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Traitements chimiques

et physico-chimiques des déchets

par Jacques BOURGOIS


Docteur ès sciences
Professeur
Bruno DEBRAY
Docteur
Chargé de recherche
et Valérie LAFOREST
Docteur
Ingénieur de recherche

École nationale supérieure des mines de Saint-Étienne

1. Considérations préalables ..................................................................... G 2 070 - 2


1.1 Objectifs........................................................................................................ — 2
1.2 Gisement des déchets concernés............................................................... — 2
1.3 Choix et mise en œuvre d’un procédé de traitement ............................... — 2
2. Traitements chimiques ........................................................................... — 3
2.1 Oxydoréduction ........................................................................................... — 3
2.2 Mise à pH/neutralisation. Précipitation. Décantation............................... — 7
3. Traitements physico-chimiques ........................................................... — 9
3.1 Procédés à membrane ................................................................................ — 9
3.2 Utilisation des résines échangeuses d’ions .............................................. — 11
3.3 Adsorption.................................................................................................... — 13
3.4 Méthodes électrochimiques ....................................................................... — 14
3.5 Extraction par solvant ................................................................................. — 15
3.6 Évaporation sous vide................................................................................. — 17
3.7 Distillation .................................................................................................... — 18
4. Conclusion ................................................................................................. — 19
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. G 2 070

L es filières de traitement des déchets visent différents objectifs. Il peut


s’agir :
— de permettre leur recyclage total ou partiel, parfois au sein même du
procédé qui leur a donné naissance ou bien encore de faciliter leur valorisation
matière ou énergétique ;
— de permettre également leur retour « écocompatible » dans l’environne-
ment après détoxication ou stabilisation-solidification ;
— enfin, de les décomposer, plus ou moins complètement, en espèces
chimiques « inoffensives ».
Toutes ces filières de traitement nécessitent la mise en œuvre de techniques
très variées qui relèvent de la thermique, de la mécanique, de la physique, de
la chimie, de la physico-chimie ou de la biologie. Le présent article est relatif

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TRAITEMENTS CHIMIQUES ET PHYSICO-CHIMIQUES DES DÉCHETS ______________________________________________________________________________

aux techniques chimiques et physico-chimiques. Pour l’essentiel, ces tech-


niques jouent un rôle prépondérant dans les opérations d’élimination et de
valorisation des déchets car elles permettent de séparer différentes fractions du
déchet, de les concentrer ou d’en modifier l’état physique ou chimique. Nous
nous attacherons, plus particulièrement ici, au cas des déchets spéciaux
liquides.

1. Considérations préalables eaux usées. S’agissant des déchets industriels, la différence princi-
pale tient à la nature du gisement (le plus souvent des « lots » de
déchets et non pas des effluents), à sa variabilité de composition et
à de plus fortes concentrations en éléments « dangereux » dans les
1.1 Objectifs déchets.
Il faut enfin noter que, dans cet article, nous n’aborderons pas :
■ Dans le cas d’une stratégie d’élimination, on cherchera à — la conception et le fonctionnement des centres collectifs de
transformer un déchet de composition complexe en deux flux traitement des déchets industriels qui font l’objet d’une présenta-
séparés : tion séparée ;
— un effluent dépollué qui peut être rejeté dans l’environnement ; — les techniques de stabilisation-solidification des déchets. Ces
— une fraction minérale de préférence, très peu soluble, qui techniques, issues pour l’essentiel du savoir-faire acquis en
peut être acceptée en centre d’enfouissement technique. matière de déchets nucléaires, connaissent un fort développement
Exemple : pour un déchet aqueux, on peut oxyder la fraction et ne se limitent pas au seul aspect chimique et physico-chimique,
organique, séparer la fraction minérale sous forme solide concentrée puisqu’elles englobent les traitements thermiques (vitrification) ou
et stabiliser cette fraction avec un liant hydraulique avant de l’entre- l’enrobage (matières plastiques et bitumes). Elles feront, elles
poser dans un centre d’enfouissement technique de classe I. Tous ces aussi, l’objet d’une présentation spécifique.
traitements font appel à des réactions chimiques d’oxydation, de Notons enfin que, si les principes chimiques ou physico-
réduction, de précipitation, de neutralisation et de stabilisation chimiques mis en œuvre couvrent très largement le champ des
chimique. connaissances actuelles dans ces disciplines, les procédés indus-
triels sont en constante évolution. Ces évolutions concernent princi-
■ Dans le cas d’une stratégie de valorisation, différents objectifs palement les matériaux comme les membranes, les résines ou les
peuvent être visés. On peut obtenir un produit ayant les mêmes réactifs ainsi que les assemblages de procédés à l’intérieur d’une
caractéristiques que le produit neuf (régénération) ou bien encore chaîne de traitement.
extraire une ou plusieurs matières premières minérales ou
organiques ou aboutir à des matériaux plus complexes mais valori-
sables. La diversité des techniques chimiques envisageables va de Ce constat nous a incité à privilégier l’exposé des principes au
pair avec l’extrême diversité des déchets concernés. Contrairement détriment, parfois, de la description exhaustive des procédés
aux procédés d’élimination, dont le champ d’application est large et existants.
la mise en œuvre peu contraignante, les opérations de valorisation
sont beaucoup plus sensibles aux variations de composition des
déchets et doivent être adaptées au cas par cas.
1.3 Choix et mise en œuvre
1.2 Gisement des déchets concernés d’un procédé de traitement

Les traitements chimiques et physico-chimiques concernent une Le choix d’un procédé de traitement chimique ou physico-
grande variété de déchets, pour l’essentiel issus du secteur chimique répond à une démarche rationnelle dont les principales
industriel. Ces déchets sont le plus souvent liquides, boueux ou étapes sont décrites dans la figure 1.
pâteux : bains de traitement de surface, solvants « usés », effluents Les traitements physico-chimiques trouvent leur application aussi
de procédés de l’industrie de synthèse, boues de traitement bien au sein de l’entreprise productrice du déchet que dans des cen-
physico-chimique des effluents industriels, fluides de coupe, etc. tres collectifs. Dans le cas de l’élimination en centre collectif, des
Différents déchets solides sont également concernés comme les chaînes polyvalentes sont prévues pour pouvoir s’adapter à des
résines échangeuses d’ions, les charbons actifs, les piles et accumu- déchets de nature et de composition variées. Les désignations des
lateurs, les sous-produits de l’épuration des fumées d’incinération, filières correspondantes sont données dans le tableau 1. Les cen-
etc. tres de traitement proposent également des filières de valorisation
La mise en œuvre de ces traitements relève de stratégies très concernant des déchets plus spécifiques telles que :
diverses. Elle peut être intégrée à une unité de production au sein — régénération de résines échangeuses d’ions ;
même de l’établissement industriel. Elle peut également constituer — régénération d’huiles usagées claires ;
des centres collectifs de traitement, qui reçoivent les déchets
— régénération d’huiles usagées noires ;
d’origine diverse et au sein desquels une panoplie d’opérations
complémentaires assure la valorisation ou l’élimination de tout ou — régénération de solvants usagés ;
partie de ces déchets. — récupération de métal dissous pour valorisation ;
On peut observer que les procédés existants sont souvent très — valorisation des métaux par voie pyrométallurgique ;
proches, voire identiques, à ceux qui sont généralement décrits — traitement des emballages pollués ;
dans les filières de traitements physico-chimique et chimique des — traitement spécifique des déchets mercuriels.

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Valorisation
Objectifs envisageables
Élimination Réglementation
(arrêté d'exploitation)

Milieu naturel Liste des polluants


(effluent) Seuils de rejet
Détermination des contraintes Centre de stockage Caractéristiques des déchets admissibles
des milieux récepteurs (déchet ultime) Seuils de lixiviation
Unité fonctionnelle Liste des contaminants
(matière valorisable) Teneurs limites en contaminants
Caractéristiques des matières valorisables
Cahier des charges
Caractéristiques
physico-chimiques Matière valorisable
Situation des composants
Caractérisation du déchet Composition Composants "neutres"
par rapport à la destination finale
État physique Contaminants/polluants

Composé admissible dans l'environnement


Transformation
Composé admissible en décharge
du contaminant
Identification des opérations Composé utilisable dans une unité
de base fonctionnelle de production
Séparation des
composés formés
Coût, facilité de mise en œuvre,
maintenance

Chimiques : oxydoréduction, précipitation


Procédé de transformation
Électrochimiques
Choix du procédé
Procédé de séparation Procédés à membranes
Résines
Distillation
Adsorption
Extraction par solvant

Figure 1 – Démarche en vue du choix d’un procédé de traitement d’un déchet

Tableau 1 – Filières physico-chimiques proposées 2. Traitements chimiques


par les centres collectifs de traitement
Code (1) Libellé de la filière 2.1 Oxydoréduction
01 Déchromatation L’objectif poursuivi lors du traitement des déchets par oxydo-
réduction est la transformation des polluants :
02 Décyanuration
— soit en une forme moins nocive pour l’environnement et qui
peut être rejetée dans le milieu naturel ; c’est le cas, par exemple :
04 Neutralisation
• lorsque l’on oxyde des cyanures ou des molécules orga-
06 Régénération de résines niques : les ions cyanure CN– sont ainsi oxydés en ions cyanate
CNO– moins dangereux :
07 Déshydratation mécanique CN – + ClO – → Cl – + CNO –

08 Solidification • lorsque l’on réduit les ions hypochlorite ClO– en ions chlo-
rure Cl– :
09 Séparation de phase des émulsions ClO – + SO2 + H2O → H2SO4 + Cl –
• lorsque l’on réduit un excès d’oxydant :
12 Traitement spécial des solutions aqueuses organiques
H2O2 + 2 Fe2+ + 2 H + → 2 Fe3+ + 2 H2O
(1) Les numéros de code sont ceux adoptés par les agences de l’Eau pour
les aides aux traitements des déchets industriels ; figurent dans ce — soit en une forme dont l’extraction et la stabilisation sont
tableau uniquement les filières physico-chimiques. facilitées, comme lorsque l’on réduit le chrome hexavalent en

