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Le tournant de la Révolution et de l’Empire (1789-1815) : une nouvelle idée de la nation.

-Nous sommes habitués à voir la carte du monde divisé en 200 Etats-Nations et des peuples
demander à avoir leur propre pays. ( Catalans, Kurdes...) Pourtant, jusqu’au XVIIIème siècle, le monde
était structuré différemment, dominé par des empires multinationaux. (autrichien, russe,
ottoman….),La plupart des peuples n’avaient pas d’Etat. La Révolution française constitue un
séisme politique dont l’onde de choc se diffuse sous Napoléon et enfante le monde contemporain
fondé sur l’idée de Nation.

I. La rupture de 1789 : la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen.


Avec la Déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen (26 août 1789) affirme et redéfinit l’idée
de Nation. Un pays ne doit plus reposer sur le Roi et une élite d’aristocrates. La légitimité et la
souveraineté procèdent de la Nation, du peuple dans son ensemble, qui doit gérer l’Etat en fonction
de nouveaux principes, à savoir la liberté et l’égalité. Il en résulte que tout peuple peut être une
Nation et revendiquer un Etat. Ill est à noter que la Révolution propose une conception de la nation
abstraite, non pas fondée sur l’ethnie, la religion et le sang, mais sur une volonté politique et des
principes.

II. Une révolution qui se heurte à la question religieuse et à la difficulté de créer un Etat.
-La Révolution expérimente tout d’abord la Monarchie constitutionnelle (1789/92). Elle cherche un
compromis avec le Roi, qui garde un pouvoir important grâce au droit de veto. Apparaît vite une
contradiction entre ce droit de veto et la souveraineté du Peuple. L’Assemblée ne supporte pas que
Louis XVI se permette de bloquer sa réforme de l’Eglise. Le Roi, de plus en plus critiqué et menacé,
décide de fuir (juin 1791). Arrêté à Varennes, il apparaît comme un traître. Dès lors, la monarchie est
condamnée à l’échec ; elle est abolie en août 1792. On décide alors d’expérimenter la république.

-La Ière République (1792/99) se heurte à maints problèmes : crise économique, guerre civile avec les
royalistes catholiques ne lui pardonnant pas d’avoir guillotiné Louis XVI, conflits idéologiques entre
révolutionnaires (Olympe de Gouges guillotinée pour avoir posé la question des droits de la
femme...) . S’affrontent les partisans d’une démocratie représentative fédérale (Girondins et Mme
Roland) et défenseurs d’une démocratie directe, centralisée + égalitaire. (sans-culottes,
Montagnards..). S’ajoute la guerre avec toute l’Europe des Rois…..Ces conflits permettent à un jeune
immigré, Bonaparte, de se distinguer. Génie militaire et de la propagande, il profite des campagnes
d’Italie et d’Egypte pour frapper les imaginations. Il renverse par un coup d’Etat (2 déc 99) une
république discréditée par la Terreur (1793/94), la faillite monétaire et la corruption du Directoire/

III. Napoléon et un Ier Empire ambivalent : assassin et propagateur de la Révolution (1799-


1815)

-Bonaparte semble efficace pour créer des institutions stables avec son Consulat (1799-1804), puis son 1er
Empire (1804-1815) : préfets, Banque centrale, nouvelle monnaie, Lycées… Il s’évertue à finir la
Révolution en exaltant un compromis entre Monarchie Absolue et idées des Lumières, un mélange
entre laïcité et primauté de l’Eglise catholique (Concordat de 1801), entre Autorité et Souveraineté
du Peuple (plébiscites) et Egalité. En 1804, son Sacre et son Code Civil instaurant l’égalité face à la
Loi montrent son ambivalence, sa synthèse entre Ancien Régime et Révolution.

- Néanmoins, l’Empire se révèle fragile. Pour unir les Français et légitimer son autorité, il mise sur des
guerres de plus en plus risquées (Espagne, Russie…) qui finissent par lui être fatales à Waterloo. (juin
1815) Paradoxalement, le dictateur Napoléon contribue à diffuser les idéaux de la Révolution hors de
France, répandant son code civil, exaltant le nationalisme en Pologne, Italie et Allemagne pour
affaiblir les Empires concurrents. Et le chaos qu’il génère en Espagne et Portugal permet à de
nouveaux Etats-nations d’émerger en Amérique latine sous l’impulsion de Simón Bolívar….

