilleure interprétation masculine
au festival d’Aubagne
2016 – PANTHÉON DISCOUNT
Prix du public et prix de la jeunesse au festival 2011 – JEUNESSES FRANÇAISES
International de Clermont-Ferrand, Prix spécial Sélectionné à la Berlinale 2012, primé aux
du Jury et prix du public du Festival Itinérances festivals Côté Court (Pantin), Un festival, c’est trop
(Alès), Prix du public du Festival du film européen

© Stef Bloch
court (Nice), Festival européen du court métrage
de Brest, pré-sélection au César 2018 du meilleur (Lille), Prix de qualité CNC, Pré-sélectionné au
court-métrage. César 2013 du meilleur court-métrage.

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Entretien avec Mathieu Naert la pub, il est complètement inconsé- Vincent est victime de tous types
Scénariste quent et immature. Son parcours va le de persécutions. Aux agressions
révéler et le sortir, paradoxalement, de s’ajoute son isolement social…
sa médiocrité. C’est avant tout la satire
d’une génération, urbaine et travaillant Ça le rend d’autant plus attachant.
Comment vous est venue l’idée le scénario aux résidences Sofilm dans le secteur tertiaire, qui ne sait rien L’une des rares choses que j’ai retenu
de Vincent doit Mourir ? de genre avec le soutien de Nicolas faire de ses mains. de mon école de cinéma, c’est ce qu’un
Peufaillit. J’ai compris alors que je vou- professeur de scénario m’a dit : « Pour
Cette idée, ou plutôt cette névrose, était lais traiter de la phobie de l’intimité, tout Vincent est pris dans un engre- s’attacher à un personnage, il faut qu’il
liée à mon état d’esprit de l’époque où était plus évident. nage qui ne cesse de croître. ait un maximum de problèmes. » Plus
je me disais : « Et si, à n’importe quel Comment avez-vous travaillé la le personnage a des difficultés, plus
moment, quelqu’un devenait fou et structure ? tu t’y attaches, c’est humain. Dans le
voulait me tuer sans raison ? » Cette « Je voulais traiter cas de Vincent, je souhaitais un per-
pensée a germé jusqu’à ce que j’abou- Ce qui m’intéressait, c’était de faire se sonnage détestable au départ qui
tisse à un scénario, celui d’un type qui
de la phobie de développer le phénomène progressive- devient par la suite sympathique. Tout
se sent persécuté, il se méfie de tout l’intimité » ment. Il démarre doucement puis petit le monde se fiche d’un personnage
le monde et pense qu’on va le tuer. à petit se répand. Au début, c’est un parfait qui devient encore plus parfait,
C’était un postulat loufoque semblable stagiaire du bureau, ensuite un autre alors qu’un anti-héros qui finit en héros
à celui des mort-vivants de Romero. Le film mélange des couches type au travail, puis de plus en plus devient très attachant... D’où l’impor-
Ensuite, le personnage est arrivé. Un différentes venant de plusieurs de gens. Vincent se met à soupçonner tance de l’histoire d’amour car elle per-
homme lambda, un urbain qui n’a pas genres, avec plusieurs tonalités. tout le monde, une névrose commence met la rédemption d’un homme et sa
l’habitude de se battre, qui n’est pas à s’étendre comme une maladie. C’est redécouverte de lui-même. Il se recon-
spécialement sportif. Comment réagi- Mes histoires sont très sombres, un peu comme dans The Truman necte à ce qui est important et reprend
rait-il à cette situation ? Qu’est ce qui violentes, sexuelles, adultes, et en Show, il y a lui et le reste du monde. possession de son corps. Lui qui vivait
se passerait dans sa tête ? Je voulais même temps j’y mets un certain J’ai voulu qu’on reste focalisé sur le dans un monde virtuel, dans la ville,