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chrome trivalent, qui précipite ensuite facilement sous forme 2.1.2.1 Dérivés oxygénés
d’hydroxyde, par exemple :
■ Air et oxygène gazeux (O2)
2– – + 3+ 2–
Cr 2 O 7 + 3 HSO 3 + 5 H → 2 Cr + 3 SO 4 + 4 H 2 O L’air est l’oxydant le plus simple. Il agit par simple dissolution
dans la solution à traiter. Cette technique est efficace pour réagir
avec les réducteurs forts comme les eaux chargées en ferII par
2.1.1 Principe exemple. Elle a également l’avantage de chasser les gaz dissous en
excès tels que H2S ou CO2 .
Les réactions chimiques d’oxydoréduction sont des réactions
Dans le cas où la demande en oxygène serait plus importante, il
d’échange d’électrons. Comme toutes les réactions chimiques, les
convient de remplacer l’air par de l’oxygène gazeux, technique bien
réactions d’oxydoréduction sont équilibrées. Une constante d’équi-
plus onéreuse.
libre élevée conduit à une réaction quasi quantitative.
■ Ozone (O3)
Réduction oxydant 1 + n 1 e – £ réducteur 1 L’ozone est un oxydant très puissant qui peut réagir sur les réduc-
Oxydation réducteur 2 £ oxydant 2 + n 2 e – teurs selon deux mécanismes différents :
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- — par réaction directe : ce type d’oxydation est très sélectif.
Oxydoréduction n2 oxydant 1 £ n 1 réducteur 1 C’est le cas, par exemple, de l’oxydation par cycloaddition des
+ n 1 réducteur 2 + n 2 oxydant 2 alcènes suivie d’une destruction de l’hétérocycle produit en
composés carbonylés ;
R1R2C -CR3R4 + O3 + H2O → R1R2C - O + R3R4C-O + H2O2
Le potentiel d’oxydoréduction, qui indique l’état d’avancement de
la réaction, est mesuré par un couple d’électrodes constitué par une — par l’intermédiaire de radicaux OH• après réaction sur l’eau :
électrode indicatrice de type redox (fil de platine, d’or...) et une élec-
trode de référence (en général au calomel ou au chlorure d’argent). O3 + H2O → 2 OH• + O2
On appelle E o le potentiel normal du couple redox ([forme
oxydée] = [forme réduite]). Les potentiels normaux sont fournis par Les oxydations par l’intermédiaire de radicaux OH• sont peu
des tables. Le tableau 2 indique quelques valeurs de E o. sélectives car la réaction est du type radicalaire.
■ Peroxyde d’hydrogène (eau oxygénée H2O2)
L’eau oxygénée (H2O2) est un oxydant fort (H2O2 /H2O,
Tableau 2 – Potentiels normaux E o E o = 1,76 V). Elle peut remplacer avantageusement les oxydants
pour différents couples redox chlorés. Ses principaux inconvénients sont d’être relativement ins-
table (elle doit être conservée en cuve d’acier inoxydable) et chère,
Potentiel redox mais elle est beaucoup plus efficace et ne conduit pas à la formation
Couple redox de dérivés halogénés. Elle est également susceptible d’oxyder cer-
(V)
tains complexes.
O3 + 2H+ + 2e– £ O2 + H 2 O + 2,07 L’eau oxygénée peut être utilisée en combinaison avec l’ozone
H2O2 + 2H+ + 2e– 2 H2O + 1,76 pour former un radical OH• selon la réaction :
£
Cl2 + 2e– £ 2 Cl – + 1,36 2 O3 + H2 O2 £ 2 OH • + 3 O 2
Br2 + 2e– £ 2 Br – + 1, 09 ■ Acide persulfurique (acide de Caro H2SO5)
ClO– + H2O + 2e– £ Cl – + 2 OH – + 0,90 et persulfate d’ammonium ((NH4)2S2O8)
I2 + 2e– £ 2I – + 0,54 Ces oxydants sont des oxydants forts qui ne sont utilisés que
lorsque les oxydants plus communs sont inefficaces. C’est le cas,
2 H3O+ + 2e– £ H2 + H 2 O 0,00 notamment, lors de la destruction de complexes cyanures stables
Fe2+ + 2e– £ Fe – 0,44 (comme les ferri ou ferrocyanures, les cyanures complexes de
nickel, de zinc, de cuivre... ou les sulfocyanures) :
Zn2+ + 2e– £ Zn – 0,76
SCN – + 4 H2SO5 + H2O → CNO – + 5 H2SO4

Plus la valeur E o est importante et plus l’oxydant est fort et, inver- Il convient de noter que l’acide de Caro est stabilisé par des sels
sement, plus la valeur de E o est faible, plus le réducteur est fort. ammoniacaux et peut conduire, lors d’une oxydation directe, à la
formation de complexes ammoniacaux très stables comme ceux du
nickel, ce qui est un inconvénient.
2.1.2 Principaux oxydants
Les oxydants sont en général des composés oxygénés ou chlorés 2.1.2.2 Dérivés chlorés
(tableau 3).
■ Chlore gazeux (Cl2)
Le chlore gazeux est le réactif le plus utilisé dans la destruction
par oxydation des micro-organismes vivants. Il réagit partiellement
Tableau 3 – Principaux oxydants avec l’eau pour donner de l’acide hypochloreux HClO, acide faible
en équilibre avec son anion hypochlorite :
Air O3 H2 O2 H2SO5
Dérivés oxygénés 2–
O2 S2 O8 Cl 2 + H 2 O £ 2HClO ( acide hypochloreux )
+ –
Dérivés chlorés Cl2 ClO2 NaClO NHmCln HClO £ H + ClO ( ion hypochlorite )

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■ Dioxyde de chlore (ClO2)


Le dioxyde de chlore ClO2 est un liquide à pouvoir oxydant élevé.
Il est toujours produit sur le site d’utilisation, par action du chlorite
de sodium sur le chlore ou l’acide chlorhydrique. Il réagit selon la 5
réaction : Effluent
– o cyanuré
ClO 2 + e – £ ClO 2 ( E = 0,95 V ) 3 4
Ce composé est surtout utilisé pour la désinfection des eaux pota- M
bles à cause de son pouvoir rémanent élevé.
rH pH
■ Hypochlorite de sodium (eau de Javel NaClO) 2
L’hypochlorite de sodium se dissocie dans l’eau selon la réaction
de dissociation : Effluent
traité
NaClO → ClO – + Na+
1
C’est le couple redox ClO– /Cl– (E o = 0,90 V) qui interviendra lors
des réactions redox sur les composés à éliminer. Il convient de noter
que la réaction d’oxydation mettant en jeu des ions OH–, le pH aura
une grande influence sur la réaction d’oxydoréduction.
■ Chloramines (NH2Cl , NHCl2 , NCl3)
Les chloramines sont produites par action du chlore sur l’ion
ammonium. Leur pouvoir oxydant est moins important que celui 1 réacteur de décyanuration 4 oxydant en solution
des composés cités précédemment, mais leur avantage est d’être
2 stockage des effluents à traiter 5 pompes à débit contrôlé
plus stables donc d’avoir un effet rémanent important. Il faut toute-
fois noter que la formation des chloramines à partir du chlore est un 3 soude M moteur d'agitation
inconvénient dans le cas de la désinfection des eaux potables. En général, le dimensionnement du réacteur se fait pour une
durée de séjour voisin de 45 min.
2.1.2.3 Efficacité des oxydants Son volume est donné par la relation suivante, avec Q débit :
V (m3) = 0,75 Q (m3/h)
L’oxygène et l’eau oxygénée sont les oxydants les moins
efficaces ; ils sont surtout utilisés dans des phases de préoxydation.
Les composés chlorés ont une action efficace en désinfection et sur Figure 2 – Schéma d’une installation de décyanuration
les composés réducteurs. L’ozone, un des meilleurs oxydants, peut
être utilisé pratiquement dans tous les domaines ; son seul inconvé-
nient réside dans la nécessité de le fabriquer sur le site, dans son
coût élevé et dans sa non-rémanence. L’acide de Caro, bien qu’il soit
très efficace, est d’une manipulation délicate et son coût reste élevé. 2.1.5 Exemples d’application

2.1.3 Principaux réducteurs Les réactions d’oxydoréduction sont très utilisées dans le
domaine des déchets liquides aqueux. Nous étudions ci-après
Les principaux réducteurs sont le bisulfite de sodium (NaHSO3) et quelques cas typiques.
le fer ferreux (Fe2+).
■ Bisulfite de sodium (NaHSO3) 2.1.5.1 Oxydation des solutions cyanurées issues
du traitement de surface
Le bisulfite de sodium est plus utilisé que le sulfite de sodium,
bien que plus onéreux, car son emploi est plus simple et son pou- Les ions cyanure ne peuvent être rejetés dans l’environnement
– 2–
voir tampon plus important. Le couple redox est HSO3 /SO 4 . Le car ils sont très toxiques et ne peuvent coexister avec un milieu
pH joue un rôle important, notamment dans le cas de la réduction acide (dégagement d’acide cyanhydrique mortel) ; ils doivent donc
du CrVI en CrIII. subir un traitement visant à les oxyder sous forme de cyanate, dans
un premier temps, et, si la réaction est menée à son terme, sous
■ Fer ferreux (Fe2+) forme de gaz carbonique et d’azote. Cette réaction peut être réalisée
Le couple redox est FeII / FeIII. Son emploi est facile mais son à l’aide des réactifs suivants d’après le schéma de procédé de la
principal inconvénient est la production importante de boue figure 2.
d’hydroxyde au stade de la neutralisation finale.
■ Hypochlorite de sodium (eau de Javel)
C’est l’oxydant le plus utilisé pour oxyder les ions cyanure. Le pH
2.1.4 Mise en œuvre de l’oxydoréduction doit être supérieur à 12 afin que la vitesse réactionnelle soit
suffisante et pour favoriser l’hydrolyse du chlorure de cyanogène
La mise en œuvre de l’oxydoréduction a lieu dans des réacteurs CNCI intermédiaire réactionnel :
parfaitement agités munis d’un couple d’électrodes de mesure. La
réaction peut être réalisée en « batch » ou en continu. Dans le CN – + ClO– → CNO– + Cl –
premier cas, la fin de la réaction sera fonction de sa cinétique et de
son potentiel électrochimique final ; dans le second, le potentiel ■ Eau oxygénée
déterminera la fin de la réaction. La cinétique et le débit sont les L’eau oxygénée détruit les ions cyanure par oxydation avec for-
principales données utilisées pour le calcul du volume du réacteur. mation d’eau. La réaction doit obligatoirement être catalysée par du
Il conviendra de prendre un soin particulier au couple d’élec- cuivre, surtout lorsque les solutions à traiter sont diluées :
trodes afin que la réaction d’oxydoréduction se fasse dans les
meilleures conditions. CN – + H2O2 → CNO – + H2O

