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Chapitre 2 : Le « Concert européen » :

la construction des relations


internationales par la nation.
Introduction :
1815 : transformation de la carte de l’Europe par les principes des nations :
 Restauration des frontières européennes d’avant 1789
 Adaptation à la nouvelle réalité du nationalisme naissant

Le nationalisme introduit des principes nouveaux dans l’ordre des RI :


 Rôle clé des masses (nation) dans les RI (1792)
 Exacerbation de la concurrence internationale (de plus en plus des enjeux
économiques et politiques sur des questions de nationalisme et religieuses)
 Apparition de l’opinion publique nationale et internationale (développement
d’une opinion publique européenne)

Le XIXe siècle : « naissance des relations internationales comme nous les connaissons
aujourd’hui » (cf. J. Osterhammel, 2014).
 Industrialisation : extension des capacités d’interaction des nations et des
inégalités.
 Formation des États-nations : rationalisation des RI et établissement d’ordres
impériaux à l’échelle planétaire.
 Nouvelles idéologies (libéralisme (France), socialisme, nationalisme, racisme) :
essor de nouveaux acteurs des RI.
 Reconfiguration globale des ordres internationaux et de rapports de
puissance : déséquilibre des RI en faveur de l’Occident.
 Formation d’un ordre diplomatique international : « le concert des nations ».

Avant l’Europe, un « système européen » :


Les RI européennes n’ont pas reposé uniquement sur des rapports de forces
- Ensemble de solidarités culturelles, religieuses, économiques et sociales.
- Système de codes et des règles juridiques et diplomatiques spécifiques
- Conscience commune à partir de l’époque moderne (Westphalie, 1648)

1815 – 1914 : conscience profonde d’une unité et d’une identité européenne


- Valeurs religieuses et politiques (christianisme et Lumières)
- Intérêts communs (paix, colonisation, stabilité)
- Naissance d’une opinion publique européenne

Nationalisation de l’héritage des Lumières :


Partisans de la liberté avant 1789 : cosmopolitisme (fraternité des peuples).

1792 – 1815 : modification générale de la relation gouvernants / gouvernés


 « Grande – nation » (expansionnisme).
 Appels au peuple en Allemagne, en Russie.
 « Guerre nationale », « patriotique ».

Refus de laisser le nationalisme à la France


 Appropriation de la liberté et de l’héritage des Lumières par les protagonistes.

Diffusion de l’association « liberté : nation »


 Première limite de la liberté Lumières : nationalisme.

L’héritage des Lumières ne peut pas se comprendre sans l’existence d’une nation.

Les guerres napoléoniennes : mythe fondateur des nations européennes


 Tres de Mayo (1808) par Goya en 1814 : Révolution à Madrid
 La bataille des nations (1813) par Mochkov en 1815.

Existence d’une « francophobie » : création de la nation en réaction vers la nation


française.

I. Le congrès de Vienne : la naissance du « Concert


Européen »
1er novembre 1814 – 9 juin 1815 : 200 délégations (sauf Empire Ottoman)
 Grande-Bretagne, Russie, Prusse, Autriche (Metternich)

Refondation d’un ordre social (pas uniquement un traité de frontières).


 Fin de l’Ancien Régime/principes des Lumières
 Consolidation par la Sainte-Alliance

Congrès de Vienne : essaye de refondre un ordre international : rejet des


nationalismes pour intégrer les idées des Lumières.
1) Refonder un « système européen » : rétablir l’équilibre des puissances
Principes d’équilibre des puissances (influence britannique)
 Refus de la domination des puissances (XVIIIe siècle : partage Pologne)
 Limiter l’influence française : États – tampons (Pays-Bas élargis jusqu’à la
Belgique, Confédération germanique)
 France réintégrée au « concert » dès 1814 (pas de Diktat)
 Établir un régime libéral en France et dans la confédération germanique
(constitutions)
 Nouvelle diplomatie (salons + diplomates)

Système de « sécurité collective » imaginé par la GB en 1804 (obligation de garantir


les frontières).
 1804 : année de création de l’empire napoléonien.
Une carte de l’Europe simplifiée par les quatre puissances :
La carte de l’Europe n’avait jamais été si simple que dans cette époque.
 Disparition du Saint-Empire
 France : retour à 1790 (second traité de Paris en novembre 1815)
 GB : bases navales (Gibraltar, Malte, Héligoland)
 Russie vers l’Ouest (Pologne, Finlande, Bessarabie)
 Autriche vers le Sud (Galicie, Tyrol, Dalmatie, Vénétie, Lombardie)
 Prusse (Posnanie, Poméranie, Westphalie)
 Royaume de Suède et de Norvège
 Royaume des Pays-Bas
 Royaume de Piémont Sardaigne et Royaume des Deux-Siciles
 Confédération germanique (division de l’Allemagne en 41 États)

