Vous êtes sur la page 1sur 15

Chapitre I

Intégrale de Lebesgue

1 Ensembles mesurables. Mesures.


2. Ensembles mesurables. Mesures

Definition 1. Soit X un ensemble non vide et P(X) l’ensemble des parties de


X. On appelle tribu (ou σ-algèbre) sur X, un ensemble A ⊂ P(X) qui possède
les propriétés suivantes :
i) ∅ ∈ A ;
ii) Si A ∈ A, alors Ac ∈ A
(où Ac désigne le complémentaire de A dans X) ;
[
iii) Pour toute famille finie ou dénombrable (Ai )i∈I⊂N d’éléments de A, Ai ∈
i∈I
A.
Remark 2. 1. Il résulte de i) et ii) que X ∈ A ;
2. Il découle de ii) et iii) que toute intersection finie ou dénombrable d’élé-
ments de A est un élément de A ;
3. Si A, B ∈ A alors A\B = A ∩ B c ∈ A.
Example 3. P(X) est une tribu sur X
Definition 4. On appelle espace mesurable tout couple (X, A) où X est un
ensemble et A est une tribu sur X. Les éléments de A sont appelés ensembles
mesurables.

Remark 5. 1. L’intersection d’une famille quelconque de tribus sur X est une


tribu sur X.
2. Soit F une famille quelconque de sous-ensembles de X. L’intersection de
toutes les tribus contenant la famille F est donc une tribu contenant F,
notée σ (F). C’est en fait la plus petite tribu sur X contenant F. Il est
alors évident que toute tribu contenant F contient également σ (F).
Definition 6. La tribu σ(F) est appelée tribu engendrée par F.
Example 7. Prenons X = Rn muni de sa topologie usuelle et F l’ensemble des
ouverts de Rn . Il est clair que F n’est pas une tribu car le complémentaire
d’un ouvert n’est pas en général un ouvert. La tribu σ(F) engendrée par F est
appelée tribu de Borel ou tribu Borélienne sur Rn . Elle est notée B (Rn ) et ses
éléments sont appelés des Boréliens.
En théorie d’intégration, nous serons amenés à travailler dans l’ensemble
R = R ∪ {+∞} ∪ {−∞} muni des opérations usuelles avec les conventions
suivantes :

1
1) a ± ∞ = ±∞ pour tout a ∈ R ;
2) a . (±∞) = ±∞ pour tout a > 0 ;
3) 0 . (±∞) est égal à 0 (nous verrons que l’intégrale d’une fonction infinie
sur un ensemble de mesure nulle est nulle et l’intégrale d’une fonction nulle
sur un ensemble de mesure infinie est nulle) ;
4) Les opérations (+∞) + (−∞) et (−∞) + (+∞) ne sont pas définies.
Definition 8. Soit (X, A) un espace mesurable. Une mesure positive sur (X, A)
est une application µ : A −→ R+ = R+ ∪ {+∞} telle que
1. µ(∅) = 0 ;
2. Pour toute famille finie ou dénombrable (Ai )i∈I⊂N d’ensembles mesurables
de X, deux à deux disjoints, on a
!
[ X
µ Ai = µ(Ai ).
i∈I i∈I

Le triplet (X, A, µ) est alors appelé espace mesuré.


Example 9. Soient (X, A) un espace mesurable et a ∈ X. On considère l’appli-
cation
δa : A −→ R+
définie pour tout A ∈ A par

1 si a ∈ A
δa (A) =
0 si a ∈
/ A.

C’est une mesure sur (X, A) appelée mesure de Dirac au point a.


Proposition Soit (X, A, µ) un espace mesuré.
1) Soient A, B ∈ A. Si A ⊂ B, alors

µ(A) ≤ µ(B).

2) Soient A, B ∈ A. Si A ⊂ B et µ(A) < +∞, alors

µ(B\A) = µ(B) − µ(A).

