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L'EMPIRE BYZANTIN
PAR
Charles D i E H L
Membre de l'Institut
PARIS
AUGUSTE PICARD, ÉDITEUR
Ι92~i
Ρ~~~Α_c~
mdéf~n~rnent les créations de quelques artistes avec trop d'abondance, des car~ctLres médiocres
de génie . et dis ámes viles . Mais, tel qu'il fut, cet .État a
E~ fait, Byzance a été tout autre chose . Quoi- été grand .
qu'elle se soit volontiers proclamée l'héritière et II ne faut point, en efj"et, .comme on le croit
la continuutr~ee de Rome, quoique ses empereurs, t~ •op volontiers, s'~mag~ner que, pendant les
Jusqu'au dernier jour, se soient ~nt~tulés « basi- mille ans qu'elle survécut à la chute de l'empire
le~s des Romains », quoiqu'ils n'aient jamais romain, Byzance descendit d'uni marche ~ninter-
renoncé aux droits qu'As réclamaient sur l'an- rompue vers la ruine. Aux . crises où elle a failli
cienne et gloriezzse capitale de l'empire, en réa- suécomber, bien des fois o'nt succédédes périodes
lité ~ourtant Byzance devint très vite et fut d'incomparable splendeur, des renaissances im-
esse~~tzellen~ent une monarchie d'Orie~zt . Il ne prévues où, selon le nrοt d'~~n chroniqueur,
faut point la juger par comparaison avec les « l'empire, cette vieille femme, apparaît comme
souvenirs écrasants de Rome : selon le nzot d'un une jeune fille, parée d'or et de pierres pré-
nies hommes qui ont le mieux compris son carac- cieuses . » Au vie siècle, avec J~stinie~, l~ monar-
lère et entrevu son aspect véritable, elle fut ~ un ~hie, une dernière fois, se reconstitue comme aux
Etat du moyen áge, placé sur les extrêmes fron- beaux temps de Rome, et la Méditerranée, de
tières de l'Europe, aux con fzns de la barb~r~e no~weau, devient un lac romain . Au v~~~" siècle,
~zsiatiqúe (~) » . Cet État a eu ses défauts et ses les empereurs sauriens brisent l'élan de l'Islam,
w~ces, qu'rl serait .puéril de vouloir d~ss~muler . pers le temps même où Chartes Martel sauvait
Il a connu trop fréquemment les ~ •é~olutions de la çhrétienté á Poitiers . Au xe siècle, les sou~e-
palais et les séditions militaires ; ~l a aimé fú- rains de la maison de 111~cédo~ne font de By-
r~eusement les jeux du cirque et davantage zance la grande puissance de l'Orient, reportant
encore les disputes théologiques ; malgré l'élé- jusqu'en Syrie leurs armes victorieuses, écra-
gance de s~ cw~hsat~on, ses meurs ont été sou- sant les-Russes sur lè Danube, noyant dans le
üer~t cruelles et barbares, et ~l a p~°oduit enfin, sang le royaume créé par les tsars bulgares .
Au x~~e siècle, avec les Comnènes, l'empire grec
t1) A . RAMBAUD, 1'Empire greσ ατι %' sτécle, ρ . νττ . fait encore bonne ~gure dans le monde, et Cons-
v11~ P~ÉFACB
P~iÉFACE 1%
tantinople est un des centres pr~nc~paux de la
chrétienne qu'à l'Athènes de Pér~clés et de,
pol~t~que européenne .
Ph~d~as .
Ainsi, pendant mille ans, Byzance a vécu, et
C'est par tout cela, par ce qu'elle ftt dans le
pas seulement par l'e /j"et de quelque hasard heu-
.passé autant que par ce qu 'elle a préparé pour
reux : elle a vécu glorieusement, et il faut bien,
l'avenir, que Byzance mérite encore l'attention
pour qu 'il en ait été ainsi, q~~'elle ait eu en elle
et l'i~térét . S~ lointaine que semble son histoire,
aulne chose que des vices . Elle a eu, poctr con-
s~ mal connue qu' elle soit de beaucoup de gens,
duire ses a f)`'atres, de grands emperéurs, des
ce n'est point use h~sto~remorfe et d~g~ed'oubli.
hommes d'État illustres, des diplomates habiles,
Ducange le savait bien lorsque, au m~l~eu du
des généraux victorieux ; et par eux, elle a
xv~~° s~écle, par ses éditions des historiens by-
accompli une grande oeuvre dans le monde . Elle zant~~s, pan les savants comme~ta~res dont ~l les
a été, avant les croisades, le champ~o~ de la accompag~~it, par tant de tra~~ux admirables,
chrétienté en Orient contre les in fidèles et, par
~l posait les bases de l'histoire scientίfτque de
sa valeur m~l~taire , à plusieurs reps° ises elle a
Byzance et ouvrait, dans ce domaine encore
sauvé l'Europe . Elle a été, sn face de la barba-
inexploré, de larges et lumineuses percées . De-
r~e, le centre d'une civ~l~sal~on adn~~rabl~* la
pu~s cinquante ans, au pays de D~cange, la tra-
plus ra ffanée, la plus élégante qu'an longtemps
dit~o~ s'est renouée des études dont ~l fut le
con~~ue le moyen âge . Elle a été l'éducatrice de
fondateur ; et sans méconnaftre ce qui s'est fait
l'Orient slave et asiatique, dont les peuples lut
ailleurs, en Russe et en Grèce, en Angleterre
dowenl leur religion, leur langue littéraire, leur et en Allemagne , peut- étre pourtant est-~l per-
art, leur gouvernement ; son ~nflt~ence toute-
mis de dire que, s~ les recherches d'histoire by-
~~zissnnte s'est étendue jusque star l'Oce~dent, zantine ont reco~qu~s droit de cité dans le monde
qa~ ~ reçu d'elle des Lien faits intellectuels et scientίf~que, c'est à la France qu'elles le doivent
arhsliques inappréciables .~C'esf • d'elle que pro-
essentiellement .
cèdent tous les peuples gui habitent aujourd'hut
l'Orient de l'Europe, et la Grèce ~ moderne, O~ m'a demandé, avec use obligeante ~ns~s-
en purl~culier, doit bien davantage à Byzance
tance, d'écrire un Ivre - qυί, chez nous, ma~-
~RÎiFACI{ PRÉFAC$ ΧΣ
quait encore, - u~ manuel, sommaire et con- disparu, en marquant dans ce hure, sans rien
densé, de l'histoire byzanti~~e . Il ne m'a point omettre de la précision des détails nécessaire,
semblé que ce füt l~ une ta che ~nut~le . J'ai tenté les grandes lignes, les traits caractér~st~ques et
les idées d~rectr~ces de l'histoire et de la ci~ih-
récemment, dans un autre volume qui vient de
paraître, de présenter le tableau synthétique de sat~on de Byzance .
ce que fut Byzance, d'expliquer les causes pro-
fondes de sa grandeur et de sa décadence, de Je gens á remercier la maison H~ehette, qut
montrer les seruices éminents . qu'a rendus sa cwi- m'~ autorisé á emprunter à l'Atlas de Géographie
lisat~on (~). Le petit livre que voici offrira au 'historique de Schrader deux des quatre cartes
lecteur un exposé plus analytique de l'histoire qυί ~ccomp~g~ent ce livre . Les illustr~t~o~s, qui
millénaire de l'empire byzantin . Je me suis ,permettront de prendre quelque idée de' la use et
efforcé d'y ,mettre en lumière les ίdées maî- du costume byzanüns et des monuments de l'art
tresses qui dominent l'éuolut~on de çette his- que Byzance vit naître, prou~ennent de mon Ma-
to~re , de présenter les faits essentiels moins en . nuel d'Art byzantin (Picard, 1910) .
m'astreignant ~u m~nut~eux détail chronolog~- On trouvera á la fin du volume une bibltogra-
que qu'en les groupant en assez larges périodes, phie sommaire des principaux vuur~ges á kre ou
plus campréhens~~es et qυί. rendront mieux ~ consulter.
compte peut-être du sens et de la portée des éυé- Cx . D .
~~ements . Les tables placées ~ la fin du uolume Juillet 1919 .
permettront ~~sément au lecteur de retrouver la
concordance chronologique des faits les plus
CHAPITRE PREMIER
toutes les affaires de l'Église, légiférant et ju- res, la séparation, qui depuis longtemps se pré-
geant pour elle, l'organisant et la dirigeant, con- parait, se précisa et devint définitive . Il y eui
voquant et présidant les conciles, dictant les dorénavant un empire romain d'Orient .
formules de foi, Constantin - et après lui tous
ses successeurs, qu'ils fussent orthodoxes ou ΙΙ
avens -réglèrent d'après un même principe les
rapports de l'État et de l'Église . Ce fut ce qu'on LΑ CRISE DE L'INVASION BARBARE . - Dllrant la
appellera le césaropap~sme, l'autorité despotique .longue période d'histoire, qui ~a de 33o á 5~~5,
de l'empereur sur l'Église ; et le clergé oriental, deux crises graves, en ébranlant cet empire,
clergé de cour, ambitieux et mondain, docile et achevérent de lui donner sa physionomie pro-
souple, accepta sans protester cette tyrannie . pre . La première est la case de l'invasion
taies, et par tout cela, quoique pendant un siècle sur le Danube comme sir le Rhin, les barbares
encore -jusqu'en 4~fi -l'empire romain ait de la Germanie pénétraient par une lente in-
subsisté, quoique, jusqu'à la fi~~ du vie siécle, en filtration sur le territoire romain . Les uns, par
Orient même, la tradition romaine soit demeu- petits groupes, y venaient comme soldats, ou
rée vivace et puissante, pourtant, autour de la s'y établissaient comme laboureurs ; les autres,
ville de Constantin, la partie orientale de la mo- par tribus entières, attirés par la sécurité et la
narchie s'aggloméra et prit en quelque sorte prospérité de la monarchie, y sollicitaient des
conscience d'elle-même . Dès le we siècle, malgré co~~c~ssions de terres, que leur accordait volon-
le maintien apparent et théorique de l'unité ro- tiers le gouvernement impé~ •i al . Les grands
maine, plus d'une fois en fait les deux moitiés de mouvements de peuples, qui sa~~s cesse se pro-
l'empire se séparèrent, gouvernées par des em- duisaient dans ce monde germaniq~~e si insta-
ble, précipitèrent cette poussée des Bar-
pereurs différents ; et lorsqu'en 3g5 Théodose le
Grand mourut, laissant à sis deux fils Arcadius et bares et finirent par la rendre redoutable . Sous
Honorius une succession partagée en deux empi- leur ruée, au ve siécle, l'empire d'Occident suc-
Ρυ . Ι .
III
IO ' '
LES ORIGINES DE L EMPIRE I) O~IENT LA C~1$E RELIGIEUSE ~t'
t~nopie (38i), et, des ce moment, s'était marqué á peindre, á enluminer ou á copier des manus-
l~ contraste entre l'esprit grec, épris de méta- crits : ee qui lui a valu le surnom de Calligr~-
physique subtile, et le clair génie de l'Occident phe . Si son souvenir cependant subsiste dans
latin, l'opposition entre l'épiscopat oriental, do- l'histoire, c'est parce qu'il a fait bâtir la puis-
cile aux volontés du prince, et la ferme et hau- sanie enceinte de remparts qui, durant tant de
taine intransigeance des pontifes romains . Le siécles, protégea Constantinople, et parce que,
débat qui, au ve siècle, s'engagea sur l'union
dans le Code Théodos~en, il a fait réunir les
des deux natures - la nature humaine et la na- canstüutions impériales promulguées depuis
ture divine - dans la personne du Christ, ac- Constantin . Mais, tel qu'il était, il devait, en
centua encore ces divergences et troubla l'em- face des querelles de l'Église, se montrer éira~~-
~ire d'autant plus gravementque la politique se gement faible et impuissant .
méta á la querelle religieuse . En effet, de méme Nesiorius, patr~a~ •c he de Constantinople, en-
que les papes, en Occident, fondaient, avec seignait que dans le Christ il fallait séparer la
Léon le Grand (440- 462) la monarchie pontifi- personne divine et la pe~~sonne humaine, qui
cale, les patriarches d'Alexandrie, avec Cyrille ,lé~us n'était qu'un homme devenu Dieu, et il re-
X412-444) et Dioscore (444-45i), tentaient alors, fusait en co~~séquence à la Vierge l'appellation
~n Orient, d'établir une papauté alexandrine . de Theutokos (mère de Dieu} . Cyrille d'Alexazz-
Et par ailleurs, á la faveur de ces troubles, les drie saisit avec empressement cette accasioa
vieilles oppositio~~s nationales, les tendances sé- de diminuer l'évêque de Ia capitale et, soutenu
~aratistes toujours vivantes trouvaient, dans la par la papauté, il fit au concile d'Éphése (43~}
lutte contre l'orthodoxie, une occasion propice solennellement co~~damner le nestorianisme ;
de se manifester et n~êlai~nt ainsi étroitement après quoi, imposant sa volonté à l'empereur, il
au conflit religieux les intérêts et les visées po- régna en maître sur l'Église d'Orient . Quand
litiques . Eutychès, quelques années plus tard, exagë*-
En 428, depuis vi~~gt a~~s, Théodose II rognait rant la doctrine cyrillienne, fit de plus en phrs
à Byzance (408-450), sous la tutelle de sa soeur disparaître la nature humaine dans la personne
Pulchérie . Éternel mineur, il passait son tempo divine (ce fut le monophysisme), il trouva dt,
bores qui s'étaient taillé des royaumes en Gaule, d'une rupture avec Rome, de ramener les dissi-
en Espagne, en Afrique, ~n Italie, quoiq~~'il ré- dents monophysites . Ce fut l'objet de l'édit
clamât toujours sur eux de vagues droits de su- d'union (Henotikon J, promulgué en 482 par Zé-
zeraineté, en fait, par les territoires qu'il possé- non, et qui eut pour premier effet d'amener le
dait, cet empire était surtout oriental . Il compre- schisme entre Byzance et Rome : pendant plus de .
nait la péninsule des Balkans tout entière, à trente ans (484-5~ 8), avec une àpre intransigeance,
l'exception de la partie nord-ouest, l'Asie Mi- les papes et les empereurs, Anastase surtout,
neure jusqu'aux monts d'Arménίe, la Syrie jus- monophysite convaincu et passionné, se com-
qu'au delà de l'Euphrate, l'Égypte et la Cyré- battirent ; et au cours de ces trubles, l'Empire
naïque . Ces pays formaient 64 provinces on d'Orient acheva de se constituer en un corps
éparch~es, réparties entre deux préfectures du séparé .
prétoire : celle d'Orient (diocèses de Thrace, Enfin, de plus en plus, la civilisation de l'em-
Asie, Pont, Orient, Égypte) et celle d'Illyricum pire grenait une couleur orientale . Même sous
(diocèse de Macédoine) . Quoique l'adm~nis- la domination de Rome, l'hellénisme, dans tout
tration de l'empire fût toujours organisée sur le l'Orient grec, était demeuré vivace et fort . De
modèle romain et fondée sur la séparation des grandes et florissantes cités, Alexandre, Antio-
fonctions civiles et militaires, le pouvoir impérial che, Ephèse, étaient le centre d'une culture in-
y était devenu de plus en plus absolu, à la façon trllectuelte et artistique remarquable . Dans
des monarchies orientales ; et, depuis 450, la céré- leur rayonnement, en Égypte, en Syrie, en Asie
monie du sacre lui donnait, par surcroYt, le pres- Mineure, avait pris naissance une civilisation
tige de l'onction sainte et de l'investiture divine . to~~te pénétrée des traditions de la Gréce classi-
La sollicitude intelligente de l'empereur Anas- que . ~onstantinople, enrichie par son fondateur
tase assurait à cet empire des frontières soli- des chefs-d'aeuvre du monde grec, devenue
dement défendues, de bonnes fi~~ances, une ad- par là le plus admirable des musées, n'entrete-
ministration plus honnête . Ét le sens politique nait pas moins puissamment les souvenirs de
des souverains s'efforçait de rendre à la monar- l'antiquité hellénique . Par ailleurs, au contact
chie l'unité morale, es essayant, ftlt-~e au prix de la Perse, le monde oriental s'était réveillé et
épouse que Dieu lui avait donnée, » dans celle réalités et des nécessités . Elle etltvoulu y apai-~
qu'il se plaisait á ;appeler « son charme le plus ser les querelles religieuses préjudiciables à la
doux, » dans l'impératrice Théod~ra . tranquillité et à la puissance de l'empire, rame-
Théodora aussi était une parvenue . Fille d'un ner par d'opportunes concessions et une large
gardien des ours de l'Hippodrome, elle avait, tolérance les nationalités dissidentes, telles que
s'il faut en croire les commérages de Procope 1a Syrie et l'Égypte, et, fût-ce au prix d'une
dans l'H~sfoire secrèie, scandalisé ses contem- rupture avec Rome, refaire la forte- unité de la
porains par sa vie d'actrice á la mode et pas • monarchie orientale . Et on peut se demander si
l'éclat de ses aventures, et davantage encore l'empire qu'elle rêvait, plus ramassé, plus homo-
;quand elle conquit le coeur de Justinien, réussit gène, plus fort, n'eilt pas mieux résisté aux as-
à se faire épouser par lui, et avec lui monta sur sauts des Perses et des Arabes . En tout cas, elle
.le tr8ne . Il est certain qu'aussi longtemps qu'elle fit sentir sa main partout, dans l'administration,
vécut, - elle mourut en,548, - elle exerça sur dans la diplomatie, dans la politique religieuse ;
l'empereur une influence toute-puissante et gou- et aujourd'hui encore, à Saint-Vital de Ravenne,
verna l'empire autant et peut-être plus que lui . .dans les mosaïques qui décorent l'abside, son
C'est que, malg~•é ses défauts, - elle aimait l'ar- image, dans tout l'éclat de la majesté souve-
gent, le pou -vo~r et, pour conserver le tr8ne, elle raine, fait face, comme une égale, à celle de
fut souvent perfide, cruelle, implacable dans ses Justinien .
