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Évolutions

Avril 2014
Volume 26
n° 104 Psychomotrices

Psychomotricité
en Argentine
Revue éditée par la Fédération Européenne des Psychomotriciens Assistant de rédaction : Nicolas Raynal, Violaine Verschoore
(Président fondateur : Philippe Choupin), en partenariat avec
l’Organisation Internationale de Psychomotricité et de Relaxation Secrétariat de rédaction :
Directeur de la publication : Gérard Hermant Anne Grisez, Aurélie Thomas, Sophie Bednarek
Rédactrice en chef : Alexandrine Saint-Cast
Traduction espagnol : Bérénice Flipo
Comité de rédaction :
Anne-Elisabeth Alba, Jean-Michel Albaret, Séverine Békier, Conception–PAO–impression : Groupe Assistance Printing
Sabine Amoretti, Pascal Bourger, Véronique Defiolles, Brigitte Feuillerat, 113/121 Avenue du Président Wilson – 93210 La Plaine Saint Denis
Denis Grabot, Yves Le Roux, Jean-Paul Pes, Catherine Potel, Isabelle Sage, 4 numéros par an.
Philippe Scialom, Aude Valentin Lefranc ISSN : 1157 – 1039
Dépôt légal : à parution.
Comité scientifique : Prix au numéro : 25 €
Gisèle Apter, Jean-José Baranes, Jacques Corraze, Gilbert Huault,
Liliane Lurçat, Fabrice de Sainte-Maréville, Bernard Thon, Jocelyne Vaysse La revue ÉVOLUTIONS PSYCHOMOTRICES est indexée dans les bases de
données PASCAL et EMC ainsi que dans le bulletin signalétique du REEDOC
Correspondants étrangers :
Franco Boscaini (Italie), Pablo Bottini (Argentine), Marta Cañizarez Direction, rédaction, service abonnements :
Hernandez (Cuba), Philippe Chantalat (Luxembourg), Lone Frimodt 5 rue Copernic – 75116 Paris
(Danemark), Juan-Antoño Garcia-Nuñez (Espagne), Tatiana Gurovich abonnement-revue@psychomotricite.com
(Chili), Carla Matta Abizeid (Liban), Juan Mila Demarchi (Uruguay), redactionep@psychomotricite.com
Galo Pesantez Cuesta (Equateur), Rui Roque Martins (Portugal), www.evolutions-psychomotrices.com
Pabla Ruiz Mendes (Paraguay), Maria-Beatriz Da Silva Loureiro (Brésil),
Begoña Suarez Riaño (Mexique), Jean-Pierre Yernaux (Belgique) Tous droits de reproduction strictement réservés.
Les articles, interviews et notes de lecture sont publiés sous la responsabilité
des auteurs.
Sommaire
Introduction
Bérénice Flipo 64

Psychomotricité en Argentine
La formation de l’étudiant en psychomotricité en Argentine 66
Pablo Bottini et Miguel Sassano
Concepts psychomoteurs et applications cliniques 71
Pablo Bottini
Réflexion théorique et clinique au sujet du dispositif groupal
en géronto-psychomotricité 79
Sebastián Buniva
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires
et l’apport de la psychomotricité 86
Claudia Marcela Carta et Natividad Castellani

Variations psychomotrices
Quels sont les champs d’action du psychomotricien auprès des enfants
et des adultes avec des troubles du spectre autistique
entre pratiques recommandées et programmes globaux ? 95
Aurélien d’Ignazio
Contribution psychomotrice à l’éducation d’enfants en situation de handicap.
Conjugaison de différents points de vue 106
Marguerite Héron de Florès
Syndrôme(s) dépressif(s) expression psychomotrice :
prise en charge d’enfants de 9 à 13 ans présentant une dépression grave –
après tentative de suicide – par le traitement de la relaxation 113
Théodore-Yves Nassé

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Introduction
« Caminante, no hay camino, se hace camino al andar1 »
Antonio Machado.

Pourquoi pars-tu ? Sais-tu ce qui t’attend, là-bas, si loin ? Une personne, un travail, un projet peut-être ?

En réalité, pas vraiment. Une opportunité, oui. Une porte, que j’aperçois déjà entrouverte. Un pays immense, un
monde que je ne connais pas. Une culture autre qui m’attire depuis trop longtemps.

Je suis née un 3 juillet et cette même date sera celle choisie pour la délivrance du diplôme d’État. Après trois
magnifiques années passées dans le sud de la France à découvrir et à vivre la psychomotricité, me voilà habilitée à
exercer la profession à laquelle j’aspire depuis longtemps.

Le 11 septembre 2014, peu avant minuit, un avion décolle de Madrid en direction de Buenos Aires, capitale de
l’Argentine.

Rapidement, je m’accoutume à l’ambiance « porteña2 ». Je découvre une ville bruyante à l’allure folle, surpeuplée,
et où l’air est à la fête. Bien que l’Argentine soit le pays « le plus européanisé » de l’Amérique du sud, je trouve quant
à moi que l’écart entre nos modes de vie est grand.

À Buenos Aires, une grande partie du travail n’est pas déclaré. L’insécurité sociale, politique et financière, alimente
une certaine méfiance que j’ai pu ressentir au fil de mon voyage. L’organisation est difficile et les Argentins ne semblent
pas souffrir du stress auquel nous, européens, sommes habitués. Le rapport au temps est complètement différent.
En effet, le retard est une notion que j’ai du réapprendre : attendre un groupe, un professionnel, les membres d’une
équipe pour une réunion, un patient et même un ami est devenu un phénomène presque quotidien. Lorsque, bien
sur, la personne se présente au rendez-vous !

Par ailleurs, cette flexibilité se retrouve au niveau social. Il est aisé, en Argentine, d’entrer en contact avec les
autres, d’échanger, de demander conseil et d’inviter chez soi. Le cadre est moins strict que chez nous, et entreprendre
quelque chose ou lancer un projet implique moins de contraintes.

Au niveau de l’éducation, l’enfant me semble être placé au centre du groupe familial et social. S’alignant sur le
modèle américain, la culture de « l’enfant-roi » m’a marquée. Le cadre proposé est souple, les limites souvent non
respectées et peu de choses sont refusées aux enfants.

J’ai rencontré Pablo Bottini3, psychomotricien à Buenos Aires, dès mon arrivée sur le sol argentin. Nous échangions
par mail depuis quelques mois et la proposition qu’il me fit de venir découvrir l’approche psychomotrice à ses côtés a
été l’une des motivations principales de mon voyage. Nous avons travaillé ensemble dans un centre de santé situé en
périphérie de Buenos Aires, dans un quartier très défavorisé. L’équipe était alors constituée de cinq psychomotriciens,
une kinésithérapeute et une orthophoniste. Nous recevions des enfants souffrants essentiellement de trouble
relationnel et moteur. Une séance durait environ une demi-heure. Un professionnel interagissait avec l’enfant au
centre, tandis que les autres restaient en observation autour du binôme et une personne filmait la séance.

1
Traduction proposée : Toi qui marches, saches qu’il n’y a pas de chemin, le chemin se fait en marchant.
2
« Porteño » est une expression courante utilisée pour désigner les habitants de Buenos Aires.
3
Pablo Bottini est psychomotricien, enseignant en psychomotricité et Délégué O.I.P.R

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Comme cette activité ne me prenait qu’une demi-journée par semaine, j’ai commencé le travail en libéral. J’ai
rencontré notamment la psychologue scolaire du collège-lycée franco-argentin qui m’a proposé d’intégrer son équipe
et m’a permis de disposer d’un cabinet pour recevoir quelques patients.

De retour d’un grand voyage à travers la belle Argentine pendant l’été, en décembre et janvier, je fais la délicieuse
rencontre de Coline et Nathalie, psychomotriciennes arrivées depuis peu à Buenos Aires, avec qui des liens se nouent
immédiatement. Outre nos « matinées psychomot’ » où nous échangeons expériences et projets, nous décidons de
créer et proposer un groupe « Éveil psychomoteur » à l’école maternelle rattachée au lycée franco-argentin de Buenos
Aires. Ce projet est accepté et nous recevrons un groupe d’enfants de trois et quatre ans, tous les vendredis, durant
une heure et demi. Parcours psychomoteurs, jeux collectifs, voyages dans l’imaginaire, chants, musique et moments
de relaxation seront les médiations privilégiées que nous utiliserons avec ce groupe.

Par ailleurs, mon espagnol s’enrichissant, je propose à Alexandrine Saint-Cast mes services pour la traduction de
textes. Je commence donc à traduire quelques articles avant que Madame Saint-Cast me propose de coordonner un
numéro de revue qui sera dédié à la psychomotricité en Argentine. J’accepte avec grand plaisir et rencontre Miguel
Sassano4, ami et collègue de Pablo Bottini, avec qui nous échangeons sur ce projet.

La traduction de ces différents articles n’a pas été toujours simple. En effet, la langue argentine me paraît
beaucoup moins stricte au niveau grammatical et syntaxique. Le mouvement du texte, la structuration des phrases,
la ponctuation (et son absence), sont des éléments qui ont parfois questionné ma rigidité linguistique et m’ont causé
certaines difficultés.

Mon expérience en Argentine a été d’une richesse indéniable. Riche de voyages, riche de rencontres, riche de
découvertes et d’expériences.

Cette revue représente un ensemble d’articles suggérés par Pablo et Miguel. Elle se donne pour objectif de vous
présenter quelques textes écrits par des psychomotriciens argentins. Leur lecture vous permettra, je l’espère, d’avoir
un meilleur aperçu de l’approche psychomotrice de nos lointains, et pourtant si proches, collègues.

Je tiens à remercier toutes les personnes qui ont fait partie de ce voyage, aux équipes qui m’ont accueillie et
intégrée, et particulièrement à Pablo qui m’a accompagné à bras ouverts tout au long de ce périple.

Bonne lecture,

Bérénice Flipo,
Psychomotricienne DE

4
Miguel Sassano est psychomotricien, enseignant en psychomotricité et professeur d’éducation physique à Buenos Aires.

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
La formation de l’étudiant
en psychomotricité en Argentine
The psychomotor student’s formation
in Argentina
La formación del estudiante en psicomotricidad
en Argentina
Pablo Bottini*, Psychomotricien, Délégué de l’Organisation Internationale
de Psychomotricité et de Relaxation pour l’Argentine
Miguel Sassano, Psychomotricien, Directeur MUOVE, Argentine
* bottinipablo@hotmail.com
** msassano@fibertel.com.ar

Résumé Mots-clés
Cet article traite de l’évolution et de l’histoire académique de Didactique – Profil professionnel – Compétences profession-
la profession de psychomotricien en Argentine. Profession qui nelles – Pédagogie des sciences et techniques du corps – Cur-
a souvent été l’objet de débats relatifs à sa définition puisqu’elle riculum
se trouve au croisement de nombreuses disciplines. Le lecteur
pourra constater au fil de sa lecture que nous fûmes les auteurs,
architectes et constructeurs de cette histoire. C’est de ce point
de vue engagé que ce texte est rédigé.
Cette lecture permet de comprendre l’évolution de la profession
et l’élaboration d’un cursus de qualité, depuis les débuts jusqu’à
leur reconnaissance légale.

Summary Key words


This paper exposes the evolution and academic history of psycho- Didactics – Professional profile – Professional skills – Pedagogy
motrician profession in Argentina. Profession which definition of body sciences and techniques – Curriculum
was often debated because of its position at crossroads of many
disciplines. The reader will note that we were the authors, archi-
tects and builders of this history. This paper is written from this
engaged posture
This reading helps understanding the evolution of the profession
and the development of a valued curriculum, from the beginning
until legal recognition.

Resumen Palabras claves


Este articulo trata sobre la evolución y la historia académica de la Didáctica – Perfil profesional – Competencias profesionales –
profesión de psicomotricista en Argentina. Esta es una profesión Pedagogía de las ciencias y técnicas del cuerpo – Curriculum
que a menudo se ha discutido, para definir, ya que se encuentra
en la encrucijada de muchas disciplinas. El lector notará ya que
éramos los autores, los arquitectos y los constructores de esta
historia. Así que hablamos de este punto de vista.
Esta lectura ayudará a comprender la evolución de la profesión y
el desarrollo de un plan de estudios de calidad, desde el principio
hasta su reconocimiento legal.

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
La formation de l’étudiant en psychomotricité en Argentine

INTRODUCTION
Cet écrit expose l’évolution et l’histoire académique de la profession de psychomotricien en
Argentine, alors qu’aujourd’hui le degré d’évolution pratique de cette discipline confirme le succès
de ce long chemin. Durant ce parcours, en tant qu’acteurs de cette conquête professionnelle nous
avons douté, discuté, mais sommes restes motivés et passionnés, comme le font ceux qui aiment
réellement ce qu’ils font.

Par exemple nous avons rendu visite à neuf universités, publiques et privées, afin de leur
présenter notre projet. Entre hésitations et intérêt, nous ne reçûmes finalement aucune adhésion
franche. Nous fûmes même sujets à des critiques de la part de certains anciens collègues, qui le
rejetèrent. Nous avons cependant continué à avancer et, petit à petit, des personnes se sont jointes
à nous. Nous étions nous-mêmes en train d’ouvrir de nouvelles voies quant au développement
de notre projet. Bien ou mal mené, nous l’avons surtout réalisé en pensant aux autres et, par là
même, avons transformé une profession qui était légitime en profession légale.

LES PREMIÈRES FORMATIONS PROFESSIONNELLES NON DIPLÔMÉES


Dalila Molina de Costallat, élève de Julian de Ajuriaguerra et de Gisèle B. Soubiran, est
l’une des innovatrices de la thématique en Argentine. Formée en France, elle introduit à son
retour les premiers concepts de notre profession et commence à former des enseignants et des
professionnels et publie ses premiers textes à la fin des années soixante. Parallèlement, Lydia F.
Coriat forme de nombreux professionnels dans les domaines de l’observation, de l’évaluation et
de l’intervention dans la petite enfance. Elle recommande auprès des autorités universitaires une
formation professionnelle spécifique en psychomotricité.

Au cours de l’année 1977, un groupe de professionnels crée l’Association Argentine de


Psychomotricité dont les objectifs centraux sont la promotion de la discipline et la formation
de professionnels. Peu après cette création et dans le but de remplir un rôle de formation pro-
fessionnelle, elle crée l’École Argentine de Psychomotricité. Pendant plus de vingt ans, cette
structure fonctionnera comme centre de formation postuniversitaire à Buenos Aires. Au sein de
celui-ci sont admis des professionnels et des professeurs rattachés au domaine de la santé ou de
l’éducation. Ils y obtiennent une certification de spécialisation mais avec comme unique garantie
la qualité, le sérieux de l’institution et le prestige du corps enseignant.

LES FORMATIONS DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR


NON UNIVERSITAIRE
Dans la province de Córdoba, Domingo Cabred obtient, il y a déjà plus de trente ans, le
droit de former des professeurs en Éducation Psychomotrice et crée l’institut public de formation
qui porte maintenant son nom. Il met ainsi en place la première institution du pays qui délivre
des attestations de formation supérieure avec reconnaissance officielle. En 1989, on obtiendra les
titres de « professeur de psychomotricité » et de « psychomotricien ».

En 1993, le ministère de l’Éducation de la province de Santa Fe autorise l’Institut Supérieur


Particulier privé Umbral à ouvrir le cursus de « Technique Supérieur en Psychomotricité ».

En 1994, c’est l’Institut Alta Casa d’Amérique du Sud, aujourd’hui ACES, institut privé,
qui est reconnu par ce ministère pour le développement le projet pilote de « Formation de Psy-
chomotriciens » dans la ville de Buenos Aires.

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
La formation de l’étudiant en psychomotricité en Argentine

Aujourd’hui ces projets ont évolué. D’autres organismes ont vu le jour comme l’Institut
Supérieur de La Salle, privé, le Centre d’Études Interdisciplinaires pour l’Apprentissage et la
Communication – CEIAC, privé), l’Institut Luis Tezza, etc., tous situés à Buenos Aires.

Par ailleurs, des techniques psycho-corporelles sontenseignées au sein d’instituts supérieurs


non universitaires dans les provinces de Salta : Institut Intecipro, de Tucumán : Institut Decroly,
de Catamarca qui a depuis fermé et de Neuquén : Institut EQS.

LES FORMATIONS UNIVERSITAIRES


Actuellement en Argentine, l’étudiant en psychomotricité est formé au sein d’un cadre
institutionnel dédié. Il étudie au sein d’une université, publique ou privée, dans le cadre régle-
mentaire de la loi n° 24.521/1995 de l’Éducation Supérieure. Pour exercer en Argentine, il faut
avoir obtenu le diplôme général et des spécialisations dans les domaines qui requièrent des
connaissances spécifiques. Ceci est différent de ce que l’on rencontre dans d’autres pays où le
diplôme d’exercice est généraliste. Ainsi chaque université formant des psychomotriciens est
reconnue pour la filière, soumise à des contrôles de qualité, portant sur l’évaluation générale de
l’institution et sur les spécialités proposées.

La formation de l’étudiant en psychomotricité fait une large part à l’expérience psycho-


corporelle. Elle lui permet d’enrichir ses compétences dans les registres de l’impression et de
l’expression corporelles, d’accéder à un mieux-être dans le temps et dans l’espace, à une régula-
tion de l’extraversion et de l’énergie, ce qui facilite ou permet la relation. De plus, elle vise à ce
que chacun puisse trouver et assumer sa place dans le monde. Belz (1994) soutient que « […] la
formation personnelle comme la clinique reposent sur ces interrogations et qu’il est nécessaire
de les considérer comme prééminentes : cette profession représente une orientation spécifique qui
requiert ses propres aptitudes et dispositions. Une sélection adéquate et approuvée du contenu
de la formation doit garantir le maintien du niveau de compétence souhaité et exigé par cette
discipline. Pour cela, il est nécessaire que cette formation se distingue en trois niveaux :

1. Théorique : psychomotricité, psychologie, sociologie, psychiatrie, neurologie, neuro-


psychophysiologie, anatomie, physiologie, pédagogie, pédiatrie, stimulation précoce,
gériatrie, initiation médicale, législation, déontologie.

2. Vécu corporel  : confrontation à des expériences pratiques et dynamiques en petits


groupes avec une fréquence et une durée régulière, savoir-être, savoir réaliser sa propre
psychomotricité et celle des autres, connaître son fonctionnement, ses failles, ses intérêts
et ses aptitudes, être capable de manier les ressemblances et les différences, la relation,
la communication, les techniques, les méthodes et les démarches psychomotrices et
psychocorporelles.

3. Pratique professionnelle : information, sensibilisation, observation, participation aux


soins d’une thérapie psychomotrice et à la vie d’équipe d’une institution. L’étudiant
devra se confronter progressivement au travail thérapeutique, tant pour ce qui concerne
la préparation du projet (élaboration de la demande, examen psychomoteur) que pour
son application proprement dite. Seront abordées les indications fondamentales de la
prise en charge psychomotrice et l’étudiant pourra participer aux réunions de synthèse
cliniques. Il est recommandé que celui-ci puisse travailler différents aspects (normalité,
prévention, débuts de prise en charge, traitement) avec diverses populations. »

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
La formation de l’étudiant en psychomotricité en Argentine

La formation en psychomotricité ne peut se limiter à acquérir uniquement des connaissances


techniques. Le futur spécialiste doit pouvoir expérimenter ses différents systèmes relationnels.
La pratique de la thérapie psychomotrice implique la personnalité du thérapeute. Elle est le fruit
d’apprentissages pratiques et d’expériences, tant en le familiarisant avec ce qu’il est et avec ce qu’il
est en train de devenir, que de ce qu’il sait et apprend.

En gardant à l’esprit ces conditions académiques associées à l’approche personnelle, c’est


finalement en août 1999 que commence une nouvelle étape pour les formations professionnelles en
Argentine. En vertu d’une résolution, le Ministère de l’Éducation de la Nation autorise l’université
privée CAECE de Buenos Aires à créer la première filière de psychomotricité. Cette dernière,
reconnue nationalement, pourra se développer au sein des milieux de l’éducation, de la santé et
de l’intervention précoce. Parallèlement, dans le domaine des sciences pédagogiques, une filière
identique est implantée. Nous en seront les coordinateurs académiques.

Quelques temps après, l’Université Nationale de Cuyo dans la Province de Mendoza et


l’Université Nationale Tres de Febrero dans la province de Buenos Aires ouvrent un cycle de
post-diplôme en Psychomotricité Éducative.

