Vous êtes sur la page 1sur 16

Monsieur BOUVIER

Lycée Masséna
Histoire
Première – Tronc commun
Année scolaire : 2023- 2024.

HISTOIRE

THÈME I :
« L'Europe face aux révolutions ».

INTRODUCTION :

L'année 1789 est une rupture historique majeure en France, en Europe et dans le monde, au point qu'elle
marque le passage de l'époque Moderne à l'époque Contemporaine. La période révolutionnaire s'ouvre en mai
1789 à Versailles (ouverture des États Généraux). Elle ne s'achève qu'en 1815 (bataille de Waterloo qui met fin à
la puissance française ; Restauration avec le retour au régime monarchique sous Louis XVIII et Charles X, frères
de Louis XVI ; Congrès de Vienne, qui fixe les frontières et les rapports de puissance en Europe pour l'essentiel du
XIXème siècle). Elle est marquée par différentes périodes (Monarchie Constitutionnelle, Convention, Directoire,
Consulat, Empire) et se montre extrêmement dense en événements marquants. Tout le XIXème siècle européen est
marqué par l'onde de choc de la Révolution, pendant laquelle de nombreux éléments de notre vie
quotidienne sont nés.
Problèmes :
- En quoi la Révolution fut- elle une rupture historique ?
- Comment a- t- elle donné naissance à une France nouvelle ?
- En quoi exprime-t-elle une nouvelle conception de la Nation ?

Plan d'étude :

I- 1789- 1792 : « Vive le Roi ! Vive la Nation ! »


1- La crise de la monarchie absolue de droit divin : (rappel des trois derniers cours de Seconde)
a- Les remises en questions de l'absolutisme et de la société d'ordres : la question des privilèges.
b- La crise économique : un royaume en grande agitation.
c- Le problème central de la dette : le déclencheur / révélateur de la crise.
d- La convocation des États Généraux et la rédaction des cahiers de doléances.
2- L'année 1789 : le tournant de la révolution :
a- La révolution politique à Versailles (mai- juin 1789)
b- La révolution politique et sociale à Paris : le tournant de la prise de la Bastille (14 juillet 1789).
c- La fin de la monarchie absolue de droit divin (août 1789).
3- Les espoirs déçus et l'échec de la monarchie constitutionnelle :
a- La naissance de l'opinion publique et de la vie politique / démocratique.
b- La fête de la Fédération (14 juillet 1790) : l'unité de la Nation et le triomphe des idéaux de 1789.
c- La rupture entre le roi et la Nation (la fuite à Varennes).

II- 1793- 1799 : « Vive la République ! »


1- 1793- 1794 : la Convention et la Terreur.
a- Les causes de la Terreur :
- La crise économique continue.
- La France face à l'Europe coalisée.
- Les contestations intérieures à la Révolution.
- La faiblesse de l'État et les luttes de factions.
b- Les formes / pratiques de la Terreur :
- La Terreur légale : le gouvernement révolutionnaire.
- La Terreur dans les provinces : les représentants en mission (le cas de la Vendée).
- La Terreur populaire: les Sans- Culotte.
c- Les bilans de la Terreur :
- Le bilan humain.
- Le bilan politique.
- Le bilan militaire.
2- 1794- 1799 : Thermidor, le Directoire et la République bourgeoise.
a- Le processus de sortie de la Terreur : la République thermidorienne.
b- Le Directoire : la « République des notables » (1795- 1799).
c- Les victoires françaises en Europe.

III- 1799- 1815 : « Vive Bonaparte ! Vive l'Empereur ! »


1- 1793- 1799 : l'ascension d'un ambitieux... du « général Bonaparte » au « Citoyen Premier Consul ».
a- Les premières armes pendant la Terreur : le siège de Toulon (1793).
b- L'accès à la célébrité : la campagne d'Italie et la naissance d'un héros (1796- 1797).
c- La campagne d'Égypte : la naissance d'un mythe et le retour de « l'homme providentiel » (1799).
2- 1799- 1804 : Le Consulat.
a- Le coup d'État du 18 Brumaire.
b- La Constitution de l'An VIII : un régime personnel et autoritaire.
c- L’œuvre législatrice : « les masses de granit ».
3- 1804- 1815 : le Premier Empire.
a- Napoléon Ier, « Empereur des Français ».
b- L'Europe napoléonienne.

I- 1789- 1792 : « VIVE LE ROI ! VIVE LA NATION ! »

Problèmes :
- Comment passe-t on- de la contestation de la Monarchie absolue de droit divin aux États Généraux de
Versailles, puis à la Révolution proprement dite ?
- En quoi la Révolution est- elle une rupture / un tournant historique majeur ?
- Comment la Monarchie absolue de droit divin s'est- elle effondrée et par quoi a-t-elle été remplacée ?

1- La crise de la monarchie absolue de droit divin :

Voir la fiche chronologique « l'année 1789 en France ».

a- Les remises en questions de l'absolutisme et de la société d'ordres : la question des


privilèges.
- Au cours du XVIIIème siècle, la critique de la société d'ordre ne cesse de se renforcer (voir les trois
derniers cours de Seconde : « Le modèle britannique et son influence », « Les Lumières et le développement
des sciences », « Tensions, mutations et crispations de la société d'ordres »).
- Dans le contexte de la fin du XVIII ème siècle (voir points b et c) les privilèges focalisent / cristallisent la
colère populaire et apparaissent comme profondément illégitimes et injustes.

b- La crise économique : un royaume en grande agitation.


- La France connaît une série de mauvaises récoltes. Le prix des grains, donc de la farine, donc du pain,
augmente, d'autant que la spéculation sur les grains renforce la montée des prix.
- En résultent la disette et le désordre social (émeutes du pain), qui s'envenime en contestation politique.
La crise agricole provoque la crise économique et l'appauvrissement de la population : la noblesse est
touchée car ses revenus sont liés aux productions agricoles ainsi que l'Église (impôts en nature comme la dîme ou
le champart, principalement sur la céréaliculture). La pression fiscale s'accroît alors sur les paysans, renforçant
davantage le mécontentement (dont l'anglais Arthur Young fut un témoin direct et sur lesquels il nous livre de
précieuses informations dans son Voyage en France publié en 1792 (3 voyages entre 1787 et 1790)).

c- Le problème central de la dette : le déclencheur / révélateur de la crise.


- A la veille de la révolution, les finances du royaume sont dans une situation catastrophique : les recettes
sont inférieures aux dépenses, et le poids de la dette ne cesse de se renforcer. Née de la crise économique et du
soutien à la guerre d'indépendance des États- Unis (1775-1783), son remboursement devient le premier poste
du budget de l'État.
- La question se pose : faut- il la payer ou déclarer la banqueroute du royaume ? La première option est
décidée. Mais la question qui se pose alors est : qui va payer la dette ?
Les ordres privilégiés se divisent sur la question (certaines parties de la noblesse sont favorables à des
réformes) mais le Tiers- État est unanime : tout le monde doit prendre sa part à l'effort collectif (donc, les
ordres privilégiés doivent eux- aussi payer).

d- La convocation des États Généraux et la rédaction des cahiers de doléances.


- Face à cette situation exceptionnelle et inextricable, le Roi décide de convoquer les États Généraux pour
trouver une solution commune à la crise.
- Pour orienter les travaux et connaître les revendications, les cahiers de doléances sont rédigés (60 000 pour
toute la France, rédigés par chaque ordre dans chaque paroisse) : ils font remonter un immense désir de réforme
politique et sociale.
- En convoquant les États Généraux, le roi est conscient qu'il prend un immense risque politique. Pour le
Tiers- État, c'est une occasion unique à ne pas manquer pour imposer le rapport de force au roi et la
réforme du royaume.

2- L'année 1789 : le tournant de la révolution :

Voir la fiche chronologique.

a- La révolution politique à Versailles (mai- juin 1789).