Le « droit des gens » sans droit des nations :


Pas un congrès contre la liberté, mais contre les nationalismes.
- Les Lumières contre les nationalismes
- Refus de l’identité liberté/souveraineté/nation
- « droit des gens » (privilèges) : autonomie des peuples (sans souveraineté)

Introduction du « droit des gens » (GB + Talleyrand)


- Émergence d’un droit international européen sur la notion de légitimité
- Rétablissement d’un État polonais (Cracovie) et autonomie des trois parties
occupées (Autriche, Prusse, Russie)
- Maintien de la Saxe au nom du droit des peuples
- Création d’une confédération germanique (mais pas d’une Allemagne –
refusée par Metternich) : Autriche s’oppose à l’idée d’une confédération
germanique.
- Condamnation de l’esclavage (sans émancipation des colonies)

Un « Concert Européen » : Sainte – Alliance et Quadruple – Alliance :


Sainte – Alliance (Autriche, Russie, Prusse : 26 septembre 1815)
 Fraternité monarchique et chrétienne
 Alliance anti-libérale : cherchaient de finir avec le libéralisme politique qu’il
existait à l’époque.

Quadruple – Alliance (+ GB le 20 novembre 1815)


 « société d’assurance mutuelle des monarques absolus » (sécurité collective).
 Combattre les courants révisionnistes, nationalistes, libéraux (limité par la GB)
 Adhésion de la France à l’alliance en 1818

Naissance du « concert européen » :


 Réunions hebdomadaires des ambassadeurs à Paris
 Congrès réguliers pour régler les conflits

Le « système Metternich » : préserver l’Ancien Régime (1815 – 1848) :


Autriche : grand vainqueur du congrès de Vienne
 Pas de Pologne, pas d’Italie, pas d’Allemagne
 Rétablissement d’un ordre social fondé sur les principes monarchiques et
chrétiens

Système fondé sur :


 L’équilibre des puissances La GB ne partage pas ces
 La négation des nationalités principes.
 L’antilibéralisme

Échec/limites de ce système à travers l’évolution rapide de la carte de l’Europe après


1815.

II. Le « système européen » face au mouvement des


nationalités.
Légende noire du « système Metternich » forgée par les libéraux de 1830 et les
révolutionnaires de 1848.
 Transformations de la carte de l’Europe
 Constitutions, révolutions
 Évolution de l’alliance des puissances

1) La répression antilibérale des années 1820 :


Répression du libéralisme dans la Confédération germanique (1819) : décrets de
Karlsbad (presse et universités).

Intervention autrichienne à Naples (1821).

Répression de la charbonnerie en Italie (1821) et en France (1822).

Intervention française (France de la restauration) en Espagne (1823) : « Cent mil


enfants de Saint – Louis ».

Velléités d’intervention en Amérique latine pour restaurer l’empire espagnol


(reconnaissance des indépendances par GB en 1825).

Absence de soutien aux chrétiens serbes et grecs contre l’empire ottoman.

Coopération des polices européennes contre les libéraux (circulation)


 France, Prusse, Piémont, Suisse

L’indépendance de la Grèce : première crise du concert


Émergence d’un nationalisme grec au sein des élites
 D’une identité religieuse chrétienne (compatible avec l’empire)
 À un nationalisme culturel (incompatible avec l’empire)

1821 : soulèvement + philhellénisme européen (Goethe, Chateaubriand, Hugo, Lord


Byron).
1822 : proclamation de l’indépendance par le congrès national + massacre de Chios.
1827 : traité de Londres (GB, Russie, France) : engagement à créer un État grec
autonome.
1829 : paix d’Andrinople imposée par les puissances européennes à l’Empire ottoman.
1832 : création d’un royaume indépendant (Otto de Bavière)

 Refus d’intervention par Metternich …

2) La détérioration du « système Metternich »


Le « système européen » de 1815 – 1848 n’a pas empêché l’essor des nationalités :
 Grèce, Belgique

Rupture des logiques de la Saint – Alliance :


 Montée des nationalismes
 Expansionnisme russe en Orient
 Velléité prussienne d’unification allemande
 Politique étrangère libérale de la GB + alliance Monarchie de Juillet
Les révolutions des années 1830 :
« Quand Paris éternue, l’Europe s’enrhume » (Metternich)
 Trois Glorieuses en France (juillet)
 Belgique (août)
 Pologne (novembre)
 Modène, parme et Bologne (février 1831)
 Leipzig, Rhénanie, Brunswick 1831

La création de la Belgique (1830 – 1831)


 Sud des Pays-Bas espagnols
 1787 – 1790 : révolution brabançonne : fondation des « États belgiques Unis »
 Domination française (1792 – 1814)
 Domination néerlandaise (1815 – 1830)

« Journées de septembre » 1830 : seconde révolution à Bruxelles + indépendance


 Rébellion contre les Pays-Bas (soutien France et GB contre Russie et Prusse)

1831 : Léopold I « roi des belges » (modèle français unitaire) : neutralité diplomatique
 Français seule langue officielle : élites francophones.