Enfin nous ouvrons avec Roberto Paterno, à l’Université privée Morón de Buenos Aires
une Licence de Psychomotricité, au sein de la Faculté de Philosophie, Sciences de l’Éducation
et Sociologie. Le programme est présenté dans l’encadré.

programme de la licence en psychomotricité délivrée par


l’université moron de buenos aires
Compétences professionnelles
En vue de l’exercice de son futur métier, l’étudiant en psychomotricité est préparé pour les tâches
et fonctions suivantes :
Réaliser des évaluations utilisant différents moyens diagnostics
(épreuves, tests, observation de l’expression corporelle spontanée) dans le but
de déterminer le niveau de développement psychomoteur de bébés, enfants,
adolescents, adultes et personnes âgées.
Diagnostiquer le fonctionnement psychomoteur des aspects préservés et/ou altérés
du corps et élaborer des pronostics d’évolution.
Participer à la dynamique des institutions de Santé et d’Éducation et réaliser
des actions en faveur de l’intervention précoce dans les cas de dysfonctionnements
du développement psychomoteur.
Effectuer des prises en charge traitant de troubles psychomoteurs, d’altérations
tonico-posturales et de troubles de développement.
Réaliser, de façon individuelle et collective, des activités de stimulation corporelle
avec des bébés, enfants, adolescents, adultes et personnes âgées, dans le but de favoriser
ou de maintenir un développement psychomoteur équilibré.
Promouvoir, dans le milieu de l’Éducation, des actions et des activités qui mettent
en jeu le corps et le mouvement.
Conseiller et participer aux projets et à l’intégration d’actions qui favorisent
le développement des capacités physiques aux différents âges de la vie.
Participer à la conception, conduite, supervision, exécution et évaluation d’activités
préventives des troubles psychomoteurs et du développement.
Élaborer, conduire, superviser et évaluer plans, programmes et projets d’intervention
psychomotrice et de stimulation précoce, individuelle et groupale, dans les domaines
de l’Éducation et de la Santé. …
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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
La formation de l’étudiant en psychomotricité en Argentine


Participer
 au sein de l’équipe interdisciplinaire aux échanges concernant le soin
psychomoteur de personnes ayant des besoins spécifiques.
D iriger et coordonner des équipes professionnelles et des institutions consacrées
aux problématiques spécifiques énumérées précédemment, mais aussi de personnes
ayant des besoins éducatifs spécifiques.
R éaliser et promouvoir des actions scientifiques et académiques pour la diffusion,
l’approfondissement et l’échange autour de la psychomotricité, dans les milieux
de l’Éducation et de la Santé.
P articiper à la formation de psychomotriciens et de professionnels de la Santé
et de l’Éducation.
A u niveau politique, conseiller et participer à la création de lois dans les domaines
éducatifs et sanitaires à partir de l’approche psychomotrice.

De plus, au sein de la même université, le ministère de l’Éducation, des Sciences et de la


Technologie, autorisa le fonctionnement d’une filière avec des conditions spécifiques d’entrée,
destinée à des professionnels détenteurs d’autres diplômes universitaires. Ces derniers purent
alors suivre le cursus à partir d’une reconnaissance de leurs études antérieures.

RÉFLEXIONS FINALES ET PERSPECTIVES


Comme le constate Hermant : « Parler de l’avenir des études et de la profession n’est pas
sans risques [….] Qui aurait pu envisager que le champ d’application, à l’origine limité à l’enfant
scolarisé en difficulté d’apprentissage, s’étendrait aujourd’hui à tous les âges de la vie ? […] Les
années 2000 portent la psychomotricité à un statut de profession totalement autonome […] Jamais
une profession paramédicale n’a connu un tel développement. La psychomotricité est devenue
un phénomène de société. » (Hermant, 2005, p.64-68). Cette évolution et cette reconnaissance
puisent leur racine et leur assise dans des formations institutionnalisées et reconnues, basées sur
l’équilibre entre la transmission de savoirs théorique, la maîtrise de techniques spécifiques et
l’engagement tonico-émotionnel.

Références bibliographiques
Bottini, P. & Sassano, M. (1999). Claves para Sassano, M. & Bottini, P. (1991). Psicomotri-
la comprensión de las características, del campo cidad : antecedentes, evolución y realidad actual.
de acción y ejercicio profesional de la psicomo- Cuadernos de Psicomotricidad y Educación Espe-
tricidad. El Cisne, 112. cial, 3.
Bottini, P. & Sassano, M. (2013). Las prácticas Sassano, M. & Bottini, P. (2000). Psicomo-
y los conceptos del cuerpo. Buenos Aires : Miño tricidad, prácticas y conceptos, Madrid : Miño
yt Dávila. et Dávila.
Hermant, G. (2005). La psychomotricité dans Sassano, M. (2003). Psicomotricidad, una his-
le monde, origines, évolutions, actualités et pers- toria y un presente. Revue Kiné, 54.
pectives. Evolutions psychomotrices, 17(68), 61- Sassano, M. (2013). La construcción del yo cor-
70. poral. Buenos Aires : Miño y Dávila.
Richard, J., Rubio, L. & col. (1994). Terapia
psicomotriz. Barcelona : Masson.

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Concepts psychomoteurs
et applications cliniques
Psychomotor concepts and clinical applications
Conceptos psicomotores y aplicación clínica
Pablo Bottini*, Psychomotricien, Délégué de l’Organisation Internationale
de Psychomotricité et de Relaxation pour l’Argentine
* bottinipablo@hotmail.com

Résumé Mots-clés
La thématique du corps et de ses acceptions est considérée Phénoménologie – Complexité – Concepts psychomoteurs –
comme fondamentale pour le développement des pratiques Guidance parentale – Développement psychomoteur
corporelles et psychomotrices. Les diverses positions et théo-
ries qui se sont développées autour de ce thème se rejoignent
dans la considération du corps en tant que substrat matériel de
toute action humaine. L’intention de l’auteur est de proposer
aux professionnels un cadre réunissant la diversité des pratiques
corporelles et des thérapeutiques psychomotrices.
Comme plusieurs voies sont possibles, chacun choisira le sens
qui lui convient.
L’exposé conceptuel est illustré d’une histoire clinique.

Abstract Key words


The theme of the body and its meanings is considered as funda- Phenomenology – Complexity – Psychomotor Concepts – Paren-
mental for the development of body and psychomotor practices. tal Guidance – Psychomotor development
The diverse positions and theories developed around this theme
join in the consideration of the body as material substratum of
any human action. The intention of the author is to propose to
the professionals a frame combining the diversity of the body and
psychomotor practices and therapeutic.
As several ways are possible, each will choose the direction which
suits him or her.

Resumen Palabras claves


La temática del cuerpo sus acepciones es dada por fundamental Fenomenología – Complejidad – Conceptos psicomotores –
para el desarrollo de las prácticas corporales y psicomotoras. Las Orientación parental – Desarrollo psicomotor
distintas posiciones y teorías que se desarrollaron en torno a este
tema se juntan en la consideración del cuerpo como substrato
material de toda acción humana. La intención dela autor es pro-
poner un marco para los profesionales que trabajan con prácticas
corporales, y especialmente los psicomotricistas. A continuación,
como no hay una única vía posible, cada uno elegirá el sentido
que le conviene mejor para definir su práctica diaria.

71
Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Concepts psychomoteurs et applications cliniques

DU CORPS ET DE SES ACCEPTIONS


La pratique psychomotrice est née de l’observation de phénomènes qui, en raison de leur spé-
cificité, ne pouvaient pas être pris en charge par une discipline scientifique. En effet ils résistaient
et ne pouvaient être compris à partir des champs de compétence existants. Ils nécessitaient une
approche spécifique et adaptée à leur complexité. À partir des différentes acceptions, les concepts
relatifs au corps et aux productions qu’il crée ont été mis en évidence et utilisés par de nombreux
psychomotriciens pour rendre compte de leur pratique (Bottini, 1998 ; Boscaini, 2002 ; Calmels,
2003 ; Contant & Calza, 1991 ; Da Fonseca, 1998 ; Suárez Riaño, 2002 ; Sassano, 2002). En uti-
lisant le corps comme axe des actions éducatives ou thérapeutiques, on obtient une réponse non
automatisée au trouble du mouvement qui affecte le développement psychomoteur.

Malgré l’importance accordée au corps dans la pratique psychomotrice, de nombreux auteurs


ne précisent pas à quel concept ou quelle vision ils se réfèrent. Certains le font par omission,
d’autres par choix, mais ils ne semblent pas percevoir que le corps mérite une prise en charge dif-
férente et plus spécifique. D’autres auteurs pensent trouver dans la vision psychanalytique relative
au corps les concepts appropriés pour rendre compte, théoriquement parlant, des fondements de
la pratique psychomotrice.

C’est en quelque sorte pour cela que le questionnement autour du corps est très ancien et
qu’il a connu et connaît encore aujourd’hui beaucoup des acceptions variées. Il est en constant
remaniement étant donné les progrès scientifiques mais surtout suite à l’évolution spectaculaire
prise par la recherche en neurosciences de ces dernières années.

ANTÉCÉDENTS PHILOSOPHIQUES DU DUALISME


La distinction entre les termes qui renvoient à la condition matérielle de l’homme est très
ancienne. Elle se retrouve dans de nombreuses cultures, particulièrement en ce qui concerne la
séparation entre le tangible, le palpable et ce qui a une fin - le corps ; et ce qui serait immuable,
immatériel, intangible, associé au divin et à l’éternel - l’âme (Gigon, 1962). Cette distinction
ancienne a engendré un profond dualisme dans nos conceptions scientifiques occidentales. Les
domaines de connaissances qui en découlent déterminent une vision morcelée de la complexe
réalité des choses, créant ainsi une disjonction conceptuelle qui a de graves conséquences pour
la santé de la planète et de ses habitants (Morin, 1994). Cette séparation a été si intense que ces
penseurs, dont Descartes, Galilée et beaucoup de mathématiciens, ont attribué un caractère divin
à la capacité de penser et de raisonner ; et un autre néfaste à la condition matérielle, dont résulte
la finitude de l’humain : son corps.

Depuis la Grèce antique et jusqu’à aujourd’hui, cette question philosophique a façonné la


pensée occidentale et a généré le paradigme de la pensée scientifique désormais appelé « dua-
lisme cartésien » (Bottini et Sassano, 2000). Cette façon d’appréhender les sciences a presque été
abandonnée aux alentours de la seconde guerre mondiale avec la découverte et l’application des
phénomènes atomiques qui contredisent les lois de la physique classique (Capra, 1985). La remise
en question du modèle classique a favorisé l’apparition d’une nouvelle manière d’appréhender les
problèmes car, de par leurs caractères complexes, il était difficile de les réduire au cadre restreint
dont on disposait à l’époque.

Cela concerne aussi la pratique psychomotrice qui est née dans le but d’aborder le développe-
ment global de la personne au moyen du corps et du mouvement. La définition suivante, proposée
pour le Forum Européen de Psychomotricité, reflète l’ampleur de la psychomotricité aujourd’hui :
« Basée sur une vision globale de la personne, la psychomotricité intègre les interactions cognitives,
symboliques et sensorimotrices dans les capacités d’être et d’expression et au sein d’un contexte
psychosocial. La psychomotricité est une discipline scientifique qui agit dans le milieu éducatif et

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Concepts psychomoteurs et applications cliniques

thérapeutique en favorisant les processus sensitivo-perceptivo-moteurs qui contribuent au déve-


loppement des structures psychiques et des systèmes fonctionnels de l’être humain ». Néanmoins
toutes les tentatives de rendre compte de l’approche globale de la psychomotricité ne sont pas
cohérentes. Ainsi, pour expliquer la nature de l’affection chez une personne qui souffre d’un trouble
psychomoteur, nous en sommes arrivés à séparer les causes d’origine organiques et fonctionnelles
d’un côté (Benos, 1973) ; et mentales et psychologiques de l’autre (Levin, 1991).

Le concept de corps est ici utilisé dans le but d’unir ces deux visions. Loin d’être univoque,
ce concept est défini par de nombreux domaines philosophiques et scientifiques. Le problème
surgit alors de l’ambiguïté découlant de ces multiples définitions. La philosophie moderne a donné
naissance à des courants qui permettent de surpasser le dualisme : l’existentialisme et le phéno-
ménologique : « L’union de l’âme et du corps n’est pas scellée par un décret arbitraire entre deux
termes extérieurs, l’un objet, l’autre sujet. Elle s’accomplit à chaque instant dans le mouvement de
l’existence » (Merleau-Ponty, 1945, p.105).

Les termes de « corps » et d’ « organisme » continuent d’être confondus ou utilisés indistincte-


ment pour parler de la dimension biologique de l’homme, ce qui est partiellement correct et mérite
une distinction. Le terme « organisme » trouve lui aussi ses racines dans la philosophie grecque,
interprété dans le sens d’instrument lié au mécanique et à l’organisation propre des machines. Des-
taca Ferrater Mora (1994) souligne que cette acception fut déjà remplacée au milieu du XVIIIème
siècle. Plus tard ce terme fut utilisé comme adjectif pour qualifier certains corps, comme les corps
biologiques, ce qui opposa alors le mécanique et l’organique. Malgré d’importantes variations
apportées par les écoles philosophiques ou scientifiques, le concept qui a persisté jusqu’à nos jours
est celui de l’organique comme présentant un ordre et une organisation déterminés.

RÉPERCUSSIONS SUR LA CONCEPTION DE LA PSYCHOMOTRICITÉ


DES VISIONS DUALISTES ET AUTRES PROPOSITIONS
Rappelons que la pratique psychomotrice est destinée à favoriser le développement global de la
personne au moyen du corps et du mouvement, afin d’aborder les troubles qui l’affectent sans pour
autant exclure une pathologie d’origine strictement organique ou psychologique (De Ajuriaguerra,
1984). Elle propose ainsi de réaliser une approche globale de la personne.

Dans certains courants psychanalytiques, l’utilisation du terme « corps » se réfère à des phéno-
mènes d’ordre humain, même si pour se distinguer d’autres sciences telle que la biologie, les concep-
tions psychanalytiques feront appel au corps tel que « corps du sujet » pour désigner le caractère
psychologique implicite. Ce type de conceptualisation a pris une grande ampleur dans la pratique
psychomotrice et cela se retrouve dans les écrits de nombreux collègues. Cela engendre un nouveau
problème conceptuel puisqu’il n’existe pas d’accord entre les différents courants psychanalytiques
pour aborder la notion de corps. Sami Ali (1992), Paín (1996) et Castoriadis (1998) s’éloignent
de la conception purement biologique ou organique du corps mais plantent un nouveau dualisme,
celui de « psychisme-corps ». Au sujet de la relation corps-psyché, Castoriadis (1998) soutient qu’
« […] il y a une sorte de globalité de l’être humain qui est à la fois corps et âme, où le corps est
toujours, en un sens, psychique, et la psyché toujours, à certains égards, somatique. Cela ne peut
pas toujours être décrit simplement par la polarité consciente-inconsciente, et encore moins par le
refoulé. Celui qui est affecté par la maladie d’un organe profond ne sera pas conscient de cela, mais
uniquement de sa douleur. C’est pareil avec le plaisir, même avec le plaisir d’organe et le plaisir plus
général d’être chacun bien dans son corps. » (p.111-112) Bien que l’auteur ne mette pas l’accent
sur la différenciation entre corps et organisme, il n’a pas oublié de mentionner dans ses exemples
le corps dans sa dimension biologique. Il affirme l’impossibilité de surpasser le dualisme corps et
âme étant donné les différences existantes entre les phénomènes psychiques et somatiques tout
en soulignant à la fois leur interdépendance : « Non seulement si l’on coupe la tête de quelqu’un,

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Concepts psychomoteurs et applications cliniques

le processus psychique s’interrompt, mais on constate aussi que, lorsqu’on donne de l’alcool à une
personne, soit elle se met à raconter des choses qu’elle ne raconterait pas dans un autre contexte,
soit elle s’énerve, soit encore elle nous donne une gifle » (Ibid, p.109).

Sami Ali (1992) souligne la condition métapsychologique du corps de la façon suivante :


« À la limite du dedans et du dehors, de la perception et du fantasme, le corps est un schéma de
représentation qui se charge de structurer l’expérience du monde aux niveaux conscient, précon-
scient et inconscient. Le corps est ainsi une fonction de synthèse dont la projection ponctue les
moments essentiels. Cependant, la projection est d’abord sensorielle. En effet, les premières rela-
tions objectales aidant, lentement et patiemment se déploie, à travers toute la sensorimotricité et
notamment la vision binoculaire, un processus projectif qui découpe un dedans et un dehors, avant
d’introduire la troisième dimension, et des objets-images du corps, avant d’accéder à l’objectivité »
(p. 80). Malgré la place que l’auteur attribue au corps dans la fonction métapsychologique, il ne
peut omettre que son caractère reste d’abord organique.

Paín (1996), quant à elle, souhaite dépasser le dualisme organisme-psychisme et propose pour
cela une distinction entre corps et organisme basée sur le fait qu’ « […] il y a un corps réel, distinct
de l’organisme et en grande partie indépendant de lui. L’organisme est ainsi un système d’autoré-
gulation admis tandis que le corps est un médiateur et un synthétiseur des comportements utiles à
l’appropriation de l’environnement par le sujet » (p. 116). Pour éclaircir son point de vue, elle ajoute :
« L’organisme serait au corps ce qu’un enregistreur est à l’instrument de musique. L’organisme peut
fonctionner selon un programme déjà enregistré et l’instrument de musique représente la possi-
bilité de combinaisons quasi infinies […] de création et de modulation personnelle. L’organisme
s’apprivoise, s’habitue, se soigne ; le corps essaie, se trompe, se corrige, apprend. » (Paín, 1996,
p.117). Dans le but de dépasser le dualisme corps-psyché, l’auteure pousse sa conceptualisation à
de tels extrêmes qu’elle créée alors un nouveau dualisme entre corps et organisme. Elle fait ainsi
naître une véritable distinction théorique, et non plus conceptuelle, afin de mettre en exergue la
différence entre ces deux notions et qui va à l’encontre de ce que découvrent aujourd’hui les neu-
rosciences : les neurones miroirs (Iacoboni, 2009, cité par Tallis, 2012, p.40). Bien qu’elle ne nie
pas explicitement la condition biologique de la genèse du corps, elle polarise cependant dans ses
exemples la distinction entre ces concepts et brouille ainsi le substrat biologico-organique, néces-
saire à l’existence du corps. C’est d’ailleurs cette relation intime qui est soulignée par Castoriadis
(1998) et Sami Ali (1992), lorsqu’ils parlent de la « […] genèse de la fonction métapsychologique
du corps ». Ce qui est plus net est que l’auteure parle d’une dimension de l’organique qu’elle réduit
au mécanique. Comme l’affirme Mora (1994), cette conception est révolue depuis le milieu du
XVIIIème siècle. Outre cette auteure, tous les courants d’origine psychanalytique reportent d’une
manière ou l’autre l’importance des phénomènes organiques avant les phénomènes psychiques, ce
qui semble raisonnable étant donné le champ d’application de la psychanalyse. Ce qui s’avère plus
préoccupant c’est qu’au lieu d’apporter des distinctions conceptuelles qui permettent de proposer
une approche globale de la psychomotricité, il se créé une véritable disjonction conceptuelle.

Distinguer, c’est « […] connaître la différence existante entre les choses et faire en sorte que
l’une se différencie théoriquement de l’autre par un signe particulier ». (Clarín, 2003, p.260). Cela
dit, menée à outrance, la distinction provoque un saut qualitatif et laisse chaque concept en disjonc-
tion, séparés les uns des autres. Alors, bien que ces deux termes de corps et organisme impliquent
d’une manière ou d’une autre une séparation, ils se différencient dans le sens d’une désunion et
non dans la distinction. D’autre part, nous ne devons pas oublier que les théories psychanalytiques
que nous mentionnons partent de concepts basiques du corps, déjà apportés par Freud dans ses
réflexions sur l’hystérie. Ainsi, bien que certains proposent des alternatives, comme par exemple
Sami Ali avec sa conceptualisation de l’unité psychosomatique, le support de ces réflexions reste
l’état pathologique du corps.

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Concepts psychomoteurs et applications cliniques

À partir d’une théorie basée sur les neurosciences, Da Fonseca adhère à une vision neuro-
psychologique et affirme que : « La notion de corps renvoie à une représentation plus ou moins
consciente de notre corps dynamique, postural et spatial. Son revêtement cutané permet le contact
avec le monde extérieur ainsi que la formation d’un processus psychologique, dont le substrat
neurologique sont les données sensorielles. Ces dernières prennent naissance à la superficie et à
la périphérie pour aller jusqu’au cerveau, où elles s’organisent en modèle plastique intégré dans
le cortex pariétal » (Da Fonseca, 1998, p.194). « La notion de corps désigne l’alphabet et l’atlas
du corps, sa carte sémantique avec des équivalents visuels, tactiles, kinesthésiques et auditifs
(linguistiques), véritable composition des mémoires de toutes les parties du corps et de toutes ses
expériences […] . En tant que carte, le corps est indispensable pour « naviguer » dans l’espace ; en
tant qu’alphabet, il est nécessaire pour communiquer et pour apprendre. Il représente le point de
référence spatial, l’instrument de réalisation et de création, et l’appui de la structure du « Je ». Le
corps est une construction bio-psycho-sociale et le produit final des expériences agréables et désa-
gréables de la vie » (Da Fonseca, 1998, p.193). Bien que l’auteur souligne ici la pluridimension du
corps, nous trouvons, dans d’autres de ses textes, trop peu d’intérêt accordé à la vie émotionnelle
de la personne dans son approche du développement psychomoteur. Néanmoins cette approche,
notamment le caractère bio-psycho-social attribué à la notion de corps, pose les principes de base
de la pratique psychomotrice. L’approche globale de la personne permet de comprendre avec une
égale importance les bases organiques, corporelles et psychologiques du développement psycho-
moteur normal et du trouble psychomoteur.