haines, - cette grande ambitieuse avait d'émi- III
nentes qualités, de l'énergie, de la fermeté, une
volonté résolue et forte, un esprit politique avisé L+A POLITIQUE EXTÉRIEURE DE Jusr~w~~N . - Au
et clair, et peut-être voyait-elle plus juste que moment où Justinien prenait possession du
son impérial époux . Tandis que Justinien rêv~~it pouvoir, l'empire n'était pas remis encore de la
de reconquérir l'Occident, de fonder sur l'alliance grave crise qu'il traversait depuis la ûn du v° siè-
avec la papauté l'empire romain reconstitué, cle . Durant les derniers mois du régne de Justin,
elle, en orientale qu'elle était, tournait les ye~~x les Perses, mécontents des empiétements de la
vers l'Orient, avec un sentiment plus exact des politique impériale au Caucase, en Arménie,
pagne fut aussi rapide que triomphante . Battu bien ensuite s'emparer de Ravenne (540) et
Decimum et á Tricamarum, Gélimer, cer~~é dans amener Vitίgès captif aux pieds de l'empereur ;
sa retraite du mont Pappua, fut obligé de se les Goths se ressaisirent, sous la conduite de
rendre (534) . En quelques mais, quelques régi- l'habile et énergique Totila . Bélisaire, renvoyé
menu de cavalerie - car c'est eux qui jouèrent en Italie avec des forces insuffisantes, y échoua
le r~le décisif - avaient, contre toute attente, lamentablement (544-548) ; il fallut l'énergie de
détruit le royaume de Gensér~c . Bélisaire victo- Narsès pour abattre à Taginae (552) la résis-
rieux reçut á Constantinople les honneurs du tance ostrogoth~que, écraser en Campanie les
triomphe ; et s~, à la vérité, il fallut quinzé ans derniers rassemblements barbares (553) ., débar-
encore (534-548) pour dompter les révoltes des rasser la péninsule des hordes franques de Leu-
Berbéres et les soulévements des troupes mer- tharis et de Butilin (554) . Il avait fallu vingt ans.
cenaires et indisciplinées de l'empire, Justinien pour reconquérir l'Italie . Cette fois encore l'ópti-
cépendant put se glor~tier d'avoir reconquis la misme de Justinien avait cru trop vite la con-
plus grande partie de l'Afrique et prendre quëte terminée • et peut-être aussi ne fit-il pas
orgueilleusement les surnoms de Vandalique et assez . tut le grand effort nécessaire pour briser
d'Africain . d'un seul coup la force des Ostrogoths . C'est
Les Ostrogoths d'Italie avaient assisté sans avec des . armées tout à fait insuffisantes, -
bouger à l'écrasement du royaume vandale . vingt-cinq ou trente mille soldats á peine, -
Bient~t leur tour arriva . L'assassinat d'Amala- qu'on entreprit de replacer l'Italie sous l'autorité,
sonthe, la fille du grand Théodoric, par son mari impériale ; et la guerre en conséquence se traîna
Théodat (534), fournit á Justinien l'occasion lamentablement,
d'intervenir ; mais cette fois la guerre fut plus En Espagne également, Justinien profita des
d~~re et plus longue . Bélisaire put bien con- circonstances pour intervenir dans les luttes
quérir la Sicile (535), prendre Naples, puis dynastiques du royaume wisigoth (554) et recon-
Rome, où il soutint contre l'armée du nouveau quérir le sud-est du pays .
roi des Ostrogoths, Vitigès, un siège mémorable Grâce à ces campagnes heureuses, Justinien
d'une année entière (mars 53~-mars 538) ; il put pouvait se flatter d'avoir réalisé son rêve. Grâce
á sa tenace ambition, la Dalmatie, l'Italie, l'Afr~- troupes spéciales, les soldats de la frontiére
.que orientale tout entière, le sud de l'Espagne, (Iim~tane~), construction d'un puissant réseau de
les Iles du bassin occidental de la Méditerranée, forteresses, - garantirent la sécurité du pays .
Sicile, Çorse, Sardaigne, Baléares, étaient ren- Just~nien put se flatter d'avoir restauré en Occi-
trées dans l'unité romaine ; l'étendue de la monar- dent cette paix parfaite, cet « ordre parfait n,
~hie se trouvait presque doublée . Par l'occupa- qui lui semblait la marque d'un État vraiment
fion de Septem (Ceuta), l'autorité de l'empereur civilisé .
s'éteńdait jusqu'aux colonnes d'Hercule, et si l'on
excepte la partie de c8tes que gardaient les Wi- Les guer~•es d'Orient . -Malheureusement, ces
sigoths en Espagne et eń Septimanie et les grandes entreprises avaient ~huisé l'empire et
Francs en Provence, de nouveau la Méditerra- lui avaient fait négliger l'Orient . L'Orient se
née était un lac romain . Sans doute, ni l'Afrique, vengea - de la façon la plus redoutable .
ni l'Italie ne rentraient dans toute leur étendue La première guerre de Perse (52~-532) n'avait
ancie~~ne dans l'unité impériale ; et elles y ren- été que l'annonce du péril qui menaçait . Aucun
#ra~ent épuisées, ravagées par - tant d'années de des deux adversaires ne tenant à s'engager à
guerre . Cependant, ces conquêtes do~~naient á fo~~d, la lutte était demeurée indécise ; la victoire
l'empire un regain incontestable de prestige et de Bélisaίre á Dara (530) avait été compensée
~de gloire, et Justin~en n'épargna rien pour l'as- par sa défaite á Callinicum (53i), et on s'était des
surer. L'Afrique et l'Italie reeonquises formère~~t, deux parts empressé de conclure une paix boi-
gomme autrefois, deux préfectures du prétoire, teuse (532 ). Maïs le no~weau roi de Perse, Chos-
et l'empereur s'eQorça de rendré aux populatio~~s roès Anoushirvan (53~-5~g), actif et ambitieux,
l'exacte image de l'empire tel qu'elles l'avaient n'était pas homme á se contenter de ces résul-
. autrefois connu . Des mesures réparatrices effa- tats . Voyant Byzance occupée en Occidznt,~ń-
cè~•ent partiellement les misères dē la guerre . quiet surtout des projets de domination univer-
Des précautions défensivés, - eréation de selle que Justinien ne dissimulait pas, en 540, il
grands ~ommandeme~~ts militaires , organisa- se jeta sur la Syrie et saccagea Antioche ; en
üon de marches ( limites ), qu'oc~upérent des 54~ , il envahissait le pays des Lazes et emportait
P~ . . III .
3 L& RÉGNB DE JUSTINIBN
34 LE RÈGNE DE JUSTINIńN
LE GOUVERNEMENT INT~RIEUR 35
La diplomatie byzantine enfin, complétant titutions militaires et se complut trop aux pra=
l'action militaire, s'efforçait d'assurer, dans le tiques d'une diplomatie ruineuse qui, e~~ dispen-
monde envier, le prestige et l'influence de l'em- sant l'argent . aux barbares, excitait dangereuse-
pire . Par une habile distribution de faveurs et ment leurs convoitises, par ailleurs il est certain
d'argent, par une ingénieuse habileté à diviser qu'aussi longtemps que l'empire fut assez fort
les uns contre les autres les ennemis de l'empire, pour se défendre, sa diplomatïe, soutenue par
elle amenait sous la suzeraineté byzantine et les armes, sembla aux contemporains une mer-
rendait inoffensifs les peuples barbares qui flot- veille de prudence , de finesse et de bon conseil
taient sur les frontières de la monarchie . Par la. (~ú6ou~~~) ; malgré les lourds sacrifices que cofltè-
propagande religieuse aussi, elle les faisait rent á la monarchie les ambitions formidables
entrer dans la sphère d'influence de Byzance . de Justinien, ses détracteurs même ont reconnu
Les missions qui ont porté k christianisme des que ~ le r81e naturel d'un empereur á l'âme haute
rivages de la mer Noire aux plateaux d'Abyssine est de vouloir agra~~dir l'empire et le rendre
et aux oasis du Sahara, ont été un des traits les plus glorieux » (Procope) .
plus caractéristiques de la politique grecque au
moyen âge . Ainsi l'empire se constituait une
1V
clientèle de vassaux : Arabes de Syrie et de
l'Yémen, Berbères de l'Afrique du Nord, Lazes LΕ GOUVERNEMENT INTÉRIÉT7R DE JUSTINIEN . -
et Tzanes αυx confins d'Arménie, Hér~~les, Gépi- Le gouvernement intérieur de l'empire ne donna
des, Lombards, Huns sur le Danube, et jus--
pas moins de soucis à Justinien que la défense du
qu'aux souverains francs de la Gaule lointaine, territoire . Une réforme administrative urgente
où, dans les églises, on priait pour l'empereur s'imposait à son attention . Une crise religieuse
romain . Gonstantinople, où Justinien accueillait redoutable réclamait sa sollicitude .
magnifiquement les souverains barbares, appa-
raissa~t comme la capitale de l'univers . Et s'il est La réforme législatwe et admin~slratiue . -La
vrai que, durant les dernières années du régne, monarchie étáit étrangement troublée . L'admi-
l'empereur vieilli laissa se désorganiser les ins- nistration était vénale et corrompue ; le désordre
.~ LB Rli(3~NE DS JUSTINIEN
LE GOUVERNEMLNT INTÉRIEUR 3,
~t la misère régnaient dans les provinces ; la bliées par Justinien entre 534 et 565 complèta
justice, grâce à l'obscurité de la loi, était arbi- l'imposant monument connu sous le nom de Cor-
traire et partiale, et l'une des plus graves con- pus juris ci~~hs .
séquences de cette situation était que les impôts De cette grande oeuvre législative, Justinien
rentraient fort mal . Justinien avait trop le goflt fut s~ fier, qu'il interdit d'y toucher à l'avenir et
de l'ordre, le désir de la centralisation adminis- de l'altérer par aucun commentaire, et que, dans
trative, et aussi le souci du bien public, pour . tolé- les écples de droit réorganisées à Constantinople,
rer un tel état de choses . II avait par ailleurs, à Beyrouth, à Rome, il én fit la base immuable
pour ses grandes entreprises, -d'incessants be- de l'enseignement juridique . Et, en effet, malgré
soins d'argent . ses défauts certains, malgré la hâte du travail
Il entreprit donc une double réforme . Pour ei~trainant des répétitions et des contradictions,
donner à l'empire « des lois certaines et indiscu- malgré la façon lamentable dont y furent mis en
tables », il confia à son ministre Tribo~~ien _une pièces les plus beaux mon~~ments du droit ro-
grande oeuvre législative . Une commission, réu- main, ce fut une très grande oeuvre, l'une des
nie en 5~8 pour la réforme du Code, rassembla
plus fécondes pour les progrés de l'humanité . Si
et classa en un recueil unique les principales le droit Justinien a fourni au pouvoir impérial
constitutions impériales promulguées depuis l'é-
le fondement de son autorité absolue, il a aussi,
poque d'Hadrien . Ce fut le Code Justinien, publié dans le monde du moyen âge, conservé et réap-
en 52g, et dont une nouvelle édition parut en 534 .
pris plus tard à l'Occident l'idée de l'Ltat et les
Ensuite ce fut le Digeste ou Pandectes, o~~ une principes de l'organisation sociale . Il a par a~l-
autre commission, nommée en 530, réunit et leurs, en pénétrant la rigueur du vieux d~ •o it
classa les décisions extraites des ouvrages des romain de l'esprit nouveau du c}iristianisme,
grands jurisconsultes du second et du troisième
introduit dans la loi un souci jusqu'alors inconnu
siècle, oeuvre énorme qui fut achevée en 533 . Les
de justice sociale, de moralité publique et d'hu-
I~stitutes résumérent en un manuel, à l'usage
manité .
des étudiants, les principes du droit nouveau .
Pour réformer l'administration et la justice,
Enfin, le recueil des nouvelles ordonnances pu-
Justinien, en 535, promulgua deux grandes or-
~}O 1.E HÉGNE Ilî: JliS '~'I1IR;Y LA CIVILISATION BYZANTINE AU VI ° SIÉ(:LE /y~
de maintenir l'accord rétabli avec la papauté ; de vingt ans (543-565), agita l'empire, provoqua
pour restaurer en Orient l'unité politique et mo- le schisme dans l'Église d'Occident, -sans rame-
rale, il lui fallait ménager les monophysites, ner la paix en Orient . De tout le déploieme~~t de
tol~jours nombreux et puissants en Égypte, en rigueur et d'arbitrage que Justinien mit en oeuvre
Syrie, c~~ Mésopotamie, en Arménie . 1J~~tre contre ses adversaires, et dont le pape Vigile fut
1~ome, qui exigeait la condamnatίon des dissi- la plus illustre victime, aucun effet utile ne ré-
dents, et Théodore, qui conseillait le retour à l~ sulta . La politique d'union et de tolérance que
politique d'union de Zénon et d'Anastase, l'em- conseillait Tlιéodora était sans doute misée et
pereur, plus d'une fois, ne sut que résoudre ; et sage ; l'incertitude de Justinien à prendre nette-
sa volonté hésitante s'efforça, à travers bien des ment parti n'en fit, malgré ses bonnes intentions,
contradictions, de trouver un terrain d'entente sortir d'autre effet qu'une recrudescence des ten-
pour concilier les ter~~~es du dilemme . Tour à dances séparatistes de l'Égypte et de la Syrie,
tour, pour complaire à Rome, il laissa le concile qu'une exaspération de leur haine nationale
de Constantinople de 536 anathématiser les dis- contré l'empire .
sidents, déchaîna contre eux Ia persécution (53~-
538), s'attaqua á la citadelle qu'était pour eur_
l'Égypte ; et, pour complaire à Théodore, ~l laissa LΑ CIVILISATION BYZANTINE AU VI S SIÉCLE .
les monophysites reconstituer leur l~glise (543) Dans l'histoire de la civilisation byzantine, le
et s'efforça d'obtenir de la papauté, au concile règne de Justinien marque une époque„ déc~-
de Constanti~~ople de 5~~3, une condamnation sive . Des écrivains de talent, historiens tels qué
détournée des décisions de Chalcédoine . Ce fut Procope et Agathias, Jean d'Éphèse ou Évagrius,
l'affaire des Troίs Chapitres (~), qui, pendant plus poétes tels que Paul le Silentiaire, théologiens
tels que Léontius de Byza~~c~, ont continué, non
(i) Ce nom vient de ce que le débat portait sur les estraita d~~
sans éclat, les traditions de la littérature grecque
onvrages de trois théologiens , Théodore de Itiopsneste, Théo- classique, et c'est vers l'aube du v~~ siècle que
doret de Cyr et Ibas d'Edesse, doit le concile -de Chalcédoine
avait approuve la doctrine et que Justinien fit condamner pour Romanos, « le prince des mélodes », a créé la
complaire auz monophysites. poésie religieuse , la plus belle manifestation
demandera pourtant, si cette gra~~deur ne fut pas contemporains se demandaient avec stupeur « où
plus apparente que réelle, et si ce magnifique s'étaient évanouies les richesses des Romains » .