- Voir la fiche chronologique (chronologie expliquée : du 05 mai au 23 juin inclus).
- En résumé : la situation est bloquée du fait du mode de scrutin (par ordre et non par tête). Le rapport de
force s'instaure d'emblée et les travaux des États Généraux ne peuvent pas se tenir normalement. Très rapidement,
la rupture s'opère entre le Tiers- État (rejoint par une partie de de la noblesse et du clergé) et les ordres
privilégiés (Clergé, Noblesse), et intervient dans la deuxième quinzaine du mois de juin (17, 20 et 23). Fin juin, la
Révolution est en marche : le Tiers- État a fait sécession en se proclamant Assemblée Nationale, refuse
d'obéir aux ordres du roi de se disperser en opposant la volonté du Peuple souverain à la souveraineté issue
du droit divin, et entend désormais changer de régime en donnant une Constitution à la France (donc en
remplaçant la monarchie absolue de droit divin par une monarchie constitutionnelle).

b- La révolution politique et sociale à Paris : le tournant de la prise de la Bastille (14 juillet


1789).
- La prise de la Bastille est le tournant de l'année 1789 et du début de la Révolution : « l'après » ne sera
plus jamais le même que « l'avant ». C'est donc un événement tout à fait considérable, qui marque le passage de
l'époque Moderne (1453- 1789) à l'époque Contemporaine (depuis 1789). Pourtant, en lui- même, l'événement peut
se résumer à une grande émeute parisienne (comme il y en eu plusieurs dans l'Histoire). Ce sont ses conséquences
qui vont lui donner une dimension historique unique.
- Pourquoi la prise de la Bastille par le peuple de Paris ?
Depuis l'ouverture des États Généraux, les Parisiens sont informés des événements qui se passent à Versailles.
Depuis la fin du mois de juin, des régiments de mercenaires étrangers convergeaient vers Paris, alimentant de
nombreuses rumeurs et peurs. L'annonce du renvoi de Necker (ministre des Finances favorable au Tiers- État et à
la réforme de la monarchie) le 12 juillet intervient dans un climat insurrectionnel (émeutes aux portes de Paris
entre le 9 et le 17 juillet) et au moment où le prix du pain est le plus cher depuis le règne de Louis XIV (les
émeutes ravagent 40 postes d'octroi sur 54 afin de laisser entrer librement les grains dans Paris sans payer les
taxes). Elle est le déclencheur de l'événement. Camille Desmoulins s'illustre à cette occasion (journaliste, il
s'impose comme l'un des principaux révolutionnaires).
- Qui est « le peuple de Paris »?
Ce sont les travailleurs (boutiquiers, artisans, paysans...) pour qui le prix du pain est une préoccupation
permanente, et qui sont favorables aux revendications du Tiers- État. C'est dans leurs rangs que va rapidement
naître le mouvement « Sans- Culotte ». Il y a donc une mixité entre des bourgeois et des classes populaires
laborieuses mais aussi entre les hommes et les femmes, qui ont une part très active dans la Révolution (le prix
du pain est au cœur de la situation des familles).
- Pourquoi la Bastille ?
Parce qu'elle est alors la principale réserve de poudre de Paris (fusils, canons) qui pourrait lui permettre de se
défendre contre les régiments royaux.
- Pourquoi la prise de la Bastille est- elle un tel tournant ?
1- Pour la première fois, le peuple bascule dans la Révolution et se l'approprie. Le rapport
de force est définitivement perdu par le roi. Le Tiers- État a gagné, la réforme de la
monarchie ne peut plus être évitée. En cela, Paris renoue avec sa vieille tradition de « ville
frondeuse », et le peuple de Paris devient l'acteur central de la période révolutionnaire, qui va
être marqué par plusieurs grandes « journées révolutionnaires » qui sont autant de grands
moments qui ont fait l'histoire de France et d'Europe.
Le 17 juillet, Louis XVI est contraint de se rendre à Paris. Il y est reçu comme le roi
légitime (remise des clés) mais doit concéder le repli des troupes, le rappel de Necker, ainsi que
de nouvelles autorités qui se sont imposées à lui : la mairie de Paris (Bailly) et la Garde
Nationale (La Fayette). Il doit arborer la cocarde des patriotes (les partisans de la Révolution) :
bleu et rouge de Paris et blanc de la monarchie.
2- Pour la première fois, la rue devient un nouvel espace politique. Le peuple en masse
dans la rue est devenu un acteur qui construit lui- même son histoire / son destin collectif.
3- Pour la première fois, la violence entre en scène. Elle sera désormais un élément central
de la période révolutionnaire. L'événement, en lui- même, est une émeute violente qui fait plus
d'une centaine de victimes.
4- Pour la première fois, l'armée intervient dans un acte de révolte contre l'autorité du roi
et se range aux côté du peuple de Paris : elle n'est plus une force de répression, elle devient un
acteur de la Révolution.
5- Pour la première fois, un flou dans le pouvoir s'exprime. Qui dirige quoi ? Paris
échappe à l'autorité du roi, mais les parisiens ne savent pas à qui ils doivent obéir, puisque des
factions révolutionnaires concurrentes donnent des consignes contradictoires et n'ont pas les
mêmes objectifs. Ce recul de l'autorité de l’État (normalement incarnée par la personne de Louis
XVI) est l'une des causes fondamentales de la montée en tension du processus révolutionnaire, du
déclenchement de la guerre et du basculement dans la Terreur à partir de 1792.

c- La fin de la monarchie absolue de droit divin (août 1789).


La prise de la Bastille accélère la chute de la monarchie absolue de droit divin au cours de l'été 1789.
- La Grande Peur.
Les événements qui se passent à Paris sont connus dans les provinces grâce aux colporteurs et autres forains.
Mais l'information se déforme, s'amplifie, alimente les rumeurs et les peurs.
Les campagnes basculent à leur tour dans la révolution. Un peu partout en France, les paysans attaquent
les châteaux et s'emparent des titres de propriété afin de les brûler. Posséder la terre cultivée est la
revendication principale des paysans, qui souhaitent aussi se libérer de la domination des seigneurs (féodalité).
Les conséquences sont majeures : non seulement les moissons prennent du retard alors que le prix du pain
est au plus haut et que la disette concerne une part importante de la population, mais en prime, le royaume est
dans un désordre général et de nombreux nobles fuient la France pour se réfugier aux frontières (la présence des
émigrés aux frontières qui s'organisent en armées contre- révolutionnaires sera le prétexte pris par la France pour
déclarer la guerre à l'Autriche et à la Prusse en 1792). Dans ce contexte, il devient urgent et vital de ramener
l'ordre et donner au peuple ce qu'il demande.
- L'abolition des privilèges (nuit du 04 au 05 Août 1789).
L'abolition des privilèges (une doléance fondamentale du Tiers- État) de la Noblesse et du Clergé fait
disparaître d'un coup la société d'ordres, qui structurait tout le pays (et l'Europe) depuis la fin de la période
carolingienne : en une nuit, des siècles d'Histoire disparaissent, et une nouvelle société apparaît. Ce qui
implique mécaniquement la fin de la monarchie absolue de droit divin (la Monarchie, la société d'ordres et l’Église
sont inséparables : la chute de l'un entraîne celle des autres), qui justifiait l'existence des ordres et se reposait sur
eux.
- La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (26 août 1789).
La DDHC est l'acte de naissance d'un nouvel ordre politique, social, économique, culturel et religieux en
France. S'inspirant du Bill of Rights anglais (1689) et de la Déclaration d'Indépendance des États- Unis
d'Amérique (4 juillet 1776), elle fonde une nouvelle société en France, qui perdure toujours aujourd'hui. C'est le
texte fondateur de notre démocratie, qui est toujours mis en préambule de nos Constitutions.
Texte fondamental, il pose que les Français sont un peuple de citoyens libres et égaux (et non les sujets d'un
roi de droit divin), que la distinction entre les citoyens réside dans le talent / le mérite / les capacités et non
dans la naissance et l'appartenance à des ordres inégalitaires, que chaque citoyen dispose de libertés
fondamentales inaliénables (quels que soient sa naissance, sa fortune, sa renommée, son appartenance religieuse
ou ses opinions), et que toute souveraineté réside dans la Nation / le Peuple (et non dans le droit divin).
3- Les espoirs déçus et l'échec de la monarchie constitutionnelle (1792- 1792) :

a- La naissance de l'opinion publique et de la vie politique / démocratique.


La Révolution amplifie des évolutions nées pendant les Lumières. Les événements sont connus et débattus, et
très vite les Français s'approprient le droit de s'informer et d'échanger / d'exprimer leurs opinions, souvent
avec passion. La presse débute et se développe très vite, avec des journaux aux opinions très diversifiées. On
discute aussi dans les cafés, les rues, les parcs et jardins, au théâtre, etc. Des clubs naissent dans Paris et sont les
centres de la vie politique, car leurs débats se répercutent ensuite à l'Assemblée Nationale (clubs des Jacobins,
des Cordeliers...). ;
Une opinion publique est donc née en 1789, qui anime la nouvelle vie démocratique et parlementaire du
pays.

b- La fête de la Fédération (14 juillet 1790) : l'unité de la Nation et le triomphe des idéaux
de 1789.
Un an après la prise de la Bastille, la Fête de la Fédération marque le triomphe des idéaux de 1789 et le
dernier moment véritable d'unité nationale. Sur le Champ de Mars, environ 100 000 parisiens se rassemblent
pour jurer fidélité à « La Nation, la Loi, le Roi ».
Serment de La Fayette, sur l'Autel de la Patrie, en présence du texte de la Constitution et en présence des
représentants de l’Église, devant le roi, la Garde Nationale et le peuple de Paris : « Nous jurons de rester à
jamais fidèle à la Nation, à la Loi et au Roi, de maintenir de tout notre pouvoir la Constitution décrétée par
l'Assemblée Nationale et acceptée par le Roi […] et de demeurer unis à tous les Français par les liens
indissolubles de la Fraternité. »
La Révolution était apparemment terminée. Elle ne faisait en fait que commencer...

c- La rupture entre le roi et la Nation.


