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La vulgarité est-elle le produit de la modernité ?

Publié le 21/10/2019 à 12:00

Bertrand Buffon

Essayiste et auteur de Vulgarité et modernité (Gallimard).

Le constat est évident, mais le remède l’est moins. Pierre Étaix (1928-2016) en a fait les frais, avec son génial documentaire
fleuve "Pays de cocagne" (1971) qui suit la tournée des plages d’Europe 1 après 1968 : la vulgarité croît. La presse lui
reprocha à l’époque sa condescendance. Que dirait-elle aujourd’hui ? Le livre de Bertrand Buffon – Modernité et vulgarité
-, aurait pu s’appeler "Extension du domaine de la vulgarité". "Il m’arrive d’être vulgaire", nous a déclaré d’entrée de jeu
son auteur. Il nous a reçu "civilement" !

Propos recueillis par Philippe Petit

Marianne : Vous accréditez l’idée d’un essor de la vulgarité, tous milieux confondus, depuis la fin du XVIIIe siècle où le
mot fut mis en circulation par Madame de Staël (1776-1817). Est-ce un hasard que ce soit une femme qui l’ait inventé
?

Bertrand Buffon : Les femmes sont nées pour civiliser les hommes, pensait Nietzsche… La vulgarité est une incivilité. Elle
allie des défauts manifestes dans les manières, le langage, la tenue, et beaucoup de présomption ou de prétention. De
Madame de Staël à Lydie Salvayre, en passant par Marie d’Agoult, Delphine Gay et bien d’autres, les femmes sont
nombreuses à porter le fer contre la vulgarité.

Soit, mais qu’est-ce qui vous fait croire à cette pente irrépressible vers moins de civilité et plus de vulgarité ?

La pente est irrépressible parce que la vulgarité résulte d’une application intempérante des principes modernes,
aujourd’hui promue par l’idéologie dominante, le néolibéralisme. La conception de l’être humain comme un être de
volonté qui se fonde lui-même et s’exhausse au-dessus de tout, le matérialisme systématique qui ravale toute chose à
l’état de moyen et l’extension abusive de l’idée d’égalité nourrissent à la fois la présomption, la prétention et les défauts
de civilité ou de manières. Cependant, si ces principes rendent la vulgarité possible, voire l’encouragent, ils n’y conduisent
pas nécessairement – sinon nous serions tous vulgaires. La vulgarité s’étend et se banalise, elle ne se généralise pas.

Vous associez cet essor à la modernité. En gros, à l’avènement de l’individu démocratique et celui des droits de
l’homme, comme si le régime des droits entravait le libre développement de notre "nature". Comme si, faisant taire
nos « passions », notre condition juridique, empêchait notre "raison" d’apprendre à discerner nos bons et mauvais
penchants ? Vous ai-je bien lu ?

Tout à fait. Se définir comme un être titulaire de droits revient à faire précéder tout ce qu’on pense et fait d’un "j’ai le
droit". La proclamation du droit vient avant et prime la pensée ou l’acte qu’il justifie ; dès lors, leur légitimité tient à leur
autorisation plus qu’à leur qualité propre. Les motifs naturels et intellectuels qui les fondent passent au second plan ; or
la délibération sur ces motifs est constitutive de notre vie intérieure et conditionne notre liberté : à trop se focaliser sur
ses droits, on atrophie l’une et l’autre. C’est donc moins les droits en tant que tels qui favorisent la vulgarité que le régime
actuel des droits, qui en fait des fins en soi. Ceux qui critiquent la vulgarité sont d’ailleurs des modernes, mais qui sont
insatisfaits de la tournure prise par la modernité.

