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Résumé du cours
AUX ÉTUDIANTS :
1
PREMIERE PARTIE
RAPPEL DES TERMES « CULTURE » ET « MEDIATION »
I. La notion de culture
1. Les sciences sociales utilisent le mot « culture » pour parler
d’identité : identité culturelle ;
du patrimoine hérité : patrimoine culturel, voir : les journées du patrimoine ;
des productions littéraires et artistiques, qu’il s'agisse de « culture cultivée » ou de
« culture populaire ». On parle aussi de « culture pub » ;
des productions matérielles ancestrales, traditionnelles, artisanales ;
de symboles et autres représentations propres à des groupes humains.
Les sciences sociales utilisent aussi le mot « culture » dans des expressions comme :
Culture d’entreprise, cultures dominantes et cultures dominées, contre-cultures et cultures
contre, culture jeune, culture de loisirs, etc.
Culture : tout ce qui est produit par l’homme dans le cadre social. Culture désigne
aussi la formation spirituelle.
Le concept ethnologique de culture selon Tylor :
« Culture ou civilisation, pris dans son sens ethnologique le plus étendu, est ce tout
complexe qui comprend la connaissance, les croyances, l’art, la morale, le droit, les
coutumes et les autres capacités ou habitudes acquises par l’homme en tant que membre de
la société. »
Parce que, d’après lui, c’est ce seul présent auquel l’anthropologue a accès.
Problème de sa théorie : il sous-estime les tendances au changement interne propres à
chaque culture, le changement d’après lui ne peut être produit que par la rencontre avec un
extérieur.
Il élabore une théorie qui sera très controversée, celle des « besoins ».
Notion désignant les espaces géographiques où sont diffusés les mêmes éléments culturels
2
et où les différents peuples adoptent des coutumes et des modes de vie semblables ou
apparentés.
WISSLER (1870-1945) a voulu délimiter les aires culturelles
D’après Wissler il y aurait une corrélation entre les cartes d’aires culturelles et les régions
écologiques.
HERSKOVITS : « Les individus d’une société donnée sont si proches de leurs traditions
qu’ils sont beaucoup plus impressionnés par les différences entre eux et leurs voisins que
par les ressemblances. Or, pour le savant qui considère un continent entier, ces différences
sont minimes. Des ressemblances générales distinguent tout un groupe de cultures de tout
un autre groupe »
3
3. La socioculture : une mosaïque pour une société éclatée
6
SAUVAGE,
UNDERGROUND,
CONTRE-CULTURE
3
1
SCOLAIRE
ET ÉLITAIRE
UNIVERSITAIRE (la haute culture)
LA
SOCIOCULTURE
5
POPULAIRE 4
PROFESSIONNELLE
2 (métier, travail)
DE MASSE
(médias,
culture de consommation,
commerciale)
4
4. Pierre Emmanuel et sa définition de la culture
Il distingue:
la culture humaniste
la culture sociale
la culture idéologique
5. L’auberge espagnole
« La culture est devenue une vaste auberge espagnole où, désormais, chacun peut trouver
la réponse mystificatrice qu’il attend de son sort. » (DJIAN)
5
Secteur Dont
- Culture artistique Musique, opéra, ballet, théâtre, littérature,peinture,
sculpture, tissage, etc.
- Culture ethnique ou Festivals, arts et artisanat nationaux, célébrations
populaire collectives, etc.
- Culture liée aux médias Presse, édition, radio, télévision, cinéma, disques et
enregistrements, etc.
- Culture récréative Chasse, pêche, motoneige, camping, natation,
football, hockey, base-ball, parcs et réserves
naturelles, etc.
- Culture liée à Enseignement primaire et secondaire, enseignement
l’éducation technique, universités et collèges communautaires,
éducation des adultes, cours de vulgarisation, etc.
« Cette vision extensive, qui relève à l’évidence du « tout- culturel », a le mérite de tenir
compte à la fois des différents types de pratiques de loisirs, des nouvelles technologies de
diffusion, des divers lieux de formation et des diverses subcultures ou composantes
socioculturelles. » (MOULINIER, op. cit.)
LA CULTURE LE CULTUREL
La culture doit être considérée comme l’ensemble des traits distinctifs spirituels et
matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social et
qu’elle englobe, outre les arts et les lettres, mes modes de vie , les façons de vivre
ensemble, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances.
CULTURE
7
II. Médiation : rappels
1. Définition de la médiation
MEDIATEUR, TRICE, est emprunté au bas latin mediator. Au départ, médiateur est utilisé
en français dans un contexte religieux : Jésus, comme médiateur entre Dieu son Père et les
hommes.
On relève, dès le XIVè siècle, l’usage au sens de « personne qui s’entremet pour
effectuer un accord ».
En Suède, l’ombudsman est une personne intermédiaire en cas de conflit. Le mot
« médiateur » doit une bonne part de son sens actuel à ombudsman.
2
Dictionnaire historique de la langue française, sous la direction de A. Rey, Dictionnaires
Le Robert, 1992.
3
Alain Chante, question 30
8
2. L’importance de la médiation d’après Bernard Lamizet4
5. La fin du socioculturel ?
10
Jean Caune, La culture en action, PUG, 1992, pp. 18-19
5
op. cit., p. 26.