3) Si (An )n≥1 est une suite quelconque d’éléments de A, alors

+∞
! +∞
[ X
µ An ≤ µ (An ) .
n=1 n=1

4) Si (An )n≥1 est une suite croissante d’éléments de A, alors

+∞
!
[
µ An = lim µ (An ) .
n→+∞
n=1

2
5) Si (Bn )n≥1 est une suite décroissante d’éléments de A telle que µ (B1 ) < +∞
alors !
+∞
\
µ Bn = lim µ (Bn ) .
n→+∞
n=1

Definition 10. Un ensemble N ∈ A est dit négligeable par rapport à µ (ou


µ-négligeable) si µ(N ) = 0.
Proposition 11. Soient (X, A, µ) un espace mesuré et (Sn )n≥1 une suite d’en-
+∞
[
sembles négligeables. Alors S = Sn est négligeable.
n=1

Definition 12. On dira qu’une propriété P est vraie µ-presque partout (µ−pp)
si l’ensemble sur lequel P est fausse est contenu dans un ensemble µ-négligeable.
Definition 13. Soit (X, A, µ) un espace mesuré. La mesure µ est dite complète
si tout sous-ensemble d’un ensemble négligeable est mesurable.
Theorem 14. Il existe une tribu L sur Rn et une mesure λ sur (Rn , L) uniques
telles que :
n
! n
Y Y
• λ ]ai , bi [ = (bi − ai ) .
i=1 i=1
• L ⊃ B (Rn ) avec inclusion stricte.
• λ complète.
L est appelée la tribu de Lebesgue sur Rn et λ est dite mesure de Lebesgue sur
Rn .
Remarque Soit l’espace mesuré (Rn , L, λ). 1) Tout point de Rn est négli-
geable. 2) Toute partie finie ou dénombrable de Rn est négligeable. Par exemple,
dans (R, L, λ), l’ensemble Q est négligeable (bien qu’il soit dense dans R).

2 Fonctions mesurables
3. Fonctions mesurables Soit (X, A) un espace mesurable.
Definition 15. Une fonction f : X −→ R est dite A-mesurable si pour tout
α∈R
f −1 (]α, +∞[) = {x ∈ X : f (x) > α} ∈ A.
Dans la suite, nous utiliserons la notation [f > α] pour désigner l’ensemble

{x ∈ X : f (x) > α} .

De même, nous noterons


• [f ≥ α] = {x ∈ X : f (x) ≥ α} ;

3
• [f ≤ α] = {x ∈ X : f (x) ≤ α} ;
• [f < α] = {x ∈ X : f (x) < α} ;
• [f = α] = {x ∈ X : f (x) = α}.
Le lemme suivant donne quatre définitions équivalentes de la mesurabilité.

Lemma 16. Soit f : X −→ R. Les propositions suivantes sont équivalentes


(a) [f > α] ∈ A.
(b) [f ≤ α] ∈ A.
(c) [f ≥ α] ∈ A.
(d) [f < α] ∈ A.

Proposition 17. Soit A ⊂ X. Alors la fonction caractéristique de A est mesu-


rable si et seulement si l’ensemble A est mesurable.
Remark 18. La fonction caractéristique possède les propriétés suivantes :
1. χ∅ = 0 ;
2. χX = 1 ;
3. χA∩B = χA .χB ;
4. χA∪B = χA + χB − χA∩B ;
5. χA = 1 − χA .
c

Proposition 19. Toute application continue sur Rn muni de sa tribu de Le-


besgue est mesurable.
Remark 20. Il existe des fonctions mesurables qui ne sont pas continues. C’est
le cas par exemple de la fonction caractéristique de l’intervalle ]0, 1[ avec X = R
et A = L.

