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Courrier à M.

Stéphane LE FOLL Le Mans, le 30 avril 2020


Maire du Mans
Hôtel de Ville
Place Saint Pierre
72000 LE MANS

Monsieur le Maire,

Nous sommes, signataires de ce courrier, quelques citoyennes et citoyens du Mans ou de ses


proches environs, clients habituels du marché des Jacobins.
Dimanche dernier, peu avant huit heures, nous avons été témoins de l’altercation qui a eu
lieu à une des entrées du marché entre un producteur-vendeur de champignons, M. Selim
SALEM de Turquant, près de Saumur, et les agents municipaux (placiers et ASVP).

La presse et les radios locales ont relaté cet événement et vous en avez probablement eu
quelques échos. Par ailleurs, certains d’entre nous vous ont, dès dimanche ou lundi matin,
adressé un message sur ce sujet via le formulaire de contact du site internet de la ville. À
notre connaissance, ces messages n’ont pas reçu jusqu’à présent de réponse.
La période très particulière que nous traversons depuis quelques semaines apporte
certainement à la fonction de maire une surcharge de travail et de préoccupations et nous
savons que vous ne ménagez pas votre énergie et la compétence de vos services pour
organiser la vie de la cité dans ce contexte très difficile.
C’est pourquoi il nous a semblé nécessaire de vous adresser ce courrier pour vous alerter sur
le caractère grave de ce qui s’est produit, caractère qui ne vous est pas forcément apparu à
travers la relation qui en a été faite.

Voilà ce que nous avons vu :


 M. Selim SALEM est arrivé avec son véhicule vers 7h45 au marché des Jacobins ; les
barrières d’accès pour les véhicules étaient fermées puisque l’installation des étals
est prévue de 5h30 à 7h30
 M. Selim SALEM s’est adressé aux agents municipaux pour qu’une barrière soit
ouverte ; cela lui a été refusé d’une part du fait de son retard et d’autre part par ce
que son activité professionnelle n’est pas domiciliée dans le département de la
Sarthe ou dans une commune limitrophe.
 Il s’en est suivi une discussion animée entre M. SALEM et les agents municipaux ; le
jeune producteur ne comprenait pas qu’on lui interdise l’accès à l’espace de vente.
Nous avons entendu des éclats de voix mais aucune invective ni injure de sa part et
aucun geste violent. Nous l’avons vu lever les bras au ciel pour exprimer son désarroi
mais il n’a adressé aucun geste, aucune parole d’agressivité en direction des agents.
 Comprenant qu’il ne pourrait entrer avec son véhicule pour installer sa marchandise,
il a approché ce véhicule de l’entrée, stationné à côté de la voie du tram avec
l’intention de décharger son matériel et de partir.
Il avait l’intention, nous a-t-il dit depuis, de déposer ses paniers de champignons dans
l’espace de vente, afin que les clients puissent venir se servir seuls directement ; il
serait alors reparti chez lui avec sa camionnette puisque l’accès lui était refusé.
 Certains d’entre nous, ainsi qu’un autre commerçant qui était à proximité, sont
intervenus, en particulier auprès des placiers pour inciter à la médiation ; à 8h00, il
n’y avait pas encore foule sur le marché, l’installation du banc de M. SALEM est
relativement simple et réduite (deux tréteaux, une planche et quelques paniers) et
ne nécessite pas de branchement électrique ; par ailleurs il restait encore pas mal de
place disponible dans l’espace d’achalandage.
 Selim SALEM commence donc à décharger son matériel et ses paniers pleins. Les
ASVP sont alors intervenus et l’un d’eux a refermé brutalement la porte du véhicule
contre M. SALEM, ce qui a eu pour effet de renverser au sol le contenu des paniers ;
ce n’est donc pas M. SALEM qui a renversé volontairement ses paniers de
champignons au sol, comme cela a pu être écrit dans certains comptes rendus.
 Les ASVP ont ensuite plaqué M. SALEM au sol et lui ont passé les menottes ; il a été
conduit au commissariat de police.

Ce qui s’est passé après :


M. SALEM a été placé en garde à vue ; après dix heures de garde à vue, dont les huit
premières avec interdiction de communiquer avec ses proches ou avec qui que ce soit.
Il est ressorti du commissariat à 19h30 muni d’une convocation au tribunal du Mans le 26
juin prochain pour :
o « avoir opposé, seul et sans arme, une résistance violente à M. …… et …….,
personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission d
service public, agissant dans l’exercice de leurs fonctions …. »
o « avoir troublé ou entravé …. la circulation des trains en ayant volontairement
mis à l’arrêt son véhicule sur les voies de tramway ».

Nous tenons ici à exprimer notre stupéfaction face à la gestion de cette situation et notre
désapprobation sur l’issue qui lui a été donnée. Nous trouvons cela injuste.

M. Selim SALEM est un homme gentil et avenant, très apprécié de sa clientèle et reconnu
comme tel par ses collègues du marché.

Concernant son retard à l’arrivée, il nous a dit que la semaine précédente il était arrivé
également avec un peu de retard et qu’un ASVP, avec l’accord du placier, lui avait
aimablement ouvert une barrière pour lui permettre d’aller installer son matériel.

