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Arnaque à L ADN celte Enquêtes en

Bretagne 24 1st Edition Alex Nicol


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Présentation

Un pirate informatique sévit dans le Pays Bigouden et rançonne


ses victimes impunément. La gendarmerie de Pont-l’Abbé s’efforce
de traquer ce malfaiteur mais l’enquête piétine. Jusqu’au jour où
celui-ci commet l’erreur de pirater le compte en banque de Soazic
Rosmadec.
Gwenn, son mari, et Jeannot, informaticien et ancien de la DGSE,
vont traquer sans relâche le cybercriminel avec leurs moyens. Leurs
investigations vont les mener des côtes de Bretagne jusqu’aux
vallées verdoyantes du sud de l’Irlande.
Le hacker qui se croyait si malin n’aurait jamais dû s’en prendre
aux Rosmadec !
Comme beaucoup de Bretons, Alex Nicol a longtemps été un «
expatrié ». La Bretagne, de ce fait, était un lieu magique, un
fantasme d’autant plus rêvé qu’elle était difficile à atteindre. Et
lorsqu’à quarante-cinq ans il a enfin pu poser son ancre sur la terre
de ses ancêtres, il a mesuré à quel point vivre sur cette terre était un
grand bonheur.
Après une carrière de chef d’établissements scolaires aux quatre
coins du globe, il a envisagé de créer un cabinet d’écrivain public.
Puis très rapidement l’idée d’écrire des romans s’est imposée. Il crée
le personnage de Gwenn Rosmadec, Breton expatrié qui revient sur
ses terres et va les célébrer. Profondément épris de son pays, de sa
culture et de ses traditions, Gwenn Rosmadec, la quarantaine, roux,
d’allure sportive, est Bigouden de cœur, et Quimpérois de racines.
Ancien journaliste, il aspire à la paix, et pose ses valises à Sainte-
Marine, petit port cornouaillais niché entre la forêt et l’Atlantique, en
bordure de l’Odet. Il y développe une activité d’écrivain public...
Alex Nicol a coutume de dire que le premier héros de ses romans
c’est la Bretagne. La Bretagne et sa grande beauté, qui accompagne
chacune des enquêtes de Gwenn Rosmadec et emporte le lecteur
dans un parcours vivifiant, au son des cornemuses et du bruit du
ressac.
Et le résultat final, c’est un chant d’amour de la Bretagne partagé
par beaucoup de ses lecteurs.
ARNAQUE
À L'ADN CELTE

Alex NICOL

38, RUE DU POLAR


LES ÉDITIONS DU 38
À ma délicieuse éditrice Anita, pour sa patience, sa gentillesse et
son sens de l’écoute

À Anne-Eléonor qui m’a réalisé des couvertures magnifiques

À Christian, fidèle lecteur, qui m’a initié aux mystères de la


distillation du cidre

À Christian M. et D. O’Callaghan pour leur aide précieuse sur


l’Irlande
Chapitre 1

Hélène et François avaient chargé leur vieille voiture et quitté tôt la


banlieue parisienne pour prendre la route des Vosges. Ils avaient
économisé longtemps pour s’offrir une semaine dans un beau chalet
à la montagne. Certes, il avait fallu faire des efforts, mais en
cherchant bien sur le Net, elle avait déniché une annonce d’un
propriétaire qui proposait son bâtiment à la location à un tarif
inférieur à ce que cela leur aurait coûté s’ils étaient passés par une
agence. Plus de mille euros quand même. Elle avait également visité
les sites d’Emmaüs et d’autres et avait déniché des vêtements
chauds d’occasion, dont deux parkas qui tenaient encore la route,
des gants, et des bonnets.
Ni lui ni elle ne savaient skier et ce n’était pas leur but. Ils allaient
plutôt faire des promenades en raquettes et si leur budget le leur
permettait, des balades en traîneaux à chiens.
Le ciel d’un bleu azur leur promettait une semaine de bien-être
pendant laquelle ils espéraient se ressourcer et emmagasiner cette
énergie positive qui les aiderait à aller de l’avant. La neige avait
d’ailleurs fait son apparition en bordure de la route et les rayons du
soleil captaient les milliards de cristaux de glace en un étonnant feu
d’artifice argenté.
Hélène se sentait bien. Le plaisir de cette semaine commençait
maintenant. À l’horizon, les montagnes vosgiennes arboraient leurs
ballons blancs, parfois couverts d’une crête de sapins.
François regarda le GPS :
— Nous n’allons pas tarder à arriver. Rappelle-moi l’adresse de la
boucherie où nous devons récupérer les clés.
Hélène fouilla dans son sac pour en tirer un calepin sur lequel elle
notait tout. Et donna l’information à son mari.
— Parfait.
La route commença à grimper progressivement et s’enfonça dans
la forêt avant de gagner un plateau neigeux désertique.
— Là-bas ! Regarde ! fit Hélène enthousiaste. Le village !
Des constructions en bois ou en pierre s’agglutinaient autour d’une
vieille église dans un coin de vallon. François ralentit pour repérer
les lieux. Le village était assez sommaire et très rapidement, ils
repérèrent sur la place centrale la boucherie recherchée. François
gara sa voiture et tous deux se rendirent gaillardement vers le petit
commerce. Leur attention fut attirée par un attroupement devant la
vitrine. Des gens parlaient haut et fort, visiblement en colère. Une
camionnette de gendarmerie était stationnée devant eux, le
gyrophare en marche qui projetait ses éclats bleus sur le sol de
neige. Ils s’approchèrent doucement, se faufilèrent dans la foule
pour rentrer dans la boucherie.
À l’intérieur, le commerçant, habillé de son tablier blanc maculé de
taches de sang les accueillit avec le sourire :
— Monsieur-dame, que puis-je pour vous ?
Hélène s’approcha en souriant :
— Nous venons prendre les clés d’un chalet que nous avons loué.
Le visage du boucher se figea en une moue catastrophée.
Finalement, il désigna le groupe vitupérant à l’extérieur :
— Vous voyez ces gens ? Ils sont, eux aussi, venus chercher des
clés pour un chalet qui n’existe pas. Je suis désolé, mais vous aussi
vous vous êtes fait arnaquer !
*

Félix ouvrit sa messagerie. Un message urgent de sa banque


attira son attention :

Votre compte a été verrouillé du fait de transactions suspectes.


Vous trouverez ci-dessous les prélèvements pour achats divers que
nous avons relevés. Merci de contester cette transaction si vous ne
l’avez pas autorisée. Pour obtenir des réponses immédiates, merci
de consulter notre centre « AIDE » au bas de cette page.

Félix reconnut l’adresse et le logo de sa banque ainsi qu’une liste


d’achats en dollars américains effectués par un certain Richard
Gerald de New York. Il s’agissait de T-shirts et de chaussures de
sport. Le montant n’était pas très élevé, mais il importait de réagir
puisque Félix n’était pour rien dans ces achats. Résolument, il cliqua
sur le lien « AIDE » et une nouvelle fenêtre s’ouvrit sur un
questionnaire :

Il importe que nous puissions vérifier si vous êtes bien le client de


cette banque. Merci de répondre aux questions suivantes :

S’ensuivaient des demandes d’information sur son état civil, son


adresse et son numéro de compte. Il entra les données et les valida.
Une dernière fenêtre s’ouvrit :

Merci de ces informations. Afin de finaliser notre contrôle, merci


d’indiquer votre numéro de carte bancaire et votre code pour que
nous puissions le comparer avec celui en notre possession.
— Logique ! songea Félix, qui remplit rapidement les cases sur
l’écran.
La fenêtre se referma sur un grand MERCI. Félix abandonna ce
souci pour se consacrer à ses autres courriels. Un quart d’heure plus
tard, il pensa à retourner sur le site de sa banque pour s’assurer du
suivi de sa demande. À son immense stupéfaction, son compte, qu’il
s’assurait de conserver toujours créditeur, avait été vidé. Il ne restait
rien, absolument rien. Paniqué, il alla voir son Livret A et là, même
constat : le solde était de 10 euros, montant minimum obligatoire
pour maintenir un compte ouvert.
— Une arnaque ! C’était une arnaque !

