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Politique de la ville :
un entretien avec
Marianne Louis
Dans le rapport qui lui a été confié en avril par la direction du PS,
Marianne Louis, adjointe au maire d'Evry, conseillère régionale d’Ile-de-France
et secrétaire nationale à la politique de la ville,
s'est attachée à évaluer l'action de l'ANRU. L'étude a été réalisée
après une série d'auditions d'élus locaux, de bailleurs et d'associations

Communes de France. Au 1er mai de Jean-Louis Borloo, qui tablait sur 250 000 démoli-
2009, 358 projets globaux ont tions. Ces données traduisent une révision à la baisse
été approuvés par l’ANRU et 323 des projets. C’est un vrai sujet par rapport à l’objectif
conventions signées. Sur cinq ans, de mixité sociale et de diversité des parcours résiden-
38,2 milliards d’euros auraient ainsi tiels. Mais je ne veux pas m’arrêter à une critique sur ce
été engagés ou programmés. Ces chiffre, d’abord parce que la qualité du logement, c’est
chiffres vous satisfont-ils ? aussi une affaire de réhabilitation lourde. Et il y a aussi
Marianne Louis. Ces projets représen- d’autres questions déterminantes, comme les transports,
tent 127 000 démolitions de logements nécessaires pour accéder à la formation, à l’emploi, à la
sociaux et 119 500 constructions, à com- diversité culturelle…
parer aux objectifs initiaux du programme En urgence, notre préoccupation concerne l’avenir de
national de rénovation urbaine (PNRU) l’ANRU après 2012. Quid des conventions signées jus-
Marianne Louis, secrétaire nationale
du PS à la politique de la ville

La politique de la ville version Hortefeux


Xavier Lemoine, maire UMP de Montfermeil, a reçu un drôle de cadeau de bienvenue pour fêter son installation à la
vice-présidence du Conseil national des villes (CNV). Un nouveau décret d'attribution, publié le 15 mai sous couvert de
Brice Hortefeux, réoriente le fonctionnement de cette instance de concertation, conçue à l'origine comme une tribune
pour les élus. Or, ses représentants ne seront désormais plus invités à participer aux conseils interministériels des
villes. Ils ne seront qu'informés ultérieurement des décisions prises. Par ailleurs, le décret ne prévoit plus que les ins-
tances gouvernementales rendent compte des suites données aux avis du CNV sur les politiques publiques en matière
de politique de la ville, comme l'imposaient les précédents textes. Enfin, la justice et la prévention de la délinquance
ne sont plus explicitement mentionnées au nombre de ses domaines d'expertise.
Le gouvernement avait parlé de renforcer les prérogatives du CNV. C'est le contraire, à l'arrivée. Un point d'organi-
sation ne trompe pas. Le CNV perd son secrétariat général et son équipe sera composée, à l'avenir, de personnels
mandatés par Fadela Amara, et non plus par des chargés de mission issus des ministères concernés (Intérieur, Justice,
Emploi, Logement…). Dans cette logique, le même décret transforme la délégation interministérielle à la ville (DIV)
en un secrétariat général, dirigé par le préfet Henri Masurel, qui préparera les travaux du comité interministériel des
villes présidé par le Premier ministre.

