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26038****
Final report
Professor C. Scholtz
Introduction ............................................................................................................................................ 2
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Introduction
de la Révolution Tranquille, c’est aussi l’ensemble du nationalisme québécois qui sera redéfinis à
cette époque. Parce que sa définition se basera désormais sur la promotion d’un État Providence
gouvernement québécois avec Ottawa sera, elle même, profondément transformée. Et cette
fédération. En observant les transformations s’opérant dans la société civile de la province dès la
fin de la Deuxième Guerre mondiale et ce jusqu’à la Révolution Tranquille en tant que telle, on
peut comprendre un peu mieux la nature des changements majeurs survenus à cette époque
s’additionnant à cette époque formeront un nouveau paradigme nationaliste qui guidera plus que
jamais les relations du Québec avec Ottawa. Ces changements de coulisses contribueront au
remplacement des élites et leaders traditionnels par une nouvelle classe d’intellectuels ayant
profondément intégrés l’idée d’un Canada fondé par deux peuples (Français et Anglais) et dont
les idées seront marquées par ce genre d’éléments particulièrement apparus après la guerre. Bref,
parce que les transformations s’opérant dans la société québécoise dès 1945 et jusqu’au début des
années 1960 sont à ce point viscérales, cette période est un point tournant de l’histoire de la
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Le Québec après la Deuxième Guerre mondiale
Dans la foulée des efforts de guerre fournis pendant la Deuxième Guerre mondiale, le
Québec connaît une importante vague d’urbanisation et d’industrialisation dès le milieu des
années 1940, réduisant d’autant l’importance de l’agriculture comme pilier central de l’économie
l’économie (versus l’imprévisibilité d’une société dont l’économie est principalement agraire)
Maurice Duplessis, réélu Premier Ministre en 1944 après une courte interruption libérale
(de 1939 à 1944) de son règne débuté en 1936, fonde son idéologie et ses politiques sur un
catholique comme éléments fondateurs du concept de « nation » (Rocher 2002, 3). Ainsi, à cette
époque, le nationalisme traditionnel est formé autour d’une dualité religieuse et linguistique et le
désir, pour les canadiens français, de pouvoir perpétuer leurs pratiques (religieuses et
linguistiques) dans un monde résolument plus anglo-saxon que le souhaiterait l’Église et les élites
traditionnelles en général. Duplessis exploite à fond cette fibre nationaliste pour gagner en
popularité et, de façon plutôt cohérente, en fera l’élément central de sa manière de gouverner.
Son règne en est un de conservatisme social : les politiques publiques mises en place sont
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minimales – l’État n’intervient pour ainsi dire pas dans les affaires privées – et ne reflètent en
rien la montée en importance des courants plutôt keynésiens, faisant la promotion d’un État
Providence, naissant dans d’autres États du monde et même de plus en plus populaires à l’époque
dans le reste du Canada. L’Église et l’État se côtoient de très près : certains rôles semblant
aujourd’hui naturellement part du joug de l’État sont, alors, assumés par l’Église. Ainsi, les soins
de santé tout comme l’éducation sont la responsabilité du clergé, qui tient beaucoup à ces rôles,
particulièrement liés au pouvoir; la relation des individus avec l’Église catholique romaine est
ainsi viscérale qu’elle fournit aussi bien la santé – la vie – que le savoir. De même, l’Église et les
et ce depuis bien plus longtemps que le règne, la vie même, de Duplessis (Meadwell 1993, 205).