En dépit des apparences, beaucoup de problèmes fondamentaux ne sont pas réglés, et le roi, qui a subi l'année
1789, n'a pas pour autant accepté la Révolution. Comment expliquer l'échec de la Monarchie Constitutionnelle (la
première forme de la démocratie en France) alors que tous l'acceptaient en juillet 1790 et qu'elle incarnait au mieux
les idéaux de 1789 ?
- La question religieuse : entre Schisme et nouvelle guerre de religion.
La Constitution Civile du Clergé, votée par décret le 12 juillet 1790, approuvée en août contre la volonté du
roi, instaure en France la plus grave crise religieuse depuis les Guerres de Religions jusqu' à ce que Napoléon
Ier y mette un terme en 1801. Il s'agissait de soumettre le clergé de France à la Constitution, en lui faisant prêter le
même serment « à la Nation, à la Loi, au Roi ». La Révolution provoque donc un nouveau schisme en voulant
créer un clergé national, tirant son autorité de la Constitution, et non du Pape. Mais, le Clergé est dirigé par le
Pape, dont il tire son autorité religieuse (sacrement de l'ordination). Profondément catholique, Louis XVI est
tourmenté et ne peut accepter ce décret et entrer en conflit avec le Pape. Mais mais il n' a pas non plus les moyens
de s'opposer à l'Assemblée Nationale. Quant au Clergé, il est profondément divisé sur la question. La rupture
totale intervient en mars et avril 1791 par le Pape : la Constitution Civile du Clergé est condamnée, les prêtres
ne doivent pas prêter serment à la Constitution, ceux qui l'ont fait doivent se rétracter sous 40 jours. Le conflit est
donc ouvert entre le Pape et l’Église catholique d'un côté, et la Révolution de l'autre. Rapidement, cette
rupture sera l'une des causes de la Terreur et de la répression féroce dans certaines provinces (Vendée).
- La crise économique, la dette, la monnaie et le prix du pain.
La dette et la crise économique, qui ont été les déclencheurs de la Révolution, se poursuit, en dépit de la
confiscation et de la nationalisation des biens de l’Église (devenus « biens nationaux ») en novembre 1789,
revendus pour résoudre la crise financière. La situation sociale demeure très tendue du fait du prix élevé du
grain. La monnaie (les assignats) gagée sur la vente des biens nationaux a un cours instable et ne permet pas de
résoudre le problème des prix.
- La fuite à Varennes (20- 21 juin 1791). Le roi et sa famille tentent de fuir pour rejoindre les émigrés aux
frontières pour se mettre sous la protection de l'empereur d'Autriche. C'est une fuite et une trahison, totalement
inattendue, qui ne sera jamais pardonnée à la famille royale. En, effet, la rupture entre le Roi et son peuple
est désormais définitive, et l'idée républicaine se renforce rapidement. Une pétition exige l'abdication du roi, mais
elle provoque la tuerie du Champ- de- Mars le 17 juillet 1791.
- La guerre contre l'Autriche et la Prusse.
La guerre est déclarée en avril 1792. A l'intérieur, elle pourrait redonner une unité à la Nation et permettre au
Roi de surmonter une grave crise politique. A l'extérieur, elle ferait reconnaître le nouveau pouvoir en France et
l'imposerait à ses adversaires. Les émigrés (nobles) servent de prétexte au déclenchement de la guerre : la
France exige que l'empereur d'Autriche et le roi de Prusse dissolvent ces troupes contre- révolutionnaires aux
frontières de la France et leur adresse un ultimatum (dernier avertissement avant la guerre), auquel ils ne répondent
pas.
La guerre commence très mal pour la France. Ses armées sont affaiblies car les nobles formaient son
encadrement (officiers) et le Nord- Est est rapidement envahi. Paris est menacée : patriotes et fédérés montent à la
capitale pour la défendre. Dans ce contexte très tendu, le duc de Brunswick adresse une lettre aux parisiens (le
« manifeste de Brunswick ») le 25 juillet 1792 dans laquelle il les menace de mort s'ils s'en prennent à la famille
royale. Les Parisiens comprennent que les armées étrangères viennent détruire la Révolution et rétablir la
monarchie absolue de droit divin en France. Il en résulte l'attaque et la prise du palais des Tuileries (10 août
1792) et la chute de la monarchie en France. Le 21 septembre 1792, la monarchie est abolie en France, et la
République est proclamée. Une nouvelle période commence.

Résumé / synthèse : première partie.

(1) La France est dans une situation de crise généralisée à la veille de 1789 (financière, fiscale,
économique, sociale...) : la réunion des États Généraux s'impose comme une nécessité, bien qu'elle soit très
risquée pour le pouvoir. Pour connaître l'état de l'opinion, les cahiers de doléances sont rédigés dans toute la
France : un énorme besoin de réforme s''exprime dans toute la France (Tiers- État).

(2) Dès leur ouverture (05 mai 1789), les États Généraux sont bloqués et ne peuvent faire ce pour quoi ils
ont été convoqués. La tension monte et éclate dans la seconde moitié de juin (du 17 au 23). La Révolution
commence donc à Versailles. Rapidement, elle déborde sur Paris, qui s'engage massivement derrière le
Tiers- État et impose au roi un rapport de force : c'est la prise de la Bastille (14 juillet 1789), qui fait
définitivement basculer la France entière dans la Révolution. La monarchie absolue de droit divin et la
société d'ordres s'effondrent avec l'abolition des privilèges (nuit du 04 au 05 août 1789) et la Déclaration
des Droits de l'Homme et du Citoyen (26 août 1789) : une France nouvelle est née durant l'été 1789.

(3) Devenue une démocratie / monarchie constitutionnelle, la France célèbre son unité et son nouveau
régime lors de la Fête de la Fédération (14 juillet 1790). Pourtant, les divisions apparaissent, qui vont mener
à la chute de la Monarchie et à la proclamation de la République : la question religieuse (Constitution Civile
du Clergé, 12 juillet 1790) envenime rapidement la situation, le roi commet l'erreur de s'opposer à l'Assemblée
Nationale (« Monsieur Veto ») et surtout de fuir (« fuite à Varennes » du 20- 21 juin 1791), et la France
commence très mal une guerre qui menace rapidement Paris et révèle la complicité du roi avec les rois
d'Europe (Autriche, Prusse) contre la Révolution. Le « manifeste de Brunswick » (25 juillet 1792)
provoque l'attaque et la prise des Tuileries (10 août 1792), la chute de la Monarchie et la proclamation de
la République (21 septembre 1792).

II- 1792- 1799 : « VIVE LA REPUBLIQUE ! »

Problèmes :
- Comment la chute de la Monarchie relance- t- elle la Révolution en donnant naissance à la République ?
- A quels dangers la République est- elle confrontée et pourquoi y répond- elle par la Terreur ?
- Pourquoi le régime républicain ne parvient- il pas à trouver un équilibre ?

1- 1793- 1794 : la Convention et la Terreur.

La Terreur est une période brève (entre mars et juin 1793 à juillet 1794) mais extrêmement violente, qui
a durablement marqué notre mémoire et notre histoire. Encore aujourd'hui, elle anime des débats d'historiens,
parfois passionnés (entre Jean- Clément Martin et Reynald Sécher notamment), en particulier sur ses excès les plus
meurtriers (le cas de la « guerre de Vendée »). Sans trop entrer dans les détails, il convient de comprendre la
portée de ce bref et intense moment historique.

a- Les causes de la Terreur :