effort d'impérialisme, en arrêtant l'évolution na- lJne liquidation s'imposait : elle fut difficile et
turelle de l'empire d'Orient, en l'épuisant au désastreuse . Ce fut l'oeuvre des successeurs de
service d'ambitions excessives, ne lui fit pas, Justinien, sors neveu Justin II (565-5~8), Tibère
au total, plus de mal que de bien . Dans toutes (5~8-58z) et Maurice (582-fio2) .
les entreprises de Justinien, il y eut toujours Résolumeni ils inaugurérent une politique nou-
une disproportion redoutabte entre le but pour- velle . Se détournant de l'Occident, où d'ailleurs
suivi et les ressources disponibles pour le réa- l'invasion des Lombards (568) enlevait á l'empire
liser ; le manque d'argent fut la plaie constante ia moitié de l'Italie, les successeurs de Justinien
qui ralentit les projets les plus magnifiques et se bornérent à y organiser une solide défensive
ruina les plus louables intentions . Pour y remé- par la création des exarchats d'Afrique et de Ra-
dier, il fallut accro~tre la tyrannie fiscale, jus- venne . Ils purent à ce prix reporter vers l'Urgent
qu'au ~o~nt où elle devient intolérable ; et comme, leur attention et prendre, en face des ennemis
par ailleurs, durant les dernières années du de la monarchie, une attitude plus fiére . Grâce
régne, Justinien vieilli laissa de plus en plus aux mesures q~~'ils ordon~~érent pour réorganiser
aller toutes choses à l'abandon, la situation de i'armée, la guerre perse recommencée en 5~a, et
la monarchie, lorsqu'il ~r~ourut, en 565, á l'âge qui dura jusqu'en 5g~, se termina par un traité
de 8~ ans, était absolument lamenta~~le . Finan- avantageux, qui céda l'Arménie perse à Byzance .
cièrement, militairement, l'empire était épuisé ; Et si, en Europe, les Avars et les Slaves rava-
sur toutes les frontiéres montaient à l'horizon gèrent cruellement la péninsule des Balkans,
des périls redoutables ; à l'intérie~~r, l'autorité- emportánt les forteresses du Danube, assiégeant
publique étáit affaiblie, dans les provinces, par Thessalonique, menaça~.t Constantinople (5gι)
le développement de la grande propriété féodale, et commençant même á s'installer de façon du-
dans la capitale, par les . luttes incessantes des rable, d'heureux succès reportérent finalement
Verts et des Bleus ; on ne vivait plus que d'expé- la guerre au delà des frontiéres et portèrent jus-
dients ; la misère partout était profonde ; et les qu'á la Theiss les armés byzantines (60~) .
Malheureusement la crise intérieure gâta tout . roès II, se posant en vengeur de Maurice, reprit
Justinien avait tendu à l'excès les ressorts du la guerre ; les Perses conquirent la Mésopota-
gouvernement absolu ; lui mort, l'aristocratie mie, la Syrie, l'Asie Mίneure . En 608, ils étaient
releva la tête, les tendances séparatistes des pro- à Chalcédoine, en face de Constantinople . A l'in-
vinces recommencèrent à se manifester, les fac- térieur, les révoltes, les conspirations, les émeu-
tions du cirque à s'agiter . Et comme le gouver- tes se succédaient ; l'empire tout entier demandait
nement était impuissant à rétablir la situation un sauveur . Il vint d'Afrique . En 6~0, Héraclius,
financière, le mécontentement ne fit que s'ac- le fils de l'exarque de Carthage, renversait Pho-
croître, aggravé en~ ;ore par la désorganisation cas et fondait une nouvelle dynastie . Après prés
administrative et les mutineries de l'armée . d'un demi-siècle d'agitation, Byzance retrouvait,
La politique religieuse rendit plus aigu le ma- pour diriger ses destinées, un chef. Mais pendant
laise général . Après un court essai de tolérance, ce demi-siècle aussi, Byzance progressiveme~~t
on revint en effet à la persécution pour dompter était revenue vers l'Orient . La transformation
les dissidents ; et si Maurice y mit un terme, par dans le sens oriental, interrompue par le long
ailleurs le conflit inopportuń qu'il lassa éclater règne de Justinien, allait maintenant se pré~;ipi-
entre le patriarche de Constantinople, prétendant ter et s'achever .
au titre d'oecuménique, ~t le pape Grégoire le
Grand, augmenta les rancunes anciennes entre
l'Orient et l'Occident . Malgré ses réelles quali-
tés, Maurice, par son économie rigide, fut pro-
fondément impopulaire . Et le relâchement de
l'autorité politique rendit aisé le succès de la
révolution militaire qui mit Phoaas sur le tr8ne
(f~oa) .
Le grossier soldat qu'était le nouveau prince
ne put se maintenir que par la terreur (6o2-óio) ;
il acheva par là de ruiner la monarchie . Chos-
Ρι . Π' .
CHAPITRE III
5ο LA DYNASTIE D'HÉRACLIUB
LA RECONSTITUTION DE L ' E~IPIRS J
CI
puissante sur toute la politique du régne . Impres- l'unité morale . à l'empire et, pour regagner les
sionnable et nerveux, capable de grands enthou-
monophysites de Syrie et d'Égypte, il se préoc-
siasmes comme de brusques dépressions, plein
c~pa de trouver, d'accord avec le patriarche
d'une foi religieuse ardente, et br~1lant de venger Sergius et Cyrus d'Alexandrie, une formule de
le christianisme des injures des Perses, soldat conciliation qui ramenât à l'orthodoxie les diss~-
courageux enfin, bon administrateur et grand dents . De là naq~~it la doctrine monothélite, que
général, Héraclius se ressaisit . Le patriarche l'empereur définit dans l'exposition de foi connue
mit à sa disposition les trésors de l'Église ; lui- sous le nom d'Ecihesis (638) et qu'il s'appliqua à
même, avec une application inlassable, recons-
faire accepter aussi bien des monophysites que
titua l'armée . Eτι 622, il était prêt pour la lutte . de l'Église romaine .
Pendant six années, sans se laisser détourner L'empire, grâce à ces efforts, semblait recons-
par rien, pas même par la formidable attaque titué : son prestige en Orient était rétabli ; son
.que Perdes et Avars coalisés tentèrent cońtre
influence, par la conversion des Croates et des
Constantinople (626), il combattit les armées du Serbes, s'étendait à nouveau sur le nord-ouest
Grand Roi, reportant la guerre sur le territoire de la péninsule balkanique . Mais ces apparences
ennemi, dans l'Aderbaïdjan (623) et dans l'Ar- brillantes cachaient mal l'épuisement réel . L'état
ménie perse (625), victorieux à Ninive (62 ~), v~c- des finances était lamentable ; les tendances sé-
torieux aux portes de Ctés~phon (628) et entrant paratistes, qui avaient tant aidé au _succès des
dans la légende comme lé premier des croisés . Perses, n'étaient point conjurées . En quelques
La mort de C:hosro~s II (628) et la révolution années, l'invasion arabe allait anéantir tous
qui suivit achevérent d'imposer aux Perses une les résultats des victoires d'Héraclius, en même
paix humiliante, par laquelle ils restituaient temps que sa politique rehgieusé préparait le
toutes leurs conquêtes et surtout la Sainte germe de longues dissensions et de graves con-
Croix, qu'Héraclius rapporta triomphalement á flits.
Jérusalem (62g) .
Aprés ces grands succé~ militaires Héraclius
s'efforça, par sa politique religieuse, de rendre
JS . '
LA DYNASTIB D HÉR~CLIUS LA TRANSFORMATION DE L'EMPIRE J7
C
Syrie, ., dont les florissantes industries étaient une tolérer l'établissement des Croates et des Serbes,
de ses richesses, et de ces ports, Alexandrie, sous la condition qu'ils se co~wertiraient au chris-
Gaza, Béryte, Antioche, centres d'une activité tianisme et deviendraient les vassaux de l'empire .
commerciale merveilleuse . Sans doute un autre Dans d'autres régions encore, les Slaves avaient
point noir montait à l'horizon : depuis 6~g, les pénétré . Il y avait des cantonnements slaves,
Bulgares, franchissant le Danube, s'étaient ins- des scla~inies, en Mésie et en Macédoi~~e, et jus-
tallés entre le fleuve et les Balkans . Mais au qu'aux portes de Thessalonique, qu'à plusieurs
total, la monarchie avait résisté aux furieux as- reprises les barbares avaient attaqué et failli em-
sauts de l'Islam ; la défense dú territoire avait porter . II y avait des Slaves en Thessalie, -dans
été assurée par une grande réforme administra- la Grèce centrale, jusque dans le Péloponèse et
tive ; et l'empire, plus ramassé, plus homogéne, dans les îles de l'Archipel ; et s'a est exagéré de
débarrassé du danger des séparatismes orientaux croire, comme l'a soutenu Fallmerayer, à une
et du poids mort de l'Occident (il allait en 6g8 compléie slavisation de ces régions, il n'en de- .
perdre l'Afrique, comme il avait perdu l'Espagne meure pas moins que des éléments étrangers
et la moitié de l'Italie), semblait un organisme nombreux étaient venus se mêler aux populations
solide et capable de vivre, sous la forme nouvelle helléniques et que ces envahisseurs donnaient
et tout orientale qu'il avait revêtue au cours du fort à faire . aux empereurs du v~~e siècle, qui ne
νττe siècle . parvinrent point sans peine à les soumettre et à
IV les assimiler . Dans le nord-est de la péninsule,
les Bulgares s'étaient ensuite établis en masse,
LΑ TRANSFORMATION DE L'EMPIRE AU V1I ° sIÉCLE . et, au contact des populations slaves installées
- Une transformation profonde s'y était en effet dans le pays, progressivement ils s'étaient sla-
accomplie . visés et avaient fondé un État solide . De tout
Transformation ethnographique tout d'abord . cela résultaient assurément pour l'empire de sé-
Dans la péninsule balkanique, dévastée et dépeu- rieux périls ; mais à ce mélange de races, il trou-
plée, des peuples nouveaux s'étaient peu à peu vait aussi un avantage ; par l'infusion de ce sang
installés . Dans le nord-ouest, Héra~lius avait dtl nouveau, il se raje~~nissait .
'
LA DYNASTIE D IiÉRACLIU~
'
LA TRAYS~ORyfATION DE L EbIPI~E Ó1
velles prennent leur place, logothétes, ép~r- les patriarcats d'Alexandrie, d'Antioche, de
ques, stratéges, drongaires . Dans l'armée, où Jérusalem, le chef unique de l'Église byzantine,
prédominent les éléments asiatiques et armé- apparaît comme un très grand personnage, dont
niens, la grec devient la langue du comman- l'influence dans le gouvernement est souvent
dement . Et quoique, jusqu'à son dernier jour,
toute puissante . Le développement du mona-
l'empire byzantin ait continué á s'appeler « l'em- chisme, le grand nombre et la richesse des
pire des Romains », on n'y comprenait plus couvents, l'influence qu'exercent les moines
guère l~ latin, et le mot `Pw~~ioc signifiait les sur la direction des consciences, la vénération
Grecs . Enfin, au lieu de la langue élégante, un q~~i s'attache à leur personne et aux images
peu artificielle aussi, dont se servaient les éeri- saintes que possèdent leurs monastères, ne sont
vains du ve et du vie siècle, et oú ils conti- pas des faits moins significatifs . Dep~.is" la fin
nuaient la tradition de la littérature classique, du vie siècle enfin, le paganisme a disparu, et
le grée vulgaire apparaît et devient la langue avec lui l'esprit antique ; à partir du commen-
parlée de la plupart des populations de la mo- cement du v~~e siècle, la littérature byzantine
narchie . prend une forme presque uniquement religieuse
En même temps que l'empire s'hellénisait, et populaire ; intellectuellement, artistiquement,
l'empreinte religieuse, dont il avait toujours été cette période est une des plus pauvres que By-
marqué, devenait plus profonde, . par la place zance ait connues . Mais, par tout cela, le grec,
croissante que prenait l'Église dans la vie pu- .qui fut toujours en Orient la langue de l'Église,
blique et dans la société . Dans l'État, les ques- achevait de conquérir l'empire ; et les ambitions
ü~ns religieuses tiennent une place essentielle ; des patriarches de Constantinople froissant les
les guerres d'Héraclius sont autant de croisades, susceptibilités romaines, la politique religieuse
et les problèmes théologiques passionnent l'es- des empereurs combattant et brutalisant les
prit des empereurs . L'orthodoxie, dès ce mo- papes, la mésintelligence et l'hostilité crois-
ment, se confond à Byzance avec la nationalité . santes entre l'Orient et l'Occident, préparaient.
Par ailleurs, le patriarche de Constantinople, la rupture entre les deux mondes et contri-
devenu, depuis que les Arabes avaient conquis buaient à rejeter vers l'Orient l'empire - by-
5αίιιΙ ΙΙι~ιιιé1rΙιι~ ι'i ]ι •~ ύ>ιι~ίαιrιιr =, ΑΙιι~ :ιηι ; ιιι~ ή,ιί~ιΙ-Π ;~ιιυ~υ'ιιιs ι1ι~ οrLπιίι~ιιι~ .
'rιι' rίι •ι'Ιι • . ~1'ΙιυΓ . Lι • lπυrιιι~ιιίΙ .~ !11ίrιιιι~J - !' .U~! Ί3ι~ ιιιιΓ~~~ /
CHAPITRE IV
lointaine, aidèrent singuliérement au succès des imposaient ai~isi aux ennemis de la monarchie
Byzantins . Pendant tout le règne de Constan- le respect d~ l'empire, les deux premiers empe-
tin V, la guerre fut heureuse pou : les Grecs ; et,. reurs isauriens s'appliquèrent au dedans à le re-
après lui, son fils Léon IV put, en ~~3, avec constituer. Ce fut une très grande oeuvre de réorga-
une armée de ioo,ooo hommes, envahir la Syrie, nisation administrative, économique et sociale .
et, en ~~g, repousser glorieusement les musul- four assurer 1a défense des frontières, Léon III
màns en Asie Mineure . Le péril arabe, si terrible et son fils com~~encèrent par généraliser le régime
au v~~° siècle, avait cessé d'~tre menaçant pour .des thèmes, divisant les grands gouvernements du
l'empire . v~~e siècle en circonscriptions plus nornbreuse~,
Constantin V s'efforça de même de conjurer le moins étendues et plus faciles á défendre ; ils y
danger bulgare . En X55, il prenait l'oiensiv~ et, trouvaient en outre l'avantage politique d'amo~n-
pendant neuf campagnes successives, il infligeait drir la puissance que donnait aux stratéges la
aux barbares, à Marcellaï ~75g), à Anchialos (~62), possessiondetropvastesterritoiresetdedi~ninuer
de si sanglantes défaites, qu'en 764, épouvantés, le danger de révoltes qui en résultait . En même
ils n'essayaient même plus de résister et accep- temps que le Code militaire restaurait la disci-
taient la paix . La guerre reprise en ~~z, et pour- pline dans l'armée, une administration financiére
s~~ivie jusqu'à la fin du règne, ne fut pás moins attentive, souvent dure, rendait des ressources
triompha~~te ; et si Constantin V ne réussit pas á au trésor . Le Code .rural s'efforçait de restrein-
anéantis• l'État bulgare, du moins rétablit-il dans dre le développement inquiétant des grands do-
la péninsule balkanique le prestige des armes, maines,, d'arrêter la dispa~ •~ tion de la petite pro-
byzantines . Pay ailleurs, il réprimait les soulè- priété libre, d'assurer aux paysans une condition
vements des Slaves de Thrace et de Macédoine, meilleure . Le Code nautique encourageait le
(~53), et, à l'exemple de J~~stinien II, il établis- développement de la marine marchande . :~iais
sait en Asie Mineure, - dans le thème d'Opsikion, surtout la grande réforme législative, que mar-
une partie de leurs tribus (~62) . qua la publication du code civil qu'on appelle
1'Ecloga (~3g), améliorait l'administration de la
La réforme intérieure .-En même temps qu'ils .justice et introduisait dans la loi, avec plus de
J~ L[;S EVPEREURS ISAURIEλS LA QUERELLE ll~~ IMAGES 7I
c1_arté, un esprit to~~t nouveau et plus chrétien dont on les mêlait à tous les actes, à tous les
d'humanité et d'égalité . Ap~•è s un demi-siècle intérêts humains, et beaucoup de bons esprits se
de gouvernement, les deux premiers Isauriens préoccupaient justement du tort que ces prati-
avaient fait l'empire riche et prospère, malgré la ques faisaient à la religion . )Jn Asie surtout,
peste q~~i le ravagea en ~!~~, malgré l'agitation les tendances hostiles aux images étaient puis-
que provoqua la querelle des Images . santes : Léon III, asiatique d'origine, les parta-
geait . Ni lui, ni son fils n'ont été, comme on le
ΙΙ croit parfois, des libres penseurs, des rationa-
listes, des précurseurs de la Réforme ou de la
LΑ ~3UERELLE DES IMAGES (~26- 7cg0~ . - Pour Révolution ; c'étaient des hommes de leur temps,
compléter leur oeuvre réparatrice, Lέon III et pieux, croyants, théologiens même, soucieux
Constantin V tentèrent, en effet, une grande ré- sincèrement de réformer la religion en la puri-
forme religieuse . Ils proscrivirent les images fiant de ce qui leur semblait une- idolâtrie . Mais
saintes, persécutèrent les moines qui s'en firent c'étaient des hommes d'État aussi, préoccupés
les défe~~seurs, et du grave conflit qu'ils déchai- de la grandeur et de la tranquillité de l'empire.