Fiche : L’Europe entre restauration et révolutions (1815-1848)


Vaincu à Waterloo (1815), Napoléon est déporté le plus loin possible, sur l’île de Sainte-Hélène.
Cependant, ses vainqueurs, les grands royaumes et empires d’Europe, ne se contentent pas de se
débarrasser de lui. Ils veulent en finir avec les 23 ans de guerre et de convulsion (1792-1815), que,
selon eux, la Révolution française de 1789 a engendrées, avec son exaltation de la Nation et de la
souveraineté du Peuple. Toutefois, cette volonté de restaurer l’ordre ancien, organisé autour
d’Empires multinationaux, se heurte au mouvement, aux révolutions des nationalités et de la
France ;

I.Congrès de Vienne (1814/15) : restauration de l’ordre ancien autour d’Empires multinationaux


-Entre 1814 et 1815, les différentes puissances européennes se réunissent à Vienne sous la direction
de l’Autriche de Metternich, de la Russie d’Alexandre 1er, du Royaume-Uni et de la Prusse. Il s’agit ni
plus ni moins que de redessiner les frontières dans toute l’Europe.

-Les rêves d’unité et de liberté des nations allemande, serbe, italienne et polonaise, confortés par la
Révolution et Napoléon, sont ignorés ; on restaure partout la loi des Empires multinationaux. Ceux-
ci s’entendent pour s’unir et intervenir en cas de nouvelle révolution. (« Sainte-Alliance »). Au nom
de l’unité et de l’équilibre entre les puissances, on veille à ne pas trop humilier la France vaincue

II. qui se heurte au mouvement des nationalités, à des révolutions (années 1820, 1830,
1848)
-A peine 5 ans, après le Congrès de Vienne, plusieurs soulèvements éclatent. S’ils échouent en Italie
et Espagne, ils finissent par porter du fruit en Grèce et Serbie. Après le massacre de Chios (1821),
perpétré par l’Empire ottoman, un mouvement d’opinion publique, porté par des artistes
romantiques comme Lord Byron ou Delacroix, amène la Russie, la France et l’Angleterre à intervenir
en faveur de la nation grecque. Le sultan doit céder l’indépendance (1830-1832) ; Milos Obredovic a
profité de ses difficultés pour négocier une très large autonomie pour la Serbie. (1830).

-En 1830, après 3 glorieuses à Paris, des insurrections éclatent dans toute l’Europe. Les Empires
russe et autrichien imposent leur loi en Pologne et Italie, un nouvel Etat-nation voit le jour : la
Belgique.Les idées révolutionnaires continuent à se répandre, favorisées par le chemin de fer, le
télégraphe, l’essor de la presse et des livres. En 1848, des révolutions explosent presque partout ;
c’est le « printemps des peuples ». L’intervention des armées russes de Nicolas 1 er sauve l’ordre
du Congrès de Vienne, mais Metternich, son architecte, doit quitter le pouvoir…

III. La France reflète ce tiraillement entre restauration et révolution / le crépuscule des


Rois.
-En 1815, la monarchie est restaurée en France. Louis XVIII se montre habile et pragmatique. Il
restaure l’autorité du Roi, le drapeau blanc, mais accorde une « charte », une constitution qui
maintient certains acquis de la révolution : la liberté de la presse, le Code Civil et l’égalité face à la loi,
le droit de vote (censitaire). Toutefois, son frère, Charles X, qui lui succède en 1824, semble désireux
de restaurer la monarchie absolue, supprimant la liberté de la presse et annulant les élections en
juillet 1830.
-Cela suscite une révolution à Paris : ce sont les 3 Glorieuses (26-28 juillet 1830). Delacroix leur
consacre un tableau pour montrer toute la force des idéaux de Liberté, du Peuple, mais aussi leur
violence. Charles X doit s’exiler, remplacé par un Roi, Louis Philippe, censé être favorable aux idées
nouvelles. S’il réhabilite le drapeau tricolore, ce souverain déçoit vite, accusé de gouverner de
manière autoritaire au profit des riches bourgeois ; le droit de vote leur est réservé à une minorité.
(suffrage censitaire) En 1848, une nouvelle révolution éclate à Paris ; Louis Philippe doit partir en
Angleterre. Il n’y aura plus de rois en France. La 2 nde république est proclamée, instaurant le suffrage
universel

L’entrée dans l’âge démocratique : de la 2nde République (1848/52) au 2nd Empire (1852/70)

-1848 marque pour la France un double tournant : la fin des Rois et le basculement vers la
démocratie. En effet, la 2nde République accorde le droit de vote à tous les hommes. Pourtant, les
républicains vont vite déchanter. Le suffrage universel profite à leurs adversaires. Louis Napoléon
Bonaparte peut se permettre de faire un coup d’Etat (2 déc 1851), puis d’instaurer un 2 nd Empire
autoritaire, approuvé par le peuple. Comment expliquer ce paradoxe, cette tension entre
république et démocratie ?