- La crise économique continue.
La crise économique se poursuit et rend la situation politique très instable. Le prix du pain ne baisse pas
et alimente la colère populaire et la pression sur l'Assemblée Nationale. Elle renforce aussi les partisans les
plus radicaux de la Révolution à Paris, notamment le mouvement Sans- Culotte. Par ailleurs, la vente des
biens nationaux (les biens du Clergé nationalisés en 1790) a profité aux bourgeois au détriment des paysans et a
creusé les inégalités et les frustrations.
- La France face à l'Europe coalisée. Voir carte.
La guerre est mal engagée. La France est envahie par les troupes prussiennes et autrichiennes. Le 11 juillet
1792, l'Assemblée Nationale déclare « la Patrie en danger » (ce qui provoque la montée à Paris des « fédérés », la
prise des Tuileries le 10 août 1792 et la chute de la Monarchie après le « manifeste de Brunswick »). Le 20
septembre 1792, la première victoire française a lieu à Valmy. Le lendemain, la République est proclamée en
France.
La guerre prend alors une nouvelle dimension : elle devient patriotique (c'est la guerre des citoyens qui
partent défendre les frontières de la Patrie), idéologique (c'est une guerre à mort de la liberté contre la
tyrannie), révolutionnaire (la République fait la guerre pour renverser toutes les monarchies d'Europe et
libérer les peuples). Avec l'exécution de Louis XVI, toute l'Europe se coalise contre la France pour écraser la
Révolution. La guerre devient alors totale : la levée en masse de 300 000 hommes est décrétée en février 1793.
- Les contestations intérieures à la Révolution : l'exemple de la « Guerre de Vendée »
Voir carte.
Dans l'Ouest, la population paysanne qui a favorablement accueilli lé Révolution s'est progressivement
retourné contre elle après la Constitution Civile du Clergé, la vente des biens nationaux (qui a surtout
bénéficié aux bourgeois des villes), l'exécution de Louis XVI et surtout la levée en masse des 300 000 hommes
(qui privaient les campagnes des jeunes hommes dont elles avaient besoin pour les moissons prochaines).
Des soulèvements paysans éclatent et rapidement des nobles locaux sont mis à leur tête. A partir de mars
1793, le soulèvement se généralise et s'organise, au point qu'apparaît la « Grande Armée Catholique et Royale »
et que se livrent en « Vendée » de véritables batailles rangées : Nantes est menacée et risque d'être prise en juin (ce
qui aurait permis de faire un lien avec l'Angleterre et la contre- révolution des émigrés et de prendre Paris à revers)
mais les Vendéens sont battus le 17 octobre 1793 à Cholet. Écrasés et terrifiés, les Vendéens errent à la recherche
d'un port pour joindre l'armée anglaise (c'est la « Virée de Galerne ») et sont finalement battus à Granville, au
Mans, et dans les marais de Savenay le 23 décembre 1793. Commence alors une répression brutale sur
l'ensemble de la région et de sa population alors qu'elle ne représente plus une menace militaire.
- La faiblesse de l’État et les luttes de factions.
Depuis l'ouverture des États Généraux, la prise de la Bastille, la prise des Tuileries, et l'exécution de Louis
XVI, l’État est affaibli. La situation politique est donc très instable. Des « partis » / « mouvances », /
« factions » s'opposent (« Girondins », « Montagnards », « Cordeliers », « Jacobins », « Indulgents »,
« Enragés », « Exagérés »...) selon les débats du moment à l'Assemblée Nationale (la guerre, la mort du Roi, la
Terreur...). Le plus célèbre conflit oppose les « Girondins » et les « Montagnards », qui s'achève sur
l'arrestation, le procès et l'exécution des députés « Girondins », ce qui provoque le « soulèvement fédéraliste »
dans certaines villes importantes, comme Bordeaux), On s'oppose aussi à l'intérieur de ces mouvances. Les
conflits entre les principales personnalités de l'Assemblée révèlent alors les différentes options politiques en
débat et l'incapacité à trouver un équilibre durable. Le cas le plus exemplaire est l'opposition entre Danton et
Robespierre, qui débouche sur le procès et l'exécution des « Indulgents » (Danton, Desmoulins...).

b- Les formes / pratiques de la Terreur :


La Terreur est une méthode de gouvernement. Elle se fonde sur le besoin de mesures rapides dans un
moment où la France fait face à des périls exceptionnels. Elle n'hésite pas à recourir à la violence, même si la
violence n'est qu'un des moyens mis en œuvre pour parvenir à ses fins politiques (ramener l'ordre à l'intérieur,
défendre les frontières, sauver la République).
- La Terreur légale : le gouvernement révolutionnaire.
La Terreur est une politique mise en œuvre par le gouvernement légal de la République, issu de la
l'Assemblée Nationale et sous son contrôle, qui passe par la loi et par des institutions, en fonction d'objectifs à
atteindre.
Elle s'instaure progressivement, dans un contexte général particulièrement périlleux pour la Révolution.
On estime généralement que la création du Comité de Salut Public (6 avril 1793), l'assassinat de Marat (13 juillet
1793), et la « loi des suspects » (votée le 12 août 1793, élargie par le décret du 17 septembre 1793, et abrogée le
4 octobre 1795) en sont les principales étapes. Elle s'intensifie jusqu'à la « loi de Prairial » (10 juin 1794) et la
chute de Robespierre (10 Thermidor an II – 27 juillet 1794).
Donc : une instauration progressive au printemps 1793, suivi d'un basculement pendant l'été 1793 et
d'une montée en tension continue jusqu'à la chute de Robespierre à l'été 1794.
- Qui est visé par la Terreur ? Tout le monde.
Les suspects sont définis de manière vague, suffisamment large pour englober des pans entiers de la population
(à peu près n'importe qui peut être visé par les points 1 et 3, quant aux nobles évoqués au point 5, ils sont suspects
par nature).
- Quelles sont les institutions qui mettent en œuvre la Terreur ?
C'est le Gouvernement Révolutionnaire. Il se compose :
- de l'Assemblée Nationale (la Convention, qui siège en permanence).
- du Comité de Salut Public formé par une douzaine de députés élus chaque mois par la Convention, qui
dirigent le pays par décrets, et qui rend compte de son action à la Convention et donne les ordres dans tous les
domaines. C'est le véritable cœur du pouvoir sous la Terreur. Robespierre y entre en juillet 1793 et y est
constamment réélu.
- du Comité de Sûreté Générale et de Surveillance. Composé d'une douzaine de membres, chargé des
affaires de police.
- du Tribunal Révolutionnaire. Applique une justice d'exception (acquittement ou condamnation à mort). A
Paris, puis en France.
- La Terreur dans les provinces : les représentants en mission.
Dans le reste de la France, la Terreur est mise en œuvre par des envoyés exceptionnels du Comité de Salut
Public : les représentants en mission, qui ont tout pouvoir pour ramener l'ordre et qui ne répondent de leurs actes
que devant le Comité de Salut Public.
Dans les armées, ils imposent une discipline de fer et veillent au moral de la troupe tout en exécutant les
généraux inefficaces. Ils veillent à rendre efficace l'effort de guerre.
Dans les villes et les régions rebelles, ils s'illustrent notamment par un recours disproportionné à la violence
(Carrier et les noyades à Nantes, Fouché et les canonnades à Lyon) qui a durablement marqué les esprits.
- La Terreur populaire : les Sans- Culotte.
Voir l'illustration : « un sans- culotte ».
Souvent liés aux Sans- Culottes et aux mouvements les plus radicaux, de nombreux citoyens engagés dans la
révolution forment des comités civiques qui relaient la Terreur dans les quartiers parisiens, les villes et villages en
France.

c- Les bilans de la Terreur :


Malgré un bilan humain terrible et une violence extrême qui a durablement marqué les esprits et nuit à
l'image de la République, la Terreur a donné les résultats attendus.
- Le bilan humain :
Il est difficile de faire un bilan chiffré et précis de la Terreur. Il est certain que la mortalité y a été extrême. On
peut en général donner quelques exemples : 17 000 exécutions capitales (guillotine) du Tribunal
Révolutionnaire (principalement à Paris), probablement 40 000 exécutions sommaire en réalité, et environ 200
000 victimes (tous camps confondus) dans la « Guerre de Vendée ». Sans omettre des milliers de victimes
diverses. Le tout pour une population de 25- 28 millions d'habitants.
- Le bilan politique :
L'ordre est ramené dans toutes les régions et les villes où il y avait des soulèvements royalistes et fédéralistes.
Les opposants à la République sont écrasés et réduits à l'inefficacité.
La République est sauvée : à l'intérieur, elle n'est plus menacée.
En revanche, le prix à payer a été énorme et la République est durablement entachée et fait peur à une large
partie de l'opinion (pour beaucoup de Français, République = Terreur, ce qui pèsera lourd sur le XIXème siècle).
- Le bilan militaire :
Les frontières sont sauvées. L'armée a été épurée, son moral et sa discipline se sont fortifiés. Son patriotisme
et son engagement pour la Révolution ont été renforcés. Avec la victoire de Fleurus (26 juin 1794), les armées
françaises renversent la situation : elles cessent de défendre et de reculer, et gagnent les victoires en occupant les
territoires étrangers (occupation et annexion de la Belgique). Elle contribue à la fin de la Terreur et à la chute
de Robespierre.

2- 1794- 1799 : Thermidor, le Directoire et la République bourgeoise.

a- Le processus de sortie de la Terreur : la République thermidorienne.


