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Thomas d'Aquin (né en 1224/1225 au château de Roccasecca près d'Aquino en Italie du Sud, mort
le 7 mars 1274 à l'abbaye de Fossanova près de Priverno dans le Latium), est un religieux de l'ordre
dominicain, célèbre pour son œuvre théologique et philosophique. Considéré comme l'un des
principaux maîtres de la philosophie scolastique et de la théologie catholique, il a été canonisé en
1323, puis proclamé docteur de l'Église par Pie V, en 1567 et patron des universités, écoles et
académies catholiques, par Léon XIII en 1880. Il est également un des patrons des libraires. Il est
aussi qualifié du titre de « Docteur angélique ». Son corps est conservé sous le maître autel de
l'église de l'ancien couvent des dominicains de Toulouse.
En 1879, le pape Léon XIII, dans son l'encyclique Æterni Patris, a déclaré que les écrits de Thomas
d'Aquin exprimaient adéquatement la doctrine de l'Église. À l'époque on distinguait encore mal la
pensée de Thomas d'Aquin lui-même de l'école thomiste et des infléchissements notionnels dus à sa
réception au cours du temps. Le concile Vatican II (décret Optatam Totius sur la formation des
prêtres, no 16) propose l'interprétation authentique de l'enseignement des papes sur le sujet, plus
précis et plus ouvert à la fois, en demandant que la formation théologique des prêtres se fasse "avec
Thomas d'Aquin pour maître".
Dans la continuité du propos de l'Église catholique, Thomas d'Aquin a proposé, au XIIIe siècle, une
œuvre théologique qui repose, par certains aspects, sur un essai de synthèse de la raison et de la foi,
notamment lorsqu'il tente de concilier la pensée chrétienne et la philosophie réaliste d'Aristote. Il
distingue les vérités accessibles à la seule raison, de celles de la foi, définies comme une adhésion
inconditionnelle à la Parole de Dieu. Il qualifie la philosophie de servante de la théologie
(philosophia ancilla theologiae) afin d'exprimer comment les deux disciplines collaborent de
manière 'subalternée' à la recherche de la connaissance de la vérité, chemin vers la béatitude.
Sommaire
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1 Biographie
o 1.1 Jeunesse et aspiration à la vie dominicaine (1224/1225-1244)
o 1.2 Études à Paris, premiers enseignements (1245-1259)
o 1.3 Premier enseignement italien (1259-1268)
o 1.4 Retour à Paris, querelles universitaires (1268-1272)
o 1.5 Second enseignement italien, fondation du studium generale de Naples (1272-
1273)
o 1.6 Sa dernière vision et sa fin (1273-1274)
o 1.7 Thomas en son temps
2 Caractère général de l'œuvre de Thomas d'Aquin
o 2.1 Théologien avant d'être philosophe
o 2.2 Les rapports de la foi et de la raison
o 2.3 Philosophie réaliste
o 2.4 Dieu connu par ses effets
o 2.5 La nature humaine au centre de son projet
o 2.6 La morale comme retour vers Dieu
3 Théologie et philosophie
o 3.1 Ratio naturalis et Révélation
o 3.2 Approfondissement des quatre sens de l’Écriture
4 Dieu selon Thomas d'Aquin
o 4.1 L’existence de Dieu
o 4.2 Le Dieu unique, le Dieu Trine
o 4.3 Le Christ
o 4.4 Le Dieu créateur : Sa Création
4.4.1 L’exitus reditus
4.4.1.1 Les Esprits purs ou Anges
5 Théorie de la connaissance
o 5.1 La connaissance sensible
o 5.2 La connaissance intellectuelle
5.2.1 Le problème de l'unité de l'intellect
o 5.3 Les degrés d'abstraction
o 5.4 La métaphysique
5.4.1 L'analogie de l'être
6 La nature humaine
o 6.1 Statut de la créature raisonnable dans la création
o 6.2 L'âme et le corps
o 6.3 Les actes humains
o 6.4 Les passions
7 La morale : l'homme et sa finalité
o 7.1 La vertu
o 7.2 De la liberté et du libre arbitre
o 7.3 La fin dernière de l'homme
7.3.1 Le bien suprême
7.3.2 Bonheur et béatitude
7.3.3 Tous les biens sont relatifs au bonheur et à la béatitude
o 7.4 L'Amour
7.4.1 L'ouverture sur l'autre : l'amour comme fondement
7.4.2 La charité fondement des vertus morales
o 7.5 Politique
o 7.6 Contempler et transmettre
8 Le vocabulaire scolastique de Thomas d'Aquin
o 8.1 Être (ens ou esse)
o 8.2 Les causes (causa)
o 8.3 Matière et forme (materia et forma)
o 8.4 Acte et puissance (actus et potentia)
o 8.5 Substance et accident (substantia et accidens)
o 8.6 Intellect passif et intellect agent
9 Méthode
10 Postérité
o 10.1 Quelques-unes des approbations pontificales du "Docteur commun"
11 Citations, avis, anecdotes
12 Œuvres
13 Annexes
o 13.1 Bibliographie
13.1.1 Vie de saint Thomas d'après les auteurs du Moyen Âge
13.1.2 Introductions à la lecture de Thomas d'Aquin
13.1.3 Essais de synthèse de la pensée de Thomas d'Aquin
o 13.2 Lectures personnelles de la pensée de Thomas d'Aquin et vulgarisation
13.2.1 Questions diverses
13.2.2 Commentaires philosophiques d'œuvres de Thomas d'Aquin
o 13.3 Liens internes
13.3.1 Sources de sa pensée
13.3.2 Influences
13.3.3 Questions théologiques
o 13.4 Liens externes
o 13.5 Notes et références
Biographie [modifier]
Jeunesse et aspiration à la vie dominicaine (1224/1225-1244) [modifier]
De 1230/1231 à 1239, il est oblat à l’abbaye bénédictine du Mont-Cassin. Il y demeure neuf ans,
durant lesquels il apprend à lire et à écrire, ainsi que les rudiments de la grammaire et du latin,
associés à une formation religieuse élémentaire.
À partir de 1239, Frédéric II, en lutte contre Grégoire IX[3], expulse les moines de l'abbaye. Sur le
conseil de l'abbé, les parents de Thomas l'avaient déjà envoyé à Naples pour y poursuivre ses études
au Studium regni (qui n'est pas une université, mais une académie locale), fondé par Frédéric II en
1220. Il y étudie alors auprès des maîtres les disciplines classiques du Trivium et du Quadrivium ; il
découvre sans doute alors Aristote à travers Averroès dont les traductions latines commencent à
circuler. C'est alors qu'il rencontre des frères prêcheurs dont la vie et la vitalité apostolique l'attirent.
Son père meurt le 24 décembre 1243, rendant le jeune Thomas un peu plus libre de son destin. Il
décide d'entrer dans l’ordre des dominicains en avril 1244, à l'âge de vingt ans, contre l’avis de sa
famille qui veut en faire l'abbé du Mont-Cassin. Sa mère le fait alors enlever et l’assigne à résidence
à Roccasecca où il demeure un an. Thomas ne changeant cependant pas d’avis, sa famille finit par
accepter son choix[4].
Il est ensuite étudiant à Paris de 1245 à 1248, sous le règne de Louis IX. Puis il suit son maître
Albert le Grand (dominicain commentateur d'Aristote) à Cologne jusqu'en 1252[5], où ses confrères
d'étude l'affublent du sobriquet de « bœuf muet » en raison de sa stature et de son caractère
taciturne. De retour à Paris, il suit le cursus universitaire classique des étudiants en théologie : il est
bachelier biblique (lectures commentées des Écritures) de 1252 à 1254, puis bachelier sententiaire.
Il rédige durant cette période un commentaire des livres d'Isaïe et de Jérémie (Super Isaiam et
Super Ieremiam), ainsi que le De ente et essentia (1252). Comme bachelier sententiaire, il
commente le Livre des Sentences de Pierre Lombard, devenu le manuel des études théologiques à
l'université de Paris depuis le début du XIIIe siècle. Thomas d'Aquin en fait le commentaire, en
deux ans, durant son enseignement de bachelier sententiaire. Son commentaire (Scriptum super
libros Sententiarum) est énorme : plus de 600 pages in-folio), écrites de 1254 à 1256, tout en
suivant certains des cours dispensés dans les écoles parisiennes et au Studium dominicain de Saint-
Jacques. Au printemps 1256, avec l'appui du Souverain Pontife qui doit intervenir auprès de
l'université, dans le contexte conflictuel de l'opposition des mendiants et des séculiers, il soutient sa
maîtrise en théologie et est nommé Maître-Régent (magister in sacra pagina ou docteur en Écriture
sainte) - avec Bonaventure de Bagnorea - Il commence aussitôt à enseigner et rédige les Questions
disputées : De veritate (1256-1259), les Quodlibet (7 à 11) ; commente le De Trinitate de Boèce
(1257-1258)… Son activité consiste principalement en disputes théologiques (disputatio), en
commentaires de la Bible et en prédications publiques. Les commentaires sur Aristote de Thomas
d'Aquin n'ont jamais fait l'objet d'un enseignement public.
Thomas d'Aquin et le pape Urbain IV, de Lorenzo Lotto, 1508, huile sur bois, 155 x 67 cm,
Recanati, Musée municipal.
En 1259, Thomas a trente-quatre ans lorsqu'il part pour l'Italie où il enseigne la théologie jusqu'en
1268, tout en jouissant déjà d'une grande réputation.
Il est d'abord assigné à Orvieto, comme lecteur conventuel, c'est-à-dire responsable de la formation
permanente de la communauté. Il trouve toutefois le loisir d'achever la rédaction de la Somme
contre les Gentils (commencée en 1258) et de l'Expositio super Iob ad litteram (1263-1265). Il
rédige notamment l'explication continue des évangiles, appelée par la suite la Chaîne d'or (Catena
aurea), un florilège de citations patristiques organisées de manière à constituer un commentaire
continu des Évangiles, verset par verset. Cet ouvrage d'importance considérable du point de vue de
l'histoire de la réception des auteurs chrétiens grecs, est rédigé de 1263 à 1264 à la demande du
pape Urbain IV auquel Thomas dédie la chaîne sur Matthieu.
Thomas est envoyé à Rome entre 1265 et 1268 comme maître régent. Durant ce séjour, affecté à la
formation intellectuelle des jeunes dominicains, Thomas rédige également De potentia Dei (1265-
1266), la première partie du Compendium de théologie et commence en 1266 la rédaction de la
Somme théologique. Il entame ses commentaires sur Aristote par le Commentaire « De l'âme »
(1267-1268), en adoptant la méthode d'explication mot à mot des grands commentaires (tafsîr)
d'Averroès. C'est également en Italie qu'il compose l'Office du Saint-Sacrement au moment de
l'instauration de la Fête du Corpus Christi. Il rédige aussi plusieurs opuscules, en réponses aux
questions de personnes particulières ou de supérieurs, portant sur des questions diverses :
économiques, canoniques ou morales.
Durant cette période, il eut l'occasion de côtoyer la cour pontificale (qui ne résidait pas à Rome).
Assigné à des couvents dans lesquels il remplissait une tâche particulière, rien ne dit qu'il suivit le
pape dans ses déplacements continuels. La curie n'avait pas alors de siège fixe.
C'est probablement durant cette période qu'il eut l'occasion de prêcher les sermons sur le Credo, le
Pater et l'Ave Maria, puisque ceux-ci furent prêchés durant le carême dans la région de Naples et
que Thomas n'était plus en mesure de le faire en 1273.
Thomas revient de 1268 à Pâques 1272[6] à Paris dont l'Université est en pleine crise intellectuelle et
morale provoquée par la diffusion de l'aristotélisme et par les querelles entre les ordres mendiants,
les séculiers et les réguliers. Le théologien Rémi de Florence a suivi ses cours lors de son second
enseignement parisien. Il a quarante-quatre ans lorsqu'il rédige la seconde partie (IIa Pars) de la
Somme théologique et la plus grande partie des Commentaires des œuvres d'Aristote. Il doit faire
face à des attaques contre les Ordres Mendiants, mais aussi à des rivalités avec les franciscains et à
des disputes avec certains maîtres ès arts (en particulier Siger de Brabant, dont la mort mystérieuse
est racontée par Dante, qui évoque également de manière énigmatique la rivalité entre Thomas et
Siger dans le Paradis de la Divine Comédie). Il écrit le De perfectione spiritualis vitae (1269-1270)
et les Quodlibets I-VI et XII contre les séculiers et les traités De aeternitate mundi (1271) et De
unitate intellectus (1270) contre l'averroïsme des maîtres de la faculté des arts[7].
Après le travail incroyable accompli à la fois pour l'enseignement et la rédaction de son œuvre, les
luttes continuelles qu'il dut mener au sein même de l'Université, Thomas est envoyé par ses
supérieurs à Naples pour y organiser le studium generale des frères dominicains (fondé en 1269),
destiné à la formation des jeunes frères dominicains de la Province de Rome, et y enseigner en
qualité de maître régent en théologie. Les raisons de ce rappel à Naples ne sont pas évidentes. On
peut supposer que ce fut sur les instances du roi Charles d'Anjou, le frère de Louis IX de France. Il
est sûr que ce fut malgré les supplications de l'Université de Paris[8]. Thomas est à pied d'œuvre
entre fin juin et septembre 1272. Il poursuit la rédaction de la troisième partie (IIIa Pars) de la
Somme théologique, à partir de la question 7; il rédige notamment les questions sur le Christ et les
sacrements qu'il n'achèvera jamais. Il y reprend son enseignement sur les épîtres de Paul (Épître
aux Romains), le commentaire des Psaumes (1272-1273), et certains commentaires d'Aristote.
« Je vous reçois, ô salut de mon âme. C'est par amour de vous que j'ai étudié, veillé des nuits
entières et que je me suis épuisé ; c'est vous que j'ai prêché et enseigné. Jamais je n'ai dit un mot
contre Vous. Je ne m'attache pas non plus obstinément à mon propre sens ; mais si jamais je me suis
mal exprimé sur ce sacrement, je me soumets au jugement de la sainte Église romaine dans
l'obéissance de laquelle je meurs. »
La plupart des témoignages concordent à le présenter comme un homme grand et fort. Son
apparence devait être harmonieuse car, lorsqu'il passait dans la campagne, le bon peuple
abandonnait ses travaux et se précipitait à sa rencontre, « admirant sa stature imposante et la beauté
de ses traits ». Ses étudiants le présentèrent comme un homme soucieux de ne froisser personne par
de mauvaises paroles, et très assidu au travail, se levant très tôt, bien avant les premiers offices,
pour commencer à travailler. Sa piété se tournait surtout vers la célébration du sacrifice de la messe
et vers l'image du Christ crucifié[11].