Océane regarda sa robe de mariée. Elle ressentait du plaisir en se


remémorant la journée magnifique qui s’associait à cet habit blanc et
aussi cette amertume qui ne l’avait pas quittée depuis qu’elle avait
dû divorcer à la hâte d’un pervers narcissique.
Il était temps de tourner la page et de regarder vers l’avenir. Cela
passait par l’abandon de cette robe qui lui rapporterait un peu
d’argent vu que ses finances étaient plutôt maigres, son ex l’ayant
abandonnée sur le quai d’une gare sans un sou. Et en même temps,
cela pouvait rendre une future mariée heureuse.
Elle avait mis la robe en vente sur un site de petites annonces et
la réaction fut somme toute assez rapide. Un carillon caractéristique
de son portable lui signala l’arrivée d’un message :

Bonjour, je suis intéressée par votre annonce et pour les


modalités, je tiens à vous informer que je suis pour un envoi, car je
suis en déplacement en Suisse. Je compte vous régler par PayPal.
Je prends à ma charge les frais de port pour lesquels je vous rajoute
25 €. J’opte pour un envoi en COLISSIMO.

D’accord. Je prépare le colis et l’emmène à la poste. Dois-je


l’envoyer en Suisse ?

Non, l’adresse est à Nanterre, rue René Laennec dans un point


relais. Merci de compléter le document joint pour que je fasse le
paiement.

Océane jeta un œil à la pièce jointe : nom, prénom, adresse mail


PayPal, numéro de téléphone, prix ferme de l’article, ville, code
postal. Apparemment, tout semblait fonctionner. Elle compléta le
document et l’expédia. Un message lui parvint en retour :

Merci. Je m’occupe du transfert d’argent. Vérifiez dans votre boîte


mail, et s’il n’y a rien, dans la boîte de spams.

Océane était aux anges. L’affaire avait été rondement menée. Elle
n’avait pas eu besoin de marchander et au final, même les frais de
port avaient été pris en charge. Il ne restait plus qu’à formaliser la
vente. Elle ouvrit sa messagerie. Un mail en provenance du site
bancaire s’ouvrit sur un clic de souris :

La somme de 935 € a bien été transférée sur votre compte. Elle


est bloquée en attendant que vous communiquiez les références
postales de l’envoi.

— Parfait ! songea-t-elle.
Elle enveloppa soigneusement sa robe dans un grand morceau de
plastique, la déposa dans un carton, mit l’adresse dessus et se
rendit au bureau de poste le plus proche. Le colis rejoignit un tas
d’autres cartons destinés à l’expédition tandis qu’elle glissait
soigneusement le reçu avec le numéro d’envoi dans son sac.
Dès qu’elle fut chez elle, elle scanna le document et l’expédia en
pièce jointe à l’adresse demandée.
— Et voilà ! Il n’y a plus qu’à attendre. Ça devrait se faire assez
rapidement.
Elle abandonna l’ordinateur pour se consacrer à d’autres tâches.
Mais une heure plus tard, elle retourna jeter un œil à l’écran. Celui-ci
n’avait pas changé.
— Bon, se dit-elle fataliste, peut-être qu’il leur faut plus de temps.
Deux heures plus tard, elle faisait le même constat.
— Curieux. Ça devrait être réglé.
Une once d’inquiétude traversa son esprit et elle envoya un
message à l’acheteuse.

Toutes les démarches ont été faites de mon côté, mais le


paiement ne se débloque pas. Pourriez-vous intervenir ?

La réponse lui parvint quasi instantanément :

Rassurez-vous, ils sont très prudents et préfèrent s’assurer que le


colis est bien arrivé à destination. Comptez entre 24 et 48 heures
avant que l’argent ne soit disponible.

Océane se le tint pour dit. Au fond, c’était logique. Il suffisait


d’attendre.
Le lendemain, elle jeta un coup d’œil à la messagerie, mais il n’y
avait rien de nouveau. Le surlendemain, pareil. Grâce au numéro
d’envoi, elle vérifia le suivi du colis et constata qu’il avait bien été
remis à son destinataire. C’était étrange. Elle s’assura dans sa boîte
d’envoi que la pièce jointe avait bien été transmise et là non plus il
n’y avait pas de problème. Un début d’angoisse commença à
poindre au fond de son cœur. À tout hasard, elle se rendit sur son
compte PayPal et demanda de l’aide via le chat. Une fois mise en
relation avec une correspondante, elle expliqua son cas. On lui
demanda alors de transférer le mail qu’elle avait reçu selon lequel
les fonds étaient bloqués. Elle dut patienter un peu pour connaître la
suite qui lui fit l’effet d’une douche froide.

Ce site n’appartient pas à PayPal ; ils en utilisent les codes visuels


pour se faire passer pour nous. Nous ne bloquons jamais des fonds
transférés. Vous devriez porter plainte. Vous avez été victime d’une
arnaque !

Édouard ouvrit sa boîte aux lettres et y trouva ce qu’il attendait :


un petit paquet adressé à son nom sans aucune autre marque
distinctive. Mais lui savait ce que c’était. Il se précipita dans sa
chambre pour ouvrir ce précieux colis. Dans une boîte blanche
hermétique, un dispositif électronique attendait qu’on fasse appel à
ses services. Sa libido monta d’un cran. Il avait enfin reçu sa cage
de chasteté connectée.
Il résista au désir de glisser son pénis dans le tuyau prévu et prit le
temps de lire le mode d’emploi.
— Bon, télécharger l’application grâce au QR code… Fait !
Positionner le pénis dans le logement prévu et passer ensuite les
deux anneaux sous les testicules… Fait ! Connecter la cage à
l’application et verrouiller le dispositif… Fait !
Édouard constata que la cage tenait fermement et alla se regarder
dans le grand miroir de la salle de bains qui jouxtait sa chambre. La
vision de son sexe emprisonné lui provoqua une bouffée de plaisir
non dissimulé. Il continua de parcourir les informations imprimées
dans le mode d’emploi :

Sa finition permet de se doucher avec et de l’immerger dans l’eau


jusqu’à 1 m de profondeur pendant 30 minutes. La Cage de
Chasteté Connectée est adaptée pour les pénis jusqu’à 9,6 cm de
long au repos.
Impossible de tricher ou de s’échapper avec cette cage de
chasteté connectée ! Une fois mise en place, il n’y a aucun moyen
de l’ouvrir sans passer par l’application qui se connecte via
Bluetooth. Un système de géolocalisation est également présent
pour connaître précisément la position du porteur de la cage à tout
moment.
Sa batterie impressionnante peut fonctionner de 8 jusqu’à
12 mois !

Le son d’un grelot l’informa qu’un message venait d’arriver sur son
portable. Nonchalamment, il l’ouvrit du bout du doigt pour le faire
apparaître. La lecture lui causa un choc majeur. C’était bref et
concis :

Ton pénis m’appartient. Pour déverrouiller, tu me transfères 750 €


en bitcoins !
Édouard se saisit de l’appareil pour tenter de le déverrouiller, mais
sans succès. Il essaya de retirer les anneaux, mais ne réussit qu’à
se faire mal. Il éteignit et ralluma son portable, revint sur l’application
dédiée, mais celle-ci restait muette. Il se rendit tout nu, la cage
pendante, dans le garage pour y trouver une pince et tenta de
sectionner les anneaux. Sans succès ! Il n’y avait plus rien à faire ! Il
se mit à hurler, de colère, de rage, de désespoir. Des larmes
coulèrent le long de sa joue. Désespéré, il répondit au hacker :

Comment dois-je procéder ?