11
III. UN CONCEPT EMERGENT : LA MEDIATION CULTURELLE
« Par la culture, les pratiques sociales singulières deviennent des pratiques collectives: elles
s'inscrivent dans des manifestations et des représentations collectives de la sociabilité, et, dans ces
conditions, elles deviennent effectivement des médiations, puisqu' elles engagent des pratiques
singulières (spectateurs, acteurs, auditeurs, lecteurs, etc.) dans des formes collectives de
représentation de l’appartenance sociale et culturelle (spectacles, musique, livre, etc.). Une fois
mise en œuvre dans la réalité de l’espace public, la médiation donne à la culture une consistance
perceptible et la matérialité sensible d'une prestation réelle, dans l’espace, avec ses costumes, ses
sonorités, sa mise en scène et ses décors. Tandis que l’existence d'un sujet singulier se manifeste,
pour l'autre, au cours de l'expérience du miroir, et tandis que l' existence des formes politiques de
la médiation se manifeste, pour ceux qui y sont soumis, par la mise en œuvre effective de la réalité
de l'exercice d'un pouvoir, l’existence de la médiation culturelle se manifeste, pour ceux qui la
partagent ou s' inscrivent dans les lieux et dans les structures de l' appartenance et du pacte social
qu' elle représente, par la mise en œuvre esthétique de prestations, d'activités ou de représentations
qui ont la matérialité de signifiants et la consistance d’événements. La culture se donne donc à
voir par la mise en œuvre effective de la médiation qu' elle constitue, ce qui renvoie à l' existence
même de l' espace public et à sa raison d'être dans la cité et dans l’espace politique. Tandis que
l'espace privé se définit, dans le droit et dans les formes de la sociabilité, par l’acteur singulier à
qui il appartient (je suis chez quelqu'un), l’espace public, qui ne saurait, au contraire, être la
propriété de quelqu’un, puisqu'il est indistinct, se définit par la mise en oeuvre de pratiques
collectives (manifestations, marché, cérémonies de toutes sortes), ou par la mise en oeuvre de
pratiques représentant la collectivité et l'appartenance collective par la médiation d'une mise en
scène et d’une représentation esthétique. La médiation culturelle donne à voir les formes de
l'appartenance sociale en en faisant les objets et les structures d'une représentation devant le
public, ainsi constitué par le fait même d’assister à la représentation : en assistant ainsi à la
représentation de sa propre appartenance, le public prend conscience de sa propre sociabilité, et,
par conséquent, les citoyens, les membres singuliers de la collectivité, prennent, de la même
manière, conscience de leur appartenance, de leur statut et des lois que celui-ci leur impose. La
médiation culturelle est donc bien plus qu'une structure institutionnelle, elle est bien plus qu’une
organisation des formes de la culture et de la communication : de la même manière que la
médiation du miroir est l'instance par laquelle nous prenons singulièrement conscience de notre
identité par la médiation symbolique de l'image de l'autre, la médiation culturelle constitue
l’instance par laquelle nous prenons pleinement conscience de notre appartenance par la médiation
esthétique d'une représentation. »
12
La sociodynamique de la culture de Moles
Cette expression est en italiques, en référence au site du Ministère d’où elle est extraite.
La substance des notes qui suivent en est issue.
On peut dater de 1959 la création d’un ministère autonome, qui n’a plus pour
mission de gérer les beaux-arts, mais d’assumer le « rôle, à la fois déterminant et
limité, qui revient à l’Etat dans la nouvelle mission culturelle de la collectivité ».
C’est le ministère des Affaires culturelles, qui est confié à André Malraux, de
1959 à 1969.
Mars 1974 : nouvelle dénomination : c’est le ministère des Affaires culturelles et
de l’Environnement.
13
Juin 1974 : Le secrétariat d’Etat à la culture. « la structure s’affaiblit
incontestablement en devenant Secrétariat d’Etat à la culture. Par là même, la Vè
République giscardienne confirme la place modeste qu’elle souhaite attribuer à la
politique culturelle. »6
Mars 1977 : ministère de la Culture et de l’Environnement.
Avril 1978 : ministère de la Culture et de la Communication.
Mai 1981 : ministère de la Culture.
Mars 1986 : ministère de la Culture et de la Communication.
Juin 1988 : ministère de la Culture, de la Communication, des Grands travaux et
du Bicentenaire.
Mai 1991 : ministère de la Culture et de la Communication.
Avril 1992 : ministère de l’Education nationale et de la Culture.
Mars 1993 : ministère de la Culture et de la Francophonie.
Mai 1995 : ministère de la Culture.
Juin 1997 (depuis) : ministère de la Culture et de la Communication
Michel Guy
Fondateur du Festival d'Automne, Michel Guy élargit la diffusion des manifestations artistiques : il
crée " l'Office national de diffusion artistique " (ONDA) chargé d'aider les lieux de spectacles
modestes à travers la France à accueillir des troupes théâtrales et chorégraphiques de format moyen,
et lance la politique des " chartes culturelles " destinée à développer la collaboration sur projets
entre l'État et les collectivités territoriales. Il introduit également dans le cahier des charges des
sociétés de radiotélévision l'obligation de diffuser un quota de manifestations artistiques. Il crée en
décembre 1975 une Direction du Livre qui permet enfin au ministère de la culture de traiter les
questions relatives au livre et aux bibliothèques de lecture publique.
6
cf. site officiel du ministère
7
Ibid.
14
Jean-Philippe Lecat
Ancien député de la Côte d'Or, Jean-Philippe Lecat crée une " Direction du patrimoine " à la suite
du transfert au ministère de l'Environnement et du Cadre de vie d'une partie des attributions de
l'ancienne direction de l'architecture, et il lance " l'Année du Patrimoine " (1980). Il fonde le
Conseil et la Mission du patrimoine ethnologique. L'établissement public du Musée d'Orsay est créé
en 1978, celui de La Villette en 1979. Il fait voter la Loi sur les Archives de 1979.