Ses œuvres sont cataloguées dans un écrit de 1319, mais leur chronologie exacte repose sur une
critique complexe des sources et des manuscrits ; elle est fixée maintenant pour l'essentiel, bien que
certains points de détail restent encore discutés.
L'œuvre de Thomas d'Aquin fut condamnée le 18 mars 1277 par l'archevêque anglais Robert
Kilwarby. Guillaume de la Mare, franciscain, publia vers 1279 un correctorium de frère Thomas,
recensant 117 propositions trop audacieuses. Réhabilité par la suite, notamment de par l'influence
grandissante de l'ordre dominicain, il est canonisé en 1323 par le pape Jean XXII. Néanmoins ses
idées continuent à faire débat, y compris à l'intérieur de l'ordre dominicain où les chapitres généraux
doivent réitérer mainte fois l'obligation de ne pas critiquer les thèses de Thomas d'Aquin.
Thomas d'Aquin (droite), saint Dominique et la Vierge Marie à l'enfant, de Fra Angelico, 1420,
fresque, 196 x 187 cm, Saint-Pétersbourg, Musée de l'Ermitage.
Thomas en son temps [modifier]
Thomas d'Aquin a écrit la majorité de son œuvre à l'Université parisienne au XIIIe siècle, sous le
règne de Louis IX de France. La didactique universitaire reposait à l'époque sur trois piliers :
l'explication des textes, les questions disputées et la prédication. Les disputes argumentées portent,
les unes sur des questions précises choisies par le maître, et les autres, dites quodlibetiques, sur des
sujets, soit proposés par les étudiants, soit choisies au hasard[12]. Comme tous les ouvrages
théologiques universitaires de l'époque, les questions et articles de la Somme de théologie adoptent
la structure dialectique des questions disputées, bien que la Somme n'ait jamais fait l'objet d'un
enseignement par Thomas d'Aquin.
Thomas d'Aquin, qui est un des premiers – sinon le premier – à distinguer une théologie naturelle et
une théologie révélée, est parti en quête d'une intelligence de la foi, par la raison naturelle, en
s'appuyant notamment sur Aristote. Cependant, les études contemporaines[13] ont rappelé que
Thomas d'Aquin est avant tout théologien, et que sa philosophie s'insère dans un système
théologique chrétien, qui prend en compte la création, l'existence de Dieu, la vie de la Grâce, la
Rédemption.
Depuis la fin du XIXe siècle, les objections de la critique rationaliste ont incité l'apologétique
catholique à mettre en évidence certaines positions de Thomas d'Aquin concernant les rapports de la
foi et de la raison. Thomas d'Aquin soutient en effet que la foi chrétienne n'est ni incompatible, ni
contradictoire avec un exercice de la raison conforme à ses principes, c'est-à-dire non détournée de
ses fins naturelles par le vice et le péché {références}. Les vérités de la foi et celles de la raison
peuvent être intégrées dans un système synthétique harmonieux, sans se contredire. À une époque
où la philosophie commence à s'organiser en discipline autonome dans les écoles et les universités,
il place les vérités transmises par la Sacra doctrina – la Révélation – au-dessus de toutes les
sciences, puisque la Révélation vient de Dieu, qui, par définition, ne peut ni se tromper ni nous
tromper. Dans cette perspective théologique, Thomas d'Aquin pose comme principe le respect de
l'ordre rationnel, créé et voulu par Dieu pour permettre à l'homme de connaître la vérité. Il distingue
de ce fait raison naturelle et raison éclairée par la Révélation (Écriture et Tradition), théologie
naturelle et théologie révélée[14].
À la suite de saint Paul, Thomas établit que l'homme peut acquérir la connaissance de l'existence de
Dieu à partir du monde et non à partir de la déduction de principes logiques ou abstraits. Il est tout à
fait possible d'accéder à une certaine connaissance de Dieu - principalement son existence, son
statut de cause première - sans Révélation, en observant le monde, par une connaissance indirecte et
a posteriori. C'est le sens des voies dites cosmologiques qui conduisent à la connaissance de
l'existence de Dieu à partir de l'observation de l'univers[16]. Thomas d'Aquin proposera cinq voies
qui conduisent à conclure, par l'exercice de la raison, à l'existence d'un être que tout le monde
appelle Dieu: les Quinquae viae. Elles reposent sur la distinction entre ce que Dieu est « pour
nous » (quoad nos) (par exemple Dieu en tant que créateur du monde) et ce qu'Il est « en lui-
même » (in se) (ce qui est impossible à connaître intégralement en ce monde, car, en raison de sa
perfection suprême, Il est au-delà de ce que la créature peut connaître par elle-même. L'exercice de
cette connaissance rationnelle reste souvent entravée par le péché. Il doit donc être aidé et complété
par la Révélation et par la grâce de la rédemption, moyennant lesquelles l'homme, créé capable de
Dieu (capax Dei), est conduit à atteindre sa finalité ultime : contempler l'essence de Dieu face à
face dans la Béatitude, c'est-à-dire après la mort pour les bienheureux.
L'être humain est au centre de toute l'œuvre de Thomas d'Aquin. La nature de l'homme en tant
qu'être matériel et spirituel, à la frontière entre l'univers visible et invisible, est analysée avec les
outils aristotéliciens. L'homme est essentiellement corps et intelligence. Thomas d'Aquin adopte
ainsi l'hylémorphisme (l'homme considéré comme composé unifié de matière et de forme), et la
théorie de la connaissance réaliste, c'est-à-dire qu'il considère qu'il n'y a rien dans l'intelligence qui
n'ait été auparavant du domaine des sens. Thomas donne du sens à l'analyse de l'homme en tant
qu'être de nature et non plus seulement en tant que créature. Il aura toujours eu une grande
conscience des limites de la nature humaine, mais aussi de ses capacités, aussi bien naturelles que
surnaturelles.
La morale de Thomas d'Aquin est finaliste[n 2], parce qu'elle a en vue une fin suprême, et naturaliste,
parce qu'elle se repose sur une anthropologie de la nature humaine précise et réaliste. L'homme doit
s'insérer dans l'ordre de l'Univers voulu par Dieu, c'est-à-dire faire ce pour quoi il a été créé :
connaître et aimer Dieu. La morale, parce qu'elle porte sur l'être humain, en tant qu'être composé
d'âme et de corps, doit intégrer dans son chemin toutes les inclinations sensibles, toutes les
passions, tous les amours, afin que l'homme arrive à sa fin dans toute son intégrité : cette fin est le
bonheur dans l'ordre naturel et la Béatitude dans l'ordre surnaturel. La vie morale consiste donc,
pour chaque homme, à développer au plus haut point ses capacités et ses possibilités naturelles sous
la conduite de la raison[17], et de s'ouvrir à la vie surnaturelle offerte par Dieu.
Philosophie et théologie diffèrent donc par l'objet premier de la connaissance humaine, et elles
diffèreront aussi en conséquence par leur méthode : il y a un statut épistémologique propre à chacun
de ces deux discours, ce qui pose la question de savoir si l'on aboutit dans les deux domaines à des
vérités qui s'accordent ou non et de quelle manière.
La thèse de Thomas est que foi et raison ne peuvent se contredire car elles émanent toutes deux de
Dieu ; la théologie et la philosophie ne peuvent donc pas parvenir à des vérités divergentes. C'est
l'argument de la double vérité que l'on trouve dans la Somme contre les Gentils[19] et dans la
question 1 de la Somme théologique : comme la lumière de la raison et celle de la foi viennent
toutes deux de Dieu, elles ne peuvent se contredire. Mieux encore, la foi se sert de la raison tout
comme la grâce se sert de la nature, c’est-à-dire que les vérités de la raison naturelle (ratio
naturalis) servent à éclairer les articles de foi.
Dans la Somme contre les Gentils[21], Thomas d'Aquin clarifie le concept de raison naturelle (ratio
naturalis) pour rendre compte de la foi chrétienne face aux objections de la raison, des hérésies et
des philosophes, tant anciens que contemporains, juifs et musulmans. Il y fait appel à la Bible ou
aux Pères dans les domaines de discussion proprement théologiques comme le mystère de l'être du
Christ. Thomas d'Aquin expose dans un premier temps des arguments purement rationnels afin de
montrer par la suite qu'ils coïncident avec la Bible. En ce sens, la raison naturelle sert de terrain
commun pour toute l'humanité et permet de prouver la cohérence entre les vérités révélées et les
vérités de raison. Toutefois, la raison naturelle ne peut parvenir « par ses propres forces » à la
compréhension totale des mystères révélés. En effet, la théologie dite naturelle[22] est ascendante :
elle va du bas (les créatures) vers le haut (Dieu) ; mais son développement est limité dans les cadres
du « per se » (pour soi). Dieu ne sera pas vu en ce qu'Il est lui-même « in se », mais en ce qu'Il est
pour nous ; par exemple, on ne peut savoir s'Il est créateur en Lui-même, mais à partir des créatures,
on peut inférer qu'Il est créateur « pour nous ». Au contraire la théologie fondée sur la Révélation
est descendante dans la mesure où elle part du haut (les vérités reçues de Dieu) vers le bas (les
créatures). La théologie n'est donc pas un discours déductif fondé sur la seule raison. Elle est par
nature connaissance de et par la Sacra doctrina : l'Écriture sainte reçue dans la tradition de
l'Église[23].
Thomas d'Aquin emploie des termes précis pour clarifier cette distinction foi/raison et leurs
communes interactions. Il appelle « révélable » (revelabile) les connaissances révélées accessibles à
la raison naturelle (comme l'existence de Dieu, par exemple) et « révélé » (revelatum) ce qui ne
peut être connu sans la Révélation (comme l'incarnation du Christ, par exemple)[24]. Il est possible
de connaître des objets inaccessibles à la raison naturelle au moyen de la grâce[25] :
« Les objets intelligibles présentant donc en Dieu deux sortes de vérité, l'une à laquelle peut
atteindre l'enquête de la raison, l'autre qui dépasse totalement les capacités de la raison humaine,
c'est à bon droit que Dieu propose l'une et l'autre comme objets de foi.[26] »
Il existe un dernier mode de connaissance de Dieu qui se fait dans la Béatitude, c'est-à-dire dans un
face-à-face avec l'essence divine.
Thomas d'Aquin est l'héritier du schéma explicatif dit « des quatre sens de l'Écriture » qui repose
essentiellement sur une distinction entre le sens littéral et le sens spirituel ou allégorique des textes
sacrés, diffusée dès l'antiquité par les auteurs du Nouveau Testament. Thomas en affine l'explication
théorique ou scolastique. Les choses signifiées par les mots de l'Écriture renvoient elles-mêmes à
d'autres choses. C'est ainsi que l'herméneutique scripturaire[27] de Thomas d'Aquin expose le sens
littéral ou historique comme étant le fondement des sens spirituels de l'Écriture : le sens allégorique,
le sens tropologique et le sens anagogique.
Thomas d'Aquin a consacré toute une question disputée (disputatio) à ces sens de l'Écriture : Le
Sens de l'écriture Sacrée - De sensibus Sacrae Scripturae en 1266.
Pourquoi tenter de démontrer l'existence de Dieu en plein milieu du XIIIe siècle, alors que
l'environnement est entièrement chrétien, et que Thomas s'adresse à des théologiens ? L'existence
de Dieu n'est-elle pas évidente et n'est-il pas inutile de la démontrer ? En fait, Thomas d'Aquin ne
cherche pas tant à prouver l'existence de Dieu qu'à trouver les conditions de possibilité qu'a
l'homme pour remonter à Dieu par les forces de sa raison.
Selon Thomas, qui s'oppose à Bonaventure, l'existence de Dieu n'est pas une évidence[n 3] : ce n'est
pas une idée innée que tout homme a en lui et que la simple réflexion (pour écarter les préjugés,
comme, plus tard, chez Descartes) lui fait découvrir. Thomas est aristotélicien : nous n'avons pas de
notion naturelle d'un être infini. Dieu n'est pas connaissable « en soi » ou en lui-même (in se), mais
seulement « pour soi » (per se), c’est-à-dire qu'on ne peut connaître de Dieu que ce qu'Il est pour
nous, non ce qu'il est en Lui-même. Thomas d'Aquin fonde ce problème sur une méthode différente
de celle et de ceux qui pensent que Dieu est évident par Lui-même, car Thomas va de l'existence à
l'essence : c'est un problème métaphysique qui le fait considérer les choses ainsi.
Nous pouvons cependant connaître que Dieu est par la « lumière naturelle », c’est-à-dire par la
raison. Nous ne sommes pas encore ici dans la véritable théologie ; que Dieu est, c'est ce que
montre la philosophie naturelle. Thomas reprend ainsi pour le montrer cinq voies de raisonnement
qui partent du réel existant pour monter jusqu'à Dieu. Et, dans ces trois manières de connaître Dieu,
il dit qu'on connaît plutôt le créé que l'incréé lui-même. Ainsi, par exemple, on ne saurait affirmer
avec notre seule raison que Dieu est créateur en lui-même, mais qu'Il est créateur par rapport à nous
en tant que nous sommes créés.
La méthode pour remonter à Dieu par la raison se résume à trois points : par mode de causalité (il
est la cause de ce monde), par mode de négation, c’est-à-dire en niant en lui ce qui est limite en
nous (par exemple : Dieu n'est pas matériel, mortel, localisé etc.), et par mode d'éminence, en
affirmant qu'il existe en lui éminemment ce qui est qualitatif en nous (par exemple : Dieu est amour,
intelligence, puissance).
Thomas d'Aquin dit qu'il y a cinq voies (quinquae viae) pour prouver que Dieu existe :
1° par le mouvement[30] : les choses sont constamment en mouvement, or il est nécessaire qu'il y ait
une cause motrice à tout mouvement. Afin de ne pas remonter d'une cause motrice à une autre, il
faut reconnaître l'existence d'un « Premier moteur non mû » : c'est Dieu.
2° par la causalité efficiente (ex ratione causae efficientis) : nous observons un enchaînement de
causes à effet dans la nature, or il est impossible de remonter de causes à causes à l'infini ; il faut
nécessairement une Cause Première : c'est Dieu.
3° par la contingence : il y a dans l'univers des choses nécessaires qui n'ont pas en elles-mêmes le
fondement de leur nécessité. Il faut donc un Être par Lui-même nécessaire qui est Dieu.
4° par les degrés des êtres : preuve reprise de Platon, qui a remarqué qu'il y a des perfections dans
les choses (bien, beau, amour, etc.) mais à des degrés différents. Or il faut nécessairement qu'il y ait
un Être qui possède ces perfections à un degré maximum, puisque dans la nature toutes les
perfections sont limitées.
