Vous êtes sur la page 1sur 16

DÉTOURS ET TRANSGRESSIONS : UNE APPROCHE DES RAPPORTS DE

GENRE

Sonia Dayan-Herzbrun

L'Harmattan | « Cahiers du Genre »

2005/2 n° 39 | pages 137 à 151


ISSN 1298-6046
ISBN 9782747593789
Article disponible en ligne à l'adresse :
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
https://www.cairn.info/revue-cahiers-du-genre-2005-2-page-137.htm
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour L'Harmattan.


© L'Harmattan. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les
limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la
licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie,
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de
l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage
dans une base de données est également interdit.

Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)


Cahiers du Genre, n° 39/2005

Détours et transgressions :
une approche des rapports de genre

Sonia Dayan-Herzbrun

Résumé
Poser l’universalité de la domination du masculin sur le féminin en
l’assimilant à celle des hommes sur les femmes voue à l’échec toute visée
politique du féminisme comme pensée et pratique de l’émancipation. Il
semble au contraire essentiel de mettre en évidence les pratiques de ré-
sistance trop souvent occultées par les scientifiques du social. On concevra
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


dès lors la domination comme une relation, une tension entre deux groupes
sociaux ou entre un individu et un groupe et non plus comme une étape
infranchissable de l’analyse. Il faut aussi distinguer les rituels et les codes,
des pratiques effectives bien plus complexes. Le terrain d’observation et de
mise à l’épreuve de ces hypothèses est le Proche-Orient, et les pratiques de
résistance des Palestiniennes des Territoires occupés ainsi que des camps
du Liban, en prenant en compte l’investissement politique du privé et en se
mettant à l’écoute de ce que disent et font celles qui sont généralement
catégorisées du côté des dominées.

RÉSISTANCES — DOMINATION — POUVOIR — PATRIARCAT — PROCHE-ORIENT

Une hypothèse communément admise aujourd’hui pose


l’universalité de la domination du masculin sur le féminin. Il
peut être intéressant de l’interroger dans la mesure où l’on as-
siste souvent dans les travaux des sociologues ou des anthro-
pologues à un glissement de ces catégories du symbolique que
sont le masculin et le féminin aux ensembles sociaux complexes
que constituent les hommes et les femmes. Assimiler la domi-
138 Sonia Dayan-Herzbrun

nation masculine à la domination des hommes sur les femmes et


en faire un universel revient à énoncer une fois de plus un
destin inéluctable des femmes noué non plus en fonction de leur
biologie mais en raison d’une structure anthropologique dont on
pose qu’elle institue le social. Toute visée politique du fémi-
nisme comme pensée et pratique de l’émancipation serait alors
vouée à l’échec. Il paraît au contraire essentiel de mettre en évi-
dence les pratiques de résistance trop souvent occultées par les
scientifiques du social aux yeux desquels les femmes ont long-
temps été invisibles et sur lesquelles ils ne portent maintenant
leurs regards et leurs analyses que si elles se tiennent sagement
à leur place d’éternelles secondes. Ce qui nécessite un court
rappel théorique.

Masculin/Féminin : signifier le pouvoir

Dans un texte désormais classique, l’historienne américaine


Joan Scott (1988) définit le genre (c’est-à-dire le masculin ou le
féminin) « comme une façon première de signifier des rapports
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


de pouvoir ». On se situe donc au-delà d’une utilisation un peu
plus restreinte du genre, qui, comme le rappelait Pauline Schmitt-
Pantel (1990), marque le rejet du déterminisme biologique,
l’introduction de la dimension relationnelle hommes et femmes,
et l’insistance sur le caractère fondamentalement social des dis-
tinctions fondées sur le sexe. Les individus ou les groupes sur
lesquels s’exerce le pouvoir, ceux qui le subissent et qui sont
donc du côté de la passivité, sont assimilés à du féminin. Joan
Scott rappelle que dans la France du XIXe siècle, des réforma-
teurs bourgeois décrivaient les ouvriers « en des termes codés
comme féminins » alors que les dirigeants ouvriers ou les théo-
riciens socialistes « répondaient en insistant sur la position
masculine de la classe ouvrière ». Ils revendiquaient le respect,
voulaient que l’on s’adresse à eux en leur disant « Monsieur »
et se coiffaient de chapeaux, non de casquettes, pour se rendre
aux premières expositions universelles qui furent les lieux de
formation des Internationales ouvrières. Dans la même perspec-
tive mais sur un terrain tout à fait différent, l’anthropologue
marocain Abdellah Hammoudi, qui s’appuie sur la biographie et
l’autobiographie de Al-Hadl Ali (1997), grand chaykh confré-
Détours et transgressions : une approche des rapports de genre 139