Une "Délégation à la création, aux métiers artistiques et aux manufactures " regroupe en 1979
l'ensemble des questions relatives aux arts plastiques. Un second Conservatoire national supérieur
de musique est créé à Lyon. Une " mission du développement culturel " et un " service des affaires
internationales " voient le jour en 1979. En matière de communication, il fait adopter la Loi du
27/07/1978 sur la radio-diffusion et la télévision.
Jack Lang
Augmentation du budget, élargissement de son champ d'action à de nouvelles formes d'art, insertion
dans le monde économique, développement de l'audiovisuel. Les Grands Travaux (Arche de la
Défense, Opéra Bastille, Grand Louvre, Bibliothèque Nationale,...).Le budget du ministère est
doublé en 1982 niveau, passe de 2,6 milliards de francs en 1981 à 13,8 milliards en 1993. Cette
croissance budgétaire, à un rythme double de celle de l'Etat, touche tous les domaines : monuments
historiques, recherche, décentralisation théâtrale, archéologie, musées (création de 22 fonds
régionaux d'acquisitions pour les musées), arts plastiques (création de 22 fonds régionaux d'art
contemporain). Une politique de contrats et de conventions Etat-collectivités territoriales est
relancée au rythme d'une centaine chaque année. Une modernisation des équipements culturels est
perceptible à l'échelle du territoire national. Plusieurs grandes institutions de formation sont créées
ou rénovées : École nationale du Patrimoine, Institut des hautes études cinématographiques, les
deux Conservatoires nationaux supérieurs de musique (Paris et Lyon), l'École du Louvre,... En 12
ans, plus de 8 000 postes sont créés dans le domaine culturel.L'éducation artistique en milieu
scolaire se modernise, de nouvelles disciplines sont enseignées (théâtre, cinéma, histoire des
arts,...), des opérations de sensibilisation se développent pour les enfants : classes culturelles,
collège au cinéma, classes du patrimoine,... Le champ d'action du ministère s'élargit à d'autres
formes d'art : chanson, jazz, arts de la rue, mode, design, création industrielle, tandis que se créent
de nouveaux lieux de diffusion (Centre national de la Chanson, Festival International de Bande
Dessinée, ...). Tenant compte de la modernité économique, et du développement de la "culture
d'appartement", grâce aux bonds en avant de l'électronique le ministère est conduit à se préoccuper
davantage des industries culturelles (livre, disque, cinéma, audiovisuel) dans un souci de régulation
du marché (mécanisme d'aides à l'industrie cinématographique, prix unique du livre, quotas de
diffusion de chansons francophones à la radio,...). Ce rapprochement culture-économie se traduit
également par l'encouragement au mécénat (incitations fiscales). Cette époque sera aussi celle des
mutations dans le paysage audiovisuel : multiplication des chaînes, privatisation d'une partie du
secteur public, ouverture des ondes, instauration d'institutions de régulation.
15
DEUXIEME PARTIE : CULTURES, GROUPES, MONDIALISATION,
MONDIALITE
Introduction
Denys Cuche signale que la culture est avant tout une production historique, « une
construction qui s’inscrit dans l’histoire ». Plutôt que de considérer qu’une culture serait le
résultat d’un groupe pris isolément, l’auteur préfère montrer l’importance des relations
intergroupales, et de l’histoire de ces dernières. L’approche des cultures doit ainsi se faire
en diachronie et en synchronie.
Deux pistes, deux approches possibles :
1° On peut étudier une culture en diachronie, compte tenu de son évolution, de son histoire.
Ex : « Evolution de la culture française »…
2° On peut étudier une culture en son état actuel, « ici et maintenant ». On peut l’étudier
dans ses rapports actuels avec d’autres cultures, sans considérer l’intervention du temps.
Ex : « Le multiculturalisme en France aujourd’hui ».
La notion de conflit mimétique a été largement analysée par René Girard. (étude des
mythes)
Toutes les cultures s’élaborent dans le cadre de rapports sociaux. Cuche rappelle que tous
les rapports sociaux sont inégalitaires. Les hiérarchies sociales sont à l’origine des
hiérarchies culturelles.
Ainsi, on peut, afin de demeurer dans notre cadre, signaler qu’une culture est plus ou moins
fortement médiatrice selon qu’elle est la culture de la classe dominante ou bien d’une classe
dominée
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Même si ce n’est pas forcément de droit, il n’y a pas, de fait d’égalité entre les cultures.
Les cultures n’existent pas indépendamment les unes des autres. Elles existent les unes par
rapport aux autres, comme les classes sociales existent les unes par rapport aux autres.
Certes, les déclarations officielles (dont celle de l’Unesco précitée) rappellent que toutes les
cultures méritent les mêmes égards. Et toutes méritent des actes de médiation (toute culture
a besoin de médiation). Mais force est de constater que toutes les cultures ne sont pas
socialement reconnues de même valeur.
Cuche envisage une approche « polémologique » (polemos = guerre) des cultures.
Les cultures (Cuche, p. 68), « se développent dans la tension, parfois dans la violence».
Cette lecture des rapports interculturels est séduisante, mais très réductrice, comme le
signale Cuche. L’erreur consiste à croire que le plus faible ne peut que se voir imposer la
culture du plus fort. Certes, il y a toujours inégalité de positions dans les champs social,
politique, économique et culturel. Donc, dans un pays donné, ou bien dans un système
supranational comme l’Europe, il y a des situations de force ou de faiblesse culturelle
relatives. Ce qui n’implique pas qu’une culture dominée se trouve sans atouts : « même le
plus faible ne se trouve jamais démuni dans le jeu culturel » (Cuche, p. 69). Une culture,
dite dominée n’est pas nécessairement écrasée ou dépendante. Dans son évolution, une
culture dominée est nécessairement soumise aux influences d’une culture dominante. Mais
une culture, pour dominante soit-elle, subit des influences plus ou moins fortes, de la
culture (ou des cultures) dominée(s).