tangibles : la majorité francophone catholique (la formule frôle le pléonasme dans le contexte) est
Cette sous-représentation rend ces milieux hostiles aux francophones (soucieux de perpétuer leurs
traditions catholique et, bien sur, de communiquer dans leur langue), contribuant d’autant plus au
« mythe rural », la campagne étant belle et bien un bastion catholique et francophone où le mode
de vie traditionnel peut être mené à bien (Rocher 2002, 3). Ce mythe est pris très au sérieux par
l’industrialisation parce que les Québécois francophones – représentés par les élites
traditionnelles, notamment l’Église – rejettent ces phénomènes par crainte d’être entrainés dans
un modèle anglo-saxon ne laissant aucune place à leur ‘précieuse’ identité nationale (qui, il est
important de le marteler, est linguistique et religieuse à cette époque) (Rocher 2002, 3). Ainsi, le
Québec n’avance pas vers la modernité… Enfin, pas officiellement. Malgré la volonté du clergé,
de l’État et de la majorité, il est pourtant difficile de freiner ces phénomènes, qui surviendront
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insidieusement mais sûrement, la population migrant lentement dans les grandes villes (Montréal,
Québec, Gatineau, Sherbrooke, etc.) et les industries, manufactures et autres représentants des
secteurs de la production lourde ouvrant leur portes et trouvant, nécessairement, la main d’œuvre
obligatoire chez les francophones pour fonctionner. Mais tout ça se fait en catimini, en dehors du
auprès de Maurice Duplessis. Outre les politiques adoptées par le gouvernement unioniste sont-
elles le reflet de ce conservatisme populaire, mais, dans le cadre de ses relations avec Ottawa, le
L’attitude adoptée par Québec prend la forme d’une défense coûte que coûte de l’autonomie
provinciale : devant le fédéral, Duplessis clamera « rendez-nous notre butin » (Angers 1997, 9).
Or, si le fédéral avait eu tendance, sous Mackenzie King par exemple (avec son ministre Ernest
Lapointe [Angers 1997, 237]), à accepter plus ou moins l’idée d’un droit des provinces à être
autonomes jusqu’au limites permises par la constitution et de croire même que le fédéral serait
finalement une créature de ces même provinces pour faciliter la gestion (c’est l’opinion de
Duplessis), la situation change dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale alors que le fédéral
ressent alors le besoin de s’impliquer plus largement dans la création de politiques sociales et
fiscales. Le fédéral, ayant des moyens tout de même non négligeables pour des responsabilités
relativement limitées, s’intéresse à offrir des services sociaux aux citoyens, voguant sur la vague
de l’État Providence en développement un peu partout dans le monde, quitte à empiéter sur les
compétences des autres gouvernements de la fédération s’il le faut. Les provinces, en général, ne
s’y opposent pas tellement; l’idée de bénéficier de nouveaux programmes sociaux, d’un filet
social, n’est pas mal perçue…sauf au Québec. C’est l’époque que Cameron et Simeon (2002)
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qualifieront de « fédéralisme coopératif ». Or, pour Duplessis – et l’Église, toujours soucieuse
parce qu’elles marchent sur les juridictions de la province en tentant d’imposer un rôle accru à
l’État (ce que Duplessis veut, à tout prix, éviter), va à l’encontre des droits constitutionnels du
Québec (Rocher 2002, 3). Dès 1945, en conférence fédérale-provinciale, Duplessis tient
fermement à ce que les compétences des gouvernements – telle que définies par la constitution
lors de l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique de 1867 – soit observées strictement (ou
religieusement devrait-on dire). En aucun cas, Duplessis ne cède le moindre terrain, quitte à
perdre la face et même subir les conséquences financières de sa ligne idéologique en perdant une
partie de l’argent provenant de transferts compensatoires (Angers 1997, 237-238). Mais qu’en
est-il de la position des citoyens de la province? Les libéraux provinciaux, alors dans
l’opposition, militent fermement contre l’attitude de Duplessis dans ses négociations avec le
fédéral comme dans son refus de moderniser la province. En 1948, une élection provinciale a
lieu : Duplessis l’emporte haut la main dans les comtés francophones, démontrant la popularité