I. L’espérance trahie de la 2nde République (1848/52)


-La 2nde République suscite tout d’abord l’euphorie. L’écrivain romantique, Lamartine, en est le porte-
parole idéaliste. Il fait tout son possible pour que cette nouvelle révolution garde le meilleur de 1789
tout en évitant ses excès (guerre et terreur). Des lois sont instaurées pour garantir la liberté
d’expression ; la peine de mort est abolie pour les crimes politiques. Il s’agit de faire triompher la
liberté sans sacrifier l’égalité. Cette Seconde République se montre dans un 1 ertemps soucieuse des
plus pauvres. L’esclavage est interdit ; pour les chômeurs, on crée des Ateliers Nationaux offrant un
emploi, un salaire minimum de 2 francs par jour ; le temps de travail est limité à 10 heures…
-Toutefois, la crise économique continue à sévir. Va-t-il y avoir assez d’argent pour financer cette généreuse
politique sociale? En avril, les 1ères élections parlementaires donnent la majorité à des députés
conservateurs. Les paysans représentent plus de 50% de la population. Or, ils se méfient des républicains de
« gauche » qui, au nom de l’égalité, pourraient augmenter les impôts et remettre en cause la propriété privée.
La nouvelle assemblée conservatrice prend peur face aux flux de pauvres vers Paris, face aux manifestations
parfois agressives qui leur font penser aux « sans-culottes » de 1793. Elle vote la fermeture des Ateliers
Nationaux. En juin 1848, 100 000 Parisiens, se sentant trahis par cette République, dressent des barricades .
L’Assemblée se montre impitoyable. Il est hors de question de céder sous peine de basculer vers le chaos, la
ruine financière et la dictature des « rouges », des radicaux ; l’armée est envoyée ; des milliers d’insurgés sont
massacrés et arrêtés.

-Après les événements de juin 1848, c’est la désillusion qui règne, même parmi les républicains
fervents comme la romancière George Sand. Celle-ci est désespérée de voir le régime politique
supposé valoriser l’égalité tourner le dos à la question sociale, aux plus pauvres. Elle est déçue, mais
pas choquée que ce soit un antirépublicain, Louis Napoléon Bonaparte qui soit élu Président en
décembre 1848. Est-ce si grave qu’il mette fin à cette république qui a trahi le Peuple ?

II. Le Second Empire (1852-1870) : autoritaire, violent, mais populaire…


-Napoléon III n’hésite pas à utiliser la violence pour installer le 2nd Empire. L’armée tire sur les
barricades s’opposant au coup d’Etat du 2 déc 1851. Des milliers d’opposants sont déportés, tandis
que des milliers d’intellectuels, comme Victor Hugo, choisissent l’exil pour fuir le manque de liberté.
Pourtant, le dictateur Napoléon III reste populaire ; il remporte tous les plébiscites de 1852 à 1870.
-Napoléon III peut manipuler le peuple et le suffrage universel. Faute de liberté d’expression et de
presse, la majorité est surtout exposée au point de vue du régime. D’autre part, il s’appuie sur
l’Eglise catholique et les notables de chaque province amener les paysans peu instruits à voter pour
les candidats officiels. Par ailleurs, le césarisme démocratique n’est pas forcément choquant pour
cette France marquée par une longue histoire monarchique et hantée par la mémoire de Napoléon
Ier.

-De plus, Napoléon III a la chance de bénéficier, à la différence de la 2de République, d’un contexte
économique favorable. (industrialisation portée par l’Angleterre, découverte de l’or en Californie …). Il est
vrai aussi qu’il remporte des succès en politique économique (forte croissance), sociale (droit de
grève) et étrangère (guerres victorieuses de Crimée et d’Italie…). Toutefois, il commet une erreur
fatale en 1870 en déclarant la guerre à la Prusse ; elle se transforme en déroute ; le 2nd Empire
s’effondre.

