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L'Europe entre restauration et révolution (1814-1848).

Introduction :
En 1814, les dirigeants européens réunis en Congrès à Vienne souhaitent clore la Révolution en
France comme en Europe, en restaurant l'ordre monarchique européen, c'est dire en rétablissant des
monarchies autoritaires, dans leurs possessions antérieures aux conquêtes révolutionnaires et
napoléoniennes.Mais l'oeuvre du Congrès de Vienne qui réorganise l'Europe après la défaite et la chute
de Napoléon Bonaparte est fragile dans une Europe qui reste marquée par l'expérience révolutionnaire
et les idées politiques que celle-ci a diffusé.
L'Europe est donc secouée par des contestations qui croisent les revendications libérales et
nationales étouffées par ces monarchies autoritaires, et connaît deux poussées révolutionnaires en 1830
et 1848, en France puis dans le reste de l'Europe.Sauf en France, où elles aboutissent à des changements de
régime politique,ces mouvements révolutionnaires sont fortement réprimée.
En quoi la fragilité de la restauration de l'ordre monarchique après 1814 témoigne-t-elle de la
persistance des idéaux révolutionnaires ?

I-Un nouvel équilibre européen instable, entre réaction, idées nouvelles et contestations.

1-Le congrès de Vienne (1814 1815):construire un nouvel ordre européen.

PPO : Metternich et l'ordre de Vienne de 1814 à 1830 (pages 64-65) questions 1 et 2 p 65.
A la chute du Premier Empire, les représentants de 216 Etats européens se réunissent en congrès à
Vienne (septembre 1814-juin 1815) pour ramener paix et stabilité en Europe après les bouleversements
révolutionnaires.Le congrès est animé par Metternich, chancelier et ministre des affaires étrangères
autrichien, et dominé par les puissances européennes qui ont vaincu Napoléon, (Autriche, Prusse,
Russie et Angleterre) qui souhaitent redessiner la carte de l'Europe à leur profit.
Mise en place du « concert européen » Une nouvelle diplomatie multilatérale ( privilégiant les relations
entre plusieurs Etats,aussi appelée « concert des nations » ou « concert européen »), fondée sur l'équilibre
entre les puissances. Elle ne tient pas compte des aspirations libérales et nationales.
Les objectifs :
-Restaurer purement et simplement l'ordre ancien, d'avant 1789. Ainsi Metternich est inflexible sur le
rétablissement de l'influence autrichienne en Italie.
-Rétablir ordre et stabilité.
-Mise en avant de valeurs communes (christianisme, Lumières du 1er XVIIIème siècle).Volonté des princes
de refermer la Révolution française : courant politique réactionnaire,contre-révolutionnaire, s'appuyant sur
des valeurs traditionnelles comme la religion.
Mais impossible d'effacer totalement la dimension sociale de la Révolution et l'influence des Lumières:
on constate le maintien de quelques libertés (en particulier liberté de conscience), ou la fin des systèmes
féodaux. En outre l'idée de l'Etat et de la Nation s'est fortement implantée dans de nombreux territoires.
=> volonté de trouver un nouvel équilibre entre retour à l'ordre et intégration des idées nouvelles.
La Sainte Alliance . Un nouveau système d'alliance,la « Sainte Alliance »,fondé en 1815 en marge du
congrès sous l'impulsion de Metternich, et réunissant l'Autriche, la Prusse et la Russie, pour écraser toute
révolution en Europe. La France s'y associe dans un second temps (1818). Elle affirme le pouvoir absolu
d'essence divine des rois et l'obligation faite au peuple d'obéir. Le Royaume Uni s'y joint au départ,
puis la quitte années 1820 en raison des premières interventions contre-révolutionnaires (Naples, Espagne).

2-La restauration d'une Europe monarchique.


Le congrès de Vienne refait la carte de l'Europe et remet les princes sur leurs trônes en leur
restituant leurs territoires sans se soucier des volontés des populations locales .
-la France perd ses acquisitions de la période révolutionnaire et de l'Empire,et revient en gros aux
frontières de 1791.
-La Pologne disparaît à nouveau, partagée entre Prusse, Autriche, Russie.
-L'Autriche récupère le contrôle de l'essentiel de l'Italie du Nord.
-Les monarchies sont rétablies : France, Espagne, Etats italiens
-Les revendications « nationales » ne sont pas écoutées:pas d'Allemagne unifiée, pas d'Italie car les
princes locaux récupèrent leurs biens et l'Italie reste fragmentée en de multiples Etats. Pas de Pologne
puisque dépecée au profit des vainqueurs.Les grands empires multinationaux, l'Autriche et la Russie,
veillent au contraire à récupérer leurs territoires.
3-Les mouvements de contestation,essor, succès et échecs.