ACCEPTIONS DU CORPS ET PRATIQUE PSYCHOMOTRICE


Il est indispensable de baser notre pratique sur des acceptions qui permettent de rendre compte
de la complexité de la notion de corps, à partir d’une approche globale de la personne. Ce concept,
fondé sur les nouveaux paradigmes scientifiques, amène à penser la personne comme un système
complexe ou auto-organisé. « Le système (du grec « systema », une chose composée) renvoie à la
composition ordonnée d’éléments (matériels ou mentaux) en un tout unifié. Un système, dans son
ensemble, est qualitativement différent de la somme de chacun des éléments qui le composent et
fonctionne d’une manière distincte » (Simon & Simon, 1988). Concevoir la personne comme un
système nécessite quelques précisions, et c’est pour cela qu’il est important de spécifier son caractère
complexe ou auto-organisé. Lorsque nous parlons d’auto-organisation, nous nous référons à ce que
Simon (1988) décrit comme « […] la capacité qu’ont les systèmes de pouvoir modifier leur structure
lorsque des changements surviennent dans leur milieu, aboutissant en général à un niveau plus
élevé de complexité et favorisant ainsi les possibilités de survie. » « Le concept d’auto-organisation
est habituellement utilisé comme un terme générique qui comprend les concepts de système
auto-réparateur, système d’apprentissage et système autoreproducteur. Entre ces systèmes figurent
les êtres vivants tout comme les familles, les groupes sociaux et les sociétés. Le point essentiel
de l’auto-organisation est l’effort fourni pour atteindre un équilibre dans un milieu en constant
changement. Cela n’est possible que si le système conserve la capacité de créer de nouveaux élé-
ments constitutifs » (Simon & col., 1988). Il faut ainsi considérer la personne comme une structure
fonctionnelle qui, dans la mesure où elle se développe, doit créer ses propres sub-structures pour
s’adapter à son milieu interne et à un contexte en constant changement.

Morin (1994) soutient que les systèmes ont une capacité d’organisation permanente, propre
aux systèmes vivants. On considère, en psychomotricité, que le système-personne se constitue de
trois sous-systèmes : tonico-affectivo-émotionnel, moteur-instrumental et praxico-cognitif. Cela
rend compte d’un certain niveau d’auto-éco-organisation et d’autonomie (Bottini, 2000). En
même temps, tout système auto-organisé interagit avec d’autres systèmes qui conditionnent son
développement : le système familial, l’institutionnel et le socio-culturel. Cette considération soulève
une autre caractéristique des systèmes complexes : sa condition d’auto-exo-référent. (Morin, 1994).
Ce point de vue permet de faire des distinctions entre les sources d’information, sub-système et
système, qui convergent pour favoriser le développement psychomoteur de la personne.

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Concepts psychomoteurs et applications cliniques

ILLUSTRATION CLINIQUE
LÉO, OU LES ALÉAS DU CORPS AU-DELÀ DE L’AFFECTION
ORGANIQUE
L’histoire de Léo peut être intéressante pour expliquerillustre la pluridimension de l’acception
du corps. Malgré des contraintes d’origine organique, l’investissement du corps dans le sens de cor-
poréité peut aider à les dépasser. Une intervention thérapeutique psychomotrice peut permettre aux
vécus corporels de trouver du sens et ainsi favoriser un développement psychomoteur harmonieux.

Lorsque les parents de Léo consultent, leur fils âgé de trois ans va à l’école maternelle. Ils
viennent sur recommandation d’une de ses maîtresses qui observe une baisse importante de ses
habiletés psychomotrices. C’est ensuite une collègue psychopédagogue qui les met en relation
avec nous. Les praxies de l’enfant sont conditionnées par les séquelles d‘une méningite sévère qu’il
connut à ses huit mois. Cette affection a engendré environ un mois d’hospitalisation pour favoriser
la récupération de l’enfant qui risquait de mourir. À cause d’une erreur de diagnostic, Léo fait une
septicémie et subit une intervention chirurgicale pour favoriser le drainage du liquide accumulé
dans la zone affectée. Il convulse aussi. Suite à cela, l’enfant présente une hypotonie généralisée
et une affection du nerf optique. Au vu de ses affections, les parents demandent une reconnais-
sance de handicap. Au moment de la consultation, l’enfant a déjà fait l’objet d’un traitement de
stimulation précoce en kinésithérapie durant deux ans. Les parents n’observant plus de progrès, ils
décident de commencer une thérapie psychomotrice. Cependant, et quoi qu’en pensent les parents,
les séquelles auraient certainement été pires si le premier traitement n’avait pas été mis en place.

Lorsque Léo a été conçu, ses parents ne désiraient pas d’enfant, mais décidèrent tout de même
de poursuivre la grossesse. Malgré leur tentative de cohabitation durant la grossesse et après la
naissance de leur fils, ils se séparent. Le père reste dans la maison tandis que la mère déménage
avec Léo dans un appartement cédé par ses grands-parents. Les parents, qui ont tous deux refait
leur vie, disent maintenir une bonne relation et être globalement en accord en ce qui concerne
l’éducation de leur fils. D’une certaine manière, nous pouvons dire que le père minimise certaines
séquelles présentées par Léo. Ainsi il déclare : « Si nous ne racontons pas son histoire, vous ne vous
en rendez pas compte. Il n’y a presque pas de différence par rapport aux autres enfants. » La mère
est plus consciente face aux troubles présentés par son fils. Les grands-parents paternels comme
maternels sont présents dans l’accompagnement de Léo.

Nous allons à présent relater certains points qui nous ont interpellés et qui nous ont amenés
à travailler, avec les parents, au niveau de l’éducation. La mère, surtout, se montra plus à l’écoute
des suggestions thérapeutiques malgré une grande peur et une certaine inquiétude. Il ne faut
pas oublier que la maman accompagne Léo quotidiennement, et que c’est elle qui est confron-
tée, chaque jour, aux décisions à prendre ou aux conflits à résoudre. Par peur que son fils ne soit
victime de convulsions lorsqu’elle est seule avec lui, la maman dort avec Léo dans sa chambre et
ce, malgré le désir de son fils de dormir seul dans la sienne. Ce point a demandé beaucoup de
travail et il a fallu collaborer avec elle afin qu’elle puisse prendre du recul sur la situation réelle
actuelle. Tout d’abord, Léo n’avait plus déclenché de convulsions depuis deux ans et sans médi-
cament. De plus, chez son père, l’enfant dormait seul dans sa chambre et cela ne lui avait jamais
fait peur. Un an environ après le début du traitement en psychomotricité, Léo investit sa chambre
définitivement, évènement important pour lui et sa maman. Il est alors convenu avec la maman
de renforcer certaines règles afin de favoriser l’autonomie de son fils pour les actes de la vie quo-
tidienne. Il était en effet fréquent d’observer que la mère l’habillait, lui lavait les mains, etc. Ces
situations nous amenèrent à questionner la maman à propos de la façon dont elle gérait l’hygiène
et l’alimentation à la maison. De nombreux entretiens furent nécessaires pour qu’elle accepte peu
à peu de le laisser faire, l’assistant par la parole et retirant ainsi des appuis à mesure que Léo déve-
loppait ses compétences en s’appropriant ses actions. Le plaisir de l’enfant de pouvoir exprimer et

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Concepts psychomoteurs et applications cliniques

montrer chacune de ses réussites fut un point essentiel durant le suivi. Il a été fondamental pour
nous de comprendre que l’angoisse de la mère provenait du fait qu’elle ait connu son fils au bord
de la mort, mais aussi d’entendre qu’elle se sentait très seule. Nous pouvons ici faire le lien avec
une référence théorique importante relative aux thérapies systémiques. Neimeyer (2007) écrit que :
« Nous vivons nos vies comme des histoires. […] Elles ont une structure différenciée, une séquence
d’évènements remplis de significations qui mettent en évidence qui nous sommes et donnent du
sens à ce que nous devenons. » Pour la mère de Léo, étant donné la maladie de son fils, les histoires
préexistantes étaient absentes de sa représentation mentale. Elle était créatrice d’une histoire avec
lui dans laquelle elle ne pouvait pas trouver ces paramètres. Cette sensation diminua puisqu’elle
se rendit compte qu’en permettant à Léo d’être plus autonome, celui-ci se montrait de plus en
plus patient et, le plus important, Léo le faisait en adoptant une ferme attitude résiliente (Melillo,
2001). Léo réclamait chaque fois plus d’espace d’autonomie. Ce processus n’a pas été linéaire et
sans régressions. Chaque fièvre que connut Léo, chaque coup et chaque chute engendraient chez
la maman un retour à ses anciens modes de relation. Cela cessa malgré tout petit à petit, Léo les
tolérant aussi de moins en moins. La relation entre la maman de Léo et son conjoint a aussi permis
d’ajouter un paramètre masculin dans l’éducation de son fils. Grâce au football qu’il proposa à Léo
par exemple, la maman l’inscrira à un club adapté à son âge.

Dans l’espace de la thérapie psychomotrice Léo essayait de nouvelles manières d’agir. En


partant de ses propositions habituelles de jeux tranquilles et peu engagés sur le plan corporel, il
essaya de nouveaux jeux qui impliquaient de grands mouvements, permis par la présence d’éléments
invitant le déploiement moteur. Il put ainsi ramper, lancer, sauter, grimper, autant de mouvements
qu’il n’avait que peu effectués. Un jour, la maman nous confia une anecdote. Lors d’une consultation
chez le neuropédiatre qui le connait depuis longtemps, elle dit au médecin que Léo n’arrivait pas
à sauter sur un pied et que la maîtresse l’avait remarqué pendant le jeu de la marelle. En sortant
de l’entretien, à quelques mètres du cabinet, Léo demande à sa maman d’attendre et, se mettant
debout sur un pied, commence à sauter. « Tu vois que je peux, maman ! » À partir de ce moment,
Léo commença à jouer avec ses camarades au jeu de la marelle. Par ailleurs, une psychopédagogue
prit en charge Léo pour l’aider au niveau de son développement cognitif et de son intégration
scolaire. Elle assistait quotidiennement Léo dans ses transferts scolaires et de façon individuelle
quand cela était nécessaire pour le travail. La psychopédagogue s’occupa de l’orientation du travail
d’accompagnement et d’éducation de Léo avec le papa. Ingénieur comme son père, ce dernier
comprenait mieux l’intérêt du travail cognitif mis en place avec son enfant, que la préoccupation
pour le développement de ses mouvements. D’un autre côté, l’école se montra chaque fois plus
perméable aux suggestions de l’équipe soignante, donnant des signaux clairs de tranquillité aux
parents et gratifiant leur enfant pour ses réussites. Ce rôle fut fondamental pour que le passage
à l’école primaire se fasse sans peurs infondées quant aux potentialités de Léo. Léo et sa famille
vont sans doute tirer parti de leur histoire, apprenant de celle-ci et lui donnant une signification
différente, se l’appropriant pour une meilleure qualité de vie (Neimeyer & Mahoney, 1998). Malgré
sa maladie et ses séquelles Léo a réussi à apprendre à vivre son corps en mouvement, à vivre les
possibilités que celui-ci lui offre plus que les limites qu’il lui impose.

CONCLUSION
De Ajuriaguerra considérait la diversité des significations du corps depuis différents points
de vue. L’autre occupe une place importante dans la construction du corps. La famille représente
un lieu dans lequel l’être humain passe une grande partie de sa vie, et notamment les différentes
phases de l’évolution : néonatalité, enfance, adolescence. Elle est le premier environnement social
duquel dépend l’enfant et où l’adulte sert de modèle. Au fil du temps, l’adulte, par son action, va
provoquer une modélisation et créer des marges d’indépendance qui peuvent être vues comme
un excès de participation ou un rejet ou encore une automatisation et une projection (Nardone
et co., 2003). Les psychomotriciens et praticiens corporels doivent faire attention à la complexité
de la notion du corps, pour éviter d’appauvrir et de brouiller la compréhension du développement

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Concepts psychomoteurs et applications cliniques

humain et psychomoteur. Comprendre qu’il n’y a pas de séparation possible entre les notions de
corps et d’organisme mais une relation mutuelle et dialectique transformatrice, organisationnelle
complexe qui mérite d’être pensée comme « organisationalisante » (Morin, Ibid).

Les symptômes apparaissent durant les crises évolutives qui impliquent des changements
de règles et de structure, cherchant ainsi à stabiliser l’exigence familiale. Le concept de globalité
amène à penser le développement de la personne en considérant sa condition bio-psycho-socio-
éco-culturelle (Bottini, 2000), son caractère multiconditionné, tout comme la pluridimensionnalité
du corps, substrat primordial pour la compréhension de la personne

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78
Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Réflexion théorique et clinique
au sujet du dispositif groupal
en géronto-psychomotricité
Theoretical and clinical reflections on psychomotor
therapeutic groups
Reflexiones teóricas y clínicas sobre el dispositivo
grupal en psicomotricidad
Sebastián Buniva, psychomotricien

Résumé Mots-clés
En raison de l’augmentation significative de la population du Géronto-psychomotricité – Vieillissement psychomoteur – Invo-
troisième âge, de l’amélioration de la prévention et de la qualité lution psychomotrice – Dynamique de groupe - Intégration bio-
de vie de la personne âgée, les psychomotriciens sont de plus en psycho-sociale
plus sollicités auprès des personnes âgées.
Après un rappel sur le vieillissement et l’involution psychomotrice,
des notions de géronto-psychomotricité sont abordées en lien avec
un abord pluridimensionnel du corps. Puis ce texte présente une
réflexion sur l’intérêt du groupe pour les personnes âgées.

Abstract Key words


Because of the significant increase of the aged population, the Geronto-psychomotricity – Psychomotor ageing – Psychomotor
improvement of the prevention and the quality of life of the involution – Group dynamic – Bio-psycho-social integration
elderly persons, the psychomotor therapists are more and more
requested with theim.
After a presentation of ageing and psychomotor involution, no-
tions of elder-psychomotricity are exposed in connection with
a pluridimensional vision of the body. Then this text presents
a reflection about the interest of group therapy for the elderly.

Resumen Palabras claves


Debido al aumento significativo de la población de la tercera edad, Geronto-psicomotricidad – Envejecimiento psicomotor – Invo-
del mejoramiento de la prevención y de la calidad de vida de los lución psicomotora – Dinámica de grupo – Integración bio-psi-
ancianos, los psicomotricistas son cada vez más solicitados cerca co-social
de estas personas.
Después de una presentación sobre el envejecimiento y la invo-
lución psicomotriz, nociones de geronto-psicomotricidad son
abordadas en lazo con una visión pluri-dimensional del cuerpo.
Luego este texto presenta una reflexión sobre el interés del grupo
para los ancianos.

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Réflexion théorique et clinique au sujet du dispositif groupal en géronto-psychomotricité

« Y… vos calculá… »1

« Nous avons moins de jambes… Mais le même cœur… »


(Borgognoni, 2014)

INTRODUCTION
Cet article s’appuie essentiellement sur le modèle de « convergence conceptuelle en psychomo-
tricité » (Bottini & Sassano, 2013, p. 129) qui reformule le concept d’« épistémologie convergente »
de Pichon-Rivière en l’adaptant à la psychomotricité. Il l’applique à l’intervention en groupe de
géronto-psychomotricité (Mila, 2008).

Dans le passé, la personne âgée avait une forte influence dans la société étant donné sa place, son
expérience et ses riches connaissances. La société avait besoin de cette source de sagesse et le grand
âge permettait de s’affirmer avec pouvoir et respect. « L’industrialisation a modifié ce processus et,
en se focalisant sur le développement économique, le terme « ancien » s’est transformé en « vieux »
assimilé à passif, dépendant, triste, seul, inutile et même « jetable » pour la communauté » (Tuzzo,
2007, p.189). C’est pour cela que cet article débute par une phrase que tout le monde a certainement
entendue un jour d’une personne ayant une longue expérience de vie : « Y… Vos calculá… ». Cette
phrase s’entend fréquemment de la part de la personne âgée qui s’apprête à raconter une anecdote,
un conte ou une simple histoire de vie. Elle fut une grande source d’inspiration pour commencer
l’exploration de ce domaine d’intervention en psychomotricité.

Lorsque nous parlons de la personne âgée, nous l’abordons dans sa globalité (Bottini, 2010). Ce
concept est à la base de l’approche du groupe en gérontologie, en considérant la personne à partir
de son caractère bio-psycho-socio-éco-culturel, en lui permettant une possibilité de mouvement,
mais aussi la capacité de vivre son corps en mouvement.

POINT DE VUE DE LA GÉRONTO-PSYCHOMOTRICITÉ


Lorsque l’on parle de vieillissement, il est inévitable de le penser comme une diminution des
capacités fonctionnelles de l’individu au cours du temps, rendant difficiles les réponses aux exi-
gences internes mais aussi externes, produisant des altérations fonctionnelles et des changements
à l’intérieur du corps qui conduisent à la mort. Si nous envisageons le vieillissement comme un
processus, nous pouvons dire que celui-ci est vécu par tous les organismes vivants, qu’il est progressif
et inévitable tout en étant influencé par les facteurs environnementaux. Il réduit les compétences
fonctionnelles sans permettre de retour en arrière.

Pour le penser comme un processus global de la personne, il est intéressant de faire appel à une
conceptualisation en tant que système complexe ou auto-organisé de ses capacités chaque système
et sous-système qui la composent. Cet ensemble est étayé par la fonction tonique, conditionnée
par le contexte au sein duquel elle se manifeste tout en ayant une influence sur lui. Concevoir la
personne comme un système auto-organisé suppose d’élargir son examen jusqu’au contexte au sein
duquel elle se développe. « […] l’auto-organisation signifie obligatoirement l’autonomie. Cependant,
un système auto-organisateur est un système qui doit travailler pour construire et reconstruire son
autonomie, ce qui demande beaucoup d’énergie ». Ainsi, il sera nécessaire « […] que ce système
extraie de l’énergie de l’extérieur. Cela signifie que, pour être autonome, il faut dépendre du monde
externe. Par ailleurs, nous savons suite à nos observations que cette dépendance n’est pas seulement
1
Expression utilisée à Buenos Aires qui peut se traduire par « Et… Cela remonte à… » ou encore « Et… De mon temps… »

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Réflexion théorique et clinique au sujet du dispositif groupal en géronto-psychomotricité

énergétique mais aussi informative puisque l’être vivant tire l’information à partir du monde exté-
rieur pour organiser son comportement. Plus encore, il reprend l’organisation du monde extérieur. »
« […] L’autonomie suggère une profonde dépendance énergétique, informative et organisatrice par
rapport au monde extérieur. C’est la raison pour laquelle je ne parle pas d’auto-organisation mais
d’auto-éco-organisation en vertu du principe de Von Foerster selon lequel l’auto-organisation est
dépendante. Ceci étant, nous savons que dépendent déjà de notre monde environnant les domaines
biologiques, météorologiques, sociologiques ou culturels » (Sassano, 2013). Cette conception nous
amène à élargir le champ d’observation et d’intervention psychomotrices, en pensant la personne
depuis son caractère bio-psycho-socio-éco-culturel.

Pour Da Fonseca (cité par Menezes de Vasconcelos, 2003) la personne âgée connaît des
diminutions au sein de son système psychomoteur qui se caractérisent par la perte de la notion du
temps, de l’espace, de la notion du corps qui se traduisent par une désorganisation motrice ou une
immobilité qui génère une incommodité et une insatisfaction corporelle.

Da Fonseca introduit la notion de « régression psychomotrice » mais il convient d’expliquer en


premier lieu celle d’ « évolution humaine ». Pour cela, nous aurons recours de nouveau à qui explique
que
« L’évolution humaine est un processus continu et dynamique d’adaptation aux changements au
travers de mouvements cycliques d’organisation et de désorganisation. Ce processus est déterminé
par la maturation des systèmes qui permettent à l’être humain immature d’accéder à une maturité
qui, plus tard, signifiera un retour en arrière. Il débute bien avant le troisième âge mais c’est à cette
période qu’il s’observe, résultant de changements structurels et fonctionnels marqués, et caractéri-
sant le produit final de l’évolution qu’est l’involution » (Menezes de Vasconcelos, 2003) Da Fonseca
soutient que l’involution serait due à l’inversion de la succession des facteurs de développement qui
donnerait lieu à une désorganisation verticale vers le bas.

ÉVOLUTION CÉRÉBRALE
ADOLESCENT ADULTE
(REPRÉSENTATION) (PLANIFICATION)

PF PF

PG PG
RETROGÉNÈSE
ONTOGÉNÈSE

SST SST
Cortex
SC SC

L L
Moëlle
E E

T T
BÉBÉ PERSONNE ÂGÉE
(ACTION) (ACTION)

T : Tonus ; E : Équilibre ; L : Latéralisation : SC : Schéma Corporel ;


SST : Structuration Spatiotemporelle ; PG : Praxie Globale ; PF : Praxie Fine

Schéma 1 – Involution psychomotrice (Da Fonseca cité par Menezes de Vasconcelos, 2003, p.54).

