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Histoire et sociétés
Joutard Philippe. La mémoire nationale rejoint la réalité historique. In: Diasporas. Histoire et sociétés, n°6, 2005. Migrations en
mémoire. pp. 23-26;
https://www.persee.fr/doc/diasp_1637-5823_2005_num_6_1_980
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nous élever au-dessus de nos intérêts et nous ensei¬
gnent ce que c'est que d'être citoyens [...] Et chaque en valeur dans
immigrant, en embrassant ces idéaux, rend notre pays
son mythe
plus et non moins américain2.» Entre les deux plus
anciennes républiques modernes, il y a au moins un de fondation
point commun, au-delà des différences bien visibles,
le mariage
l'idée d'un projet national qui n'est pas fondé sur un
enracinement dans le sang ou même le sol, mais sur de Vétranger grec9
l'adhésion à des valeurs communes et partagées, ce qui
Protis9 venu
donc permettrait aux Français d'avoir un discours com¬
parable. Ce ne fut pas celui qui a été tenu, même si par par la mer ,
ailleurs la législation et les pratiques prennent en avec Vautochtone
compte déjà depuis longtemps le fait que la France est
une grande terre d’immigration, Patrick Weil l'a parfai¬ et terrienne Gyptis.
tement montré3.
Les premiers à avoir changé de discours furent les
généalogistes français qui, organisant leur congrès à
Marseille, en mai 2001, prirent comme thème «Ces
migrants, nos ancêtres». Signe des temps, au même
moment la commission d'experts pour les nouveaux
programmes de l'École primaire reprenait en Histoire la
perspective de Michelet en intitulant le premier point
fort de l'Antiquité: «À l'origine de l'histoire du terri¬
toire français, une diversité qui en fait la richesse,
populations premières, Grecs, Celtes (Gaulois) prédomi¬
nants» et en évoquant au début du Moyen Âge l'arrivée
de «peuples venus de l'est, les Francs et les Wisi-
goths4».
Le couronnement en est la création, en avril 2003,
d'une mission de préfiguration pour la création d'un
Centre de ressource et de mémoire de l'immigration qui
d'entrée de jeu adopte en sous-titre l'expression provo¬
catrice «Leur Histoire est notre Histoire», sous-titre
conservé lors de la création de la Cité nationale en jan¬ synthèse
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vier 2005. L'écoute du prologue du film qui préfigure
l'exposition et que l'on peut suivre sur le site5, explicite
ce sous-titre et remet en cause aussi le mythe fonda¬
teur du xixe siècle : « Nos ancêtres les Gaulois, oui, mais
aussi les Romains, les Goths, les Francs, les Normands...
La France s'est construite avec les différents peuples
qui au fil des siècles, ont traversé le continent et s'y
sont installés. Le brassage de populations a toujours
existé sur notre sol», et le texte se poursuit en mon-
2 5 ■
■ la mémoire nationale...
Philippe Joutard
Philippe Joutard (Université de Provenee-EHESS) travaille sur l'his¬
toire de la mémoire historique, entre autres, à propos des huguenots
ou de la nation française. Il a publié notamment La Légende des
camisards, Histoire d'une sensibilité au passé (Gallimard, 1 977, 1 985),
Ces voix qui nous viennent du passé (Hachette, 1983), «Une passion
française: l'histoire» (André Burguière et Jacques Revel, dir., Histoire
de la France, Choix culturels et mémoire, Seuil, 2000, p. 301-424). Il
termine avec son épouse un ouvrage sur la francophilie aux États-
Unis. Il est membre du comité scientifique de la Cité Nationale de
l'Histoire de l'Immigration.
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