que ce soit sombre mais que Vincent humour noir. Dans le scénario, Vincent personnage et qu’on puisse toujours se dans le monde de la pub, se recon-
sorte de sa petite vie pour se décou- est d’abord quelqu’un d’assez détes- demander si tout cela n’est finalement necte à plein de choses, dont l’amour.
vrir autrement. J’ai ensuite développé table. C’est un anti-héros : il bosse dans pas que dans sa tête.
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nous sommes devenus des individus La première c’est John Carpenter, Mathieu Naert
déconnectés les uns des autres. Tout c’est grâce à lui que je suis venu au Biographie
le monde est une menace car on ne se cinéma. Si je n’avais pas regardé
« C’est avant tout la satire fait plus confiance. Certains diront aussi L’Antre de la folie et The Thing à Né à Paris, Mathieu Naert est réalisateur,
que ça parle de l’insécurité. Donc fina- 14 ans, je ne serais pas là. Ça a scénariste et comédien. En 2006, après
d’une génération, urbaine et lement, non, le film n’est pas en rapport été un choc. J’aime tellement son un passage par l’ESRA, il réalise son
premier court métrage. La même année
travaillant dans le secteur avec la pandémie, mais elle a rendu le cinéma que je n’ai pas beaucoup de il est un des lauréat du concours Sopadin
scénario encore plus pertinent. recul dessus. ça infuse forcément junior pour son premier scénario de long
tertiaire » dans mon travail. Il y a aussi évi- métrage. Entre 2013 et 2018, il réalise
Il est aussi question de la violence demment George Romero, c’est lui plusieurs courts-métrages qui explorent
sociale… qui a inventé ce genre. Buñuel m’a le drame, le thriller et le fantastique.
En 2018 le scénario de Vincent doit mourir
aussi beaucoup influencé par cette
est un des lauréats des résidences Sofilm
En voyant le film, on pense forcé- À l’époque où je l’ai écrit, ce n’était pas manière qu’il a d’utiliser le fantas- de genre. Il a depuis écrit Lionel meurt à la
ment à la période Covid, est-ce du tout volontaire. C’était une idée vis- tique de manière très subtile. Dans fin, sorte de suite spirituelle et thématique
quelque chose qui a influencé cérale, instinctive, pas intellectuelle. L’Ange exterminateur le postulat fan- de Vincent doit mourir, et a réalisé
l’écriture? Pour moi, ce n’est pas une histoire tastique est quasiment invisible. Il y Submersibles, un court sur le thème d’une
d’« ensauvagement » de la société, c’est a juste une petite dissonance qui est histoire d’amour folle et perverse, qui
commence son parcours en festivals.
Le scénario a été écrit avant la pandé- plus profond que ça. Ça parle peut-être d’autant plus perturbante qu’on se dit
mie ! Mais la sensation d’isolement ne plutôt de solitude. La solitude te fait que ça pourrait nous arriver. L’idée
date pas d’hier. Je pense que le confi- devenir paranoïaque et méfiant. Tous fantastique c’est que les gens ont un
nement a juste exacerbé la manière les forcenés que l’on voit dans les faits blocage mental.
dont on vivait déjà avant ! On était déjà divers, ce sont des gens qui sont com-
tous devant nos ordinateurs chacun de plètement seuls. Notre société crée de Vincent doit mourir, mais
son côté. Chacun peut y voir ce qu’il la solitude de manière industrielle, et on pourquoi ?
veut, la souffrance du covid, la cris- en récolte les fruits.
pation politique du pays... On est de Parce qu’il doit renaître !
plus en plus seul avec nous-même, Avez-vous eu des références pour
nous n’avons confiance en personne, ce film ? Entretien réalisé en avril 2023
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Karim Leklou