rique du XIXe siècle, a montré comment la relation confrérique


entre maître et disciple constituait un paradigme de l’exercice
du pouvoir et de l’autorité dans un certain nombre de sociétés,
et en particulier au Maroc. Or cette relation passe par une
longue étape initiatique au cours de laquelle le disciple devient
un errant, sur la trace de son maître. Il quitte sa famille, son
village, et renonce surtout à ce qui marque la masculinité. Il
renonce pour de longues années au mariage. Il obéit au maître
initiateur quand celui-ci exige de lui qu’il accomplisse les tâches
assignées socialement aux femmes, tâches domestiques, bien
entendu, mais aussi, semble-t-il, services sexuels. La trans-
gression des règles sociales et l’inversion sont les étapes d’un
chemin mystique au bout duquel le disciple deviendra maître à
son tour et fera régner son autorité. Cette féminisation du dis-
ciple est comme le modèle de la féminisation de l’assujetti à
l’autorité du « commandeur des croyants ». On peut considérer
que la rumeur, persistante au Maghreb, de la bisexualité des
détenteurs du pouvoir est la forme que prend cette féminisation
des dominés : les proches des chefs d’État sont représentés comme
étant soumis à leur pouvoir sexuel. Non que la rumeur informe
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


sur les pratiques effectives. Mais elle montre comment le rap-
port de domination s’imagine et surtout se symbolise. Aussi
brièvement qu’ils aient été cités, ces exemples mettent en évi-
dence l’usage des catégories du masculin et du féminin dans des
situations où seuls des hommes sont présents.
Dans aucun des deux cas l’usage inconditionnel et finalement
essentialiste de la catégorie de « dominant » et de « dominé »
n’est pertinent. La domination est conçue comme relation, ten-
sion entre deux groupes sociaux, ou bien entre un individu et un
groupe. Elle n’est pas non plus énoncée comme une étape
infranchissable de l’analyse. Elle s’inscrit dans une histoire et
dans des rapports complexes qu’il faut élucider. Il peut s’agir
d’une relation de conflit ou de lutte (de classes, comme dans le
premier exemple), ou d’une relation de transmission dans la-
quelle l’accès à une position d’autorité (masculine) est rendue
possible par une première étape de soumission.
De la même façon, l’approche des relations entre les hommes
et les femmes, qui concernent toujours des groupes historique-
ment et socialement situés, ne peut pas être limitée à celle des
140 Sonia Dayan-Herzbrun

catégories du symbolique dans lesquelles on tente trop souvent


de les enfermer. Erving Goffman (1988) lui-même, dans son
célèbre article sur la ritualisation de la féminité, prend bien soin
de préciser que les photographies publicitaires qu’il étudie et
qui mettent en scène un rapport masculin/féminin qui se lit
comme rapport de domination, ne sont que des photos, qui
disent certes le rituel et les codes, mais qui n’informent pas sur
les pratiques et les conduites effectives des Américain(e)s des
années 1970 à qui s’adressent ces images.
Ce sont ces pratiques qu’il convient d’étudier, dans leur di-
versité et dans leur complexité, loin de tout schéma unidimen-
sionnel. Je propose donc de penser la question de la domination
dans les rapports entre les femmes et les hommes comme celle
d’une perpétuelle tension entre des forces parfois très inégales,
parfois en quasi équilibre. La dimension historique et sociale
— en termes de classes, de générations et d’« ethnicité » — est
ici primordiale.
Jusqu’à une période très récente, la plupart des travaux en
sciences sociales, féministes ou non, ont fourni les instruments
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