Proposition 21. Soient (X, A) un espace mesurable et f, g deux applications


A-mesurables définies sur X et à valeurs dans R. Alors les fonctions suivantes
sont A-mesurables
1. f + g, lorsque cette somme existe ;
2. max (f, g) et min (f, g) ;
3. Pour tout β ∈ R, βf ;
4. | f |, f 2 et f × g.
Démonstration : En exercice
Proposition 22. Soient (X, A) un espace mesurable et (fn )n≥0 une suite de
fonctions A-mesurables définies sur X et à valeurs dans R. Alors f = sup fn ,
n
g = inf fn , f ∗ = lim inf fn et g ∗ = lim sup fn sont A-mesurables.
n n n

Démonstration : En exercice

4
Corollary 23. Soient (X, A) un espace mesurable et (fn )n≥0 une suite de fonc-
tions mesurables définies sur X et à valeurs dans R. Si la suite (fn )n converge
simplement vers f sur X alors f est une fonction mesurable.
Démonstration : En exercice
Definition 24. Soit (X, A) un espace mesurable. Une fonction e définie sur
X est dite étagée (ou simple) s’il existe un nombre fini d’ensembles mesurables
A1 , A2 , . . . , An et n réels α1 , α2 , . . . , αn tels que
n
αi χAi .
X
e= (1)
i=1

Theorem 25. Soit f : (X, A) −→ R+ mesurable. Il existe une suite de fonctions


étagées positives (en )n≥1 telle que
i) 0 ≤ e1 ≤ e2 ≤ . . . ≤ f ,
ii) Pour tout x ∈ X, la suite (en (x))n converge vers f (x).
Autrement dit, toute fonction positive mesurable est limite simple d’une suite
croissante de fonctions étagées positives.
4. Intégrale de fonctions positives On considère (X, A, µ) un espace
mesuré.
n
αi χAi une fonction étagée positive sur X. On
X
Definition 26. Soit e =
i=1
appelle intégrale de e sur X par rapport à la mesure µ, le nombre positif (éven-
Z n
X
tuellement +∞) noté e dµ égal à αi µ(Ai ).
X i=1
Z
Definition 27. On dit que e est µ-intégrable sur X par rapport à µ si e dµ
X
est finie.
Definition 28. Si E est un ensemble mesurable, on définit l’intégrale de e sur
E par Z Z
edµ = eχE dµ.
E X
Z
En particulier si E ∈ A, alors dµ = µ(E).
E
Example 29. On se place dans (R, L, λ) et on considère la fonction e définie par

1 si x ∈ Q
e(x) =
0 si x ∈ / Q.
La fonction e est positive étagée car e = 1χQ + 0χQc . Si E = [0, 1], alors
Z
e dλ = λ ([0, 1] ∩ Q) = 0.
[0,1]

La fonction e est donc λ-intégrable au sens de Lebesgue sur [0, 1].

5
L’intégrale d’une fonction étagée positive possède les propriétés suivantes :
Proposition 30. Soient e1 et e2 deux fonctions étagées positives et α un réel
positif. On a
Z Z Z
1. (e1 + e2 ) dµ = e1 dµ + e2 dµ ;
X X X
Z Z
2. αe1 dµ = α e1 dµ ;
X X
Z Z
3. Si 0 ≤ e1 ≤ e2 , alors e1 dµ ≤ e2 dµ.
X X

Definition 31. Soit f : X −→ R+ une fonction mesurable positive. L’intégrale


de f sur X par rapport à µ est définie par
Z Z 
f dµ = sup e dµ ; 0 ≤ e ≤ f et e étagée .
X X

(La borne supérieure est prise sur toutes les fonctions étagées positives qui mi-
norent la fonction f )

Remark 32. Toute fonction f : X −→ R positive, mesurable, possède une inté-


grale au sens de Lebesgue. Cependant, cette intégrale est soit positive finie, soit
égale à +∞.
Definition 33. Soit f :ZX −→ R+ une fonction mesurable positive. La fonction
f est dite intégrable si f dµ est finie.
X

Si E ∈ A, on pose Z Z
f dµ = f χE dµ.
E X

Proposition 34. Soient f, g : X −→ R+ deux fonctions mesurables positives


et E, F ∈ A.
Z Z
1. Si f ≤ g alors f dµ ≤ g dµ ;
E E
Z Z Z
2. Si E ∩ F = ∅ alors f dµ = f dµ + f dµ ;
E∪F E F
Z Z
3. Si E ⊂ F alors f dµ ≤ f dµ.
E F

Théorème[Théorème de convergence monotone] Soit (fn )n une suite crois-


sante de fonctions mesurables positives qui converge simplement vers une fonc-
tion f . Alors Z Z
lim fn dµ = f dµ.
n→+∞ X X