Chapitre 2

Gwenn Rosmadec terminait de rédiger le rapport que lui avait


commandé un client. Depuis qu’il avait installé son cabinet d’écrivain
public dans le charmant petit village finistérien en bord de mer de
Sainte Marine, les demandes affluaient. Il n’avait pas eu besoin de
faire de la publicité, le bouche-à-oreille avait suffi.
Satisfait, il enfonça magistralement la touche Entrée pour valider
l’enregistrement et se cala dans son siège de bureau en regardant
les icônes s’animer sur son écran. Puis il quitta les lieux et se servit
une rasade d’Eddu, le whisky breton au blé noir qu’il affectionnait
tant, dans son verre Glencairn, pour ensuite rejoindre son épouse
Soazic qui semblait très affairée devant son Smartphone :
— Alors ? fit-il jovial. Quelles sont les nouvelles ?
Soazic leva la tête et fit onduler la longue chevelure noire qui lui
tombait au creux des reins :
— Figure-toi que je viens de recevoir le rapport que j’avais
commandé sur mon analyse d’ADN.
— Et ils t’ont trouvé des ancêtres javanais et une arrière-grand-
tante new-yorkaise ? répondit-il en rigolant.
— Béotien ! tu ferais mieux d’essayer avant de te moquer. Tu
trouverais certainement des surprises dans ta lignée celte !
Gwenn reposa son verre vide sur le bar de la cuisine.
— D’accord, je m’excuse. Maintenant, dis-moi tout ! Je suis
curieux de savoir si tu es bien celle que j’ai épousée.
Soazic fit défiler l’écran et commenta les statistiques qui y étaient
affichées :
— D’après eux, j’ai 41 % d’origine celte, 28 % anglaise, 19 %
italienne, 9 % scandinave et 3 % balte.
— Celte et anglaise, d’accord. Je suppose que derrière le mot
celte, ils font référence à la Bretagne ?
— Oui avec l’Écosse, l’Irlande et le pays de Galles.
Gwenn poursuivit :
— Là où ça devient curieux, c’est italien à 19 %. Tu savais qu’il y
avait une branche italienne dans ta famille ? se demanda Gwenn.
— Non pas du tout. Mais c’est peut-être un marin vénitien ou
romain qui s’est posé en terre bretonne ?
— C’est plausible, fit le grand roux. Mais scandinave et balte, là
c’est plus étrange.
Soazic se mit à réfléchir :
— Les Scandinaves, ce sont les Vikings qui ont conquis
l’Angleterre. On peut penser que des échanges ont eu lieu à cette
époque !
— Connaissant les Vikings, je dirais plutôt des viols comme ils les
ont pratiqués quand leurs drakkars remontaient la rivière de Pont-
l’Abbé ou l’Odet. Qu’est-ce qu’il t’apprend d’autre ce test ?
Soazic chargea une autre page :
— Ils proposent une liste de personnes avec lesquelles je partage
des segments d’ADN. Intéressant ! Il y a même un lien pour les
contacter.
— Et tu vas le faire ? demanda Gwenn, sourcilleux.
— Peut-être ! Je vais d’abord sélectionner ceux qui me sont plus
proches géographiquement et ensuite je verrai !

*
Installées dans un vieil appartement du centre de Quimper, les
deux sœurs s’activaient devant leurs ordinateurs respectifs avec
l’agilité d’un singe affamé qui se balance sur une liane pour aller
chercher une banane. L’intérêt du lieu c’était sa discrétion : entouré
de magasins où se croisaient des inconnus toute la journée, le
quartier se vidait de ses résidents le soir. C’était donc sans souci
que les sœurs s’adonnaient à leur passe-temps favori : hacker les
particuliers pour leur soutirer de l’argent facilement.
C’est au collège que cette passion avait commencé. D’abord par
l’efficacité d’un professeur de technologie qui les avait initiées aux
bases du codage informatique. Puis, comme Zizi n’était pas très
portée sur l’effort et ses notes, pas très brillantes, elle avait réussi à
pirater le serveur du collège pour les modifier. Certes, elle avait été
assez fine pour ne pas faire passer ses résultats de six à dix-huit sur
vingt de moyenne. Elle s’était contentée d’un dix ou douze. Mais
c’était suffisant pour arborer un bulletin à peu près convenable.
Ensuite, avec le temps et l’expérience, elles avaient poussé le
bouchon un peu plus loin. Au départ, ce n’était qu’un jeu, des
arnaques faciles et vite réalisées. D’autant que les sommes
demandées restaient raisonnables et les victimes préféraient céder
plutôt que s’engager dans une procédure de justice longue et
difficile.
Avec le temps, une sorte de compétition s’instaura entre elles, à
savoir qui réussirait la plus belle arnaque. Résultat : les enchères
montèrent jusqu’au moment où il s’avéra nécessaire de passer à la
vitesse supérieure. D’autant que leurs petits virus ne faisaient plus le
poids face aux murs de protection des ordinateurs.
Un voyage dans les arcanes du Darknet les mit en relation avec
un hacker de haut vol. Le deal était simple : ce dernier mettait à leur
disposition des virus puissants et indétectables, qu’il mettait
régulièrement à jour, avec lesquels elles pouvaient passer à l’action.
Puis il récupérait la rançon en bitcoins qu’il faisait transiter par divers
canaux vers un compte aux Bahamas, en Suisse ou d’autres lieux
exotiques, en se servant au passage. Elles n’avaient jamais su
comment s’appelait ce contact qui s’identifiait sous le pseudo
l’Intermédiaire. Et elles ignoraient totalement d’où l’Intermédiaire
agissait. Mais au final, elles s’étaient constitué grâce à lui un joli
magot et comptaient bien poursuivre la manœuvre.
Au lycée, à l’époque où elles étudiaient encore, on les avait
surnommées les Gnomes et ce surnom leur était resté. Elles
semblaient toutes les deux être passées entre les mâchoires d’un
étau géant qui les aurait rendues aussi hautes que larges : 1,50 m.
Leurs poitrines laissaient tomber une paire de seins flasques qui
n’avaient jamais allaité, alors que leur abdomen s’élargissait en un
énorme tonneau posé sur une paire de petites pattes. Conscientes
de leur difformité, elles l’avaient accentuée avec des attributs
gothiques. Les naseaux de l’une étaient transpercés d’un anneau
métallique tandis que l’autre avait rasé son crâne, ne laissant qu’une
crête teintée de rouge, à la Huronne. Tout leur corps était couvert de
tatouages, aussi hideux et malfaisants que leur titulaire, allant
jusqu’à se faire dessiner sur une fesse une croix gammée, sans
qu’elles connaissent vraiment la signification de ce logo sinon qu’il
suscitait du dégoût de la part des honnêtes gens.
— Tu as fini ?
— Oui, fit la Huronne. L’Intermédiaire a réceptionné le colis et l’a
expédié en Afrique.
— OK. Moi j’ai fait virer les bitcoins et libéré l’abruti !
— Sous quel pseudo le virement ?
— Comme d’habitude : Big Muzy.
Zizi éteignit son ordinateur :
— Voilà une affaire sacrément facile. Et maintenant, les bitcoins
sont à l’abri au chaud !
— Avoue que le coup du chalet l’hiver dernier, c’était génial !
répliqua Mumu.
Zizi remonta ses lunettes qui tendaient à glisser sur son nez porcin
et se mit à rire :
— Cinq mille euros récoltés avec des gogos, j’avoue être assez
fière de toi.
— Quel est le prochain coup ? demanda Mumu.
Zizi la regarda avec un air mystérieux :
— On va taper au portefeuille d’une châtelaine.
— OK. Je finalise la gestion de la robe de mariée et je te rejoins.
Ça m’intéresse.