nè~tent, et qu'on appelle la querelle des Images, t)r le grand nombre des monastères, l'accrois-
ils ont gardé, dans l'histoire, le nom d'icono- sement . incessant de la richesse monastique
clasles . créaient, pour l'État, de sérieux dangers . L'im-
On s'est mépris souvent sur le caractère de la munité dont jouissaient les biens d'Église di-
politique religieuse des empereurs isauriens et minuait les ressources du trésor ; la multit~~de
on en . a assez imparfaitement compris l'inten- des hommes qui entraient au cloYtre enlevait
tio~~ et la portée . Les raisons qui l'inspirèrent des travaüle~~rs à l'agriculture, des soldats à l'ar-
étaient à la fois religieuses et politiques . Beau- mée, des fonctionnaires aux services publics .
coup d'âmes pieuses, au début du v~~~e siècle, Mais surtout l'influence que les moines exer-
étaient choquées des excès de la superstition, en çaient sur les âmes et la puissance qui en résul-
particulier de la place faite au culte des images, tait faisaient d'eux un élément d'agitation re-
des miracles qu'on attendait d'elles, de la façon doutable . C'est contre cet état de choses que les
t~•o upes impériales les Arabes, les Bulgares, les Diminuée au dehors, la monarchie état affai-
T .ombards, elle dut se résoudre à la retraite blie au dedans par la complaisance excessive que
ego) . Mais, avec une tenace habileté, elle pré- le gouvernement montrait á l'Église, par les divi-
para son retour au pouvoir : en ~g~, elle ren- sions profondes qu'avait laissées la querelle des
versait son fils et n'hésitait pas à Iui faire cre- images, par le fâcheux exemple enfin qu'avait
ver les yeux . Elle régna alors (~g~-8o2) en vé- donné Iréne en rouvrant l'ére des révolutions
ritable ~empe~~ur, la premiére femme qui eflt dynastiques . Sans doute l'époque iconoclaste
:encore gouverné en son propre nom la monar- avait . été marquée par un grand élan intellectuel
c hie . Mais si, grâce à elle, l'Église, fortifiée, re- et artis"tique ; les empereurs isaariens n'étaient
nouvelée par la lutte, reprit, dans la société . by- point des puritains ; tout en proscriWant les ima-
~antme, toute sa place, si le parti monastique ges, ils avaient aimé le faste, l'éclat mondain
.et dévot, conduitpardes hommes tels que Théo- de la vie de cour, et pour parer leurs construc-
d ort de Stoudion, redevint plus puissant et plus tions, ils avaient encouragé un art profane, ins-
entreprenant que jamais, le souci trop exclu- piré de la tradition antique a~~ssi bien que des
sif qu'avait eu Iréne de la politique religieuse modéles arabes ; et par là encore, aussi bien que
;entraîna pour l'empire de fâcheuses consé- par la place que tiennent, au v~~~~ siécle, les
quences . Malgré les succés passagers remportés Asiatiques, l'empire avait achevé de s'o~ •i enta-
par Constantiń VI sur les Arabes et sur les Bul- liser . Mais quelque grand rdle que conservât la
gares (~g~-~g5), le khalifat de Bagdad, sous le monarchie, comme champ=on de la chrétienté
,gouvernement d'Haroun-al-Raschid, reprenait contre l'Islam, comme gardienne de la civilisa-
glorieusement l'offensive en Orient et obligeait tion contre_ la barbarie, elle était, à la fin du
les Byzantins à lui payer tribut (~g8) . En Occi- v~~~e siècle, partout menacée de périls redouta-
dent, en face de Charlemagne, le gouvernement bles, et elle était très faible . La chute d'Iréne,
._grec montrait la même faiblesse, et l'événe- renversée par le coup d'État de Nicéphore (8ο2)
ment de l'an 800, qui restaurait au bénéfice du allait ouvre• la porte aux désastres et à l'anarch~ .e.
roi franc l'empire romain d'Occident, fut, pour
~a cour byzantine, une humiliation sensible .
Ρτ. ~'~ .
IV
cuta durement en Asie Mineure, et e~~ achevant vertissa~t á là foi orthodoxe, et quoique, dans les
la conversion des Slaves du Péloponèse (8 49) ; années suivantes, le néophyte ait un instant
surtout, par l'oeuvre des missions, elle étendait hésité entre Byzance et Rome, quoiqu'il soit
magnifiquement dans tout l'Orient l'influence entré en relations avec le pape Nicolas Ier pour
de Byzance . A l'appel du prince de la Grande iui demander d'établir le rite latin dans son
Moravie, Cyrille ét Méthode, « les ap~tres des royaume (866), l'influence grecque n'en a pas
Slaves, » allaient porter le christianisme aux moins désormais profondément pénétré en
tribus barbares qui peuplaient la Hongrie et la Bulgarie .
Bohême (863) . Ils faisaient davantage . A l'~nten- C'étaient lá de grands succès . Sans doute, les
tion des nouveaux convertis, ils traduisaient en folies de Michel III (842 -86~), lorsque surtout
slave les Livres Saints ; ils inventaient, pour i~ jeune prince échappa á la-tutelle de sa mère
transcrire leur oeuvre, l'écriture glagolitique, Théodora (856) et de son oncle Bardas, cornpro-
donnant ainsi tout ensemble aux Slaves leur mirent passagèremeńt les résultats acquis . Les
alphabet et leur langue littéraire ; ils prêchaient pirateries des Arabes de Crète désolèrent les mers
en slave, ils célébraient les offices dans la langue orientales ; en Asie Mineure, . pendánt vingt ans
et avec uni liturgie slaves, ils s'ef%rçaient de (844 -863), les succès alternèrent avec les revers ;
former ur~ clergé slave ; et, par jette intelligence en Occident, les musulmans achevaient, de 843
avisée et souple, ils ont conquis le monde slave á 85g, la conquête de la Sicile . Enfin les Rus-
á l'orthodoxie . Pendant vingt ans (863-885), ses, pour la première fois, paraissaient devant
les deux frères de Thessalonique poursuwi- Constantinople (860) et ~l ~~e fallut pas moins,
rent en Moravie leur oeuvre d'évangélisation . dans la croyant:e populaίre, qu'un miracle de la
~t si, finalement, elle succomba devant l'hosti- Vierge pour sauver la capitale .
lité allemande et l'invasion magyare, ailleurs Un autre événement plus grave, plus signifie
les mémos méthodes valaient á Byzance de plus catif aussi, marquait le régne de Michel tII . A
durables succès . Aux rivages du Don, le Chris- la place d'Ignace, destitué par le César Bardas,
Nanisme pénétrait dans l'État juif des Khazars . Photius était monté sur le siège patriarcal de
Surtout, eτι 864, Boris, tsar de Bulgarie, se con- Gonstant~nople X858) . Le pape Nicolas IeΓ, sur
8Ó ~
LES EMPE EU~S ISAU~I~sN~ LA POLITIQUE E%TÉRIEURE Dg L' IiMPIRE ~{~
l'appel du prélat déposé, évoqua l'affaire et grandeur . Quand Basile le Macédonien (~), favori.
chargea ses légats d'ouvrir une enquête . L'a~n- de Michel III et associé par lui au tr~ne, après :
bition de Photius sut merveilleusement exploi- s'être débarrassé de son rival Bardas (866), as-
ter le mécontentement que, depuis des siècles,, sassina ensuite son bienfaiteur (86~) et fit mon-
l'Orient ressentait des prétentions du pape, et ter sur le tr~ne une dynastie ~~ouvelle, il donna,
l'hostilité qu'il éprouvait contre l'Occident ; habi- par son coup d'État, à l'empire byzantin, cent
lement, en face des revendications de la pri- cinquante ans de splendeur, de prospérité et
mauté romaine, il sut faire de sa cause person- de gloire .
nelle u~~e véritable cause nationale . A l'excom-
municatio~ī que lança contre lui Nicolas IeΥ (863), (1) Cette désignation est usuelle : il faut observer ponrtane
qne la famille de Basile était d'origine arménienne et avait été
il répondit en rompant avec Rome . Le concile transplantée assez récemment en Macédoine.
de Constantinople (86~) anathématisa le pape,
dénonça son ingérence illégale dans les affaires
de l'Église orientale et consomma le schisme ..
C'était une preuve éclatante de l'existence . d'ur~
sentiment national byzantin, qui se manifestait .
vers le même temps, de façon non moins claire,
par l'émotion que causait la politique envahis-
sante de Rome en Bulgarie (866) .
Ainsi, vers le milieu du axe siècle, il existait
vraiment une nationalité byzantine, lentement
formée á travers les événements : l'empire, au
sortir de la querelle des Images, avait retrouvé .
l'unité religieuse, la puissance politique, ld gran-
deur intellectuelle ; surtout il était devenu un
empire nettement oriental . Le moment était pro-
che où cet empire allait atteindre l'apogée de sa
LBS BMPSREUR~ DE LA MAISON DE MACÉDOINE 9I
lers ont été le plus souvent des hommes obscu~ •s , la fortune de sa maison . Son fils Léon VI (886-
qu'ils employaient et dont ils demeuraient les ~dxz), dont le gouvernement a pour l'histoire
maîtres . Épris de gloire, le coeur plein des ambi- administrative de l'empire une importance essen-
tions les plus hautes, ils ont voulu faire de l'em- tielle, poursuivit - si différent qu'il fût . de son
pire byzantin la grande puissance du monde père par son . humeur casanière, ses manies de
oriental, champion tout ensemble de l'hellénisme pédant et sa faiblesse en face de ses favoris -
et áe l'orthodoxie ; et par l'effort magnifique de la consolidation de la dynastie avec une sem-
leurs armes, par la souple habileté de leur diplo- blable ténacité : pour assurer un héritier au
~natie, par la vigueur de leur gouvernement, ils tr~ne, il n'hésita pas à scandaliser ses contem-
ont réalisé leur rêve et fait de cette période porains par ses quatre mariages et à entrer en
une époque de véritable renaissance, un des mo- conflit avec l'Église et son chef, le patriarche
ments les plus glorieux de la longue histoire Nicolas . Itilais, à ce prix, on vit pour la première
de Byzance . fois à Byzance, na~tre, au bénéfice d'une famille
Au moment où Basile I~~ montait sur le tr~ne, princière, l'idée de la légitimité . Ce fut l'oeuvre
la situation de la monarchie était encore singu- éminente des deux premiers empereurs macé-
liérement difficile : tout l'État semblait • à re- doniens « de donner, comme l'écrit un con-
constituer . Le rude paysan, que son crime haus- temporain, à l'autorité impériale des racines
sait au pouvoir suprême, avait toutesles qualités puissantes, pour en faire sortir les magnifiques
nécessaires pour suffire à cette lourde tâche : il rameaux de la dynastie » . Désormais il fut phis
était intelligent, également désireux de rétablir difficile de renverser l'arbre aussi fortement en-
l'ordre à l'intérieur de la monarchie et de res- raciné ; désormais il y eut une famille impériale,
taurer son prestige au dehors, bon admin~stra- dont les membres reçurent le nom de « porphy-
teur, excellent soldat, ~ désireux par dessus tout rogénétes » (nés dans la pourpre), et un attache-
d'asseoir solidement l'autorité impériale . Pen- ment populaire, un dévouement loyaliste à cette
dant ses vingt ans de règne, il sut tout à la fois famille . C'était, dans cette monarchie troublée
remettre sur un bon pied les affaires de l'empire jusqu'alors par tant de révolutions, une nou-
et, par le prestige des services rendus, assurer veauté heureuse et grosse de conséquences .
~~ L'APOGÉE DE L'EMPIRE
LES EMPEREURS DB LA MAISON DB MACSDOINE 9J
.Sans doute, même pendant cette période, les affermie que, dans cette monarchie orientale,
révolutions ne manquèrent point . Les troubles
des femmes mêmes purent régner, les niéces
qui marquèrent la minorité agitée de Constan-
de Basile II, Zoé (~oa8-~o50), qui partagea le
tin VII, le fils de Léon VI (g~2-~5g), permirent à
tr~ne avec ses trois époux successifs, et Théo-
Romain Lécapène de s'emparer du pouvoir pour
dora (xo54-io5ó} ; et ces princesses furent popu-
un quart de siècle (gag-g~4) . Un peu plus tard,
laires, comme l'attestent larévolution de io4~, où
quand Romain II, le fils de Constantin VII,
Michel V fut renversé pour avoir . voulu détr~ner
mourut après quatre ans de règne (g5g-g63), la Zoé, et le mécontentement que rencontra Cons-
faiblesse du gouvernement, pendant la minorité tantin Monomaque, quand on le soupçon~~a de
de ses fils Basile II et Constantin VIII, amena le vouloir écarter les deux impératrices, Jamais en-
soulèvement qui porta au poavoir Nicéphore core on n'avait vu rien de semblable à Byzance,
Phocas (g63-góg) et le coup d'État tragique qui, et l'opinion publique professait ouverte~~ent que
par l'assassinat de Nicéphore, fit Jean Tzimiscès « celui qui règne à Constant~nople finalement
empereur (gδg-g~6) . biais aucun de ces usur- est toujours victorieux » ; ce qui faisait de l'u-
pateurs n'osa écarter du tr~ne la descendance surpation non pas seulement un crime, mais,
légitime de Basile IeΓ . Romain Lécapéne, offi- chose pire, ~tne sottise .
ciellement, partagea le pouvoir avec Constan- Comme il se trouva, par ailleurs, que les usur-
tin VII, encore qu'il le reléguát dans les loisirs pateurs aussi furent des hommes éminents et
obscurs de sa studieuse activité d'érudit . Nicé- des généraux remarquables, l'empire put sup-
phore Phocas et Jean Tzimiscés laissèrent régner porter sans accident l'incapacité politique d'un
nominalement les enfants de Romain II et s'ef- Constantin VII, les amusements de viveur d'un
forcèrent, en épousant des princesses de la fa- Romain II, et la longue minorité de ses fils, et
mille impériale, de donner à leur usurpation un trouver pendant un siècle et demi, pour con-
air de légitimité . Et après eux, tout naturelle- duire ses affaires, une unité de vues, une fer-
ment, le pouvoir revint au représentant devenu meté de direction que Byzance, depuis long-
majeur de la famille de Macédoine, a~~ grand temps, ne connaissait plus . Grâce au concours,
empereur Basile II . La dynastie était si bien enfin, de collaborateurs de haute valeur, géné-
1ι. VIL
L'APOGBS AB L'EMPIRE
LA POLITIQUES' flXTÉRIEURIi 97
en séparant à jamais Byzance de Romé, d'ébran-
ler la solidité de la monarchie ; si la maison
de Macédoine finissante a laissé l'empire faible
~n face des Normands et des Turcs et ouvert la
porte ~ une longue anarchie (~05~-~o8i), il n'en
demeure pas moins que, pendant un siècle et
demi, la dynaste que fo~~da Basile Iet a donné à
I3yzánce un éclat merveilleux . Au ~°, au χτ° sié-
~le, Constantinople a été le centre le plus bril-
lant de la civilisation européenne et, comme on
l'a dit, .« le Paris du moyen âge » .