de sa position dans un vote quasi-plébiscitaire (Angers 1997, 238). Ce ne sera pas pour cette fois,
mais des changements profonds sont néanmoins à l’œuvre, malgré l’appui incontestable à
progressifs et ne sautent pas aux yeux : ils semblent se produire « en coulisse », sans impact
encore sur le discours nationaliste de l’époque. Pourtant, ça ne saurait tarder : ils contribueront à
la naissance d’un nouveau mouvement nationaliste, qui trouvera ses bases dans l’organisation
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traditionnelles par une nouvelle classe d’intellectuels plutôt néo-nationaliste qui, en coulisse,
La commission Tremblay
s’inscrit dans la lignée du rapport Rowell-Sirois et, plus récemment, du rapport Massey, ces
derniers menaçants la position autonomiste défendue par Duplessis en proposant, par exemple, le
Massey). La commission, dirigée par le juge Thomas Tremblay, est plus ou moins pour
Duplessis un prétexte pour gagner du temps et de la légitimité dans les négociations entreprises
avec le gouvernement fédéral. Le dépôt du rapport sera reporté à de multiples reprises, au point
ou il faudra attendre 1956, trois ans après le début des audiences, pour en obtenir les résultats
finaux. Et les résultats ne sont guère surprenants quand on considère les motivations entretenues
par Duplessis lors de la fondation même de cette commission : « […] it is a land-mark in the
literature of federalism: it describes and explains more fully than any other public document the
position and anxieties of Quebec in the federal state, and defends the concept of a strict
federalism as the essential basis for the success of Canada's national experiment. For the
Tremblay Commissioners the issue of Quebec in the federation and the issue of the French in the
nation are one and the same » (Brady 1959, 259). Bref, le rapport se range parfaitement dans la
ligne dure adoptée par le gouvernement de Duplessis et suggère une approche conservatrice,
l’élément le plus important à retenir du document lui-même, même si les rédacteurs ne sont pas
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les premiers ni les derniers à prendre ce point de vue, dans le cadre de cet essai, sera
l’attachement du rapport à la thèse des deux nations fondatrices comme base argumentaire (Brady
1959, 269-270). Cette idée d’un Canada duel, fondé par deux peuples (Anglais et Français), on la
retrouvera un peu plus tard chez les néo-nationalistes de la Révolution Tranquille et le choix
d’une position sur l’histoire par les rédacteurs du rapport Tremblay n’est pas sans lien. Mais la
gouvernementales), et c’est ce qui fait, a posteriori, son intérêt tout particulier. Le principe
visant à gagner du temps dans les négociations avec Ottawa en prolongeant artificiellement la
durée des audience (et le temps de rédaction), à la demande (explicite ou implicite) de Duplessis,
permet à la commission d’étendre son questionnement à une gamme bien plus large que prévu de
publique, etc.
1954 (Sarra-Bournet 2007, 47). Les premier intervenants, partiellement responsables de la tenue
demandent à Ottawa dans leurs mémoires de rendre aux provinces les responsabilités fiscales
assumées depuis la guerre tout en assurant la santé financière des provinces afin qu’elles puissent
formée particulièrement d’élites traditionnelles – insiste pour que le Québec ait les moyens
financiers de ses ambitions (qu’on notera pour l’instant assez maigres; mais les élites
traditionnelles formant la Chambre sentent peut-être le vent tourner) (Sarra-Bournet 2007, 46).
Outre ces groupes initiaux et leurs demandes plutôt frileuses, pour ne pas dire traditionalistes, la
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commission fait vite face à une série d’intervenants issus d’horizons extrêmement divers et de
demandes révélatrices d’un changement s’opérant dans la société : la Ligue d’Action Nationale
demande une nouvelle constitution où la souveraineté des provinces serait reconnue et la Société
Saint-Jean-Baptiste une place particulière pour les Canadiens français – un État-Nation – au sein
du Canada. Mais la question des relations entre gouvernements n’est pas l’unique préoccupation
d’assistance, etc. Et les groupes militants traditionnels (comme la SSJB) ne sont pas les seuls à
intervenir : de l’Union Catholique des Cultivateurs (future UPA) à différentes troupes de scouts