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■ Ozone
L’oxydation par l’ozone est réalisée dans une tour de contact. Il est
nécessaire de traiter les rejets gazeux afin d’éliminer l’ozone rési- 5
duel :
Effluent
CN– + O3 → CNO – + O2 ferreux
3 4
■ Acide de Caro ou acide monopersulfurique (H2SO5)
Cet oxydant fort est principalement utilisé dans le cas où les ions pH
cyanure sont complexés :
4–
2
Fe ( CN ) 6 + 6 ,5 H 2 SO 5 + 0 ,5 H 2 O →
– 3 – Effluent
6 CNO + Fe + 6 ,5 H 2 SO 4 + OH traité
1
Dans tous les cas, il est possible de poursuivre l’oxydation, à
l’aide d’un excès d’oxydant, jusqu’au stade de l’azote gazeux.

2.1.5.2 Oxydation des eaux d’exhaure minier


Air
Les eaux d’exhaure minier sont en général riches en fer à cause comprimé
de la dissolution de sulfure ferreux. Lorsque ces eaux sont rejetées
dans l’environnement, il y a formation d’un précipité rouge
d’hydroxyde de fer après oxydation par l’oxygène dissous et dilu- 1 réacteur d'aération 3 acide
tion. 2 cuve de stockage des effluents ferreux 4 base
■ À l’air
Le temps de séjour dans le réacteur de la solution à traiter
C’est l’oxygène de l’air qui oxyde le fer ferreux en fer ferrique. est compris entre 45 et 60 min.
Deux méthodes peuvent être utilisées : Le dimensionnement du réacteur est donné par la formule
— par ruissellement : la solution est aérée au contact de l’air suivante, avec Q débit :
(hauteur de la chute d’eau de 1 m à 1,5 m) ; V (m3) = 0,75 à 1 x Q (m3/h)
— dans un réacteur d’oxydation où a lieu une circulation d’air
[débit d’air : 50 à 100 (m3/h)/m2] (figure 3). Figure 3 – Schéma d’une installation d’oxydation du fer ferreux
Les réactions d’oxydation sont les suivantes selon la nature du en fer ferrique par aération
milieu :
4 Fe 2+ + O2 + 4 H + → 4 Fe3+ + 2 H2O
■ Traitement par réduction
4 Fe 2+ + O2 + 8 OH – + 2 H2O → 4 Fe(OH)3
Les réducteurs les plus utilisés sont le bisulfite de sodium
La cinétique de la réaction est maximale pour une valeur de pH (NaHSO3) et l’acide sulfamique (NH2SO3H). Les réactions mises en
comprise entre 6,5 et 7. La mise à pH précipite l’hydroxyde ferrique jeu sont les suivantes :
Fe(OH)3. Les réactions d’oxydation et de précipitation peuvent être
– – + –
réalisées en même temps pour des valeurs de pH comprises entre 2 NO 2 + 3 HSO 3 + 2 H → N 2 + 3 HSO 4 + H 2 O ( pH = 2 )
6 et 9.
– –
NO 2 + NH 2 SO 3 H → N 2 + HSO 4 + H 2 O ( pH = 4 )
■ Avec l’hypochlorite de sodium
Dans ce cas, la réaction se fait dans un réacteur régulé par le L’avantage de la réduction des nitrites par rapport à l’oxydation
potentiel électrochimique, analogue à celui de la figure 2. est qu’il n’y a pas formation d’ions nitrate ; par contre, lors du
traitement par le bisulfite, la régulation du pH à une valeur très acide
2 Fe2+ + ClO – + 2 H+ → 2 Fe3+ + Cl – + H2O est délicate et, dans le second cas, le coût de l’acide sulfamique est
élevé.
2.1.5.3 Traitement des eaux nitritées Le schéma des procédés utilisés est analogue à celui de la
issues de la galvanoplastie figure 2 où le réducteur est introduit dans le réacteur 4.
Les nitrites présents dans les effluents issus de la galvanoplastie,
ne peuvent être rejetés directement dans l’environnement ; ils doi- 2.1.5.4 Réduction du chrome hexavalent
vent être oxydés au préalable en nitrates ou réduits en azote gazeux.
Le chrome hexavalent est très soluble et très toxique pour
■ Traitement par oxydation
l’environnement, il est nécessaire de le réduire en chrome trivalent
La solution la moins onéreuse consiste à utiliser l’eau de Javel pratiquement insoluble et moins toxique. Ce procédé peut être aussi
comme oxydant dans un réacteur potentiellement régulé analogue bien utilisé pour les rejets aqueux que pour les sols pollués riches
à celui de la figure 2 (la réaction d’oxydation doit être conduite à un en CrVI.
pH de 6) :
– – – –
ClO + NO 2 → Cl + NO 3 ■ Réduction par le bisulfite de sodium

Notons qu’il est également possible d’utiliser l’acide de Caro 2– – + 3+ –


Cr 2 O 7 + 3 HSO 3 + 8 H → 2 Cr + 3 HSO4 + 4 H 2 O
comme oxydant, mais son coût est plus élevé.
– – Cette réaction est pratiquement instantanée pour des valeurs du
NO 2 + H 2 SO 5 → NO 3 + H 2 SO 4 pH inférieures à 2,5. Au-delà de 3,5, la cinétique n’est plus favorable.
Les autres oxydants (Cl2 , H2O2 , O3...) sont économiquement peu Le CrIII est ensuite précipité sous forme d’hydroxyde par augmen-
compétitifs par rapport aux précédents. tation du pH.

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Notons que, lorsqu’un grand excès de bisulfite est utilisé, il se


produit un dégagement de gaz sulfureux d’odeur piquante. Le Tableau 4 – pH de précipitation des métaux
schéma de l’installation de déchromatation est identique à celui de en solution aqueuse (1)
la figure 2, les effluents d’entrée étant de nature chromique (le réac-
teur 1 est le réacteur de déchromatation ; la cuve 3 est, en général Début de Précipitation
Redissolution Précipitant
une réserve d’acide sulfurique ; la cuve 4 est une réserve de bisul- Ion précipitation quantitative
à pH (2)
fite, en général). Le dimensionnement du réacteur correspond à un à pH à pH
temps de séjour de 20 à 30 min. Son volume est donné par la rela-
tion suivante : Fe3+ 2,8 3,5 – NKS
V (m3) = 0,33 à 0,5 × Q (m3 /h) Sn2+ 3,9 Colloïdal 10,6 N
■ Réduction par le fer ferreux Al3+ 4,3 4,8 8,5 NKS
Cette réaction de réduction peut être réalisée à pH acide (> 2,5) : 5,5 6,3 à 6,5 9,2 NS
Cr3+
2– 2+ + 3+ 3+ 5,5 6,3 à 6,5 – K
Cr 2 O 7 + 6 Fe + 14 H → 2 Cr + 6 Fe + 7 H2 O
5,8 7,5 – NK
Cu2+
ou basique (> 8,5) : 5,8 8,5 – S
2–
Cr 2 O 7 + 6 Fe
2+ –
+ 10 OH + 7 H 2 O → 2 Cr ( OH ) 3 + 6 Fe ( OH ) 3 7,6 8,3 > 11 N
Zn2+ 7,6 8,3 – K
Son inconvénient majeur est la production importante de boues
d’hydroxyde après neutralisation (3 à 4 fois plus importante que lors 7,4 7,9 > 11 S
de l’emploi du bisulfite de sodium). Le schéma de principe de ce Ni2+ 7,8 9,3 – NKS
procédé est analogue à celui de la figure 2.
7,0 9,5 – NK
■ Réduction par d’autres composés du soufre Pb2+
5,5 6,5 9,0 colloïdal S
On peut aussi utiliser comme réducteur :
9,1 9,5 à 9,8 – NK
— l’anhydride sulfureux gazeux (SO2) ; Cd2+
— le sulfite de sodium (Na2SO3) ; 7,0 7,2 – S
— le pyrosulfite de sodium (Na2S2O5) ; 9,5 Colloïdal Colloïdal N
— le dithionite de sodium (Na2S2O4). Ag2+
9,25 Colloïdal Colloïdal S
(1) D’après L. Hartenger. — Wasser-u. Abwasserforschung, no 1, 30 (1998)
cité par Weiner (cf. bibliographie en [Doc G 2 070]).
2.2 Mise à pH/neutralisation. (2) N : soude caustique
K : chaux
Précipitation. Décantation S : carbonate de sodium.