ΙΙ
vité . Malgré quelques succès de la marine byza~~- veinent poussée . En g28, Théodosiopolis, l'ac-
tine, en go7, en g24 surtout dans les eaux de tuel Erzeroum, était prise ; en g34 Méliténe, en
Lemnos, les expéditions dirigées contre la Créte g/~l~ Édesse, d'où on rapporta triomphalement
n'aboutissaient qu'à des désastres (gi ~ et g4g) . l'image , miraculeuse du Christ qui y était con-
Il fallut e~woyer contre l'Yle « que Dieu con- servée, en g4g Germanikia, en g57 Amida, en
fonde » le meilleur général de l'empire, Ni- g58 Samosate ; la frontière byzantine était repor-
céphore Phocas (góo) . Il réussit à débarquer tée de l'Haiys à l'Euphrate et au Tigre, et toute
en Gréte, et après un siège de plusieurs mois il une série de provinces ~~ouvéllement constituées
emporta Chandax d'assaut (mars gδi) . L'Yle (thémes de Sébaste, de Mésopotamie, de Séleucie,
conquise €ut convertie au christianisme . La de Lykandos) attestaient l'importance des con-
maîtrise des mers orientales revenait aux By- quêtes byzantines . L'Arménie et l'Ibérie se-
zantins . couaient le joug de l'Islam et entraie~~t dans la
En méme temps, des circonstánces heureuses sphère d'action . de Byzance. Durant tout le
permettaient de reprendre l'offensive en Asie xe siècle, les Arméniens devaient jouer dans les
Mineure . Déjà Basile IeT avait reporté jusqu'au affaires de la monarchie un rSle considérable,
haut Euphrate les limites de l'empire, repris et lui fournir des soldats, des généraux, des
Samosate (873), fait en Cappadoce et en Cilicie administrateurs, des diplomates et jusqu'à des
des campagnes victorieuses (8~8-879) . L'anar- empereurs : Romain Lécapène et Jean Tzim~s-
chie du monde musulman au x • siècle facilita cès étaient tous deux d'origine arménienne .
encore les succès byzantins, surtout lorsqu'á Un véritable mouvement de croisade empor-
partir de g27 l'empire se trouva délivré du péril tait les Byzantins contre les infidéles . En Cilicie
bulgare . Sous des généraux illustres, sous Jean et dans la Syrie du Nord, Nicéphore Phocas
Courcouas qui, pendant vingt-deux ans, coin- écrasait la puissance des émirs Hamdanides
manda en Asie Mineure (g2o-g4a), et mérita d'Alep . Il emportait Anazarbe, Ada~~a, Mop-
d'être appelé « un autre Trajan, un autre Béli- sueste (g64), Tarse (g65), Laodicée, Hiérapolis,
saire », sous Bardas Phocas ensuite et ses fils Émése, Alep et enfin Antioche (g68) . Son suc-
Nicéphore, Léon, Constantin, la lutte fut acti- e : ss~ur, Jean Tzimiscès, conquérait en Mésopo-
soudoyés par les Byzantins, contraignit finale- des ambitions bulgares . Quand Syméon mourut
ment le roi bulgare à la retraite (8g3) . Mais aprés (gai), la décadence était déjà commencée .
la mort de Léon VI, les troubles qui marqué- Elle se précipita sous le long régne de son
rent la minorité de Constantin VII Iui fourn~- fils Pierre (gai-g68) . Pendant ces quarante an-
rent l'occasion de revenir . En g~3, il paraissait nées, de plus en plus la Bulgarie devint un satel-
devant Constantinople ; en g~4, il prenait Andri- hte de l'empire ; et pendant que Byzance se for-
nople ; en g~~, il écrasait à la journée d'An- tifiait, son ancienne rivale s'afTaiblissait de jour
chialos les armées impériales . Et, tout g)orie~~x en jour davantage . En face du pouvoir rvyal
de ses succés, Syméon se proclamait ~ tsar des fléchissant, la féodalité relevait la tête ; l'unité
Bulgares et empereur des Romains » ; il instal- religieuse était compromise par l'hérésie des
lait, dans sa capitale de Preslav, un patriarcat Bogomiles ; la nationalité bulgare se désagré-
bulgare indépendant ; 11 ne lui restait plus qu'à geait . L'heure de la revanche approchait pour
emporter Constantinople . Il le tenta en ga4 . les Byzantins .
Mais, pour enlever la capitale byzantine, il Elle sonna en g6~ . Nicéphore Phocas refusa
fallait l'attaquer par terre et par mer, et Syméon ie tribut que l'empire payait toujours aux Bul-
n'avait pas de marine . Il semble aussi que, gares et, avec l'aide des Russes de Sviatoslav,
dans l'entrevue qu'il eut avec Romain Léca- grand-prince de Kief, il attaqua la Bulgarie .
péne, il subit, comme jadis Attila en face de Mais Sviatoslav trouva le pays conquis à son
saint Léon, l'influence de tout ce qu'il y avait goflt ; il s'y installa et refusa d'en sortir (g68) .
de prestige et de civilisation dans cette antique La mort du tsar Pierre, l'assassinat de Nicé-
majesté impériale . II recula, il abandonna le phore (góg), aggravérent les difficultés de la si-
rêve doré qu'il avait caressé . Et quoique Sy- tuation . Quand Jean Tzimiscés monta s~~r le
méon ait dans son royaume, dans sa capitale tr8r~e, l'invasion russe menaçait l'empire même ;
surtout de Preslav-la-Grande, fait éclore une Sviatoslav lassait les Balkans, saccageait Phi-
culture intellectuelle et artistique qui lui a mé- lippopoli (g~o), semait la panique jusque dans la
rité le nom de Charlemagne de la Bulgarie, capitale . Heureusement, les Busses furent bat-
l'arrêt devant Constantinople marqua la ruine tus à Arcadίopolis, l'actuel Lulé-Bour •g as (g~o),
et l'empereur put organise• contre eux une En g86, Basile II prenait l'offenswe et péné-
grande expédition (g~~) . Pendant que la flotte trait en Bulgarie ; mais il fut sévérement battu
byzantine remontait IP Danube, Tzimiscès fran- au défilé de la Porte Trajane dans les Balkans .
chissait les Balkans, prenait Preslav, assiégeait Dix ans passèrent avant que l'empereur prit re-
Sviatoslav dans Uorostol (Silistrie) et l'obli- commencer la lutte et, pendant ces dix ans, Sa-
geait á faire sa soumission et á évacuer le pays . muel ne cessa d'agrandir son royaume,du Da-
La Bulgarie- fut annexée à l'empire, le patriarcat nube à l'Adriatique et à la mer Égée . Mais en
autonome fut supprimé ; l'hellénisme victorieux ggó, le tzar était battu sur les bords du Sper-
reportait jusqu'au Danube les limites de la ~no- ch~os ; la Grèce lui échappait ; il échouait de-
narchie . vant Thessalonique, une partie de la Bulgarie
Pourtant, dans la Bulgarie du Pinde, autour danubienne tombait entre les mains des impé-
de Prespa et d'Ochrida, l'éliment national, sous riaux (~ooo) . La Bulgarie de l'ouest, pourtant,
la direction du comte Sischman et de ses fils, restait inexpugnable . En ~ooi, Basile II entre-
s'obstinait dans sa résistance . A la faveur des prit de la réduire . Progressivement, il en con-
troubles qui agitèrent les débuts du règne de quit les abords, Ber~ •hoea, Servia,Vodena . Cerné
Basile II, l'un des fils de Sίschman, le tsar Sa- dans les montagnes, Samuel se dégagea et vint
muel (entre 977 et g;g - ~0~4) reconstitua h~ saccager Andrinople 0003) . Mais tenacement,
Bulgarie . En dix années, de 977 á g8fi, il libéra l'empereur poursuivait et resserrait le blocus,
la Bulgarie danubienne, conquit la Macédoine, prenant Skopia, conquérant la basse et la
la Thessalie, pénétra jusque dans le Péloponèse . moyenne Macédoine (~oo~), menant la guerre
Pour abattre ce formidable empire, qui allait du avec une atroce dureté . Samuel évitait les ba-
Danube à l'Adriatique, il fallut aux Grecs trente tailles rangées ; finalement, pourtant, ses trou-
années de guerre (g86-~o~8) . Ge fut essentielle- pes furent écrasées au défilé de Gimbalongou,
ment l'oeuvre de l'empereur Basile II, à qui sa sur la route de Serrès á Melnik(2y juillet ~0~4) .
dure énergie et ses victoires cruelles valurent le Le tsar ne survécut pas à cette défaite ; il mou-
surnom terrible de Bulgarocto~e, le tueur de rut peu de jours après (~5 septembre ιοι4).
B~lbares . C'était la fin de la Bulgarie .
ι~~ ., ι - ιιι .
ΙΙ1
du xe siècle, ~8 en Asie et i2 en Europe), tous maure, une seule foi . » Ce fut l'oeuvre admirable
les pouvoirs étaient concentrés entre les mains de l'administration de donner à cet État sans
d'un personnage tout-puissant, le stratège, nationalité la cohésion et l'unité nécessaires par
nommé d~rectemeńt par l'empereur et dépen- l'empreinte commune de l'hellénisme, par la
dant directement de lui . Ainsi, du haut en bas professïon . commune de l'orthodoxie . Le grec
de l'échelle administrative, tout le personnel des fut la langue de l'administration, de l'Église, . de
fonctionnaires d~~pendait étroitement du souve- la civilisation ; il prit dans l'empire cosmopolite
raina et ce personnel, bien recruté, bien préparé, comme un faux air de langue nationale . Par son
et tout dévoué à sa tâche, encouragé à bien ser- habileté à propager la culture hellénique, par l'art
vir par l'avancement que lui accordait le prince ingénieux qu'elle apporta à ménager et à assim~-
dans la hiérarchie savante des fonctions et des di- le~• les peuples vaincus, l'administration impé-
gnités, s'acquittait avec un zèle attentif du double r~ale marqua d'une empreinte commune les
r~le que lui assignait la volonté de l'empereur . éléments discordants dont se composait la mo-
La tâche de l'administration était d'abord de narchie ; et rien n'atteste mieux la vitalité et la
fournir de l'argent au gouvernement tâche puissance d'expansion de l'empire . Par la propa-
Lourde, car sans cesse il y eut à Byzance manque gation de la foi orthodoxe, par l'ingénieuse façon
d'équilibre entre les recettes du trésor et les dé- dont elle employa l'Église à faire la conquête
penses innombrables de la politique et du luxe morale - des pays soumis par les armes, l'admi-
impérial, disproportion entre les projets gran- nistration acheva de rapprocher et de fondre les
dioses et l'insuffisance des ressources . L'autre races dïverses que gouvernait le basileus . Elle
tâche de l'administration impériale était encore fut vraiment la robuste armature qui soutint la
plus difficile peut-être . La monarchie byzantin monarchie et en fit un corps homogène et fort .
n'avait ni unité de race ni unité de langue
c'était, comme on l'a dit, « une création artifi- L'reuure lég~st~t~ue . - Les empereurs de la
cielle, gouvernant vingt nationalités différentes, maison de ïVlacédoine s'efforcèrent de fortitîer
et les réunissant dans cette formule un se~~l encore cette cohésion par une grande oeuvre
législative ' ils restanr~re~t, en l'adaptant aux
conditions nouvelles de la vie sociale, l'antique disait un écrivain du x~e siècle, « la gloire des
droit créé par Justinien . Basile IeΓ prit l'initiative Romains », augmentaient encore la force et le
de cette grande entreprise en faisant réunir dans prestige de l'empire . Pour ces soldats, en qui ils
le Proch~ros Nomos (8~g) les principaux extraits voyaient les meilleurs serviteurs de la monar-
du Corpus juris c~~ihs et en faisant préparer, chie, les grands empereurs militaires de la
sous le nom d'Épanagogè (886), un manuel du dynastie macédonienne ont eu une attentwe et
droit usuel . Son fils Léon VI acheva l'eeuvre constante sollicitude : ils ont voulu leur assurer
en faisant rédiger, sous le titre de Bas~hques, tous les priviléges, tous les égards, les terres
un code complet en soixante livres (88~-8g3), d~str~buées à titre héréditaire, aussi bien que la
compilation et résumé des travaux . juridiques considération due aux défenseurs de l'empire
publiés sous le règne de Justinien . Les succes- et de la chrétienté . Et l'admirable épopée des
seurs des deux premiers empereurs macédoniens guerres d'Asie, l'âpreté infatigable de la lutte
ne montrèrent pas une moindre activité législa- contre les Bulgares ont montré en effet tout
tive, que couronna, en ~oh5, sous Constantin ce qu'on pouvait attendre de ces troupes incom-
Monomaque, la fondation de l'école de droit parables, rompues au métier des armes, capa-
de Constantinople, destinée à être tout ensem- bles de supporter toutes les épreuves, toutes les
ble une pépinière de juristes et de fonction- fatigues, toutes les privations . Assurément ces
naires . Ainsi achevait d'être consolidée l'unité troupes étaient en grande partie formées de
de la monarchie . . mercenaires et elles avaient tous les défauts des
armées de mercenaires : elles n'en ont pas moins,
L'org~n~salion militaire . - Une armée excel- sous les chefs illustres qui alors les commandè-
lente, admirablement entraYnée par une tactique rent, rendu à la monarchie d'éclatants servies
savante, et qui trouvait dans l'élan religieux et et paré~ses drapeaux d'une auréole de gloire .
le sentiment patriotique des motifs puissants ~e
vaillance et d'enthousiasme, une belle flotte, La prospér~fé économique . - Une bonne
dont les victoires avaient rendu à Byzance la administration financière, un admirable déve-
domination des mers, et qui était, comme le loppement de l'industrie et du commerce don-
Ι2Ο L 'APOGE~ DB L 'EMPIRE
far trois hommes remarquables,Togrul beg, Alp- dangers qui s'annonçaient au x° siécle avaient
Arslan (~o65-io~2), Malek-Shah (io~ 2- 1og2), les réalisé leurs menaces .
Turcs Seldjoucides donnaientl'assaut à l'empire .
Ils se brisèrent d'abord à la solide ligne de forte- Le schisme et l'anarchie ~ntér~eure . -En X054,
resses créée par Basile II ; mais l'Arménie, mal l'ambition du patriarche Michel Céroutarios avait
rattachée á Byzance, mécontente des persécu- déchaYné un grave conflit . II s'était attaqué á
tions religieuses qu'on lui infligeait, était de fidé- Rome, lorsque celle-ci prétendit rétablirson au-
li~é incertaine . En ~o641es Turcs prenaient Ani, turité sur les diocèses de l'Italie du sud . . Le pape
bientSt Césarée et Chopes . Vainement l'énergique Léon IX avait riposté avec une égale vigueur et
Romain Diogéne tenta d'arrêter leurs progrès . les légats pontificaux venus á Constantinople
I1 fut défait á Álantzikiert (~o~~), au nord du avaient par leur attitude arrogante choqué vio-
lac de Van, et tomba aux mains des infidéles . lemment l'orgueil byzantin . On en vint donc vite
Jamais Byzance ne devait se relever compléte- à la rupture . Les légats excommunièrent solen-
ment de ce grand désastre . Désormais tout l'est nellement le patriarche . Céroulariπs imposa par
de l'Asie Mineure, l'Arménie, la Cappadoce, l'émeute à l'empereur Constantin IX Monomaque
toutes ces régions d'où l'empire tirait ses meil- le schisme qu'il désirait . La séparation des deux
leurs soldats, ses généraux les plus illustres, .Églises était accomplie . .. Cette rupture avec la
étaient perdues sans retour . Désormais aussi, papauté devait avoir pour l'empire de trés graves
dans l'anarchie croissante de l'empire, les Turcs conséquences . Non seulement elle précipita la
eurent beau jeu : Iconium tombait entre leurs chute de la dominatio~~ grecque en Italie ; elle
mains, puis Nicée, où les Byzantins eux-mêmes creusa surtout entre Byzance et l'Occident ~n
les appelèrent ; et en ~o~g ils s'emparaient de abYme que rien ne put combler . Aux yeux des
Chrysopohs, en face de Constantinople . Latins, les Grecs ne furent plus désormais que des
Est-ce á dire que les Normands et les Turcs schismatiques, auxquels on ne devait ni égards
fussent des adversaires plus redoutables que tant ni tolérance, et dont on avait les plus justes rai-
d'autres que Byzance avait vaincus autrefois? son de se défier . Les Byzantins d'autre part s'en-
Nοη, mais l'empire était plus faible . Tous les têtérent dans leurs rancunes et leur haine contre
Rome. La question des rapports entre la papauté l'écart ou disgracia les généraux . Le gouver-
et l'Église orthodoxe pésera lourdement désor- nement fut aux mains de gens de lettres, Psel-
mais sur les destinées de la monarchie . Enfin, à los, Xiphilin, Jean Mauropous, etc . La fondation
l'intérieur, les circonstances où s'ét,ait produit le de l'école de droit eut pour objet principal de
schisme avaient montré de façon éclatante, e~~ fournir des fonctionnaires civils á ce gouverne-
face d~ patriarche tout-puissant, la faiblesse du ment . Entre la bureaucratie toute-puissante, ap-
pouvoir impérial : Michel Céroularios ne devait puyée sur le Sénat, et l'armée le conflit fut bientót
point l'oublier . inévitable : Il fut violent . En io5~ un pro~uncia-
Mais surtout • le péril féodal devenait c}~aque miento, qu'appuya le patriarche Céroular~os, mit
jour glus menaçant . Pour abattre l'aristocra- sur le tr~ne un général illustre, Isaac Comnéne .