La chute de Robespierre le 10 thermidor an II (27 juillet 1794) marque la fin de la Terreur et implique
une nouvelle situation politique. Les Thermidoriens (ceux qui ont tenu à Robespierre et l'ont éliminé le 10
thermidor) donnent naissance à une nouvelle République (le Directoire), plus favorable à la bourgeoisie,
éliminant les forces politiques extrêmes (royalistes à Droite, Sans- Culottes à Gauche).
Les royalistes sont combattus au nom des principes de la Révolution (ils sont la Contre- Révolution et
souhaitent le retour de la monarchie absolue de droit divin) et pour la défense du nouveau régime républicain :
ils sont mis hors d'état de nuire mais poursuivront de nombreuses intrigues jusque à la Restauration de 1815.
Les Sans- Culottes sont combattus pour apaiser la vie politique de la République et tourner
définitivement la page de la Terreur, dont ils étaient la force principale à Paris. En effet, la République
victorieuse aux frontières redoute les fureurs populaires à l'intérieur et veut unifier les Français contre les ennemis
l'extérieur, et la République bourgeoise se méfie d'un peuple parisien armé et révolutionnaire, prompt à l'émeute
et aux mesures extrêmes.
L'heure est donc à l'apaisement et à l'écrasement des extrêmes :
- L'insurrection sans- culotte contre la Convention du 12 germinal an III (01 avril 1795) est matée.
- L'insurrection royaliste du 13 vendémiaire an IV (5 octobre 1795) est écrasée à coups de canons par le jeune
général Bonaparte, et les derniers chefs de l'insurrection vendéenne sont exécutés (Jean- Nicolas Stofflet est
fusillé le 25 février 1796 à Angers, et François- Athanase de Charette de la Contrie est fusillé le 29 mars 1796 à
Nantes).

b- Le Directoire : la République des « notables » (1795- 1799) :


Voir la Constitution du Directoire (organigramme scanné).
Principaux éléments :
- Les principes de 1789 sont réaffirmés (DDHC).
- Le suffrage est censitaire et masculin (il est donc inégalitaire) : il y a les citoyens actifs (les hommes de
plus de 21 ans qui paient le cens / l'impôt) qui votent pour les maires et les juges et qui élisent les « grands
électeurs » (lesquels élisent le Conseil des Cinq- Cent et le Conseil des Anciens, c'est- à- dire l'Assemblée
Nationale et le Sénat, ainsi que les tribunaux civils et criminels).
- La citoyenneté est donc restreinte : les plus pauvres et les femmes ne votent pas. Le poids de la
bourgeoisie est donc nettement renforcé (30 000 « grands électeurs », qui sont les plus riches, élisent les deux
assemblées, et donc, détiennent le pouvoir législatif). Cependant, la base démocratique est réelle, car les
« grands électeurs » doivent être élus par un corps civique de plusieurs millions de citoyens actifs. Le Directoire
ressemble ainsi à la République romaine, qui était une république oligarchique. Ainsi, si les décisions locales
(mairies) sont aux mains de millions de citoyens actifs, les décisions nationales sont aux mains des 30 000
« grands électeurs ».

c- Les victoires françaises en Europe :


Voir carte scannée « les conquêtes de la République, 1795- 1799 » :
La victoire de Fleurus (juin 1794) change la situation militaire : la France passe de la défensive à
l'offensive, et commence à occuper et à annexer (rattacher à son territoire) des territoires frontaliers.
En 1799, les frontières sont sécurisées et la France est la principale puissance en Europe :
- Occupation puis annexions de la Belgique, de la Rhénanie, de la Savoie et du Comté de Nice.
- Occupation du Piémont et de la Toscane (la puissance autrichienne est rejetée hors d'Italie).
- Création de puissances satellites qui forment un glacis militaire et un système d'alliances : ce sont les
Républiques Sœurs (puissances vaincues protégées par la France, qui ont chassé leurs rois et qui doivent
appliquer les principes républicains imposés par les armées de la Révolution).
L'armée est cependant devenue un acteur politique incontournable : les généraux sont les arbitres de la
vie politique (Pichegru élimine les sans- culottes, Bonaparte écrase les royalistes et signe la paix de Campo-
Formio avec l'Autriche le 18 octobre 1797, alors qu'il n'était pas autorisé à le faire), ce qui révèle la fragilité du
Directoire. On commence à se dire qu'un nouveau César peut naître dans cette situation : ce sera le général
Bonaparte.

Synthèse / résumé : deuxième partie.

(1) La chute de la monarchie (10 août 1792), la proclamation de la République (21 septembre 1792),
l'exécution de Louis XVI (21 janvier 1793) et la levée en masse de 300 000 hommes (mars 1793) relancent la
Révolution, qui doit désormais faire face à des attaques de toute l'Europe coalisée contre elle (Autriche,
Prusse, Espagne, Angleterre, Pays- Bas, Piémont), ainsi qu'à de graves troubles intérieurs (« guerre de
Vendée », soulèvement fédéraliste). Dans ce contexte, l'affaiblissement de l’État, les divisions entre les
révolutionnaires et la pression populaire née de la crise économique favorisent la montée en tension et
l'adoption de lois d'exception pour redresser la situation de la France par tous les moyens : c'est la Terreur.
Celle- ci doit ramener l'ordre à l'intérieur en écrasant les ennemis de la République, et défendre les
frontières attaquées, afin de sauver la Révolution. La violence est un outil privilégié pour atteindre ces
objectifs rapidement. Elle est alors extrême (surtout en Vendée et dans les principales villes, dont Paris) et prend
différentes formes (guillotine, massacres...). Le Gouvernement Révolutionnaire l'organise (Comité de Salut
Public notamment), les Représentants en mission la relaient dans tout le pays, et les Sans- Culottes la
pratiquent à la base de la société.
Cet épisode bref (du printemps 1793 à l 'été 1794), grandiose et terrible, a puissamment marqué les
consciences et l'Histoire, en divisant profondément et durablement les Français sur la question de la
République. La Terreur a été vue comme la guerre des « deux France », l'ancienne et la nouvelle, dont Victor
Hugo donne une image saisissante dans son dernier roman (Quatre- Vingt- Treize, 1874), et elle est toujours un
objet de recherche et de débats pour les historiens (Jean- Clément Martin notamment). De grandes figures de
l'Histoire s'y sont distinguées : Danton, Robespierre (« l'Incorruptible »), Saint-Just (« l'Archange de la
Révolution »), Desmoulins, Hébert...

(2) La Terreur cesse avec la victoire de Fleurus (26 juin 1794) et la chute de Robespierre (10 thermidor an
II - 27 juillet 1794). Commence alors la République ou la Convention « thermidorienne », qui cherche à
apaiser la France en éliminant les forces extrêmes (royalistes et Sans- Culottes). Celle- ci débouche à partir
de 1795 sur une nouvelle Constitution, un nouveau régime républicain : le Directoire (1795- 1799). Plus
favorable aux bourgeois, excluant les plus pauvres de la citoyenneté, mais ayant toutefois une réelle dimension
démocratique, il est une forme de République oligarchique d'inspiration romaine. La France devient la
principale puissance en Europe, mais le pouvoir politique est divisé et fragile, ce qui permet à l'armée et à
des généraux ambitieux (Bonaparte) de devenir l'arbitre de la vie politique avant de se forger une image
d'« homme providentiel ».

III- 1799- 1815 : « VIVE BONAPARTE ! VIVE L'EMPEREUR! »

Problèmes :
- En quoi Napoléon Bonaparte est- il une synthèse / fait- il le lien entre l'Ancien Régime et la Révolution ?
- Comment son œuvre intérieure et extérieure a- t- elle donné naissance à la France et à l'Europe
contemporaines ?

1- 1793- 1799 : l'ascension d'un ambitieux...


du « général Bonaparte » au « Citoyen Premier Consul » :

a- Les premières armes pendant la Terreur : le siège de Toulon (1793).


- Napoléon Bonaparte est un fils des Lumières et de la Révolution. Né le 15 août 1769 à Ajaccio dans une
famille (pauvre) de la petite noblesse de robe (gens de lois), il quitte l'île et suit des étude à l’École royale militaire
de Brienne (1779- 1784) puis à l’École militaire supérieure de Paris (1784- 1785). Lorsque la Révolution éclate,
il n'est qu'un jeune lieutenant de 19 ans affecté dans un régiment d'artillerie. La guerre (1792) ouvre des
perspectives inespérées à ce jeune ambitieux.
- Après une période compliquée, Napoléon commence son ascension avec le siège de Toulon. Arsenal royal
en Méditerranée à proximité de Marseille, Toulon est en proie à une insurrection royaliste et fédéraliste. La ville se
donne aux Anglais et aux Espagnols et leur livre la flotte française. Commandant de l'artillerie, Napoléon joue
un, rôle décisif dans la reprise de ce site stratégique. En récompense, il obtient le grade de général de brigade
(à 24 ans) en décembre 1793. Son nom est désormais connu à Paris, notamment de Robespierre (il est lié à
Augustin, le frère de Maximilien). Sa chute le plonge dans une période troublée (il est exclu de l'armée).
- Il réapparaît le 13 vendémiaire an IV (15 octobre 1795) : il écrase l'insurrection royaliste à Paris à coups
de canon. Il en est remercié par le grade de général de division (16 octobre) et par celui de général en chef de
l'armée de l'Intérieur (25 octobre). Il y succède alors à Paul Barras (qui devient l'un des cinq Directeurs). En
quelque semaines, il parvient donc à devenir un personnage central du Directoire. En quête de gloire
personnelle pour asseoir son autorité politique, il recherche un commandement pour une campagne extérieure : il
obtient au printemps 1796 le commandement de l'Armée d'Italie.

b- L'accès à la célébrité : la campagne d'Italie et la naissance d'un héros (1796- 1797).