Depuis un an, les internautes goûtaient avec plaisir les messages


et les images que Flora de Kervarec, propriétaire du manoir du
même nom, publiait sur les réseaux sociaux. C’était pour elle le
meilleur moyen de rester en relation avec les visiteurs, dont certains
venaient du bout du monde. Elle partageait ainsi sa passion pour
son jardin à la française, les rosiers, les buis taillés, les arbres plus
que centenaires. Au fil du temps, elle avait attiré dans son sillage
plus de trente mille abonnés. Flora était heureuse du résultat qui lui
avait permis de se plonger dans les arcanes de l’informatique.
Ce soir-là, elle s’installa dans son bureau et engagea la
conversation avec le responsable du serveur pour demander une
certification de l’adresse de leur compte. Mal lui en prit : un hacker
mit la main dessus, changea le nom du compte, le mail associé et le
numéro de téléphone, interdisant la récupération du compte. Puis via
une autre messagerie, le pirate la contacta pour lui demander de
verser dix mille euros en bitcoins, faute de quoi, elle perdrait tous
ses abonnés.
Flora appela immédiatement la gendarmerie de Pont-l’Abbé.
Visiblement, elle n’était pas la première à s’être fait gruger. Les
gendarmes du Net étaient en chasse pour remonter la piste, mais on
lui avait fait comprendre que ce serait long.

— Alors ?
— C’est fait ! La châtelaine a raqué ! fit Zizi.
— Vire ça vite fait, ma cocotte ! répondit sa sœur.
Zizi pianota sur son ordi, l’écran se couvrit de chiffres puis d’une
jauge qui indiquait le transfert.
— C’est fait ! lança-t-elle joyeuse.
— Il se prend toujours 25 % l’Intermédiaire ? demanda Mumu.
— Comme d’habitude ! fit Zizi fataliste. Mais c’est le prix à payer
pour rester invisibles.
Mumu se leva, roula sa carcasse vers un petit tabouret et alluma
un chandelier à sept branches. Sa sœur ne put s’empêcher de
réagir :
— C’est fini ces bêtises ? Tu as peur que le rabbin vienne te voir ?
— Je n’ai pas peur de lui. Mais après tout, on ne sait jamais…
— Au fait Mumu, tu as reçu tes résultats d’analyse ADN ?
La Huronne s’installa sur le petit bureau qui lui était dévolu,
ralluma son ordinateur et sélectionna sa messagerie.
— Attends ! Je regarde… Oui ! Il y a un message !
Zizi lui jeta un œil rigolard :
— Alors ? On est ashkénazes ou sépharades ?
Mumu resta silencieuse. Son visage venait de blêmir. Zizi s’en
rendit compte et redevint sérieuse.
— Qu’est-ce qui se passe ? fit-elle.
Mumu prit le temps de respirer profondément tant l’information lui
paraissait incompréhensible. Finalement, elle lâcha :
— Nous sommes d’origine anglaise et irlandaise !
— Quoi ! Ce n’est pas possible ! Il doit y avoir une erreur. Et ils
donnent d’autres informations ?
Mumu fit défiler l’écran :
— Oui, nous sommes de la même famille qu’une certaine Soazic
Rosmadec !
— Oh oh ! murmura Zizi. Une bourge ! Il n’y a qu’une bourge pour
se payer un test ADN. On va la pister celle-là ! Je sens qu’on va se
faire du pognon facile !
Chapitre 3

Soazic parcourait rapidement les titres des mails qui venaient


d’arriver sur son ordinateur portable. Elle supprima automatiquement
toutes les publicités, repéra les noms connus pour lire le contenu
puis s’attarda à ce qui restait. Un mail en provenance d’une certaine
Muriel. Elle avait beau se creuser la tête, elle ne parvenait pas à
mettre un visage sur ce nom. Finalement, elle ouvrit le message :

Madame Rosmadec, bonjour, vous êtes apparue comme un


membre de mon arbre généalogique suite à une analyse ADN. Je
serais heureuse de converser avec vous, car je me pose moi-même
des questions sur mes origines.
Bien à vous,
Mumu

Une pièce jointe de type JPG indiquait la présence d’une photo.


Soazic l’ouvrit sur une magnifique blonde souriante et avenante à
souhait. Gwenn ne put s’empêcher de lancer un petit sifflement
d’admiration devant les formes de la correspondante.
— Ça y est ! fit Soazic. Je sais. C’est une personne qui a fait un
test auprès de la même société américaine que moi.
— C’est étonnant que nous n’ayons jamais entendu parler d’elle,
répondit son mari.
— Oui. Et c’est bien là l’avantage de ces tests. On peut remonter
la piste des membres inconnus de la famille.
— Elle est plutôt bien carrossée ta cousine !
La Bretonne se fendit d’un large sourire pour répondre :
— La classe voluptueuse, c’est le cœur de notre ADN familial,
mon cher !
Soazic était à la fois émue et surprise. Gwenn, qui connaissait
bien sa femme, lui en fit la remarque :
— Je te sens dubitative…
Soazic serra les lèvres, peut-être pour garder un peu en tête ce
qu’elle avait envie de dire. Finalement, elle déclara :
— Après tout si j’ai fait ce test, c’est aussi pour retrouver des liens
brisés dans ma famille. Alors, oui. Je vais répondre et on verra bien.
Elle cliqua sur Répondre et pianota sur le clavier :

Bonjour Mumu, je suis heureuse de découvrir un nouveau membre


de ma famille. Je suis toute disposée à partager avec vous les
informations qui éclaireront notre position au niveau de nos liens
familiaux.
Cordialement,
Soazic

— Alors ? fit Mumu à sa sœur.


— Attends… ça y est presque… ça y est ! Le virus est dans son
ordinateur. Maintenant, on laisse faire et cette nuit, quand elle
dormira du sommeil du juste, on ira voir ce qu’elle recèle comme
trésors !
Chapitre 4

Un tendre soleil d’été caressait la haie de griselinias qui bordait à


l’est la petite maison des Rosmadec. Il allait faire beau et ces rayons
du matin alimentaient la bonne humeur de Gwenn.
Il se prépara un café fort, mélange de robusta et d’arabica
savamment choisi dans une brûlerie de café de Quimper et dégusta
le breuvage chaud avec plaisir.
Son job d’écrivain public lui prenait tout son temps, mais il se
ménageait des journées de vacances, souvent à bord de son semi-
rigide, Diaoulig Ar Mor, le diablotin de la mer, et puisait dans la force
de l’océan son bonheur et son amour de la vie. Et de temps en
temps, il sortait sa cornemuse, s’installait sur une petite plage au
bord de l’Odet et sonnait des mélodies irlandaises ou écossaises
pour son plus grand plaisir et celui des voiliers de passage.
Son épouse posa sur la table sa tasse de thé et jeta un œil à ses
messages sur son Smartphone.
— Tiens ? fit-elle, en remarquant le logo de l’administration des
finances. Qu’est-ce qu’ils me veulent ?
D’un geste du pouce, elle ouvrit le message. Celui-ci était bref,
mais clair et administratif :

Vous avez fait l’objet d’un procès-verbal pour avoir commis des
infractions au Code de la route entraînant une perte de tous vos
points. Votre permis a perdu sa validité en vertu de l’article L.223-1.
Une amende forfaitaire dont vous trouverez le détail ci-dessous a été
établie.
Je vous prie d’agréer madame l’expression de ma considération
distinguée.

— Quoi ?
Le rugissement d’un tigre dans la jungle aurait fait l’effet du
jappement d’un chiot par rapport au hurlement de la Bretonne.
Gwenn tenta de calmer le jeu.
— Ce doit être une erreur. Montre-moi ce document.
Elle lui tendit son téléphone et Gwenn fit dérouler les divers
éléments. Il hocha la tête pour dire :
— Oui, c’est une erreur. D’après les lieux de l’infraction, tu es
accusée d’excès de vitesse le même jour à Marseille, à Lille, à
Toulouse, à Villefranche-de-Lauragais et à Nantes.
— Que dois-je faire ? Si je ne réagis pas, mon permis va être
annulé et la facture est salée.
— Je connais le procureur de Quimper. Je vais essayer de lui en
toucher un mot. Pour le moment, tu ne fais rien. Je l’appelle et te
tiens au courant.