tie trop puissante, la politique impériale crut Mais quand Isaac découragé abdiqua(io5g,) l'avé-
habile de combattre l'armée sur qui s'appuyaient nement des Doucas marqua une réaction contre
les féodaux et dont la force se manifestait dán- le parti militaire et assura de nouveau, et plus
gereusement, á ce mo~~ient même, par des soulé- que jamais, le triomphe de la bureaucratie . Un
vements comme celui de Georges 1laniahès, le moment, Romai~~ Diogène rendit le pouvoir á
héros des guerres de Sicile et d'Italie 0043), ou l'armée . Il succomba sous l'attaque forcenée de
celui de Léon Tornikios (~04~) . Un parti civil ses adversaires coalisés ; et le règne de Mi-
se forma, qui prit á tâche de témoigner sa dé- chel VII, dont Psellos fut le premier ministre,
fiance aux soldats . Le règne de Constantin Mo- sembla le triomphe définitif du parti civil .
numaque en marqua le premier triomphe . Soūs Tout cela avait de graves conséquences . A l'ex-
cet empereur jouisseur et peu guerrier, l'armée térieur, l'empire partoutreeulait ; les populations,
fut notablement dimi~~uée ; les troupes natio- mal défendues par un gouvernement trop faible,
nales furent plus que jamais remplacées par des et d'ailleurs écrasées d'imp8ts, se détachaient
mercenaires, Norma~~ds, Scandinaves, Russes, de Byzance et, comme dans l'empire romain finis-
Angio-Saxons, en qui on croyait pouvoir mettre sant, . elles appelaient les barbares . A l'intérieur,
plus de confiance . On rogna sur le budget n~i- dans l'anarchie universelle, l'aristocratie féodale
litaire, on négligea les f~rteresse~, on tint á relevait la tête ; l'armée, mécontente de l'hosti-
fois . Les Turcs étaient à Iconium et ils y restè- moins éminent . Sévèrement élevé, de ,moeurs
rent ; dans les Balkans, avec l'appui de la Hongrie rigides, ennemi glu luxe et du plaisir, d'humeur
grandissante, les peuples slaves se constituaient douce et . généreuse, d'intelligence avisée, il
en États presque indépendants ; de l'Occident a mérité par sa haute personnalité morale le
enfin montaient des périls inquiétants, résultat surnom de Kalojean (Jean l'excellent) . Très
des visées grandioses et inopportunes de l'im- brave, avide de gloire militaire, il a eu la pleine
périahsme byzantin, des ambitions politiques conscience de son métier de roi, et il a mis
nées de la croisade, des âpres convoises écono- très haut son idéal politique . Son père avait
m~ques de Venise . Malgré cela les Comnènes défendu les frontières ; il a révé de les étendre,
ont donné à l'empire un dernier rayon de splen- de ~•e co~~quérir les provinces perdues de la mo-
deur et, dans la détresse des s~écles suivants, les narchie, de lui rendre son ancienne splendeur .
peuples bien souvent se sont souvenus du siècle Manuel (~ X43-~ X80), le fils de Jean, a été le plus
des Comnènes comme d'une époque brillante et séduisant des Comnènes . Intelligent, aimable,
heureuse entre toutes . généreux, il a été tout ensemble un basileus
Issus d'une grande famille aristocraüque et byzantin, instruit, cultivé, théologien même, et
militaire, les empereurs de la maison des Com- un chevalier d'Occident . Admirablement brave,
nènes ont étδ avant tout des soldats . Mais ils il a, plus que tout autre souverain grec, eu le
furent encore quelque chose de plus . Alexis, le goût des moeurs occidentales, et les Latins, à
fondateur de la dynastie (io8~-~~~8), était un qui il ressemblait par tant de cités, l'ont ad-
homme intelligent, plein de finesse et de fermeté miré plus qu'ils n'ont fait aucun autre empereur .
tout ensemble ; grand général, diplomate habile, Fort épris de luxe et de plaisir, il a rempli le
excellent administrateur, il appara~ssa~t, dans la x~~e siécle de l'éclat de ses aventures . Grand poli-
case de la monarchie, comme l'homme néces- tique aussi et fort ambitieux, il a étendu à toute
sa~re . Et il sut, en ~ifet, aussi bien contenir au l'Europe de son temps les visées souvent exces-
dehors les ennemis de l'empire que rétablir à sives et utopiques de son impérialisme . Mais si,
l'intérieur l'ordre et la force . Jean, son fils et son par l'effort démesuré qu'il demanda à a monar-
successeur (i i ~8-~ i42), n'était pas un prince chie, il l'a épuisée et rapprochée de la ruine, il
Ρι . ~.
p~~t rien d'abord contre cette invasion . Mais bien- ale céder, du moins, comme son père, táchait-il
tut, grâce à l'alliance des Vénitiens, il reprenait de neutraliser l'influence vénitienne en traitait
Corfou (~ ~4s) et reportait la guerre jusqu'en Ita- avec Pise (~ ~ 36) et Gênes ( ~ i 43), Manuel, lui aussi,
he, où il occupait Anc~ne (~ ~5~) . Pourtant, mal- rechercha d'abord contre les Normands l'alliance
gré la mort de Roger II (~ ~5G), malgré la grande de Venise et la paya par de larges concessions
ligue que la diplomatie byzantine réussit u~ mo- ~ X48) . Mais entre les deux États la mésintelli-
ment à former contre le roi de Sicile, ni sur terre, gence allait croissant. La morgue et l'âpreté
ni sur mer, les Grecs ń purent de succès . Manuel vénitienne en Orient exaspéraient les Grecs ; la
dut signer en ~ X58 avec Guillaume h~ une paix République d'autre part s'inquiétait des ambi-
boiteuse, qui laissa fort tendues les relatio~~s tions italiennes de Manuel ; quand l'empereur
entre les deux États . C'est que l'Occident ne vou- óccupa Ancδne, quand il conquit la Dalmatie,
lait à aucun prix d'une Italie soumise à l'influence elle comprit que sa domination dans l'Adriatique
grecque, et Venise en particulier, l'ancienne al- état en péril . Dés lors la rupture était inévitable .
liée de l'empire, s'en inquiétait extraordina~re- Manuel la provoqua en faisa~~t arrêter tous les
ment. Vénitiens établis dans l'empire (~i~~) ; la Répu-
Contre les Normands, les Vénitiens avaient blique répondu en envoyant, ses flottes occuper
volontiers soutenu d'abord l'empire grec et, en Chio et ravager l'Archipel et en faisant alliance
échange de leur concours, ils avaient obtenu avec le roi de Si,,ae . Manuel céda (~ ~,5) ; il ren-
d'Alexis Comnène de larges priviléges pour leur dit aux Vénitiens leurs prwiléges . Mais, ainsi
commerce dans tout l'Orient(~o82) . Mais, malgré qu'avec les Normands, les rapports restèrent ten-
les bons rapports politiques, l'âpreté des négo- dus et difficiles, et lé jour était proche où Nor-
ciants vénitiens inquiéta vite les Grecs . Alexis mands et Vénitiens feraient cruellement sentir
déjà, pour diminuer un peu le monopole dont ils leur hostilité à l'empire .
Ρτ . S1 .
III
IÓÓ LB 3IÉCLB DrS COMN)~NI{~ L' E1iPI~E BYZ~rTIN ~ LA F1N DL xίle SI1sCLE Iá>^
X68 ~r. s~ c~~ ~xs coz~~ Nos L~EMPIRE BYZANTIN A LA FIN AU RIS ° SIÉCLS IÓg
(~ ~g4) . Un empirevlaq~o-bulgare se fondait, dont de Barberousse, fut un adversaire plus da~~ge-
le tzar Johannitsa ou ICalojean (i ~g~-~2o~) de- reux encore, surtout quand il eut hérité des do-
vait assurer la grandeur . Par le traité de ~ao~, maines et des ambitions des rois normands . II
Alexis III dut confirmer toutes les co~iquête b~1- rêvait de faire la conquête de l'Orient, ~l som-
gares, depuis Belgrade jusqu'à la mer Noire et mait Alexis de lui restituer tous les territoires
au Vardar. Peu après, le souverain bulgare ~bte- conquis jadis par les Normands (~ ~g6) et il l'obli-
tenait d'Innocent III le titre de roi et la c~nstitu- geait, en attendant, á lui payer tribut.
tion d'une Église nationale 0204) . C'etait la ruine Mais Venise surtout était inquiétante . Elle
complète de l'oeuvre des Tzimiscés et des Ba- aussi réclamait vengeance pour les massacres
sile II . de ~~82 et, pour l'apaiser, Isaac avait dfl, en
Du c8té de l'Occident, l'horizon était plus ~ ~8~, lui accorder d'amples indemnités et de
sombre e~~core . Le massacre dont .les Latins de larges privilèges . Alexis III avait dfl, en i ig8,
Constantinople avaient été victimes en ~ X82, lors augmenter encore ces concessions, dont il avait
de l'émeute qui porta au tr8ne Andronic úom- au reste atténué l'effet, en concédant aux Gé-
nène, avait déchaYné la guerre ave^ les Normands . nois et aux Pisans de semblables réparations .
Sans doute, la prise de Thessalonique par 1'ar- Malgré cela, les Vénitiens sentaient leur com-
~née du roi de Sίçile avait été un succès sans merce et leur sécurité menacés par la haine
lendemain et Isaac avait réussi á repousser les exaspérée des Grecs, et de plus, depuis que
envahisseurs (~ X86) . Mais la vieille hostilité entre Henri Dandolo était doge (~ ~g3), l'idée_ se
Ocçidentaux et Byzantins avait été accrue par ces faisait jour que la conquête de l'empire byzan-
événements . La maladroite politique de l'empire tin serait la meilleure- solution de la crise,
à l'égard de Frédéric Barberousse, au m oment . le plus sûr moyen de satisfaire les haines la-
de la troisième croisade (~ ~8g), eut un semblable tines accumulées et d'assurer en Orient les
effet . Un moment l'emperaur allemand songea, intérêts de la République . De tout cela, hosti-
d'accord avec les Serbes et les Bulgares, á pren- lité de la papauté, ambitions de Venise, rancunes
dre Constantinople et les croisés traversèrent de tout le monde latin, devait, comme une con-
.l'empire en ennemis exaspérés . Henrί VI, le fils séquence nécessaire, sortir le détournement de
Ρι. . SI1 .
rurent poi~~t tous en même temps que l'empire française y était toute-puissante : « on y par-
de Constantinople . Sans parler de Venise qui lait aussi bien français qu'à Paris » . On voit re-
devait, pendant longtemps encore, conserver vivre, dans le curieux livre qu'est la Chronique
dans les mers orientales son empire colonial de Morée, cette société toute chevaleresque et
et les seigneuries insulaires qu'avaient fondées française, de même qu'aujourd'hui encore,
ses patriciens, le duché d'Athènes, sous le gou- dans tout le Peloponése, à l'Acrocorinthe ou à
vernement des La Roche, subsista jusqu'en ~3~ ~ ; I{lemoutzi, à Karyténe ou à Mistra, à Kalamata
et si la désastreuse bataille du Céphise le fit ou à Nlaïna, on rencontre les ruines des puis-
passer alors sous l'autorité des Catalans (i3~ ~- santes forteresses féodales que bâtirent les
i333), que remplacèrent ensuite les ducs floren- maYtres français du pays . Et ce n'est pas assu-
tins de la famille des Acciajuoli (1333-1456), rément un des épisodes les moins curieux de
jamais les Byzantins n'en reprirent possession . l'histoire byzantine que cette puissance de sé-
La principauté d'Achaïe, sous le gouvernement duction qu'exerça, dans ce pays grec conquis
des trois Villehardouin, Geoflroi I, le fondateur par les armes, et qui si vite s'assimila, la France
de la dynastie, et ses fils Geoffroi II et Guillau- lointaine du x~~~e siècle .
me (~2og-~2~8), fut plus florissante encore . Pourtant, la défaite de Pélagonia, o~y Guil-
.Malgré son organisation pureme~~t féodale et les laume de Villehardouin tomba aux mains de
douze grandes baronnies que la conqùête fran- Michel Paléologue, eut pour la principauté
que y établit, le pays, habilement administré d'Achaïe de graves conséquences . Pour recou-
par ses souverains, fut, durant tout le xτττθ siécle, vrer sa liberté, le prince franc dut, au traité
un des États les plus prospères de l'Orient latin . de 1262, céder aux Grecs Monemvasie, Maïna
Les finances étaient excellentes ; l'armée passait et Nlist.ra . Les Byzantins ainsi . reprenaient pied
pour « la meilleure chevalerie d'Europe » ; la dans le Péloponèse . Ils devaient, sous les gou-
tranquillité était parfaite, la bonne entente avec vernements de femmes et d'étrangers - prin-
les sujets grecs remarquable . La cour d'Andra- ces angevins, compagnie navarraise - qui sui-
vida « était, dit un chroniqueur, plus brillante virent la mort de Villehardoui~~ (i2~8), faire
que celle des plus grands rois » . L'influence dans le pays, avec l'appui des populations indi-
0282-X453) . - On le vit bien sous les succes- Les causes intérieures de la déc~~dence . -Les
seurs de Michel VIII, sous son fils Andronic II guerres c~~~iles . - En face des périls extérieurs
(1282-~ 328, prince instruit, beau parleur, ami des qui me~~açaient la monarchie, il eût fallu que
lettres et très pieux, mais incurablement faible l'émpire demeurât uni, tranquille et fort . L'épó-
et médiocre, et sous le petit-fils ~de celui-ci, que des Paléologues, au contrairé, fut pleine de
Andronic III 0328-~34~), intelligent, mais léger, révolutions et de discordes civiles . Contre An-
turbulent et viveur ; on le vit sous le long règne dronic II se soulevait son petit-fils, le futur An-
de Jean V (~34~- ~3g~), malgré l'énergique di- dronic III, que le vieil empereur prétendait dé-
rection que donna un moment aux affaires le pouiller de ses droits légitimes au trdne ; et pen-
souverain remarquable que fut l'usurpateur dant plusieurs années (~32i-X328), la guerre,
Jean VI Cantacuzène (ι34ι-X355), et malgré coupée de trèves passagères, désola l'empire,
les hautes qualités qu'apporta ensuite au trSne pour aboutir finalement à la prise de Constanti-
le fils de Jean V, Manuel II (~3g~-X425), prince nople par les révoltés et á la chute d'Andronic II .
éminent, dont on a pu dire « qu'en des temps Pendant la régence d'Anne de Savoίe et la mi-
meilleurs il aurait sauvé l'empire, si l'empire norité de Jean V Paléologue, Jean Cantacuzène,
avait pu être sauvé . p L'empire ne pouvait plus à son tour, se proclama empereur (ι34ι), et
pendant six années (~34~-~34~) le monde grec la misère des discordes civiles . Vers le n~i-
se divisa en deux partis, l'aristocratie tenant lieu du xτνe siècle, un vent de révolution so-
pour l'usurpateur, le peuple pour la dynaste ciale passait sur la monarchie : les classes infé-
légitimé, jusqu'au jour où la capitale tomba, rieures s'insurgeaient contre l'aristocratie de
par une trahison, aux mains du prétendant . naissance ou de richesse ; et pendant sept an-
Pendant le règne de Jean Cantacuzène (~34~- nées (ι342-i34g), Thessalonique, la seconde
1355), les intrigues de Jean V Paléologue, à qui ville de l'empire, était, par l'agitation des Zé-
le nouvel empereur avait . conservé sa part de lotes, remplie de troubles, de terreur et de sang.
pouvoir, troublèrent constamment la monarchie La cité macédonienne se constitua èn une véri-
et amenèrent une révolution nouvelle qui ren- table république indépendante, dont la tumul-
versa Cantacuzène . Puis ce furent les démêlés tueuse histoire est un des épisodes les plus in-
de Jean V avec son fils Andronic (~3~6), avec téressants de la vie de l'empire grec au xw° siè-
son petit-fils Jean (~3g~}, qui, l'un et l'autre, cle ; et ce n'est point sans peine que Jean Can-
réussirent à écarter momentanément du trSne le tacuzène rétablit finalement dans la ville qui
vieux .souverain . Et la chose grave, c'est qu'au avait prïs parti contre lui l'ordre et la paix .