Cela se traduirait par un mouvement régressif du cortex vers la moelle épinière (schéma 1).
L’involution psychomotrice confirme l’involution génétique programmée, du cortex vers la
moelle épinière, du lobe frontal vers le tronc cérébral, du plus complexe au plus simple, du pro-
grammé au réflexe, du plus fin au plus global, du plus sélectif au plus diffus, présupposant une
destruction de la hiérarchie structurelle en une désorganisation verticale descendante. C’est ainsi

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Réflexion théorique et clinique au sujet du dispositif groupal en géronto-psychomotricité

que l’approche en psychomotricité vise non pas à aller contre le processus naturel de vieillisse-
ment mais à préserver une structure fonctionnelle adaptée aux nécessités spécifiques de chaque
personne : un tonus approprié, une fluidité du contrôle postural, une image du corps réelle et
ajustée, une organisation spatiale et temporelle structurée. Ces facteurs doivent être abordés en
suscitant la créativité et les émotions qui favorisent la spontanéité et la vitalité (voir encadré).

Compétences fonctionnelles à soutenir en géronto-psychomotricité.


• Maîtriser les processus sensorimoteurs, psychomoteurs et fonctionnels
• Réaliser soi-même les activités de la vie quotidienne, de façon la plus indépendante
et responsable possible
• Utiliser des expériences, capacités et connaissances pour les appliquer à de nouvelles situations
• Maintenir et continuer à développer les fonctions cognitives et les habiletés, chercher de
nouveaux objectifs à atteindre
• Faire face à différentes situations sociales en rencontrant de nouvelles personnes et en
maintenant le contact avec elles
• Conserver ou retrouver une image positive de son propre corps
• Définir des objectifs, des projets et des valeurs jugés importants et nécessaires pour vivre
• Se rendre compte que, bien que certaines fonctions et certains processus ne soient plus
totalement contrôlés, il est possible d’éviter la dépression

« La géronto-psychomotricité est une discipline née de la combinaison et de la convergence


entre la gérontologie et la psychomotricité. » Étymologiquement, la gérontologie désigne l’étude
des plus âgés. En ajoutant la définition de la psychomotricité, elle demeure inchangée : […] une
discipline qui intervient dans les domaines sanitaire, éducatif et social, dont l’objectif est l’aide
au développement de la personne, tout comme le dépassement de ses difficultés au moyen du
travail corporel ». (Mila, 2008, p.138). La psychomotricité en gérontologie a un caractère inter-
disciplinaire. On considère qu’elle implique quatre dimensions :
v D’un point de vue biologique, elle recherche les changements dus à l’évolution et
produits dans les différents systèmes de l’organisme.
v D’un point de vue psychologique, elle étudie les transformations de fonctions telles
que l’attention, la perception, la mémoire, l’affectivité et la personnalité.
v D’un point de vue social, elle considère les changements relatifs au rôle social, aux
échanges et à la structure sociale, aux changements culturels et au vieillissement des
populations.
v D’un point de vue corporel, elle recherche et traite de l’évolution du schéma corporel,
c’est-à-dire au niveau du corps réel dans l’ici et maintenant, mais aussi celle de l’image
du corps. » (Mila, 2008, p.137-138).

En psychomotricité, cette approche du corps n’aurait pas de sens sans la prise en compte
de sa pluridimensionnalité. « Le corps est une entité physique, au sens matériel du terme, avec
une surface, un poids, etc. Il évolue de l’automatique vers le volontaire pour ensuite de nouveau
s’automatiser avec plus de liberté d’action et économie de mouvement. […] Le corps est acteur
et récepteur des phénomènes émotionnels, sur les autres et sur soi-même. […] Le corps se situe
dans l’espace et dans le temps. Temps biologique d’abord, régulé par les besoins fondamentaux
(alimentation, hygiène), et qui deviendra un temps chronologique. L’espace est d’abord manipulé
avec une faible capacité d’action puis, plus tard, l’individu partira à la conquête de son espace.
Ce rapport au temps et la conscience du corps ne sont pas isolés ni abstraits, mais interagissent
et permettent l’action. […] Le corps est une totalité, bien que nous puissions distinguer diffé-
rentes composantes dont les champs d’action diffèrent (tronc, extrémités, tête) et des orifices qui

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Réflexion théorique et clinique au sujet du dispositif groupal en géronto-psychomotricité

reçoivent et expulsent. […] Le corps est co-formé. Il est difficile de comprendre ce corps si nous
n’incluons pas l’autre comme co-formateur. Au début, symbiose avec l’autre, objet de crainte et
d’amour, l’enfant peut distinguer la personne associée à la fonction maternelle de l’étranger, dans
un dialogue affectif entre un corps qui offre et un autre qui reçoit ou qui rejette. […] Le corps
est connaissance. À partir de la perception sensorimotrice où il agit dans un espace concret,
il s’ouvre ensuite au monde extérieur en tant que corps vivant. L’individu passe par un stade
préopératoire conditionné par la perception spatiale et basé sur l’activité symbolique. C’est le
corps senti, perçu. Enfin, le stade opératoire s’inscrit dans l’espace objectif, en étroite relation
avec l’efficacité générale dans le domaine spatial. Il s’agit du corps représenté. C’est à partir de
cette évolution que nous pouvons comprendre la fonction du corps. […] Le corps est langage. Il
serait absurde de penser que la connaissance corporelle dépend uniquement du développement
cognitif, des aspects perceptifs ou du développement émotionnel. » (Sassano et Bottini, Ibid.).

Par ailleurs au moyen de différentes interventions, la psychomotricité en gérontologie vise à


renforcer la prévention liée au maintien du tonus musculaire fonctionnel et au contrôle postural,
ainsi que l’expression des émotions tant verbale que motrice, directement liée au tonus muscu-
laire. Cette lecture de la structuration tonico-émotionnelle et de ses transformations qui intègre
les praxies, agit aussi dans différents domaines tels que la santé, l’éducation, la prévention, la
rééducation, la réhabilitation et la thérapeutique. On y considère le corps comme un lieu où
interviennent les facteurs neurophysiologiques et psychologiques en ajoutant les caractères social
et culturel, comme une construction dans et pour la relation à l’autre et à soi.

Le plus grand défi en géronto-psychomotricité est de réussir à préserver l’environnement


habituel de la personne (Mila, 2008). Ceci vise à la meilleure intégration possible pour qu’elle
puisse continuer à partager des activités et à remplir certains rôles et lui permettent d’être prise
en compte dans la société. « La personne âgée a la possibilité d’extérioriser ses ressentis et ses
émotions. Elle peut ainsi prendre conscience de ses affects à partir de l’expression de mouve-
ments. Pour cela, ce travail doit permettre à l’individu d’accéder à la nécessité de transformation.
À partir d’une approche préventive, il prépare l’adulte à pouvoir vieillir de la meilleure façon
possible. » (Mila, 2008).

Avec le groupe de psychomotricité pour les personnes âgées nous cherchons principalement
à ce qu’elles puissent retrouver le plaisir du corps en mouvement, qu’elles bougent et ressentent
leur corps : pouvoir revivre le plaisir du mouvement sans préjudice ni jugement, atténuer la rigidité
en permettant à son corps de s’exprimer en groupe et de s’exprimer à travers lui.

PERSPECTIVES CLINIQUES DE L’INTERVENTION PSYCHOMOTRICE


AUPRÈS DE GROUPES DE PERSONNES ÂGÉES
L’objectif principal est de développer et éventuellement de rétablir les capacités de la personne
âgée (Berruezo Adelantado, 2010). À travers la voie corporelle, on vise à développer différentes
potentialités motrices, affectives, sociales, linguistiques, intellectuelles et cognitives.

Pour Pichon Rivière un groupe est « […] un ensemble restreint de personnes qui sont liées
entre elles par les constantes du temps et de l’espace et articulées par leur représentation interne
mutuelle. Il propose de manière explicite ou implicite une activité qui constitue sa propre fin,
interagissant à travers des mécanismes complexes d’acceptation et d’attribution de rôles » (Bottini,
2005, p.1). Chez la personne âgée le travail en groupe peut être considéré comme « […] une activité
commune et un processus d’internalisation réciproque qui permet à chacun des membres d’accéder
à une représentation de lui-même et des autres au sein de cette structure. Ils sont par là même les

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Réflexion théorique et clinique au sujet du dispositif groupal en géronto-psychomotricité

principaux organisateurs du groupe et du lien qui les unit aux autres membres […] D’autre part,
il est possible de définir les groupes humains comme un sous-ensemble, c’est-à-dire un ensemble
de parties qui représente une portion d’un ensemble plus large, un système dans un système ».
(Bottini, 2005, p. 2). Il est ainsi important de considérer les caractéristiques de chaque groupe
pour pouvoir contextualiser, intervenir et introduire des informations significatives pour l’évo-
lution du groupe. C’est uniquement en considérant les multiples dimensions du groupe - insti-
tutionnelle, sociale, culturelle, de genre, etc. - que nous pourrons atteindre des co-constructions
efficaces. C’est en considérant la personne comme un système complexe et auto-organisé que
nous pouvons comprendre la complexité et le dynamisme du phénomène groupal. « […] Penser en
systèmes, c’est penser en configurations uniques, stables et dynamiques à la fois, qui permettent
de réaliser des changements internes en fonction du contexte, tout en en modifiant la structure
par sa propre influence. Dans ce processus d’auto-transformation, le contexte est inévitablement
transformé […] Il s’agit d’un processus dialectique qui se structurent à partir de l’acceptation et
de l’attribution de rôles » (Bottini, 2005, p. 2). Pour mieux décrire ce processus, Pichon Rivière
propose un schéma de « cône inversé » (voir schéma 2). « Pour l’auteur, la dynamique de commu-
nication groupale permet de mobiliser des contenus qui ne sont pas toujours conscients pour les
membres du groupe. Ils permettent à l’ensemble du groupe d’atteindre les objectifs déterminés
tout en enrichissant l’activité qui constitue sa propre fin […] Il sera nécessaire de dynamiser la
répartition des rôles entre les membres du groupe afin d’éviter les stéréotypes et les catégorisa-
tions. » (Bottini, 2005, p. 3). 2

Contenu explicite ou manifeste

Adhésion et appartenance Communication

Coopération Apprentissage

Pertinence Télé2.

Contenu implicite ou latent

Schéma 2 : Les vecteurs représentent d’un côté les rôles fixes attribués lors de la création de la dyna-
mique du groupe et de l’autre ceux qui vont changer dans leur roulement et au niveau de leur fonction
au fur et à mesure de l’évolution dynamique du groupe. (Bottini, 2005, p. 3).
2
 NDT : Le facteur « télé », mot d’origine grec attribué à Moreno, représente la distance affective (positive ou négative), l’empathie entre
les membres du groupe.

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Réflexion théorique et clinique au sujet du dispositif groupal en géronto-psychomotricité

Nous pouvons considérer deux types de dynamique de groupe : l’une, explicite, comme étant
la raison principale et partagée pour laquelle se réunit le groupe. L’autre, implicite, où le groupe
doit se réaliser par lui-même comme un processus groupal pour travailler quelque chose de pri-
mordial et faisant office de moteur permettant un meilleur déroulement de la consigne explicite.

Il n’est, par conséquent, pas toujours possible de travailler avec efficacité puisque c’est au
coordinateur de permettre une meilleure évolution groupale. Pour cela, il doit analyser le stade
d’évolution dans lequel se trouve le groupe et permettre la circulation de la communication en
travaillant notamment à partir des éventuels conflits.

Une communication fluide avec les membres du groupe favorise sans doute un meilleur pro-
cessus de communication avec soi-même, d’où l’importance du travail groupal en psychomotricité
avec les personnes âgées.

CONCLUSION
« La proposition d’activités psychomotrices en gériatrie vise à susciter un apprentissage
permanent qui permet une adaptation aux changements, le développement de l’estime de soi, la
capacité de jouissance, la création de liens et de réseaux sociaux, la promotion d’une participation
active et créatrice, le renforcement de schémas de communication verbale, gestuels et corporels.
Elle engage également la créativité et entretient l’élan cognitif, affectif, social, corporel, gestuel
et verbal, où chacun peut écouter et être écouté, soutenir et être soutenu. Dans cette dynamique,
ce qui est vécu corporellement devient signifiant et symbolique ce qui permet de réfléchir et de
partager dans le groupe l’expérience vécue. » (Mila, 2008, p.141)

Sans oublier la disponibilité psychocorporelle du coordinateur de groupe, sa capacité à


contextualiser l’expérience de chacun, en fonction de la vie et du bagage culturel des personnes.
Le cœur de la personne âgée reste le même, malgré le fait qu’elle ait « moins de jambes » (Bor-
gognoni, 2014). Pouvoir retrouver le plaisir de vivre son corps en mouvement permet de se sentir
entier et de traverser les années.

Références bibliographiques
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una praxis compleja para un complejo trastorno. enfoques en psicomotricidad. Revista Ibero-
In J. Tallis (éd.) Autismo infantil : lejos de los Americana de Psicomotricidad y Técnicas Cor-
dogmas. Madrid : Miño et Dávila. porales, 38.
Menezes de Vasconcelos, M. (2003). A psico- Tuzzo, R. (2007). Un aporte a la investigación
motricidade como promotora da qualidade de de estereotipos implícitos acerca del envejeci-
vida na terceira idade. Revista Ibero-Americana miento y la vejez. Revista Ibero-Americana de
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Sassano, M. & Bottini, P. (2010). Apuntes
para una historia de la Psicomotricidad. In P.
Bottini, (éd.) Psicomotricidad. Prácticas y concep-
tos. Buenos Aires : Mino y Dávila. (3°éd.).

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Le vécu du corps dans les troubles
des conduites alimentaires et
l’apport de la psychomotricité
Body’s experience and eating disorders
psychomotor care contribution
La experiencia del cuerpo en los trastornos
de las conductas alimentarias y la contribución
de la psicomotricidad
Claudia Marcela CARTA * et Natividad CASTELLANI **, Psychomotriciennes
*marcelacarta@yahoo.com.ar
**natividadcastellani@hotmail.com

Résumé Mots-clés
Cet écrit expose l’apport de la psychomotricité dans le traitement Groupe de psychomotricité – Analyse Clinique – Psychiatrie de
des troubles des conduites alimentaires au sein d’une équipe plu- l’adolescent – médiations thérapeutiques – Image du corps
ridisciplinaire hospitalière. Les résultats de l’intervention sont
rapportés à partir de l’observation d’activités corporelles et de
l’analyse de productions graphiques.

Abstract Key words


This paper exposes the contribution of psychomotricity in the Group of psychomotricity – Clinical analysis – Adolescent psy-
treatment of eating disorders within a hospital multidiscipli- chiatry – Therapeutic mediations – Image of the body
nary team. The profits of the intervention are reported from the
observation of body activities and analysis of graphic productions.

Resumen Palabras claves


Este escrito expone el interés y la contribución de la psicomotrici- Grupo de psicomotricidad – Análisis clínica – Psiquiatría del
dad en el tratamiento de los desórdenes de las conductas alimen- adolecente – Mediaciones terapéuticas – Imagen del cuerpo
tarias en el marco de un equipo pluridisciplinar hospitalario. Se
exponen los resultados de la intervención a partir de la observación
de actividades corporales y del análisis de producciones gráficas.

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires et l’apport de la psychomotricité

INTRODUCTION
Les Troubles des Conduites Alimentaires – TCA - font référence à une perturbation psycho-
logique avec anomalie grave des comportements d’ingestion. Les symptômes de l’anorexie mentale
consistent en diètes prolongées, l’usage de diurétiques, laxatifs, perte de poids, distorsion de l’image
du corps, augmentation de l’insatisfaction personnelle, peur de grandir, un taux d’auto-exigence
élevé, des idées déformées liées au corps, au poids et à la nourriture (Carta-Castellani, 2011).
On décrit des facteurs prédisposant, déclenchant, précipitant ou alimentant la maladie (Marín,
2002), une étiologie multiple (Barrionuevo Colombres, Zurlo deMirotti et Col., 1997). Aux
facteurs biologiques s’ajoutent les variables socio-historico-culturelles (Barrionuevo Colombres,
2005). C’est la raison pour laquelle la prise en charge pluridisciplinaire est la plus pertinente. Ces
troubles constituent un problème de santé avec un fort impact dans notre société. La problématique
est si variée et multifactorielle qu’elle exige une attention et une action considérant les facteurs
cliniques, familiaux, culturels, sociaux et éducatifs. Une perspective sanitaire, psycho-éducative
et préventive est nécessaire.

Les personnes qui souffrent de TCA rejettent, renient et subissent leur corps. Elles n’acceptent
pas ce corps qui leur impose d’être et de se sentir exister dans le monde. Elles rêvent de le trans-
former et ont tendance à tout contrôler : leur corps, leurs émotions, leurs relations.

Cet article expose des interventions psychomotrices menées durant six années, de 2005 à
2010, au sein d’un service de psychopathologie hospitalier. À partir de l’approche psychomotrice,
nous soutenons que nous sommes et avons un corps au travers duquel nous communiquons, nous
nous exprimons, nous sommes en relation, nous apprenons, créons, percevons, nous souvenons,
nous amusons, nous souffrons et avons une histoire ; à tel point que « […] lorsque la bouche retient
le mot, le corps parle inconsciemment à travers les pores. » (Cencillo, 1973, p.110).

REPÈRES SÉMIOLOGIQUES ET QUESTIONNEMENT SUR LA RELATION


AU CORPS DANS LES TROUBLES DES CONDUITES ALIMENTAIRES
Le corps est objet de préoccupations et d’anxiété. À travers lui, nous recherchons la perfection,
la supériorité, l’hégémonie et l’idéal de la société, parfois au prix de sacrifices extrêmes, de souf-
frances, d’angoisses, dans le but d’atteindre un corps svelte, beau, parfait. La minceur s’est convertie
en un idéal de beauté, une aspiration suprême pour devenir attirant ou attirante, atteindre des
objectifs et rivaliser avec autrui. La préoccupation pour l’image physique et l’apparence peut devenir
une obsession dominant la vie affective, émotionnelle et sociale. « Dans une société régie par la loi
du marché, la valeur d’échange de l’individu est fonction de son statut corporel. Par conséquent,
l’attention obsessive portée à l’image conduit paradoxalement à la destruction de ce que le sujet
souhaite parfaire, et ainsi à l’agression et au dommage de son propre corps. » (Margulis, 1996,
p.74-75). Qu’en est-il alors de la représentation du corps pour une personne souffrant de TCA,
d’anorexie ou de boulimie ? Existe-t-il une altération de la perception du corps, de ses possibilités
d’action ou de l’intégration de certaines informations ? En deçà de cette préoccupation constante
pour le poids, s’agirait-il d’une perturbation du décodage ou de la signification de ce que le corps
communique, ressent ? Quel peut être le vécu du corps pour une personne souffrant d’un TCA ?
Comment se manifeste ce vécu ?

Les TCA se traduisent par une perturbation de l’ingestion d’aliments par volonté de contrôle
du poids et de la silhouette, en lien avec un dysfonctionnement émotionnel et/ou relationnel. L’in-
gestion comme l’aspect corporel sont perturbés dans une quête vaine pour dissimuler ou résoudre
des conflits internes (López-Ibor et Valdés Miyar, 2003). L’anorexie mentale est caractérisée par le
rejet persistant des aliments, en lien avec une peur irrationnelle de prendre du poids immédiatement

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires et l’apport de la psychomotricité

ou dans le futur, associée à une altération de l’image du corps. Ces caractéristiques entraînent une
importante perte de poids et conduisent à un état de dénutrition progressive (Moreno, 1995). La
boulimie nerveuse est caractérisée par la présence d’épisodes fréquents de voracité avec consom-
mation durant un temps limité d’une quantité de nourriture nettement supérieure à la quantité
normale et qui s’accompagne d’un sentiment de perte de contrôle, par une préoccupation excessive
ou une peur intense d’être obèse et par le recours à des conduites compensatoires inadaptées en
prévention d’une prise de poids.(Moreno, 1995). Les critères utilisés pour poser le diagnostic de
ces maladies sont définis par le DSM IV-TR (López-Ibor et Valdés Miyar, 2003).

Lorsqu’on évoque les facteurs étiologiques, on ne peut omettre de mentionner que les TCA
sont complexes et pluridimensionnels combinant divers facteurs de causalité :
v biologiques, génétiques ;
v psychologiques caractérisés par des exigences personnelles élevées, une faible estime de
soi, une manque d’autocontrôle ;
v familiaux où chaque membre joue un rôle dans un système bio-psycho-social ;
v sociétaux marqués par la survalorisation du corps dans notre société de consommation
perfectionniste.

Généralement ces troubles prennent naissance à l’adolescence, même s’il existe des cas de
survenue à l’âge adulte. Parfois ils débutent lorsque la personne essaye de perdre du poids avec ou
sans contraintes externes.