Le Second Empire (1852/70) la transformation économique et sociale de la France.


-Tous les Français connaissent Napoléon Ier. Ce dernier hante la mémoire collective ; plus de 300 000
livres lui seraient consacrés. En revanche, la majorité ignore Napoléon III et son Second Empire
(1852-70). Et, pourtant, d’un point de vue économique et social, le IInd Empire marque une rupture
plus grande que le 1er. C’est lui qui projette la France vers la modernité capitaliste, industrielle et
urbaine.

I. Un tournant économique : l’ouverture au capitalisme symbolisée par les frères Pereire.


-Napoléon III est un leader original. Il est le 1 er chef d’Etat français à accorder la priorité aux questions
économiques et sociales qui le passionnent. Il sait le contexte propice à la modernisation
économique. Le rôle moteur de l’Angleterre et la multiplication des innovations (bateau à vapeur,
télégraphe, train) stimulent les échanges, la mondialisation et la croissance. Et il est convaincu que la
France a besoin de ce développement. Dans un contexte de transition démographique, la majorité
est pauvre.

-Or, la France a pris beaucoup de retard, handicapée par son instabilité politique et son mépris pour
l’Angleterre. Napoléon III est décidé à révolutionner sa politique économique. D’une part, il veut
développer les infrastructures et réseaux de communications : on passe de 3 000 à 18 000
kilomètres de chemins de fer. D’autre part, à l’opposé de son oncle, il signe un accord de libre-
échange avec l’Angleterre (1860). Il s’agit d’ouvrir l’économie française à la mondialisation, lui offrir
de nouveaux marchés et l’obliger à se moderniser en se confrontant à la concurrence. ( vision
libérale/Adam Smith)

-Cependant, le financement de cette modernisation nécessite beaucoup de capital. Napoléon III doit
donc s’appuyer sur la Bourse, les Banques et la bourgeoisie. Les frères Perreire, anciens journalistes
(années 1830) devenus des banquiers millionnaires (années 1860), sont les meilleurs exemples de la
mutation de la France, de l’explosion de richesses sous le IInd Empire et de l’alliance entre le régime
et la finance. Les Frères Perreire, créateurs d’un nouveau type de banques, le Crédit Mobilier, jouent
un rôle clé dans le financement des chemins de fer et des travaux d’Haussmann…

II. Un tournant social et urbain symbolisé par les travaux du Baron Haussmann à Paris.
-La mutation est à la fois économique et sociale. L’essor des chemins de fer a un impact sur les
campagnes. Les paysans les plus fortunés en profitent pour vendre de plus en plus ; enrichis, ils
achètent de nouvelles terres…Dans le même temps, le train favorise l’exode rural et l’urbanisation.
Cependant, c’est dans les villes où le changement est le plus marquant, tout spécialement à Paris.

-Napoléon III aspire à ce que Paris cesse d’être une ville médiévale, pleine de petites rues sales
propice aux révolutions, pour devenir une métropole moderne, stable et propre. Il confie au baron
Haussmann la tâche de moderniser Paris. Des milliers d’édifices et de rues sont détruits, remplacés
par des bâtiments modernes et de larges avenues propices aux échanges. Des centaines de
kilomètres d’égouts, et des parcs sont aménagés. Toutefois, cette révolution urbaine a des
contreparties. La spéculation immobilière contribue à l’embourgeoisement du centre-ville, et à la
relégation des pauvres vers les périphéries. Ce sont les débuts de la gentrification et de la
métropolisation. (voir géo)

III. Les limites et ombres de ce développement économique : une société très inégalitaire.
-L’exacerbation des inégalités s’observe à l’échelle de Paris et de toute la France. Les ouvriers ne
semblent en recevoir qu’une infime partie de l’enrichissement général alors qu’ils travaillent dur.
Napoléon III n’est pas indifférent à la question sociale. Il prend des mesures pour les plus pauvres et
autorise le droit de grève en 1864. Il tente ainsi de rester populaire auprès des ouvriers alors que le
socialisme se développe. La Ière Internationale voit le jour avec Marx qui exalte la lutte des classes
et la révolution pour collectiviser biens de production et créer une nouvelle société sans Argent ni
classe.

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