Devant l’évidence, le procureur reconnut qu’effectivement Soazic


ne disposait pas du don d’ubiquité. Il assura Gwenn qu’il allait régler
l’affaire rapidement et que son épouse n’avait pas à s’en inquiéter.
Mais il le mit en garde :
— Ce n’est pas la première fois que la justice est confrontée à
cette situation. Des malandrins changent les plaques
d’immatriculation de leurs voitures après avoir récupéré les cartes
grises frauduleusement, souvent des go fast qui transportent de la
drogue entre le Maroc et diverses villes de France. Il est probable
que la plaque de votre épouse a été vendue sur le Darknet à
plusieurs chauffeurs, d’où la multiplicité des infractions en des lieux
si différents.
— Comment cela est-il possible ?
— J’ai été informé par Paris de la recrudescence de ce type
d’arnaque dans notre région. Apparemment, une bande de hackers
bien organisée fait des ravages chez les Bretons. Je vous conseille
de verrouiller vos liens Internet avec des mots de passe compliqués
à craquer et surtout de tenir à jour votre antivirus.
— Merci cher ami. J’en prends bonne note.
— Transmettez mes amitiés à votre épouse.
— Je n’y manquerai pas ! Au revoir !
Gwenn quitta le palais de justice assez heureux. Il appela Soazic
pour l’en informer, mais au son de la voix de son épouse, il sentit
qu’elle allait lui annoncer un autre problème :
— Gwenn ! C’est affreux ! Mon Livret A ! Il a été vidé ! Il n’y a plus
d’argent dessus ! Juste les 10 euros obligatoires pour ne pas fermer
le compte !
Le grand roux se remémora les paroles du procureur. Des hackers
faisaient des ravages en Bretagne…
— Soazic ! Écoute-moi. Tu éteins et tu débranches l’ordinateur. Tu
coupes ton Smartphone et si tu dois m’appeler tu vas chez les
voisins. D’accord ?
La voix tremblait au bout du fil.
— D’accord Gwenn.
Il trotta rapidement vers les quais de l’Odet où l’attendait son 4x4
noir et fila vers l’agence bancaire où il demanda à voir le directeur.
Gwenn n’était pas un inconnu ni un client lambda. Sa requête fut
immédiatement prise en compte et deux minutes plus tard, le
directeur de l’agence, un homme affable, lui ouvrait la porte de son
bureau.
— Monsieur Rosmadec… Asseyez-vous, je vous prie. Que puis-je
faire pour vous ?
Gwenn ne perdit pas de temps en salamalecs :
— Le Livret A de mon épouse a probablement été piraté et son
compte vidé. Je souhaiterais que vous interveniez au plus vite pour
rétablir la situation.
L’homme hocha la tête, compatissant. Mais en son for intérieur, il
ne put s’empêcher de se dire : encore un ! C’est le troisième
aujourd’hui ! Pianotant sur le clavier de son ordinateur, il ouvrit la
page du compte de Soazic. Gwenn Rosmadec ne lui avait pas
menti. Le Livret A était quasiment vide. Se tournant vers son hôte, il
déclara :
— Vous avez raison, monsieur Rosmadec. Je vous connais assez
bien pour vous assurer que nous allons faire tout ce qui est possible
pour rectifier cette situation. Cela dit, toutes les opérations via
Internet ne sont pas gérées ici, mais au siège social, donc cela peut
prendre un peu de temps. Néanmoins, vous pouvez rassurer votre
épouse. Les choses devraient rentrer dans l’ordre bientôt. Je m’y
engage.
— Je vous en sais gré, monsieur le directeur.
— Surtout, continua l’autre, modifiez le mot de passe dès que
possible et allez porter plainte. Vous me ferez parvenir une copie du
procès-verbal.
— Comptez sur moi !

Lyon, siège d’Interpol


Paul Jordan lisait les rapports que la police nationale française lui
avait transmis. Son rang de Cybercrime Intelligence Officer le
désignait naturellement pour traiter ce type de problèmes et la
cybercriminalité en hausse dans le monde avait mis la pression sur
le secrétaire général qui, à son tour, avait renvoyé le bébé à son
subordonné.
Ce phénomène avait explosé partout dans le monde. Rien qu’en
France, neuf entreprises sur dix en avaient été victimes. Dans la
majorité des cas, il s’agissait d’attaques par rançongiciels destinés à
obtenir de l’argent rapidement, suivies par les vols de données. Les
hackers appartenaient à tout type d’organisation : depuis les petits
artisans indépendants jusqu’aux groupes mafieux puissants qui
s’étaient aperçus de l’intérêt de ce type de fraude. Et l’un des soucis
majeurs, c’était leur identification : les gros bonnets vivaient dans les
pays de l’Est qui n’avaient pas signé la Convention de Budapest sur
la cybercriminalité.
Paul avait cependant réussi un joli coup. Il avait monté l’opération
First Light : des enquêtes menées dans trente-cinq pays avaient
permis d’effectuer plus de dix mille perquisitions, d’interpeller vingt et
un mille cinq cent quarante-neuf criminels et de saisir cent
cinquante-quatre millions de dollars de fonds illicites. Cette traque
planétaire avait permis de neutraliser EMOTET, le logiciel pirate le
plus dangereux du monde{1}. Mais la lutte continuait !
Cela faisait déjà un moment que ses limiers étaient sur la piste
d’un gang de hackers qui opérait au niveau mondial sans jamais
réussir à mettre la main sur le cerveau de la bande. Tout ce que ses
hommes étaient parvenus à découvrir, c’était la signature de cet
individu : L’Intermédiaire. Apparemment, il ne fonctionnait pas selon
une organisation structurée, mais semblait piloter une myriade de
petits sous-traitants qui œuvraient chacun de leur côté sans être en
lien les uns avec les autres.
L’Intermédiaire, contrairement aux gangs de la mafia, ne faisait
pas de gros coups. Il ciblait plutôt des proies faciles et ses rançons
restaient souvent raisonnables. Et les victimes payaient parce que
c’était la chose la plus simple à faire. Mais d’après les données
recueillies, cet escroc s’était constitué une fortune considérable.
C’était probablement sa discrétion qui l’avait longtemps placé en
dehors des radars d’Interpol. Mais la multiplication des arnaques,
toutes en lien avec son organisation, avait commencé à attirer
l’attention des polices en général et d’Interpol en particulier. C’était la
raison pour laquelle Paul Jordan avait commencé à s’intéresser
davantage à ce pirate et avait donné des instructions à son équipe
pour qu’une veille active soit mise en place.
Un jour, un de ses informaticiens avait repéré un signal en rapport
avec les arnaques de l’Intermédiaire. Il avait remonté la trace, repéré
les liens et ciblé le nid des pirates à Anvers. Paul avait
immédiatement informé la police belge qui avait fait irruption dans le
studio. Mais celui-ci était vide : pas de meubles, pas d’ordinateurs,
rien… Les hackers étaient déjà partis.
Paul appela son adjoint sur une ligne intérieure :
— Chang ?
— Oui monsieur ?
— Je travaille sur le dossier de l’Intermédiaire. Nous allons lancer
une fiche bleue, histoire de voir si les polices réagissent. Vous
pouvez me préparer ça ?
— Je m’en occupe.
Chang raccrocha.
Le Britannique lissa sa moustache de colonel de l’armée des
Indes et se félicita de s’être vu attribuer un adjoint aussi efficace et
discret que ce Hongkongais. Il savait que la fiche bleue serait sur
son bureau dans l’heure qui vient.
Interpol n’était pas à proprement parler une agence d’action.
C’était plutôt un centre de partage d’informations, lesquelles étaient
compilées, analysées et transmises aux polices concernées. Leur
outil : les fiches. La plus importante était la fiche rouge,
incorrectement surnommée Mandat d’arrêt international. Les notices
rouges renfermaient des informations de deux types : des éléments
d’identification comprenant le signalement, une photographie, les
empreintes digitales, les numéros des pièces d’identité des individus
recherchés. Et par ailleurs, des éléments juridiques, à savoir la
qualification de l’infraction dont l’individu était accusé, les références
des lois sur lesquelles se fondait l’accusation ou la condamnation,
les références du mandat d’arrêt ou de la décision de justice…
Dans l’affaire qui le préoccupait, Paul ne disposait d’aucune
donnée relative à l’Intermédiaire. Ce qui l’avait amené à choisir la
fiche bleue, utilisée pour avoir des informations sur des individus
suspects, leur identité, leur lieu de séjour, leurs activités illicites.
On frappa à sa porte. Chang venait d’arriver avec le document
demandé qu’il déposa sur le bureau de son chef.
— Dites-moi Chang, vous avez du nouveau sur cette affaire ?
— Les noms des dernières victimes. Et une signature inconnue
jusqu’à présent : Big Muzy ! Il a arnaqué une certaine madame
Rosmadec et quelques autres dans la même région. J’ai reçu le PV
de la gendarmerie ce matin.
— Rosmadec vous me dites ? À tout hasard, faites-moi une
recherche sur ce nom et ceux des autres victimes, on ne sait jamais.
— À vos ordres !