Karim Leklou apparaît pour la première fois au cinéma dans Un Prophète de


Jacques Audiard en 2009. Entre 2011 et 2013, il poursuit le chemin du cinéma
d’auteur en imposant sa présence chez Bouli Lanners (Les Géants) ou Rebecca
Zlotowski (Grand Central). Son rôle principal dans Coup de chaud de Raphaël
Jacoulot (2015) marque un premier tournant, puis il retrouve Tahar Rahim (son
partenaire de jeu dans Un Prophète) pour Les Anarchistes d’Elie Wajeman
(2015), Réparer les vivants de Katell Quillévéré (2016) et Joueurs de Marie
Monge (2017).
En 2018, la carrière de Karim Leklou se confirme avec Le Monde est à toi de
Romain Gavras, rôle pour lequel il est nommé au César du Meilleur Espoir
masculin. Il est la même année l’un des protagonistes de la série Hippocrate
de Thomas Lilti. Depuis 2020, Karim Leklou poursuit dans le cinéma d'auteur,
récemment Un Monde de Laura Wandel ou Goutte d'or de Clément Cogitore,
tout en se diversifiant avec des rôles plus physiques comme La Troisième
Guerre de Giovanni Aloi et Bac Nord de Cédric Jimenez. Son rôle dans Vincent
doit mourir se situe à la lisière de ces deux mondes.

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Vimala Pons
Artiste de cirque et actrice, Vimala Pons entame des études d'Histoire de l'Art,
puis d'Histoire du Cinéma avant d'intégrer la Classe Libre du Cours Florent
et d'enchaîner sur des formations au Conservatoire National Supérieur d'Art
Dramatique de Paris au Centre National des Arts du Cirque. Depuis 2013, elle
évolue devant la caméra d'une nouvelle génération de cinéastes indépendants
(Antonin Peretjatko, Bertrand Mandico, Thomas Salvador, Lucie Borleteau,
Sébastien Betbeder) et de figures de proue du cinéma d'auteur (Philippe
Garrel, Jacques Rivette, Alain Resnais, Paul Verhoeven, Christophe Honoré).
Parallèlement, Vimala Pons met en scène des spectacles performatifs de cirque
avec la collaboration de Tsirihaka Harrivel notamment GRANDE en 2017 et
Le Périmètre de Denver en 2022 dont découlent les projets musicaux Victoire
Chose (Murailles Music / Teenage Menopause Records) et Eusapia Klane
(Wariorecords / Kythibong). Elle confirme son appétence pour le cinéma de
genre et les univers singuliers en interprétant Margaux dans Vincent doit mourir.

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FICHE ARTISTIQUE
Vincent..................................Karim Leklou
Margaux.................................Vimala Pons
Le Père............................François Chattot
Joachim...............................Michaël Perez
Yves.................................Emmanuel Vérité
Le Facteur.................Guillaume Bursztyn
Le Policier.........................Benoit Lambert
Le DRH........................Jean-Rémy Chaize
Motard 1.................................Maurin Olles
Motard 2................Jean-Christophe Folly

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FICHE TECHNIQUE Producteurs.................................Thierry Lounas,
Claire Bonnefoy
Réalisation................................Stéphan Castang Production.............................................Capricci,
Scénario.........................................Mathieu Naert Bobi Lux
Adaptation et dialogues..............Mathieu Naert, Coproduction.....................Arte France Cinéma,
Dominique Baumard, Gapbusters
Stéphan Castang En association avec..........................Goodfellas,
Photographie............................Manuel Dacosse Avec la participation de..........................Canal +,
Musique.............................................John Kaced Ciné +
Son....................................................Dirk Bombey Avec l’aide de..........CNC - Avance sur recettes,
Émilie Mauguet, Eurimages,
Xavier Thieulin Centre du cinéma et de l’audiovisuel
Montage.........................................Méloé Poillevé de la fédération Wallonie Bruxelles
Costumes.................................Charlotte Richard Avec le soutien de.......................Fondation Gan
Maquillage...............................................Pia Quin, pour le cinéma,
José Luis Blasco Cofinova 19,
Décors.................................Samuel Charbonnot, Région Auvergne-Rhône-Alpes,
Aurore Benoit, Région Pays-de-la-Loire,
Lucie Poichot Procirep-Angoa
Régleur cascades............................Manu Lanzi Ventes internationales.......................Goodfellas

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