2.2.1 Principe
Les conditions de précipitation sont quelquefois plus favorables
La mise à pH (neutralisation) des eaux résiduaires a deux lorsqu’il y a mélange de plusieurs métaux dans l’effluent à traiter.
objectifs : ramener les effluents acides et basiques dans une zone de
pH compatible avec les conditions de rejet dans le milieu récepteur, Exemple : le nickel seul précipite à un pH de 9,5 alors que, en
puis transformer les ions métalliques en solution en composés inso- présence d’une quantité égale de chrome, il précipite à un pH de 8,5.
lubles, ce qui permet alors leur séparation ultérieure après décanta- La qualité de l’eau influe sur les courbes de solubilité (effet de sel).
tion et filtration.
La neutralisation des eaux provoque toujours la précipitation des
ions métalliques sous forme de composés peu solubles (souvent
des hydroxydes) lorsqu’ils ne sont pas présents sous forme d’ions
2.2.2 Différents types de précipitant
complexes. Dans ce cas, il est nécessaire, avant neutralisation, de D’après le tableau 4, la présence simultanée de certains métaux
détruire les complexes métalliques par oxydation. La précipitation nécessiterait des précipitations sélectives. En réalité, le mélange de
des métaux présents dans les effluents acides est effectuée le plus certains ions permet de diminuer le pH de solubilité. Mais le choix
souvent à l’aide de chaux ou de soude : des précipitants (tableau 5) permet aussi de résoudre ces difficultés.
n+ – Les opérations de neutralisation et de précipitation s’intègrent dans
Me + n OH £ Me ( OH ) n la ligne de traitement classique des effluents avant floculation et
décantation.
La précipitation des hydroxydes se produit dans une fourchette
de pH qui varie selon le métal considéré. Une valeur de pH située
dans l’intervalle 6,5 à 9 permet une élimination correcte de la plu-
part des ions métalliques contenus dans un effluent industriel. 2.2.3 Réacteur
Après décantation, la concentration résiduelle de métal dans
l’effluent est de 1 à 3 mg /L. Les principales zones de pH de précipi- Le réacteur de précipitation est généralement le même que le réac-
tation sont reportées dans le tableau 4. teur de neutralisation (figure 4, page 9). La solution doit être modé-
rément agitée pour favoriser la formation de flocs. Le réacteur et le
■ Remarques temps de séjour varient suivant le type de traitement (tableau 6).
L’aluminium, le zinc et le chrome donnent des complexes solubles Après neutralisation et précipitation, les métaux initialement en
en milieu fortement alcalin (pH >10) et leurs hydroxydes peuvent se solution se retrouvent sous forme insoluble. Ces composés insolu-
redissoudre dans les zones de pH choisies pour la précipitation bles forment des « boues » qui sont séparées après décantation par
d’autres métaux. filtration (figure 5, page 9).

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Tableau 5 – Liste non exhaustive des précipitants


Précipitants Propriétés

Hydroxyde de sodium (soude) • Précipitant le plus utilisé


NaOH • Provoque la précipitation des métaux sous forme d’hydroxydes métalliques

• Action similaire à celle de la soude


• Permet la précipitation des
2–
— sulfates : SO 4 + Ca
2+
+ 2 H 2 O → CaSO 4 ⋅ 2 H2 O
— fluorures auxquels il faut ajouter du chlorure de calcium (CaCl2) afin d’obtenir une faible quantité
Chaux
Ca(OH)2 de fluorure résiduel :
2 F – + Ca2+ → CaF2
3– 2+
— phosphates : 2 PO 4 + 3 Ca → 3 Ca 3 ( PO 4 ) 2
• La précipitation du chrome et du zinc présente l’avantage de réduire très fortement le risque de
redissolution de l’hydroxyde par suite de la formation de zincates ou de chromites

• Utilisé pour la précipitation du cadmium et du plomb


Carbonate de sodium • La solubilité des précipités est supérieure à celle des hydroxydes correspondants
Na2CO3 • Le traitement est moins coûteux qu’à la soude mais la précipitation est généralement incomplète
exemple : CaSO4 + Na2CO3 → Na2SO4 + CaCO3

• Précipitation des phosphates :


3– 3+
Chlorure de fer ferrique PO 4 + Fe → FePO 4
FeCl3
si la concentration en phosphore est inférieure à 10 mg/L, la précipitation est améliorée en combinant
du calcium au fer

• Très peu solubles


Composés soufrés
• Permettent une précipitation des métaux faiblement chélatants

Borohydrure de sodium • Efficace sur divers ions métalliques et notamment le cuivre


NaBH4 8 Cu2+ + 2 NaBH4 + 4 H2O → 2 NaBO2 + 16 H+ + 8 Cu

• Composés généralement cycliques comportant des radicaux soufrés


• Réaction avec les métaux lourds sauf les trivalents
Insolubilisants organiques
• Formation de précipités moins solubles que les hydroxydes métalliques correspondants
• La concentration en métal obtenue est inférieure à 1 mg/L

Tableau 6 – Propriété du réacteur et temps de séjour dans le réacteur en fonction du type de traitement
Temps de séjour
Type de traitement Propriétés du réacteur
(min)

NaOH
Insolubilisants
classiques Ca(OH)2 Réacteur de neutralisation 20
Na2CO3

NaBH4 Si présence de matières oxydantes : préréduction au bisulfite de sodium 20


Insolubilisants Soit injectés lors de la neutralisation : même réacteur 20
spécifiques Composés
organiques
Soit après décantation et avant neutralisation finale : réacteur spécifique > 15

Phosphates Réacteur de neutralisation 20


Insolubilisation Sulfates Réacteur de germination avec recirculation des boues > 30
d’anions
Fluorures Réacteur de neutralisation 20

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3.1.1 Techniques
Eaux usées Précipitants : Les différents procédés utilisant des membranes sont les
Soude suivants :
Chaux
Carbonate de sodium


etc.
Techniques
Techniques membranaires
électromembranaires

Filtration Électrodialyse
Figure 4 – Schéma d’un réacteur de neutralisation-précipitation
Osmose inverse Électrolyse à membrane

Pervaporation Électrodésionisation
Eau claire :
vers exutoire Perméation

Décanteur
∞ Filtre - presse La séparation par les procédés à membrane présente différents
Mise à pH - avantages par rapport aux techniques traditionnelles (évaporation,
Neutralisation Boues distillation, cristallisation...) : elle peut être employée à température
ambiante ou proche de l’ambiante, en général sans changement de
phase. Le procédé fonctionne en continu, est facilement automati-
Vers décharge sable et de maintenance faible. Il ne nécessite pas de réactifs
agréée ou centre chimiques.
de traitement

Figure 5 – Schéma simplifié d’une station de traitement 3.1.2 Nature des membranes
physico-chimique
La structure des membranes peut être de deux types : isotrope
(uniforme dans l’épaisseur) ou anisotrope (composite). Les mem-
branes anisotropes sont plus fines, donc de productivité plus
élevée.
3. Traitements Les membranes peuvent être de nature organique (acétate de
physico-chimiques cellulose, polysulfones, polyamides...) ou minérale (céramiques,
métalliques, verres). Les membranes organiques sont encore les
plus utilisées, mais les membranes minérales se développent lar-
Pour de plus amples renseignements sur ces opérations, le lec- gement aujourd’hui car elles peuvent être utilisées dans des
teur pourra se reporter à la rubrique « Opérations unitaires » du conditions sévères (pH, température...). Il existe également des
traité Génie des procédés des Techniques de l’Ingénieur (référence membranes échangeuses d’ions fonctionnant par électroattraction
bibliographique [5]). et électrorépulsion : elles peuvent ainsi interdire le passage des
anions ou des cations selon le cas.
Elles sont mises en œuvre dans différents types de modules :
3.1 Procédés à membrane plans, spirales, tubulaires, à fibres creuses...

Une membrane est une barrière mince (de quelques nanomètres


à quelques millimètres) qui autorise ou interdit le passage de 3.1.3 Méthodes de séparation
certaines entités chimiques sous l’effet d’une force de transfert (gra-
dient de pression, de concentration, de température, de potentiel On distingue trois techniques de séparations en fonction des
électrique...). mécanismes mis en jeu (tableau 7) [1].

Tableau 7 – Différents types de procédés à membrane


Technique Procédé Mécanisme
Microfiltration Dans ces cas, il y a séparation de deux liquides par perméation à
Ultrafiltration travers des membranes permsélectives. La différence entre les
Techniques de filtration procédés tient au diamètre des pores qui passe du micromètre
Nanofiltration pour la microfiltration au nanomètre pour l’osmose inverse.
Osmose inverse
Pervaporation Ici, les membranes utilisées sont denses et non poreuses.
Techniques mettant en jeu des gaz
Perméation
Électrodialyse Elles font intervenir des échanges d’ions. La force motrice est ici le
Électroélectrodialyse courant électrique.
Techniques électromembranaires
Dialyse à membrane dipolaire
Électrodésionisation

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Tableau 8 – Domaines d’application des procédés de filtration à membrane


Conditions opératoires Microfiltration Ultrafiltration Nanofiltration Osmose inverse
Diamètre des pores 0,1 à 10 µm 1 à 100 nm 1 nm 0,5 nm
Pressions................................... (bar) 0,2 à 3 2 à 10 10 à 40 30 à 80
Débits .......................... (L · h–1 · m–2) 100 à 1 500 40 à 200 50 à 100 10 à 60
Molécules de masse molaire
Espèces retenues Particules colloïdes Macromolécules colloïdes > 300 g/mol Ions

■ Procédés de filtration
Condenseur
Le tableau 8 présente les domaines d’application des différentes
techniques en fonction du diamètre des pores de la membrane et
des pressions appliquées. Dans le but d’éviter l’encrassement de la Pompe
à vide
membrane, la filtration est généralement de type tangentiel.
■ Pervaporation et perméation gazeuse
Perméat
Ces procédés sont utilisés pour la séparation de mélanges de sol- Pervaporation
vants organiques, de mélanges azéotropiques, de mélange gazeux
O2 /N2 , le traitement des gaz de purge...
Ils constituent des alternatives à la distillation puisqu’ils fournis-
sent un effluent gazeux sous faible pression. Les fluides entrants Réchauffeur
sont liquides pour la pervaporation (figure 6) et gazeux pour la per-
méation.
Échangeur
■ Procédés électriques
Ce sont ceux mentionnés dans le tableau 7. Rétentat
● Électrodialyse et électroélectrodialyse (figure 7)
Fluide à traiter

Les membranes perméables aux cations ou aux anions sont dis- Figure 6 – Schéma de principe d’une unité de pervaporation
posées alternativement dans un réacteur, ce qui permet d’obtenir
d’une part une solution appauvrie dans un compartiment et d’autre
part une solution enrichie dans l’autre, la force motrice étant créée
par électrolyse. Solution
enrichie
L’électroélectrodialyse se distingue de l’électrodialyse par le fait Solution
qu’il se produit des réactions redox aux électrodes. appauvrie
● Électrodialyse à membrane dipolaire (figure 8)