Voir les tableaux : Napoléon au pont d'Arcole et Napoléon au grand Saint- Bernard.
- La campagne d'Italie est l'acte fondateur de la légende napoléonienne : elle démontre son exceptionnel
talent militaire (pensée stratégique, sens tactique, connaissance du terrain et des hommes...), et révèle ses
ambitions politiques (propagande).
- Depuis 1792, la France est en guerre contre une coalition dont l'Angleterre et l'Autriche sont les deux
principales puissances, l''une sur mer, l'autre sur terre. Pour la France, la priorité est de vaincre l'Autriche
(principale puissance rivale sur le continent) afin de contraindre l'Angleterre à la paix (principale puissance
ennemie de la France, au cœur de toutes les coalitions). Pour y parvenir, trois armées sont organisées : deux sur
la frontière Nord- Est (celles du général Jourdan et du général Moreau, fortes de 80 000 hommes chacune) et une
en Italie (celle du général Bonaparte, forte de 50 000 hommes, mais mal équipée et ravitaillée). L'idée est de
vaincre les Autrichiens sur la frontière Nord- Est et de faire diversion en Italie (tout en la pillant pour
renflouer les caisses de l’État et rétablir la valeur de la monnaie afin de sortir de la crise économique).
- Mais Napoléon entend au contraire vaincre en Italie et menacer directement Vienne pour contraindre
l'Autriche à la paix, ce que personne alors ne croit possible. Bon connaisseur de la réalité du terrain (qu'il utilise
à son avantage), des hommes (qu'il sait motiver pour les faire avancer rapidement et se battre efficacement, et au
milieu desquels il demeure), ne négligeant pas l'intendance (nourriture, chaussures, habits...), il parvient à vaincre
les Sardes et les Autrichiens, s'empare de toute l'Italie du Nord entre les Alpes et Rome (Piémont, Lombardie,
Vénétie, Toscane...) et de ses richesses (pillage des œuvres d'art et transfert vers Paris). Surtout, il impose la paix
à une Autriche pourtant victorieuse face aux autres armées françaises : par le traité de Campo- Formio (18
octobre 1797), il ramène la paix en Europe à l'avantage de la France et isole l'Angleterre. Ses succès vont très au-
delà de son seul commandement militaire. Ils révèlent son ambition politique et font naître des craintes. Le retour
à Paris est triomphal, mais on voit désormais en lui autant un « homme providentiel » capable de sauver la
République qu'un nouveau César capable de la remplacer par un pouvoir personnel... Si certains cherchent
alors à l'éloigner de Paris pour sauver la République, d'autres complotent lui permettre de prendre le pouvoir.

c- La campagne d'Egypte (1798- 1799) : la naissance d'un mythe et le retour de « l'homme


providentiel ».
- A la différence de la campagne d'Italie, la campagne / expédition d’Égypte est conçue comme une vaste
opération militaire destinée à forcer l'Angleterre à la paix en la coupant de ses relations économiques /
commerciales avec l'Inde (sa principale colonie depuis la perte de l'Amérique du Nord et l'indépendance des
États- Unis). En effet, avant l'ouverture du canal de Suez (1869), l’Égypte (isthme de Suez) était déjà la plaque-
tournante du commerce anglais vers les Indes Orientales (l'Asie du Sud et du Sud- Est). S'en emparer, c'était
détruire l'économie britannique et redéfinir les puissances en Méditerranée en imposant la suprématie
française.
- une flotte de 400 navires, de 40 000 hommes et 10 000 marins traverse la Méditerranée et débarque à
Alexandrie le 1er juillet 1798. Dès le 21 juillet, la bataille des Pyramides permet aux Français de s'emparer du
Caire. Mais la flotte française est coulée à Aboukir par l'amiral Nelson, ce qui bloque l'armée française en Égypte
et l'empêche de recevoir des renforts. Après une brève invasion de la Syrie, la campagne d’Égypte apparaît
comme un désastre.
- Elle est cependant une réussite scientifique. 167 ingénieurs, savants et artistes y participaient. L'un des
principaux éléments est la découverte de la pierre de Rosette, qui fut à l'origine de la compréhension et du
déchiffrage des hiéroglyphes par Jean- François Champollion (1822) et favorisa l'intérêt nouveau pour l’Égypte
et l'égyptologie.
- Informé des évolutions politiques en France (défaites militaires, perte de l'Italie, effondrement de la confiance
de la population dans le Directoire...), Napoléon abandonne son armée en Égypte et rentre en France malgré la
menace de la flotte anglaise. Il accoste à Fréjus le 8 octobre 1799 et remonte sur Paris pour y prendre le pouvoir.

2- 1799- 1804 : le Consulat.

a- Le coup d’État du 18 Brumaire.


Voir les 6 documents iconographiques.
Napoléon rentre d’Égypte pour prendre le pouvoir à Paris. Il le fait à l'occasion du coup d’État des 18 et 19
brumaire An VIII (9 et 10 novembre 1799).
Le problème de la France était la nécessité du changement de régime politique, le Directoire étant affaibli
par la crise économique, la guerre, les divisions... Il fallait un pouvoir plus fort, et il fallait pour cela changer de
Constitution : ce fut le prétexte. Au sommet, les forces principales étaient pour le changement de régime, et
l'ont donc organisé : Assemblée (Lucien Bonaparte), armée (Napoléon Bonaparte), affaires étrangères
(Talleyrand), police (Fouché), Finances (Gaudin), une large partie de l'opinion publique (très favorable à
Bonaparte). Les résistances étaient surtout à craindre du côté des parlementaires (pouvoir législatif).
Le Conseil des Cinq- Cents (Assemblée Nationale) et le Conseil des Anciens (Sénat) sont
exceptionnellement réunis au château de Saint- Cloud au motif que les Jacobins menaceraient les travaux
parlementaires à Paris : sous prétexte d'être mis en sécurité, les parlementaires sont isolés à distance de Paris
(qui est isolée : personne n'entre ni ne sort), sous la menace de troupes fidèles à Bonaparte (devenu chef de la
Garde Nationale et de la place de Paris).
Promu chef de l'armée pour restaurer l'ordre dans Paris, il vient finalement imposer un changement de régime
aux Assemblées en faisant un coup d’État militaire. Les débats sont animés et Bonaparte est vivement contesté
au point d'être mis en difficulté le 19 brumaire. En définitive, l'armée intervient pour imposer son général
(Joachim Murat : « Foutez moi tout ça dehors ! »).
Le 20 brumaire, le Directoire est modifié le temps de donner une nouvelle Constitution à la France : les cinq
Directeurs sont remplacés par une Commission consulaire exécutive composée de trois Consuls (Napoléon,
Sieyès et Ducos). A Paris, le coup d’État est accepté et la population accueille favorablement Napoléon (« Vive
Bonaparte ! Vive la République ! Vive la paix ! »). Bonaparte déclare : « La Révolution est fixée aux principes
qui l'ont commencée : elle est finie. »
La constitution de l'An VIII est proclamée le 22 frimaire an VIII (14 décembre 1799) et rédigée en 11 jours
(par Danou). Elle est promulguée le 25 décembre 1799 (4 nivôse an VIII) et ratifiée ensuite par plébiscite le 19
pluviôse an VIII (7 février 1800). Elle met en place un nouveau régime : le Consulat.

b- La Constitution de l'An VIII : un régime personnel et autoritaire.


Voir l'organigramme « La Constitution de l'An VIII et de l'Empire ».
Le Consulat est une réorganisation en profondeur du régime républicain, qui s'inspire directement du
Principat d'Auguste (petit neveu de César, considéré comme le fondateur de l'Empire Romain et le premier
empereur).
En apparence, la France reste une République, et une démocratie (les citoyens forment le Peuple
Souverain).
Mais en réalité, le pouvoir est totalement dans les mains de Bonaparte. Il y a donc une personnalisation du
pouvoir au profit de Napoléon, et un renforcement énorme du pouvoir exécutif sur le pouvoir législatif (qui est très
nettement affaiblit et soumis à l'exécutif).
Le Premier Consul est le véritable détenteur du pouvoir. Il nomme le Gouvernement (les ministres),
propose et promulgue les lois, est le chef des armées. Il nomme et révoque les ministres, les préfets, les maires et
les fonctionnaires, et n'est responsable devant personne... Il nomme les membres du Conseil d’État et du Sénat. Les
deux autres consuls (Cambacérès et Lebrun) n'ont qu'un rôle consultatif (ils donnent leur avis, mais le Premier
Consul peut l'ignorer).
Le pouvoir législatif est divisé en 4 assemblées, chacune spécialisée sur un aspect du processus législatif : le
Conseil d’État (prépare / rédige les lois), le Sénat (vérifie les lois), le Tribunat (discute les projets de lois sans les
voter) et le Corps Législatif (vote les projets de lois sans les discuter).
La démocratie est réelle, mais indirecte et limitée. Le suffrage est masculin et universel (mais il redevient
censitaire à partir de 1802). Mais les citoyens votent en fait pour des « notables » (à l'échelle de la commune, du
département et de la Nation), qui sont ensuite choisi par le Sénat (en fait par Napoléon) pour intégrer le Tribunat et
le Corps Législatif (où leur rôle est en fait très réduit). En revanche, ils peuvent élire les juges. Enfin, le Premier
Consul peut les consulter directement par un plébiscite (une question posée aux électeurs, à laquelle ils doivent
répondre par « oui » ou « non »).
Le véritable pouvoir est donc aux mains du Premier Consul, et dans le dialogue qu'il entretient avec les
Ministres, le Conseil d’État et le Sénat. Le reste sert juste à préserver les apparences de la République et de la
démocratie.

c- L’œuvre législatrice : « les masses de granit».