Cependant les idées libérales et nationales issues de la Révolution française ne sont pas mortes.Les
libéraux exigent des constitutions.Les peuples sans Etat ,en particulier ceux qui se trouvent intégrés en tout
ou partie dans les grands empires mutinationaux comme l'Autriche et la Russie (patriotes polonais, italiens,
allemands, mais aussi Hongrois ; Grecs de l'Empire Ottoman) réclament un Etat-nation : Etat composé d'une
population partageant une culture communs et la volonté de vivre ensemble, formant donc une nation.

a-Idées libérales :
Revendications libérales :constitution, séparation des pouvoirs, élection de représentants,
libertés..Elles concernent d'abord les élites qui réclament une participation au pouvoir et une limitation
des pouvoirs des monarques.Mais la politisation progresse et touche progressivement l'ensemble de
la bourgeoisie puis certains membres des couches populaires:entre 1830 et 1848, montée des idées
démocratiques et de la revendication de suffrage universel.

b-Idée de nation et « mouvement des nationalités » :


Allemagne,Italie, Pologne..Elle trouve une traduction dans la culture populaire, la proximité
linguistique, ou l'exaltation du passé (Italie), ou encore l'identité religieuse (Grèce orthodoxe). Elle est
soutenue par le mouvement du romantisme (exaltation des sentiments).Exemple : mouvement italien du
Risorgimento (renaissance, réveil..). Cette communauté culturelle conduit à la volonté de vivre ensemble
dans un même Etat indépendant: de former une nation.

c-Tensions et répression.
Les libéraux et patriotes, étroitement surveillés par les polices politiques qui se développent,
limités dans la plupart des Etats par la censure et l'interdiction de réunion et d'association ,s'organisent et
circulent à travers l'Europe pour fuir la répression. Des sociétés secrètes sont créées comme les
Carbonari, partisans de l'unité italienne. Des révolutions libérales éclatent dès 1820 (Espagne, Portugal,
Naples, Sicile) mais échouent : la Sainte-Alliance, rejointe par la France, veille.
Ces conflits culminent avec les révolutions de 1830 et 1848.
1830:mouvement qui associe les libéraux (bourgeoisie essentiellement), les ouvriers (question
sociale), les patriotes selon les pays. A la suite du succès de la révolution parisienne (libérale).Mouvements
insurrectionnels en Italie du Nord (Parme, Modène) contre la domination autrichienne ; dans les territoires
polonais contre la domination prussienne et russe. Mais sauf Belgique, échec et forte répression (1831).
Le mouvement national est réprimé en même temps que le mouvement libéral. Il se heurte aux
puissances d'Europe centrale.

d-Les rivalités entre les puissances ouvrent cependant des failles dans l'ordre du Congrès de Vienne
dont profitent les mouvements de nationalités.
L'indépendance de la Grèce illustre ces rivalités,liées ici à la « question d'Orient ».La Grèce est
soumise à l'Empire ottoman peu acquis aux idées nouvelles mais en cours d'affaiblissement.Les élites
grecques adhèrent aux idées libérales issues des Lumières, et proclament l'indépendance de la Grèce.
Les Ottomans ripostent par une répression très brutale et un massacre dans l'île de Chios (1822).
Les Grecs reçoivent l'appui d'une partie des élites occidentales, notamment en France ou au RU où l'on
redécouvre l'héritage grec tout en s'émouvant de la situation d'un peuple chrétien.
Dans le même temps,l'affaiblissement de l'Empire ottoman aiguise les appétits des puissances
européennes, surtout les plus proches, l'Autriche, qui espère récupérer des territoires dans les Balkans, et la
Russie qui espère améliorer son accès à la Méditerranée. Metternich s'efforce vainement de neutraliser le
Tsar Nicolas 1er qui veut soutenir la Grèce et qui en 1826 entraîne les Français et les Britanniques. En 1829,
la Grèce obtient son indépendance.
La Belgique obtient aussi son indépendance en 1831 pour éviter des tensions entre France et R-U.

II-En France, l'échec des expériences de monarchie constitutionnelle.