.cours de ces luttes, sans scrupules les adver- Les luttes religieuses, nées surtout de l'hos-
saires appelaient à leur aide tous les ennemis tilité séculaire entre Grecs et Latins, augmen-
de l'empire, Bulgares, Serbes, Turcs, payant taient encore le désarroi . Michel VIII, par po-
leur concours de larges subsides, de cessions litique, avait cru sage de se rapprocher de
de territoires même et ouvrant ainsi la porte à Rome et de rétablir l'union entre I€s Églίses ;
ceux qui rêvaient la destruction de la monar- il avait soulevé, par I à, un mécontentement s~
chie . Tout patriotisme, toute i~~telligence poli- grave que le premier soin de son successeur
tique même avaient disparu dans le conflit de Andronic II fut de faire sa paix avec le clergé
ces ambitions exaspérées . orthodoxe, en dénonçant l'accord conclu . avec
la papauté . L'antagonisme entre Latins et Grecs
Les querelles sociales et religieuses . - Des s'en était naturellement accru et, dans la mo-
antagonismes religieux et sociaux aggravaient na~•chie même, l'opposition entre les partisans
19$ L~EMPIRE BYZANTIN SOUS LES PALÉOLOGUES LA DÉCADENCE INTÉ~IEUitE τ99
et les adversaires de l'union . Une ardente polé- effort désespérê . L'empereur vint en personne
mique entretenait cette agitation et transfor- en Italie (~43~) et signa avec Eugéne IV, au
mait insensiblement toute sympathie pour -les concile de Florence, l'accord qui mettait fin au
idées latines en une véritable trahison à l'é- schisme (~43gj . Comme Michel VIII, il se heurta
gard de la patrie . Dans ces conditions, la moin- à l'intransigeance farouche du clergé et du peuple
dre occasion déchaînait l'opposition du nationa- orthodoxes, persuadés que, malgré toutes leurs
lisme byzantin contre l'Occident . Ce fut la rai- prómesses, les Latins ne poursuivaient que - « la
son profonde du débat, d'apparence purement destruction de la ville, de lá race et du nom
théologique, qu'on nomme la querelle des Hésy~ grec . » Jean VIII et son successeur Constan-
chastes et qui, pendant dix ans (i34~-~35i), trou- tin XI eurent beau essayer d'imposer l'union
bla et divisa l'empire . Dans cette affaire, née en par la force ; l'émeute gronda jusque sous les .
apparence des rêveries étranges de quelques voûtes de Sainte-Sophie (~45z) ; à la veille de
moines de l'Athos, ce qui s'opposait en ~•é alité, la catastrophe qù allait sombrer Constantino-
c'était l'esprit grec et l'esprit latin, le mysti- ple, on se passionnait dans la ville pour ou
cisme oriental, que représentaient les Hésy- contre l'union, et certains hommes déclaraient
chastes et leur défenseur Grégoire Palamas, et qu'ils « aimaient mieux voir régner ~ Byzance
le rationalisme latin, dont les tenants étaient le turban des Turcs que la mitre des Latins . »
un Barlaam et un Akyndinos, nourris de saint
Thomas d'Aquin et rompus à la dialectique sco- La détresse fina~c~~re et maitarre . - Par lá-
lastique ; et c'est pour cela que la lutte prit fort dessus, c'était la détresse financière . Malgré la
vite une couleur politique, Cantacuzéne prenant tyrannie fiscale, l'impôt foncier, dans un pays
parti pour l'Athos et Anne de Savoie pour Bar- complètement ruiné par la guerre, ne rapportait
laam. plus au trésor que des ressources insuffisantes .
Il en alla de même quand, par nécessité poli- Les douanes, depuis que le commerce de l'em-
tique, Jean V (~36g), puis Manuel II (i4i~~, re- pire était tombé aux mains des Vénitiens et des
commençèrent á négocier avec Rome et que, Génois, diminuaient avec une rapidité crois-
peur conjurer le péril turc, Jean VIII tenta un sante . Le gouvernement était réduit à altérer les
"200 I.BDdPIRE BYZANTIN SOUS LES PALÉ~LOGUSS
2~ 4 L' EMPIRE BYZANTIN SOUS LES PALÉOLOGUEs LES PÉRILS E%TERIEURS 903
dronic II á lui reconnaître toutes ses conquêtes sait sur le modèle de Byzance ; il lui donnait une
{~2g8) : et comme les Bulgares, les Serbes législation (~34g), il instituait á Ipek u~ patr~ar-
s'étaient mêlés sans cesse aux troubles inté- c~t indépendant de Constantinople ; vainqueur
rieurs de l'empire grec . des Grecs (en ~35~ il assiégeait Thessalonique),
Quand Étienne Douchan (a33~-1355) monta des Angevins, du roi de Bosnie, du roi de Hon-
sur le trdne, la Serbie s'étendait de la Save grie, il apparaissait comme le prince l~ plus
et du Danube au nord jusqu'à Stroumitza ~t puissant des Balkans, et le pape le proclamait
Prilep au sud, de la Bosna à l'ouest au Rilo- « le chef de la lutte contre les Turcs » . Il
dagh et á la Strouma à l'est . Douchan vou- ne restait plus à Douchan qu'à prendre Cons-
lut faire d'elle davantage encore : il rêva de tantinople . Il le tenta (ι355), coτιquit Andrino-
réunir sous son autorité toute la péninsule des ple et la Thraee, et mourut brusquement, - mal-,
.Balkans et de ceindre à Constantinople la cou- heureusement pour la chrétienté, - en vue de
tonne impériale . Habile diplomate, grand !a ville dont il rêvait de faire sa capitale . Lui
général, intelligent, volontaire et tenace, il mort, son empire se disloqua vite . Mais, de jette
commença par achever la conquête de la Ma- lutte de vingt-cinq ans, Byzance sortait »~ peu
cédoine occidentale (~331~) ; puis, enlevant l'Al- plus faible encore .
banie aux Angevins jusqu'á Durazzo et Valona,
l'Épire aux Grecs jusqu'à Janina (i34o), il Les Turcs . - Pendant qu'ainsi, en Europe,
poussa ses progrès en Macédoine, où les By- l'empire grec diminuait sous l'assaut des États
zantins ne conservèrent que Thessalonique et slaves, les Turcs Osmanlis progressaient en
la Chalcidique, et où la frontière serbe attei- Asie, sous la conduite de trois grands chefs,
gnit vers l'est la Maritza 0345) . Et en X346, Ertogrul, Osman (i28g-326) et Orkhan (ι3αδ-
dans la catr~édrale d'Uskub, Douchan se faisait i35g) . Malgré les efforts, parfois heureux, d'An-
solennellement couronner « empereur et auto- dronic II pour les arrêter, Brousse tombait en
crate des Serbes et des Romains » . L'empire 1326 aux mains des Ottomans, qui y établis-
serbe s'étendait maintenant du Danube á la saient leur capitale . Nicée succomba ensuite
mer Égée et á l'Adriatique : Douchan l'organi- (i32g), puis Nicomédie (~33~) ; en 1338 les Turcs
SOLE L' EMPIRE BYZANTIN SOUS LES PALÉOLOGUE~3 LES PÉRILS EXTÉRIEURS 1p5
atteignaient le Bosphore . Ils le franchissaient obligé de se reconnaître le vassal du sultan, de
bientôt, sur l'appel des Byzantins eux-mêmes, .u~ payer tribut, de lui fournir un contingent
qui sollicitaient avec •empressement leur alliance de troupes pour prendre la dernière place que
dans leurs discordes civiles : en X353, Cantàcu- les Byzantins possédaient encore en Asie ~1i-
zène, qui dès X346 avait donné sa fille en ma- neure, Philadelphie (~3g~) .
riage au sùltan, récompensait ses services en Bajazet (~38g-~~o~) agit plus vigoureusement
Iui cédant une forteresse sur la cote europénne encore à l'égard de l'empire . Il bloqua étroite-
des Dardanelles . L'année suivante 0354), les ment (~3g~-~3g5) la capitale grecque ; et qua~~d
Turcs s'installaient à Gallipoli ; ils occupaient eut échoué, . à la bataille de Nicopolis (~3g6), le
Didymotique et Tzouroulon (~35~) . La pénin- grand effort que l'Occident tenta pour sauver
sule des Balkans leur était ouverte . Byzance, il attaqua de vive force Constantino~le
:ltourad I~~ (~35g-~38g) en profita . Il conquit ( ~3g~), en même temps qu'il envahissait la Morée .
la Thrace (~36~), que Jean V~Paléologue dut lui I~eureusement pour lés Grecs, l'invasion mon-
reconnaître 0363) ; il emporta Philippopoli et gole et la défaite retentissante que Timour ińfli-
bientôt Andrinople, où il transporta sa capitale gea a~~x Turcs à Angora (i4o2) donnèrent à l'em-
(~3(i51 . Byzance isolée, cernée, coupée du reste pire vingt ans encore de répit . Mais, en ~4ai,
de la monarchie, attendait, retranchée derrière Mourad IT (~42~ -~45~) reprenait l'offensive . II
ses murailles, le coup suprême qui semblait attaquait, d'ailleurs sans succès, Constantinople,
inévitable •. Pendant ce temps, les Ottomans qui résista énergiquement 0422) ; il prenait
achevaient la conquête de la péninsule balka- Thessalonique 0430) que, depuis X 423, les Véni-
nique. Ils écrasaient sur la Maritza lēs Serbes tiens avaient achetée aux Grecs ; un de ses gé-
du sud et les Bulgares (~3~~ ) ; ils installaient néraux pénétrait en Morée 0423) ; lui-même
leurs colonies en Macédoine et menaçaient Thes- portait ses armes en Bosnie, en Albanie, et
salonique (~3~4) ; üs envahissaient l'Albanie imposait tribut au prince de Valachie . L'empire
0386), détruisaient l'empire serbe à la j ournée. grec, aux abois, ne possédait plus, outre Cons-
de Kossovo (ι38g), faisaient de la Bulgarie un tantinople et la région voisine jusqu'à Derkon
pachalik turc (~3g3) . Jean V Paléologue état et Selymbria, que quelques territoires épars
.les Serbes, chéz les Russes, chez les Rou- C'est en effet un trait digne d'attention que,
mains . dans cette Byzance, qui si longtemps s'était
désintéressée de la Grèce antique, brusque-
Le despotat de Mistra . - Entre ces divers ment, à la veille de la catastrophe, reparaYt le
centres de çulture intellectuelle et artistique . souvenir des lointaines origines helléniques .
Mistra mérite uni mention particulière . Sur les lévres des gens du xve siécle, se ren-
Fondée par Guillaume de Villehardouin, au- contrent de façon inatte~idue les grands noms
dessus de la plaine où fut Sparte, devenue en- des Périclés et des Thémistocle, des Lycurgue et
suite la résidence des despotes grecs du Pélo-- des Épaminondas, dont on se plat à rappeler ce
ponèse, Mistra, avec ses églises toutes décorées qu'ils firent, jadis « pour la chose publique, pour
de fresques, ses murailles, ses maisons, ses pa- la patrie m . Les hommes les plus éminents d~~
la~s, est, comme on l'a dit justement, une Pom- temps, un Gémiste Pléthon, un Bessarion, voient
péï byzantine . Après qu'en X262 la ville fut re- dans le réveil de la tradition hellénique le le-
venue au pouvoir des Byzantins, Andronic II vain qui sauvera l'empire, et ils adjurènt le sou-
s'appliqua à la peupler et à l'embellir et il y fit verain de prend~ •e , au lieu dιι titre suranné de
bátir plusieurs églises . Jean Gantacuzène plus basileus des Romains, le nom nouveau et vi-
.tard s'y intéressa davantage encore . Il fit de la vant de roi des Hellénes, « qui à lui seul suffira,
province de 14iorée, progressivement reconquise disen~-ils, poùr assurer le salut des Hellénes
sur les Francs, un apanage pour son fils cadet libres et la délivrance de leurs fréres esclaves » .
~'lanuel, qui reçut le titre de despote (1348) ; et Bessarion rappelle au dernier des Paléologues
sous le gouvernement de ce prince, comme les exploits des Spartiates d'autrefois et le sup-
sous celui des cadets de la dynastie des Paléo- plie de se mettré á la tête de leurs descendants
logues qui lui succédèrent (á partir de 1383), pour affranchir l'Europe des Turcs et recon-
Mistra fut le centre d'une cour brillante, artiste quérir en Asie l'héritage de ses péres . Pléthon
et lettrée, véritable foyer d'hellénisme et d'hu- propose à Manuel II tout un programme de ré-
manisme, et refuge de la nationalité grecque formes - à la veille de la catastrophe suprême
expirante . - pour l'Hellade régénérée . Et si vaines que
9IÓ L' EMPIRE BYZANTIN SOUS LES PALÉOLO(3UES LA CIYILI3ATION BYZANTINS 9I7
semblent ces illusions, au moment oie iVlaho- l'art byzantin était capable enco~ •e et jettent sur
met II est aux portes, ce n'en !est pas moins un Yépoque des Paléologues une suprême splen-
fait remarquable que cette reprise de conscience deur .
de l'hellénisme qui ne veut pas mourir, . que
cette vue prophétique d'un avenir lointain o~~, L'empire grec de Tréb~zonde . - A l'autre
selon le mot d'un écrivain du xve siècle, Chat- extrémité du monde byzantiń, au fond de la
condylès, r quelque jour un roi grec et ses suc- mer Noire, l'empire lointain de Trébizondé
cesseurs restaureront un royaume o~~ les fils des offrait vers le ~~ê~ne temps un autre ce~~tre int~-
tIellènes réunis administreront eux-mêmes leurs ressant de civilisation hellénique .
affaires en formant une nation A . Au commencement du x~~~e siècle, Alexis h~
. C'est à la cour de Mistra surtout que se so~~t (iao4-~a2a), de la famille des Comnènes, avait
exprimées ces aspirations, et pareillement . c'est fondé, malgré les attaques des souverains de Ni-
dans les églises de Mistra, à la Métropole (com- cée et des Turcs Seldjoucides, un État qui com-
mencement du x~~~ siècle), à la Peribleptos (mi- prenait tout l'ancien Pont Polémoniaque et s'é-
lieu du xwe siècle) á la Panta~~assa (xve siècle), tendait vers l'est jusqu'au Phase . Mais isolé aux_
que se re~~contrent quelques-uns des chefs- extrémités de l'Urgent, perdu entre les Turcs et
d'oeuvre de la Renaissance artistique de ce les Mongols, troublé à l'intérieur par les que-
temps . On y observe une rare entente du sens relles de sa turbulente noblesse féodale, ex-
décoratif, une recherche du pittoresque, du mou- ploité par les Gênois, jalousé par les souve-
vement, . de l'expression, un gotlt remarquable rains grecs de Contantinople, le nouvel empire
de l'élégance et de la grâce, un sens admirable mena une existence souvent difficile . Il connut
de la couleur, délicate et v~guureuse à la fois, pourtant des jou~ •s prospères, sous le règne
un art savant et libre tout ensemble . Les mêmes d'Alexis II (iag~-X330), sous le lo~~g gouverne-
qualités se retrouvent dans les fresques des ment d'Alexis III (~34o-i3go), qui embellit sa
églises de Macédoine c~mrc~e dans les peintures capitale d'églises et de monastères . Étagée au-
les plus anciennes des monastères de l'Athos . dessus de la mer, parmi les eaux courantes et la
Elles montrent de quelle originalité créatrice verdure, prodigieusement riche far le grand
commerce qu'elle faisait avec ~'~ntérieur de personne parut en Morée, brisant toutes les ré-
l'Asie, célèbre par son luxe et par la beauté de sistances, sans réussir pourtant à emporter
ses princesses, Trébizonde était alors une des Mistra . Les despotes encore une fois durent se
plus belles villes de l'Orient et un des grands soumettre, mais bient~t à nouveau ils se soule-
marchés du monde . Sur le plateau qui dominait vèrent . Alors le sultan marcha droit á Mistra,
le rivage, le palais des princes était une mer- déposa le despote Démétrius qu'il emmena pri-
veille d'élégante magnificence, et la renommée sonnier ; l'autre prince grec s'enfuit en Italie, et
de la cité, « tête et oeil de l'Asie tout entière p, la Morée devint une province turque 0460) .