Ajoutons qu’une culture dominée peut résister à la culture dominante. Aucune culture ne
peut s’imposer, se substituer totalement à une autre culture. Aucun groupe social ou
ethnique ne peut s’imposer totalement à un autre groupe. L’humanité produit en
permanence de la différence. Le concept d’évolution des cultures implique que rien n’est
totalement gagné ni perdu pour toujours. Certaines cultures plient, s’adaptent, imitent les
autres cultures, mais sans rompre pour autant.
Un autre aspect mérite qu’on s’y arrête :
le contact entre cultures peut être dynamisant. En effet, une culture dominante peut changer
au contact des cultures qu’elle domine ; une culture dominée peut éventuellement, au
contact de la culture qui la domine, puiser de quoi se reconstruire et perdurer… Cuche
rapproche culture dominée et culture populaire :
« Evoquer la question des groupes dominés, c’est inévitablement évoquer le débat autour
de la notion de “ culture populaire”.
Au XIX° siècle, les folkloristes se sont intéressés aux traditions populaires, singulièrement
aux traditions paysannes. Au XX° siècle, de nombreux projets culturels s’attachent à servir
la cause des cultures populaires, cultures dominées. Deux théories s’affrontent en la
matière, qu’on va essayer de montrer.
Deux thèses en opposition:
a) La thèse qui conduit au mépris des cultures populaires.
b) A l’opposé, il y a des gens qui considèrent que les cultures populaires sont authentiques,
qu’elles peuvent être égales ou même supérieures à la culture dominante, à la culture
cultivée des classes sociales dominantes, culture élitiste.
Après avoir exposé ces deux thèses opposées, je propose une mise au point :
Avertissement : il ne s’agit pas de dire ici que les peuples ne peuvent que consommer les
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biens et produits culturels produits par les médias de masse!
Comment définir « culture de consommation » ?
Il faut considérer que les gens ordinaires ont bien une intelligence pratique, que les
publics ne sont pas constitués de clones 100% conditionnés par la massification.
Il faut aussi considérer que les publics ont une réaction à ce qu’on leur propose (impose).
Les publics négocient, s’approprient ce qu’on leur propose.
Les publics trient, puis font un certain usage de ce qu’on leur propose. Ce tri, cet usage, on
peut les appeler une production, que Michel de Certeau appelle des « manières de faire
avec » .
La culture populaire est une culture de consommation au sens noble, car elle négocie ce
qu’on lui propose.
Cette négociation est une production.
Ce qui importe, c’est l’usage que les publics font de ce qu’on leur propose. Un public
intellectif choisit, c’est-à-dire qu’il élimine ou refuse ce qui ne lui convient pas.
Les publics ont donc des opérations culturelles qui consistent d’une part à accepter, d’autre
part à refuser ce qu’on leur propose.
On posera donc l’ambivalence des cultures populaires. Toute culture populaire est à la fois
culture d’acceptation et culture de refus. Elle est donc culture d’acceptation et de
dénégation de la culture dominante.
Ces deux logiques s’opposent, mais coexistent dans toutes les cultures populaires, comme
Grignon et Passeron l’ont montré.
(Claude Grignon et Jean-Claude Passeron, Le Savant et le Populaire, Gallimard/Le Seuil,
1989.)
Les publics ont donc des opérations culturelles qui consistent d’une part à accepter, d’autre
part à refuser ce qu’on leur propose.
On posera donc l’ambivalence des cultures populaires. Toute culture populaire est à la
fois culture d’acceptation et culture de refus. Elle est donc culture d’acceptation et de
dénégation de la culture dominante.
Dans cette partie du cours, seront abordés les thèmes suivants dont le médiateur sait qu’ils
sont déterminants dans ses entreprises :
1. Le « kit » identitaire
2. Intégration/assimilation
3. Les « modèles » nationaux
4. Le multiculturalisme et le communautarisme devant les principes républicains
5. L’interculturalité.
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1. Le « kit » identitaire
IDENTITE FEDERATRICE
Certaines actions culturelles résultent du fait que l’on peut envisager la culture médiatrice,
un ciment qui permettrait, tel un liant, de réunir ce qui était encore désuni.
- Par exemple des groupes ethniques encore en marge du groupe considéré comme
majoritaire ;
- Par exemple des banlieues en marge de la cité.
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2. Intégration ? Assimilation ?
Ce qui vient d’être dit montre que l’on peut en venir à imaginer des événements culturels (outre
d’autres interventions concomitantes) visant à RELIER une minorité culturelle à une majorité.
Etant bien entendu que la minorité devrait peu à peu devenir semblable à la majorité et que les
minoritaires/marginaux doivent se fondre dans une société dont ils doivent accepter les règles,
donc la culture. Par la culture diffusée sur le mode de la démocratisation de la culture.
D’où l’idée de culture comme médiateur conduisant a une intégration.
Mais, à l’heure actuelle, ce modèle semble bien ne plus avoir cours. Dans de nombreux pays on
s’efforce maintenant de dégager une sorte de « supra identité » qui respecterait toutes les
diversités ethniques et culturelles. Serait alors prise en compte une hétérogénéité de fait des
sociétés contemporaines, indépendante des « modèles » nationaux de gestion de la diversité
ethnique et culturelle.
La médiation culturelle - comprendre : « le travail des médiateurs culturels » - dépendant
désormais de cet état de fait. On va voir comment Marco Martiniello dit qu’on peut « sortir des
ghettos culturels ».