6
Démonstration :Rappelons que si (An )n≥0 est une suite croissante d’ensembles
mesurables alors  
[
µ An  = lim µ (An ) .
n→+∞
n≥0

Montrons le lemme suivant :


Lemma 35. Soit e une fonction étagée
[ positive et (Bn )n une suite croissante
d’ensembles mesurables avec X = Bn . Alors on a
n
Z Z
lim e dµ = e dµ.
n→+∞ Bn X

m Z m
αi χAi , donc
X X
Démonstration :On a e = e dµ = αi µ (Ai ∩ Bn ).
i=1 Bn i=1
[
La suite (Ai ∩ Bn )n est croissante et Ai = (Ai ∩ Bn ) d’où
n

µ (Ai ) = lim µ (Ai ∩ Bn ) .


n→+∞

Par conséquent
Z m
X Z
lim edµ = αi µ (Ai ) = edµ.
n→+∞ Bn X
i=1

Démontrons à présent le théorème : La fonction f est mesurable comme limite


simple d’une suite de fonctions mesurables. D’une part, on a
Z Z
fn ≤ f =⇒ fn dµ ≤ f dµ
X Z X Z (2)
=⇒ lim fn dµ ≤ f dµ.
n→+∞ X X

D’autre part, soit e une fonction étagée positive telle que 0 ≤ e ≤ f et soit
ε ∈]0, 1[. On pose

Bn = {x ∈ X/ fn (x) ≥ (1 − ε)e(x)} .

L’ensemble
[ Bn est mesurable et la suite (Bn )n est croissante. De plus on a
X= Bn . En effet pour x ∈ X, la suite (fn (x))n converge vers f (x) :
n
• Si f (x) = 0 alors e(x) = 0 et donc x ∈ Bn ;
• Si 0 < f (x) < +∞ alors il existe n0 ∈ N tel que

fn0 (x) ≥ (1 − ε)f (x) ≥ (1 − ε)e(x),

donc x ∈ Bn0 ;

7
• Si f (x) = +∞, alors il existe n0 ∈ N tel que

fn0 (x) ≥ (1 − ε)e(x),

d’où x ∈ Bn0 .
On constate que fn ≥ (1 − ε)e χBn , donc
Z Z
fn dµ ≥ (1 − ε) edµ.
X Bn

Il vient Z Z
lim fn dµ ≥ (1 − ε) lim edµ
n→+∞ X n→+∞ Bn
Z
≥ (1 − ε) edµ.
X
Ceci étant vrai pour tout ε ∈]0, 1[, on en déduit que :
Z Z
lim fn dµ ≥ e dµ,
n→+∞ X X

et par suite Z Z
lim fn dµ ≥ f dµ.
n→+∞ X X

Proposition 36. Soient f, g :−→ R+ deux fonctions positives mesurables et


α ∈ R+ .
Z Z Z
1. (f + g) dµ = f dµ + g dµ ;
ZX Z X X

2. αf dµ = α f dµ.
X X

Lemma 37 (Lemme de Fatou). Soit (fn )n une suite de fonctions mesurables


positives. On a Z Z
lim inf fn dµ ≤ lim inf fn dµ.
X n n X

Proposition 38. Soit f une fonction mesurable positive. On a


Z
f = 0 µ − pp ⇐⇒ f dµ = 0.
X
 
1
Démonstration : [⇐=)] Soit En = x ∈ X/ f (x) ≥ . L’ensemble En est
n
1
mesurable et on a f ≥ χ . Donc
n En
Z
1
f dµ ≥ µ(En ),
X n

8
ce qui prouve que µ(En ) = 0. On a
+∞
[
{x ∈ X/ f (x) > 0} = En .
n=1

Cet ensemble mesurable est donc négligeable comme réunion dénombrable d’en-
sembles négligeables.
=⇒ Posons E = {x ∈ X/ f (x) > 0} ; comme E ∈ A,on a µ(E) = 0. Consi-
dérons la suite de fonctions de terme général fn = nχE . Nous avons
Z
fn dµ = nµ(E) = 0.
X