théoriques d’une analyse de plus en plus fine des processus
d’imposition du pouvoir. Les transgressions, les résistances,
n’ont fait l’objet que de quelques recherches. C’est sur ce point
que je veux maintenant insister en m’appuyant à la fois sur mes
expériences de terrain au Proche-Orient (en particulier auprès
des femmes de Palestine des Territoires occupés et du Liban) et
sur un certain nombre d’ouvrages qui viennent éclairer et en-
richir cette problématique.
Il ne s’agit pas, bien entendu, de revenir au lieu commun aussi
banal que faux d’un pouvoir féminin, ou pouvoir des femmes,
s’exerçant à l’intérieur de la sphère domestique, ou, pire encore,
dans l’espace clos de la chambre à coucher. L’assignation aux
tâches domestiques — y compris les services sexuels — est la
forme la plus banale revêtue par la relation de domination. Ces
tâches peuvent être accomplies par des mercenaires, hommes ou
femmes (cadets, esclaves, domestiques, prostituées), dominés
parmi les dominés. Une fois admise et posée la domination, une
fois rappelé que cette domination, très largement répandue des
hommes sur les femmes, se combine avec d’autres dominations
Détours et transgressions : une approche des rapports de genre 141

induites par les rapports de classe ou par les relations coloniales


ou ethnicisantes, et que chacune des combinaisons est parti-
culière, il faut rappeler que cette domination se décline sur des
modes divers et avec des degrés différents d’intensité.
Je renvoie ici à l’analyse de Carole Pateman concernant ce
qu’elle appelle « les confusions relatives au patriarcat » dans son
livre The Sexual Contract (1988). Carole Pateman met en évi-
dence la nécessité de déconstruire la notion de patriarcat qui est
l’une des formes que revêt le postulat d’un absolu de la domi-
nation masculine. Il y a eu plusieurs formes ou étapes du pa-
triarcat depuis le patriarcat « traditionnel » dans lequel le pouvoir
politique est construit sur le modèle et à partir de la position du
père dans la famille. La théorie contractuelle prévalente dans les
sociétés modernes occidentales instaure un patriarcat de « frères »
dans lequel la domination sur les femmes s’inscrit dans le cadre
conjugal et plus dans celui de la filiation. Le contrat social
instaure une égalité entre les hommes, mais signifie en même
temps la défaite des pères 1. Carole Pateman récuse aussi les
affirmations selon lesquelles les femmes ont toujours et partout
été tenues hors de l’histoire, et n’ont jamais exercé la moindre
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


autodétermination ou possédé de pouvoir social.
La position sociale et économique des femmes et l’éventail de
leurs activités ont varié énormément dans les différentes cultures
et aux différentes époques de l’histoire, rappelle-t-elle (id., p. 29).
Cette analyse, qui lie féminisme et démocratie, propose de
penser le projet démocratique dans une perspective participa-
tive, dans laquelle ceux qui sont de fait exclus de la commu-
nauté politique pourraient prendre place. C’est ce que l’on
nomme aujourd’hui habituellement l’accès à la citoyenneté et
qui exige, bien sûr, de repenser le rapport privé/public et
privé/politique.
Les idéaux et les politiques démocratiques doivent être mis en
pratique dans la cuisine, la chambre des enfants et la chambre à
coucher (Pateman 2000, p. 117).

1
Dans la société civile qui s’établit alors et qui aboutit à la démocratie
libérale, « ce sont tous les hommes et pas seulement les pères, qui engendrent
de la vie politique et des droits politiques. La créativité politique appartient
non pas à la paternité mais à la masculinité » (Pateman 1988, p. 36).
142 Sonia Dayan-Herzbrun

L’autonomie ainsi conquise ne sera cependant pas celle des


individus de la société libérale, mais une autonomie de pra-
tiques solidaires.
Si la prééminence des hommes doit être remplacée par l’auto-
nomie mutuelle des hommes et des femmes, la liberté indivi-
duelle doit être limitée par la structure des relations sociales
dans laquelle se déploie la liberté (Pateman 1988, p. 232).
Au-delà de ce qui se présente ouvertement comme un projet
politique fondé sur une analyse rigoureuse de philosophie
féministe, on peut tirer deux conséquences d’ordre méthodo-
logique. La première consiste à ne pas exclure les pratiques
relevant du « privé » quand il s’agit d’étudier les rapports des
femmes à la vie politique. La seconde est de prendre systéma-
tiquement en compte ce que font et ce que disent les dominé(e)s
et de se placer de leur côté, à leurs côtés, en essayant de
comprendre comment ils — et elles — gèrent la domination,
rusent avec elle, et transgressent les interdits. Il convient alors
de déterminer quels sont les espaces où elles et ils échappent à
la domination, au lieu de l’intérioriser (de l’incorporer) ou de la
légitimer. Les sociologues ou les théoriciens du social — au
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