Dans bien des domaines, le Consulat (et son prolongement le Premier Empire) a donné naissance à la
France contemporaine. On appelle souvent cette grande œuvre réformatrice « les masses de granit », c'est- à- dire
des fondations solides d'une France nouvelle destinée à durer. En voici les principaux éléments (le thème est mis
entre parenthèses).
- Préfets (1800) (ADMINISTRATION, GOUVERNEMENT).
La Révolution avait donné naissance aux départements en 1790. Il s'agissait de rationaliser
l'administration du pays, en mettant fin aux vieilles provinces, dans lesquelles les bailliages, sénéchaussées et
villes jouissaient de privilèges très nombreux. Il fallait aussi harmoniser les poids (introduction du kilogramme)
et les mesures (généralisation du système métrique).
Dans le prolongement de cet effort, Napoléon instaura les préfets. Ceux- ci sont toujours les représentants
de l’État dans les départements (1 par département). En relation directe avec le sommet de l’État, ils permettent
une centralisation efficace du pouvoir et une bonne connaissance des réalités locales par le pouvoir central. Ils
veillent au maintien de l'ordre, à la levée des impôts, à la conscription (recrutement militaire), à l'exécution des
lois, doivent veiller au développement économique, animer la vie culturelle et religieuse, récompenser les citoyens
et les fonctionnaires méritants... Ils sont un rouage essentiel du pouvoir.
- Concordat (1801) (RELIGION, CONCORDE, ÉGALITÉ, LIBERTÉ)
Pour sortir des divisions religieuses nées de la Constitution Civile du Clergé de 1790 (nationalisation des
biens du Clergé, déchristianisation, guerre de Vendée, rupture entre la République et l’Église...), Napoléon décide
de rétablir la liberté religieuse en signant le Concordat (un concordat est un traité entre un État et l’Église
catholique).
Le Concordat est un compromis religieux et politique destiné à permettre la pacification du pays. Il
consiste à rendre la liberté religieuse aux français, tout en rappelant le poids historique et la prééminence du
Catholicisme.
Il permet aux catholiques de pouvoir à nouveau pratiquer leur religion en toute liberté. Le Catholicisme n'est
plus « religion d’État », mais il demeure « la religion de la majorité des Français », ce qui lui donne une place
particulière : si l’État ne lui rend pas les biens nationalisés qu'il avait vendu aux Français (bourgeoisie), il associe
l’Église au gouvernement de la France (Napoléon nomme les évêques et les prêtres, mais le Pape leur donne
l'investiture spirituelle). On en revient donc à une situation similaire à celle de la monarchie, mais plus équilibrée
car tenant compte de la DDHC.
En effet, toutes les autres religions sont reconnues (notamment les Juifs et les Protestants) et peuvent
librement accéder aux carrières de l’État. L'agnosticisme et l'athéisme sont admis. La tolérance religieuse
est donc généralisée.
- Légion d'Honneur (1802) (SERVICE DE L’ÉTAT)
Les ordres chevaleresques de l'Ancien Régime (Ordre de Saint Louis, Ordre du Saint Esprit...) ont disparu et
ont été remplacés par un ordre unique : l'Ordre National de la Légion d'Honneur. Il est destiné à honorer les
meilleurs serviteurs de l’État, tant civils (fonctionnaires, religieux, citoyens) que militaires (soldats et officiers).
C'est la plus ancienne et la plus haute distinction honorifique décernée en France, dont la devise est :
« Honneur et Patrie ».
- Lycée (1802) (ÉDUCATION)
Les lycées sont destinés à former la future « élite de la Nation », tant civile (hauts fonctionnaires) que
militaire (officiers et généraux). L'organisation et la discipline y sont militaires, la formation est à la fois littéraire
et scientifique.
En 1808 est instauré le baccalauréat, qui est le premier grade universitaire d’État (suivi par la licence, puis le
doctorat). Le premier baccalauréat, en 1809, comptait 31 bacheliers...
- Banque de France (1800) Franc germinal (1803) (MONNAIE, FINANCES)
La création de la Banque de France (1800) pour émettre la monnaie (le franc) et garantir sa valeur sur le
bimétallisme (or et argent) a permis de résoudre la crise économique qui frappait la France depuis la fin des
années 1780. La monnaie (pièces, billets) à valeur garantie sur un stock massif et réel de métaux précieux (or,
argent) redonne confiance à une population qui l'utilise massivement. D'autant que la prééminence de la France en
Europe et son expansion territoriale lui assurent une large diffusion et un nombre important d'usagers.

- Code Civil (21 mars 1804) (LOI)


Le Code Civil est l'ensemble des lois qui définissent les droits et les devoirs des personnes dans la société .
Il est destiné à être connu de tous et à permettre d'unifier les Français. Il fut imposé partout où les troupes
françaises entrèrent en Europe. Pour Napoléon, il était sa plus grande œuvre : « Ma vraie gloire n'est pas d'avoir
gagné quarante batailles ; Waterloo effacera le souvenir de tant de victoires. Ce que rien n'effacera, ce qui me
vivra éternellement, c'est mon Code civil. »

3- 1804- 1815 : le Premier Empire.

a- Du Consulat à l'Empire :
L'année 1802 marque un tournant : non seulement Napoléon parvient à contraindre l'Angleterre à la paix
(paix d'Amiens, un an après la paix de Lunéville avec l'Autriche) mais en prime il met fin à la division
religieuse du pays (Concordat). Sa popularité est immense : il est le pacificateur de la France et de l'Europe. Il
tente alors de renforcer son pouvoir et de le pérenniser : par le plébiscite du 02 août 1802, Napoléon devient
Premier Consul à vie.
Le 18 mai 1804, le Sénat le proclame « Empereur des Français », sous le nom de Napoléon Ier. A la suite de
la proclamation, un plébiscite fait approuver par une écrasante majorité de français « l'hérédité de la dignité
impériale ».
En deux ans, le « Premier Consul » est donc devenu « Empereur des Français ». Un nouveau pouvoir
impérial et une nouvelle dynastie règnent en France. Cette situation relance rapidement la guerre en
Europe.

b- Napoléon Ier, « Empereur des Français ».


- Le sacre : un nouveau pouvoir monarchique / impérial et dynastique.
Voir Jacques- Louis David, Le sacre de l'empereur Napoléon et de l'impératrice Joséphine, 1808.
Le 02 décembre 1804, la cérémonie du sacre impérial se déroule à Notre- Dame de Paris, en présence du
Pape. Elle fut marquée par le serment de l'Empereur : « Je jure de maintenir l'intégrité du territoire de la
République, de respecter les lois du Concordat et de la liberté des cultes ; de respecter et de faire respecter
l'égalité des droits, la liberté politique et civile, l'irrévocabilité des ventes des biens nationaux ; de ne lever aucun
impôt, de n'établir aucune taxe qu'en vertu de la loi ; de maintenir l'institution de la Légion d'honneur ; de
gouverner dans la seule vue de l'intérêt, du bonheur et de la gloire du peuple français. »
- Napoléon Ier / Louis XVI : analyse comparée.
Voir :
- François Gérard, Napoléon Ier en costume de sacre, 1805).
- Jean- Auguste Ingres, Napoléon Ier sur le trône impérial en costume de sacre,1806).
- Anne Louis Girodet de Roucy-Trioson, Napoléon en costume impérial, 1812.
- Hyacinthe Rigaud, Portrait de Louis XIV en costume de sacre, 1701.
- Antoine- François Callet, Louis XVI, roi de France et de Navarre revêtu du grand costume royal, 1779.
Un nouveau pouvoir, faisant le lien / la synthèse entre l'Ancien Régime et la Révolution, la Monarchie de
Droit Divin et la République est donc né, qu'il convient de comprendre, en étudiant notamment les symboles
impériaux et en les comparant avec les symboles royaux (les Regalia) sur les portraits en costume de sacre (ils
forment une image officielle de la manière dont le pouvoir se conçoit et veut être perçu, à l'intérieur comme à
l'extérieur du pays).
Napoléon Ier est donc une sorte de roi républicain (empereur), arrivé au pouvoir par son talent (Lumières,
DDHC) et la loi (les assemblées, les plébiscites), avec l'accord de l’Église (Pape, Concordat) et dans le respect
des autres religions minoritaires (Juifs, Protestants) : il incarne donc quelque chose de totalement nouveau en
France et en Europe, car il tente de construire sa légitimité dans le long et riche passé de la monarchie et du
catholicisme français tout en affirmant les principes de la Révolution (c'est ce qui explique à quel point il peut
séduire certains en Europe - notamment en Italie et en Allemagne - et en effrayer d'autres - notamment en
Angleterre, en Autriche et en Russie : Napoléon divise les Européens, car ils sentent qu'il change définitivement ce
Vieux Continent si figé dans ses traditions séculaires). Par conséquent, il reprend la plupart des symboles
royaux, mais il leur donne un sens nouveau, et en modifie parfois la forme / l'apparence.
Voir le tableau comparatif de la cérémonie du sacre (comparaison Monarchie / Empire).