1-La restauration.
Les puissances victorieuses de Napoléon Ier ont envahi la France en 1814 et imposent un frère de
Louis XVI,Louis XVIII (1814-1824) sur le trône.Rentré en France « dans les wagons de l'ennemi »,
momentanément chassé par le retour de NB durant les 100 jours, il lui faut se faire accepter.
Partisan d'une réconciliation des Français,il ne revient pas à la monarchie absolue : il proclame
une Charte instaurant une monarchie constitutionnelle : deux chambres détiennent le pouvoir législatif :
celle des députés élue au suffrage censitaire (seuls les plus riches peuvent voter et être élus), celle des
pairs nommés par le roi. Le roi garde des pouvoirs étendus car il a le contrôle des chambres.
Louis XVIII conserve également tout ce qui est nécessaire pour le maintien de la paix civile et
l’acceptation de la restauration par les Français :
- Les anciens « biens nationaux »,propriétés des nobles en fuite qui avaient été vendues, et
rachetées par des bourgeois essentiellement, ne sont pas restitués.
- L'égalité devant la loi est conservée (plus de privilèges);mais il n'y a pas d'égalité politique en
raison du suffrage censitaire.
- La liberté de culte et certaines libertés individuelles.
- L’organisation administrative fondée par la Révolution et remaniée par Napoléon.

Il n’y a donc pas de retour à la société d’Ancien Régime, ni même à la monarchie absolue. Les acquis
de la Révolution validés par NB sont conservés. On retrouve quelque chose d'assez ressemblant aux choix
de 1789-91 avec une monarchie constitutionnelle, qui favorise le rôle politique des plus riches, des libertés
individuelles et une égalité en droit.
Cependant,ce régime est aussi réactionnaire, avec des mesures symboliques pour s'inscrire
hors du cadre révolutionnaire: la Charte est octroyée par le roi (sous-entendu,parce qu'il le veut bien, ce
n'est pas un droit du peuple,elle ne porte pas simplement le nom de constitution) ; le drapeau tricolore est
remplacé par le drapeau blanc, la Marseillaise est interdite.
Sur le plan extérieur, la France suit la politique des souverains réactionnaires définie à
Vienne:dès 1818, la monarchie française intègre la Sainte-Alliance et participe à la répression de
mouvements libéraux (en Espagne en 1823).
Ces choix ne permettent pas de régler toutes les tensions : en effet, une partie des royalistes
cherche à parvenir à un retour à la situation d'avant 1789 : ce sont les “ultras” (plus royalistes que le roi).Face
à eux, les défenseurs de la Charte, les libéraux , sont majoritaires à la chambre des députés.Enfin, des
républicains restent attachés aux héritages révolutionnaires.La liberté d'expression permet à la population
de critiquer le régime (chansons, caricatures..).
A l’avènement de Charles X (1824-1830) en 1824 la situation se tend : le nouveau roi ,lui aussi un
frère de Louis XVI,est un ultra, et faute d’avoir une majorité qui lui convienne à l’Assemblée aux élections de
1830, il la dissout et gouverne par ordonnances (acte par lequel le roi édicte des règles juridiques) : il
supprime la liberté de la presse, modifie le mode d'élection des députés pour s'assurer d'une
majorité ....4 ordonnances, le 26 juillet 1830 mettent le feu aux poudres.

2-La révolution de 1830 : « Les Trois Glorieuses »,juillet 1830.

PPO: 27,28,29 juillet 1830 - Trois Glorieuses pour la liberté (pages 68-69)
A l'origine,un conflit et une crise politique entre le nouveau roi, Charles X et la Chambre autour
de la Charte.Le roi souhaite rétablir l'ordre antérieur à la Révolution.Il s'oppose aux notables libéraux. Le
conflit porte sur le vote, sur la liberté de la presse, sur la place de l'Eglise. Mais il faut tenir compte également
d'un contexte de crise économique.
La politique de Charles X et le gouvernement par ordonnances,perçu comme un véritable coup
d'Etat et une volonté de retour à la monarchie absolue, entraîne la protestation des libéraux. Des émeutes
éclatent les 27, 28 et 29 juillet 1830 : Paris se couvre de barricades. Ce sont les Trois Glorieuses.
Bourgeois et ouvriers s'allient pour défendre les acquis de 1789. Les combats entre les insurgés et les
troupes royales font plus de 500 morts mais aboutissent à la destitution de Charles X.
Cette révolution souligne le rôle central de la France,et en particulier de Paris, dans la tension
entre ordre ancien et idées nouvelles.On y retrouve les « journées révolutionnaires » avec l'intervention
d'une partie du peuple parisien. La résolution de la crise montre l'impossibilité d'un retour à l'ordre ancien,
mais également la volonté des notables de maintenir un cadre conservateur, avec la monarchie de
Juillet et Louis Philippe, une monarchie constitutionnelle.
Une vague révolutionnaire parcourt aussi l'Europe :elle relance le mouvement des nationalités en
Belgique, Pologne ou Italie. Les Belges proclament leur indépendance et se dotent d'une constitution libérale.
Mais les révoltes échouent en Italie et en Pologne.
La révolution parisienne est étroitement liée au reste de l'Europe:d'une part de nombreux étrangers,
présents en France, participent à ces journées ; d'autre part de nombreux exilés européens , libéraux ou
parfois républicains,se réfugient ensuite en France.

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