premier rang desquels Weber, Bourdieu, Foucault — ont très
longuement et très brillamment étudié les différentes formes de
l’assujettissement. L’irruption des moments de liberté échappe
souvent aux analyses empiriques. On peut cependant repérer
quelques études majeures qui ont été parmi les premières à ten-
ter ce chemin difficile : La nuit des prolétaires de Jacques Rancière
(1981), qui faisait entendre la parole et les rêves des ouvriers du
XIXe siècle dans la langue qui était la leur, beaucoup moins
maîtrisée et rationnelle que celle de leurs porte-parole, leaders
ou théoriciens du mouvement ouvrier. Ou encore La vision des
vaincus de Nathan Wachtel (1971), où ce sont les Indiens du
Pérou qui disent la conquête espagnole. Les deux ouvrages sont
rédigés à partir de documents précis qui cependant ont été sou-
vent négligés par les spécialistes de ces différentes périodes. Ce
que les épistémologues nomment le sujet connaissant — savant,
producteur de savoir et de textes écrits — se situe, en effet, dans
la plupart des cas très largement du côté des dominants. Ce
sujet s’énonce donc au masculin, puisque sa position est celle
de l’autorité.
Détours et transgressions : une approche des rapports de genre 143

L’autre scène

L’anthropologue politique américain James Scott (1990), qui


a travaillé sur les résistances paysannes quotidiennes dans l’Asie
du Sud-Est, a entrepris lui aussi de transcrire ce qui se dit et se
fait sur l’autre scène, celle des dominés, derrière le dos des
dominants, quand cesse la fiction de la soumission et de la
déférence. On est dans le moment « infra politique » qui peut
précéder la révolte, et où les petits gestes de la quotidienneté
sont autant d’actes de résistance. Cette autre scène, invisible
aux dominants comme l’est la scène de l’inconscient, se déroule
dans un autre temps ou un autre espace. Autre temps, celui des
déguisements, du carnaval, mais surtout celui de la nuit, où le
paysan qui, le jour, salue humblement le maître, égorge les
moutons, tend des pièges à ses faisans ou empoisonne ses
chiens. Autre espace : celui des « coulisses », quand on sort de
scène ou que l’on se prépare à y entrer.
James Scott a emprunté au sociologue américain Erving
Goffman cette métaphore théâtrale qui est un remarquable ins-
trument conceptuel pour rendre compte de la complexité du
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


social en termes de spectateurs et d’acteurs, les positions pou-
vant s’inverser. Il s’agit pour James Scott, en effet, de découvrir
ce qui se dit derrière l’histoire officielle. Il distingue deux types
de discours et de comportements : un discours de la subordi-
nation qui se tient en présence des dominants, et qu’il appelle
« public transcript » (en quelque sorte une prestation publique)
et un discours « offstage » — des coulisses —, à l’abri de
l’observation directe des détenteurs du pouvoir. Le décalage
entre les deux comportements est d’autant plus marqué que la
domination est pesante, et qu’elle semble ne jamais devoir
prendre fin, comme c’est le cas pour l’esclavage ou la subor-
dination des femmes. Ainsi des pratiques religieuses clandes-
tines des esclaves du Sud des États-Unis où la rage et la haine
contre les maîtres s’expriment en malédictions et en prédictions
des jours d’apocalypse. Ce domaine du « off » est fait de dé-
clarations, de gestes, de pratiques, qui peuvent confirmer ce qui
apparaît publiquement, aux yeux de tous, mais le plus souvent
le contredisent ou l’infléchissent et ne sont pas de simples
144 Sonia Dayan-Herzbrun

exutoires. Le passage du caché au dévoilement peut déboucher


sur une mobilisation collective rapide et parfois violente.
Écrivant à propos de la société iranienne, Paul Vieille (1975)
avait très clairement analysé ce phénomène des scènes mul-
tiples. Il y avait remarqué « la dualité de l’expression verbale »
ainsi que « l’ambiguïté du sens des conduites ». Dans certaines
circonstances, et notamment quand il s’agit de relations
d’autorité, deux expressions verbales contradictoires se suc-
cèdent. La première est ce que Paul Vieille nomme l’expression
frontale, celle qui doit s’exposer en présence des autres aux-
quels on fait face. Elle est stéréotypée, rigide, sans nuance,
voire brutale.
Elle reprend les termes de la morale religieuse reçue, de la
morale politique officielle, ou de tout autre code de circons-
tance. Elle est indiscutée et indiscutable si l’on se situe à son
propre plan (Vieille 1975, p. 95).
La seconde expression se réfère à la pratique dont elle rend
compte ou qu’elle commente. Elle est nuancée, variable, énon-
cée sur un ton plus bas.
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