5° par l'ordre du monde : on observe un ordre dans la nature : l'œil est ordonné à la vue, le
poumon à la respiration, etc. Or à tout ordre il faut une intelligence qui le commande. Cette
Intelligence ordinatrice est celle de Dieu.
Thomas d'Aquin n'avait aucunement pour but de prouver l'existence de Dieu ; il s'adressait en effet
à des étudiants en théologie (c'est-à-dire des frères prêcheurs, des prêtres, etc.), pour lesquels cette
existence était considérée comme acquise. L'intention de Thomas d'Aquin était plutôt de montrer
que l'on pouvait accéder à Dieu au moyen de la raison naturelle, en partant de ce que l'on constate
du monde[31]. C'est pourquoi il ne propose pas de « preuves », mais des « voies ».
Nous y découvrons que Dieu existe (qu. 2), qu'Il est simple (qu. 3), infini (qu. 7-8), parfait (qu. 4-6)
et immuable et éternel (qu. 9-10).
Premièrement, Il n'est pas corps : Dieu est le premier moteur immobile, or aucun corps ne meut à
moins qu'il soit mû, donc Dieu n'est pas un corps[32]. Il ne peut être composé de matière et de forme,
puisque la matière est en puissance et que Dieu est acte pur[33]. Son existence inclut l'essence ou
« Dieu est identique à son être » car l'acte d'exister ne demande que la cause d'existence, qui est par
soi en Dieu[34].
La Trinité est composée du Père (qu. 33), du Fils qui est Verbe et image, (qu. 33-35) et du Saint-
Esprit que l'on nomme par « Amour » et « Don » (qu. 36-38). Leurs relations sont étudiées de la
question 39 à la question 43 de la Somme théologique. Il y a en Dieu deux processions : celle de la
génération et celle de l'amour[35]. Thomas d'Aquin, afin d'expliquer l'unité substantielle des trois
Personnes divines a recours à la notion de relation[36].
Le Dieu Trinitaire et le Dieu unique sont une seule et même entité incompréhensible en elle-même.
Le Dieu de la foi (Trinitaire) n'est absolument pas en contradiction avec le Dieu de la raison (Dieu
Unique).
Nous nous situons là dans ce que Martin Heidegger appelait une onto-théologie, c’est-à-dire dans
un schéma où Dieu est concept rationnel avant d'être le Dieu de la foi : Dieu rentre en philosophie
avant d'entrer en théologie[37]. Cependant d'autres commentateurs, comme Étienne Gilson montrent
que la métaphysico-théologie de Thomas d'Aquin échappe à cette critique onto-théologique
d'Heidegger[38].
Le Christ [modifier]
Le Christ est le Fils, c'est-à-dire la personne Trinitaire qui est Verbe. La Christologie de Thomas
d'Aquin est développée dans la tertia pars de la Somme théologique en 90 questions (et 99 si l'on
compte le supplément). Le prologue de la tertia pars commence ainsi : « Notre Sauveur, le Seigneur
Jésus (…) s'est montré à nous comme le chemin de la vérité, par lequel il nous est possible
désormais de parvenir à la résurrection et à la béatitude de la vie immortelle. »[39] Dieu s'est incarné
(qu. 1-26) ; Il a souffert dans sa chair pour les hommes (qu. 27-59). Nous accédons à la vie éternelle
et aux sacrements par et dans le Christ. Son incarnation était convenable à Dieu : c'est ce que l'on a
appelé les raisons de convenance : « il apparaît de la plus haute convenance que par les choses
visibles soient manifestés les attributs invisibles de Dieu. Le monde entier a été créé pour cela,
selon l’Apôtre (Rm 1, 20) : “Les perfections invisibles de Dieu se découvrent à la pensée par ses
œuvres.” Mais, dit S. Jean Damascène, c’est par le mystère de l’Incarnation que nous sont
manifestées à la fois la bonté, la sagesse, la justice et la puissance de Dieu : sa bonté, car il n’a pas
méprisé la faiblesse de notre chair ; sa justice car, l’homme ayant été vaincu par le tyran du monde,
Dieu a voulu que ce tyran soit vaincu à son tour par l’homme lui-même, et c’est en respectant notre
liberté qu’il nous a arrachés à la mort ; sa sagesse, car, à la situation la plus difficile, il a su donner
la solution la plus adaptée ; sa puissance infinie, car rien n’est plus grand que ceci : Dieu qui se fait
homme. »[40]
Toujours dans ces raisons de convenance, Thomas d'Aquin se repose sur le bonum diffusium sui : le
Bien est ce qui se diffuse. Dieu se communique donc : « Aussi tout ce qui ressortit à la raison de
bien convient à Dieu. Or, il appartient à la raison de bien qu’il se communique à autrui comme le
montre Denys. Aussi appartient-il à la raison du souverain bien qu’il se communique
souverainement à la créature. Et cette souveraine communication se réalise quand Dieu s’unit à la
nature créée de façon à ne former qu’une seule personne de ces trois réalités : le Verbe, l’âme et la
chair »[41]
L'Incarnation, en plus d'être nécessaire au salut des hommes[42], par voie de nécessité superlative (de
la meilleure façon possible), est donc aussi la manifestation sensible de Dieu dans sa gloire, voulue
par Dieu Lui-même.
Thomas d'Aquin considère la création comme une action transitive venant de Dieu, c’est-à-dire
comme quelque chose émanant de lui, mais qui va retourner à Lui par un mouvement d’exitus
reditus (sortie / retour)[43]. La création est donc interprétée dans une dynamique métaphysique
intrinsèque aux choses.
Ainsi, Dieu, qui a créé le monde par pur amour, est le principe de toutes choses (en tant que
créateur), mais aussi la fin de toutes choses (en tant que fin ultime : la béatitude), car il a imprimé
aux créatures un mouvement vers lui. C'est ainsi qu'est organisée la Somme théologique, mais c'est
aussi ainsi que toutes choses, tout être, tout acte vont être situés et connus dans ce mouvement qui
émane de Dieu et qui y retourne[n 4]. Ce plan permettra de conduire le savoir rationnel jusqu'aux
causes divines des choses, et leurs finalités elles aussi divines.
Les Esprits purs ou anges sont le type de créature qui réalise en sa nature même le plus haut degré
de perfection de toute la création. L'angéologie thomiste est extrêmement importante en volume et
aux yeux de son auteur même. Elle comprend l'étude des anges, des démons, du maintien des uns et
de la chute des autres, de leurs relations entre eux, et de leurs relations avec les êtres humains.
L'angéologie thomiste représente de nombreuses questions dans la Somme théologique[45].
La question de la connaissance sensible repose sur le problème de connaître des réalités inférieures
à l'esprit. Cette conception originairement aristotélicienne trouve son degré d'achèvement et de
perfection chez Thomas d'Aquin. L'homme est un être composé d'un corps et d'une âme qui connaît
en puisant dans l'univers sensible. Les sens ne sont donc pas à renier puisque l'homme est un être
corporel plongé dans un monde corporel : les sens lui permettent d'être relié à ce monde corporel.
C'est notamment à partir de ces articles de la Somme que vont naître les diverses formes de
nominalisme médiévaux. C'est surtout contre les platoniciens que Thomas d'Aquin veut réaffirmer,
avec Aristote, l'origine sensible des idées.
Thomas d'Aquin écarte la position de Platon pour qui les idées sont des substances totalement
séparées des corps sensibles.
« Le fait de connaître ces substances séparées ne nous permettrait pas de juger des choses
sensibles[59]. »
Après cela, Thomas d'Aquin dit que l'intelligence connaît effectivement par les sens, mais selon le
mode propre de l'intelligence : universellement, immatériellement et nécessairement : « Disons
donc que l’âme connaît les corps au moyen de l’intelligence, d’une connaissance immatérielle,
universelle et nécessaire. »
Il faut aussi écarter la position de Démocrite pour qui les sens et l'intelligence étaient exactement la
même chose. Seul Aristote avait une position intermédiaire satisfaisante. C'est sur ce dernier que
Thomas d'Aquin s'inspire afin de développer une théorie de la connaissance réaliste.
« Aristote, lui, prit une voie intermédiaire. (…) Dans la mesure où il dépend des images, l’acte
intellectuel est causé par le sens[60]. »
Nous trouvons donc chez Thomas d'Aquin une interprétation du réalisme aristotélicien situé entre le
platonisme et l'empirisme de Démocrite, où l'intelligence est un intellect agent qui actualise
l'intelligence humaine à partir de perceptions sensibles, purement passives, car elles ne font que
recevoir l'action d'un objet extérieur. Ainsi, tout ce que nous connaissons par la sensibilité est
individuel ou singulier : seul l'intellect agent généralise ensuite les perceptions sensibles en idée
générale, c’est-à-dire en concept.
les sens externes sont les cinq sens (vue, odorat, toucher, ouïe, goût) qui permettent à
l'homme de faire expérience du monde matériel[n 8] ;
les sens internes sont le sens commun (discernement et synthèse des sensations), la
fantaisie, l'imagination, l'estimation et la mémoire[61].
Saint Thomas d'Aquin confond Averroès, par Giovanni di Paolo, 1445, 24,7 x 26,2 cm, Saint-Louis,
Art museum.
L'intelligence est une puissance de l'âme qui met en rapport cette dernière avec l'être universel. En
effet, l'intellect n'est pas la réalité tout entière, il est donc en puissance par rapport à elle. Et comme
l'intellect est en puissance par rapport à la réalité, il est passif par rapport à la réalité[62]. L'intellect
n'est rien mais peut tout devenir en ce qu'il reçoit, par le moyen des sens, l'impression de la réalité :
il est donc passif (intellect passif)[63].
Le sens cause l'acte de la connaissance sensible par le mode de l'image. Mais c'est par l'action de
l'intellect agent[n 9] que cette connaissance sensible se transforme en connaissance intellectuelle[64].
Quelle est la modalité de cette action de l'intellect ? C'est l'abstraction[65].
L'homme ne connaît, tout d'abord, que par les sens. La faculté de connaître le sensible, de qui tient
la connaissance sensible, ne connaît que les singularités : on ne connaît par la sensibilité que cette
pomme-là, ce chien-là, etc :
Ainsi l’intellect humain n'est pas l'intellect d'intuition des anges. Les Esprits purs (l'ange), de par le
fait qu'ils ne sont pas reliés à un corps, ne connaissent les êtres que dans leur forme immatérielle,
ou, dira Thomas d'Aquin, par intuition, c’est-à-dire sans passer par le mode sensible.
« Il y a une autre faculté de connaître qui n’est pas l’acte d’un organe et n’est unie en aucune
manière à la matière corporelle : c’est l’intellect angélique. »
— Somme théologique, qu. 85, art. 1
L’intellect humain connaît la forme à partir de l'image sensible fournie par les sens : Elle abstrait
une forme individuée dans une matière corporelle ; nous dirons par exemple qu'elle abstrait l'idée
d'homme de cet homme-là en particulier. L'intelligence connaît la nature des choses en abstrayant
les singularités d'une chose en particulier. L'idée se forme en abstrayant de l'intelligible dans les
données de l'expérience sensible ; c'est exactement le sens de ce passage : « Or, connaître ce qui
existe dans une matière individuelle, mais non en tant qu’elle existe dans telle matière, c’est
abstraire de la matière individuelle la forme que représentent les images ». Il serait également
possible de parler « d'extraction ». Nous comprenons maintenant pourquoi la connaissance
intellectuelle est dite abstraite. Mais il existe plusieurs niveaux d'abstraction, selon que l'intelligence
abstrait plus ou moins du singulier dans une chose.
« Or, connaître ce qui existe dans une matière individuelle, mais non en tant qu’elle existe dans telle
matière, c’est abstraire de la matière individuelle la forme que représentent les images. Et c’est
pourquoi on doit dire que notre intelligence connaît les réalités matérielles en les abstrayant des
images. »
— Somme théologique, qu. 85, art. 1
L’objet de l'intelligence est la réalité de façon intentionnelle. Dans l'ordre de la connaissance, les
facultés sensibles extraient une image sensible d'une matière et la fournissent à l'intelligence, plus
précisément à l'intellect passif[66]. L'intellect agent est cet acte qui extrait la forme de l'image
sensible[67] : c'est cette faculté qui procède par abstraction. Thomas d'Aquin nous dit[68] : « il y a le
même rapport entre l'espèce intelligible et l'intelligence qu'entre l'espèce sensible et le sens. »
L'intelligible est donc ce par quoi l'intelligence comprend, et non ce qu'elle connaît. C'est un point
d'importance capitale : on ne connaît pas le concept, mais le concept est ce qui nous fait connaître.
On appellera cela le réalisme des idées : « ce qui est premièrement connu, c'est la réalité dont
l'espèce intelligible est la ressemblance. »[n 10]. Ainsi l'objet (concept ou image) intelligence est le
réel, mais de façon intentionnelle : de façon similaire. C'est à ce stade qu'on retrouve ensuite
l'intellect passif, car c'est lui qui est ce qui est connu de façon intentionnelle[69].
Il est important de parler de l'erreur d'Averroès parce que Thomas d'Aquin y consacre tout un
ouvrage : Contre Averroes. Thomas d'Aquin développe sa théorie de la connaissance intellectuelle à
partir des ouvrages d'Aristote (notamment du De anima). Or Thomas d'Aquin y a eu accès avec les
commentaires des musulmans, notamment d'Averroès (voir illustration). Thomas reprend les
commentaires, commente Aristote avec eux, mais les abandonne quand ils vont trop loin. C'est le
cas d'Averroès lorsqu'il parle de l'intellect humain comme étant séparé et commun à tous.
« Depuis longtemps beaucoup d’esprits se sont laissé surprendre par l’erreur d’Averroès, qui
s’efforce de prouver que l’intellect, qu’Aristote reconnaît comme possible, par une dénomination
fausse, est une espèce de substance séparée du corps quant à l’essence, et qui lui est unie, d’une
certaine façon quant à la forme ; et de plus, qu’il est possible qu’il n’y ait qu’un intellect commun
pour tous : depuis longtemps nous avons réfuté cette erreur.[70] »
L'intellect actif et l'intellect agent ne sont pas, comme le pense Averroès, dans deux sujets distincts
mais dans une seule substance individuelle[71]. Alors l'intellect humain est sous différents rapports
en acte et en puissance par rapport à la réalité[72].
Suivant le degré selon lequel l'intellect abstrait des images sensibles des formes intelligibles,
l'essence de la chose (res) s'en retrouve plus ou moins éloignée de ses qualités sensibles premières.