Marco Martiniello, Sortir des ghettos culturels, Presses de Sciences Po, Paris, 1997
Martiniello: « Si toutes les sociétés humaines sont hétérogènes, chacune d’entre elles présente
une configuration particulière de la diversité culturelle et identitaire. »
Il convient de distinguer les deux types d’hétérogénéité culturelle :
Martiniello dénonce ce schéma qu’il juge trop caricatural, simplificateur. Il démontre que
ceci ne correspond à aucune réalité.
En effet, on observe :
Alors que le « modèle » français, assimilationniste, ne saurait tolérer la mise en scène des
particularismes et autres identités minoritaires, la monstration institutionnalisée des racines
fait partie du paysage touristico-culturel contemporain. On peut appeler cela
le multiculturalisme « soft » ou « light ».
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© Bernard Tabuce
22
4. Multiculturalisme et communautarisme devant les principes républicains (Taguieff)
La thématique de l’« égalité des droits » doit être rapprochée d’un vulgaire égalitarisme qui
nivelle toute différence, paradoxalement au nom du « droit à la différence ». Et cet
hyperpluralisme, qui découle directement du « droit à la différence », s’incarne
parfaitement pour Pierre-André Taguieff dans l’idéologie multicommunautariste. Au nom
de l’hyperpluralisme, c’est peu à peu le pluralisme en tant que tel qui est visé, par la
réduction de la liberté d’expression et par la constitution de rentes politico-communautaires
sur fond de « nouvelle laïcité » ou «laïcité ouverte».
« Le pluralisme est sujet à des corruptions idéologiques » pour Taguieff. Il importe donc au
plus haut point de dévoiler l’idéologie cachée des hérauts de la « tolérance » et de la «
différence ».
La société interculturelle. Vivre la diversité humaine de Gilles Verbunt8 est un livre somme
toute généreux et optimiste, dans lequel l’auteur présente un aspect positif de la
8
Gilles Verbunt, La société interculturelle. Vivre la diversité humaine, Paris, Seuil, 2001
23
mondialisation : l’interculturel. Verbunt voit en en la mondialisation une situation que
l’homme n’a jamais rencontrée jusqu’alors : une communication mondiale faite de
« rencontres et échanges généralisés entre cultures. (…) L’interculturel est déjà un fait, qui
ne fera que s’amplifier demain. ». L’interculturalité y est présentée comme une voie
normale.
L’interculturel est l’effort pour créer un type de lien social et de philosophie politique
susceptibles de concilier la globalisation avec le besoin de communautés à taille humaine.
La société interculturelle (ou l’interculturel tout court) est une manière de concilier
l’universel et le particulier, le global et le local.
Pour le moment, il n’y a pas de modèle : aucune nation n’a réalisé une vraie société
interculturelle. En même temps, dans nos pays occidentaux, des initiatives sont prises, qui
se donnent les étiquettes de multiculturel, transculturel, interculturel. Ces termes flous
s’expliquent historiquement ; ils prennent un usage « tous azimuts » et imprécis, qui n’est
pas favorable à la prise au sérieux du projet de société interculturelle car ils la cantonnent
souvent au monde restreint des militants humanistes.
En réalité, l’outillage conceptuel traditionnel est incapable de décrire de façon adéquate ce
qui se passe. La culture et l’identité ne sont peut-être pas ce que nous pensons. Au temps de
la mondialisation, pour vivre mieux le tourbillon qui nous emporte, il importe aujourd’hui
de poser autrement les problèmes de personnes et de société dans leurs rapports à la culture.
« Autrement » signifie d’abord ceci : abandonner l’idée qu’il est bon et normal de vivre
dans un seul milieu culturel, avec une identité homogène et en compagnie de gens de même
origine.
Gilles Verbunt, op. cit., p. 10
Introduction
- Les livres de Jean-Pierre Warnier et de Gérard Leclerc sont les références de cette partie.
La lecture de ces ouvrages est indispensable, le cours ne saurait les remplacer.
1. Les cultures-traditions
Il y a les cultures qui, en plus d’être fondées sur la tradition, sont puissamment marquées
par le phénomène industriel.
Les cultures sont diverses, enracinées. Ce qui contraste avec la diffusion planétaire des
biens et des produits culturels de l’industrie. Là, rien n’est ancré, localisé, spécifié. Ce
système est générateur de l’ethnocide* : il tue les cultures locales, singulières.
- Deux théories, deux mots pour exprimer des chemins différents : convergence et
différence.
(explication)
- Remarque sur l’érosion des cultures singulières.
- Sur le local et le global. (cours)
Le concept de résistance
La Convention vise à réaffirmer les liens qui unissent culture, développement et dialogue et à
créer une plate-forme innovante de coopération culturelle internationale. A cette fin, elle
réaffirme le droit souverain des Etats d’élaborer des politiques culturelles en vue de « protéger et
promouvoir la diversité des expressions culturelles », d’une part, et de « créer les conditions
permettant aux cultures de s’épanouir et interagir librement de manière à s’enrichir mutuellement
», d’autre part (article premier).
Ce faisant, une série de principes (article 2) garantit que toute mesure destinée à protéger et à
promouvoir la diversité des expressions culturelles n’entrave pas le respect des droits de l’homme
et des libertés fondamentales « telles que la liberté d’expression, d’information et de
communication, ainsi que la possibilité pour les individus de (les) choisir… ». De plus, le «
principe d’ouverture et d’équilibre » assure que lorsque les États adoptent des mesures pour
favoriser la diversité des expressions culturelles, « ils devraient veiller à promouvoir, de façon
appropriée, l’ouverture aux autres cultures du monde ».