Notons que f ≤ lim inf fn = lim fn . En utilisant le lemme de Fatou, on obtient


n n
Z
0 ≤ f dµ
X
Z
≤ lim inf fn dµ
X n

Z
≤ lim inf fn dµ = 0.
n X

Par conséquent Z
f dµ = 0.
X

Corollary 39. Soit f une fonction mesurable positive et N un ensemble µ-


négligeable. Alors, on a Z
f dµ = 0.
N

Proposition 40. Soient f, g : X −→ R+ mesurables. On a


Z Z
f = g µ − pp =⇒ f dµ = gdµ.
X X

5. Fonctions intégrables Soient (X, A, µ) un espace mesuré, f : X −→ R,


f + et f − les fonctions positives définies par :

f + (x) = sup{f (x), 0} et f − (x) = sup{−f (x), 0}.

f + (resp. f − ) est dite partie positive (resp. négative) de f . On vérifie que


1. f = f + − f − ,
2. |f | = f + + f − ,

9
Remark 41. L’application f est mesurable si et seulement si f + et f − sont
mesurables.
Definition 42. Soit f : X −→ R mesurable. On dit que f est intégrable sur
X par rapport à µ, si f + et f − le sont. L’intégrale de f est alors définie par
Z Z Z
f dµ = f + dµ − f − dµ.
X X X

Si E ∈ A et f intégrable, on définit :
Z Z Z Z
f dµ = f χE dµ = f + dµ − f − dµ.
E X E E

Proposition 43. Soit f : X −→ R mesurable ;

f est intégrable ⇐⇒ |f | est intégrable.

Démonstration : (=⇒) Les applications f + et f − sont intégrables, donc


Z Z
f + + f − dµ

|f |dµ =
X X
Z Z
= +
f dµ + f − dµ < +∞.
X X
Z
(⇐=) On a f mesurable et |f |dµ < +∞. Les fonctions positives f + et f −
X Z
sont mesurables et vérifient f + ≤ |f | et f − ≤ |f |. On en déduit que f + dµ <
Z X

+∞ et f dµ < +∞, donc f est intégrable. Cette proposition est fausse
X
pour l’intégrale de Riemann. En effet la fonction f définie par

−1 si x ∈ Q
f (x) =
+1 si x ∈ /Q

n’est pas Riemann-intégrable sur X = [0, 1]. Cependant |f | = 1 est Riemann-


intégrable sur X = [0, 1].
Proposition 44. Soient f, g : X −→ R intégrables. Alors on a
Z Z
f = g p.p. =⇒ f dµ = g dµ.
X X

Proposition 45. Soient f : X −→ R intégrable et N un ensemble négligeable.


Alors Z
f dµ = 0.
N

Proposition 46. Toute fonction f : X −→ R intégrable est finie pp

10
\
Démonstration :Posons E = {x ∈ X : |f (x)| = +∞}. Nous avons E = En
n∈N∗
où
En = {x ∈ X : |f (x)| ≥ n} .
L’ensemble En est mesurable car |f | l’est. On en déduit que E est mesurable.On
a n χEn ≤ |f |, donc
Z
1
µ(E) ≤ µ (En ) ≤ |f |dµ, ∀n ≥ 1.
n X
Z
Comme |f |dµ < +∞ on en déduit que
X

µ(E) = 0.

Ainsi, lorsqu’on fait du calcul intégral, on peut se limiter aux fonctions à valeurs
dans R ou dans C. Dans toute la suite, nous désignerons par L1R (X, A, µ), L1 (X)
ou tout simplement L1 l’ensemble des fonctions f : X −→ R intégrables sur X
par rapport à la mesure µ. Notons que pour toute fonction f ∈ L1
Z Z

f dµ ≤ |f |dµ.