La psychomotricité considère le sujet de façon globale, avec un corps construit au travers d’un
vécu et en fonction d’une histoire personnelle, en relation avec les autres et les objets. Le corps est
une unité qui s’exprime au moyen de vecteurs corporels tels que le regard, le geste, la parole, la
posture ou la praxie, en relation. La psychomotricité offre un espace où le sujet peut se connaître
et utiliser son corps comme moyen d’expression, de communication et de relation. « La psychomo-
tricité est une tentative de rencontrer la globalité du sujet […] pour habiliter le corps. » (Sassano,
2003, p.105). Cette dynamique se réfère à une personne « bio-psycho-socio-éco-culturelle » (Sas-
sano, 2003, p.115) dans la mesure où interagissent trois sous-systèmes de base : 1) moteur-instru-
mental ; 2) tonico-émotionnel ; et 3) praxico-cognitif sous l’influence du milieu. Chacun est une
totalité qui possède une histoire, des expériences, des fantasmes et des désirs, et qui se construit
en relation avec les autres et avec l’environnement. « La psychomotricité, comme l’indique son
nom, tente de mettre en relation deux éléments : le psychique et le moteur. Outre l’importance du
mouvement, il s’agit de considérer les connotations psychologiques qui sous-tendent le purement
biomécanique. La psychomotricité ne s’attache pas au mouvement humain en lui-même, mais à sa
compréhension en tant que facteur de développement et d’expression de l’individu en relation avec
son environnement » (Bottini, 2000, p. 43). « Si la psychomotricité existe en tant que discipline
scientifique, c’est en ce qu’elle restaure le lieu du corps en considérant l’homme comme le résultat
de circonstances historiques, sociales et en construction. Homme dont le corps […] est le résultat
des relations économiques, des valeurs et croyances religieuses, du développement technologique
et scientifique, du pouvoir de la classe sociale, mais aussi du groupe dans lequel il grandit. La
psychomotricité est la discipline qui étudie l’homme en décodant le champ de significations géné-
rées par le corps et par le mouvement en relation, qui représentent les signaux de sa santé, de son
développement, de ses possibilités d’apprentissage, de son insertion sociale, mais aussi signaux de la
maladie, du handicap et de la marginalisation » (Chockler, 1988, p.13-15). Lorsque nous évoquons
le corps, « […] contenant et producteur de ce que nous sommes et de ce que nous avons, capable
de productions très diverses : organiques, émotionnelles, psychiques, mentales, matérielles…, qui
s’exprime et se manifeste à partir et au travers du mouvement. » (Franc Battle, 2001, p.5), nous

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires et l’apport de la psychomotricité

nous référons à « […] l’axe du monde et à partir duquel découle l’adaptation au milieu, et surtout
au milieu social » (Lazaro, 2009, p.6).

De Ajuriaguerra (cité par Sassano, 2003, p.106)décrit le corps comme :


v « Une entité physique avec une superficie, un poids, etc. Il évolue de l’automatique vers le
volontaire, pour ensuite de nouveau s’automatiser avec plus de liberté d’action et économie
de mouvement.
v Acteur et récepteur des phénomènes émotionnels, sur les autres et sur soi-même. L’enfant
découvre son corps au moyen des déplacements qui lui sont imposés et au travers de ses
réflexes. En grandissant, il découvre les objets extérieurs, expérimente, vit avec autonomie
sa propre expérience, ses émotions.
v Pouvant se situer dans l’espace et dans le temps. Temps biologique d’abord, régulé par les
besoins fondamentaux, et qui deviendra un temps chronologique.
v Une totalité bien que nous puissions distinguer différentes composantes dont les champs
d’action diffèrent : axe, tronc et membres inférieurs d’un côté, et membres supérieurs d’un
autre côté. Dans un premier temps, il est fragmenté et commencera à être vécu comme
une totalité au fur et à mesure de son évolution.
v Co-formé à partir de la symbiose avec l’autre, objet d’amour et de peur, différencié des
étrangers. La connaissance de cet autre permet à l’enfant de se rendre compte que si l’autre
est formé de segments qui édifient un tout, ces mêmes segments existent chez lui et il peut
alors les reconnaître.
v Connaissance à partir du stade sensori-moteur où il agit dans un espace concret et dans un
corps vécu, en passant par un stade préopératoire conditionné par la perception spatiale et
basé sur l’activité symbolique pour enfin arriver au stade opératoire, intégré dans l’espace
objectif, représenté.
v Ayant une relation vitale avec le langage. Cela peut être pré-verbal, à partir du vécu affectif
et au moyen de gestes ou de mimiques, ou bien au moyen du langage verbal, qui facilite
l’action, la connaissance du corps et la communication. »

L’espace et le temps sont deux autres entités qui influent sur, et déterminent la relation avec
le milieu dans lequel la personne se construit. La structuration spatio-temporelle naît de la motri-
cité et dépend du schéma corporel. Les personnes souffrant de TCA présentent un trouble de
l’image corporelle et une faible connaissance du schéma corporel. L’espace comme le temps, « […]
représentent le substrat de notre action dans le monde, […] nous constituent autant que nous les
constituons, formant partie de notre univers de symboles. » (Ravera Verdasio, 2002). Une des dif-
ficultés majeures que connaissent les personnes qui présentent un TCA est d’établir des relations
et de communiquer avec l’autre. Cela entraîne une appréciation et une utilisation particulière de
l’espace et du temps. C’est pour cela que la psychomotricité, à travers l’approche corporelle, pro-
pose de développer ou de rétablir les capacités de l’individu. Elle accompagne la personne dans la
construction de sa conscience corporelle et dans le développement de ses capacités d’orientation,
d’organisation, de structuration spatio-temporelle et de ses habilités motrices. Elle favorise ainsi
l’acquisition d’une conduite personnelle et relationnelle, lui permettant un accès au monde social.

EXPOSÉ DE L’INTERVENTION CLINIQUE


Cette intervention en psychomotricité a été menée durant six années au sein d’un service de
psychopathologie. Au sein des prises en charge pluridisciplinaires avec médecins, nutritionnistes,
psychologues et psychiatres, un groupe de psychomotricité d’une durée de deux heures par semaine
a été mis en place. L’objectif de l’intervention psychomotrice était le développement des possibi-
lités d’expression et de création à partir du corps. Le travail était centré sur le mouvement, l’acte,

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires et l’apport de la psychomotricité

l’intention, l’attitude, l’expression, la création, la connaissance et l’échange. Le but était que les
patientes perçoivent leur corps à partir d’une expérience positive, découvrent de nouvelles possi-
bilités et sensations corporelles. L’objectif final de l’approche pluridisciplinaire était l’amélioration
de leur vie relationnelle avec elles-mêmes, avec les autres, avec l’espace, le temps et le monde. Les
objectifs plus spécifiques étaient :
v Une sensibilisation du corps à partir des sens et de l’intégration du poids, de l’élasticité
musculaire et de la capacité de mouvement ;
v Favoriser un lien positif avec le corps ;
v Promouvoir les possibilités corporelles et en même temps la confiance en soi et l’estime
de soi ;
v Construire un espace de revalorisation pour vivre son corps à travers l’expression indivi-
duelle et groupale ;
v Créer des capacités et des mécanismes qui permettent la résilience.

Cette intervention psychomotrice intègre des techniques artistico-expressives comme moyen


de favoriser la symbolisation.

Une analyse clinique quali-quantitative a été réalisée par :


v Des réunions avec les professionnels de l’équipe pluridisciplinaire ;
v Une observation directe non participante des activités avec prise de notes ;
v L’analyse des productions graphiques réalisées par les patientes ;
v Un entretien avec une psychomotricienne experte.

Population
v Quinze patientes ont été prises en charge dans ce groupe :
v Onze d’entre elles l’ont suivi pendant six années ;
v Deux sont sorties rapidement après disparition de leurs symptômes ;
v Une est décédée des suites d’un déséquilibre sodium-potassium ;
v Une fut réorientée après avoir présenté des complications psycho-pathologiques avec
consommation de toxiques.

Les patientes proviennent de différents groupes socioculturels. Elles sont âgées de 13 à 25 ans.

Les diagnostics sont l’anorexie, la boulimie et les troubles alimentaires non spécifiés associés
à une perturbation marquée de l’image du corps, un mépris du corps, des pensées obsessionnelles
liées au contrôle du corps, une alternance contrôle/perte de contrôle de l’ingestion et de l’exercice
physique, une carence de la mémorisation des sensations corporelles, un registre émotionnel pauvre
avec des pensées dichotomiques (« tout ou rien »), une dissociation entre le corps et les émotions,
un état de tension corporelle, de fortes contractures musculaires, une abstraction sélective avec
focalisation sur les aspects négatifs des situations, une faible estime de soi, une instabilité émo-
tionnelle, un esprit déprimé, des sentiments d’irritabilité et de honte.

Déroulement thérapeutique
Les activités psychomotrices portent sur la conscience du corps avec les thématiques suivantes :
structure, posture, respiration – diaphragme - émotion, schéma corporel - segments corporels
- symétrie des hémicorps - intégration structurelle, structure de soutien, système ostéo-myo-ar-
ticulaire, structuration spatio-temporelle. L’accent est porté sur la perception des dimensions du
corps (interne, externe, devant, derrière).

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires et l’apport de la psychomotricité

L’observation directe non participante permet de suivre l’évolution des attitudes, de la ges-
tualité expressive, de l’équilibre statique et dynamique, du tonus, des coordinations générales
et manuelles, des praxies, du graphisme, des mouvements dissociés, de la structuration et de
l’organisation spatio-temporelle, de la latéralité, du schéma corporel et de l’image du corps, de la
morphologie, de l’activité spontanée, de l’utilisation des objets, de la communication, des relations
avec les autres.

Évolution des patientes


Les patientes avec TCA donnent l’impression de considérer leur corps comme un objet, à
modifier. Elles l’utilisent comme un bouc émissaire contre lequel elles déposent leurs conflits,
déformant les sensations et perceptions reçues et entravant non seulement la connaissance d’elles-
mêmes mais aussi leur relation aux autres et au monde qui les entoure. Les personnes avec TCA
manifestent un rejet du corps, un déni, un besoin de le changer, de le transformer pour un autre
qu’elles désirent et idéalisent. Ceci se retrouve dans leur posture à prédominance rigide, retirée
avec une faible capacité de flexibilité. L’intervention psychomotrice a ici favorisé la conscience
corporelle, l’intégration esprit-corps, le lien entre les émotions et le corps, tout comme la relation
avec les autres.

Nous avons rencontré dans ce groupe des patientes présentant :


v Des difficultés à parler de leur propre corps par faute d’acceptation et de lien avec lui, par
une pauvreté de la connaissance de leur schéma corporel et, dans certains cas, des signes
d’inhibition psychomotrice ;
v Des blocages pour distinguer les parties du corps, les sentir, les vivre ;
v De grandes difficultés à mettre des mots sur les sensations corporelles vécues, génératrices
d’angoisse ;
v Des blocages de la mobilité et de la disponibilité corporelle malgré leur intention et volonté
de faire, qui sont alors amputées au niveau comportemental ;
v Des augmentations du tonus musculaire avec des comportements de sur-contrôle et de
multiples contractures spécialement au niveau du cou et du dos qui agissent comme de
véritables carapaces musculaires ;
v Des difficultés à discriminer et à exprimer leurs émotions en lien avec l’augmentation de
l’état tonique musculaire, toile de fond des émotions.
v Des difficultés à abaisser les réactions toniques durant la relaxation ;
v Des paratonies qui entravent l’expression des émotions ;
v Une tendance à l’occupation stéréotypée de l’espace ;
v Des obstacles pour imiter les postures dans les différents plans spatiaux ;
v Une pauvre adéquation au rythme externe ;
v Des manques d’impulsion lors des mouvements libres, de liberté du mouvement.
v Des tendances à intellectualiser les actes corporels ;
v Des incapacités à différencier le système osseux du système musculo-articulaire, en relation
à la structure de soutien ;
v Des limites corporelles confuses ;
v Des lacunes dans la perception des espaces corporels internes avec des sensations cines-
thésiques pauvres, bloquées et un système postural construit sur des appuis inefficients ;
v Des sensations corporelles de pieds fatigués, endormis, qui sont majorées par la présence
d’œdèmes, de gonflements et de lourdeur.

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires et l’apport de la psychomotricité

Au fil des séance les patientes ont verbalisé certains sentiments tels que la peur de tomber et
de perdre le contrôle du corps, un manque de liberté de mouvement, des contractures, un manque
de confiance, de la colère. Elles expriment clairement une sensation de manque d’intégration du
schéma corporel, une relation au « tout ou rien » qui se manifeste aussi à travers le corps. Elles
reconnaissent une décharge négative des tensions corporelles à travers l’auto-agression lors de
conduites à risque avec des coupures, des vomis de sang, des jeûnes. Mais par contre, à la suite
des séances de psychomotricité, elles évoquent des sensations agréables au travers de peintures
de mandalas, de modelage, de collages libres. Enfin, elles confieront avoir pu se relâcher un peu,
libérer certaines tensions et ressentir une sensation agréable dans et avec leur corps. En général les
étirements et la relaxation leur ont permis d’atteindre un sentiment de bien-être corporel.

Analyse des dessins du corps


Chaque participante dessine en début de séance le dessin d’une personne de face, de profil et
de dos, puis un autre dessin après les exercices psychomoteurs en décrivant son nouveau ressenti.
De plus un dessin du squelette a été également demandé avant et à la suite d’exercices d’eutonie
portant sur la conscience osseuse. Il s’agissait alors aussi d’écrire les mots liés à ces nouveaux res-
sentis : structure, dureté, consistance, air, etc.
Ce vécu est ensuite partagé dans le groupe.

Dans les premiers dessins, on note leur petite taille qui évoque une faible estime de soi. Les
tracés sont instables, les traits sont souvent courts et appuyés. Les personnages n’ont pas de main,
d’oreille, d’œil, ni même parfois de visage, or ces organes des sens et les mains constituent ce qui
rend possible les connexions, la communication et la relation avec le monde interne et externe.

Nous observons des changements positifs au niveau du registre corporel dans les dessins consé-
cutifs aux séances même si l’expression des personnages reste vague. Dans certains apparaissent
des organes des sens et nous notons moins de rigidité. La posture ne change pas en général mais
la tension diminue. L’expression du visage semble plus détendue, tout comme l’impression que
donne le corps. L’oubli de certaines parties du corps est moins fréquent, sauf chez trois patientes
boulimiques. Il est possible que ces omissions, chez les patientes qui se font vomir, soient liées au
sentiment de culpabilité. Le second dessin occupe toujours le même emplacement que le premier
et la taille reste similaire. Peu de patientes la diminuent et une seulement l’augmente.

Les représentations du corps sont également plus adaptées à la réalité. On note moins de
déformation corporelle et de vécus irréels traduits dans la forme et dans la taille des segments
corporels. L’expression et le renforcement des yeux, du cou et de la bouche attirent l’attention. Les
yeux sont liés à un vécu de persécution et à un comportement de contrôle permanent, puisque
ce sont des patientes qui se sentent observées, par elles-mêmes ou par l’extérieur. Le cou, lieu de
connexion entre la pensée et l’action, peut symboliser le besoin obsessif de contrôle du corps et du
monde environnant. La bouche est liée à la fonction nutritive, à la possibilité d’incorporer la vie
et/ou de la rejeter, de l’expulser.

Le tracé des dessins consécutifs au travail corporel est nettement brouillé, entrecoupé, avec
tentative d’établir des limites corporelles. Cela serait un indicateur d’instabilité, de labilité peut-
être même d’anxiété mais ces sentiments sont générés par un vécu différent du corps. Les limites
corporelles sont certes floues mais elles seraient un indicateur positif, puisqu’en activant les récep-
teurs intéroceptifs et extéroceptifs, il se produit un réajustement du schéma et de l’image du corps.
Ce vécu génère de l’anxiété mais il favorise dans un même temps la mobilisation des idées strictes
qu’elles ont de leur apparence. Si elles peuvent percevoir un corps différent, la réalité peut aussi
être perçue d’une autre manière. De plus les descriptions de sensations qui ont accompagné ces

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires et l’apport de la psychomotricité

productions évoquaient un registre positif : légèreté, liberté, détente, tranquillité. L’inquiétude liée
à une déstabilisation ouvre vers une nouvelle connexion avec son moi-corporel, une mobilisation
et une prise de conscience de schémas moins rigides.

Des collages pour représenter le corps ont aussi été réalisés. Des éléments s’y répètent : le
cœur, les yeux, la bouche, le sang. D’après l’interprétation populaire, le cœur représente l’organe
des émotions et des sentiments, domaines sont plutôt niés par ces patientes. Peut-être est-ce une
manifestation sublimée et symbolisée de leur nécessité et désir caché d’exprimer leurs émotions.
Le sang peut renvoyer aux pulsions de mort, d’autodestruction, à Thanatos et au fantasme de la
mort dans une tentative de contrôler la vie. Certaines de ces patientes se faisait vomir jusqu’au sang
et d’autres présentaient des antécédents d’auto-agressions et d’auto-mutilations.

Dans la plupart des productions graphiques, des dessins et collages, nous retrouvons une
utilisation principale de l’espace graphique gauche de la feuille. Cela pourrait révéler une manière
régressive d’affronter les conflits, l’activation des défenses et indiquerait un renfermement excessif.
Dans les collages, on observe que l’espace graphique est divisé en deux ou trois secteurs. Ceux
qui sont divisés en deux font correspondre le positif (le bonheur, la vie) dans la partie gauche de
la feuille, et le négatif (tristesse, mort, larmes, relations, désirs perdus) dans la partie droite. Dans
d’autres sont représentés des visages qui révèlent un besoin de soutien, une peur de l’action, une
personnalité dépendante et un manque de sécurité, tandis que le bas symbolise le mal, le négatif,
la terre, le concret. Ces derniers évoquent des productions dépressives. Il est possible que ce soit
la fatigue qui empêche les mouvements d’amplitude ou l’utilisation de zones plus éloignées de la
feuille. Un grand nombre des productions témoigne d’une faible capacité de symbolisation. Elles
expriment le drame de leur vie : la nourriture, le vomi dans les toilettes, les vécus de mort, la
tristesse, la dépression, les éléments qui les relient à la vie. Un des collages présente des fragments
dans une tentative de reconstitution. On peut observer des morceaux de corps mais un tout éclaté.

Les objets qui apparaissent et qui reviennent dans les collages sont des fleurs fleuries ou
fanées, de l’eau, des poissons, des papillons, des soleils visibles ou semi-recouverts par des nuages.
À nouveau l’allusion à la vie et à la mort se retrouve dans la même utilisation de l’espace : sur la
gauche, le positif, le bon avec les papillons, des couleurs chaudes, des fleurs ouvertes, un soleil
radieux, des poissons dans l’eau, des cœurs rouges ; et sur la droite le négatif avec des montagnes
sèches, des marrons, des fleurs fanées et d’autres signes d’agressivité et de dépression. La lecture
symbolique suggère que ces patientes perdurent dans un temps passé et témoignent de comporte-
ments infantiles. Elles peinent à se représenter et à se projeter dans le futur, ont peur de grandir,
de s’éloigner de leur famille, de se séparer et d’affronter leur propre vie avec les réussites et les
échecs qu’implique la croissance.

Lors de l’activité de conscience osseuse, système de soutien, les patientes évoqueront par écrit
d’intéressants ressentis du corps et des sensations reliées à des représentations du squelette mais
aucune n’a reconnu par elle-même le système osseux en tant que structure de soutien sur laquelle
se construit la verticalité.

CONCLUSION
La psychomotricité et l’art sont des thérapeutiques et des médiations privilégiées pour favo-
riser les possibilités d’interaction et de communication humaine. Dans les TCA, le sentiment de
dissociation entre le corps et les émotions entrave la possibilité de reconnaissance de l’émotion.
Cela affecterait la capacité de communiquer et d’être en relation avec les autres. Dans les produc-
tions de ces patientes nous avons observé une tendance à surévaluer et à faire perdurer le passé
et une absence de projection dans le futur. Elles ont ainsi une tendance à penser le passé comme

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Psychomotricité en Argentine
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires et l’apport de la psychomotricité

étant sécurisant et à vouloir le faire perdurer. Elles se représentent le passé comme meilleur que
le présent ou le futur. Il y a comme une grande peur de grandir, d’assumer des responsabilités de
vie adulte et une incapacité à assumer leurs erreurs.

Cet article rend compte de l’importance de l’apport de la psychomotricité dans la prise en


charge pluridisciplinaire des TCA. Il est essentiel de considérer le sujet dans une globalité, car il
n’est pas possible d’aborder le rejet du corps si la personne ne peut pas dans un premier temps le
rencontrer. Une approche corporelle est nécessaire. Il est fondamental de préciser que les patientes
avec TCA présentent une profonde souffrance de leur corps. Chaque séance, chaque lecture que
nous avons confectionnée tout au long de ces années de travail ont fait naître une petite lumière dans
l’obscurité. À travers la sensibilisation du corps, l’intégration des sens et l’accès à la symbolisation,
la psychomotricité permet de créer des liens positifs avec le corps. Elle aide à considérer, à penser,
à mettre du sens sur les possibilités corporelles encore inconnues, ce qui favorise l’estime de soi. Le
contact avec son propre corps, ses limites et ses possibilités amène les patientes à le rencontrer. La
psychomotricité offre un espace de revalorisation qui rend possible, pour des personnes souffrant
de TCA, de reconstruire une estime de soi.

Références bibliographiques
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Publications du séminaire d’anthropologie phi-
losophique. Madrid : Université Complutense.