*
Gwenn s’était rendu à la gendarmerie de Pont-l’Abbé pour
déposer sa plainte puis était rentré à Sainte Marine et avait rassuré
Soazic. Ensuite, il avait modifié tous les mots de passe sur leurs
deux ordinateurs. Et, installé dans son bureau, il avait ouvert sa
messagerie professionnelle.
Plusieurs demandes de futurs clients apparurent sur l’écran.
Gwenn, consciencieusement, commença à rédiger une réponse
pour chacun. Mais inconsciemment, il se sentait mal à l’aise. Autant
il ne craignait guère de se confronter avec un malfrat avec ses
poings, autant la subtilité des virus informatiques le perturbait. Dans
cet étrange combat, les armes n’étaient pas égales.
C’est alors qu’il s’aperçut que la diode qui témoignait de l’allumage
de la caméra de l’ordi venait de s’éclairer. Il serra les dents !
Quelqu’un venait de se connecter à sa machine et l’observait
quelque part dans le monde. Résistant à l’envie de réagir
brutalement, il se maîtrisa, coupa la messagerie et éteignit
l’ordinateur, mettant fin en même temps au piratage de la caméra. Il
le débrancha, ferma le capot et se mit à réfléchir à voix haute :
— Il me faut mettre un terme à cette histoire… Seul je n’y arriverai
pas.
Un nom monta dans son esprit : Jeannot.
Installé dans le petit port de Saint-Guénolé, Jeannot était un
ancien expert informatique de la DGSE{2} et avait à plusieurs
reprises épaulé Gwenn dans des situations délicates. Lui pourrait
une fois encore trouver la parade.
Gwenn prit son téléphone, chercha le nom de son correspondant
et appela.

*
Zizi venait de faire une capture d’écran. Elle déclara :
— Il est mignon tout plein le Rosmadec. Je m’en ferais bien mon
goûter !

Gwenn laissa sa voiture sur le parking du port de Saint-Guénolé et


prit un peu de temps pour admirer les chalutiers à quai. Une odeur
particulière, mélange d’embruns, de goémon, de poisson et de
gasoil flottait dans l’air. Quelques mouettes se laissaient bercer sur
les eaux calmes du port tandis que les goélands, plus massifs,
s’étaient alignés sur le faîte du toit de la criée.
Gwenn aimait ces moments de rencontre avec la mer. Il y puisait
sa force et sa sérénité. Il laissa son esprit vagabonder sur le décor
maritime, se projetant vers le grand large, loin des vicissitudes de la
vie quotidienne et respira profondément. Face à ce spectacle, sa
batterie interne s’était rechargée. Il pouvait à présent reprendre le fil
de son problème.
Il quitta le parking à petites foulées pour gagner la ruelle au fond
de laquelle Jeannot avait élu domicile et sonna. Toujours aussi jovial,
l’informaticien l’accueillit avec un grand sourire :
— Salut mon pote ! Comment que c’est ?
Depuis qu’il avait retrouvé sa terre natale, Jeannot se faisait un
malin plaisir à utiliser des tournures bretonnes. C’était aussi un
moyen pour lui de se raccrocher aux terres de ses ancêtres.
— Bonjour Jeannot ! J’ai besoin de ton aide et c’est sérieux !
— Toujours à ton service ! Je vois que tu as apporté tes
ordinateurs ?
Gwenn désigna la sacoche en nylon noir dans laquelle il avait
glissé son portable et celui de son épouse.
— Parfait ! On y va !
Les deux hommes descendirent dans le sous-sol où Jeannot avait
installé son bureau et tous ses équipements informatiques.
— Pose tes machines là ! fit-il, pointant du doigt un espace
disponible sur la table de travail, encombrée de dispositifs
électroniques divers que Gwenn aurait été bien en peine de
désigner.
Jeannot ouvrit le capot des deux ordis et commença par scotcher
les deux caméras.
— C’est le truc simple, fit-il, mais toujours aussi efficace. Si on
arrive malgré mes moyens à pirater ta machine, la caméra ne
donnera aucune indication. Bon, on commence par celui de Soazic.
C’est lui qui a été infecté le premier non ?
— Oui, fit Gwenn sobrement. Mais nous ne savons pas comment.
— Probablement une pièce jointe. On va voir.
Jeannot brancha un câble sur l’ordi de la Bretonne, qui était relié à
un gros serveur. Il alluma ce dernier puis celui de Soazic et lança
l’analyse. Le léger vrombissement d’un petit moteur remplit le sous-
sol tandis que l’écran de contrôle se couvrait de ligne de codes.
— Si c’est un virus, on va le savoir assez vite !
— Pourtant nous avons un antivirus ! remarqua Gwenn.
Jeannot haussa les épaules :
— Les pirates vont tellement vite aujourd’hui que même les
antivirus ont du mal à suivre. Heureusement que je dispose de
mises à jour de produits professionnels.
Soudain, le défilé des lignes de code s’estompa pour laisser place
à un petit texte encadré en vert.
— Gast ! s’écria Jeannot ! EMOTET ! Je croyais qu’il avait été
éradiqué celui-là !
— Qu’est-ce que c’est ? demanda Gwenn.
Jeannot se cala dans son siège avant de répondre :
— C’est un cheval de Troie bancaire apparu en 2014. Il a ensuite
évolué pour devenir une solution clé en main incontournable des
cybercriminels. Il est polymorphe, c’est-à-dire qu’il change son code
à chaque fois qu’il est appelé pour déjouer la détection des
antivirus{3}.
Songeur, Gwenn répliqua :
— Tu dis qu’il a été éradiqué ?
— Le gang qui l’utilisait a été anéanti. Mais il suffit qu’un individu
dispose du code pour le réinjecter dans les réseaux. Alors les
grosses boîtes sont protégées. Mais les petits comme toi ne peuvent
pas grand-chose.
— Tu peux intervenir ?
— Bien sûr. Je dispose d’un vaccin. Mais j’ai peut-être mieux
encore. En fait ce qui nous intéresse c’est de remonter à l’origine du
pirate. Donc, je vais commencer par neutraliser ce virus, et lui en
rajouter en autre à ma manière.
Devant le visage surpris de son visiteur, Jeannot le rassura :
— Ne t’inquiète pas. Ton ordi ne risque rien. Par contre, ton pirate
va recevoir à son insu mon petit ami et nous allons savoir d’où il
vient.
Gwenn était au fait des nouveautés en manière de guerre
informatique, mais ces manipulations le surprenaient. Toutefois, il
faisait confiance à son ami qui se targuait d’être un hacker éthique.
Jeannot pianota sur son clavier. Ses doigts couraient sur les
touches qu’il effleurait à peine tandis que sur l’écran, de nouvelles
lignes de code faisaient leur apparition.
— Voilà ! C’est fait ! Il n’y a plus qu’à attendre.
— Ça va durer longtemps ? demanda le grand rouquin.
— En général, les pirates reçoivent un signal pour leur indiquer
qu’un des ordis piratés vient de se connecter et ils réagissent
immédiatement. À mon avis ça va venir très vite. En attendant, on va
essayer de trouver par quel canal ce virus a infecté ta machine.
Quelques manipulations suivies d’une série de lignes de code
permirent à Jeannot de déclarer triomphal :
— C’était une pièce jointe d’un mail, provenant d’une certaine
Mumu ; une photo apparemment. On va voir.
Gwenn laissa s’exprimer sa surprise :
— Mumu ? C’est extraordinaire ! Jamais je n’aurais pensé qu’elle
aurait pu être à l’origine de tout ça !
— Eh oui, fit Jeannot. Les pirates ont l’art de passer pour des gens
insoupçonnables.
En quelques clics, il fit apparaître la blonde pulpeuse.
— Oui, c’est elle, fit Gwenn.
Jeannot hurla de rire.
— Ça, mon petit gars, c’est un montage photographique fait à
partir de critères précis. On avait demandé à un panel représentatif
d’hommes de préciser quels seraient les éléments constitutifs d’une
belle femme à leurs yeux. Et c’est une intelligence artificielle qui a
fait le reste. Ça fait longtemps qu’elle traîne sur les réseaux sociaux
celle-là !
Au moment où il prononçait ces paroles, une petite icône s’alluma
sur le bandeau en bas de l’écran de Soazic.
— Regarde, fit Jeannot. C’est le témoin du virus que j’ai mis sur ta
machine. Il indique que ton pirate s’est connecté.
— Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ?
— On trace l’origine du signal. Attends un peu, je lance le logiciel
de traçage. Un petit bijou concocté par mes collègues de la DGSE…
Introuvable dans le commerce ! Mais utilisé couramment par la
police.
Une carte apparut sur l’écran. L’origine du signal semblait venir de
Pologne.
— Attends un instant, fit l’informaticien. Je parie qu’ils ont un
VPN{4}…
Jeannot pianota allègrement sur son clavier, déroulant de
nouvelles lignes de codes.
Finalement, il valida d’un coup sur la touche prévue et se cala
dans son siège.
— Maintenant, on va savoir où tu te caches, petite rigolote !