La GB, puissance libérale :


 Modèle politique depuis les Lumières
 Idéologie libérale internationale
 Abolition de la traite (1807) et de l’esclavage (1833)
 Libre-échange : Free Trade (absence de droits de douanes à l’entrée en GB)
 Respect des engagements financiers des États (diplomatie de la canonnière)

Création d’une Quadruple Alliance libérale :


 Pays à constitution (GB, France Portugal, Espagne) contre les pays absolutistes
 Rapprochement franco-britannique (constitution libérale 1830, neutralité
belge)

III. L’opinion publique : nouvelle actrice des relations


internationales :
Essor de l’opinion publique au cours du XVIIIe siècle (espace public)
 Naissance des sociétés civiles nationales

Émergence lente d’une opinion publique internationale


 Opinion sur l’actualité internationale
 Influence croissante dans les RI

1630s – 1820s : étroite « République des Lettres » : il y avait très peu des gens qui
lisent.
1830s : naissance d’une opinion publique internationale
1880s : naissance d’une médiatisation nationale de masse : massification grâce aux
journaux.

Espace public : espace où se déroule un échange d’opinion littéraire, journalistique,


critique entre différents acteurs, où il y a le droit à s’exprimer, le droit à débattre, le
droit à être écouter, etc.

1) L’opinion publique : incarnation du sentiment des nations


Incarnation l’identité singulière de la nation dans le concert européen.

Réalité labile
 D’une poignée de directeurs de presse à la foule belliciste/pacifiste

Importance de l’opinion publique pour les gouvernements


 Émotion : révolution : considèrent qu’il faut éviter les émotions pour ne pas
arriver à faire une révolution.
 Fondement de la légitimité pour les libéraux
 Extension des suffrages

L’émotion populaire : la naissance des évènements transnationaux


Mobilisation commune de l’opinion publique européenne
 Interdiction de la traite (1815)
 Massacre de Chios (1822)
 Guerre de Sécession (1861 – 1865)
 « atrocités bulgares » (1876)
 Guerre des Boers (1880 – 1881 et 1899 – 1902)

Émergence d’une conscience européenne commune.


2) Vers une diplomatie des peuples ?
Idée de fonder la paix sur l’opinion publique (bien commun/intérêts dynastiques)
 Kant, Vers la paix perpétuelle (1795)

Moralisation de l’action diplomatique/raison d’État


 Refus des oppositions formelles et impérialistes
 Transparence/secret
 Défense de valeurs : civilisation et liberté

L’opinion publique : instrument diplomatique :


Défense des revendications libérales des peuples européens.
 Affaiblissement des monarchies absolutistes à l’intérieur et à l’étranger

Critique de l’État libéral : en contradiction avec ses valeurs.


 Pression sur les gouvernements

Un espace public européen :


Opinion publique relativement homogène entre 1820 et 1850
 Socialement, journalistiquement (mêmes contenus), linguistiquement
 Circulation des mêmes informations
 Division de l’opinion publique par l’ère démocratique et nationaliste

Occupation française de Tahiti (1844) : débat public européen :


 Protestation de l’opinion britannique au nom du droit des peuples
 Protestation de l’opinion française au nom de l’équilibre des puissances dans le
monde

3) L’opinion au service des crises internationales


Instrumentalisation du nationalisme dans les crises internationales.
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Crise égyptienne (1840) : « empire arabe » de Mehemet Ali soutenu par la France/GB
 Traité de Londres : neutralité des détroits turcs
 Préparatifs de guerre (Thiers)
 Révil nationaliste et vélléités de reconquête de la Rhénanie
 Réveil nationaliste en Allemagne : Wacht

Conclusion :
Congrès de Vienne n’est pas un congrès conservateur.
 Restauration des Lumières (cosmopolitisme libéral) contre les nationalismes
(libéralisme national)
 Pas de répression des nationalités : faiblesse des mouvements nationaux
élitaires en 1815
 Équilibre européen sans guerre générale jusqu’en 1914 en dépit de
modifications
Un système européen fondé sur l’équilibre des nations
Naissance des RI contemporaines
- Multilatéralisme, arbitrage, sécurité collective
- Opinion publique internationale
- Émergence d’une conscience européenne : « droit public européen »,
diplomatie des peuples

Détérioration progressive de ce « système européen » jusqu’en 1914.

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