On l’appellera l’expression spontanée, dans ce sens qu’elle
n’apparaît pas contrainte et non dans celui où elle ne serait pas
réfléchie, pas organisée par des habitudes et une culture, puis-
qu’elle semble interpréter l’activité quotidienne et non se sur-
imposer à elle (id., p. 96).
L’expression est donc directement liée à la situation dans
laquelle s’effectue l’échange verbal, et varie si l’interlocuteur a
statut d’étranger ou s’il appartient au groupe. À l’étranger on
réserve toujours l’expression frontale. Mais un étranger peut
s’intégrer au groupe. L’expression peut donc évoluer quand la
relation évolue. Les codes de la frontalité sont multiples, selon
les groupements auxquels appartient l’individu (famille, groupe
de familles, village, profession, etc.). Il s’agit avant tout de
« couvrir ou de légitimer la conduite réelle, les intentions, les
motivations, les sentiments » de façon à les cacher ou à forcer
les autres à les accepter, en invoquant la règle acceptée par les
autres.
C’est dans ce langage frontal que s’énonce d’abord ce qui
concerne les rapports hommes/femmes, dans des sociétés où les
Détours et transgressions : une approche des rapports de genre 145

codes sont ceux de la non-mixité, quand la parole se prononce


sur cette scène où les hommes se font face les uns aux autres,
qu’ils disent la règle publique alors que les femmes restent sous
leur regard. La société féminine, dans ce monde structuré par la
différence — voire la ségrégation — des sexes, moins hiérar-
chisée, et « qui n’est pas comme celle des hommes », observe
encore Paul Vieille, « stratifiée étroitement par le pouvoir et la
fortune » (id., p. 103), fait beaucoup moins appel au langage
frontal. Cette scénographie vaut aussi pour les rapports inter-
générationnels dans les sociétés où la règle est celle de la pré-
éminence des aînés sur les cadets.
Cependant, dès que celui ou ceux qui sont en position de
domination ou d’extériorité s’éloignent ou sont absents, une autre
parole, d’autres comportements apparaissent. Les déchiffrer
suppose que l’on donne sens aux silences, aux plaisanteries et
aux mots d’esprit, aux rires, à la poésie 2, et à tous ces rituels
d’inversion que sont les fêtes, les mascarades ou les carnavals.
Je voudrais mentionner à ce propos la belle étude consacrée par
la politologue américaine Liza Wedeen (1999) à la Syrie de
Hafez El Assad, et dans laquelle elle décortique toutes les ambi-
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


guïtés d’un régime tout à fait autoritaire. Au niveau manifeste,
ou frontal, le pouvoir de Hafez El Assad a fonctionné sur le
modèle du patriarcat dit traditionnel. La nation syrienne y appa-
raît, dans les discours officiels, dans la statuaire et l’iconogra-
phie, sous la métaphore d’une famille dont le président est le
chef mâle. Il est à la fois l’époux et le père de la nation. La
transgression, dans cette situation où la résistance face à face n’est
pas possible, passe elle aussi par le détour de la métaphore.
Ainsi d’un rêve, qu’un jeune officier alaouite, interviewé plus
tard par la politologue, a cru pouvoir raconter à un de ses supé-
rieurs qui, visitant leur caserne, interrogeait les soldats sur leurs
rêves de la nuit précédente. Alors que tous ses prédécesseurs
disaient avoir rêvé du leader trônant dans le ciel ou tenant le
soleil entre ses mains, lui raconte qu’il a tout simplement rêvé
que sa mère se prostituait avec l’officier supérieur auquel il
s’adresse, ce qui lui a valu d’être frappé et renvoyé de l’armée.

2
Comme l’a superbement montré Lila Abu Lughod dans sa remarquable étude
de la société bédouine (1987).
146 Sonia Dayan-Herzbrun