Zizi fixait son écran de contrôle et celui sur lequel apparaissaient


les données de l’ordinateur de Soazic. Soudain, un message crypté
apparut sur l’écran :

Vous êtes tracées. Videz les lieux ! Vite !


L’Intermédiaire

— Merde ! Merde ! Merde ! Je me suis fait avoir ! Mumu ! On


déménage ! Vite !

— Ton pirate est installé dans la rue Kéréon, à Quimper. Je te note


l’adresse, fit fièrement Jeannot. Maintenant, c’est à toi de jouer !
Chapitre 5

Chang pénétra dans le bureau de son chef, tout excité.


Habituellement calme et maître de lui, il semblait tout à coup saisi
d’une frénésie irrépressible.
— Patron ! On est tombé sur le bon filon !
Imperturbable, l’Anglais désigna la chaise en face de son bureau à
son adjoint :
— Asseyez-vous, Chang. Calmez-vous et dites-moi l’objet de votre
joie.
— Vous aviez raison hier. J’ai fait des recherches approfondies sur
les dernières victimes de Big Muzy. La plupart sont des citoyens au-
dessus de tout soupçon sauf un.
Chang laissa sa réponse en suspens. Paul Jordan ne broncha pas
d’un cil et attendit. Chang finit par lâcher, triomphal :
— Rosmadec !
— Très bien. Rosmadec. Alors, dites-moi ce que vous avez trouvé
sur lui.
Chang ouvrit une chemise en carton dans laquelle il avait compilé
ses notes :
— Il a commencé à se faire connaître comme correspondant de
guerre pour l’agence Magna Carta. Partout où ça chauffait, il était là.
Ensuite, il s’est rangé dans le village de Sainte Marine en Bretagne
pour ouvrir un cabinet d’écrivain public. Mais je pense que c’est une
couverture.
— Pourquoi ?
— Parce que sa vie est émaillée de crimes, de meurtres, de morts
étranges, certaines non élucidées. Suffisant en tout cas pour éveiller
mes soupçons. Mais il n’a jamais été poursuivi.
Paul lissa sa moustache en réfléchissant.
— Donc il se serait fait passer pour une victime afin d’éviter qu’on
braque sur lui nos projecteurs ? C’est un peu étonnant, non ?
— Au contraire patron, c’est le meilleur moyen de passer sous les
radars.
Paul continuait à réfléchir. La ficelle lui semblait trop grosse. Et
pourtant… dans le monde des truands, tout était bon pour parvenir à
ses fins. Finalement, il décida de suivre la piste que lui apportait son
adjoint.
— Très bien. Vous contactez la gendarmerie de sa zone de
résidence et vous leur demandez un rapport sur les activités de ce
monsieur.
Chang se leva d’un bond.
— Très bien ! Je m’en occupe !
Le Chinois avait atteint la porte quand Paul le rappela :
— Chang ! N’allez pas trop vite en besogne. Je vous rappelle la
présomption d’innocence. Donc, agissez, mais avec discrétion.
Le Hongkongais se contenta de hocher la tête en souriant et
disparut dans le couloir.

Le son caractéristique d’un SMS sonna sur le portable de Gwenn


au moment où il quittait Saint-Guénolé. Il jeta un œil sur l’écran
connecté de son 4x4. Ça venait de la gendarmerie de Pont-l’Abbé :
Monsieur Rosmadec, veuillez passer à mon bureau dès que
possible.