Hugo était vivant, sa vanité ostensible


La liste des auteurs qui sont partis en guerre au XIXe siècle et XXe siècle contre la vulgarité est impressionnante !
Certains ont reproché à Victor Hugo d’être vulgaire. C’est un peu excessif ?
Bien sûr, mais il faut se remettre dans le contexte : Hugo était vivant, sa vanité ostensible ; son outrance revendiquée
heurtait un goût encore très attaché à la mesure. Avide de succès, il ne rechignait pas devant le sentimentalisme. Il lui
arrivait donc bien de tomber dans la vulgarité. De là à le juger uniformément vulgaire...

Au XVIII siècle, c’est le peuple qui était vulgaire, avant de devenir dangereux. Au XIX siècle, c’est le bourgeois qui est
vulgaire. Aujourd’hui, c’est tout le monde qui peut l’être ?

Au XVIIIe siècle, "le vulgaire" désignait l’ensemble de la population, excepté les élites. Longtemps neutre, le terme prenait
alors une tournure péjorative, dénonçant la banalité, la trivialité, la grossièreté. Avec la Révolution, la bourgeoisie prend
le pouvoir, impose ses idées, domine l’économie ; elle en tire prétention : du vulgaire on passe à la vulgarité. Peu à peu,
les principes modernes se diffusent ; l’éthique classique s’efface : quand elle aura disparu, le fondement hédoniste de la
modernité déploiera toutes ses virtualités – narcissisme, relativisme… –, exposant désormais tout le monde à la tentation
de la vulgarité.

Vous ne parlez pas de la télévision. Vous auriez pu évoquer Cyril Hanouna. Ou bien l’allure ostentatoire des nouveaux
riches, qualifiée de bling-bling. Où commence et où finit la vulgarité de nos jours ?

Mon livre est le premier à aborder de front le phénomène. Il ouvre des pistes, il ne pouvait tout traiter. J’espère qu’il fera
des émules. Une démarche intéressante serait d’établir une typologie, car la vulgarité prend des formes variées : il y a une
vulgarité terne comme une vulgarité ostentatoire, une vulgarité bonhomme comme une vulgarité agressive – voyez Trump
–, etc. Tout dépend de la tonalité de la prétention et des défauts qui l’accompagnent. Ceux-ci peuvent de surcroît relever
de l’esprit : faire valoir son émancipation quand on obéit servilement à un supposé "sens de l’histoire" est une vulgarité
intellectuelle. Mais, aussi diverse soit-elle, la vulgarité consiste toujours en une affirmation excessive de soi ; aussi
s’éclipse-t-elle dès lors que cette survalorisation s’estompe, même si les autres défauts demeurent.

L’humilité n’est pas une faiblesse


L’affirmation de soi, une subjectivité sans bornes - "un moi qui exalte sa souveraineté et ses droits" - entretient selon
vous les manières vulgaires. Seule l’humilité pourrait freiner cette propension au narcissisme ? Pourquoi ?

L’humilité, qui implique la discrétion, est le contraire de la prétention qui caractérise la vulgarité. Se croire autosuffisant,
c’est s’enfermer en soi, s’appauvrir et s’asservir à ses penchants et désirs. En faisant droit à ce qui le transcende – nature,
culture, société –, l’être humble ne s’amoindrit pas, il s’élargit et s’élève ; quand on s’y refuse, "rien ne soutient plus
l’homme au-dessus de lui-même", s’inquiétait Tocqueville ; notre humanité est muselée car "être un homme, c’est tendre
à se dépasser sans cesse" (Karl Jaspers). Quant à notre puissance technique, elle fait notre orgueil, mais nous nous y
assujettissons faute de finalités partagées allant au-delà du seul souci de bien se conserver. Ces finalités supposent de ne
pas nous définir exclusivement par la volonté et de la soumettre à des facteurs d’humanité qui nous obligent, à
commencer par la vertu de force, car rien n’est moins aisé que de résister aux sirènes de la technique. L’humilité n’est pas
une faiblesse.

L’absence de morale civique, c’est ce qui rend possible selon vous la vulgarité. Diriez-vous que la politesse s’apprend
davantage à l’école qu’en famille, ou dans l’espace public ?