Dans ce procédé, les membranes sont constituées d’une face per-


méable aux anions et d’une face perméable aux cations. À la jonc-
tion entre ces deux couches, la dissociation de l’eau se produit sous + ....... CN-- ....... --
champ électrique et fournit des protons du côté cathodique et des
Cu2+
ions OH– du côté anodique. L’association d’une telle membrane
avec une membrane cationique constitue un compartiment où sont
générées des espèces basiques. En association avec une membrane
anionique, ce sont des espèces acides qui sont générées. On trans-
forme ainsi un sel en un acide d’une part et en une base d’autre part. Solution de cyanure de cuivre

● Électrodésionisation
Figure 7 – Schéma de principe de l’électrodialyse
Dans ce cas, l’électrodialyse est associée à des résines échan-
geuses d’ions. Cela permet d’éliminer la phase de régénération des
résines lorsqu’elles sont utilisées seules.
Acide Base

3.1.4 Exemples d’applications industrielles


■ Traitement des fluides de coupe
M+
Les fluides de coupe sont des mélanges aqueux très utilisés dans Cathode Anode
l’industrie mécanique pour les opérations d’usinage. Ils peuvent X--
+
être de différentes natures : émulsions ou solutions vraies. Leur H OH--
durée de vie est limitée soit par la prolifération bactérienne, soit par
une perte en principes actifs, soit encore par une pollution par des
huiles étrangères... On peut augmenter la durée de vie de ces fluides
Eau Sel Eau
en utilisant des techniques de filtration membranaire (figure 9). La
microfiltration permet de retenir les particules fines en suspension,
l’ultrafiltration servira, quant à elle, à éliminer la majeure partie des Figure 8 – Schéma de principe de l’électrodialyse à membrane
polluants de la phase aqueuse qui doit être rejetée ultérieurement. dipolaire (3 compartiments) pour la production d’acide et de base

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métalliques par électrodialyse (cf. figure 7) et de les réintroduire


dans la solution de dépôt.
T P

Vanne de
contre-pression Décolmatage 3.2 Utilisation des résines
Pompe
d'alimentation
D D échangeuses d’ions
Rétentat Perméat

Ultrafiltration
L’échange d’ions est une technique de purification dans laquelle
Alimentation les ions présents dans une solution sont éliminés par adsorption sur
Résistance Boucle de
circulation un matériau solide (résine) et remplacés par une quantité équiva-
Échangeur
Bac de
de chaleur
lente d’un autre ion de même charge électrique émis par le solide.
lancement Lorsque les ions échangés sont de charge positive, la résine sera
P
appelée cationique, et anionique dans le cas contraire.
Mesures :
V V D
D : débit
V : vitesse
■ Structure des résines
P : pression Pompe Pompe de La matrice solide est généralement un composé de type copoly-
T : température volumétrique circulation
mère réticulé, en général à base de polystyrène ou de polyacrylate,
mis en œuvre sous forme de billes de diamètre compris entre 0,3 et
1,2 mm. La matrice est insoluble dans l’eau, sa structure contient
Figure 9 – Schéma de la filtration membranaire des fluides de coupe des ions et sa porosité doit être suffisante pour permettre la diffu-
sion des ions dans sa masse.
Il existe deux types de matrice : les résines microporeuses et les
résines macroporeuses. Ces dernières possèdent une porosité
supérieure provenant de l’addition d’une substance porogène
créant des canaux de large diamètre, ce qui permet l’adsorption
d’ions de grosse taille.

■ Différents types de résines


Bain de Les copolymères de base sont activés chimiquement par greffage
dégraissage – –
de radicaux sulfonique —SO 3 ou carboxylique ( — CO 2 ) pour les
+ + +
échangeurs de cations, azotés (—NR2 , —NR 3 , —NR2R’ , —NRH 2)
ou soufré (—SH) pour les échangeurs d’anions.
Un contre-ion X+ est toujours présent dans l’eau d’hydratation de
la résine et c’est lui qui sera échangé suivant la réaction :
Prétraitement Filtration + + + +
Rétentat sur membrane R—SO 3– ,X + Y £ RSO 3– ,Y + X

Il est d’usage de classer les résines en quatre catégories


(tableau 9) :
Figure 10 – Schéma d’installation de régénération
de bain de dégraissage
— type 1 : les résines fortement acides, obtenues par greffage
de radicaux sulfoniques, fixent la totalité des cations en solution ;
— type 2 : les résines faiblement acides, obtenues par greffage
de radicaux carboxyliques, fixent de préférence les cations di ou
trivalent ;
Il convient de noter que :
— type 3 : les résines fortement basiques, obtenues par greffage
— la DCO (demande chimique en oxygène) de la phase aqueuse d’ammonium quaternaire, neutralisent les acides forts et transfor-
produite (perméat) reste encore importante. Un traitement ulté- ment les sels neutres en bases correspondantes ;
rieur est alors nécessaire avant rejet dans l’environnement ; — type 4 : les résines faiblement basiques, obtenues par gref-
— un traitement de déshuilage préalable est souvent nécessaire fage d’amines primaires, secondaires ou tertiaires, neutralisent les
pour éliminer les huiles étrangères surnageantes. acides forts.

■ Régénération des bains de dégraissage Il existe des tables donnant la sélectivité relative des ions par rap-
port à H+ ou OH – (tableau 10).
Les entreprises de traitement de surface doivent toujours faire
subir aux pièces, avant tout traitement ultérieur, une opération de Les résines sont placées dans des réacteurs à lit fixe ou à lit
dégraissage chimique (acide ou basique) avant tout autre traite- mobile.
ment. Les bains résultants, chargés en huiles et graisses, peuvent
être traités par ultrafiltration en continu (figure 10) afin de ■ Mécanisme des échanges d’ions
conserver leur efficacité. Le rétentat produit, riche en huile, est La réaction chimique d’échange ionique est une réaction équili-
ensuite éliminé par des méthodes classiques. brée qui est régie par la loi d’action de masse. La réaction inverse
est appelée réaction de régénération [2].
■ Récupération des métaux La capacité totale d’échange est proportionnelle au volume d’eau
Après une opération de dépôt métallique (Ni, Cu, Ag, Cd...) lors percolée et au nombre d’équivalents échangés. La capacité utile
d’un traitement de surface, les eaux de rinçage des pièces traitées représente la différence entre la capacité en début de cycle et la
sont polluées par les ions métalliques de la solution de dépôt. Plutôt capacité disponible en fin de cycle. Elle est fonction de la nature et
que de dépolluer cette phase aqueuse par voie chimique en produi- de la concentration des ions à traiter, de la température, du débit de
sant des boues d’hydroxyde, il est possible de récupérer les ions percolation, de la hauteur du lit de résine, etc.

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Tableau 9 – Différents types de résines échangeuses d’ions


Catégorie Formule Réaction
– – ++
Ca ( HCO 3 ) 2 + 2 R —SO 3 H → 2 RSO 3 , Ca + 2 H 2 O + 2 CO 2
Type 1 – ++
R—SO3H MgSO 4 + 2 R —SO 3 H → 2 RSO 3 , Mg + H 2 SO 4
Fortement acide

NaCl + R— SO 3 H → RSO 3 , Na+ + HCl
– ++
Ca ( HCO 3 ) 2 + 2 R—CO 2 H → 2 RCO 2 , Ca + 2 H 2 O + 2 CO 2
Type 2 – ++
R—CO2H MgSO 4 + 2 R—CO 2 H → 2 RCO 2 , Mg + H 2 SO 4
Faiblement acide
– +
NaCl + R—CO 2 H → RCO 2 , Na + HCl
Type 3
R—NH3OH HCl + R—NH3OH → R—NH3Cl + H2O
Fortement basique
Type 4
R—NH2 HCl + R—NH2 → R—NH3Cl
Faiblement basique

Tableau 10 – Sélectivité relative des ions par rapport à H+ pour une résine sulfonique
de taux de réticulation 8 %
H+ Li+ Na+ NH 4
+
K+ Cs+ Cu+ Ag+
1 0,85 1,5 1,95 2,5 2,7 5,3 7,6
Mn++ Mg++ Fe++ Zn++ Cu++ Cd++ Ni++ Ca++ Hg++ Pb++ Ba++
2,3 2,5 2,6 2,7 2,9 3,0 3,0 3,9 7,2 7,5 8,7

Tableau 11 – Exemple de traitement d’une eau polluée par différents ions (1)
Espèces en solution
Type de résine Contre-ion Ions captés par la résine
après traitement

Anionique forte Cl– –


HCO 3 , SO 4
2– Ca2+, Mg2+, Na+, Cl–, CH3CO2H

Cationique forte Na+ Ca2+, Mg2+ – 2–


HCO 3 , SO 4 , CH3CO2H, Na+, Cl–

Ca2+
Cationique faible H+ –
2–
Mg2+, Na+, Cl–, SO 4 , CH3CO2H, CO2
HCO 3 (qui réagit avec H+ pour donner CO2 et H2O)

Cationique forte H+ Ca2+, Mg2+, Na+, HCO 3 2–
SO 4 , CH3CO2H, CO2
H+ – 2–
Cationique forte + anionique faible Ca2+, Mg2+, Na+, HCO 3 , Cl–, SO 4 CH3CO2H, CO2
Amine
– 2–
H+ Ca2+, Mg2+, Na+, HCO 3 , Cl–, SO 4 , CH3CO2H
Cationique forte + anionique forte OH– H2 O

(dissocié en CH3 CO 2 et H+)
– 2–
(1) Composition de l’eau brute : Ca2+, Mg2+, Na+, HCO 3 , Cl–, SO 4 , CH3CO2H

■ Régénération contre-courant). La régénération à contre-courant nécessite un


volume de solution régénérante nettement inférieur à celui requis
Lorsque la résine est saturée, donc en équilibre avec la solution pour une régénération à cocourant.
entrante, il est possible de la régénérer, c’est-à-dire d’effectuer la
réaction inverse de celle d’échange au moyen d’une solution ■ Dysfonctionnements
concentrée en contre-ion d’origine. Cette étape peut se réaliser dans Les résines échangeuses d’ions constituent un moyen simple et
le même sens que la saturation (à cocourant) ou en sens inverse (à efficace de traiter les eaux peu chargées en polluants. Contraire-