était répandue dans tout le ~r~onde ór~ēntal . David Comnène, le dernier empereur de Tré-
Sans doute, à partir du commencement du bizonde, succomba en ~46~ . Vainement il avait
xve siècle . une démoralisation profπnde troubla essayé de s'appuyer sur le mari de sa nièce, le
la cour des Comnènes et la remplit d'intrigues prince turcoman Ouzoun Hassan . En I46~ N1α-
sanglantes et de tragiques aventures . IΙ n'en homet II paraissait en Anatolie, battait les
subsista pas moins, g~ •â ce á l'empire de Trébi- troupes d'Hassan, puis se retournait contre Tré-
zonde, au fond du Pont-Euxin, un reflet des bizonde, qui dut capituler . Ce qui restait de la
gloires de Byzance, et pendant deux siècles et famille impériale fut interné par ordre du sultan
demi, la nationalité grecque trouva ~à un de près de Serrés en Macédoine . C'était la fin du
ses refuges . dernier État grec d'Orient .
Le despotat de Morée et l'empire de Trébi-
zonde devaient survivre quelques années à peine Ainsi finit l'empire byzantin, après plus de
à la chute de Constantinople . Dès X 453, l'insur- mille ans d'existence, et d'une existence sou-
rection albanaise dans le Péloponèse avait amené vent glorieuse, après avoir été, durant des siè-
les Turcs en Morée, et les despotes, frères de cles, le champion de la chrétienté contre l'Islam,
Constantin XI, après avoir appelé les Ottomans le défenseur de la civilisation contre la bar-
à leur aide, avaient d~1 se reconnaYtre les vas- barie, l'éducateur de l'Orient slave, après avoir,
. Mais
saux du sultan . Lorsque en I45g Thomas re- jusqu'en Occident, fait sentir son influence
fusa le tribut, ce fut plus grave . Mahomet II en alors même que Byzance fut tombée, alors qu'elle
940 L'EMPIRE BYZAYT (N SOUS LE3 P~LÉOLOGU$s
~1 A PPI~ND1Cti
LISTE DES EMPEREURS BYZANTINS 4S~
t 1J)'-J
. χπι< sίèιίe . (?Ιατι . ~F .1r
de Cίύίαυdυr , ά 1 .1(Σιυs
2 . Cυur Qιι ιυυιrι ;ιι~re
58~ . - Prise de S~rmium par les Avars . 6g2. - Défaite de Justinieτι II par Ies Arabes à Sé-
Vers 582 . - Création des esarchats d'Afrique et de bastopolis .
Ravenne. 697-698 . - Prise de Carthage par les Arabes et perte
5g~ . - Paix avec la Perse . de l'Afrique.
60~ . - Victoires de Priscos sur les Avars . 708 . - Echec de Justinien II contre les Bulgares .
602 . - Soulèvement de Phocas. ~o . - Insurrection de l'Italie .
608 . - Les Perses conquièrent la Syrie et parvienne 7~2-7~~ . - Progrès des Arabes en Asie Mineure .
à Chalcédoine . 7~7-718 . - Siège de Coτιstantinople par les Arabes
óio. - Soulèvement d'~īéraclius et chute de Phocas . 726 . - Éàit contre les images .
6~5. - Prise de Jérusalem par les Perses . 727 . - Insurrection de la Grèce et de l'Italie .
6i7 . - Conquête de l'Égypte far les Perses . 739. - Bataille d'Akroïnos .
622 . - Héraclius prend l'oflénswe contre les Perses . 740. - Publication de l'~'~log~ .
626. - Les Avars et les Perses attaquent Constant~- 75~ . - Prise de Rανeηηε har les Lombards .
vo~le . 752 . - Succès sur les Arabes .
X27 . - Bataille de Ninive . 753 . - Concile iconoclaste d'~Iiéria .
62g . - Paiχ avec les Perses . 754 . - Donation de Pépin à la papauté . Perte de l'ILa-
Commencement du vus siècle . - Établissement des lie byzantine .
Croates et des Serbes dans l'Illyricum . 755 . - Guerre contre les Bulgares.
634 . - Lés Arabes envahissent la Syrie . 7~2 . - Uéfaite dis Bulgares à A~chialos .
636. - Bataille de l'Yarmouk . 765 . - Persécution contre les partisans des images .
637 . - Capitulation de Jérusalem. 787 . - Concίle ~~cu~néniq~~e áe Nicée .
638. - Héraclius publie 1'Ecthesis ou Exposition de 797 . - Consta~~tin VΙ renversé par Irène .
la foi . 800. - Reconslitutia~ de l'empire roman d'Occident .
640-642 . - Conquéte de l'Egygte par les Arabes . 809 . - Invasion du Khan bulgare Kroum .
647 . - Les Arabes dans l'Afrique du Nord . 5~~ . - L'empereur Nicéphore est tué dates la lutte
648 . - Constant II publie le type. contre Ies Bulgares .
655 . - Défaite de la flotte byzantine dans les eaux de 8~3 . - I{rouet devant Const3nt~LOple .
Lycie. 8τ3 . - Victoire des Byzantins à Mesembria.
:Milieu du v~~A siècle . - Création des thèmes asiatiques . 8~5 . - Sy~~ode iconoclaste de Constantinople .
668 . - Les Arabes à Chalcédoine . 822 . - Ins~~rrectiou de '~~~u~~~as .
673-678 . - Grand siège de (:onstantinople par les 826 . - Cοηgυε?te de la Crète par les λrabes .
Arabes . SR7 . - Les Arabes en Sicile .
679 . - Établissement des Bulgares au sud du D~ 832 . - Édit de 7héo~hile contre, les ~~nages .
nube . 83á . - F~tise d'Amor~on par les Arabes .
680-68~ . - Concile oecuménique de Constantinople . 8tμ . -- Prise de ~iessin~: par Ies Arabes .
go{ . - Thessalonique prise par les Arabes . ~oa~ - posa . -Annexion de l'Arménie .
g~5 . - Bataille du Garigliano . X039 . - Prise d'Édesse par les Grecs .
g~~ . - Victoire des Bulgares à Aneh~alos. X038 . - Succès de Georges Maniakès en Sicile .
gag. - Usurpation de Romain Lécapène. X040 . - Insurrection de la Bulgarie .
g94. - Syméon devant Constantinople . X049 . - Révolution à Constantinople . Chute de Mi-
gai . - Mort du tsar Syméon . chel V .
g34 . - Prise de Mélitène par les Byzantins. X043. - Soulèvement de Georges Maniakès .
944 • - Prίse de Nisibis et d'Édesse . X054 . - Le patriarche Ceroular~os rompt avec Rome .
944 • - Chute de Romain Lécapène . ~05~ . - Soulèvement d'Isaa~ ComnBne .
g6~ . - Reprίse de la Crète par Nicéphore Phocas . X064 . - Prίse d'Ani par les Turcs Seldjoucides .
g6:i . - Usurpation de Nicéphore Phocas . ~o~~ . - Prise de Bari par les Normands et perte de
g65 . - Conquëte de la Cilicie . l'Itahe .
g6~ . - Reprίse de la guerre bulgare . ~o~~ . - Bataille de Mantzikiert .
g68. - Les Russes en Bulgarie . ~0~8. - Soulèvement de Bryenne et de Botan~ate .
g68. - Prise d'Antioche . ~0~8 . - Les Turcs à Nicée .
góg. - Assassinat de Nicéphore Phocas . ~08~ - 084 . - Invasion de Robert Guiscard en Épire .
g~~ . - Insurrection de Bardas Phocas . X089. - Traité avec Venise .
g~~ . - Défaite des Russes à Silistrie . Annexion de ~og~ . - Défaίte des Petchenègues sur le Léburn~on .
la Bulgarie . ~og6. - Les croisés à Constantin p e .
g~6. - Campagne de Tzi~~~~scès en Syrie. X097 . - Prise de Nicée par les crosés .
9~ APPBNDICS
~3g~. - Bajazet attaque Constantinople.
~40~. - Bataille d'Angora .
~G~~. - Siège de Constantinople par les T~r~s . BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE
~lf~3. - Thessalonique vendue à Venise.
~4~3 . - Expéd~tio~ des Turcs en Morée . Des principaux ouvrages à lire ou s~ consulter
X430 . - Prise de Thessalonique par les Tnrca .
~43g . - Concile de Floreαce .
X444 . - Bataille de Varna .
X446 . - Invasion turque en Morée .
~45~ . - AvBnement de Mahomet II .
~ISTOI~B GÉNÉRALIi DB L'EbiPdRIi BYZANTIN. - Il
~lM53-~g mai , - Prise de Constantinople par les Turcs.
n'existe point actuellement, sauf peut-étre en Russίe,
d'h~stoir~ générale détaillée et complète de l'empire by-
zantin , que l'on puisse considérer comme étant au cou-
rant des dernières recherches scient~óques . L'ouvrage
de Gibbon : Hástory of the decline and fall of the Ro-
man empire, est étrangement tendancieux et vieilli, et
l'édition no~welle qu'en a donnée Bury (Londres, ~8g6,
~ vol .) vaut surtout par les précieuses notes dont l'a
accompagnée l'éditeur . Le hure de Fίnlay : History of
Grece from its coi~quest br the Ro~i~ans to the present
t~me (éd. nouvelle de Tozer, Oxford, X877, ~ vol .), de
même que ce1u~, plus sommaire, de ~Iertzberg, Ge-
schichte der Byzantiner und des Osmanischen Reiches
bis gegen Ende des X VI Jahrhunderts (Berlin, X883,
~ vol .), sont antérieurs aux grands travaux scientifiques
de ces dernières années ; et si le travail de Ch . Hopf,
publié dans l'Encyclopédie de Ersch et Gruber (t . 85 et
86), sous le titre : Geschichte Griechenlands vom Be~i~~
des Mittelalters bis auf unsere Zeit, X867, mérite tou-
jours d'~tre consulté, lest principalement -pour la pé-
riode qui suit la 4g croisade et pour l'histoire des États
latins qui se fondèrent en Grèέe après ~a~4 . La Chrono-
graphie byzant~~e de Muralt (Saint-Pétersbourg, ~855-
~8~3 , ~ vol .), malgré de nombreuses inexactitudes, est
toujours un répertoire chronologique utile .
En ces dernières années, plusieurs savants russes ont ~gos) ; Bary, H~story of the eastern Roman empire (,80o-
commencé la publication d'histoires générales de By- ~7) (~ndr~• 1912) •
zance. Celle de Koulakovski (Kiel ~g~o-~g~5) comprend
Po~~r Za période qui va de la fin du Ire au commence-
trois volumes, . qui racontent les événements de 3g5 à
~~~. Celle d'Ouspenski (Pétrograd, ~g~3) ne compte ment du XIII° siècle : Vogt, Basile Iθ° (Paris, ~go8) ;
Rambaud, L'Empire grec au X° siècle (Paris, ~8~0) ;
encore qu'un volume et s'arrëte pareillement en ~~~ .
Celle de Vassίlief (Pétrograd, ~g~~) comprend, dans son S~hlumberger, Nicéphore Phocas (Paris, ~8go) ; L'épopée
tome I, la période qui va du we sίècle à ~08~ . Il faut byzantine à la fin du X~ siècle (góg-~o5~) (Paris, t8gó-
citer enfin l' `~~~op~~ ~~~ '~~~~~o~ de Lambros, dont les τgο5, 3 vol.) ; Bréhier, Le schisme oriental du Xie siècle
(Paris, ~8gg) ; Neumann, die Weltstéllung des byz .
tomes III à Vl (Athènes, ~$g~-~go8) racontent 1'histαίre
de l'empire depuis Constantin jusqu'en X453 : Reá~hes vor den Kreuzzügen (Leipzig, ~8g4 ; traduction
A défaut d'histoire générale de Byzance, il existe quel- française, Paris, τgο5) ; Chalandon, Essai sur le règne
ques manuels sommaires : les meilleurs sont cens de d'Alexis Comnène (Paris, ~goo) ; Jean II Comnène
Gelzer, Abr~ss der byza~zt~nischènlfaisergeschichte(Álu- et Manuel Comnène (Paris, ~gia) ; Cognasso, Partiti
n~çh, X897, à la suite de la Geschichte der byz . Littera.- politici e lotte d~nastiche in Bisanz~o (Turin, ~g~2) ;
tur, de Kr~~~nbacher) ; de Jorga, The byzantine empyre Isaac Ange (Bessar~one, ~g~5} ; Luchaire, Innocent III
(Londres, ~go7}, et de Foord, The byzantine emgïrε la question d'Orient (Paris, ~go7) ; Norden, Der vierte
(Londres, ~g~ ~) . Enfin les tomes lI et IV de la Cambridge Kreuzzug (Berlin, ~8g8) .
medi~e~al history (Cambridge, ~g~3 et ~g~3) contiennent Pour la période qui va de ~2o~E à ~~f53 : Gerland,
d'excellents chapitres sur l'histoire byzantiné . Geschichte des lateinischen Kaiserreiches (Hombourg,
~go5 ; Miliarak~s, `I~~o~~a ~o~ ~~~~~~~ov ~~~ N~x~éa~ (Athènes,
MONOGRAPHIES RELATI~'~i~ A L'llISTOIRE ~ΥZá.NTIPTΣ.. ~~g8) ; Gardner, The Lascaridv of Nicaea (Londres,
- Nous possédons en revanche de nombreux onvrages : τgτ3) ; Buchon, Recherches sur la principauté franque
traitant une portion plus ou-moins étendue de I'hisi~~re de Morée (Paris, ~84~-846, 5 vol.) ; Rennell Rodd,
de Byzance . On citera ici les principaux The primes of Achaia (Londres, ~go7, 2 vol .) ; Miller,
Pour Za période qui va de la fin du IV° siècle à Z~,ffrt The Latins in the Levant (Londres, igo8) ; Schlum=
du IX° : Bury, A h~story of the later Roman empár~, berger, Expédition des Almugavdres (Paris, ~goa) ;
from Arcadius to Irene (Londres, ~88g, 2 vol .), History of Berger de Xwrey, Manuel II Paléologue (Paris, X853) ;
ihe later roman empire (3g5 565) (Londres, ~g23 . 2 vol) . Schlumberger, La prise de ()onstantinople (Paris, ~g~4) ;
D~ehl, Justinien et la civilisation byzantine au VI° siècle Fallmerayer, Geschichte des Kaisertums Trapezunt
(Paris, ~go~, ~ vol . ) ; Pernice, L'imper tore Eraclio (Flo- {Munich, X827) .
II faut citer, en outre, plusieurs monographies rela-
rence, ~go5) ; Schwartzlose, Der Bilderstreit (Γsotha,.
tis~w à l'histoire de certaines provinces ou de certaines
~8go) ; Bréhier, La querelle des images (Pars, ~go4) ;
Lombard, Constantin V, empereur des Romains (Paris, vïlle~ : D~ehl, l'Afrique byzantine (Paris, ~8g6 ; Études
a±ur l'administrat~o~ byzantine dans l'exarchat de Ra-
Ρα~τsεα -
CHAPITRE P1iEMIER
La fondation ds Constantinopie et les origines
de l'empire romain d ' Oráent (330-518)
CHAPITRE li
Le règne de Jnatinien et l'empire grec au VIS ~iécle
(518-810)
CHAPITRE III
La dynastie d'Héraclius . Le péril arabe et la trana-
formation - de l'empire au gII~ siécle (~10-717)
CHAPIT~tE VΙΙ
CHAPITRE IV
L'empire latin de Qonstantfnople et l'empire g~eo
Les empereurs i sauriena et la querelle des images
de ~Tioóe (1404~ •iZBi)
(717-887) '
1 . - La dislocation de l'empire byzantin . 173
1. - La recoastitntion de l'empire sons les denz premiers 175
lI . - L'empire ~at~n de Cons~antinople
empereurs isan~iens (717-775 ) 65 179
III . - L'empire grec de Nicée .
11 . - La querelle des images (726-750) . 70
IV . - La reprise de Conatantinople par les Grecs 184
III . - Iréne et la restauration des images (780-802) . 76 18~~
Y . - La principa~t8 d'AchaYe .
IV. - La deaziéme période de la querelle des images
80
APns~iDian . 221
I . - Les souverains de la maison de Macédoine et ia conso-
I. - Liste des emparants byzantine . ~1
lidation de ~a dyaastée (867-1025) 90
II . - La politique ezt8rie~re des emparants macédoniens II . - Table ~hronolog~gne des óvenemeats les plus
importants de l'histoire byzantine ~
(867-1025) ~. 97
CHAPITRE VI
Le sióole des Comabnes (1081-1204)