La politesse s’apprend partout, mais sa maîtrise suppose d’y être accoutumé dès l’enfance. La famille est le lieu le plus
propice à cet apprentissage parce que l’amour filial rend l’inculcation des règles plus aisée. Les familles ont du mal à la
transmettre aujourd’hui parce que l’air du temps lui demeure rétif. Des initiatives publiques – politiques et associatives –
doivent être prises pour la réhabiliter authentiquement.

Cessons de vivre uniquement dans l’abstraction des droits !


La politesse corrompue de l’Ancien Régime, ce n’est pas mieux que certaines convenances hypocrites qui règnent
parfois dans les entreprises, les clubs de golf, ou certains restaurants ? Comment être poli sans être convenu ?
À la fin de l’Ancien Régime, le raffinement des manières était admirable mais… insupportable tant il bannissait tout
sentiment vrai. La politesse sert à établir la communication et à manifester le respect ; elle n’est pas convenue quand elle
n’est pas indifférente : c’est le cas si, en disant à quelqu’un "comment vas-tu ?", on le reconnaît et on lui témoigne de la
bienveillance, même si on ne s’intéresse pas vraiment à sa santé ni à son humeur. La bonne politesse se préoccupe de la
relation et pas seulement de la convention.

"L’agréable, l’utile, le juste et le noble", tel est votre viatique ! C’est un peu beaucoup pour un seul individu, non ?

Non, puisque ce sont des aspirations naturelles. L’agréable, c’est le plaisir maîtrisé : qui aspire véritablement à être saoul
ou "addict" ? L’utile, c’est la réponse à nos besoins, sans cupidité : qui ne s’estime aliéné d’obéir à une pulsion d’acquérir
ou de consommer ? Le juste, c’est le souci d’une égalité bien entendue : qui ne critique des inégalités injustifiées ? Le
noble, c’est le dévouement : qui ne se félicite d’avoir accompli un geste gratuit, fourni une aide désintéressée ? Cessons
de vivre uniquement dans l’abstraction des droits ! Retrouvons les motifs naturels qui nous animent. Nous n’en serons
que plus heureux, quels que soient les efforts qu’ils nous demandent – grâce à eux, même.

>> Bertrand Buffon, Modernité et vulgarité, Gallimard, 229 p., 19 euros 50


(1928-2016) pagó el precio, con su brillante documental "Pays de cocagne" (1971), que sigue el recorrido por las playas
de Europa 1 después de 1968: la vulgaridad crece. La prensa le reprochó en su momento su condescendencia. ¿Qué diría
ella hoy? El libro de Bertrand Buffon, Modernidad y vulgaridad, podría haberse llamado "Extensión del campo de la
vulgaridad". "Resulta que soy vulgar", nos dijo desde el principio su autor. ¡Nos recibió "civilmente"!

Entrevistado por Philippe Petit

Marianne: Usted acredita la idea de un aumento de la vulgaridad, todos los círculos, desde finales del siglo XVIII cuando
Madame de Stael (1776-1817) hizo circular la palabra. ¿Es una coincidencia que una mujer lo haya inventado?

Bertrand Buffon: Las mujeres nacieron para civilizar a los hombres, pensó Nietzsche ... La vulgaridad es una incivilidad.
Combina defectos obvios en modales, lenguaje, vestimenta y mucha presunción o pretensión. Desde Madame de Staël
hasta Lydie Salvayre, pasando por Marie d'Agoult, Delphine Gay y muchas otras, muchas mujeres usan hierro contra la
vulgaridad.

O bien, ¿pero qué te hace creer en esta pendiente irrefrenable hacia menos cortesía y más vulgaridad?