Le message provenait directement de l’adjudant-chef Irène Le


Roy. C’était étonnant qu’elle communique directement avec lui. En
tout cas, ce n’était pas dans les méthodes de la gendarmerie.
— Peut-être en lien avec ma plainte, se dit-il.
Pont-l’Abbé était sur sa route, il poursuivit donc son chemin et vint
se garer devant le bâtiment de béton qui servait de caserne. Dans le
hall, devant le comptoir qui barrait l’accès aux bureaux, le gendarme
Le Guennec traitait une affaire avec une vieille dame. Lorsqu’il vit
Gwenn passer l’entrée, il entrouvrit une demi-porte en bois attenante
au comptoir d’accueil et indiqua la direction du bureau du chef.
— Allez-y, monsieur Rosmadec, elle vous attend.
Gwenn se glissa dans le passage et se rendit au lieu de rendez-
vous. Il n’eut pas le temps de frapper : Irène Le Roy venait d’ouvrir la
porte et le faisait pénétrer dans son domaine. Elle n’était pas du
genre à s’embarrasser de détails :
— Asseyez-vous, monsieur Rosmadec.
Le ton était étrange. D’habitude autoritaire, voire cassante, la
gendarme semblait perturbée même si elle s’efforçait de le cacher.
Gwenn s’abstint de tout commentaire et écouta ce qu’elle avait à lui
dire.
— Monsieur Rosmadec, ça fait longtemps que je vous connais…
Je sais que vous êtes régulièrement à la limite de franchir la ligne
blanche chaque fois que cela vous arrange. Mais je dois reconnaître
que vous êtes quelqu’un de foncièrement honnête…
Irène Le Roy marquait une pause entre chacune de ses phrases
pour mieux soupeser la portée de ses mots. Gwenn était étonné.
C’était la première fois qu’elle lui parlait de cette façon pour lui dire
de telles vérités. Elle poursuivit :
— Ce que je vais vous dire reste entre nous et cette conversation
n’a jamais eu lieu…
L’étonnement monta d’un cran. Gwenn se concentra davantage.
Irène le regardait droit dans les yeux :
— Je viens de recevoir une demande d’enquête à votre sujet par
Interpol.
— Gast ! De quoi suis-je soupçonné ?
— D’être un possible membre d’un gang de hackers international
tout simplement.
L’information aurait prêté à rire, mais Gwenn sentait le coup fourré.
Il demanda :
— Et qu’est-ce que vous en pensez ?
Irène prit le temps de réfléchir.
— Vous aimez bien mener vos enquêtes vous-même, au mépris
des règles et de la loi.
— Oui ?
— Vous avez porté plainte pour un détournement d’argent du
compte bancaire de votre épouse…
— Continuez…
— Je ne crois pas que vous soyez un bandit, monsieur
Rosmadec, mais je pense que, comme d’habitude, vous avez fouiné
de votre côté afin de trouver les coupables, au risque de susciter
l’intérêt des informaticiens d’Interpol.
— Bon… Alors ?
— Vous n’ignorez pas que votre route est parsemée de cadavres,
même si vous n’avez jamais été mis en cause. Et évidemment, c’est
le genre de détail qui interpelle Interpol.
— Vous aussi je suppose ?
— Exactement. Je vais donc faire à Interpol un rapport aussi
précis que possible. Mais maintenant que vous êtes dans leur viseur,
je souhaite… non…
Elle fit une pause et regarda Gwenn fixement dans les yeux avant
de poursuivre :
— … j’exige une collaboration pleine et entière.
Gwenn hocha la tête :
— C’est-à-dire ?
— Je veux que vous me fassiez part de toutes les informations
que vous pourriez trouver afin de parvenir au plus vite à la résolution
de votre problème, sans que cela ne provoque de catastrophe.
Gwenn assimila très vite toutes les données qu’il venait de
recevoir. À son tour, il la fixa :
— J’apprécie beaucoup votre franchise, adjudant-chef. Quand on
parle de collaboration, il faut être deux. Donc je suis tout disposé à
vous donner les informations que je pourrais trouver, à condition que
de votre côté vous en fassiez autant à mon égard.
Irène approuva d’un battement de cils.
— Je comprends. Officiellement, je ne suis pas habilitée à vous
donner ces infos. Officieusement…
— J’ai cru comprendre que cette conversation n’avait pas eu lieu ?
— Merci monsieur Rosmadec. Je vous souhaite une belle
journée !
Gwenn quitta la gendarmerie un peu perturbé. Cette affaire
commençait à aller trop loin. Il était temps d’y mettre un terme
rapidement. Il appela Soazic pour l’informer qu’il devait faire une
course à Quimper et reviendrait ensuite. Par ailleurs, le problème
venait vraisemblablement de cette Mumu qui avait infecté son ordi.
En aucun cas, elle ne devrait ouvrir un message provenant de cette
personne. Son objectif dans l’immédiat : un studio dans la rue
Kéréon où devait résider cette célèbre Mumu, à l’origine de tous
leurs problèmes. Il ne savait pas encore ce qu’il allait faire. Il suivait
simplement son instinct.

— Le Guennec !
— Oui chef.
— L’équipe est prête ?
— Oui. Deux gendarmes en civil comme vous avez demandé.
— Parfait. Qu’ils suivent Rosmadec et me tiennent informée de
ses moindres faits et gestes. Où va-t-il ? Qui rencontre-t-il ? Etc.
Vous connaissez la musique alors, au boulot !

Gwenn avait laissé sa voiture sur le parking au bord des quais de


l’Odet et s’était rendu à pied vers les rues piétonnes. Il longea le
fronton de la cathédrale Saint Corentin où une nuée de touristes
japonais, appareil photo rivé à l’œil, mitraillait la statue du roi
Gradlon. Une famille d’Allemands s’extasiait devant les prouesses
de leurs rejetons sur les chevaux de bois d’un manège à l’ancienne.
Un crêpier dans sa cahute s’affairait devant son billig et distillait dans
l’air des nuées embaumées de galettes chaudes. Les touristes
avaient envahi l’espace et butinaient les vitrines, telles des abeilles
ouvrières en quête de nectar. En arrière-plan, devant le musée des
beaux-arts, une queue de passionnés attendait de pouvoir découvrir
l’exposition de l’été. L’ambiance estivale était joyeuse, bon enfant.
Mais Gwenn était dans un tout autre état d’esprit.
Il abandonna la grande place pour s’engager directement dans la
rue Kéréon entre les rangées de maisons de granit gris, passa sous
les statues de bois polychrome de Corentin et Philomène et
poursuivit son chemin jusqu’à une petite placette où des poneys
attendaient que des enfants les enfourchent pour une balade en
ville. Il fit une pause pour réfléchir. Il savait que son objectif se situait
quelques mètres plus loin. Mais en fait, il ignorait ce qu’il allait faire
une fois sur place. Se fiant à son instinct, il continua sur les pavés de
la rue piétonne.
D’après les indications que lui avait données Jeannot, il parvint
rapidement devant une porte en bois qui jouxtait un magasin de
sous-vêtements féminins. Il poussa la porte pour se retrouver dans
un étroit corridor au fond duquel grimpait un vieil escalier en chêne.
Sur le mur, deux boîtes aux lettres. L’une destinée à la boutique,
l’autre mentionnant simplement un numéro. Aucun nom ne figurait
sur l’étiquette.
— Il est prudent le coco, songea l’écrivain public.
Le rouquin s’avança prudemment vers l’escalier et gravit les
marches qui couinaient sous son poids. Il atteignit un palier avec une
seule porte. Que faire ? Frapper et voir ? Oui ; a priori, c’était la
chose la plus simple à faire. Ensuite, en fonction de ce qu’il
trouverait, il improviserait.
Il s’approcha, donna quelques coups secs et attendit. Mais
personne ne vint lui ouvrir. Il frappa encore, plus fort, sans succès. Il
se demanda ce qu’il allait pouvoir faire. À tout hasard, il poussa la
poignée et découvrit que la porte n’était pas verrouillée.
Prudemment, il entra.
Le studio ne comportait qu’une seule pièce, désespérément vide à
l’exception d’une planche posée sur des tréteaux. Quelques fils
électriques traînaient par terre. Le papier peint, jauni, n’avait pas
connu la caresse d’un artisan depuis longtemps. Visiblement, Mumu,
ou celui ou celle qui utilisait ce pseudonyme, avait quitté les lieux.
Gwenn était déçu. Il redescendit les marches et entendit du bruit
dans le hall. Passant discrètement la tête au-dessus de la rambarde,
il observa le nouveau venu. Mumu ?
Non ; le facteur. Celui-ci venait de déposer des lettres pour la
boutique, avant d’en glisser une dans l’autre boîte. Gwenn attendit
patiemment que le postier eût terminé son travail et une fois celui-ci
parti, il s’approcha.
Armé de son petit couteau de poche, il défonça la serrure pour en
extraire la lettre. Celle-ci provenait d’une société d’ordinateurs. Une
publicité sans doute. Mais Gwenn trouva une réponse à sa quête.
L’enveloppe était adressée à Muriel et Élisa Simon. Maintenant, il
pouvait mettre un nom sur la « Mumu ». Et il découvrait par ailleurs
l’existence d’une autre personne. Une piste à exploiter à fond avec
tous les moyens en sa possession.
Son état d’esprit changea. Il craignait une confrontation orageuse.
Elle n’avait pas eu lieu, mais il avait avancé dans son enquête.
Tout joyeux, il sortit du hall, la lettre à la main, et retourna à son
véhicule.

L’air affairé devant la vitrine d’un pâtissier de kouign-amann, les


deux gendarmes n’avaient rien perdu de la scène.
— Tu as vu ? Il sort avec une lettre.
— Oui, c’est curieux. Elle a dû être déposée par le facteur.
— On va le rattraper et lui demander à qui elle était destinée.
— En route !
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