Les droits et obligations des Parties (articles 5 à 11) comprennent une série de politiques et
mesures visant à protéger et à promouvoir la diversité des expressions culturelles, à savoir
aborder la créativité avec toutes les implications qu’elle connaît dans le contexte de la
mondialisation où les diverses expressions sont mises en circulation et rendues accessibles à tous
par l’entremise des biens et services culturels.
A ce titre, les Parties, reconnaissant le rôle fondamental de la société civile, s’efforceront de créer
un environnement encourageant les individus et les groupes sociaux « à créer, produire, diffuser
et distribuer leurs propres expressions culturelles et à y avoir accès, en tenant dûment compte des
conditions et besoins particuliers des femmes, ainsi que de divers groupes sociaux, y compris les
personnes appartenant aux minorités et les peuples autochtones » et « de reconnaître l’importante
contribution des artistes et de tous ceux qui sont impliqués dans le processus créateur, des
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communautés culturelles et des organisations qui les soutiennent dans leur travail, ainsi que leur
rôle central qui est de nourrir la diversité des expressions culturelles ».
Le souci d’assurer une cohérence entre la Convention et les autres instruments internationaux
existants a guidé les États vers l’inclusion d’une disposition (article 20) visant à assurer une
relation de « soutien mutuel, complémentarité et non-subordination » entre ces instruments. En
même temps, « rien dans la présente Convention ne peut être interprété comme modifiant les
droits et obligations des Parties au titre d’autres traités auxquels elles sont Parties ».
La Convention établit une série de mécanismes de suivi visant à assurer une mise en œuvre
efficace du nouvel instrument. Parmi ceux-ci, un mécanisme non contraignant de règlement des
différends permet d’aborder, dans une perspective strictement culturelle, d’éventuelles
divergences de vues sur l’interprétation ou l’application de certaines règles ou principes relatifs à
la Convention (article 25). Ce mécanisme encourage d’abord la négociation, puis le recours à la
médiation et aux bons offices. En dernier recours, une procédure de conciliation peut être
engagée. La Convention ne prévoit aucun mécanisme de sanctions.
Enfin, il faut rappeler que l’Acte constitutif de l’UNESCO lui donne mandat, à la fois de
respecter la « féconde diversité des cultures » et de « faciliter la libre circulation des idées par le
mot et par l’image », principes réaffirmés dans le Préambule de la Convention. L’Organisation,
qui fêtera en novembre prochain son 60e anniversaire, n’a pas ménagé ses efforts pour remplir
cette double mission. Avec cette Convention, elle complètera utilement son action normative
visant à défendre la diversité culturelle dans toutes ses manifestations, et plus particulièrement les
deux piliers de la culture : patrimoine*** et création contemporaine.
*** Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l'importation,
l'exportation et le transfert de propriétés illicites des biens culturels (1970) - Convention sur la
protection du patrimoine mondial, culturel et naturel (1972) – Convention pour la sauvegarde du
patrimoine culturel immatériel (2003)
Source Communiqué de presse N°2005-128
Auteur(s) UNESCOPRESSE
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III. DE LA MONDIALISATION DE LA CULTURE À LA
MONDIALITÉ DE LA CULTURE
Dans La mondialisation culturelle, Gérard Leclerc pose, dès son introduction, une
distinction entre la mondialisation économique et politique et la mondialisation
culturelle.
Le rôle des musées dans notre relation avec les œuvres d’art est si grand, que nous avons
peine à penser qu’il n’en existe pas […] et qu’il en existe chez nous depuis moins de deux
siècles. Le XIXème siècle a vécu d’eux, nous en vivons encore et oublions qu’ils ont imposé
aux spectateurs une relation toute nouvelle avec l’œuvre d’art. Ils ont contribué à délivrer
de leur fonction les œuvres d’art qu’ils réunissaient.
Malraux a développé l’idée d’un déplacement du sens et de l’usage de l’objet opéré par le
musée. Cette opération participe à la constitution d’un patrimoine universel symbole de
l’identité humaine. C'est en quelque sorte l’aboutissement de l’idéal humaniste de l’esprit
des Lumières. Au 20ème siècle, tous les pans de l’activité humaine sont consignés sous
forme muséale.
En effectuant cette sélection, les conservateurs procèdent par conséquent à une extraction
des objets du flux du vivant. Faire entrer un tableau ou tout autre chose au musée, c’est le
soustraire à la vie commune, aux changements de mains, au vieillissement, à la mort…
pour le placer dans la perspective d’une histoire universelle de l’humanité. Cependant, en
matière d’art contemporain, on assiste à un renversement du processus décrit par Malraux
dans la mesure où les œuvres montrées sont destinées au musée dès leur création. Le musée
n’est plus une suspension mais devient la destination de l’art.
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Définition du « musée imaginaire », de nos jours:
Ainsi, le « musée imaginaire », c’est « la mondialité culturelle en tant qu’elle concerne le
domaine de l’art, accomplie à travers la confrontation, pour la première fois dans
l’histoire de l’homme, de toutes les formes de création artistique ayant existé parmi
l’ensemble des civilisations. »
Leclerc, op. cit., p. 299.
On pourrait, bien qu’il soit lapidaire, définir le « musée imaginaire » de Malraux par ce
passage emprunté à Patrice Béghain :9
Leclerc part donc de l’idée de Malraux, visionnaire, qui peut évidemment s’appliquer à la
situation actuelle.
L’art du Monde est accessible à tous grâce aux moyens de communication et d’information
qui, par exemple, nous permettent de « connaître » la Joconde même si nous ne l’avons
jamais vue en réalité.