sans l’implication de l’Église, pour faire valoir ses intérêts. Seuls les syndicats se font discrets,
encore plutôt attachés à des positions conservatrices et proches du pouvoir. Notons tout de même
le mémoire déposé par la Fédération des unions industrielles du Québec (un syndicat) et rédigé
Sur le principe d’intervention de l’État dans les affaires privées, la Commission estime
accrue de l’État dans la vie économie et sociale, quoi que ce rôle ne devrait pas contrevenir à
l’initiative privée (Sarra-Bournet 2007, 51-52). Cette incursion sur le sentier du rôle de l’État est
en dehors des limites du mandat de la Commission, et aurait du, selon l’ordre des choses, être
rapidement élidée, pour ne jamais figurer dans le rapport. Pourtant, la Société Civile –
insistance sur le sujet en audiences, et la Commission n’a d’autre choix que de le noter, même
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brièvement, dans son imposant rapport. Idem pour l’éducation : un nombre impressionnant de
mémoires y faisant référence et ce malgré que la commission ne soit pas en principe supposée
aborder le sujet d’aucune manière sinon peut-être du point de vue d’un financement éventuel des
institutions par le fédéral (comme le proposait le rapport Massey). Les mémoires déposés sur le
sujet ayant souvent comme base une vision traditionnelle de l’éducation revendiquent pourtant
parfois la création d’institutions étatiques encadrant le domaine, jusqu’à soulever même l’idée
une occasion de contredire le rapport Massey et l’intervention du fédéral dans le financement des
provincial, le débat sur l’éducation comme un domaine de l’État et non plus de l’Église semble
être lancé (Sarra-Bournet 2007, 52-53). Qui plus est, le rapport final se permet de mentionner ce
que Duplessis ne veut pas entendre : ce qui a été proposé en audiences sur l’éducation y figure en
bon et du forme.
Le rapport final de la commission, on l’a dit déjà, demeure conservateur et fait appel à
l’idée d’une définition stricte des limites des champs de compétences des provinces : même si
Duplessis tablettera le rapport sitôt sorti (il contient après tout quelques idées naissantes sur
l’éducation et le rôle de l’État qui ne plaisent pas beaucoup à Duplessis), ce dernier n’offre rien
de bien exaltant ni de très saillants signes d’un changement social en cours, et considère encore
moins des voies d’avenir pour le Canada et la collaboration entre francophones et anglophones
dans la fédération (Smiley 1965, 80). En revanche, tout le processus menant à son écriture aura
été en soi révolutionnaire pour le Québec de l’époque : les idées des néo-nationalistes sont
exprimées publiquement par des groupes de pression organisés en dehors de l’égide de l’Église
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ou du corporatisme traditionnel (Sarra-Bournet 2007, 57). Encore une fois, comme c’est le cas
pour l’urbanisation et l’industrialisation, c’est un changement de coulisse qui s’opère pendant les
progressivement. Si les facteurs sont nombreux – ce changement sera aidé notamment par
« nous, québécois » (Lévesque 1976, 738) – ces changements de coulisses jouent un rôle majeur
dans la mutation du discours nationaliste et, de ce fait, la relation de Québec avec Ottawa.
Pendant ce temps, même si le Québec lutte pour freiner le développement des politiques sociales
Providence canadien se construit lentement mais sûrement dès la fin de la Deuxième Guerre
mondiale, certaines provinces emboîtant également le pas dans leurs juridictions (Béland et
Lecours 2006, 81). Si le Québec est en retard, ce ne sera cependant plus le cas très longtemps…
Tous les changements de coulisses dont nous avons parlés n’ayant besoin que d’un important
déclencheur pour se manifester et s’unir en réaction en chaine. Or, en 1959, la mort du Duplessis
viendra jouer ce rôle, marquant la fin d’une époque et un nouveau départ pour la société
québécoise, mais également une nouvelle donne pour les relations entretenues avec Ottawa.
La Révolution Tranquille
L’idée n’est pas ici de couvrir l’ensemble des changements opérants après la mort de
Duplessis – la tâche aurait peine à être accomplie dans un ouvrage comprenant plusieurs tomes –
mais de s’intéresser à la transition entre la période d’après Guerre et le début des années 1960 du
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Benedict Anderson, Imagined Communities (Londres : Verso, 1991), 6.