Par le procédé d'abstraction, l'intelligence explore à diverses profondeurs ou zones d'intelligibilité la
chose même. Il est possible d'en distinguer trois[73] :
1. laissant de côté les caractères singuliers de la chose, on découvre les natures et les lois
universelles de cette chose. On trouve à ce degré les sciences expérimentales telles que la
physique ou la biologie. Ces sciences découvrent la forme de la chose dans ses caractères
sensibles mêmes ;
2. laissant de côté les propriétés physiques et sensibles de la chose, on ne considère plus que
l'accident quantité ; on retrouve à ce degré la mathématique, qui ne s'occupe que des
relations quantitatives dans la nature même de la chose, ou dans ses relations avec les autres
choses ;
3. laissant de côté les quantités et les propriétés physiques des choses, on est dans la
métaphysique, qui est donc la science la plus abstraite en ce qu'elle ne s'occupe que de l'être
de la chose en tant qu'être, c’est-à-dire qu'elle traite de l'ontologie. C'est donc par là même
qu'elle est la science la plus « universelle » et la plus « abstraite ».
La métaphysique [modifier]
L'analogie de l'être est le concept clef de toute la métaphysique thomasienne, car il rend compte de
l'unicité du réel tout en maintenant sa multiplicité, et lui imprime un mouvement dynamique et
hiérarchique vers Dieu, terme vers lequel tout étant tend et s'ordonne.
L'être ne se réalise pas de la même façon dans toutes les choses, tout en étant le même. C'est donc,
conclut Thomas d'Aquin, qu'il se réalise à des degrés divers dans les choses, en se proportionnant à
la diversité de ces degrés. Il se hiérarchise intrinsèquement dans toutes les choses selon qu'elles se
rapprochent plus ou moins de l'Être en plénitude, Dieu, car toute hiérarchie implique une relation ou
une référence à quelque chose d'unique[75]. Cette hiérarchie ontologique est une « analogie de
proportionnalité ». Tous les êtres font référence à quelque chose d'unique, Dieu[n 11].
La théorie de l'analogie de l'être pose problème aux commentateurs de Thomas d'Aquin en raison
des points de vue divers à partir desquels Thomas aborde le sujet, toujours de biais et par occasion,
au fil de son œuvre. L'étude de synthèse disponible la plus complète actuellement sur la question, en
raison de sa lecture historique du développement de la pensée thomasienne sur la question, est celle
de Bernard Montagnes[76]. Deux écoles s'affrontent de manière irréductible, celle de S. Thomas[77] et
celle de Cajetan[78]. Elles « manifestent que la philosophie de l'être peut se développer selon deux
directions rigoureusement parallèles et se construire sous la forme de deux thématiques dont les
solutions ne sont ni interchangeables ni convergentes. » (B. Montagnes, op. cit., conclusion). Deux
voies se présentent qui chacune déterminent une métaphysique particulière : selon une première
approche, l'analogie tend à réduire le multiple à l'un par voie conceptuelle, au risque de confondre
l'être avec son concept ; selon l'autre approche, l'analogie tend à mettre en évidence les rapports de
causalité qui relient les êtres à la Cause première et tend à dissoudre l'être participé dans l'acte
premier dont il est participe.
Parmi la création tout entière, l'homme est considéré comme une créature raisonnable à laquelle est
imprimée intrinsèquement la fin dernière de remonter à Dieu (en vertu de la dynamique
métaphysique de l'exitus reditus) jusqu'à la béatitude[81] ; de plus, « l'homme porte la ressemblance
et représente l'image de Dieu »[82], ce qui le rend capable de se diriger librement vers les fins qui lui
semblent les meilleures et d'utiliser les moyens qui lui semblent les plus appropriés. Nous
retrouvons ici toute une philosophie morale de la responsabilité en tant que libre finalité, très
marquante dans l'œuvre entière de l'Aquinate ; on retrouve cette thèse déclinée sous la forme de
l'« autonomie des réalités terrestres ». Être autonome, c'est se donner des lois (autos-nomos en
grec). Ainsi l'homme doit se dicter des lois à lui-même, mais ces lois se situent à un niveau
comportemental : ce sont des lois qui doivent permettre d'utiliser les bons moyens pour arriver à
une bonne fin et qui doivent respecter les lois que Dieu a révélées[83].
On conçoit dès lors très rapidement deux des statuts du bien pour l'homme : il caractérise ce qui est
le mieux adapté à la réalisation d'une fin et la pertinence de cette fin par rapport à la nature
humaine. C'est donc toute la question de l'agir selon la nature humaine en vue d'une fin propre à la
nature humaine. Cette créature raisonnable qu'est l'homme se retrouve donc plongée avec ses
responsabilités dans une nature ordonnée par une Intelligence supérieure : c'est dire qu'il s'agit alors
pour l'homme de se maintenir dans l'ordre naturel des choses, et que la question principale de la
morale se résume à adapter ses actes et ses fins à cet ordre.
L'axiome principal qui va normer tout le sujet est le suivant : si Dieu a donné un corps à l'être
humain, c'est que c'est forcément bon pour ce dernier et qu'il est fait pour être utilisé. Il n'y a aucune
dualité en l'homme selon Thomas d'Aquin : l'âme et le corps constituent un seul être. En effet, si
l'âme et le corps sont deux principes ou deux réalités différentes, ils ne sauraient exercer la même
activité « des réalités ontologiquement diverses ne sauraient exercer d'activité une ». Or lorsque
l'homme agit, il agit de tout son être, son acte est un[84]. L'âme est donc la forme (selon la
terminologie d'Aristote) de l'homme, et le corps sa matière[n 12]. C'est la logique de l'hylémorphisme
aristotélicien : l'âme est la seule forme du composé humain auquel elle donne d'être un corps vivant
et sensible[n 13].
Ce fut un des grands travaux de Thomas d'Aquin d'avoir dépassé la conception néo-platonicienne de
l'âme enfermée dans un corps en appliquant l'hylémorphisme aristotélicien à une conception
Chrétienne de l'homme. La substance même de l'homme se trouve ainsi pleinement dans le monde
des êtres matériels : l'homme n'a plus un corps, mais « l'homme est un corps »[85]. La forme du
corps, c'est-à-dire l'âme, est le principe vital de l'homme, ce qui lui donne la nature d'homme. Le
corps est la matière, il donne à l'homme ses caractéristiques singulières : le corps est donc principe
d'individuation, ce qui fait qu'un homme est tel homme, et non un autre. L'hylémorphisme est cette
conception d'une substance en tant que « composé » de matière et de forme. L'homme est donc une
unité substantielle ou ontologique. Ainsi quand l'homme pense, c'est tout le composé corps/âme qui
pense en même temps, de même lorsqu'il agit, ou fait une activité sportive. Thomas d'Aquin ouvre
ici une clef d'interprétation métaphysique à toute la problématique psychosomatique (des
interactions âme/corps). Remarquons qu'il en est de même pour la connaissance intellectuelle qui
commence par les sens, et nécessite donc le corps.
Il est possible de distinguer trois parties dans l'âme, qui reste cependant une[86] :
On retrouve une description précise des actes humains dans la prima secundae (Ia, IIae) de la
Somme théologique. C'est un axiome de Thomas d'Aquin que d'affirmer que « s'il y a des actes qui
sont dits humains, c'est en tant qu'ils sont volontaires »[89]. Mais le fait qu'un acte soit volontaire ne
prouve pas qu'il soit libre. Un acte est dit véritablement humain lorsqu'il est un acte volontaire libre.
Le mot volontaire « signifie que l'acte naît d'une inclinaison propre »[90]. La volonté naît donc d'un
désir qui provoque une inclinaison. Cette inclinaison est voulue lorsque l'homme y consent. La
volonté se meut donc vers une fin, qui représente la fin de l'inclinaison qui a suscité cette volonté ;
or cette fin doit lui être connue : « pour qu'une chose se fasse en vue d'une fin, une connaissance
quelconque de cette fin se trouve requise »[91]. Mais cette fin doit lui être connue par la raison. Dans
cette définition de la volonté, on voit déjà poindre le fait que l'acte ne peut être véritablement
qualifié d'acte volontaire que si : premièrement, il est fondé en raison, et deuxièmement, s'il
coïncide avec une vraie tendance de la nature humaine. Et de surcroît, la volonté domine
indifféremment tous les biens : c'est ce qui lui confère sa liberté et la qualifie d'acte volontaire libre.
Pour résumer :
1° l'acte humain est volontaire, rationnel et libre ; s'il ne remplit pas une de ces deux
caractéristiques, il ne peut être qualifié d'acte humain mais il sera qualifié d'acte immoral ou animal.
2° la volonté est dite interne en ce qu'elle choisit une fin et externe en ce qu'elle choisit et exécute
les moyens de l'atteindre.
L'étude des passions est fondamentale : l'homme est un être mû par ses passions, en tant qu'il est
unité d'âme et de corps. La passion est un pâtir (pati), issu de l'extérieur, par différentes modalités,
qui vient modifier l'appétit sensible. On ne peut choisir de ressentir ou non la passion car il
n'appartient pas à l'homme en propre, mais seulement en tant qu'animal ; n'étant pas humaines en
propre, elles ne font pas partie de la sphère morale, puisque cette sphère ne régit que les actes
volontaires libres, qui appartiennent en propre à l'homme. L'âme et le corps s'éprouvent
constamment l'un l'autre : ainsi lorsque l'âme éprouve le corps, il s'agit d'une « passion corporelle »
et lorsque le corps éprouve l'âme, il s'agit d'une « passion animale » (puisque provoquée par l'âme,
anima). Ainsi la passion est une modification de l'âme qui provient du corps[92]. Les passions sont
provoquées, se développent et se produisent dans le composé humain : l'étude des passions repose
donc sur une anthropologie hylémorphique. Elles se situent dans ce que Thomas d'Aquin appelle
l'appétit sensible, qui provoque le mouvement vers un objet qui intéresse le corps[93].
Thomas d'Aquin distingue différents types d'appétits desquels vont naître les passions[94] :
l'appétit naturel qui est mouvement d'un être vers ce qui l'intéresse en raison de sa nature
propre ; le sujet se déplace vers tel objet parce qu'il en a ontologiquement besoin de par sa
nature même, en raison d'une certaine connaturalité entre l'objet et le sujet.
l'appétit sensible est déclenché par les sens en tant qu'ils perçoivent quelque chose de
délectable ou de nécessaire en propre (la nourriture, par exemple) ou en raison de l'espèce
(la génération, par exemple)
l'appétit intellectuel est un désir réfléchi, entièrement soumis à la raison dans un jugement
rationnel libre : c'est la volonté.
L'amour est principe fondamental des passions en tant qu'il permet le dynamisme premier entre un
sujet et son objet, et réveille l'appétit, le mouvement proprement dit du sujet vers son objet. Il est
principe du mouvement, et non le mouvement lui-même[95].
La science morale se donne pour but d'amener l'homme tout entier (animalité comprise) à une vie
bonne : elle doit donc non pas repousser les passions, mais les intégrer dans les actes volontaires et
en faire un usage bon, car c'est l'usage que l'on fait de la passion qui la rend bonne ou mauvaise ;
elle n'est elle-même que moralement neutre. Mais ce qui importe, c'est que la présence ou l'absence
et le degré d'éloignement du bien recherché va influer grandement sur la sensibilité entière de l'être
humain, et donc avoir d'importantes répercussions au plan physiologique et psychologique.
Dans l'ordre des passions, on peut effectuer une distinction entre les passions de l'irascible
(irascibilis) et les passions du concupiscible (concupiscibilis)[96]. La première est un mouvement qui
évite ou détruit les obstacles vers le bien, la deuxième est le mouvement qui va aller vers ou fuir du
bien en question.
Le triomphe de saint Thomas d'Aquin, Francisco de Zurbarán, 1631, 475 x 375 cm, Séville, Musée
provincial des beaux-arts
La créature raisonnable qu'est l'homme dans le monde en tant que système de choses est pris dans
cette dynamique qui part de Dieu comme en son principe et qui y retourne de façon rationnelle[97] :
c'est le mouvement de l'exitus reditus où l'homme provient de son Créateur et y retourne au moyen
d'actes ordonnés à sa propre nature[98].
Dieu imprime donc une direction aux choses en les créant, et la direction imprimée à la créature
raisonnable est de retourner à Dieu au moyen de leurs actions qu'ils choisissent eux-mêmes
librement[99]. C'est le choix de ces moyens corrélatifs à cette fin ultime qui constitue le propre de la
science morale.
Thomas d'Aquin conceptualise sa vision optimiste de l'homme et du monde pour faire germer au
cœur de la vie morale la possibilité naturelle d'accéder au bonheur, c’est-à-dire sans le secours
surnaturel de la Grâce, bien que ce n'est pas sans ce secours que l'homme peut accéder à un bonheur
parfait en ce monde.
Ainsi, comme il y a une destinée surnaturelle de l'homme, il y a aussi une destinée naturelle : cette
destinée est le bonheur, et il consiste à bien agir, c'est-à-dire à agir selon sa nature propre, à se
maintenir dans l'ordre naturel des choses, ordre qui ne peut qu'être bon puisqu'il est créé directement
par Dieu.
C'est donc le rejet de toute artificialité, qu'elle soit individuelle ou collective, et une question
d'adaptation de l'homme à lui-même et au monde qui l'entoure : ce n'est que dans cette optique que
l'homme fera bien, car il ne tentera pas de se soustraire au gouvernement divin, mais bien plutôt à
s'y adapter.
La vertu [modifier]
Tout agir humain repose sur des dispositions de l'âme que l'on appelle vertu. La vertu est un avoir
(habitus)[100] acquis et possédé durablement dans l'âme qui « favorise chez l'homme le bon agir »[101]
et grâce auquel il atteint le bonheur et aide à l'adéquation raisonnable entre les fins et la nature
humaine. C'est donc un « principe intérieur » des actes humains. Étant donné que les vertus sont
indispensables pour le bon développement de la vie morale, et donc des biens qui va en découler, il
est nécessaire de les inclure dans cette étude sur le bien de l'homme. D'autant plus que la vertu est
définie comme étant une bonne disposition de l'âme et comme ce qui rend bon : « la vertu est ce qui
rend bon celui qui la possède »[102], car la vertu est ce qui oriente durablement l'âme vers le bien[n 14].
les vertus appétitives ou morales, qui sont dans la partie sensible (ou irrationnelle) de
l'âme
les vertus intellectuelles, qui sont dans l'intellect, soit spéculatif, soit pratique[103]
les vertus théologales, ou les dons du Saint-Esprit.