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rétention des polluants organiques en phase aqueuse ou le captage


de polluants minéraux ou organiques dans les gaz.
Effluent
à traiter
■ Principe
Circuit de L’adsorption repose sur une rétention surfacique qui entraîne une
régénération variation de la composition du mélange solvant-soluté à la surface
de l’adsorbant. Un bon pouvoir d’extraction est donc obtenu avec
des matériaux présentant une grande surface spécifique. Les plus
Résine utilisés sont les charbons actifs, mais on emploie aussi de l’alumine,
des argiles, des gels de silice ou des résines spécifiques.
La relation entre la quantité de composé adsorbée et sa
concentration peut être représentée par diverses formules parmi
lesquelles les plus utilisées sont les isothermes de Langmuir et de
Freundlich :
Eau traitée
q m bC
q = ----------------- (isotherme de Langmuir)
1 + bC
Figure 11 – Schéma de principe d’une installation d’échange d’ions 1/ n
q = kC (isotherme de Freundlich)
avec q quantité de composé adsorbé,
ment à de nombreux procédés, elles ne nécessitent que peu d’inter- b, n et k constantes,
ventions. Cependant, une dégradation des effluents peut être C concentration du composé dans la solution,
observée, notamment dans le cas de régénération imparfaite, de qm quantité maximale de composé adsorbable.
débit mal adapté au réacteur, d’empoisonnement (chimique ou
microbien) ou de dégradation de la résine échangeuse, de présence La relation de Freundlich, bien que fondée sur une approche
de silice ou autre contaminant dans la résine, de problèmes empirique, donne les meilleurs résultats dans le domaine du traite-
mécaniques : fuites, perte de résine... ment des eaux.
La capacité de rétention d’un adsorbant et ses propriétés d’utilisa-
■ Récapitulatif tion varient en fonction de sa surface d’adsorption, de sa granulo-
métrie et de sa porosité.
Exemples :
— le tableau 11, page 12 résume le traitement d’une eau polluée ■ Substances adsorbables
– 2–
par différents ions (Ca++, Mg++, Na+, HCO 3 , Cl–, SO 4 , CH3CO2H) ; Toutes les substances ne sont pas adsorbables au même titre. La
— les eaux de rinçage en galvanoplastie contiennent divers cations capacité de rétention d’un polluant par un adsorbant est donnée par
le rapport entre la masse de produit adsorbé et la masse d’adsor-
métalliques comme Cr3+, Fe3+, Ni2+, Pb3+..., ainsi que des anions bant. Pour une même surface d’adsorption, la capacité de rétention
2– 4– 2– 2–
comme CrO 4 , Fe ( CN ) 6 , Ni ( CN ) 4 , SO 4 , des citrates, des acé- peut varier de moins de 1 % (très faible rétention) à plus de 30 %
tates, des tartrates... Après filtration de cet effluent, un passage sur (forte rétention) en fonction de l’énergie de liaison de la substance à
résine cationique forte élimine les cations. Les impuretés anioniques adsorber, de sa structure moléculaire, de sa solubilité, de sa
sont ensuite fixées par une résine anionique faible et une résine anio- concentration et de l’acidité du milieu. Des tables permettent de
nique forte (pour les anions provenant d’acides faibles). Lorsqu’elles situer différents polluants en fonction de leur susceptibilité à
sont saturées, les résines sont régénérées par de l’acide chlorhydri- l’adsorption.
que ou de la soude.
Exemple : sur un charbon actif, le benzène présente une forte
La figure 11 présente le schéma d’un réacteur à résine échangeuse capacité de rétention (de 25 à 30 %) alors que l’acétylène ou le
d’ions. méthane ne sont retenus que faiblement (capacité de rétention infé-
rieure à 1 %).

■ Mise en œuvre des adsorbants


3.3 Adsorption Le charbon actif, forme microporeuse de carbone, est l’adsorbant
le plus utilisé. Il est obtenu par activation thermique ou chimique
L’adsorption est un phénomène physique de fixation de molé- d’un charbon obtenu par carbonisation de matériaux divers tels que
cules à la surface d’un solide par des forces d’interaction faibles de la tourbe, la houille bitumineuse, le lignite, le charbon de bois et la
type Van der Waals. Elle permet d’extraire un soluté d’un solvant coque de noix de coco. Il se présente sous plusieurs formes décrites
liquide ou gazeux. L’adsorption est généralement utilisée pour la dans le tableau 12.

Tableau 12 – Différents types de charbons actifs couramment utilisés


Forme Aspect Utilisation Régénération
Poudre (cf. figure 12) Particules de diamètre compris Introduit directement dans l’effluent puis filtré
entre 1 et 100 µm
Grains (cf. figure 13) Particules de 0,5 à 10 mm Mis en œuvre sous forme de lits parcourus par le fluide Possible
à traiter
Tissé Fibres tissées Limitée à la dépollution des effluents gazeux faible-
ment pollués

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Anode + -- Cathode

Cuve avec


agitateur
+ →
Red → Ox + n e--

← -- Ox + n e-- → Red

Filtre-presse
Liquide purifié
Figure 14 – Principe de fonctionnement d’un électrolyseur
Adsorbant usé

Figure 12 – Exemple de mise en œuvre de charbons actifs en poudre L’électrolyse est un procédé ancien et maîtrisé, utilisé de manière
industrielle depuis plus d’un siècle pour le revêtement des pièces
métalliques. Son utilisation pour le traitement et la valorisation des
déchets est également ancienne.
Elle a été employée très tôt pour la récupération des métaux
Charge liquide nobles tels que l’or et l’argent dans certains déchets industriels.
Pour ces métaux, le recours à cette technique était parfaitement jus-
tifié du point de vue économique.
L’application de l’électrolyse à la récupération d’autres métaux est
plus récente. Elle se heurte à des difficultés d’ordre économique qui
sont liées aux performances des électrolyseurs pour les solutions de
Charbon Unité en faibles concentrations. On observe en effet une chute de rendement
actif cours de due principalement à la réduction des transferts d’ions dans la
granulaire régénération solution et, éventuellement, à la prédominance de réactions para-
sites (dégagement d’hydrogène dû à la réduction des ions H+, par
exemple).
Enfin, l’électrolyse est aussi utilisée dans le cadre de l’élimination
des déchets, pour l’oxydation ou la réduction de polluants particu-
liers avant rejet de la phase aqueuse.
Liquide purifié Exemple : on peut utiliser l’électrolyse pour la décyanuration par-
tielle d’un effluent.
Figure 13 – Exemple de mise en œuvre de charbon actif granulaire
en montage parallèle 3.4.2 Paramètres de fonctionnement
La détermination a priori des réactions électrochimiques qui peu-
■ Régénération des charbons actifs vent se produire aux électrodes fait appel à des considérations ther-
modynamiques et cinétiques. Les outils théoriques utilisés sont :
La régénération du charbon actif consiste en une libération des
pores de la surface adsorbante par destruction ou entraînement de — les diagrammes potentiel-pH, qui permettent de déterminer la
la substance adsorbée. Cette régénération peut être thermique, nature des espèces théoriquement prédominantes en fonction des
chimique, biologique ou par solvant. La régénération thermique, la conditions de tension aux électrodes et du pH de l’électrolyte ;
plus courante, combine des étapes de vaporisation et d’oxydation — les courbes intensité-potentiel (ou de polarisation), qui ren-
de la substance adsorbée. Cette activation est réalisée sous atmo- dent compte des aspects cinétiques des réactions mises en jeu.
sphère contrôlée : vapeur d’eau ou gaz inerte. L’application principale de l’électrolyse est la récupération de
métaux dans les bains usés de traitement de surface. La liste des
métaux susceptibles d’être électrodéposés résulte de ces considéra-
3.4 Méthodes électrochimiques tions thermodynamiques et cinétiques. En pratique, il s’agit des
métaux qui sont couramment utilisés en traitement de surfaces (Zn,
Ni, Cr, Cu, Cd, Sn, Ag, Au, pour les plus courants). Leur récupération
3.4.1 Principe de l’électrolyse ne pose donc pas de problème sur le plan purement thermodyna-
mique. En revanche, sur le plan cinétique, la diminution de la
L’électrolyse consiste à imposer un courant entre deux électrodes concentration du métal dans la solution à traiter entraîne une chute
plongées dans un électrolyte. Il se produit alors des phénomènes : de rendement importante due principalement aux phénomènes de
polarisation (appauvrissement de la solution aux abords de la
— d’oxydation à l’anode et de réduction à la cathode ; cathode, accumulation d’anions autour de l’anode) et à la prédomi-
— de réaction chimique entre les espèces présentes dans l’élec- nance éventuelle de réactions parasites dues notamment à la pré-
trolyte et les espèces formées ; sence d’éléments tels que le fer ou le chrome, qui réagissent en
— de transport (migration sous l’effet du champ électrique, dif- même temps à l’anode et à la cathode et mobilisent ainsi l’essentiel
fusion). de l’énergie électrique. Le développement de techniques d’électro-
La figure 14 décrit le principe de fonctionnement d’un électro- lyse à compartiments séparés permet cependant de compenser ces
lyseur. phénomènes.