9
Patrice Béghain , Le patrimoine : culture et lien social, Paris, Presses de Sciences Po, 1998.
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Pour Malraux, l’expression « Musée Imaginaire » à laquelle il est resté attaché ne signifiait
pas le musée des préférences esthétiques de chacun, mais l'ensemble des oeuvres qui
s'imposent à la sensibilité d'une époque et à pratiquement tout le monde, puisque ces
œuvres sont accessibles grâce au moyens modernes de communication et de duplication.
Ces oeuvres, notre siècle les a découvertes, ou il a appris à les regarder autrement.
Pour Malraux, la modernité est la confrontation, a partir d'une civilisation devenue agnostique (la
civilisation occidentale ), de toutes les formes artistiques ayant existe, de toutes les créations
esthétiques ayant, au sein des civilisations historiques, prétendu au statut d'absolu. Toutes les
civilisations ont produit « un art », des formes de ce que nous appelons l'art; mais aucune n'avait,
avant la nôtre, conçu « l'art » en lui-même, ne l'avait envisagé en tant que forme de création
humaine autonome, séparable des autres formes de production culturelle : « Les idoles deviennent
des œuvres d'art en changeant de références, en entrant dans le monde de l'art que nulle civilisation
ne connut avant la nôtre » (1957, p. 20). C'est pourquoi Malraux a pu affirmer, dans La
métamorphose des dieux, que le « monde de l'art » est né avec la civilisation moderne universelle. II
est né des conquêtes, des explorations, des fouilles archéologiques accomplies par les conquistadors
de l' Amérique, les explorateurs de l' Afrique, les chercheurs orientalistes... Pour la première fois
existe une tradition mondiale, universelle. Notre culture réunit, rassemble dans une présence
commune les statues égyptiennes et sumériennes, les sculptures de Chartres et celles de Michel-
Ange, les fresques de Piero de1la Francesca et les toiles de Rembrandt, les fresques de Lascaux et
les peintures de Van Gog, les fresques d' Ajanta et celles de Saint-Savin, Versailles et la Cite
interdite, le Taj Mahal et la Grande Mosquée de Cordoue... « Aucune civilisation, avant la nôtre, n'a
connu le monde de l'art créé par les artistes pour qui l'idée d'art n'existait pas » (1957, p. 3). Notre
civilisation présente la particularité unique de reconnaître comme art non seulement ses propres
créations esthétiques, mais l'ensemble des productions créées par tous les hommes d'autrefois et
d'ailleurs : « L'art d'une civilisation est à la fois celui qu'elle crée, et l'ensemble des figures présentes
pour elle. La Renaissance n'a pas apporté seulement un nouvel art des vivants, mais encore un
nouvel art des morts ; notre ère n'apporte pas seulement sa peinture, mais encore celle de son Musée
imaginaire » (1957, p. 20).
Dans toutes les civilisations du passé, l'art a été lié à la religion: l'art était un art religieux, un art
sacré. Dans notre civilisation, l'art est devenu agnostique en s'autonomisant par rapport à la religion.
La civilisation moderne séculière, en constituant l'art comme un monde en soi, est amenée à
reconnaître en même temps la dimension sacrée qu'a possédé l'art antérieurement à la modernité
occidentale : « La première civilisation agnostique, ressuscitant toutes les autres, ressuscite les
œuvres sacrées » (1957, p. 1). La civilisation occidentale, en inventant l'approche comparative, en
rassemblant sous un œil à la fois esthétique, historique et scientifique, l'ensemble des productions
humaines (celles du moins qui n'ont pas été détruites au fil des temps), invente la modernité
transculturelle. La civilisation occidentale est une réalité « transcivilisationnelle » : « Le Musée
imaginaire, qui n 'a d'autre lieu que l'esprit de chacun, ne veut pas être l'héritage d'une nation,
comme les offices ou le Prado, ni même d'une civilisation, comme le Louvre, la National Gallery de
Londres ou celle de Washington. En lui les grands arts européens deviennent de grands arts parmi
d'autres, comme l'histoire de l'Europe est devenue pour nous une histoire parmi d'autres » (1957, p.
22).
La civilisation occidentale ne construit plus de cathédrales, elle ne produit plus d'art sacré. Elle a
cessé de faire jouer à l'art une fonction religieuse, depuis qu'elle a perdu une partie de sa croyance
dans les dieux. Elle construit par contre des musées, et voit dans l'art une forme nouvelle de
l'absolu, comme elle voit dans l'éternité des oeuvres d'art un succédané possible de la mort des
dieux. Est-ce parce qu'en confrontant l'ensemble des oeuvres d'art, elle ne peut plus croire aux dieux
que chacune d'entre elles était censée apprivoiser ? Est-ce parce que, ne croyant plus aux dieux, elle
peut regarder d'un regard purement « esthétique » ou « esthétisant » des « objets » qui autrefois
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furent porteurs de valeurs religieuses, donc non purement « esthétiques » ? « Le musée transforme
l'oeuvre en objet » (1957, p. 21).
P. 302-303
En soi, cette « bibliothèque de Babel, si elle était imaginée comme un outil rassembleur,
unificateur, pourrait être la meilleure et la pire des choses :
Dans le meilleur des cas, cette mondialité culturelle révélerait points communs et
différences. On passerait avec bonheur de la séparation des cultures à des situations de
contacts généralisés, une acculturation à l’échelle mondiale, une « interculturalité » à
l’échelle globale.
Dans le pire des cas, au lieu d’aider les hommes à surmonter leurs antagonismes, cela
pourrait les conduire de conflits culturels en confrontations dramatiques.