X X

Proposition 47. Soient f, g ∈ L1 et α ∈ R. On a


Z Z
1
1. αf ∈ L et αf dµ = α f dµ.
X X
Z Z Z
1
2. f + g ∈ L et (f + g)dµ = f dµ + gdµ.
X X X

Theorem 48 (Théorème de convergence dominée). Soient (fn )n≥0 une suite


de fonctions mesurables définies de X dans R. On suppose que
i) La suite (fn ) converge simplement vers f ;
ii) Il existe g ∈ L1 telle que pour tout n ∈ N, on a

|fn | ≤ g. (3)

Alors
• Pour tout n, fn ∈ L1 et f ∈ L1 ;
Z
• lim |fn − f | dµ = 0 ;
n→+∞ X

Démonstration : • Il est clair que f est mesurable, fn ∈ L1 et |f | ≤ g; et par


suite f ∈ L1 ;
• On a |fn − f | ≤ 2g. Définissons la suite de fonctions mesurables positives

ϕn = 2g − |fn − f | .

11
On a 2g = lim ϕn = lim inf ϕn . L’application du lemme ?? conduit à
n n
Z Z
2gdµ ≤ lim inf ϕn dµ
X Z n X  Z 
≤ 2gdµ + lim inf − |fn − f | dµ .
X n X

On en déduit que
Z Z
lim sup |fn − f | dµ ≤ 0 ou encore lim |fn − f | dµ = 0.
n X n X

6. Calcul intégral Soit (X, A, µ) un espace mesuré. 6.1. Intégrales dé-


pendant d’un paramètre
Soit I un intervalle de R borné ou non. On considère
f : I ×X −→ R
(t, x) 7−→ f (t, x).

Theorem 49. On suppose que


i) l’application x 7−→ f (t, x) est mesurable pour tout t ∈ I,
ii) pour presque tout x ∈ X, l’application t 7−→ f (t, x) est continue en t0 ∈ I,
iii) il existe g ∈ L1 telle que pour tout t ∈ I : |f (t, x)| ≤ g(x) pp
Alors, pour tout t ∈ Z I, la fonction x 7−→ f (t, x) est intégrable et la fonction F
définie par F (t) = f (t, x)dµ(x) est continue en t0 .
X

Démonstration :L’inégalité |f (t, x)| ≤ g(x) p.p. entraı̂ne que la fonction

x 7−→ f (t, x) ∈ L1 .

Soit (tn )n une suite d’éléments de I qui converge vers t0 . Posons hn (x) =
f (tn , x) et h(x) = f (t0 , x). Les fonctions hn et h sont mesurables, |hn | ≤ g
p.p. et (hn )n converge vers h presque partout. L’application du théorème de
convergence dominée implique que hn et h sont intégrables et
R R
limn F (tn ) = Rlimn X f (tn , x)dµ(x) = limn X hn (x)dµ(x)
= X h(x)dµ(x) = F (t0 )

Theorem 50. Soit I un intervalle ouvert de R. On suppose que


i) l’application x 7−→ f (t, x) est intégrable pour tout t ∈ I,
∂f
ii) pour presque tout x ∈ X, (t, x) existe,
∂t

12
iii) il existe g ∈ L1 telle que pour tout t ∈ I on a

∂f
(t, x) ≤ g(x) pp
∂t

∂f
Alors, pour tout t ∈ I, la fonction x 7−→ (t, x) est intégrable, la fonction F
Z ∂t
définie par F (t) = f (t, x)dµ(x) est dérivable et on a
X
Z
∂f
F 0 (t) = (t, x)dµ(x).
X ∂t
6.2 Intégrale de Lebesgue et de Riemann Rappelons que la fonction f =
χQ∩[0,1] est Lebesgue-intégrable mais elle n’est pas Riemann-intégrable.
Theorem 51. Soient [a, b] un intervalle compact de R et f une fonction me-
surable définie de [a, b] à valeurs dans R. Si f est Riemann-intégrable sur [a, b]
alors f est Lebesgue-intégrable sur [a, b] pour la tribu et la mesure de Lebesgue ;
de plus, on a :
Z b Z
f (x)dx = f (x)dλ(x). (4)
a [a,b]

Theorem 52. Soient I un intervalle de R et f une fonction localement Riemann-


intégrable sur I. Alors f est Lebesgue-intégrable
Z sur I si et seulement si l’inté-
grale de Riemann généralisée f (x)dx est absolument convergente et on a
I
Z β Z
f (x)dx = f (x)dλ(x) (5)
α I

où α, β ∈ R sont les extrémités de l’intervalle I.