c- L'Europe napoléonienne.
Voir la carte « L'histoire de Napoléon ».
Une Europe vaincue, envahie et réorganisée.
L'Europe coalisée contre la France est progressivement battue, conquise et réorganisée par la force des
armes, à l'occasion de campagnes militaires marquées par des batailles décisives :
- Trafalgar, 21 octobre 1805 : les Anglais gardent la maîtrise des mers face aux Français et leurs alliés
Espagnols. Cette suprématie permet à l'Angleterre de dominer hors d'Europe, et de maintenir son commerce
avec les Indes, qui lui permet de financer les coalitions successives contre la France et la rend inattaquable
par la France.
- Austerlitz, 02 décembre 1805, « la bataille des trois empereurs », un an après le sacre, contre les
Russes et les Autrichiens : la plus grande victoire de Napoléon.
- Iéna, 14 octobre 1806, victoire décisive contre la Prusse, qui va donner naissance au nationalisme
allemand et contribuer à transformer tout le XIXème siècle.
- Eylau, 08 février 1807 : la plus grande charge de cavalerie de l'histoire militaire.
- Friedland, 14 juin 1807, remportée contre la Prusse et la Russie, qui implique la paix de Tilsit avec la
Russie.
- Wagram, 5-6 juillet 1809 : victoire décisive contre l'Autriche.
- la campagne de Russie, 1812 : défaite totale, tournant du règne et début de la fin de l'empire.
- Leipzig, 16-19 octobre 1813 : principale défaite de Napoléon, à un contre deux et la trahison de ses
alliés.
- Waterloo, (18 juin 1815 : défaite finale de Napoléon contre la Prusse et l'Angleterre, qui entraîne la fin
de l'Empire.
Il en résulte :
- Une France agrandie : 130 départements (des villes comme Bruxelles, Amsterdam, Hambourg,
Turin, Florence ou Rome sont des villes françaises).
- Des pays frontaliers battus, envahis, soumis et gouvernés par des membres de la famille de
Napoléon : Espagne, Royaume de Naples, Confédération du Rhin...).
- Le cas particulier de la Pologne, conquise au XVIIIème siècle et partagée entre l'Autriche, Prusse
et Russie. Restaurée entre ces nations pour les prendre à revers.
- Les États « alliés » : militairement vaincus et contraints à une alliance avec la France.
- Les États « ennemis » : l'Angleterre, le Portugal et la Sardaigne.
- Un « blocus continental » (1806- 1814):l'Angleterre dominant les mers depuis Trafalgar (1805), et
la France n'étant plus capable de couper la route des Indes par la Méditerranée, elle cherche à ruiner le
Royaume- Uni en interdisant tout commerce avec l'Europe.
- La naissance du sentiment national en Europe. Avec la Révolution, la France est le premier
« État- Nation » d'Europe : les Français forment un peuple (une Nation) qui s'est librement donné son
État (la République) dont ils défendent les frontières attaquées par des ennemis. Puis, en gagnant la
guerre, les Français envahissent l'Europe et diffusent l'idée de Nation. Le sentiment national naît alors en
Italie, en Allemagne (après la défaite prussienne de Iéna en 1806), en Russie (la campagne française de
1812 provoque chez les Russes « la Grande Guerre Patriotique »), en Espagne (la conquête française est
violemment rejetée et combattue par une alliance menée par l’Église et les royalistes : les Espagnols
s'unissent contre les Français). Ce sentiment était déjà présent en Angleterre depuis la fin du Moyen Age
et l’Époque Moderne. C'est un élément fondamental qui structure tout le XIXème siècle, et qui donne
naissance à l'unification de l'Italie, puis de l'Allemagne (qui sera l'une des causes les plus profondes des
deux guerres mondiales au XXème siècle).
- L'effondrement et le Congrès de Vienne (1812- 1815) :
La campagne de Russie est le tournant de l'Empire et le début de son effondrement.
La Grande Armée qui entre en Russie est le plus importante jamais connue à l'époque (plus de 600 000 hommes
dont la moitié de Français). Elle remporte une série de victoires mais le général russe Koutouzov refuse le combat
en entraînant les Français toujours plus loin dans le pays et pratique la politique de la « terre brûlée » (tout ce qui
ne peut être emporté est détruit pour qu'il ne reste aucun ravitaillement aux Français). Malgré tout, Napoléon arrive
à Moscou pour y passer l'hiver. Mais la ville est victime d'un gigantesque incendie. Les Français doivent donc
rebrousser chemin en plein hiver sans y avoir été préparée et sans avoir pu se reposer, sans aucun
ravitaillement possible, et avec une armée russe préservée et combative sur ses arrières. C'est un désastre
total pour Napoléon : environ 75 000 hommes sortent vivants de Russie...
Les « alliés » s'unissent donc contre Napoléon : l'Autriche et la Prusse rejoignent l'Angleterre et la Russie.
Napoléon ne parvient pas à reprendre l'initiative de la guerre lors de la « bataille des nations » de Leipzig (1813).
Dès lors, l'invasion de la France est inévitable. Battu, Napoléon abdique et est déporté à l'île d'Elbe. Mais
Napoléon s'en échappe et reprend le pouvoir. Il a besoin d'une grande victoire décisive : il n'aura qu'une défaite
définitive à Waterloo (1815) face aux Prussiens et aux Anglais. Il doit donc abdiquer une seconde fois, et est
déporté en captivité à l'île de Sainte- Hélène, en plein cœur de l'Océan Atlantique (sous surveillance anglaise). Il
y meurt en 1821. Louis XVIII (frère de Louis XVI) revient à Paris après un long exil : commence alors une
nouvelle période, la Restauration (1815- 1848).
La chute de l'Empire provoque un redécoupage des frontières de l'Europe (Congrès de Vienne, 1815), qui
resteront très stables jusqu'en 1914, mis à part l'unification de l'Italie (le « Risorgimento », 1859- 1870) et de
l'Allemagne (1866- 1870). La France garde ses frontières de 1789 mais doit payer d'énormes indemnités de
guerre. Les principaux ennemis de Napoléon gagnent des territoires (Russie, Prusse, Autriche), notamment
sur la Pologne qui disparaît à nouveau. L'Autriche retrouve son rôle de principale puissance continentale et
reprend sont influence sur le Nord de l'Italie. Les monarchies sont partout restaurées.
Pourtant, le sentiment national continue d'alimenter d'importants événements révolutionnaires en France
et en Europe, notamment en 1830 et en 1848. La « question nationale » et la « question libérale » structurent
tout le XIXème siècle jusqu'en 1914 : ce sont des héritages de la Révolution Française.

Synthèse / résumé : troisième partie.

(1) Napoléon commence son ascension pendant le siège de Toulon en 1793 pendant la Terreur. La chute de
Robespierre (1794) le menace, mais il revient en se chargeant de la répression royaliste à Paris en 1795. Il
dirige alors la campagne d'Italie (1796- 1797), qui lui permet de se couvrir de gloire et qui met un terme à la
guerre contre l'Autriche (traité de Campo- Formio, 1797). Fondant sa conquête du pouvoir politique sur la
gloire militaire, il mène la campagne l’Égypte (1798- 1799) afin de soumettre l'Angleterre, mais c'est un
échec.

(2) En France, le pouvoir du Directoire est fragile, et un coup d’État se prépare au bénéfice de Bonaparte. Il
a lieu les 18 et 19 brumaire an VIII (09 et 10 novembre 1799). Il donne à la France un nouveau régime (le
Consulat). La Constitution met un terme à la Révolution et Napoléon devient Premier Consul. L'œuvre
politique est considérable : en quelques années, les fondations de la France contemporaine sont posées (les
« masses de granit »). Tandis que la guerre en Europe se poursuit, le Consulat évolue à partir de 1802 vers
l'Empire.

(3) Le nouveau pouvoir impérial (1804- 1815) fait la synthèse entre la Monarchie de droit divin (Ancien
Régime, pouvoir absolu d'un chef unique) et la Révolution (République, DDHC, citoyenneté, élections,
assemblées), ce que révèle notamment la comparaison des portraits de sacre de Louis XIV et de Napoléon Ier.
Les victoires de Napoléon transforment l'Europe (Austerlitz 1805, Iéna 1806, Wagram 1809...) et donnent
la prééminence à la France, qui compte alors 130 départements. Elles fondent la légende napoléonienne. Mais
l'Angleterre résiste et l'Europe subit le « blocus continental ».
En 1812, la campagne de Russie est un désastre absolu, qui mène à la chute de l'Empire (Waterloo, juin
1815) et à la Restauration (1815- 1848). Napoléon meurt en 1821 sur l'île de Sainte Hélène au milieu de
l'océan Atlantique. Tout au long du XIXème siècle, l'Europe est agitée par les héritages de la Révolution
(révolution de 1830 et « Printemps des Peuples » de 1848, unification de l'Italie et de l'Allemagne).

Vous aimerez peut-être aussi