La pendiente es irreprimible porque la vulgaridad resulta de una aplicación intemperante de principios modernos, hoy
promovida por la ideología dominante, el neoliberalismo. La concepción del ser humano como un ser de voluntad que se
basa y se eleva por encima de todo, el materialismo sistemático que reduce todo al estado de los medios y la extensión
excesiva de la idea. de igualdad alimentan al mismo tiempo la presunción, la pretensión y los defectos de civilidad o
modales. Sin embargo, si estos principios hacen posible la vulgaridad, o incluso la alientan, no necesariamente conducen
a ella; de lo contrario, todos seríamos vulgares. La vulgaridad se propaga y se vuelve común, no se generaliza.

Asocias este boom con la modernidad. Básicamente, en el advenimiento del individuo democrático y el de los derechos
humanos, como si el régimen de derechos impidiera el libre desarrollo de nuestra "naturaleza". Como si, silenciar nuestras
"pasiones", nuestra condición legal, impidiera que nuestra "razón" aprendiera a discernir nuestras inclinaciones buenas y
malas. ¿Te leí correctamente?

Absolutamente. Definirse a sí mismo como titular de los derechos es preceder a todo lo que uno piensa y hace de un
"Tengo el derecho". La proclamación de la ley viene antes y tiene prioridad sobre el pensamiento o el acto que justifica;
por lo tanto, su legitimidad reside en su autorización más que en su propia calidad. Los motivos naturales e intelectuales
subyacentes son de importancia secundaria; Pero la deliberación sobre estos motivos es constitutiva de nuestra vida
interior y condiciona nuestra libertad: centrarnos demasiado en los derechos de uno, uno atrofia a uno y al otro. Por lo
tanto, son menos los derechos como tales los que favorecen la vulgaridad que el sistema actual de derechos, lo que los
convierte en fines en sí mismos. Los que critican la vulgaridad también son modernos, pero no están satisfechos con el
giro de la modernidad.

Hugo estaba vivo, su aparente vanidad

¡La lista de autores que fueron a la guerra en el siglo XIX y XX contra la vulgaridad es impresionante! Algunos han criticado
a Victor Hugo por ser vulgar. ¿Es un poco excesivo?

Por supuesto, pero es necesario ponerlo en contexto: Hugo estaba vivo, su aparente vanidad; Su indignada indignación
dio un gusto aún asociado a la medida. Codicioso de éxito, no se resistió al sentimentalismo. Sucedió, por lo tanto, caer
en la vulgaridad. A partir de ahí para juzgarlo uniformemente vulgar ...

En el siglo XVIII, las personas eran vulgares antes de volverse peligrosas. En el siglo XIX, los burgueses son los vulgares.
Hoy, todos pueden ser?

En el siglo XVIII, "vulgar" significaba toda la población, excepto la élite. Durante mucho tiempo neutral, el término tomó
un giro despectivo, denunciando banalidad, trivialidad, grosería. Con la Revolución, la burguesía toma el poder, impone
sus ideas, domina la economía; dibuja pretenciosidad: de la vulgaridad se pasa a la vulgaridad. Poco a poco, los principios
modernos se difunden; La ética clásica se desvanece: cuando desaparece, la base hedonista de la modernidad desplegará
todas sus potencialidades (narcisismo, relativismo ...), exponiendo a todos a la tentación de la vulgaridad.
No hablas de televisión. Podrías haber mencionado a Cyril Hanouna. O el aspecto ostentoso de los nuevos ricos, llamado
bling-bling. ¿Dónde comienza y termina la vulgaridad hoy?

Mi libro es el primero en abordar el fenómeno de frente. Abrió pistas, no pudo con todo. Espero que emule. Un enfoque
integrado establece una tipología, porque la vulgaridad adopta varias formas: hay una vulgaridad sorda como una
vulgaridad ostentosa, una vulgaridad como una vulgaridad agresiva (ver Trump), y así sucesivamente. Todo depende del
tono del reclamo y los defectos que lo acompañan. Estos pueden, además, ser de la mente: afirmar la propia emancipación
cuando uno se somete servilmente a un supuesto "sentido de la historia" es una vulgaridad intelectual. Pero tan diversa
como es, la vulgaridad siempre consiste en una afirmación excesiva de sí mismo; También desaparece tan pronto como
esta sobrevaluación desaparece, incluso si los otros defectos permanecen.