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Tableau 13 – Exemples de dispositifs d’électrolyse applicables au traitement des déchets liquides


Type d’électrolyseur Configuration d’électrode Avantages
Type « filtre-presse » avec cathode en mousse Cathodes en mousse métallique • Manutention simple
métallique • Permet de réduire au maximum l’écart entre
deux électrodes (5 mm)
• Grande surface d’électrode
Électrolyseur à lit fixe Lit granulaire en graphite à travers lequel per- • Grande surface d’électrode
cole la solution à traiter • Réduit les phénomènes de polarisation
Électrolyseur à lit fluidisé L’électrode de travail est constituée par une • Grande surface d’électrode
poudre conductrice de fine granulométrie, • Réduit les phénomènes de polarisation
généralement en graphite, maintenue en sus- • Évite les problèmes de colmatage
pension dans le flux d’électrolyte
Électrolyseur à électrode poreuse percolée La cathode, en graphite granulaire, est traver- • Grande surface d’électrode
pulsée sée par l’électrolyte qui subit un mouvement • Réduit les phénomènes de polarisation
pulsatoire • Évite les problèmes de colmatage

Tableau 14 – Caractéristiques des solvants


Caractéristique Influence sur le procédé
Capacité d’extraction Détermine la quantité de soluté qui peut être mise en solution dans le solvant
Sélectivité pour le soluté à extraire Détermine la capacité du solvant à extraire un polluant particulier
Facilité de régénération Correspond à la facilité de séparation du solvant et du soluté, notamment par des
techniques de distillation
Facilité de séparation du solvant et du diluant Détermine la facilité de séparation du mélange solvant-soluté d’une part et du déchet
(solvant non miscible dans l’eau, faible pouvoir d’autre part
mouillant)
Stabilité chimique du solvant Détermine le risque de dégradation du solvant du fait de réactions parasites avec le
déchet
Caractère dangereux (inflammabilité, toxicité) du C’est naturellement un critère important qui joue notamment sur les conditions
solvant d’utilisation du solvant

3.4.3 Géométrie d’électrode et une concentration du composant C dans S2. Il permet aussi
d’extraire sélectivement le composant C de la substance S1. Le
composant peut être alors à nouveau séparé du solvant S2 afin de
Pour compenser la chute de rendement due à la faible
reconstituer une solution pure, par exemple.
concentration du métal à électrodéposer, des dispositifs d’électro-
lyse spécifiques ont été développés. Ils visent essentiellement à : La nature du solvant est variable. Il peut s’agir d’eau, de vapeur
d’eau, d’un solvant organique ou inorganique, d’un gaz liquéfié ou
— augmenter la surface de la cathode par l’emploi d’électrodes
d’un fluide supercritique. Le solvant est choisi en fonction du soluté
poreuses (mousses) ou volumiques (billes) ;
que l’on veut extraire et du diluant à purifier. Les caractéristiques à
— faciliter les transferts ioniques dans la solution en créant des prendre en compte sont énumérées dans le tableau 14.
turbulences et en rapprochant les électrodes ;
— réduire les réactions parasites et les phénomènes de polarisa- La nature du soluté est très variable. Il peut s’agir de matière orga-
tion aux électrodes en jouant sur la nature des matériaux employés nique (hydrocarbures, huiles, molécules organiques complexes) ou
à l’anode et à la cathode. minérale (sels, ions métalliques).

Des exemples de dispositifs développés sont donnés dans le


tableau 13.

Solvant chargé Solvant (S2)


3.5 Extraction par solvant en composant C
Extraction

3.5.1 Principe
L’extraction par solvant consiste à mettre en contact une
substance solide ou liquide S1 et un solvant S2 dans lequel l’un des C
composants présents dans la substance S1 est soluble. Ce S1
composant C est donc extrait et se retrouve en solution dans le sol-
vant S2, qui est ensuite séparé de la substance S1 (figure 15). Ce
procédé permet donc de réaliser une purification de la substance S1 Figure 15 – Schéma de principe de l’extraction par solvant

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Reconditionnement Circuit du solvant


du solvant

Distillation Désextraction
Extraction Lavage du soluté

Impuretés Soluté

Soluté

Solution de
Raffinat Solution de Solution désextraction
lavage chargée de lavage chargée de soluté
d'impuretés vierge

Traitement de Solution
Traitement Solution la solution de désextraction
du raffinat d'alimentation désextraction vierge
du soluté

Autre
Récupération
procédé
du soluté

Rejets Élaboration Rejets


du produit fini

Figure 16 – Bloc-diagramme d’un procédé d’extraction liquide-liquide [3]

3.5.2 Extraction liquide-liquide le composant à séparer forme un azéotrope à température d’ébul-


lition minimale avec l’eau ;
L’extraction liquide-liquide concerne essentiellement des conta- — récupération de solvants instables thermiquement ou qui réa-
minants minéraux (métaux notamment) en solution aqueuse, qui gissent avec d’autres composants du déchet à la température
sont extraits par un solvant non miscible dans l’eau. Il existe cepen- d’ébullition ;
dant certaines applications visant des contaminants organiques — récupération de solvants qui ne peuvent pas être distillés,
(phénols, éthanol ou acétone, par exemple). même à basse pression, en raison de leur point d’ébullition élevé ;
— récupération de solvants lorsque des dangers d’explosion ou
Parmi les applications de l’extraction liquide-liquide, on peut citer d’incendie existent.
l’extraction du cuivre, du cobalt et du fer en milieu chlorhydrique
par la triisocétylamine ou le tributylphosphate ou celle du phénol Le point essentiel à considérer pour déterminer la faisabilité d’un
entraînement à la vapeur est l’existence d’un azéotrope à tempéra-
des effluents de cokerie et des raffineries de pétrole par le diiso-
propyléther ou le benzène. Le schéma type d’un procédé d’extrac- ture d’ébullition minimale. En l’absence d’information sur ce point,
tion liquide-liquide est présenté sur la figure 16. on utilise la température d’ébullition et la constante de Henry
comme indicateur de l’intérêt d’un entraînement à la vapeur. On
considère que les composants présentant les caractéristiques sui-
vantes sont susceptibles d’être traités par entraînement :
3.5.3 Entraînement à la vapeur — température d’ébullition inférieure à 150 oC ;
— constante de Henry supérieure à 10–4 bar · m3 /mole.
La vapeur agit par réduction de la pression partielle des
constituants du mélange, ce qui entraîne une diminution de la
température de fusion du constituant à séparer. Le mélange de gaz 3.5.4 Extraction par fluides supercritiques
ainsi formé est stable en raison de la basse température d’ébullition
de l’azéotrope. Il peut être évacué et recondensé pour obtenir un Au-delà d’un couple de température et de pression (T c , P c) qui
mélange eau-solvant. Lorsque le solvant est non miscible dans définissent le point critique, il n’existe plus de frontière entre l’état
l’eau, il peut aisément être récupéré. liquide et l’état gazeux (cf. figure 17). La matière se trouve alors à
l’état supercritique. Un fluide supercritique est doté d’une forte
L’entraînement à la vapeur est habituellement utilisé pour les opé-
compressibilité, d’une viscosité supérieure à celle du gaz et de capa-
rations suivantes : cités d’autodiffusion élevées. Un fluide supercritique est aussi doté
— séparation d’une faible quantité de COV (composés orga- d’un pouvoir solvant bien supérieur à celui de son liquide. Le
niques volatils) d’une grande quantité de matière ; dioxyde de carbone supercritique est le plus utilisé car ses
— séparation d’une quantité importante de composants à faible conditions d’obtention sont faciles à atteindre (31 oC, 74 bar) et il
solubilité et haut point d’ébullition d’un déchet non volatil lorsque allie, à un bon pouvoir solvant, une absence de toxicité et de

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P (bar)
Compresseur
Zone Vapeur
supercritique
Liquide
PC = 74 bar
C
Solide
PT = 5,2 bar
T Concentrat Incondensables

Gaz
Alimentation Condensat

TT = 57 °C TC = 31 °C T (°C)
Figure 18 – Schéma de principe d’une unité d’évaporation
Les échelles ne sont pas respectées sous vide à compression mécanique de vapeur

Figure 17 – Diagramme d’état du dioxyde de carbone

réactivité. Il est compatible avec des solutés très variés. Ses proprié- Pompe
tés sont exploitées dans différentes applications : à vide

— dissolutions extractives (caféine du café, nicotine du tabac,


cholestérol du jaune d’œuf) ;
— chromatographies ;
— réactions chimiques en milieu supercritique homogène. Évaporateur
Compresseur de la PAC
■ Application au traitement des déchets de la PAC Distillat
L’application des fluides supercritiques au traitement des déchets
est récente. Il s’agit principalement d’extraire des contaminants
organiques de déchets minéraux solides (sols pollués notamment). Entrée du
fluide
La plupart des composés organiques de masse molaire inférieure à à traiter Condenseur
2 000 g/mol sont solubles dans le CO2 supercritique. de la PAC

3.6 Évaporation sous vide


L’évaporation d’une solution aqueuse est une opération unitaire Concentrat
qui consiste à éliminer une partie plus ou moins importante du sol-
vant, selon le degré de concentration souhaité. Cette élimination a
lieu en chauffant la solution jusqu’à ébullition sous une pression Figure 19 – Schéma de principe d’une unité d’évaporation
donnée. Si ce type de procédé est largement répandu dans de nom- sous vide à pompe à chaleur
breux types d’industrie (chimie, agroalimentaire...), il commence à
être utilisé pour la concentration d’effluent aqueux provenant du
secteur de la mécanique, par exemple (usinage, traitement de sur-
face), notamment à cause de l’utilisation de la compression méca- des premiers concentrateurs (700 kW par tonne d’eau évaporée).
nique de vapeur (figure 18) ou des pompes à chaleur (figure 19) qui Maintenant que le couplage avec une compression mécanique de
le rendent énergétiquement compétitif. vapeur ou une pompe à chaleur a vu le jour, les dépenses énergé-
Les avantages de la concentration par évaporation sous vide sont tiques sont bien moindres : 50 à 100 kW par tonne d’eau évaporée
les suivants : avec la compression de vapeur selon le type de compresseur, 230 à
250 kW par tonne d’eau évaporée avec une pompe à chaleur.
— réduction des volumes des solutions résultantes à traiter ;
— possibilité de recyclage des condensats ;
— valorisation ou recyclage des concentrats. 3.6.1 Compression mécanique de vapeur
Les domaines d’application sont, par exemple :
— concentration des bains usés : dégraissage, décapage... ; ■ Principe de la compression mécanique de vapeur (CMV)
— concentration des éluats de régénération de résines échan- (figure 18)
geuses d’ions ; Les vapeurs issues d’une évaporation sous pression réduite sont
— concentration des bains de rinçage, des eaux de cabines de comprimées et sont ensuite condensées dans un échangeur
peinture... ; réchauffant le liquide à évaporer.
— concentration des eaux de lavage, de solutions aqueuses hui-
leuses ou graisseuses... Le liquide à traiter est placé dans la cuve d’évaporation. Il est
chauffé sous vide par l’intermédiaire d’un échangeur, entre en ébul-
Ces exemples d’application mettent en valeur la possibilité de lition et produit de la vapeur. Cette vapeur (souvent appelée buées)
réutilisation soit de l’eau, soit des solutés, ce qui tend vers le zéro passe sur un séparateur qui a pour but de limiter au maximum les
rejet liquide dans l’environnement. entraînements physiques de liquide. Elle est ensuite comprimée par
Si l’évaporation sous vide n’est appliquée industriellement que un compresseur (à lobes « Roots » ou soufflante), puis est envoyée
depuis peu, c’est à cause de la demande énergétique importante vers l’échangeur où elle se condense.