Les auteures remercient l’équipe pluridisciplinaire du Service de Psychopathologie de l’Hôpital


Clinique National de l’Université Nationale de Córdoba (Argentine) ainsi que Myrtha H.
Chokler

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Dossier – Psychomotricité en Argentine Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Quels sont les champs d’action
du psychomotricien auprès des
enfants et des adultes avec des
troubles du spectre autistique
entre pratiques recommandées
et programmes globaux ?
What are the psychomotrician’s applied activities
for children and adults with autistism spectrum
desorders between recommended practices
and global programs?
¿Cuales son las áreas de acción del psicomotricista
cerca de niños y adultos con trastornos del espectro
autístico entre intervenciones recomendadas
y programas globales?
Aurélien D’IGNAZIO*, Psychomotricien MIP, Formé en intégration sensorielle Niveau 3
*aurelien.dignazio@free.fr

Résumé
L’intervention du psychomotricien est actuellement intégrée aux La spécificité de l’approche psychomotrice doit être encouragée
recommandations de la Haute Autorité de Santé (2012) et dans par la méthodologie scientifique et l’évaluation des résultats.
le Plan Autisme (2013-2017) à différents niveaux. Tout en pré-
cisant ces niveaux d’interventions, nous précisons ici le rôle de la Mots-clés
psychomotricité au sein des programmes globaux recommandés. Développement psychomoteur atypique – Troubles moteurs –
Troubles sensoriels – Recommandation de bonnes pratiques –
L’analyse de la littérature permet d’insister sur l’importance de
Évaluation des interventions
la détection des troubles psychomoteurs, et de l’évaluation des
stratégies de rééducation des troubles impactant la motricité ainsi
que la sensorialité de la personne avec autisme, à tout âge de la vie.

Abstract
The psychomotor intervention is now integrated by the recom- The specificity of psychomotricity has to be supported by the
mendations of the High Authority of Health (2012) and the scientific methodology and evaluation of results.
Autism Plan (2013-2017) at different levels. While stating these
levels of intervention, we clarify the role of psychomotricity within Key words
recommended global programs. Atypical psychomotor development – Motor disorders – Sensory
A literature review emphasizes the importance of the detection disorders – Recommendation of good practiced – Evaluation of
of the psychomotor disorders, and the evaluation of the reha- the interventions
bilitation strategies for the disorders affecting the motor skills
and sensory organization of the person with autism, at any age
of her life.

95
Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Variations psychomotrices
Aurélien D’IGNAZIO - 2014 - Quels sont les champs d’action du psychomotricien auprès des enfants et des adultes…

Resumen
La intervención del psicomotricista es actualmente integrada por La especificidad del enfoque psicomotor debe ser animada por la
las recomendaciones de la Alta Autoridad de Salud (2012) y por el metodología científica y la evaluación de los resultados.
Plan Autismo (2013-2017) a diferentes niveles. Precisando estos
niveles de intervenciones, precisamos aquí el papel de la psico- Palabras claves
motricidad en el seno de los programas globales recomendados. Desarrollo psicomotor atípico – Disturbios motores – Disturbios
El análisis de la literatura permite insistir sobre la importancia sensoriales – Recomendación de buenas prácticas – Evaluación
de la detección de los disturbios psicomotores, y de la evaluación de las intervenciones
de las estrategias de reeducación de los disturbios que impactan
a la motricidad así como a la sensorialidad de las personas con
autismo, cualquiera sea su edad.

INTRODUCTION
La psychomotricité conjugue plusieurs sensibilités et conceptions théoriques. Elle se posi-
tionne au carrefour des sciences humaines et médicales, entre intersubjectivité relationnelle et
critères fonctionnels objectifs, à l’intersection de paradigmes phénoménologiques et positivistes.
La nécessité de rigueur préconisée par la Haute Autorité de Santé dans le champ de la prise en
charge des personnes présentant un Trouble du Spectre Autistique – TSA - nous amène à (re)
considérer une partie de notre pratique pour la faire coïncider avec les exigences de la métho-
dologie scientifique, en répondant notamment aux critères d’évaluation et de mise en évidence
de nos résultats. Nous proposons une réflexion sur la place de la psychomotricité au sein des
préconisations actuelles et sur sa complémentarité avec les programmes globaux.

L’intervention du psychomotricien est déjà bien intégrée dans les prises en charges des
personnes avec TSA mais il est important d’affiner son champ d’action dans certains domaines
ciblés par les recommandations (HAS, 2012) tout en s’appuyant sur une analyse de la littérature.

LA PLACE DU PSYCHOMOTRICIEN DANS LES RECOMMANDATIONS


ACTUELLES ET LES PROGRAMMES GLOBAUX
La prise en charge psychomotrice s’inscrit dans les interventions non médicamenteuses et fait
partie des interventions thérapeutiques ciblées (HAS, 2012). Le psychomotricien a pour fonction
première de repérer les troubles psychomoteurs à l’aide d’un bilan qui lui est spécifique et qui
associe observations cliniques et tests standardisés (Le Menn-Tripi, 2013). Ce faisant il contribue
à l’évaluation, nécessaire à la formulation d’un diagnostic et à l’élaboration d’un projet de soin
individualisé, axée autour des compétences, difficultés et intérêts de la personne. La mise en
perspective de ces données avec les besoins repérés par l’entourage permet d’apprécier l’indication
d’une rééducation psychomotrice et de dégager des objectifs opérationnels.

Les recommandations (HAS, 2012) encouragent les psychomotriciens à définir les axes de
prise en charge ainsi qu’un calendrier d’évaluation objective de l’évolution des fonctions essen-
tielles ciblées par l’intervention rééducative. Il est également souligné l’importance de la formation
initiale et continue1 afin que les psychomotriciens travaillant auprès des populations avec TSA
puissent continuellement actualiser leurs connaissances (Entretiens de psychomotricité, 2014).

La psychomotricité au sein des programmes développementaux


Des programmes tels que le Modèle d’intervention de Denver (Dawson, Rogers et col., 2010)
et la Thérapie d’Échange et de Développement de Barthélémy (Lelord et col., 1995) proposent des
outils d’évaluation ciblés ainsi que des dispositifs d’intervention. L’interdisciplinarité de la prise
1
 ar exemple l’Institut Supérieur de Rééducation Psychomotrice de Paris intègre les recommandations de bonnes pratiques (HAS et
P
ANSEM, 2012) dans ses dispositifs de formation initiale et de Développement Professionnel Continu.

96
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en charge est encouragée, contribuant à porter un regard global sur l’ensemble des difficultés que
peut rencontrer l’enfant avec TSA. Le psychomotricien y apporte ses connaissances du dévelop-
pement psychomoteur en évaluant la compétence à acquérir pour mieux se situer dans la zone
proximale de développement (Miermon et col., 2011) et ainsi optimiser son émergence potentielle.
En s’inscrivant au plus près de l’évolution de l’enfant, nous évitons l’écueil d’un apprentissage de
surface et au contraire nous favorisons une inscription neuro-développementale durable qui sous-
tendra l’élaboration des compétences plus complexes. Dans ces programmes, le jeu et le plaisir
partagés sont encouragés comme support des premiers apprentissages (Barthelemy, 1995 ; Rogers,
2013). La mise en place de situations et d’aménagements ludiques est au centre de l’approche du
psychomotricien pour soutenir l’investissement du corps de la personne concernée, autant dans
ses aspects instrumentaux que relationnels (Bénavidès, 2013).

Au sein de la plate-forme des acteurs de la prise en charge, le Modèle d’intervention de Den-


ver (Dawson, Rogers et col., 2010) évoque le rôle du psychomotricien avec pragmatisme : « […]
responsable du dépistage initial, de l’évaluation si nécessaire, de la révision des objectifs, de la
mise en œuvre du traitement concernant le fonctionnement sensoriel et moteur des enfants pré-
sentant des anomalies marquées dans ce domaine » (Rogers, 2013, p.85). Thérapie d’Échange et
de Développement de Barthélémy (Lelord et col., 1995) s’élaborent quant à eux dans l’esprit d’une
disponibilité à l’autre, agrémentée d’une proposition quotidienne de situations d’interactions et
d’exercices psychomoteurs : parcours, jeux de rythme, relaxation, etc. (Le Menn-Tripi, 2013).

La psychomotricité au sein des programmes psycho-éducatifs


Les programmes et méthodes issues de l’Applied Behavior Analysis - Analyse Appliquée du
Comportement - ABA (Lovaas, 1987) et du Treatment and Education of Autistic and Related Com-
munications Handicapped Children - TEACCH (Schopler et al., 1995) sont davantage axés sur
l’apprentissage, l’autonomie ainsi que l’analyse des comportements. L’expertise psychomotrice
au sujet des particularités sensorielles et motrices de la personne TSA peut s’articuler avec ces
dispositifs en facilitant :
vl’évaluation des déficits praxiques au regard d’une norme au moyen de l’adaptation d’outils
standardisés ;
vl’optimisation de la structuration de l’environnement selon le niveau d’activité, les hyper-
sensibilités et hyposensibilités repérées et la proposition d’adaptations en milieu écologique ;
l’éclairage sur certains troubles du comportement ;
v
vla proposition de renforçateurs spécifiques découlant du repérage des centres d’intérêts
de la personne tels que des renforçateurs sensoriels par exemple ;
vla sélection des guidances pédagogiques appropriées, notamment si celles-ci nécessitent
un contact tactile avec la personne afin de porter un regard sur les manifestations tonico-
émotionnelles pouvant en découler.

Les principes de l’éducation structurée sont de plus en plus intégrés aux séances de psycho-
motricité : séquençage visuel de l’intervention au moyen d’un Time-Timer®, utilisation de matériels
concrets ou de photos choisies au préalable, structuration de l’espace de la salle et/ou du bureau,
adaptation des consignes au niveau cognitif de la personne, instauration de routines, utilisation
de renforçateurs afin d’augmenter la motivation de la personne à reproduire le comportement
adapté en cours d’acquisition, etc. (Entretiens de psychomotricité, 2014). Nous relevons que les
renforçateurs tangibles d’ordre sensoriels constituent une alternative particulièrement intéres-
sante car permettant d’associer la probabilité d’augmentation d’un comportement ciblé tout en
apportant un équilibre sensori-tonique nécessaire de la personne avec autisme. Tous ces modèles

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Variations psychomotrices
Aurélien D’IGNAZIO - 2014 - Quels sont les champs d’action du psychomotricien auprès des enfants et des adultes…

d’intervention et leurs grilles d’évaluations sont élaborés pour des enfants. Leur transposition
pour une population adulte n’est pas établie.

Par sa connaissance du fonctionnement du corps à tout âge de la vie, le psychomotricien


est apte à proposer des adaptations selon l’âge et les domaines à renforcer. Auprès des adultes, il
apporte une lecture développementale des troubles mais privilégie une approche fonctionnelle
dans son intervention. Celle-ci vise à évaluer de façon concrète les difficultés adaptatives au
quotidien pour restaurer l’adéquation de la personne à son environnement par la réduction ou la
disparition du trouble psychomoteur ou par la proposition de compensation.

L’INTERVENTION DU PSYCHOMOTRICIEN
DANS LE DOMAINE MOTEUR
La revue de la littérature de Rogers et Benetto (2002) relève les principales difficultés
motrices chez les enfants TSA dans les domaines postural, praxique, tonique, de motricité
manuelle, d’imitation et de planification motrice. D’autres particularités sont décrites comme les
stéréotypies motrices, les retards et atypies du développement, les troubles de la motricité fine et
globale, les altérations de l’imitation et les troubles de la latéralité (Matson et col., 2011 ; Downey
et Rapport, 2012 ; Gowen et Hamilton, 2013). La plupart de ces éléments font partie des champs
d’actions figurant dans le décret d’acte du Diplôme d’état du psychomotricien, particulièrement
formé pour les traiter2. Son intervention pour repérer, évaluer et quantifier les potentialités et
fragilités de l’organisation motrice de la personne apparait nécessaire pour répondre aux exi-
gences des évaluations initiales préconisées. En revanche, nous ne trouvons pas à l’heure actuelle
de recommandations précises en la matière, mis à part que « les outils sont à adapter » (HAS,
2012), ce que les psychomotriciens ont toujours fait face à la diversité clinique de leur patients,
au moyen de tests étalonnés tels que l’Échelle de Coordination Motrice (Charlop et Atwell 1980 ;
Albaret et Noack, 1994) ; la Batterie d’Evaluation du Mouvement M-ABC (Soppelsa et Albaret,
2004) ; l’ Échelle de Développement psychomoteur de la première enfance (Bruent-Lézine, 2001) ou
d’observations cliniques structurées.

Dans le domaine de l’autisme, nous relevons que la plupart des échelles d’évaluation tra-
duites en français comprennent des items traitant des coordinations motrices globales et fines :
Childhood Autism Rating Scale – CARS (Schopler, Reichler et Rochen-Renner, 1988) ; Profil
Psycho- Éducatif – PEP (Lansing, Schopler et Reichler, 1990) ; Profil Psycho-Éducatif pour Ados
et Adultes - AAPEP (Mesibov, Schopler, Schaffer et Landrus, 1997) ; Évaluation des compétences
Fonctionnelles pour l’Intervention auprès d’adolescents et d’adultes ayant de l’autisme et/ou un handi-
cap mental sévère – EFI (Willaye, Deprez, Descamps et Ninforge, 2005) ; Vineland Adaptive
Behavior Scales, Second Edition - Vineland II (Sparrow, Cicchetti et Balla, 2015). Ces outils de
mesure, dans une logique d’intervention, permettent de repérer les acquisitions lacunaires. Le
psychomotricien peut apporter son expertise du domaine moteur dans la conception des échelles,
de l’objectivité de leur cotation au projet de réadaptation qui en découle.

Le Trouble de l’Acquisition de la Coordination -TAC, est une perturbation spécifique du


développement moteur débutant dans la petite enfance dont la prévalence dans la population
générale est estimée à 6 % (Gillberg, 2003). Sa prévalence dans les TSA serait comprise entre
34 % et 79 % (Matson et col., 2011). Le Manuel du DSM 5 reconnait à présent l’entité morbide
TAC comme une comorbidité du TSA (APA, 2013).

2
Article R-4332 du Code de Santé Publique

98
Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Aurélien D’IGNAZIO - 2014 - Quels sont les champs d’action du psychomotricien auprès des enfants et des adultes…

Une de nos réflexions actuelles (Entretiens de psychomotricité, 2014) porte sur les comp-
tabilités de la mise en œuvre des stratégies habituellement opérantes chez les personnes neu-
rotypiques atteintes de TAC auprès des personnes avec TSA3 (Madieu et Ruiz, 2014). Il s’agit
de méthodes orientées sur la performance, préconisant une attention particulièrement portée
sur la tâche spécifique et les moyens nécessaires à son apprentissage (Shumway et Woollcott,
2001). Les approches cognitives et particulièrement la méthode Cognitive Orientation to Daily
Occupational Performance - CO-OP (Polatajko et Mandich, 2013) ont montré leur efficacité dans
plusieurs études pour améliorer les performances des personnes présentant un TAC (Hender-
son et Henderson, 2002 ; Salvan et Albaret, 2006 ; Zwicker et col., 2012 ; Blank et col., 2012).
Une étude sur les performances motrices déficitaires dans l’autisme de haut niveau et utilisant la
Plateforme d’analyse du mouvement a permis d’évaluer l’efficacité de ce type d’intervention dans
cette population (Gallot, 2014). Le psychomotricien utilise certains outils issus de cette méthode
auprès de personnes TSA comme le séquençage de la tâche en étapes, la focalisation sur les points
d’exécutions, les techniques de chainage et les aménagements matériels. A noter que la mise en
place d’une communication alternative par signes de type Makaton (Walker, 1974) bénéfique
pour certaines personnes avec TSA peut être optimisée par l’affinement des praxies.

L’INTERVENTION DU PSYCHOMOTRICIEN
DANS LE DOMAINE SENSORIEL
Les recherches indiquent que les personnes ayant un trouble du spectre autistique présentent
fréquemment des réactions aux stimuli sensoriels différentes de celles des personnes au déve-
loppement typique. Les études montrent que 45 % à 95 % des enfants ayant un TSA présentent
des anomalies sur le plan sensoriel et perceptif (Watling et col., 2001 ; Ben-Saison et col., 2007 ;
Baranek et col., 2008 ; Tomchek et col., 2007). Les troubles de la modulation sensorielle font
partie des tous premiers symptômes observés par les parents. La littérature scientifique ne révèle
à l’heure actuelle que peu d’études portant spécifiquement sur les profils sensoriels des adultes
avec autisme. Les témoignages individuels (Grandin, 1994, 1997, 2011) vont néanmoins dans
le sens d’une persistance des désordres sensoriels à l’âge adulte. Les données de certaines études
(Leekam et col., 2007 ; Crane et col., 2009) suggèrent une continuité des anomalies sensorielles
au fil de la vie contrairement à d’anciens résultats basés sur l’hétéro-évaluation des familles (Kern
et col., 2007).

Nous disposons des échelles d’évaluation spécifiques traduites en français :


vLe Profil Sensoriel (Dunn, 2010) étalonné auprès d’enfant et souvent utilisé dans la re-
cherche scientifique ;
vLe Profil Sensoriel et Perceptif PSP-R (Bogdashina, 2012) établi pour les enfants et dont
l’étalonnage en cours pour les adultes devrait s’intituler Quotient de Perception Sensorielle
(Tavassoli, Baron Cohen, 2014) ;
vL’échelle d’Évaluation Sensorielle de l’Adulte avec Autisme - ECAA (Degenne, 2014) validée
récemment et déjà expérimentée dans différents établissements. Elle vient combler le
manque d’outil d’évaluation à ce jour pour la population adulte.

Nous pouvons également évoquer Le Bilan sensori-moteur d’André Bullinger® (Bullinger, 1996)
non étalonné et qui n’est pas une échelle mais pouvant se classer dans les outils d’observation
clinique structurée dont se servent les psychomotriciens.

3
Nous précisons qu’il s’agit de personnes autistes qui parlent et sans déficience intellectuelle majeure

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Le concept d’intégration sensorielle, issu de la neurophysiologie intégrative, apporte des outils


de compréhension du fonctionnement comportemental des enfants et adultes TSA. Malgré la
difficulté de validation des travaux sur ce thème, l’intégration sensorielle apparait comme une
alternative très employée au sein des programmes thérapeutiques aux États-Unis (Gorgy, 2013)
ainsi qu’en Australie et au Canada (Brown, Rodger, Brown et Roever, 2005). Les déficits en
intégration sensorielle peuvent altérer les fonctions de la vie quotidienne impliquant l’attention,
le mouvement, l’équilibre, la planification, les perceptions auditives et visuelles. La thérapie de
l’intégration sensorielle fait intervenir diverses activités, qui comprennent généralement une
combinaison de stimulation contrôlée des systèmes sensorielles et d’activités motrices (Ayres,
1972 ; Bundy et Murray, 2002 ; Hoehn et Baimeister, 1994 ; Vargas et Camili, 1999 ; Bundy et
Murray, 2002 ; Hodgetts et Hodgetts, 2007). Selon Polatajko et Cantin (2010) l’application de
stimulation sensorielle ciblée a pour effet d’améliorer le traitement neurologique du sens stimulé.
Le but de cette approche consiste à fournir au sujet les stimulations appropriées afin d’amener une
maturation du processus de réception et d’analyse des informations sensorielles (Schaff et col.,
2009). Lorsque les thérapies fournissent des stimulations à un niveau suffisant et acceptable pour
l’enfant, Ayres (1972, 2005) émet l’hypothèse qu’un changement se produit au niveau cérébral
en raison de la plasticité neuronale.

Au regard des parents, l’intégration sensorielle permet de faire évoluer l’enfant TSA sur
le plan de sa socialisation et contribue à modifier ses intérêts restreints (Cohn, 2001). Nous
disposons à l’heure actuelle d’un grand nombre de données empiriques justifiant le recours à
des interventions axées sur le traitement des troubles de la modulation sensorielle. Différentes
procédures d’analyse des comportements ont montré leur efficacité lorsque ceux-ci interfèrent
avec les apprentissages, comme les crises de colère, l’automutilation et la stéréotypie vocale et
motrice (Hanley et col., 2003 ; Odom et col., 2003 ; Devlin et col., 2007 ; Cooper et col., 2007 ;
Prior et col., 2011 ; Dounavi, 2011).

Les programmes sensoriels sont mis en place pour faciliter l’autonomie et l’opérationnalité
de la personne dans son quotidien. Par exemple l’habituation par stimuli tactiles variés pour une
personne hypersensible au toucher (Wilbarger, 1991 ; 1995), l’aménagement d’exercices vestibu-
laires et proprioceptifs pour celle ayant besoin de la sensation de mouvement pour trouver son
équilibre sensori-moteur, la proposition de stimulation de la zone orale pour diminuer la mise
en bouche des choses non comestibles, etc. Par ailleurs Schaaf et Nightlinger (2007) évoquent
les interventions indirectes dans l’environnement des enfants. Cela permet d’améliorer leur
participation, particulièrement en classe et de mieux tenir compte des stimulations sensorielles.
Les activités proposés sont sélectionnées en s’appuyant sur l’utilisation d’un équipement et de
ressources spécialisés : brosses, balançoires trapèzes, ballons vestibulaires, couvertures et vestes
lestées (Parham et col., 2007 ; Pollock, 2009). Une veste lourde offre une stimulation proprio-
ceptive et tactile à celui qui la porte (Davis, Dacus et col., 2013). Selon Fertel-Daly, Bedell et
Hinojosa (2001), l’objectif est de produire un effet calmant et de favoriser les bons comportements.
Souvent, le protocole d’utilisation de ces vestes comporte de grandes variations (Davis et col.,
2013 ; Morrison, 2007 ; Olson et Moulton, 2004). L’utilisation de ces vestes proprioceptives a
permis de voir une augmentation des capacités d’attention visuelle et une diminution des com-
portements d’autostimulaiton (Fertel-Daly et col., 2001). L’exposition importante de ce genre
de matériel tels que vestes lestées, gilets de compression, couvertures proprioceptives dans les
principaux circuits de ventes spécialisées en France et aux États- Unis confirme l’intérêt de ces
outils pour les familles au quotidien.