Leclerc, donc, ne confond pas contacts culturels et unité culturelle. Il fait preuve d’un
optimisme prudent :
« Le pire est possible, mais pas sûr ».
Ainsi, la mondialisation de la culture est peut-être un processus pouvant conduire à une
situation catastrophique : l’ethnocide généralisé, c’est-à-dire la mort des cultures et des
diversités culturelles.
Cela peut tout aussi bien être un processus conduisant à une situation positive, une diversité
dans l’unité.
Mais la prudence s’impose : la situation positive, si elle est atteinte (?) devra faire l’objet de
soins très attentifs, puisqu’on sait quel fut le sort de la tour de Babel…
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Les enjeux du XXIè siècle et des siècles à venir sont énormes. Les politiques culturelles
nationales et internationales, on le voit maintenant (on l’a vu avec la diversité culturelle et
le travail de l’Unesco) seront déterminantes, non seulement pour la seule préservation de la
(des) culture(s) de chaque pays, mais aussi pour l’Homme et la Paix.
Djian publie en 2005 Politique culturelle : la fin d’un mythe. Paris, Gallimard, 2005.
Comment fonder un principe commun de reconnaissance entre droits culturels inhérents à chaque
culture, quand on sait que chacune est à elle-même sa propre juridiction, sa propre norme, et qu'elle
ne se départira pas si aisément de ses critères du licite et de I'illicite, du bien et du mal, du juste et
de I'injuste, de I'obéissance et de la transgression, de I'innocence et de la force ? II y a un
hermétisme propre, interne à chaque conviction culturelle, qui rend inextricable le désaccord
ontologique entre elles. Avec la notion de droit culturel, c'est-à-dire de légitimité propre à chaque
culture, il y a déjà la reconnaissance implicite d'une morale valable pour tous les hommes. Aucun
acte ne pourrait plus être répréhensible aux yeux de la conscience universelle, non pas parce qu'il ne
serait pas condamnable en soi, mais parce qu'il n'y aurait plus de conscience universelle pour
I'affirmer. Pour surmonter cette irrésolution, il faudrait imaginer une instance supérieure dont le
génie comparatif aurait su extraire un nouveau syncrétisme supraculturel, prescriptible pour toutes
les cultures. Mais qui pourra occuper cette position de souveraineté incontestable ? Quelle raison
supérieure viendra au bout de toutes les passions culturelles si tant est que le mot raison ait une
signification de jugements similaires dans toutes les cultures ? Nous touchons là, avec le pluralisme,
la question du malentendu intellectuel et affectif entre les cultures. »
Hélé Beji, in Jérôme Binde (dir.), Entretiens du xxe siècle, Unesco/Albin Michel, 2004.
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« Tandis que le multiculturalisme permet d'occulter une part de la question de l'inégalité, le travail
pédagogique mobilise peu les artistes. On assiste, en arrière-fond, à une tentative de redéfinition de
la notion de culture populaire, assimilée aux cultures minoritaires. »[F. Benhamou, 2004]. En «
dévitalisant spirituellement » la culture, la politique a instrumentalisé son objet au profit d'actions
festives, communautaires et récréatives « païennes » dont le « local » est le meilleur terreau. Face à
un « global » anxiogène qui homogénéise, l'identitarisme, associé au communautarisme, ferme les
portes au lieu de les ouvrir ; érige des murs au lieu de construire des ponts. En quoi les politiques
culturelles, qu'elles soient locales, nationales ou internationales, donnent-elles le change en
favorisant radicalement des initiatives artistiques allant dans l'autre sens ? Quand elles existent, elles
sont au mieux objet de curiosité, au pire banalisées par l'absence d'enthousiasme de pouvoirs
publics toujours prompts à la suspicion. Chaque fois que ces initiatives locales prennent des formes
originales et expérimentales ouvertes sur le monde, il faut des trésors d'ingénuité, de persuasion et
de combativité pour faire en sorte que le local se l' « approprie». On peut citer l'exemple du
comédien Robin Renucci qui, chaque été, réunit en Corse des centaines d'amateurs et de
professionnels du théâtre pour créer, dans un esprit d'éducation populaire fraternel et exigeant, une
rencontre qui ne doit son succès qu’à son engagement et à sa notoriété ; ou celui du festival des
Vieilles Charrues en Bretagne, créé sous l'impulsion de Christian Troadec, devenu depuis maire de
Carhaix, qui mobilise des milliers de bénévoles dans le seul but de retrouver une autre manière de
défendre, par la musique, une certaine conception de la solidarité et du développement local. Ou
encore celui du Burkina Faso, où, depuis un quart de siècle, se tient à Ouagadougou un festival
panafricain de cinéma populaire qui défend, dans des conditions improbables et sans véritables
moyens, une production bien éloignée des canons esthétiques reconnus en Occident. Des milliers de
projets naissent ici ou là sur la terre dans un esprit où l'engagement, le partage et l'exigence sont
partie prenante d'un contexte géoculturel local mais en aucun cas d'une démarche identitaire voulue,
consciemment ou inconsciemment, par des populations ou leurs élus. Cette difficulté de la culture à
composer avec l'universalité et la particularité, le global et le local, aurait dû trouver sa solution
dans le politique. « Les cultures, dit Alain Touraine, sont toujours apparues comme étant ou dans le
ciel ou trop bas sur terre, par conséquent à mi-distance entre le social et le divin. Et c'est le
politique, inventé pour cela, qui a été désigné pour les concilier. Le problème, c'est que nous
sommes confrontés à l' affaiblissement du politique. » Une politique qui considère la culture comme
un segment de sa légitimité et non comme un ressort de son action.
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