10 Communes Juin 2009 n° 492

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qu’en 2018 ? Quid d’une ANRU 2 ? Il est clair que le qu’il serait absurde de s’arrêter en chemin. Or, il ne sera
"siphonage" du 1 % au profit quasi exclusif de l’ANRU pas facile de trouver un deuxième souffle. Mais à l’heure
pour compenser le désengagement financier de l’État ne où il faut enrayer les effets de la crise, ce genre de re-
règle rien dans le temps. noncement traduirait un choix idéologique de la part de
la droite qui s’accommoderait bien de la relégation de
Vous plaidez pour un ANRU 2 ? certains. Déjà, sous l’égide de Fadela Amara, la politique
Il faudra en effet résoudre les problèmes posés aux ter- de la ville a peu à peu (re)fait place à une simple "po-
ritoires qui n’ont pas encore été traités par l’ANRU, mais litique de quartiers". C’est dommage. Je crois profondé-
aussi s’intéresser aux projets qui n’avaient pas été jugés ment, et tous les professionnels et élus que j’auditionne
prioritaires à l’origine. Comme vous l’avez noté, beau- partagent ce sentiment, que la force de la politique de
coup se "jouaient" sur le nombre de démolitions… Il en la ville c’est justement d’associer un volet "urbain" et un
faut parfois vraiment pour "inverser" l’image d’un quar- volet "humain".
tier, interrompre un processus de dégradation. On fonctionne désormais sur une petite échelle sans
Mais il y a d’autres questions importantes pour la cohé- vision d’ensemble. Un exemple ? Le "busing", mesure
déjà fort contestable pour lutter contre
la discrimination scolaire. L’année pro-
chaine, 14 opérations pour toute la
France, ce n’est rien. Mais derrière, la
lutte contre l’échec scolaire et le ren-
forcement des moyens massifs ne
semblent plus prioritaire. Au niveau
associatif, les réseaux d’éducation
populaire tirent à raison la sonnette
d’alarme. C’est un véritable double dis-
cours : d’un côté, un système d’appel
à projets via l’ACSE qui prive le tissu
associatif de la moindre initiative et qui
l’asphyxie, de l’autre l’hypermédiatisa-
tion d’actions marginales. Aujourd’hui
c’est le "volet" humain qui souffre le
premier.

sion sociale et territoriale : la qualité des équipements Propos recueillis par Jacques Massey
publics et notamment des écoles, l’effort fait pour le dé-
veloppement et le maintien du service public. Ne dit-on
pas que « le service public, c'est le patrimoine de ceux
qui n'en n'ont pas ». L’observation vaut aussi pour les
Les grandes villes demandent un débat national
maisons de santé. Au sein de l’ANRU, les personnels sont L’Association des maires de grandes villes de France « prend acte de la décision » de Fadela
assez conscients de cet enjeu lorsque l’on évoque les
Amara, secrétaire d’État chargée de la Politique de la ville, d’attendre l’année 2010 pour
futurs objectifs de l’agence après l’époque des interven-
évaluer les actuels contrats urbains de cohésion sociale (CUCS), qui arrivent à échéance à la
tions lourdes sur le logement. Mais pour cela, il faudra
d’autres financements. Gérard Hamel, son président (et fin 2009. Selon Michel Destot, président de l’AMGVF, il s’agit « d’une décision raisonnable et
député-maire UMP de Dreux), parle aujourd’hui d’en- conforme aux attentes des maires de grandes villes » qui souhaitent une année de transition
gager des partenariats public-privé pour cette nouvelle pour dresser, dans de bonnes conditions, un bilan d’étape sérieux et approfondi des CUCS
étape. Dans un contexte de crise, c’est à voir, mais pour 2007/2009, nécessaire avant toute élaboration de nouveaux dispositifs.
l’instant j’ai des doutes. En tout cas, je ne voudrai pas Pour le député-maire de Grenoble, il faut profiter de l’année 2010 pour engager une discus-
que ce soit l’écran de fumée qui encore une fois retarde
sion plus générale sur la nouvelle politique de la ville que l’État et les élus des grandes villes
la question de la solidarité financière entre communes
souhaitent promouvoir, portant sur les questions de gouvernance et de nouvelles contrac-
et entre intercommunalités. Je n’oublie pas que nous ne
sommes pas passés loin l’année dernière d’une réforme tualisations mais également sur la refonte de la géographie prioritaire et la réforme de la
particulièrement inique de la DSU. Dotation de solidarité urbaine (DSU). Dans un courrier adressé à Fadela Amara, Michel Des-
tot précise que l’AMGVF se tient à la disposition du gouvernement « afin de présenter son
Le simple fait que cette question se pose traduit analyse et ses préconisations pour une politique de la ville ambitieuse, concertée et portée
les hésitations de l’État à s’engager plus avant…
avec exigence au niveau national et local ».
Il y a effectivement là une contradiction. Nous estimons

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