L’utilisation de techniques corporelles comme les pressions profondes a permis de consta-


ter également une augmentation des capacités d’attention et du niveau de réponse de l’enfant
autiste (Field et col., 1997). Une autre étude montre les effets bénéfiques des stimulations tactile

100
Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Aurélien D’IGNAZIO - 2014 - Quels sont les champs d’action du psychomotricien auprès des enfants et des adultes…

et kinesthésique sur la prise de poids, les capacités d’alerte et la maturité des processus d’habi-
tuation sensorielle chez des enfants prématurés (Field et col., 1986). Ainsi il apparait que les
renforcements tactiles et proprioceptifs ont un impact positif, tout en gardant à l’esprit qu’il ne
s’agit pas de solutions absolues ni uniques et qu’il est nécessaire de prendre des précautions avant
de les utiliser (Gorgy, 2013). La prise en charge du psychomotricien sensibilisé à ces techniques
se compose souvent de mesures de protections axées sur l’environnement du sujet et de mesures
de renforcement axées sur le sujet. Néanmoins les résultats en lien avec cette approche sont encore
peu évalués et ne bénéficient pas suffisamment de validations scientifiques systématiques contrô-
lées dû à l’hétérogénéité des dispositifs proposés ainsi que des particularités interindividuelles
des réactions aux traitements (Case-Smith et Arbesman, 2008 ; May-Benson et Koomar, 2010 ;
Watling et Dietz, 2007 ; Pfeiffer, Koenig, et col., 2011). Ils ne fournissent que des preuves limitées
quant au fait que ces interventions corrigent bien les problèmes sensoriels sous-jacents pour les
enfants ayant un TSA (Lang et col., 2012 ; Prior et col., 2011 ; Sinha et col., 2011 ; Odom et col.,
2010 ; Leong et Carter, 2008, National Standards Project, 2009 ; Kane et col., 2005).

Bien que les traitements d’intégration sensorielle ne puissent être considérés comme ayant
une action véritablement curative des particularités neuro-développementales de la personne
avec autisme, ces outils font néanmoins partis des rares à proposer une forme d’opérationnalité
non intrusive en terme d’évaluation des troubles de la modulation sensorielle, de lecture des
troubles du comportement et de moyen d’intervention du quotidien. Ils constituent par ailleurs
une modalité de soin susceptible de répondre tant à des besoins immédiats (situation de crise)
qu’à des objectifs de soin à moyen et long terme pour des personnes avec TSA. Les programmes
et traitements sensoriels ne peuvent être administrés qu’après une évaluation éclairée et objective
par un professionnel formé. L’intervention du psychomotricien, sensibilisé à cette approche, prend
toute son intérêt au sein d’une réflexion interdisciplinaire.

ASPECTS SPÉCIFIQUES DES INTERVENTIONS


DES PSYCHOMOTRICIENS
Si les champs de la motricité et de la sensorialité n’appartiennent pas à une profession en
particulier, c’est probablement dans leurs articulations que le regard du psychomotricien puise sa
richesse. Cette approche globale, au carrefour du fonctionnement sensori-moteur, socio-émotion-
nel et cognitif (Le Menn, 2013), permet de ne pas considérer le trouble de façon isolée mais de le
lier à la trajectoire développementale de la personne. Après avoir ciblé les domaines lacunaires, le
psychomotricien tend à renforcer aussi bien la motricité à visée fonctionnelle : dominance latérale,
régulation tonique et posturale, coordinations visuo-manuelles, tâches motrices du quotidien,
etc., que la motricité à visée sociale : jeux d’imitation, situations de coopération motrice, décodage
de la communication non verbale, interaction à l’autre, etc. Ces dispositifs s’accordent avec les
particularités de traitement cognitifs des personnes autistes, décrites dans la plupart des études
scientifiques actuelles, comme les déficits d’une exploration visuelle des visages (Hernandez et
col., 2009), la réactivité atypique des systèmes cérébraux miroirs (Dapretto et col., 2006), les
troubles d’intentionnalité des actes moteurs (Cattaneo et col., 2007), etc.

L’évaluation du schéma corporel est également un domaine particulier au psychomotricien.


Son investigation au moyen de tests et d’observations cliniques permet d’évaluer dans quelle
mesure la personne connait son corps, se le représente et l’investit. Si nécessaire, nous établis-
sons alors des mesures pour guider le sujet vers une (ré)appropriation plus adaptée de son corps
avec diminution des auto-stimulations trop envahissantes, régulation des émotions, apaisement
de l’anxiété. La diminution des stéréotypies est décrite dans certains protocoles menés par des

101
Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Variations psychomotrices
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psychomotriciens, que ce soit dans des études comparatives avant/après séance (Chapeau, 2014)4
ou dans des études de cas où sont décrits des exercices procurant des sensations de « substitutions
à la stéréotypie »5 (Savary, Loridon, 2013).

La capacité à pouvoir exprimer un vécu corporel, selon le mode de communication de la


personne, est une compétence qui se travaille également en psychomotricité et apparait souvent
très précieuse dans la réflexion interdisciplinaire, par exemple pour la prise en charge de la dou-
leur. Enfin la multiplicité de nos approches à médiation corporelle permet d’adapter nos prises en
charge à tout le spectre autistique, considérant les particularités cognitives, les centres d’intérêt,
ainsi que l’âge des personnes concernées. Certaines de ces approches sont les mises en situation
perceptivo-motrices : parcours psychomoteurs, jeux d’imitation, jonglage et manipulations d’objets
(D’Ignazio et Faideau, 2015), les dispositifs médiatisés dans des cadres spécifiques telles que les
activités circassiennes, la balnéothérapie par exemple, les approches à visée rééducative comme
le graphisme ou les coordinations motrices (Polatajko, 2004), les groupes d’habiletés sociales
(Baghdadli et Brisot-Dubois, 2011 ; Vermeulen, 2010), les techniques d’intégration sensorielle
(Ayres, 1972 ; Gorgy, 2013), etc.

CONCLUSION
Nous œuvrons pour la poursuite de la recherche en psychomotricité, en adéquation avec les
critères scientifiques préconisés, afin de tenter de combler certaines lacunes méthodologiques et
bibliographiques relevées par le plan autisme (2013-2017). La complexité de cette démarche tient
à la nécessité de mettre au point des dispositifs d’évaluation reposant sur des critères scientifiques
tout en continuant à considérer l’individu dans sa globalité sans le réduire à un enchevêtrement
de déficiences.

Néanmoins la synthèse de la littérature existante et des données empiriques, parfois encore


à des stades expérimentaux, montre l’intérêt de notre approche dans l’amélioration du quotidien
des personnes avec autisme. Les soins psychomoteurs ont vocation à participer plus largement à
une lecture des particularités neuro-développementales et comportementales, tout en permettant
de proposer une forme d’opérationnalité non intrusive en terme de détection, d’évaluation et de
moyen d’intervention sur les troubles spécifiques de la personne avec autisme.

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4
 ans un espace Snoezelen, auprès de personnes adultes avec retard mental sévère et observant au moyen d’une échelle de type Likert
d
le degré d’investissement sensoriel des activités proposées, pendant deux ans.
5
utilisation de trampoline auprès de personne présentant un handicap moteur sévère et des traits autistiques

102
Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
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Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Variations psychomotrices
Contribution psychomotrice
à l’éducation d’enfants en situation
de handicap.
Conjugaison de différents points
de vue
Psychomotor contribution to children with handicaps.
Conjugation of various points of view
Contribución de la psicomotricidad a la educación de
niños con discapacidades.
Conjugación de varios puntos de vista
Marguerite Héron de Florès*, Psychomotricienne MIP
*margueriteheron@gmail.com

Résumé Mots-clés
Cette étude porte sur les bénéfices d’un programme d’interven- Développement psychomoteur atypique – Test psychomoteur –
tion en psychomotricité pour des enfants porteurs de handicap Bilan psychomoteur – Évaluation de l’intervention – Méthodo-
au Pérou. L’objectif est de déterminer si ces interventions aident logie mixte
ces enfants à mieux s’adapter à leur environnement. Les résul-
tats, basée sur une méthodologie mixte, montrent des bénéfices
sur l’ensemble des fonctions psychomotrices évaluées et pointent
l’intérêt de l’objectivation dans l’appréciation des progrès effectués.

Abstract Key words


This is a study about the profits of a program of intervention in Atypical psychomotor development – Psychomotor test – Psycho-
psychomotricity for handicapped children in Peru. The target is motor appraisal – Evaluation of care – Mixt method
to determine if these interventions help these children to adapt
themselves to their environment. The results, based on a mixed
methodology, show evolution of psychomotor functions assessed
and the interest of objective appreciation of the progress.

Resumen Palabras claves


Este estudio evalúa los beneficios de un programa de intervención Desarrollo psicomotor atípico – Prueba psicomotora – Bilan psi-
en psicomotricidad para niños con discapacidades, en Perú. El comotor – Evaluación de la intervención – Metodología mixta
objetivo es determinar si estas intervenciones ayudan a estos niños
a adaptarse a su entorno. Los resultados, basados en una metodo-
logía mixta, muestran beneficios en las funciones psicomotrices
evaluadas, y apuntan el interés de la objetivación de la evolución.

106
Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Contribution psychomotrice à l’éducation d’enfants en situation de handicap. Conjugaison de différents points de vue

INTRODUCTION
Au Pérou la psychomotricité est une discipline très développée dans l’éducation. Elle s’est
implantée dans ce pays avec Miedzinki formé par Kliphart1 à partir de 1989. Il construisit à la
demande de la Cooperación técnica Peruano-Alemana un parc pour enfants dans un bidonville dans
la banlieue de Lima (Miedzinki, 2000).

De manière très étonnante, il n’est pas rare d’entendre, dans divers milieux thérapeutiques,
que les enfants qui ne marchent pas ne peuvent pas accéder à la thérapie psychomotrice, qu’il faut
un certain langage et intelligence pour en bénéficier. Ainsi la psychomotricité pour les personnes
avec un handicap reste méconnue. Notre objectif est donc de proposer la psychomotricité théra-
peutique et de participer à sa justification par une recherche objectivant ses bienfaits.

PSYCHOMOTRICITÉ ET ADAPTATION
La psychomotricité intervient dans trois domaines : l’éducation et la prévention, la réédu-
cation et la thérapie (Berruezo, 2000 ; Potel, 2012). Cependant l’objectif est le même : amener
la personne vers une meilleure adaptation et une meilleure autonomie. Boscaini et Saint-Cast
(2012) décrivent l’adaptation comme un échange incessant entre la nécessité pour l’organisme
de maintenir son équilibre et celle de créer de nouvelles expériences.

L’entretien avec les parents ainsi que le bilan permettent l’élaboration du projet thérapeu-
tique et l’instauration des séances de psychomotricité. Le bilan permet d’estimer le niveau et les
capacités des patients dans les différents domaines psychomoteurs (Saint-Cast, 2009) : le tonus,
le schéma corporel, la coordination visuo-motrice, la motricité fine, graphomotricité et praxies,
la structuration spatio-temporelle, la sensorialité, les émotions et la communication. Chacun de
ces domaines s’évalue en fonction de l’âge et de la pathologie du patient. Durant le bilan, le(la)
psychomotricien(ne) observe donc de manière qualitative et quantitative son patient.

Une étude de Grabot (2004) expose les effets de la psychomotricité à l’issu de 6 mois de
suivi de plus de 150 enfants en CMPP2. Au Pérou aucune étude dans ce domaine n’a été menée.
Notre objectif est de vérifier l’efficacité d’une intervention psychomotrice d’une durée de 7 mois
chez 13 enfants avec des handicaps divers.

MATÉRIEL ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE


L’objectif de cette étude est de déterminer en quoi un programme d’intervention en psycho-
motricité peut améliorer l’adaptation d’enfants en situation de handicap.

Méthode et participants
Cette recherche-action se compose de la comparaison entre des données relatives aux carac-
téristiques psychomotrices avant et après intervention. La méthodologie de collecte et d’analyse
des données retenue est mixte, sans groupe de contrôle. Les processus systématiques, empiriques
et critiques en jeu dans ce type de recherche permettent une meilleure compréhension des proces-
sus étudiés (Hernández Sampieri et Mendoza, 2008, cité par Hernández Sampieri, Fernández
Callado y Baptista Lucio, 2010).

Cette recherche a été menée au sein d’un centre de rééducation dans la ville d’Arequipa au
Pérou.
1
Pionnier de la psychomotricité en Allemagne.
2
Centre Medico – Psycho – Pédagogique

107
Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Variations psychomotrices
Contribution psychomotrice à l’éducation d’enfants en situation de handicap. Conjugaison de différents points de vue

Treize patients ont participé à cette étude (tableau 1). Le tableau ci-dessous présente les
noms d’emprunt (pour garder l’anonymat des personnes), l’âge, le diagnostic et le niveau de
développement. Pour 10 d’entre eux, le temps d’intervention s’est appliqué de mai à novembre
2015, soit 7 mois. Pour Julieta, Santiago et Astrid, le temps d’intervention fut seulement de
4 à 5 mois, Santiago et Julieta étant entrés dans le programme plus tard que les autres, et Astrid
ayant déménagé à Lima en septembre.

Tableau 1 : Caractéristiques générales des enfants étudiés


Nom
(modifié pour Âge Sexe Niveau de dév. / Diagnostic
anonymat)
Matilda 20 mois Féminin 1 an / hydrocéphalie
Naomi 3 ans Féminin 2 ans / Trisomie 21
Carlos 4 ans Masculin 1 an / Trouble du spectre autiste
Astrid 4 ans Féminin Agénésie partielle du corps calleux
Paolo 5 ans Masculin Difficultés de comportement (sans diagnostic)
Juan 5 ans Masculin Retard global du développement (sans diagnostic)
Edgar 5 ans Masculin Retard global du développement (sans diagnostic)
Fabiana 5 ans Féminin Retard mental
Julieta 5 ans Féminin TSA
Santiago 6 ans Masculin Retard global du développement (sans diagnostic)
Diego 7 ans Masculin Infirmité motrice cérébrale
Pablo 7 ans Masculin Difficultés en motricité fine, se manifestant dans l’écriture
Raquel 15 ans Féminin Infirmité motrice cérébrale

Procédure
Tous les participants connaissaient les objectifs de l’étude. Les familles, les participants
eux-mêmes, ainsi que la commission éthique du centre de consultation ont donné leur accord
pour l’étude.

La procédure s’est déroulée en trois temps :


v Première collecte des données par évaluation des capacités et difficultés par un bilan
initial au moyen d’une observation, d’un questionnaire renseigné par les parents avec des
réponses ouvertes et fermées et de la passation de tests psychomoteurs.
vP  rogramme d’intervention psychomotrice.
vD  euxième collecte des données par la même procédure.

La majorité des séances se dérouler ainsi :


v Entrer et enlever les chaussures ;
vC  hanter une chanson pour se dire bonjour ;
vC  hoisir un ou plusieurs jeux, avec le support des images parfois ;
vR  éaliser le ou les jeux choisis ;
vS  e dire au revoir avec une chanson ;
v Mettre ses chaussures et sortir.

Collecte des données relatives aux caractéristiques psychomotrices


L’évaluation initiale et finale pour chaque participant s’est effectuée de manière qualitative
et quantitative. L’observation quantitative s’est effectuée grâce à des tests psychomoteurs (Saint-
Cast, 2009). Le tableau 2 présente chaque test psychomoteur et les patients auprès desquels ils
ont été utilisés.

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Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Contribution psychomotrice à l’éducation d’enfants en situation de handicap. Conjugaison de différents points de vue

Tableau 2 : Tests utilisés et participants qui ont été évalués avec ces tests.
Source de Nom du test Auteurs Âge Participants
l’Information
Domaine
Coordinations et Développement Vaivre-Douret 0 – 48 mois Matilda
capacités motrices Moteur Fonctionnel (1999) Naomi
Echelle de Albaret & 3 ans 5 mois – Astrid,
coordinations motrices Noack (2004) 6 ans Paolo
de charlop-Atwell Juan
Fabiana
Echelle de Rogé (1984) 5 ans 6 mois Pablo
développement à 14 ans 6 mois
psychomoteur
Lincoln-Oseretsky
Structuration Epreuve graphique Santucci (1960) 4 à 6 ans Astrid
spatiale d’organisation Ionescu (1996)
perceptive
Praxies gestuelles Test de la figure Rey (1959) A partir Paolo
et constructives complexe de 4 ans
Test d’imitation Vaivre-Douret 4 à 8 ans Paolo
de gestes (1997) Fabiana
Pablo
Astrid
Développement moteur Vaivre-Douret, 0 – 48 mois Matilda
et fonctionnel (1999) Naomi
Schéma corporel – Somatognosie Bergès-Lézine 3 à 6 ans Fabiana
image du corps (s.d) Pablo, Paolo,
Juan, Astrid
Dessin du Goodenough, 3 à 13 ans Astrid, Pablo
bonhomme (1956)

Le questionnaire renseigné par les parents ainsi que la grille d’observation étaient de type
Likert, le plus utilisé pour mesurer des comportements (Malave, 2007). Chaque questionnaire et
chaque feuille d’observation possèdent au moins une question dans chaque sous-variable : le tonus,
le schéma corporel, la coordination visuo-motrice, la motricité fine (graphomotricité et praxies),
l’organisation spatiale, la structuration temporelle, la sensorialité, les émotions et la communication.
Ils sont uniques pour chaque participant. Chacun d’entre eux est construit à partir de l’Échelle de
développement moteur fonctionnel (Vaivre-Douret, 1999) et l’ Échelle de développement de la première
enfance (Brunet et Lézine, 1965) pour les participants de 0 à 48 mois. Des questions ont été ajoutées
pour les enfants de plus de 4 ans (Lacunza, Castro Solano et Contini, 2009 ; Madrona, 2004,
2016) pour mesurer les habiletés sociales. Enfin pour les patients atteints d’Infirmité Motrice
Cérébrale ou de Troubles du Spectre Autistique les questions ont été inspirées par l’évaluation de
Pelletier (2002) pour personnes polyhandicapées. Chaque question comporte cinq propositions :

v Rien - Un peu – Suffisamment - Très bien – Excellent - En recherche d’un comporte-


ment adapté
et
v Trop – Beaucoup – Assez - Un peu – Rien - En recherche d’un comportement inadapté.

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Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Variations psychomotrices
Contribution psychomotrice à l’éducation d’enfants en situation de handicap. Conjugaison de différents points de vue

Les réponses fermées pouvaient aussi être commentées.

RÉSULTATS
Les résultats généraux sont présentés dans le tableau 3 et dans le graphique 1.

Tableau 3 : Moyennes pré et post intervention psychomotrice calculées sur une échelle en %
Evaluation psychomotrice Questionnaire
PRE POST évolution PRE POST évolution
Coordinations dynamiques 36,9 46,9 10,0 43,5 46,1 02,6
générales
Tonus 31,5 36,7 05,2 34,8 37,3 02,5
Motricité fine 26,4 37,8 11,4 32,0 37,2 06,2
Communication/relation 31,6 37,4 05,8 35,2 38,6 03,4
Emotions 40,0 44,3 04,3 37,1 40,2 03,1
Schéma corporel 31,6 38,1 06,5 36,3 39,3 03,0
Dominance latérale 23,6 25,2 01,6 25,8 25,5 -0,3
Structuration spatiale 31,0 39,0 08,0 32,5 35,3 02,8
Structuration temporelle 19,7 23,3 03,6 20,8 23,1 02,3
Sensorialité 58,3 67,5 10,0 62,5 66,1 03,6

Graphique 1 : Moyennes totales de chaque sous-variable selon la feuille d’observation


et le questionnaire
100

80
Pré psychomotricienne
60
Post psychomotricienne

40 Pré parents

Post parents
20

0
TO CDG SC DL SS ST EM CRA MF SE

On observe un changement positif pour chaque sous-variable avec un changement positif plus
important dans les domaines de la motricité fine (MF, 11,4 points), de la sensorialité (SE) et
des coordinations motrices générales (CDG, 10 points). Ensuite en ordre décroissant, les chan-
gements observés touchent la structuration spatiale (SS, 8 points), le schéma corporel (SC, 6,5
points), la communication et la relation à l’autre (CRA, 5,8 points), le tonus (TO, 5,2 points),
les émotions (EM, 4,3 points) et la structuration temporelle (ST, 3,6 points). Le changement le
moins important s’observe dans la dominance latérale (DL, 1,6 point). En ce qui concerne les
réponses aux questionnaires, le changement est positif sauf pour la dominance latérale (DL) où
l’évolution est légèrement négative de - 0,3 points. Le changement majeur s’observe aussi dans
la motricité fine (MF, 6,2). Ensuite en ordre décroissant les changements observés touchent
la sensorialité (SE, 3,6 points), la communication et la relation à l’autre (CRA, 3,4 points), les
émotions (EM, 3,1 points), le schéma corporel (SC, 3 points), la structuration spatiale (SS,
2,8), les coordinations dynamiques générales (CDG, 2,6 points), le tonus (TO, 2,5 points) et la
structuration temporelle (ST, 2,3 points).