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point de vue des relations fédéral-provincial et des demandes du Québec, particulièrement en
Lesage, ancien ministre de Louis Saint-Laurent et réputé farouche adversaire des positions de
Duplessis sur la question de l’autonomie provinciale, arrive à la tête des Libéraux provinciaux.
centralisatrice adoptée à Ottawa. Son parti – composé d’une importante quantité d’intellectuels
issus de différentes organisations privées (comme Le Devoir par exemple; auparavant on aurait
plutôt vu dans ce rôle d’anciens journalistes de La Patrie [Meadwell 1993, 205]) et bien
dans la rhétorique nationaliste plus que tout parti avant lui (Angers 1997, 12). Le parti libéral
décide également de sortir des tiroirs le rapport de la Commission Tremblay et d’en faire,
d’une accroche qui laisse peu de doutes : « Maîtres chez nous » (Angers 1997, 12). Les Libéraux
réponds pas exactement aux mêmes impératifs que l’ancien nationalisme duplessiste en ce sens
qu’il vise avant tout une amélioration du positionnement des francophones dans la société
québécoise de même que la modernisation du Québec en général, peu important l’ethnicité des
bénéficiaires. Bref, pour arriver à leurs fins, contrairement à l’Union Nationale qui jusque là
tenait les rennes depuis la fin de la Guerre, les Libéraux n’hésiteront pas à utiliser l’appareil de
l’État provincial. Avant tout, ils rapatrieront progressivement les responsabilités déléguées
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jusque là à l’Église (Béland et Lecours 2006, 81) : santé, éducation, etc. Le nationalisme, dont la
redéfinition avait commencé après la Deuxième Guerre mondiale avec l’émergence des néo-
nationalistes, trouve ici son sens nouveau : fondé non plus sur la conservation de la pratique
des concepts tel que la démocratie, l’État, la Modernité (Rocher 2002, 3). Bref c’est un
nationalisme qui naît de l’État moderne et d’une certaine pratique des sciences sociales (Handler
1984, 56). Mais, qu’attendre du nationalisme sinon qu’il soit exclusif sur certains critères (même
s’il se défend bien, dans sa version « néo », d’être ethnique)… Ainsi, ce néonationalisme
québécois demeure bien lié au groupe qui a créé son prédécesseur : les canadiens francophones
de Lesage – et des autres gouvernement qui suivront pendant la Révolution Tranquille (d’aucun
diront tous les gouvernements qui suivront). Rappelons nous de l’affirmation de la thèse des
deux peuples fondateurs utilisé par la Commission Tremblay pour appuyer son argumentaire.
Cette conception d’un Canada duel est intégralement reprise par le mouvement néo-nationaliste
et dans l’exercice du pouvoir des libéraux des années 1960. Ainsi, le paradigme du Canada
biculturel est-il solidement intégré dans le discours nationaliste – même modéré – au Québec et
dans le processus même de création de politiques publiques dès les années 1960 (Lafontaine
1995, 1042-43). Difficile dès lors de déloger cette conception pour promouvoir – plus tard – le
Le rôle grandissant de l’État québécois sous la Révolution Tranquille pose problème dans
ses relations avec le fédéral. Si le Québec négocie la possibilité de se retirer d’une sélection de
programmes fédéraux en échange de recevoir les fonds pour mener à bien l’équivalent mais au
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niveau provincial (un système de « opt-out » en sommes [Béland et Lecours 2006, 81]), l’État
fédéral est en expansion malgré tout. Et on peut dire la même chose du provincial. Les risques
de collisions et de conflits constitutionnels sur qui a le droit de faire quoi augmentant d’autant
lorsque deux paliers de gouvernements tentent de couvrir une portion de plus en plus large de
services auprès de leurs populations. Bref le fédéralisme coopératif des années 1950 cède alors
responsabilités; c’est l’ère du fédéralisme compétitif (Cameron et Simeon 2002, 51). Le discours
néo-nationaliste n’aide en rien Ottawa à trouver des justifications à intervenir dans le champ des
compétences de la province : alors que l’idée était déjà délicate du temps de Duplessis, toute la
rhétorique du « Maître chez nous » teinte ce genre d’interventions d’un nouveau sens, beaucoup
plus grave. Ottawa n’est plus qu’un autre palier de gouvernement : c’est carrément l’agresseur.