6.3 Théorème de Fubini Posons

dλ(x) = dx = dx1 dx2 · · · dxn , pour x = (x1 , · · · , xn ) ∈ IRn

Nous énoncerons ce théorème pour des fonctions de deux variables réelles.


Theorem 53. Soient f : R2 −→ R une fonction mesurable et E×F un ensemble
mesurable de R2 .
(i) Si f est positive sur E × F alors on a
Z Z Z
f (x, y)dxdy = dx f (x, y)dy
E×F E F
Z Z (6)
= dy f (x, y)dx,
F E

(= éventuellement à +∞) ;

13
Z Z Z Z
(ii) f ∈ L1 (E × F ) ⇐⇒ dx |f (x, y)|dy ou dy |f (x, y)|dx est finie ;
E F F E
Remark 54. L’aspect pratique à retenir est que l’on peut calculer une intégrale
double en choisissant l’ordre d’intégrabilité que l’on veut, pourvu que l’une au
moins des intégrales itérées en module existe. L’existence des deux intégrales
Z Z Z Z
dx f (x, y)dy et dy f (x, y)dx
E F F E

n’implique pas l’intégrabilité de f sur E × F .


6.4. Changement de variables Soient X et Y deux domaines de Rn et
ϕ : Y −→ X une fonction bijective telle que ϕ et ϕ−1 soient de classe C 1 . On
note Jϕ (y) la matrice jacobienne de ϕ au point y
 
∂ϕi
Jϕ (y) = (y)
∂yj 1≤i,j≤n

où pour i ∈ {1, 2, . . . , n}, ϕi est la iième application coordonnée de ϕ.


Theorem 55. Une fonction f est intégrable sur X si et seulement si f (ϕ(y)) |det Jϕ (y)|
est intégrable sur Y et on a
Z Z
f (x)dx = f (ϕ(y)) |det Jϕ (y)| dy.
X Y

Exercice R +∞ 2
Calculer de 0 e−x dx 7. Espaces Lp Soit (X, A, µ) un espace mesuré.
1 1
L’ensemble L = LR (X, A, µ) des applications Lebesgue intégrables sur X est
un espace vectoriel sur R Pour f ∈ L1 , on pose
Z
kf k1 = |f |dµ.
X

L’application f 7−→ kf k1 n’est pas une norme car kf k1 = 0 n’implique pas que
f est nulle.
On introduit alors dans L1 la relation R
f Rg ⇐⇒ f = g pp.
On vérifie que R est une relation d’équivalence et on pose
L1 = L1 (X, A, µ) = L1 /R.
C’est l’espace vectoriel quotient, des classes d’équivalence des fonctions de L1
modulo l’égalité pp
Proposition 56. L’application
k.k1 : L1 7−→ R+ Z
f −→ kf k1 = |f |dµ
X

est bien définie et c’est une norme sur L1 .

14
Nous avons les résultats suivants :
Proposition 57. L’application

k.kp : Lp −→ R+
Z  p1
p
f 7−→ kf kp = |f | dµ
X

est bien définie et c’est une norme sur Lp .


Proposition 58. (Inégalité de Hölder) Soient p, q ∈]1, +∞[. Si f ∈ Lp et
1 1
g ∈ Lq avec + = 1, alors
p q

f g ∈ L1 et kf gk1 ≤ kf kp kgkq .

Theorem 59. Pour 1 ≤ p < +∞, Lp est un espace de Banach (espace vectoriel
normé complet).
Remark 60. Si X = R et µ est la mesure de Lebesgue, on définit l’ensemble des
(classes de) fonctions localement intégrables noté L1loc par
 Z 
L1loc = f mesurable/ ∀K compact, |f |dµ < +∞ .
K

Muni de l’addition et de la multiplication par un scalaire, L1loc est un espace


vectoriel.

15

Vous aimerez peut-être aussi