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Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Contribution psychomotrice à l’éducation d’enfants en situation de handicap. Conjugaison de différents points de vue

Tableau 4 : Résultats des tests en moyenne et convertis en pourcentage.


Evaluation
PRE POST DIF
Sous-variables
Coordinations dynamiques générales 32,9 46,9 14,0
Motricité fine 54,4 63,8 09,4
Schéma corporel 38,0 44,6 06,6
Structuration Spatiale 11,1 43,5 32,4

Graphique 2 : Résultats en pourcentage obtenus aux tests pour évaluer 7 patients


dans 4 sous-variables

100
80
60 PRE

40 POST
20
0
CRD MF SC SS

La comparaison des résultats des tests psychomoteurs montre des changements positifs nets pour
tous les sujets. En ce qui concerne les coordinations dynamiques générales, le changement est
de 14 points, pour la motricité fine, il est de 9,4 points, pour le schéma corporel, on observe une
évolution de 6,6 points et enfin pour la structuration spatiale, le changement est le plus important
avec une évolution positive de 32,4 points.

DISCUSSION
Les résultats viennent confirmer l’hypothèse selon laquelle la psychomotricité améliore
l’adaptation des patients dans leur environnement. De manière générale, nous pouvons observer
un changement positif dans toutes les sous-variables. D’autres études comme celle de Rodríguez
Barba, Gómez Barrato, Pietro – Ayuso et Madrona (s.d) et celle de Cuesta Cuerpo, Pietro –
Ayuso et Madrona (s.d) ont démontré les bienfaits de la psychomotricité. La première se base
sur le lien entre la psychomotricité et le langage ; grâce à l’étude de l’évolution de 3 patients,
ils observent et justifient le progrès de ces derniers, non seulement au niveau du langage mais
aussi dans plusieurs domaines psychomoteurs. La deuxième étude porte sur l’élaboration d’un
programme psychomoteur pour les écoles, où les auteurs ont observé dans deux écoles que les
habiletés sociales et affectives des élèves étaient trop peu développées et que ce programme psy-
chomoteur pouvait améliorer cela.

Enfin nous observons que le changement est plus important dans les observations du profes-
sionnel que dans celles des parents. C’est pourquoi nous devons poser la question de la relation
entre parents et enfants handicapés et entre les thérapeutes et les parents des patients.

CONCLUSION
La psychomotricité, profession reconnue par l’Etat français depuis plus de 40 ans, continue à
se développer et à s’améliorer en France et à travers le monde. Malgré les différentes théories qui
la constituent, les différentes façons de l’exercer, on retrouve toujours les mêmes domaines et le
même objectif qui est d’améliorer l’adaptation du patient dans son environnement. Les résultats
positifs de cette étude confirment cet intérêt.
111
Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Variations psychomotrices
Contribution psychomotrice à l’éducation d’enfants en situation de handicap. Conjugaison de différents points de vue

Développer une telle thérapie à l’étranger n’est pas une tâche facile ; la compréhension de
cette nouvelle et l’importance de prendre de la distance pour rompre avec ses propres schémas
culturels sont nécessaires pour pouvoir proposer une nouvelle application de la psychomotricité
comme thérapie dans un pays en développement tel que le Pérou.

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en Educación Física en 6º curso de primaria. coordination visuo-manuelle. Paris : Editions du
Educación, 21, 1-27. Centre de Psychologie Appliquée.

112
Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Syndrôme(s) dépressif(s) expression
psychomotrice :
prise en charge d’enfants de 9 à 13
ans présentant une dépression grave
– après tentative de suicide –
par le traitement de la relaxation
Depressive syndrome & psychomotor expression :
relaxation treatment for 9-13 years old children
with severe depression - after suicide attempt
Síndrome(s) depresivos (s) y expresión psicomotora
toma en carga de niños de las 9 a los 13 años con
depresión severa – después de intento de suicidio –
con el tratamiento de la relajación
Théodore-Yves Nassé, Psychomotricien, Psychothérapeute, Président de l’Institut
Européen de Recherche en Sophrologie et Psychothérapie

Résumé
Les tentatives de suicides chez l’enfant augmentent réguliè- Cet article porte sur la possibilité d’aider ces enfants par des
rement en France dans toutes les catégories sociales et tous méthodes de relaxation.
les milieux. Très longtemps considéré par le monde médical
et scientifique comme un fléau complexe et tabou, il est au- Mots-clés
jourd’hui davantage pris en compte par les spécialistes et thé- Sophrologie – Psychothérapie – Angoisses mortifères – Groupe
rapeutes. Le stress de la vie courante et les dépressions de plus thérapeutique
en plus multiples compliquent les diagnostics et les traitements.

Abstract
Suicide attempts in children increased steadily in France in This paper is about the opportunity of helping these children by
all social classes and environments. During very long it has relaxation methods.
been regarded by the medical and scientific world as com-
plex and taboo scourge. It is now more considered by spe- Key words
cialists and therapists. Everyday life stress and depressions Sophrology – Psychotherapy – Mortiferous Anxiety – Therapeutic
require more and more complicated diagnosis and treatment. group

Resumen
Los intentos de suicidio de niños aumentan constante- Este papel trata de la oportunidad de ayudar a estos niños por los
mente en Francia en todas las clases sociales y ambientes. métodos de relajación.
Aun que fue considerado por el mundo médico y científico
como un flagelo complejo y tabú, ahora está más estudiado Palabras claves
por los especialistas y terapeutas. El estrés de la vida cotidia- Sofrología – Psicoterapia – Angustias mortíferas – Grupo tera-
na y las depresiones complican el diagnóstico y el tratamiento. péutico

113
Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Variations psychomotrices
Théodore-Yves Nassé - 2014 - Syndrôme(s) dépressifs(s) expression psychomotrice : prise en charge d'enfants de 9 à 13 ans…

INTRODUCTION
Aujourd’hui, la dépression touche malheureusement de plus en plus d’enfants issus de
familles qu’elles soient constituées de couples non séparés ou divorcés ou recomposées. La prise
en charge de ces enfants en psychothérapie et/ou en relaxation pose la question de la pertinence
d’un tel choix, plutôt que celui d’une prise en charge psychiatrique médicamenteuse, pour des
pathologies aussi sévères et notamment la façon de faire prévaloir globalement l’intérêt du corps
et de l’esprit dans cette pathologie. Si l’on veut aller plus loin dans cette recherche très spécifique
du traitement de la dépression grave des enfants, on peut également se poser la question de la
pertinence du choix entre la prise en charge de l’enfant par des méthodes de relaxation ou de
la psychothérapie ? Ces questions, d’un abord a priori relativement simple, s’avèrent en réalité
beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît.

Il s’agit d’un sujet délicat par excellence, dont les causes sont nombreuses et parfois difficiles
à identifier. Les tentatives de suicides ou suicides d’enfants sont un phénomène souvent tabou et
peu étudié, il semble pourtant être en nette augmentation ces dernières années en Frances selon
les statistiques du Ministère de la santé.

Chaque année dans le monde, plus de 800 000 personnes, adultes enfants, adolescents,
meurent de suicide ; soit une personne toutes les 40 secondes1 (OMS, 2014). Avec 16,2 suicides
pour 100 000 habitants, la France se situe dans le groupe des pays européens à taux élevé de
suicide après la Finlande, la Belgique et les pays de l’Est, avec un niveau nettement supérieur à la
moyenne européenne qui s’établit à 10,2 suicides pour 100 000 habitants. En revanche en ce qui
concerne les enfants, les statistiques sont frileuses. On peut noter cependant une augmentation
très importante des tentatives de suicides – TS - chez les jeunes enfants et surtout les adolescents
avec 21 % chez les filles et 9 % chez les garçons.

LES IDEES SUICIDAIRES DES ENFANTS


Même s’il nous est difficile de l’admettre et de croire aux tentatives de suicide chez les enfants
de 6 à 13 ans, le processus de passage à l’acte suicidaire sur un fond de dépression grave aux
multiples visages pousse malheureusement certains enfants à l’irrémédiable. Le suicide désigne
l’acte par lequel un enfant, tout comme un adulte, provoque volontairement sa mort. Dans la
plupart des cas, il ne s’agit pas d’une simple envie de mourir mais d’un ultime moyen d’échapper
à une grande souffrance ou à une situation pour laquelle l’enfant ne voit et ne perçoit aucune
issue possible.

L’état suicidaire est souvent difficile à détecter car l’enfant vit dans l’instant présent et a plus
de mal que les adultes à parler de son mal-être. Quant aux idées suicidaires d’un enfant, elles
doivent toujours être prises au sérieux car le déni de l’adulte peut lui être fatal. Si les souffrances
et la maladie de l’enfant ne sont pas entendues par au moins l’un des parents, l’enfant peut pas-
ser à l’acte ou encore, « traîner » ses idées noires avec lui jusqu’à l’adolescence et même dans sa
vie d’adulte. En effet l’enfant est parfois confronté à des situations ou à des événements qui lui
paraissent tellement difficiles à surmonter que son état de stress intérieur et son peu d’expérience
de la vie peuvent alors l’amener à choisir l’irréparable pour mettre fin à une situation qu’il perçoit
comme sans espoir. Cette position devient tellement intolérable à vivre que l’enfant en vient à
croire que seule la mort peut faire cesser ou disparaître cette souffrance. L’apparition des idées
suicidaires se manifeste alors comme le seul remède à un état de souffrance insupportable.

1
 remier rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé – OMS – sur la prévention du suicide, publié le 10 septembre 2014 : « Pré-
P
vention du suicide : l’état d’urgence mondial ».

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Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Théodore-Yves Nassé - 2014 - Syndrôme(s) dépressifs(s) expression psychomotrice : prise en charge d'enfants de 9 à 13 ans…

CAUSES ET SYMPTÔMES DE SUICIDE CHEZ LES ENFANTS


La fin de l’enfance et le début de l’adolescence sont des étapes de la vie difficiles à franchir
présentant de nombreux défis à surmonter. Le passage à l’adolescence se caractérise notamment
par des changements hormonaux, une scolarité parfois difficile ou encore de nouvelles rencontres
ou relations souvent tumultueuses et complexes à gérer. Cette nouvelle période de la vie d’un
enfant peut alors favoriser les pensées négatives. Cependant parler d’un seul facteur déclencheur
du suicide serait inexact. Si un événement très marquant peut dans certains cas pousser le passage
à l’acte, il s’agit très souvent de la conséquence d’une multitude de facteurs qui mis bout à bout
finissent par générer un trop plein de souffrance insupportable : il s’agit de la « goutte d’eau de
trop ». Les principales raisons qui expliquent cette souffrance sont variées tels que :

la peur d’avoir déçu,


v
des difficultés à l’école,
v
le sentiment, d’être privé d’amour, de rejet fondé ou non,
v
le divorce ou la séparation des parents,
v
le fait de ne pas aimer son corps, la dysmorphophobie,
v
les problèmes de poids, anorexie ou boulimie,
v
des difficultés vécues à la maison avec des tensions, de la violence, des abus,
v
la mort d’une personne d’importance ou proche, 
v
l’incapacité d’exprimer ses émotions,
v
les maltraitances à l’école ou dans les relations amicales.
v

On note également la présence de symptômes qui peuvent être inquiétants surtout si l’enfant
en présente plusieurs caractérisés par :

un sommeil perturbé, qu’il soit plus court ou plus long, la perte d’appétit et/ou de poids,
v
l ’isolement,
v
une perte d’intérêt pour ses activités favorites,
v
des fugues,
v
l’agressivité verbale et/ou physique,
v
une apparence et hygiène négligées,
v
des prises de risques non nécessaires,
v
la diffusion de messages inquiétants sur internet/Facebook©.
v

LES SIGNES DE SOUFFRANCE


Les enfants, comme les adultes, tentent de faire comprendre aux autres leur souffrance et leur
sentiment de désespoir. Ils peuvent par exemple essayer de le faire à l’aide de moyens simples qui
peuvent se manifester par la parole ou par des gestes d’agitation psychomotrice trop importante :
tics, troubles obsessionnels compulsifs. Mais la prévention n’est pas facile. « Un enfant peut se
suicider sans être suicidaire » souligne Cyrulnik (2011, p.118). « C’est pourquoi les signes indica-
teurs sont difficiles à voir et à comprendre. Le petit, formule mal un malaise diffus que les adultes
n’imaginent même pas. » Il faut savoir entendre au-delà des mots un enfant qui dit « J’ai mal au
ventre… je suis fatigué… j’en ai marre » (ibid, p.120). Il faut aussi repérer les enfants vulnérables
qui autant que les autres, sinon plus, ont besoin de sentir des liens d’affection qui les lient et
relient aux autres : « Un appel téléphonique, une carte postale, un bavardage…Un événement
banal pour une personne épanouie prend pour un suicidaire l’effet d’un sauvetage » (ibid, p.120).

Les signes de dépression simple chez l’enfant devraient toujours alerter les adultes :
vexpression de tristesse, perte de plaisir, désintérêt pour les choses que l’on aime habituellement ;
vdésinvestissement inhabituel  ;
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Théodore-Yves Nassé - 2014 - Syndrôme(s) dépressifs(s) expression psychomotrice : prise en charge d'enfants de 9 à 13 ans…

repli sur soi, difficulté à communiquer ;


v
plainte

v d’un mal-être à l’école, et/ou avec les copains ;
sentiment d’isolement et d’incompréhension ;
v
mauvaise image de soi ;
v
fatigue,

v plainte somatique ;
réaction de fuite, de se dérober à la réalité ;
v
recours aux drogues et à l’alcool ;
v
mauvaise interprétation de la réalité. 
v

QUE FAIRE DEVANT CES MANIFESTATIONS... AVANT LA THÉRAPIE !


COMMENT AIDER L’ENFANT
En amont, il est important pour les parents de prendre le temps de parler avec leur fille ou
leur fils, dès lors que leur enfant les inquiète. Si le problème persiste, c’est à nous thérapeutes,
d’intervenir pour aider l’enfant à découvrir ses angoisses cachées. Mais en plus du traitement
par un professionnel de santé, les enfants ont aussi besoin de savoir que l’on se préoccupe de leur
sort et que l’on est prêt à les écouter. Pour être en mesure de fournir un soutien adéquat, on doit
être capable d’écouter les enfants qui expriment leurs émotions, sans les juger. Il est essentiel de
les réconforter en leur rappelant qu’il est possible de résoudre n’importe quel problème par des
moyens autres que le suicide. Dans cette dynamique les thérapies de relaxation favorisent une
relation de langage entre le corps et l’esprit.

PRISE EN CHARGE PRINCIPALEMENT EN RELAXATION


Cette réflexion clinique émerge d’un groupe de neuf enfants composé de six filles et de trois
garçons. Chez les filles on constate que les tentatives de suicide sont plus fréquentes que chez les
garçons ; elles retournent davantage la violence contre elles. Certaines d’entre elles ne peuvent
plus se défendre, sont démunies, manquent d’appartenance sociale ou de sentiment d’identité.
Dans cet état de désespérance totale, elles en arrivent aux tentatives suicidaires. Les garçons vont
d’abord s’en prendre à la société par des actes délictueux ou qui s’y apparentent, d’agressivité vis-
à-vis de l’école ou des parents. Ces enfants et adolescents reflètent trop souvent les angoisses de
leurs parents ; ils sont aussi les miroirs d’une société en perte de repères. L’image positive du chef
de famille, garant de l’identité et de l’équilibre, en perte réelle de crédit symbolique et imaginaire,
se détériore. Les couples se disputent, se déchirent, ne s’aiment plus, probablement en raison de
l’usure de la vie. Les enfants répètent et absorbent inconsciemment la situation de leurs parents
qui rejaillit sur eux : dépression, problèmes personnels et/ou professionnels, situation d’échec,
anxiété, angoisse. Comment survivre dans ces conditions pour un enfant qui recherche un sens
positif à sa vie ?

Les enfants consultent sur les conseils du médecin psychiatre. Ils sont reçus dans un premier
temps avec leurs parents puis seuls. Une orientation vers un autre lieu thérapeutique peut aussi
être recommandée aux parents. Pendant l’anamnèse, le diagnostic indispensable permet au plus
vite le choix de la méthode la plus efficace à retenir : soit la relaxation, soit la psychothérapie.
L’urgence est réelle même si certains psychanalystes, pensent que la tentative de suicide veut
simplement signifier aux parents une souffrance, un appel, une interrogation existentielle. Oui,
d’accord, mais ce n’est pas tout ; il faut aussi rechercher ce qui se cache derrière cette menace !
Le danger est présent et, quel que soit le motif, il est donc nécessaire d’écouter mais aussi
d’agir.

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Dossier – Variations psychomotrices Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014
Théodore-Yves Nassé - 2014 - Syndrôme(s) dépressifs(s) expression psychomotrice : prise en charge d'enfants de 9 à 13 ans…

L’intérêt de cette prise en charge, principalement par la relaxation plutôt que par la psycho-
thérapie, est de passer par le corps à l’aide de méthodes adaptées. Ces méthodes de relaxation
semblent efficaces car elles favorisent l’émergence et la verbalisation des angoisses, des blessures
et de ce qui empêche les enfants de vivre normalement, au cours du déroulement de la séance.
Le traitement qui dure depuis 12 mois est positif, aucune rechute dans le groupe. Seul un enfant
semble moins bien réagir, il s’agit d’une fille de 12 ans, Julie, qui penche vers un état limite psy-
chotique inquiétant. Ses parents semblent ne pas le réaliser. Le couple se dispute beaucoup, parle
de divorce. Ils ressemblent aux troubles et symptômes de parents toxiques pervers narcissiques.
La relaxation sera suspendue pour cet enfant qui ne répond pas à cette méthode, au bénéfice
d’une psychothérapie, tout en faisant de la relaxation à sa demande, quand elle en exprimera le
souhait. La prise en charge pour les enfants dépressifs paraît intéressante en prenant le corps
comme langage afin de permettre à un autre langage de conscientisation de s’exprimer. Il est
évident qu’une telle démarche est fort complexe et l’écoute du thérapeute doit être totale, avec
un investissement important. Mais surtout, il est essentiel de donner à l’enfant un socle solide de
confiance, de présence et d’écoute, même en dehors des séances. L’enfant peut laisser un message
téléphonique et en lui répondant, ne serait-ce que quelques minutes, cet entretien lui apportera
un réconfort immédiat. Ce qui aura pour effet positif de diminuer ses angoisses mortifères et
peut-être le sauver du passage à l’acte. La vie de ces enfants en dépend.

CONCLUSION
L’aide psychologique en relaxation permet aux enfants de mettre au point des mécanismes
efficaces qui leur donnent la possibilité de faire face à leurs problèmes graves. Ils auront ainsi acquis
un mode de fonctionnement qui leur sera utile au-delà de l’adolescence. Notre vigilance et notre
empathie de cliniciens sont les gages de la responsabilité thérapeutique souhaitable pour aider
ces enfants-patients à sortir du chemin de la mort et rester dans la vie du présent d’ici et à venir.

Références bibliographiques
Cyrulnik, B. (2011). Quand un enfant se donne
« la mort » : attachement et sociétés. Paris : Odile
Jacob.
Organisation Mondiale de la Santé (OMS)
.sur la prévention du suicide, publié le 10 sep-
tembre 2014 : « Prévention du suicide : l’état d’ur-
gence mondial ».

117
Évolutions Psychomotrices – Vol. 26 – n° 104 – 2014 Dossier – Variations psychomotrices
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Volume 26
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Sommaire
Introduction
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Psychomotricité en Argentine
La formation de l’étudiant en psychomotricité en Argentine 66
Pablo Bottini et Miguel Sassano
Concepts psychomoteurs et applications cliniques 71
Pablo Bottini
Réflexion théorique et clinique au sujet du dispositif groupal
en géronto-psychomotricité 79
Sebastián Buniva
Le vécu du corps dans les troubles des conduites alimentaires
et l’apport de la psychomotricité 86
Claudia Marcela Carta et Natividad Castellani

Variations psychomotrices
Quels sont les champs d’action du psychomotricien auprès des enfants
et des adultes avec des troubles du spectre autistique
entre pratiques recommandées et programmes globaux ? 95
Aurélien d’Ignazio
Contribution psychomotrice à l’éducation d’enfants en situation de handicap.
Conjugaison de différents points de vue 106
Marguerite Héron de Florès
Syndrôme(s) dépressif(s) expression psychomotrice : prise en charge d’enfants
de 9 à 13 ans présentant une dépression grave – après tentative de suicide –
par le traitement de la relaxation 113
Théodore-Yves Nassé

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