La vertu morale maintient l'homme qui les possède dans le juste milieu entre différents états qui
tiennent de sa sensibilité ; par exemple le courage est l'état de l'homme qui n'est ni lâche, ni
téméraire[104]. Or ce milieu est celui qui convient à l'être humain : il est ainsi à sa place, ni dans un
agir par défaut (lâcheté), ni dans un agir par excès (témérité), mais dans un agir proprement humain
car raisonné par une vertu intellectuelle qu'Aristote et Thomas d'Aquin nomment la tempérance
(c'est la vertu intellectuelle qui a rapport à la capacité calculatrice de l'âme rationnelle). Ainsi les
vertus morales ne peuvent se passer des vertus intellectuelles[105]. Ainsi l'agir vertueux est celui qui
ordonne au bien parce qu'il est l'agir qui correspond le mieux à la forme substantielle de l'homme
qui est d'être une créature raisonnable. Le problème proprement moral de la distance entre l'homme
et sa nature humaine trouve sa solution (à mettre en pratique) dans la vertu : c'est en agissant
vertueusement que l'homme agit en homme, et agit donc bien.
Parmi les vertus intellectuelles, il y en a qui sont primordiales par rapport aux autres : ce sont les
vertus cardinales. Il y en a quatre[106] :
« l'intelligence » ;
« la sagesse » ;
« la simple intelligence » pour la partie spéculative de l'âme ;
« la prudence » pour la partie calculatrice de l'âme rationnelle.
C'est la prudence qui est la principale des vertus cardinales, c'est la plus nécessaire au bon agir
humain : « la prudence est la vertu la plus nécessaire à la vie humaine. »[107].
Les vertus théologales sont ainsi dénommées parce qu'elles ont pour objet Dieu et qu'elles sont
causées par Lui. Elles transcendent les simples possibilités de la nature humaine, car elles sont
justement fondées sur Dieu : « les vertus intellectuelles et les vertus morales perfectionnent
l'intelligence et l'appétit dans les limites de la nature humaine ; mais les vertus théologales,
surnaturellement »[108]. L'homme ne saurait effectivement pas être renfermé sur lui-même alors qu'il
est précieux à Dieu : la Grâce lui permet d'accéder à une pratique des vertus théologales, qui
transcendent l'agir humain naturel. Cette vie est la « vie surnaturelle » de l'homme. Elles sont
étudiées dans la secunda secundae de la Somme théologique des questions 1 à 46. Il y a :
Est dit libre un être qui est principe de ses actes. Ainsi le problème de la liberté est explicitement
mêlé à la question de l'acte volontaire. C'est le jugement, dans l'acte de délibération[110], qui permet
de déterminer si un objet est bon ou non, adapté à la situation, au sujet, etc. mais ce jugement est
entièrement libre, absolument rien ne s'oppose à lui. Il s'agit bien sûr du jugement rationnel, et non
du jugement instinctif, qui lui est déterminé par la sensibilité. En effet, les passions et toutes les
inclinations de la sensibilité ne déterminent pas totalement la volonté à aller dans un sens plutôt
qu'un autre, puisqu'elles sont soumises à la raison : « Quant aux manières d’être surajoutées, ce sont
les habitus et les passions, qui inclinent un individu dans un sens plutôt que dans l’autre. Toutefois
ces inclinations elles-mêmes sont soumises au jugement de la raison. De plus, ces qualités en
dépendent encore, par le fait qu’il nous appartient de les acquérir, en les causant ou en nous y
disposant, ou encore de les rejeter. Et ainsi, rien ne s’oppose à la liberté de décision »[111]. Par
contre, l'homme qui suivrait toujours ses désirs et ses passions ne pourrait pas être considéré comme
libre puisqu'il agit en dehors du contrôle de la raison et est soumis à ses inclinations sensibles,
purement déterminée physiologiquement. Le libre arbitre n'est ni une puissance de l'intellect, ni une
puissance de l'appétit, mais des deux en même temps : « Le choix est ou bien un intellect qui veut,
ou bien un appétit qui juge »[112].
Une fois que l'intelligence a choisi ce qu'elle veut faire, c'est la volonté qui prend le relais et qui est
l'efficience de l'acte libre, car elle mène l'intention à sa fin. Et la volonté est dite libre parce qu'elle
est libre de contrainte et de nécessité[113]. Libre de contrainte car elle ne subit pas par nature de
violence qui la font dévier de son inclination, et libre de nécessité sans quoi elle ne pourrait pas être
louée ou blâmée : « L’homme possède le libre arbitre, ou alors les conseils, les exhortations, les
préceptes, les interdictions, les récompenses et les châtiments seraient vains »[114].
Le libre arbitre se situe dans le choix et la délibération de l'intelligence. Ainsi l'acte dépend de ce
choix que permet la liberté[115].
Thomas d'Aquin, en suivant l'Ethique à Nicomaque d'Aristote, développe une morale finaliste, c'est-
à-dire que tous les actes humains sont effectués en vue d'une fin, et toutes les fins en vue d'une fin
suprême. La partie morale est extrêmement importante en volume dans toute l'œuvre de Thomas
d'Aquin. Les actes moraux vont en effet permettre à l'homme de remonter jusqu'à Dieu. Tous les
commentateurs contemporains se sont accordés sur ce point, d'Étienne Gilson, dans Saint Thomas
moraliste, à Jacques Maritain, dans Principes de la morale naturelle.
Les biens sont hiérarchisés proportionnellement : tous les biens sont voulus d'une manière
subordonnée par rapport à un bien suprême[116] (par exemple la santé en vue de la possibilité d’un
épanouissement social ou encore l’acquisition d’une technique afin de s’en servir à des fins utiles
comme le soldat apprend le maniement de l’épée afin de pouvoir tuer son ennemi), donc relative les
uns aux autres, et cela parce qu'il y a une fin suprême qui lui est voulu d'une manière absolue, qui
est en quelque sorte le sommet de l'analogie : le soldat a tué son ennemi afin de gagner la bataille,
victoire qui permettra de vivre en paix, ce qui permettra aux citoyens de s’épanouir, etc. cela
jusqu’à une fin suprême qui sera voulue pour elle-même, et non en vue d’autre chose. Sans elle, rien
ne serait subordonné et tous les biens se vaudraient. Toutes les autres choses ne sont recherchées
qu'en vue de cette fin : « Tout ce que l'homme veut ou désire, il est nécessaire que ce soit pour sa fin
ultime. »[117]. Cette fin ultime peut être librement choisie, mais elle est le plus souvent plus ou moins
consciente et plus ou moins déterminée par des phénomènes physiologiques et psychologiques.
L'expérience nous montre d'ailleurs bien que tous les hommes, qu'ils le reconnaissent ou non, qu'il
en aient clairement conscience ou non, agissent tous en vue d'un but qu'ils veulent d'une manière
absolue et auquel sont subordonnés tous leurs actes ; ainsi l'avare n'agit qu'en vue de l'argent, pour
certains artistes c'est en vue de la beauté, pour un hitlérien c'est en vue de l'expansion vitale de la
race allemande, pour un marxiste révolutionnaire c'est en vue de la puissance matérielle du
prolétariat. Cependant, un homme ne peut avoir qu'une seule fin ultime : « il est impossible que la
volonté d'un homme se dirige en même temps vers divers objets comme des fins ultimes »[118].
Thomas d'Aquin place le bien suprême de la vie morale naturelle, dans ce qu'il appelle le bonheur,
et le bien suprême de la vie surnaturelle dans la béatitude, c'est-à-dire la connaissance de Dieu[n 15].
C'est la fin de tous les hommes : « l'homme et les autres créatures raisonnables [les anges]
atteignent leur fin ultime par la connaissance et l'amour de Dieu »[119]. Pourquoi cette seule fin, alors
qu'il est clair que tous les hommes ne s'accordent pas sur leurs fins ? Parce que la raison formelle de
fin dernière est le bien parfaitement comblant, et seul Dieu est parfaitement comblant[120]. Comme la
vie surnaturelle est infiniment supérieure à la vie naturelle, la béatitude (appelée « béatitude
parfaite » par les commentateurs) est un bien infiniment plus parfait que le bonheur (appelé
« béatitude imparfaite » par les commentateurs).
Thomas d'Aquin explique pourquoi certains biens inférieurs dont on est privé causent plus de
désagrément que la privation d'un bien supérieur : « il est dans la nature d'une privation de
contrarier la volonté. Cependant, chaque homme n'apprécie pas toujours dans sa volonté les biens
selon la vérité : il se fait qu'une chose puisse priver d'un grand bien sans contrarier la volonté pour
autant qu'il ait moins raison de peine. […] Ainsi beaucoup jugent les peines corporelles supérieures
aux peines spirituelles : leur jugement sur la hiérarchie des biens est alors faussée. »[121] Et leur
jugement est faussé par l'immédiateté de la privation inférieure, par leur non-capacité d'abstraction.
Ainsi ne pas être riche, pécuniairement parlant, cause plus de peines que de ne pas être vertueux,
par exemple, et « c'est pourquoi ils voient souvent les pécheurs jouir de la santé corporelle et
posséder la fortune extérieure dont les hommes vertueux sont parfois privés »[122]. Et cette « fausse
injustice » leur cause plus de peine que la privation même de la vertu car ils ne considèrent pas la
hiérarchie des biens à sa véritable valeur.
On voit bien que cette considération de la hiérarchie des biens se fait sous le mode intellectif, et que
seule la raison permet d'en rendre compte. Le statut de la raison prend alors une nouvelle
dimension. Ce n'est plus seulement la faculté de juger ce qui est bon ou non, mais aussi d'embrasser
la vie tout entière par une objectivité abstractive et de replacer chaque bien à sa véritable place,
celle qui est voulu par l'ordinateur de toutes choses et qui constitue l’essence même du Bien unique
à partir duquel tous les autres biens prennent de la valeur : Dieu.
L'Amour [modifier]
La notion d'amour chez Thomas d'Aquin pose problème aux commentateurs : certains considèrent
qu'il faut placer Thomas dans les conceptions physiques de l'amour, comme le père Rousselot ;
d'autres, comme E. Gilson, le place plutôt dans la conception « extatique », c'est-à-dire qui nous fait
sortir de notre être ; ou bien encore comme le P. Geiger qui considère que l'amour est une notion
qui touche le bien dans toute son universalité[123].
L'amour (amor, dilectio, caritas, amicitia)[124] est un mouvement interne ou externe de l'être humain.
Il comprend en lui toutes les formes d'appétits, qu'ils soient sensibles ou rationnels, mais ne se
réduit pas à eux.
L'amour et le bien sont corrélatifs : tous deux sont des notions analogiques, des transcendantaux, et
Dieu les possède en absolue plénitude : ce qui veut dire que la béatitude, en tant que connaissance
de Dieu, est le Bien suprême de l'homme, mais que l'amour de Dieu est partie constituante de la
béatitude, car c'est le propre de l'homme que d'aimer ce qu'il juge comme bien, et plus encore
lorsque ce bien le dépasse infiniment.
L'amour est d'abord une passion, en tant qu'il est le principe premier de tout mouvement de la
volonté ou d'une faculté appétitive quelconque vers le Bien : « l'amour a rapport au bien en général,
qu'il soit possédé ou non. C'est donc l'amour qui est par nature l'acte premier de la volonté ou de
l'appétit »[125]. L'amour, en sa dimension de principe des actes humains, constitue dès lors le
fondement de toute morale. Il n'y a rien qui se fasse sans amour, et il n'y a pas de bien s'il n'est aimé
auparavant. L’amour est donc principe de l’agir en général. Nous ne pourrons ici nous étendre sur
l’amour en ses cas particuliers, car il y a en fait autant de qualités d’amour que de qualités de bien :
l’amour porte vers le bien, mais reçoit sa dignité du bien vers lequel il porte.
L'amour volontaire n'est donc pas déterminé uniquement par le bien individuel et égoïste, mais par
le Bien et l'être en général : l'amour est donc dans un lien de dépendance avec la connaissance. C'est
ainsi qu'il devient un amour rationnel, ou volontaire (il se nomme alors dilectio)[126]. Il devient un
pouvoir psychologique autonome par rapport à l'appétit sensible : ce dernier n'étant un bien qu'en
vertu de l'ordre ontologique du sujet, c'est-à-dire de ce qui lui convient en propre, alors que la
dilectio est une réalité psychologique autonome car reposant sur l'intellect et le libre-arbitre. Il en
résulte que cet amour est amour de soi mais essentiellement « amour objectif » ; il surpasse
l’appétit, le désir ou la convoitise, tout en les incluant. Dans cette perspective, un amour
désintéressé ne fait aucune difficulté ; et un amour désintéressé prend son objet dans sa qualité de
bien honnête.
L'amour pousse donc au bien, en sa qualité de puissance motrice ; il permet une constance dans la
recherche vertueuse du bien, en sa qualité de puissance appétitive rationnelle, et il permet d'ouvrir la
sphère purement individuelle de la recherche et de la jouissance du bien à une sphère élargie à
l'autre, individu ou communauté, en tant qu'aimé. La notion d'amour introduit également de l'altérité
et de l'éthique (ethicorum) dans les comportements moraux. En effet, aimer quelque chose dans
l'ordre du bien honnête, c'est lui vouloir du bien : « l'amour consiste principalement en ce que l’ami
veut du bien à celui qui aime »[127]. Le bien particulier est inférieur au bien politique ou
communautaire, et plus encore, il y tend : « Le bien particulier tend au bien commun comme à sa
fin (…) de là, le bien de la communauté est plus divin que celui de l'individu »[128]. Ainsi le bien se
diffuse à travers toutes les réalités qui entourent l’être humain sous la modalité de l’amour (c’est
tout le sens du bonum diffusium de Thomas d'Aquin), et prend par là même le rôle de principe
fondateur de toute sociabilité et de toute vie communautaire : la vie de famille, la vie sociale, la vie
politique, et même tout rapport singulier d’un individu à l’autre, qui ont une visée constructive et
bonne, reposent sur l’amour en tant qu’il est partage de bien (bien matériel, utile, agréable,
intellectuel, intéressé, vertueux, jouissif, etc.).
L'amour devient charité (caritas) lorsqu'elle est une vertu théologale, c'est-à-dire une vertu qui vient
et qui a pour objet Dieu. Thomas d'Aquin se situe donc sur un registre surnaturel lorsqu'il parle de la
charité. Les vertus morales ne peuvent exister sans la charité[129]. C'est donc que des vertus
naturelles, immanentes à la nature humaine (les vertus morales) ont un fondement surnaturel en tant
qu'elles reposent sur la charité, qui est une vertu théologale[130]. La charité est une amitié avec Dieu,
c'est-à-dire une réciprocité fondée sur la Grâce. Fondamentalement, elle repose sur le fait que Dieu
doit un jour partager sa béatitude avec l'homme[131]. Nous nous trouvons encore une foi dans le
registre du partage et de l'ouverture, qui est permis par l'amour. De plus, elle ajoute une certaine
perfection à l'amour passion (amor)[132].