Son récit, en effet, par tout ce qui l’oppose à ceux de ses


camarades, rend évidente la flagornerie mensongère de ces
derniers. Quand M. interprète pour Liza Wedeen ce rêve qui a
brisé sa carrière, il associe patrie (umma) et mère (umm). Il a
donc dit de sa patrie — sa mère — qu’elle était souillée et pros-
tituée, ce qui signifie, entre autres, que Hafez El Assad, le père
et le protecteur, était incapable de protéger la patrie, son épouse,
de la corruption. Ainsi, M. a fait le choix, non de boycotter le
rituel auquel il devait se soumettre, mais de s’y soumettre de
façon transgressive et rebelle. D’autres canaux, les plaisanteries,
les caricatures, certains sketches télévisés mettent également en
évidence toute l’ambiguïté de la domination et de la soumission
dans ce type de régime autoritaire dont la violence répressive
interdit toute résistance directe, en montrant qu’il s’agit avant
tout de faire comme si. L’implicite, le rire, la parodie sont d’une
extrême importance. Ce sont comme des canaux souterrains
d’une résistance qui pourra surgir au grand jour quand les cir-
constances le permettront. Ils constituent la part de liberté par
laquelle certains échappent non pas à la violence directe et
brutale, mais à la domination dès lors que celle-ci n’est pas
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


intériorisée. Et elle l’est souvent moins que ne l’imaginent ou
l’énoncent beaucoup de sociologues.
Décrivant et analysant un pèlerinage effectué par un groupe
de femmes sur la tombe d’un saint de la région de Tlemcen,
Sossie Andezian en vient à des conclusions du même ordre. Ce
rituel « qui nous livre la vérité non officielle des femmes sur la
société » s’accompagne de rires, de déguisements et de parodies.
Il révèle l’ambivalence de la représentation de l’autorité des
hommes en général, celle des hommes religieux en particulier…
Il tend à détruire l’un des stéréotypes les plus courants concer-
nant l’image des femmes dans les sociétés musulmanes, celle de
leur soumission passive et mécanique aux règles qui leur sont
édictées par les hommes. Par delà le point de vue des femmes
sur la société algérienne, ce rituel contribue à apporter un éclai-
rage sur le rapport au pouvoir (politique et religieux) de caté-
gories sociales dominées. Il souligne notamment leur usage de
la dérision qui traduit une grande maîtrise de l’organisation et
du fonctionnement d’un système dont elles sont a priori exclues
(Andezian 2001, p. 153-154).
Détours et transgressions : une approche des rapports de genre 147

Petites et grandes résistances

J’ai souvent fait des observations analogues, et d’abord au


niveau des rapports entre les hommes et les femmes, dans un
sourire, un regard de complicité avec la chercheuse (moi). Tout
en faisant mine de préserver les signes du pouvoir masculin parce
que s’attaquer à ces codes met en péril la structure sociale dans
une situation où elle est particulièrement fragile (par exemple en
Palestine ou dans les camps palestiniens du Liban), les femmes
gardent une certaine maîtrise du jeu. Je ne citerai ici que deux
exemples récents (juin 2002).
Dans la cour d’une maison du camp de Rachidiyeh, au Sud-
Liban, un homme âgé nous expose ses souffrances, ses maladies.
Nous sommes reçues dans la cour, ombragée par quelques ar-
bustes, parce que dans l’intérieur des maisonnettes, avec leurs
toits de tôle, il règne une chaleur étouffante ; la pluie n’améliore
rien : la tôle est percée par endroits, et laisse passer l’eau qu’il
faut alors recueillir dans des seaux ou des cuvettes. Notre groupe
est mixte, composé de l’homme, de sa belle-fille, de ses petits-
enfants, de deux chercheuses et d’une accompagnatrice. Les
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


codes vont cependant se trouver réaffirmés à deux moments.
Lorsque nous partons, et que le maître de maison cueille quel-
ques brins de basilic pour nous les offrir, se situant symbolique-
ment comme celui qui donne. Mais surtout, il réaffirme la hié-
rarchie quand, à un moment de la conversation, pour souligner
l’inutilité des traitements coûteux auxquels il est soumis, il sort
du sac en plastique dans lequel il les avait rassemblés et jette à
terre les nombreux médicaments qui lui sont prescrits et qu’il
nous avait montrés. Sa belle-fille les ramasse, en silence, en me
lançant un regard de connivence, et les range. Dans ce regard
passe toute la dimension du « comme si ». Il vient de se dé-
rouler un rituel auquel personne ne croit, mais qui réaffirme les
codes.
Dans un appartement près du camp de Chatila, une femme
âgée, survivante du massacre (1982) et de la guerre des camps
(1987), nous dit son mariage précoce et imposé qu’elle a accepté
comme quelque chose contre quoi elle ne pouvait rien, mais qui
ne l’a pas empêchée de mener ensuite une vie de combattante
qu’elle raconte avec tristesse (il y a eu beaucoup de morts et de
148 Sonia Dayan-Herzbrun