Québec » (même « L’État du Québec » fait son apparition dans un discours de Jean Lesage)
(Fontaine 1995, 1041). Difficile pour Ottawa de faire valoir l’intérêt collectif du Canada quand
jouant la carte de la thèse des deux peuples fondateurs (Anglais et Français, maintenant
Québécois). D’ailleurs, il est à noter que le Québec se dira le mouvement politique de l’ensemble
des francophones du pays (Rocher 2002, 4), remettant peut-être en question, du même coup, la
Bref, c’est tout le principe de la fédération qui est fragilisé, et les choses ne semblent pas prêtes
de s’arranger.
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Avec la poursuite de la modernisation de l’État provincial, les relations entre citoyens et
autres choses), est remplacée par Québec. Ce qui était vrai pour l’Église est également vrai pour
l’État : avec le savoir et la santé, difficile de trouver plus intimes connexions avec les citoyens.
De la carte « soleil » au bulletin scolaire, le drapeau québécois trône toujours bien en vue. Et
pourtant, ce ne sera pas tout : viendront éventuellement s’y greffer d’autres services (les pensions
de vieillesses par exemple) pourtant assurées ailleurs par le fédéral de même que d’imposantes
institutions dont le caractère « national » et distinctif sont mis en valeur comme réussite locale (la
populaire. Bref, Ottawa n’a pas le beau rôle : outre les douanes peut-être, les contacts du
quotidien avec le palier fédéral sont exceptionnellement rares (même la GRC est remplacée par
une agence provinciale, même si ce n’est pas unique au Québec et relève déjà du fait historique à
l’époque). Et mal l’en pris, la bureaucratie du gouvernement fédéral est accusé en plus, dès Louis
Saint-Laurent, d’être formée d’une troupe où les francophones – et même le personnel bilingue –
sont fortement sous-représentés, y compris dans la province elle-même (Johnson 1995, 80). Bref,
alors que le provincial s’impose comme défenseur de la majorité francophone, comme État
nourricier et omniprésent, le fédéral, lui, est carrément hostile lorsqu’il n’est pas absent. Voilà
une source de légitimité supplémentaire – en apparence du moins – donnée à Québec dans ses
négociations avec le fédéral dès le début des années 1960. Et cette idée d’État puissant dans un
État faible attise les flammes du feu néo-nationaliste, féru de modernisation, de démocratie et
d’une place particulière pour le Québec dans la fédération, si ce n’est pas un État propre lui-
même. Et c’est sur ce dernier point que le débat se cadre dès lors. Mais, entre les néo-
nationaliste qu’on dira dès lors séparatistes et les autres, l’origine néo-nationaliste de ces
intellectuels demeure, et influencera les leaders que ces courants – devenus divergeant –
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produiront. Ainsi, la pensée néo-nationaliste est-elle intégrée non seulement (et évidemment) par
les supporteurs de l’indépendance de la province, mais également (et plus surprenant), par de
nombreux partisans du camp du « non ». Difficile dès lors pour Ottawa de trouver des alliés et
collaborateurs dans les gouvernements québécois qui suivront, qu’ils soient Libéraux, Unionistes
et, sans surprise, Péquistes. Notons même que cette conception néo-nationaliste est celle qui
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Conclusion
les changements s’opérants alors sont plutôt subtils, c’est toute la dynamique, l’ensemble de la
façon de penser la place des Québécois dans le Canada, qui se transforme. Également, même si à
première vue l’abandon de la position autonomiste de Duplessis semble être une bonne nouvelle
semble plutôt créer l’effet inverse : le fédéral est délégitimé dans la province, le nationalisme
connaît un jour nouveau sous une forme plus « acceptable » d’un point de vue éthique, certes,
mais d’autant plus revendicatrice et populaire, même chez ceux qu’on dira « fédéralistes ». Bref,
Tranquille, quiet revolution, parle plutôt de son silence que sa nature « tranquille ». L’expérience
de la fin des années 1940 et des années 1950, où tous les changements se sont effectués au vu et
au su de tous mais sans alerter personne qu’un profond changement allait se produire, nous
montre qu’une révolution majeure, un changement dans les relations fédéral-provincial ou une
nouvelle identité sont à portée de l’histoire et, pourraient se produire, là encore, en catimini.
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