Politique [modifier]
La conception politique de Thomas d'Aquin se dessine de façon très nette dans son œuvre, bien qu'il
n'ai pas consacré un ouvrage à ce sujet. Sa réflexion politique est bien sûre nourrie par celle
d'Aristote, notamment lorsqu'on considère que Thomas a commenté le Livre sur les politiques, ou
Politique. La politique est enracinée dans la question de la communauté de nature entre les êtres
humains, d'où la question de l'amitié (en grec philia), et se développe jusqu'à la sphère de
communauté divine et religieuse.
La communauté est naturelle à l'être humain : sa conception politique repose donc sur une
anthropologie naturaliste. En effet, Thomas fait sien cette parole d'Aristote[133] : l'homme est un être
social, ou plus précisément : « En tout homme il y a comme un élan naturel à la vie sociale,
comparable au goût pour la vertu ». C'est ainsi que la société s'établit sur un penchant naturel et bon
de la nature humaine.
Thomas dit, lors de son prologue au Commentaire du livre de la politique d'Aristote : « les procédés
artificiels ne peuvent qu'imiter les opérations naturelles » ; ainsi l'institution de la cité n'est pas un
processus purement artificiel, mais se fonde sur les communautés naturelles telles que la famille[134].
Mais plus que le lien communautaire familial, qui est naturel par excellence, le lien politique est la
raison[135]. Et cette institution politique qu'est la cité a en vue le bien de tous, visé de façon
raisonnable : « La cité poursuit un certain bien. »[136]. Plus encore, elle poursuit le bien suprême :
« Plus encore, elle recherche le meilleur des biens humains », c'est-à-dire le bien divin : tout, dans la
cité, doit permettre à l'individu de pratiquer bien sa religion, et doit viser le bien de la communauté,
qui est supérieur au bien individuel. Le bien commun ne doit pas être sacrifié au bien d'un seul :
« Au bien d'un seul on ne doit pas sacrifier celui de la communauté : le bien commun est toujours
plus divin que celui de l'individu.[137] »
Chaque individu est une partie organique du tout que constitue la société ; il est de l'essence même
d'une structure organisée que chacun n'y occupe pas la même place et qu'il y ait une structure
hiérarchique entre les éléments, bien que la société vise un même bien : celui de tous.
La contemplation, activité supérieure à toutes les autres, est celle du dominicain. Plus encore, le
dominicain doit transmettre ce qu'il a contemplé aux autres :
« En effet, il est plus beau d’éclairer que de briller seulement ; de même est-il plus beau de
transmettre aux autres ce qu’on a contemplé que de contempler seulement. »
— Somme théologique, IIa, IIae, qu. 188, art. 6
Cette citation[138] résume le dynamisme intellectuel et religieux de Thomas d'Aquin : les fruits de la
contemplation peuvent et sont partagés avec les autres. C'est ainsi que le théologien et philosophe
Thomas d'Aquin, en enseignant et en cherchant, ne fait que d'approfondir, scruter et partager les
fruits de la connaissance de Dieu, qui sont les fruits les plus parfaits en ce monde et en l'autre. Faire
profiter à autrui des fruits de la contemplation, par la prêche et par l'enseignement, ce n'est pas
partager sa vie active et sa vie contemplative, c'est additionner les deux : la vie active dérive, en
quelque sorte, de la vie contemplative et s'y coordonne[139].
Quelques termes sont importants et couramment utilisés par Thomas d'Aquin, leurs sens a beaucoup
changé depuis les siècles qui nous séparent de Thomas d'Aquin . Ils proviennent pour la plupart du
vocabulaire d'Aristote, que Thomas d'Aquin s'est permis de préciser.
L'être est la notion fondamentale de la philosophie thomiste. Mais l'ontologie développée par
Thomas d'Aquin est complexe et nécessite de considérer plusieurs aspects différents de ce terme.
L’ens dans le sens du concept (conceptus entis) signifie l'être pensé dans toute sa généralité,
ou plutôt l'acte d'être commun à tous les étants, après abstraction. C'est le concept central de
toute la métaphysique de Thomas. L'être se dit de manière analogique[140], c'est-à-dire qu'il se
hiérarchise à divers degrés selon les étants. Dieu, en tant que sommet de l'analogie de l'être,
est l'ipsum esse, l'acte pur d'exister, Celui en qui se confond l'essence et l'existence[141].
L’esse est l'acte même d'exister d'un étant.
L’essentia ou quidditas est une des significations du mot être en tant qu'une chose est ce
qu'elle est : c'est l'essence de la chose, ce que l'intelligence va atteindre de la chose par le
procédé d'abstraction.
Enfin l'être se confond avec la réalité même en tant qu'elle est pensée (être de raison) ou en
tant qu'elle est simplement (être réel).
Cette théorie des quatre causes provient d'Aristote. Elle faisait partie du bagage de l'enseignement
des écoles parisiennes de théologie au XIIIe siècle dès avant l'arrivée de Thomas qui la reprit à son
compte et l'approfondit.
La « cause matérielle » est ce qui dans le sujet est susceptible de recevoir une
détermination ;
la « cause formelle » est ce en quoi l'effet est, ce qui fait qu'il est ce qu'il est ;
la « cause efficiente » est ce qui effectue le changement ;
la « cause finale » est ce vers quoi le changement se produit.
Les deux premières causes sont dites « intrinsèques » en ce qu'elles constituent le sujet en son être
même, et les deux dernières causes sont dites « extrinsèques », car elles ne sont pas constitutives de
l'être de la chose. La cause est l'objet de plusieurs autres distinctions chez Thomas d'Aquin (cause
première et seconde, cause per se et per accidens, cause instrumentale, cause dispositive, cause
exemplaire, etc.)
La « forme » est le principe intrinsèque et constitutif d'un être, ce qui fait qu'une chose est ce
qu'elle est. Par exemple, elle donne la nature humaine à une matière corporelle. Elle est donc
aussi principe d'espèce et elle constitue ce que Thomas d'Aquin appelle l'âme. Ce concept
vaut surtout pour parler de la substance d'une chose.
La « matière » est ce qui dans un être reçoit la forme, c'est-à-dire une détermination
quelconque.
Ces termes sont eux aussi aristotéliciens, ils ont de nombreuses significations :
L’« acte » signifie l'achèvement, quel qu'il soit (moral, ontologique, etc.) de l'être d'une
chose : il est donc pris en ce sens de l'entéléchie. Mais il signifie également le fait même
d'exister ou encore le simple fait d'agir.
La « puissance » signifie ce qui peut être déterminé par un acte, ou par un passage à l'acte.
Elle représente ou dévoile en quelque sorte un inachèvement ontologique mais qui peut
potentiellement recevoir un perfectionnement. Il y a des puissances passives et des
puissances actives[142].
La « substance » est l'étant qui existe par lui-même, ce qui constitue le sujet en ce qu'il a de
plus irréductible. La substance première est l'individu (par exemple Socrate) et la substance
seconde est la nature (par exemple homme).
L’« accident » est ce qui est « ajouté » à une substance, en tant qu'elle peut exister d'elle-
même, mais que l'accident ne peut qu'exister avec une substance. On distingue de nombreux
accidents : de temps, de lieu, de relation, etc.
L’« intellect passif » (ou possible) est l'activité de l'intellect conditionnée par la réception
des images sensibles, c'est en quelque sorte une activité passive[143]. C'est en quelque sorte un
table rase dans laquelle est imprimée les images sensibles extraites par les sens.
L’« intellect agent » est l'opération de l'intellect qui va abstraire les caractéristiques sensibles
des images sensibles[144]. Il sépare l'élément universel de l'élément singulier de ce que lui
fournissent les sens.
Méthode [modifier]
Thomas d'Aquin est resté fidèle à la méthode[145] qui lui a été inculquée par Albert le Grand :
« En matière de foi et de mœurs, il faut croire Augustin d'Hippone plus que les philosophes, s'ils
sont en désaccord ; mais si nous parlons médecine, je m'en remets à Galien et à Hippocrate, et s'il
s'agit de la nature des choses, c'est à Aristote que je m'adresse, ou à quelque autre expert en la
matière. »
La rédaction de la Somme théologique montre cependant que même en matière de foi et de mœurs,
il préféra apporter sa propre compilation d'arguments et ses propres conclusions que de s'en
remettre à Augustin, sans toutefois ne jamais l'avoir directement contredit. On sait aussi par ailleurs
qu'il avait toujours critiqué le point de vue d'Augustin qui se gaussait qu'on pût croire à la théorie
des antipodes, conséquence de la rotondité de la Terre adoptée par Aristote.
Le recours aux autorités patristiques est néanmoins considérable dans l'œuvre de Thomas d'Aquin,
conformément à la méthode générale de la scolastique, où les arguments se trouvent souvent
introduits ou soutenus par des autorités[146].
Postérité [modifier]
Le Triomphe de saint Thomas d'Aquin, de Benozzo Gozzoli (1468-1484), Paris, musée du Louvre.
Articles détaillés : Thomisme et Néo-thomisme.
Le XIXe siècle voit renaître le thomisme, après deux siècles d'abandon partiel, afin de lutter contre
le modernisme, l'idéalisme, le positivisme et le matérialisme, notamment depuis l'encyclique
Æterni Patris (« Sur la restauration dans les écoles catholiques de la philosophie chrétienne selon
l'esprit du docteur angélique ») du pape Léon XIII en 1879 qui préconise un retour à Thomas
d'Aquin : c'est ce que l'on va appeler le néothomisme. Le pape confie aux Dominicains la tâche de
publier une édition scientifique et critique des œuvres de Thomas d'Aquin en fondant la
Commission Léonine. Le 4 août 1880 Léon XIII déclare le patron des études dans les écoles
catholiques (Cum hoc sit). Le 29 juin 1914, dans son motu proprio, le pape Pie X demande aux
professeurs de philosophie catholique d'enseigner les principes du thomisme dans les universités et
les collèges ; cette même année, la Congrégation romaine des Séminaires et Universités promulgua
une liste de 24 thèses thomistes considérées comme normæ directivæ tutæ : ce sont les thèses de
1914. Naît ainsi le néo-thomisme. Les principales figures de ce renouveau sont notamment Jacques
Maritain, qui proposa un retour au réalisme philosophique de Thomas d'Aquin et Jean Daujat, qui
développa l'enseignement de la philosophie thomiste, notamment en créant le Centre d'études
religieuses. Le XXe siècle voit également un renouveau des études universitaires sur Thomas
d'Aquin, soit centré sur sa philosophie (Étienne Gilson) soit sur sa pensée prise dans son contexte
scolastique (M-D Chenu et J-P Torell). Les dominicains fondent le Bulletin thomiste. Certains,
comme Joseph Maréchal, tentent de concilier les thèses de Kant et celles du thomisme en fondant le
courant appelé thomisme transcendantal.
Depuis le concile Vatican II, Thomas d'Aquin devient une figure essentielle (mais non plus
obligatoire) de la vie intellectuelle de l'Église catholique. La philosophie contemporaine, par son
retour à l'étude des philosophes médiévaux, prend en compte de plus en plus l'importance de
Thomas d'Aquin[n 17].
Lors de ses études, ses camarades l'appelaient le « bœuf muet » en raison de sa corpulence,
de sa discrétion, de son humilité qui pouvait passer pour de la timidité et de son goût pour la
réflexion solitaire. Son maître Albert le Grand, apprenant que ses camarades le nommaient
ainsi, déclara : « lorsque le bœuf mugira, il fera trembler l’Occident ! » La postérité
considérable de son jeune étudiant lui donna raison[148].
Deux novices voulant plaisanter lui dirent de regarder à la fenêtre, car on voyait, disaient-ils,
un bœuf en train de voler. Thomas se déplaça à la fenêtre, et leur répondit : « J'aurais été
moins étonné de voir un bœuf voler qu'un religieux mentir » (la nomenclature des péchés en
répertoriait alors un véniel qui se nommait le mensonge joyeux)[149].
Un jour, quelqu'un lui demanda s'il aurait voulu posséder toutes les richesses de Paris.
Thomas d'Aquin répondit : « Je préférerais avoir le manuscrit de Chrysostome sur saint
Matthieu. »[150].
Alors qu'il résidait à Naples (1272-1274), un de ses confrères affirma l'avoir vu en lévitation
devant le Crucifix qui lui disait : « Tu as bien écrit de moi, Thomas[151], que désires-tu
comme récompense ? », Thomas d'Aquin aurait alors répondu : « Seigneur rien d'autre que
toi. »[152] A une autre occasion, aux alentours du 6 décembre 1273, il eut une extase en
célébrant la messe. Après cela, il cessa d'écrire et de dicter. À son secrétaire qui s'en
inquiétait il répondit : « Je ne peux plus. Tout ce que j'ai écrit me paraît comme de la paille
en comparaison de ce que j'ai vu. »[153]
Œuvres [modifier]
Le tombeau de saint Thomas d'Aquin dans l’église du couvent des Jacobins à Toulouse.
Article détaillé : Commission Léonine(avec liste intégrale des éditions critiques disponibles des
œuvres de Thomas d'Aquin)
Annexes [modifier]
Bibliographie [modifier]
La bibliographie concernant Thomas d'Aquin est pléthorique. Il ne sert à rien de tout citer. À terme,
les collaborateurs de cet article proposeront un choix de textes didactiques, utiles et
scientifiquement éprouvés.
Hubert Jacobs, jésuite, professeur émérite aux Facultés universitaires de Namur et à l'Institut
d'études théologiques de Bruxelles. Bibliographie pour l'étude de saint Thomas en langue
française reprenant des publications parues depuis une soixantaine d'années (liste non
exhaustive), Bruxelles, Institut d'études théologiques ; Namur, Facultés Notre-Dame de la
Paix, 2010. Cette publication est présente, sous format papier, à la Bibliothèque du CDDR
(cote : VII. 45 A 2). Elle est consultable sur son site au format PDF. Voir : htpp :
//www.fundp.ac.be/universite/bibliotheques/cdrr/bibliographies
Jean-Pierre Torrell, o.p., «Situation actuelle des études thomistes», Recherches de sciences
religieuses 91 (2003) 343-371 [traduction polonaise].
Guillaume de Tocco, l'Histoire de saint Thomas d'Aquin (Vie écrite en vue du procès de
canonisation de Thomas. Ce livre propose la traduction française du dernier état du texte
(1323) avec introduction et notes par Claire Le Brun-Gouanvic). – Paris : les Éditions du
Cerf, coll. « Sagesses chrétiennes », 2005. – 223 p., 20 cm. – (ISBN 2-204-07729-1). – Titre
original : Ystoria sancti Thomae de Aquino.
Jean-Pierre Torrell, O.P., Initiation à saint Thomas d'Aquin. Sa personne et son œuvre,
Initiation 1. (Pensée antique et médiévale, Vestigia 13), Paris-Fribourg, Les Éditions du Cerf
- Éditions Universitaires, 1993, 2e éd. 2002, XVIII-650. voir site.