souffrance autour d’elle) mais aussi avec fierté. Elle relate, en


particulier, comment elle transportait armes et munitions dissi-
mulées dans son panier sous un tas de légumes, et comment les
soldats (les Israéliens, les milices libanaises de différents bords),
la laissaient passer, la prenant pour ce qu’elle jouait, une femme
âgée et inoffensive. Sa fille, également présente, ajoute qu’elle
avait, quant à elle, comme cache favorite, le sac de couches sales
de ses bébés. D’autres femmes, dans d’autres conflits, par exemple
au moment de la guerre d’Algérie, ont fait des expériences
analogues.
Je voudrais enfin mentionner l’histoire de Souha Bechara,
cette jeune Libanaise qui, en 1988, âgée de 20 ans, a tenté
d’éliminer physiquement Antoine Lahad, le chef de l’ALS,
milice supplétive d’Israël au Sud-Liban. Dans un livre écrit en
collaboration avec le journaliste Gilles Paris (2000), elle a ra-
conté comment, fille de militants communistes et politisée depuis
l’enfance, elle a feint d’adhérer aux représentations dominantes
des femmes. Elle a d’abord fait semblant d’être amoureuse, puis
fiancée, pour quitter Beyrouth où elle poursuivait ses études et
se rapprocher géographiquement de sa cible. Elle a ensuite joué
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


à adhérer aux canons de l’esthétique corporelle en réussissant à
devenir le professeur d’aérobic de Minerve Lahad, l’épouse de
celui qu’elle avait décidé d’éliminer.
Dans les travaux que j’avais consacrés, il y a une dizaine
d’années, aux femmes de Palestine dans la première Intifada,
j’avais parlé d’un investissement politique du privé. Cette notion
me permettait de rendre compte des modes de résistance des
femmes de Cisjordanie et de Gaza à l’occupation israélienne, à
partir de leur place dans le privé. Les exemples que je viens de
citer montrent comment c’est en rusant à partir du privé dont
elles ne sont pas supposées sortir, à partir des places qui leur
sont assignées par les rapports de sexes et de génération (belle-
fille, mère, vieille femme, jeune fille), que ces femmes des camps
du Liban ont pu mener leur résistance.
Dans le monde arabe, et plus généralement dans toutes les
régions du monde où le pouvoir est exercé par des dirigeants
autoritaires et répressifs, mais peu soucieux de la majorité de
leur population, les frontières entre privé et public sont perméables.
Détours et transgressions : une approche des rapports de genre 149

La vie proprement politique et les zones de résistance se situent


souvent hors du champ qu’explorent les médias et les polito-
logues — c’est-à-dire les élites et les institutions officielles. Les
rapports entre les hommes et les femmes s’y déroulent sur un
mode complexe qui ne se réduit pas à une relation de domi-
nation. Comme le développe Diane Singerman, qui a effectué
de longs séjours dans les quartiers populaires du Caire, vivant à
l’intérieur des familles et partageant leur existence, pour com-
prendre l’activité politique populaire, celle qui surgit du bas de
la société, il faut s’attacher à ces formes de gestion de la vie en
commun que sont les réseaux informels (réseaux économiques,
réseaux familiaux, etc.) pour y percevoir un type de politique
participative. Les femmes y occupent une place prépondérante.
Diane Singerman écrit qu’à l’intérieur des ménages :
La façade publique de la ségrégation sexuelle et du rôle de
soumission des femmes s’effondre, là où hommes et femmes
s’engagent ensemble à assurer la prospérité de la famille ainsi
que leurs propres besoins individuels (1995, p. 32).
Plus j’avance dans mes propres recherches et plus ces obser-
vations rencontrent les miennes. Diane Singerman note encore
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


que :
Les voix, les expériences, l’activité politique des hommes et des
femmes des basses couches de la société sont peu représentées
dans les analyses politiques (id., p. 3 ).
Les élites les ont exclues de l’arène politique formelle, celle
des groupes d’intérêt, des syndicats et des partis politiques offi-
ciels ou clandestins. On les suppose écrasées par la brutalité du
système répressif, silencieuses et soumises ou apathiques. Cela
ne les empêche cependant pas de constituer des institutions po-
litiques alternatives et informelles, qui, si elles n’affrontent pas
le pouvoir central, sauf dans des moments exceptionnels, leur
permettent de vivre ou de survivre, sont véritablement créatives,
et représentent un élément, parmi d’autres, de transformation de
la société.
* *
*
Pendant de longues années on a considéré que la théorisation
féministe passait toujours par une mise à plat et une dénoncia-
150 Sonia Dayan-Herzbrun