La presse a fait allusion à un arrêté préfectoral du 17 avril, juste avant la réouverture du


marché le dimanche 19 avril, qui n’autorise l’installation sur les marchés, pendant cette
période, que des producteurs-vendeurs du département de la Sarthe ou des communes
limitrophes.
Cet arrêté préfectoral a-t-il été porté à la connaissance des commerçants qui viennent
habituellement ? Aucune remarque à ce sujet n’a été faite à M. Salem lorsqu’il est venu
travailler le dimanche précédent, 19 avril.
Par ailleurs, a-t-on vérifié l’attachement territorial de tous les commerçants présents ?
Nous ne voulons pas remettre en cause la présence des producteurs des régions
avoisinantes qui nous permettent de profiter de produits frais et de qualité, des fruits de
mer, des fraises, ... Cependant, pourquoi interdire les champignons cultivés près de Saumur
et autoriser les huîtres d’Oléron ou les fraises de Bretagne, proposées sur des étals de
producteurs ces deux derniers dimanches aux Jacobins ?
En ce qui concerne le stationnement du véhicule de M. SALEM, il n’est pas exact
d’écrire :« Il aurait reculé sa camionnette pour "s'installer sur les voies du tramway" ».
Des photos prises par un témoin montrent le véhicule stationné à proximité, le long de la
voie de tramway.
Comme nous l’avons dit précédemment, M. SALEM voulait seulement décharger son
véhicule et le dégager rapidement. À 8h00, le dimanche matin, la fréquence de passage du
tramway est de 1 toutes les 20mn.
L’emplacement du véhicule est effectivement dans l’emprise de la voie du tram, de même
que le plaquage au sol qui a été effectué au milieu des voies.

Nous sommes attristés de ce qui s’est passé et de la conclusion judiciaire de cet événement.
L’image d’un homme plaqué au sol par 3 agents et menotté est choquante et difficilement
supportable, surtout lorsqu’on connait personnellement l’individu ainsi traité.
De même que nous n’avons vu aucune violence physique ni entendu aucune agression
verbale de la part de M.SALEM, nous n’avons perçu aucune tentative de médiation de la
part des agents ; il leur a été suggéré d’appeler un responsable avant d’en venir à la manière
forte ; cela n’a pas été mis en œuvre.

Nous sommes conscients que la période actuelle amène à vos agents un surcroit de travail et
de tension ; néanmoins, il nous semble que l’attitude et la réaction des agents ont été
disproportionnées aux faits observés et qu’une concertation et une référence à une autorité
supérieure aurait permis une autre issue.

M. SALEM, que plusieurs d’entre nous ont contacté depuis est désemparé ; il ne comprend
pas pourquoi il a subi une telle violence.
Il s’inquiète de savoir s’il pourra revenir travailler sur le marché des Jacobins. Il a cherché à
savoir dès lundi s’il pouvait revenir dimanche prochain.
Il a contacté la mairie ; il lui a été dit qu’il devait s’adresser au responsable des placiers pour
avoir la réponse sur son retour dimanche prochain, responsable qui était présent dimanche
matin et n’est pas intervenu positivement dans la négociation.

Par ce courrier, nous sollicitons votre attention et vous demandons :


 d’autoriser officiellement M. SALEM à reprendre son activité dimanche prochain sur
le marché des Jacobins, dans de bonnes conditions (voir l’additif en fin du courrier)
 d’intervenir auprès des autorités judiciaires pour compléter et amender l’exposé des
faits.
 de faire un geste ou d’avoir une parole à l’égard de M. SALEM pour réparer
l’humiliation qu’il a subie et compenser sa perte de recettes.

Enfin, nous terminons en évoquant une question que certains pourraient se poser : pourquoi
un producteur de champignons fait-il tous les dimanches près de 200 kms (aller-retour) pour
vendre des champignons sur le marché du Mans ?
Nous lui avons posé cette question et voilà sa réponse, plutôt flatteuse pour les habitants de
notre ville :
« J’aime ce marché, les clients sont sympas et simples, pas de chichis, pas d’histoires ; on se
connait ; on parle de beaucoup de choses, de livres, de l’Égypte, … des clients passent me
voir à Turquant, d’autres m’amènent des petits cadeaux, on me réconforte si je n’ai pas le
moral …….. ».
Dans l’attente de votre réponse, nous vous adressons nos salutations respectueuses et
citoyennes.

Témoins directs signataires de la présente :

Patrice CÔME – Le Mans


Annie GOURIOU – Sargé-les-Le Mans
Frédéric HOVASSE – Le Mans
Didier KERVELLA – Parence – Yvré L’Évêque
Thierry LAMBERT – Le Mans

Copie du courrier adressée à Mme DEWAILLY, Procureure de la République – Tribunal du


Mans
Copie du courrier adressé à M. le Préfet de la Sarthe – Place Aristide Briand – LE MANS

Courrier transmis à la L D H ainsi qu’au media locaux ayant couvert l’événement.

Nous avons appris mercredi soir de M. Selim SALEM qu’il pouvait revenir sur le marché
dimanche prochain et qu’il y serait accueilli par M. PENAUD, directeur du service
« Prévention, Sécurité » à la ville du Mans. Nous prenons acte de ce geste.
Nous vous adressons cependant ce courrier pour l’éclairage qu’il peut apporter sur le
déroulement des faits et le ressenti qu’il a généré.
Nous avons appris jeudi après-midi que M. SALEM ne sera pas accueilli par M. PENAUD,
directeur du service « Prévention, Sécurité » ; mais à 6h45 par M. David HERVÉ, responsable
des agents placiers, donc accueilli par la personne qui l’a laissé dimanche matin entre les
mains des ASVP. Nous ne pouvons pas interpréter cela comme un geste de bienveillance à
l’égard de M. SALEM.

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