La humildad no es una debilidad.

La autoafirmación, una subjetividad ilimitada, "un ego que exalta su soberanía y sus derechos", se mantiene de acuerdo
con sus modales vulgares. ¿Solo la humildad podría frenar esta propensión al narcisismo? Por qué ?

La humildad, que implica discreción, es lo opuesto a la pretensión que caracteriza la vulgaridad. Creer que uno es
autosuficiente es encerrarse, empobrecerse y esclavizarse por las inclinaciones y deseos de uno. Al hacer justicia a lo que
lo trasciende (naturaleza, cultura, sociedad), el ser humilde no disminuye, se amplía y se eleva; cuando uno se niega a
hacerlo, "nada apoya al hombre más que a sí mismo", se preocupaba Tocqueville; nuestra humanidad está boquiabierta
porque "para ser un hombre, tiende a excederse constantemente" (Karl Jaspers). En cuanto a nuestro poder técnico, es
nuestro orgullo, pero estamos sujetos a él por la falta de fines compartidos que van más allá de la única preocupación de
mantenerse bien. Estos fines presuponen no definirnos exclusivamente por la voluntad y someterla a factores de la
humanidad que nos obligan, comenzando con la virtud de la fuerza, ya que nada es menos fácil que resistir las sirenas de
la tecnología. La humildad no es una debilidad.

La ausencia de moral cívica es lo que hace posible, según usted, la vulgaridad. ¿Diría que la cortesía se aprende más en la
escuela que en la familia o en el espacio público?

La cortesía se aprende en todas partes, pero su dominio requiere estar acostumbrado desde la infancia. La familia es la
más propicia para este aprendizaje porque el amor filial facilita la inculcación de las reglas. Las familias están luchando
para transmitirlo hoy porque el aire de los tiempos sigue siendo inquieto. Se deben tomar iniciativas públicas, políticas y
asociativas, para rehabilitar auténticamente.

¡Dejemos de vivir solo en la abstracción de los derechos!

La cortesía corrupta del Antiguo Régimen, ¿no es mejor que algunas convenciones hipócritas que a veces prevalecen en
compañías, clubes de golf o algunos restaurantes? ¿Cómo ser cortés sin ser acordado?

Al final del Antiguo Régimen, el refinamiento de los modales era admirable pero ... insoportable, ya que desterró todos
los sentimientos verdaderos. La cortesía sirve para establecer comunicación y mostrar respeto; no se acuerda cuando no
es indiferente: es el caso si, al decirle a alguien "¿cómo estás?", uno lo reconoce y le da testimonio de la benevolencia,
incluso si uno no No estoy realmente interesado en su salud o su estado de ánimo. La buena educación se refiere a la
relación y no solo a la convención.

"Lo agradable, lo útil, lo justo y lo noble", ¡tal es tu viático! Es un poco demasiado para un individuo, ¿verdad?

No, ya que son aspiraciones naturales. Lo placentero es el placer controlado: ¿quién realmente aspira a estar borracho o
"adicto"? Lo útil es la respuesta a nuestras necesidades, sin avaricia: ¿quién no se siente ajeno a obedecer un impulso para
adquirir o consumir? El derecho es la preocupación por una igualdad bien entendida: ¿quién no critica las desigualdades
injustificadas? Lo noble es la dedicación: ¿quién no se felicita por haber realizado un gesto libre, proporcionado una ayuda
desinteresada? ¡Dejemos de vivir solo en la abstracción de los derechos! Encontremos los patrones naturales que nos
impulsan. Solo seremos más felices, no importa cuánto lo pidan, incluso gracias a ellos.

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