tion de la domination et de l’exploitation. Ce moment a consti-


tué une étape indispensable. Il a malheureusement parfois servi
d’argumentaire à l’énoncé d’une domination indépassable des
hommes sur les femmes (Bourdieu 1998 ; Lipovetski 1997). Il a
aussi sous-tendu les revendications « égalitaires » au partage des
positions de pouvoir par les hommes et les femmes. Les relations
de domination se transformeraient, certes, mais prendraient la
forme de domination de classe, de domination ethnique, etc. Pour
tenir compte de ces objections, l’analyse s’est affinée et a pro-
cédé à une déconstruction des processus de domination que
beaucoup de travaux actuels envisagent maintenant dans leur
complexité (Butler, Scott 1992). La mise en évidence des modes
de résistance que mettent en œuvre certaines femmes, le fait de
donner un sens politique à des conduites du privé et de la vie
quotidienne, rend possible une véritable critique de la domina-
tion (Tumultes 2004). Elle devrait permettre maintenant de mieux
penser la place des femmes comme sujets politiques, selon des
codes et des règles qui ne seraient plus ceux de la masculinité,
mais seraient le fruit d’une élaboration commune.
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


Références

Abu Lughod Lila (1987). Veiled Sentiments. Honor and Poetry in a


Bedouin Society. Cairo, The American University in Cairo Press.
Andezian Sossie (2001). Expériences du divin dans l’Algérie contem-
poraine : adeptes des saints dans la région de Tlemcen. Paris, CNRS
Éditions « Ethnologie ».
Bechara Souha (avec Gilles Paris) (2000). Résistante. Paris, Jean-
Claude Lattès.
Bourdieu Pierre (1998). La domination masculine. Paris, Seuil.
Butler Judith, Scott Joan W. (eds) (1992). Feminists Theorize the
Political. New-York & London, Routledge.
Goffman Erving (1988). Les moments et leurs hommes. Paris, Seuil.
Hammoudi Abdellah (1997). Master and Disciple. The Cultural Foun-
dations of Moroccan Authoritarianism. Chicago, The University of
Chicago Press.
Lipovetsky Gilles (1997). La troisième femme. Permanence et révo-
lution du féminin. Paris, Gallimard « NRF. Essais ».
Détours et transgressions : une approche des rapports de genre 151

Pateman Carole (1988). The Sexual Contract. Stanford, Stanford


University Press.
— (2000). « Féminisme et démocratie ». In Ballmer Cao Thanh-Huyê’n,
Mottier Véronique, Sgier Lea (textes rassemblés et présentés par).
Genre et Politique : débats et perspectives. Paris, Gallimard « Folio.
Essais ».
Rancière Jacques (1981). La nuit des prolétaires. Paris, Fayard « L’espace
du politique ».
Schmitt-Pantel Pauline (ed) (1990). L’Antiquité. In Duby Georges,
Perrot Michelle (eds). Histoire des femmes en Occident [tome 1].
Paris, Plon.
Scott James (1990). Domination and the Arts of Resistance. New Haven,
Yale University Press.
Scott Joan W. (1988). « Genre : une catégorie utile d’analyse historique ».
Les Cahiers du GRIF, n° 37-38 « Le genre de l’histoire », printemps.
Singerman Diane (1995). Avenues of Participation: Family, Politics,
and Networks in Urban Quarters of Cairo. Princeton, Princeton
University Press.
Tumultes (2004). « Adorno critique de la domination. Une lecture
féministe » (Sonia Dayan-Herzbrun, Nicole Gabriel, Eleni Varikas,
eds), n° 23.
© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)

© L'Harmattan | Téléchargé le 31/10/2020 sur www.cairn.info (IP: 109.10.39.190)


Vieille Paul (1975). La féodalité et l’État en Iran. Paris, Anthropos.
Wachtel Nathan (1971). La vision des vaincus : les Indiens du Pérou
devant la conquête espagnole, 1530-1570. Paris, Gallimard
« Bibliothèque des histoires ».
Wedeen Liza (1999). Ambiguities of Domination: Politics, Rhetoric,
and Symbols in Contemporary Syria. Chicago, University of Chicago
Press.

Vous aimerez peut-être aussi