[Livre de référence, profondément documenté et régulièrement mis à jour, dont l'information sur les
œuvres de Thomas et leur datation repose directement sur les travaux de première main des éditeurs
de la Commission léonine et une connaissance exhaustive de l'historiographie de Thomas d'Aquin.
Le livre déploie deux intuitions fondamentales sanctionnées par la meilleure critique historique
contemporaine : 1. La pensée de Thomas est inséparable d'un contexte historique inscrit dans les
contingences temporelles, 2. Thomas est un théologien avant d'être un philosophe et c'est en tant
que théologien qu'il a développé une pensée philosophique.
Jean-Pierre Torrell O.P., Saint Thomas d'Aquin, maître spirituel. Initiation 2. (Pensée
antique et médiévale, Vestigia
19). Éditions universitaires, Fribourg - Éditions du Cerf, Paris, 1996, 2e éd. 2002, VIII-600 p. voir
site. [Ce livre développe la seconde des thèses du précédent en montrant comment la théologie de
Thomas est inséparable d'un enseignement spirituel et éthique orienté vers l'horizon de la rencontre
de l'homme avec Dieu.]
Stanislas Breton, Saint Thomas d'Aquin, Paris, Seghers, 1965. Approche philosophique d'un
penseur de la fin du XXe siècle, un peu en marge des écoles et des courants dominants.
Étienne Gilson, Le Thomisme : introduction à la philosophie de saint Thomas d'Aquin,
éditions VRIN, 6e réédition : 2005. (ISBN 2-7116-0297-4). Essai de synthèse, plus
philosophique que théologique, de la pensée de Thomas d'Aquin, qui cherche à dégager tous
les points nécessaires à l'exposé d'un système philosophique cohérent avec la pensée
historique de Thomas.
Jacques Maritain, Le Docteur angélique, Paris, Paul Hartmann, 1929. Manifeste du
néothomiste catholique du XXe siècle.
Antonin-Dalmace Sertillanges, Saint Thomas d'Aquin (2 volumes), Paris, 1910. Présentation
des grands thèmes de la pensée thomiste, vus du point de vue d'une théologie systématique
philosophiquement ouverte.
G.K. Chesterton, Saint Thomas du créateur, 1933. Ouvrage d'un écrivain présentant la vie et
la pensée de Thomas d'Aquin d'une manière
littéraire et spirituelle.
Cajetan, Commentaria in Summam Theologiam, ed. H. Prosper (Lyrae, 1892), repris dans
l'Editio leonina de Thomas d'Aquin, vol. IV-XII ; commentaire analytique de chaque article
de la Somme théologique de Thomas d'Aquin.
Alain de Libera, « Thomas d’Aquin. Somme contre les Gentils », Gradus philosophique, dir.
L. Jaffro et M. Labrune, Flammarion, GF 773, Paris, 1995, p. 765-783 [Introduction
philosophique à la lecture de la Somme contre les Gentils].
Commission Léonine dominicaine chargée par les papes, depuis Léon XIII, de publier une
édition des œuvres de Thomas d'Aquin, fondée sur les manuscrits et la critique historique la
plus rigoureuse.
Influences [modifier]
Les œuvres de Thomas d'Aquin disponibles en ligne à la Bibliothèque des Éditions du Cerf
(Dominicains)
Dominicains de Toulouse, École de théologie Site de la Revue thomiste
Corpus thomisticum Ensemble d'outils pour les chercheurs et toutes les œuvres en latin
(université de Navarre)
Site officiel de l'Académie pontificale de Saint Thomas d'Aquin
Notes
1. ↑ « Nihil est in intellectu quod non sit prius in sensu. » (Thomas d'Aquin, De veritate, Questio 2, art. 3,
argumentum 19 [archive]. Sur la réception de cet adage hors de l'école thomiste, voir J. Cranefeld : « On the
Origin of the Phrase Nihil est in intellectu quod non prius fuerit in sensu », Journal of the History of Medicine
and Allied Sciences (Oxford), 1970 XXV(1):77-80; première page consultable en ligne [archive]).
2. ↑ En référence à l'ordre de l'Univers orienté vers Dieu que Thomas d'Aquin reprend de la cosmologie grecque,
et à la téléologie éthique aristotélicienne.
3. ↑ Sur ce point, il faut remarquer que Thomas d'Aquin et Bonaventure, tous deux contemporains, tous deux
docteurs de l'Église, n'ont absolument pas la même méthodologie. Thomas part du monde pour accéder à Dieu
en ce qu'Il est pour nous, alors que Bonaventure par de Dieu pour analyser la façon dont il se manifeste :
Emmanuel Falque, saint Bonaventure et l'entrée de Dieu en théologie, éditions VRIN, 2000 et l'article de la
Somme théologique, Ire partie, question 2, article 1 : « l'existence de Dieu est-elle évidente par elle-même ? »
où Thomas répond indirectement à Bonaventure.
4. ↑ à noter que la Somme contre les Gentils ne prend pas ce schéma d'exitus reditus
5. ↑ En effet, les anges n'ont pas accès direct aux réalités matérielles : ils n'abstraient pas leur connaissance du
sensible et leur intelligence ne progresse donc pas par discursivité.
6. ↑ La tradition catholique reprendra plus tard ce thème pour décrire la perte de la nature intègre d'Adam et des
conséquences de la chute de Lucifer. Voir Somme théologique, Ia, qu. 110, art. 1, resp.
7. ↑ Cette remarque est constamment attestée par la Bible, notamment lors de l'Annonciation. Voir contra
Gentiles, III, 80
8. ↑ C'est sur ce point précis que les thomistes contemporains se confrontent à la phénoménologie : voir Revue de
l'université de Louvain, Tome 51, 1953, p. 374 à 408 sur les sens externes chez Thomas d'Aquin ; voir aussi,
dans l'œuvre de Thomas lui-même : Somme théologique, Ia, qu. 78, art. 3, sed contra
9. ↑ Le vocabulaire scolastique de Thomas d'Aquin pour la différence intellect actif, intellect passif
10. ↑ Le réalisme des idées est englobé dans un réalisme épistémologique global dans la pensée de Thomas
d'Aquin. J-P Torell, dans Sources insiste sur ce point ; Jacques Maritain, dans Les Degrés du savoir reprend
d'une façon contemporaine l'épistémologie de Thomas d’Aquin. Et Somme théologique, Ia, qu. 85, art. 2, resp.
11. ↑ La meilleure présentation de l'analogie de l'être se trouve dans le De Potentia Dei, qu. 10, art. 4
12. ↑ En gardant à l'esprit que matière et forme sont employés dans leurs sens aristotélicien, voir plutôt scolastique
(reportez vous au court chapitre sur les termes scolastiques). et Somme contre les Gentils, II, LXXII
13. ↑ Pour une exposition claire de l'hylémorphisme adopté par Thomas d'Aquin, voir et consulter L-B Geiger,
penser avec Thomas d'Aquin, CERF, 1997, p.6 et suivantes
14. ↑ Cette conception de la notion de vertu est clairement héritée d'Aristote dans l'Éthique à Nicomaque que
Thomas connaissait et qu'il a commenté. Étienne Gilson, textes sur la morale, VRIN et somme théologique, Ia,
IIae, qu. 55, art. 3
15. ↑ En cela, il s'éloigne d'Aristote en ajoutant à la vie de l'homme une part surnaturelle dans sa fin dernière et ne
fait pas du bonheur terrestre la fin unique et Somme contre les Gentils, IV, I
16. ↑ On retrouve la conception finaliste et naturaliste des Grecs anciens mais transposée dans un monde Chrétien :
tout ce qui se rapprochera de Dieu aura encore plus de bonté ; d'où, d'ailleurs, la doctrine de l'analogie de
l'être ; Commentaire de l'Éthique à Nicomaque d'Aristote et Somme contre les Gentils, III, CXLI
17. ↑ On peut citer la connaissance parfaite de Thomas d'Aquin qu'avait Heidegger, ou bien les cours de Brentano
sur l'intentionnalité chez Thomas d'Aquin qu'il faisait au jeune Husserl
Références
1. ↑ La date de naissance est déduite à partir de l'âge approximatif de sa mort, donnée tardivement dans le
contexte du procès de canonisation. Comme souvent au Moyen Âge, un millésime précis est difficile à
déterminer; cf. J.-P. Torell, Initiation 1, 1993, chap. 1, p. 1.
2. ↑ Ce château se trouve aujourd'hui dans la province de Frosinone, J-P Torell, Initiation 1, 1993, chap. 1, p. 2
3. ↑ Jean Chélini, Histoire religieuse de l'Occident médiéval, Hachette, 1991, p. 320
4. ↑ J-P Torell, Initiation à Thomas d'Aquin, tome 1, p. 27 et p. 32.
5. ↑ J-P Torell, Initiation à Thomas d'Aquin, Tome 1, p. 27 à 52
6. ↑ J-P Torell, Initiation 1, chap. IX, p. 288
7. ↑ Pour des explications précises : J-P Torell, Initiation 1, p. 288 à 326
8. ↑ Lettre de l'université de Paris du 2 mai 1274.
9. ↑ Selon ses premiers biographes, notamment l'Ystoria sancti Thome de Aquinode Guillaume de Tocco qui date
de 1323
10. ↑ Introduction à la Ire partie de la Somme théologique des éditions du Cerf, 2004, Marie-Joseph Nicolas, p. 24
11. ↑ M. Morard, « Thomas d'Aquin, un homme de chair et d'os aussi », Sedes sapientiae, t. 30, 1989, p. 37-54 et
J.-P. Torell, Sources 19 (1993) 3, p. 97-110.
12. ↑ Humbert de Romans, Opera de vita regulari, éd. Berthier, t. II, p. 260 ; Le P. Mandonnet (Revue thomiste,
XXIII, 1928, p. 297 et suivantes) décrit de manière vivante cet exercice académique majeur de la période
scolastique ; voir également P. Glorieux dans La littérature quodlibétique de 1260 à 1320, Bibliothèque
thomiste 5 et 21, Paris, 1925 et 1935). Sur la structure des disputes, quodlibets et quaestiones, se reporter à J.-
P. Torell, Initiation 1, p. 293-307.
13. ↑ Étienne Gilson, Le thomisme, Vrin, p. 414-419, surtout la note 26 de la page 419.
14. ↑ Certains parleront du début de l'émancipation de la raison par rapport à la théologie, bien que pour Thomas
elles soient intrinsèquement associées et ordonnées à la même fin. La question de l'existence d'une philosophie
thomasienne, distincte de sa théologie a été soutenue par Étienne Gilson, mais cette thèse fait l'objet d'un débat
qui concerne moins la pensée de Thomas d'Aquin que l'histoire du thomisme, cf. Étienne Gilson, Le Thomisme,
VRIN, 2000, voir introduction : « le cadre doctrinal », p. 9 à 33
15. ↑ Émile Bréhier, Histoire de la philosophie, tome 1, PUF, 1989, le XIIe siècle, chapitre VIII, p. 586 et
suivantes
16. ↑ Somme théologique, Prima pars, question 2, art. 3 et Étienne Gilson, Le thomisme, chapitre : « L'existence de
Dieu comme problème » et le cadre doctrinal, Paris, Vrin, 1997, p. 25
17. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, Vrin, 1994, p. 353
18. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 1 : la doctrine sacrée
19. ↑ L'argument de la double vérité stipule que les vérités accessibles par la raison sont englobées dans les vérités
supérieures de la révélation, et qu'elles ne sont donc pas contradictoires : voir la Somme contre les Gentils, I,
VII
20. ↑ In I Sent. proem. q. 1 a. 1 co. ; Somme théologique Ia, qu. 1, art. 2 et voir le commentaire et l'interprétation
philosophique de cet article par J-F Courtine, Suarez et le système de la métaphysique, cet article est présenté
comme l'hypothèse d'un troisième terme entre la théologie naturelle et la théologie Révélée : ces deux sciences
ont leur fondement dans la science de Dieu et des Bienheureux, ce qui fonde l'évidence et la prééminence de
ces deux sciences.
21. ↑ Somme contre les Gentils, I, II
22. ↑ C'est-à-dire la partie de la philosophie qui traite de Dieu / théologie qui est partie de la philosophie (Sum.
theol. Ia q. 1 a 1 ad 2) ; Thomas n'utilise qu'une seule fois l'expression « theologia naturalis » (In Rom. 1, 25).
Dans les deux cas il désigne un mode de connaissance par les forces de la raison naturelle, distinguée de la
connaissance par révélation. Cf. aussi Étienne Gilson, Le thomisme, VRIN, 2000, introduction et Révélatio.
23. ↑ J-P Torell, Sources 1, p. 68
24. ↑ Somme contre les Gentils, I, IV et V ; voir Étienne Gilson, Le thomisme, introduction, sur le Révélatum et le
Révélabile
25. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 12, art. 13
26. ↑ Somme contre les Gentils, I, IV, début du chapitre
27. ↑ Somme théologique, Ia, question 1, article 10
28. ↑ nous reprenons cette formule d'Étienne Gilson dans Le thomisme, éditions VRIN, 2000, voir la fin de
l'introduction (le dernier paragraphe)
29. ↑ La Bible, Exode, III, 3, 14. Selon les versions de la Bible, cette phrase (interprétable comme « Je suis le vrai
Dieu, par opposition aux autres dieux ») est aussi traduite par « Je suis qui je suis » (refus de faire connaître
son nom personnel), « Je suis qui je serai » (je suis là avec vous, de la manière que vous verrez). Réf. La Bible
- Ancien Testament, Trad. œcuménique, 1985.
30. ↑ L'origine de cette preuve remonte à Aristote : Physique, VIII, 5, 311 et Métaphysique, XII, 6, 1071 b, 3
31. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, « L'existence de Dieu comme problème »
32. ↑ Marie-Dominique Chenu, Saint Thomas d'Aquin et la Théologie, édition VRIN et Somme théologique, I, qu.
3, art. 1, resp.
33. ↑ Somme théologique, I, qu. 3, art. 2, resp. ou Contra Gentiles I, 18
34. ↑ Somme théologique , I, qu. 3, art. 4, resp.
35. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 27, art 5, concl.
36. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 28 : les relations divines
37. ↑ Martin Heidegger, La constitution onto-théologique de la métaphysique (1957) dans Questions I, Gallimard
38. ↑ Étienne Gilson, l'être et l'essence, éditions VRIN, 2000, notamment le chapitre III et Johannes B. Lotz,
Martin Heidegger et Thomas d'Aquin, PUF, 1975
39. ↑ Somme théologique, prologue de la IIIe partie
40. ↑ Somme théologique, III, qu. 1, art. 1, sed contra
41. ↑ Somme théologique, III, qu. 1, art. 1, respondeo
42. ↑ Somme théologique, III, qu. 1, art. 2
43. ↑ On se reportera avec profit à M-D Chenu, Introduction à l'étude de saint Thomas d'Aquin, chapitre IX
44. ↑ Somme théologique, Ire partie, qu. 2, introduction
45. ↑ Somme théologique, Ia, (qu. 50-64) et autres ; sur l'angéologie de Thomas d'Aquin, on se reportera avec
profit à Étienne Gilson, le thomisme
46. ↑ J. Turmel, Histoire de l'angéologie ; Somme théologique, Ia, qu. 50, art. 1
47. ↑ ibid.
48. ↑ De spirit. creat. (Des créatures spirituelles), qu. I, art. 8 ad resp.
49. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, éditions VRIN, 2000, IIe partie : les anges, p.209 à 224 et Somme théologique,
Ia, qu. 50, art. 5 et qu. 61, art. 2
50. ↑ Étienne Gilson, le Thomisme, éditions VRIN, 2000, IIe partie : « les anges », p.209 à 224 et Somme
théologique, Ia, qu. 108 : « hiérarchie et ordres angéliques ». Thomas d'Aquin se réfère sur ce point à Denys
l'Aréopagite et sa hiérarchie angélique (de la hiérarchie céleste)
51. ↑ Étienne Gilson, le Thomisme, éditions VRIN, 2000, IIe partie : « les anges », p.209 à 224 et somme
théologique, Ia, qu. 58 : « le mode de connaissance angélique » et de Veritate, qu. VIII, art. 10, ad resp.
52. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 63, art. 1
53. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 107 : « le langage des anges »
54. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 108, art. 8 : « les hommes sont-ils élevés aux ordres angéliques ? »
55. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 111, art.1
56. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 111, art. 3
57. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, éditions VRIN, 2000, IIe partie : « les anges », p.209 à 224 et Somme
théologique, Ia, qu. 111, art.4
58. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, VRIN, 2000, chap. VI, p. 263 et chapitre VII, p. 280 : « connaissance et
vérité »
59. ↑ Somme théologique, Ire partie, qu. 84, article 2
60. ↑ Somme théologique, Ire partie, qu. 84, article 5|
61. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 85, art. 4, sed contra
62. ↑ Pierre Rousselot, l'intellectualisme de saint Thomas, bibliothèque des archives de philosophie, 3ème édition
et Somme théologique, Ia, qu. 79, art. 2, respondeo
63. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, VRIN, 2000, chap. VI, p. 263 et chapitre VII, p. 280 : Connaissance et vérité :
« considéré sous son aspect le plus humble, l'intellect humain apparaît comme une puissance passive »
64. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 84, art. 6, resp.
65. ↑ Pierre Rousselot, l'intellectualisme de saint Thomas, bibliothèque des archives de philosophie, 3e édition,
notamment les pages 92, 93, 103, 104 et Étienne Gilson, Le Thomisme, VRIN, 2000, chapitre VII, p. 283, 284
66. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 79, art. 2, resp.
67. ↑ Jean Daujat, Y a-t-il une vérité ?, éditions Téqui, chapitre sur la connaissance intellectuelle et Somme
théologique, Ia, qu. 79, art. 3 et 4
68. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 85, art. 2, sed contra
69. ↑ Jean Daujat, Y a-t-il une vérité, éditions Téqui, 2004, Sur la connaissance intellectuelle et Somme
théologique, Ia, qu. 85, art. 2 et note de bas de page n° 2 de l'édition du Cerf
70. ↑ Contre Averroes, préface
71. ↑ Contre Averroes de Thomas d'Aquin où il expose l'unité substantielle de l'être humain contre les
interprétations d'Aristote faites par les philosophes et théologiens musulmans, notamment Averroès et Somme
théologique, Ia, qu. 79, art.5
72. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 79, les puissances de l'âme (voir également la différence intellect passif, actif)
73. ↑ Somme théologique, qu. 85, art. 1 : « notre intellect opère-t-il en abstrayant des images les espèces
intelligibles ? »
74. ↑ Pour une présentation moderne et avec les problématiques contemporaines de la métaphysique et de la
théologie de Thomas d'Aquin, voir J.B. Lotz, Martin Heidegger et Thomas d'Aquin, PUF, Paris, 1988, p. 36 et
suivantes.
75. ↑ Somme contre les Gentils, I, XXXIV
76. ↑ B. Montagnes, La doctrine de l’analogie de l’être d’après saint Thomas d’Aquin, Paris, Vrin, 1963, rééd.
2008 (version originale : (fr) [pdf] metataphysica.free.fr [archive])
77. ↑ Voir, entre autres textes : Somme théologique, Ia, qu. 13 et de potentia qu. 10, art. 4 et De Veritate q. 2, a. 1,
78. ↑ Voir, entre autres textes, Cajetan, De nominum analogia, cap.II : « analogia ista (analogia attributionis) sit
secundum determinationem extrinsecam tantum ; ita quod primum analogatorum tantum est tale formaliter,
caetera autem denominantur talia extrinsece ».
79. ↑ Père Rousselot, Le problème de l'amour chez saint Thomas d'Aquin et Somme contre les Gentils, III, CXVII
80. ↑ Somme contre les Gentils, III, CXVII
81. ↑ Somme contre les Gentils, IV, I
82. ↑ Contra Gentiles, I. III, cap. 1
83. ↑ Étienne Gilson, textes sur la morale et Somme contre les Gentils, III, CXXI
84. ↑ Somme contre les Gentils, II, LVII
85. ↑ L'âme est ainsi vue comme un principe de vie (comme chez Aristote, plutôt que comme une substance à part
entière, différente du corps ; sur ce point, voir Étienne Gilson, le Thomisme, VRIN, 2000, P. 241 et Somme
théologique, Ia, qu. 76 : l'union de l'âme au corps
86. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 76, art. 3 ; sur les problèmes entre l'âme et la corps, voir Gilson, le Thomisme :
l'âme et le corps
87. ↑ Reprise d'Aristote ; voir Somme contre les Gentils, II, LVII
88. ↑ Reprise d'Aristote : De anima, I et Éthique à Nicomaque, I ; voir Somme contre les Gentils, IV, LXXXVI
89. ↑ Somme théologique, Ia IIae, Qu. 1, art.1 et Étienne Gilson, Le thomisme, III partie, chap. 1, p. 315
90. ↑ Somme théologique, Ia IIae, Qu. 6, art.1, concl.
91. ↑ Somme théologique, Ia IIae, Qu. 6, art.1, concl. et Étienne Gilson, Le Thomisme, III partie, chap. 1, la
structure de l'acte humain, p. 314 - 319
92. ↑ De veritate, qu. 26, art. 2, ad resp.
93. ↑ Étienne Gilson, Le thomisme, éditions VRIN, 2000, p. 400 et Somme théologique, Ia, IIae, qu. 22, art. 2 et 3
94. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 26, art. 1
95. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 26, art. 2 et voir le commentaire du cardinal Cajetan dans son commentaire
de la somme théologique de cet article précis de la Somme théologique : pour le trouver, voir les éditions de la
Commission Léonine
96. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, éditions VRIN, 2000, p. 300 sur le concupiscible et l'irascible : « à l'intérieur
de l'appétit sensitif, qui constitue une sorte de puissance générique désignée par le nom de sensualité, on
distingue deux puissances qui en constitue deux espèces ; l'irascible et le concupiscible » et Somme
théologique, Ia IIae, Qu. 23, art.1
97. ↑ (Somme théologique, Ia, qu. 44, art. 4)
98. ↑ (Somme théologique, Ia, prologue de la question 2)
99. ↑ qu. De veritate, qu. 13, art. 1 et 2
100. ↑ Étienne Gilson, Le thomisme, éditions VRIN, 2000, p. 319 et Somme théologique, Ia, IIae, qu. 55,
art. 1
101. ↑ Somme contre les Gentils, III, CXLI
102. ↑ Somme théologique, Ia IIae, qu. 55, art. 4, concl. Voir aussi le commentaire de cet article du cardinal
Cajetan
103. ↑ Étienne Gilson, Textes sur la morale de Thomas d'Aquin et Somme théologique, Ia IIae, qu. 56, art.
3, concl
104. ↑ Commentaire de l'Ethique à Nicomaque, II, leçon 2, # 264
105. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, éditions VRIN, 2000, p. 322 : « les vertus, le bien et le mal » et
Somme théologique, Ia, IIae, qu. 58, art. 2
106. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 57, art. 2
107. ↑ Le commentaire de Cajetan sur cet article est particulièrement éclairant et Somme théologique, Ia,
IIae, qu. 57, art. 5
108. ↑ Somme théologique, Ia IIae, qu. 62, art. 2, solu. 1
109. ↑ sur la foi chez Thomas d'Aquin, voir les études du bulletin Thomiste n° 20 et les études de la Revue
néo-scolastique de l'université de Louvain (maintenant appelée Revue philosophique de Louvain), numéro
spécial sur la foi chez les scolastiques et Somme théologique, IIa, IIae, qu. 1, art. 1
110. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 14
111. ↑ Somme théologique, I, qu. 83, article 1, respondeo
112. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 83, art. 3, rep.
113. ↑ Étienne Gilson, le Thomisme, éditions VRIN, 1994, appétit et volonté, p. 306
114. ↑ Somme théologique, I, qu. 83, article 1, respondeo
115. ↑ Sur la liberté, consulter L-B Geiger, Penser avec Thomas d'Aquin, CERF, 1997, chapitre sur la
philosophie réaliste et la liberté, p. 186 et suivantes ou Revue des sciences philosophiques et théologiques,
Tome 2, 1955, p. 347-407
116. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 1, art. 6
117. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, éditions VRIN, 2000, p. 429 et autres sur la fin dernière de l'homme
et Somme théologique, Ia, IIae, qu. 1, art. 6, rép
118. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 1, art. 5, rép ; sur la question de la fin ultime, voir Jean Daujat, Y a-
t-il une Vérité ?, chap. sur la morale
119. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 1, art. 8, rép
120. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 1, art. 7
121. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, éditions VRIN, 2000, p. 430 et Somme contre les Gentils, III, CXLI
122. ↑ Somme contre les Gentils, III, CXLI
123. ↑ P. Rousselot dans l'ouvrage : Pour l'histoire du problème de l'amour au moyen-âge ; Étienne
Gilson : L'Esprit de la philosophie médiévale, au chapitre 14 : L'amour et son objet (spéc. p. 278 s.) ; P.
Geiger : Le Problème de l’amour chez S. Thomas d'Aquin (Montréal et Paris, 1952)
124. ↑ Sur cette distinction, voir Somme théologique, Ia, IIae, qu. 26, art. 3, resp. et Étienne Gilson, Le
Thomisme, p. 337 et 338
125. ↑ Somme théologique, I pars, Qu. 20, art. 1, concl.
126. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 26, art. 3, resp. et Étienne Gilson, Le Thomisme, p. 340
127. ↑ Somme contre les Gentils, III, XC
128. ↑ Somme contre les Gentils, III, XVII
129. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 65, art. 2 : les vertus morales peuvent-elles exister sans la
charité ? ; sur ce sujet, voir le cours de Michel Labourdette o. p. de Théologie morale sur la Charité (année
1959 - 1960)
130. ↑ ibid. voir fin de la respondeo
131. ↑ Étienne Gilson, Le thomisme, p. 426
132. ↑ Somme théologique, Ia, IIae, qu. 26, art. 3, resp. (fin du paragraphe)
133. ↑ Première leçon du commentaire de la politique d'Aristote
134. ↑ Première leçon du commentaire de la politique d'Aristote : Pour tout le monde, il y a deux sortes de
communautés évidentes : la famille et la cité.
135. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, éditions VRIN, 1997, p. 400
136. ↑ F. Daguet, article dans le Bulletin Thomiste, n°1 de l'année 2007 : principes d'anthropologie
politique chez saint Thomas d'Aquin et première leçon du commentaire de la politique d'Aristote
137. ↑ Somme contre les Gentils, III, CXXV, CERF, 1993, p. 686
138. ↑ Somme théologique, IIa, IIae, qu. 188, art. 6
139. ↑ Étienne Gilson, Le Thomisme, éditions VRIN, 1997, p.10
140. ↑ Sur les problèmes soulevés par la doctrine de l'analogie de l'être chez Thomas, voir l'ouvrage de
synthèse de B. Montagnes, La doctrine de l’analogie de l’être d’après saint Thomas d’Aquin, Paris, Vrin, 1963,
rééd. 2008 ((fr) [pdf] metataphysica.free.fr [archive]). Voir le chapitre sur l'analogie de l'être. Les partisans de
deux thèses fondamentales s'affrontent sur ce point : celle de Thomas d'Aquin (suivi par E. Gilson) et celle de
Cajetan au XVIe siècle, suivie par J. Maritain, par exemple ; cf. la Somme théologique, Ia, qu. 13
141. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 3, art. 4 : l'essence et l'existence en Dieu
142. ↑ De potentia, qu. 1
143. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 79, art. 2
144. ↑ Somme théologique, Ia, qu. 79, art. 3, sed contra ; Aristote, De anima, V, 1, 430 a 10
145. ↑ Marie-Dominique Chenu, Introduction à l'étude de saint Thomas d'Aquin, éditions VRIN.
146. ↑ Marie-Dominique Chenu, Introduction à l'étude de saint Thomas d'Aquin, VRIN, chapitre sur la
question des autorités au moyen-âge
147. ↑ Léon XIII, encyclique Æterni Patris, le 4 août 1879
148. ↑ Guillaume de Tocco, Histoire de saint Thomas d'Aquin de l'Ordre des frères prêcheurs, (écrit en
1323) : chapitre X : l'élève de saint Albert le Grand
149. ↑ Chesterton, Le bœuf muet, chapitre 1
150. ↑ Chesterton, Le bœuf muet, chapitre 2
151. ↑ Roger Peyrefitte dans Du Vésuve à l'Etna cite cette approbation et la commente ainsi : « Parole
terrible : l'Inquisition est sortie de ce mot. » Effectivement il n'était plus permis ensuite d'émettre des doutes
sur l'enseignement de Thomas.
152. ↑ Guillaume de Tocco, Ystoria sancti Thome, chap. 34
153. ↑ Procès de canonisation, § 79, p. 376-377 et Guillaume de Tocco, Ystoria sancti Thome, chap.47
(écrit en 1323)
154. ↑ Cf. L.-J. Bataillon, « Le P. M.-D. Chenu et la théologie du Moyen-Âge », Revue des sciences
philosophiques et théologiques, 75, 1991, p. 454 et J.-P. Torrell, Initiation à saint Thomas d'Aquin, 2e éd., p.
XII.