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Tableau 15 – Différents types d’évaporateurs à CMV


Évaporateurs verticaux Évaporateurs horizontaux Compression
À flot tombant À faisceau immergé Volumétrique : faible débit
À thermosiphon À faisceau arrosé Centrifuge : débit important
À circulation forcée

Tableau 16 – Différents types d’évaporateur à PAC


Évaporateurs à plaques Évaporateurs tubulaires Autres types PAC
À flot tombant À faisceau immergé À double enveloppe Compresseur à piston ou à vis
À flot grimpant À faisceau arrosé À faisceau arrosé Fluide frigorigène : R22, R134a, mélanges
À circulation forcée À circulation forcée À couche mince
Noyés

Lorsque le processus est amorcé (création des premières buées), 3.7 Distillation
la seule dépense énergétique est l’énergie nécessaire à la machine
tournante de compression. La distillation est une technique très ancienne aux applications
industrielles multiples. Dans le domaine du traitement des déchets,
■ Évaporateurs à CMV (compression mécanique de vapeur) elle intervient principalement comme technique de régénération de
Il existe plusieurs types d’évaporateurs (tableau 15) qui seront solvants. La distillation exploite la différence de composition entre
choisis en fonction du fluide à traiter (sensibilité thermique, visco- le liquide et la vapeur en équilibre pour un mélange. Une installation
sité, risques d’encrassement ou de moussage). de distillation est donc composée d’un dispositif de chauffage et
d’un dispositif de captage et de condensation des vapeurs. Une telle
Exemple : le cas présenté ici porte sur la concentration d’émulsion installation permet de récupérer un distillat plus ou moins exempt
usée de fluide de coupe de l’industrie mécanique au moyen d’un éva- de ses impuretés et un résidu appauvri en solvant.
porateur de 40 L/h de débit maximal. L’évaporation est menée sur une
charge de 304 kg, la masse de concentrat obtenu est de 26 kg avec un
facteur de concentration voisin de 10. La charge a été préalablement
3.7.1 Principe de fonctionnement
placée dans un décanteur afin d’éliminer les huiles étrangères surna- La figure 20 présente l’allure générale d’un diagramme de phase
geantes. L’évaporation a été menée à 90 oC sous une pression de binaire (obtenu à partir d’un mélange de deux composants (A et B)).
550 mbar et le débit d’évaporat a varié entre 37 L/h et 30 L/h en fin La fraction molaire xA du composant A est portée en abscisse (xB se
d’évaporation. La DCO moyenne du distillat obtenu exempt de toute déduit de xA par xB = 1 – xA). Les deux courbes sont appelées res-
prolifération bactérienne est de 2 g/L, valeur conforme à un rejet dans pectivement courbe d’ébullition et courbe de rosée. La première
un collecteur relié à une station d’épuration. Notons cependant qu’une correspond au début de l’ébullition du mélange lorsque celui-ci est
fine couche huileuse (1 ‰) est présente à la surface du distillat, un chauffé, la seconde à la fin, c’est-à-dire au moment où l’ensemble
post-traitement serait nécessaire pour s’affranchir de cette huile rési- du mélange est vaporisé.
duelle. La consommation énergétique a été, pour le cas choisi, de
130 kW/tonne d’eau évaporée. Partant d’une teneur initiale xM en composant B, la phase liquide
et la phase vapeur évoluent au cours du processus. À une tempéra-
ture donnée, les compositions de la phase vapeur et du liquide sont
données par les abscisses des points d’intersection de l’horizontale
3.6.2 Pompe à chaleur intégrée isotherme avec la courbe de rosée et avec la courbe d’ébullition.
Dans l’exemple de la figure 20, la vapeur est plus concentrée en
■ Principe d’un évaporateur à pompe à chaleur intégrée composant B que le liquide. En une étape de distillation, on a donc
(figure 19) obtenu deux produits : l’un enrichi en composant A et l’autre en
composant B.
La chaleur nécessaire à l’évaporation est celle produite par la
condensation de la vapeur du solvant à éliminer une fois son niveau Dans la pratique industrielle, il est fréquent de procéder à plu-
énergétique augmenté par une pompe à chaleur. La pompe à cha- sieurs étapes de distillation, généralement dans le même appareil,
leur permet le transfert de chaleur d’une source froide vers une une colonne à distiller (figure 21). En absence d’azéotrope, les pro-
source chaude par l’intermédiaire d’un fluide frigorigène : elle duits obtenus sont quasi purs.
comprend un compresseur, un évaporateur (source froide) et un Dans certains cas, le mélange présente un azéotrope. Les courbes
condenseur (source chaude). d’ébullition et de rosée admettent alors un extremum commun. Le
mélange correspondant est appelé mélange azéotropique. Il a la
■ Évaporateurs à PAC (pompe à chaleur) particularité de présenter une phase vapeur et une phase liquide de
Il existe plusieurs types d’évaporateurs (tableau 16) qui seront même composition. Lorsque l’on distille un mélange présentant un
choisis en fonction du fluide à traiter (sensibilité thermique, pres- azéotrope, on n’obtient pas deux corps purs mais un corps pur et le
sion maximale admise, possibilité de précipitation). mélange azéotropique.

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— la position relative des températures d’ébullition des diffé-


T (°C) rents composants ;
Vapeur — la formation d’un azéotrope ;
— le point d’auto-inflammation.
Courbe Courbe Lorsque les températures d’ébullition des composants sont trop
de rosée d'ébullition proches, la séparation devient difficile car une légère variation de
température entraîne la vaporisation ou la condensation de
T
l’ensemble du mélange.
L+V Lorsque le mélange de solvants forme un azéotrope, celui-ci
constitue l’un des produits obtenus à l’issue de la distillation, en asso-
ciation avec l’un des composants du mélange à l’état pur. La régéné-
ration n’est alors intéressante que si la fraction de produit pur est
Liquide suffisamment importante ou si le mélange azéotropique présente un
intérêt. C’est, par exemple, le cas lorsqu’il s’agit d’un mélange
aqueux et que l’on tolère une certaine humidité dans le solvant.
Le point d’auto-inflammation est la température à laquelle un
Composition Composition corps en présence d’oxygène s’enflamme sans intervention d’une
de la vapeur du liquide flamme. Un point d’auto-inflammation trop bas peut se traduire par
un danger d’incendie ou d’explosion lié au chauffage du mélange.
B pur A pur On limitera donc la régénération par distillation aux solvants dont le
Composition
initiale point d’auto-inflammation est supérieur au point d’ébullition de
du mélange Composition 40 oC au moins.
(%) En plus des paramètres purement techniques, certaines données
économiques peuvent intervenir. Il s’agit, en particulier, de la valeur
Figure 20 – Allure générale d’un diagramme de phase binaire des solvants récupérés et du coût d’élimination des résidus de dis-
tillation. Ceux-ci dépendent notamment de la teneur en chlore du
solvant, un solvant chloré étant généralement plus cher à l’achat
mais aussi plus coûteux à éliminer, donc plus rentable à régénérer.

Condenseur
4. Conclusion
Reflux
Cet article présente un panorama illustré des principales opéra-
tions chimiques et physico-chimiques mises en jeu dans le traite-
Fractions ment des déchets industriels. Il ne présente pas les procédés de
Colonne manière exhaustive mais privilégie l’exposé de leur principe de
régénérées
fonctionnement. N’ont pas été pris en compte dans cet article la
conception et le fonctionnement des centres collectifs de traitement,
Solvant à Vapeur ni les techniques de stabilisation-solidification qui sont présentées
régénérer par ailleurs [4].
Toutes les techniques présentées sont des procédés classiques du
génie chimique. Elles sont donc bien connues et bien maîtrisées,
Chaleur même si leur application au domaine des déchets nécessite une
approche spécifique liée à la nature même des déchets traités. Ces
Chaudière différentes opérations sont rarement utilisées seules, elles sont
associées dans une chaîne de traitement, cette association étant dif-
férente d’un déchet à l’autre. Il convient de souligner que les pro-
cédés d’épuration sont en lien étroit avec ceux du traitement des
Résidu de eaux, la seule différence réside dans les concentrations plus impor-
distillation tantes en éléments nocifs, dans la variabilité de composition, dans
la nature du gisement, ce qui implique que les procédés doivent
Figure 21 – Schéma simplifié d’un dispositif de distillation avoir une grande « souplesse » d’utilisation.
discontinue Ces techniques sont, pour la plupart, fortes consommatrices
d’énergie et de réactifs. Elles génèrent souvent des déchets ultimes
qui aboutissent en décharge de classe I et dont l’élimination repré-
3.7.2 Application à la régénération de solvants sente un coût non négligeable. D’une manière générale, ces coûts
d’élimination se trouvent réduits lorsque ces techniques sont utili-
Les déchets concernés par la distillation sont principalement des sées dans un but de valorisation. Mais, seule, une approche de type
solvants souillés par divers types de matières : graisses, eau, pein- « technologies propres », qui vise à réduire à la source la production
ture, matières en suspension diverses. L’objectif de la régénération de déchets, notamment par optimisation du procédé, permet de
est la récupération d’un solvant présentant les mêmes qualités d’uti- réduire véritablement le coût de la protection de l’environnement. Il
lisation que le solvant neuf. s’agit de passer d’une vision classique qui sépare le procédé de pro-
En dehors de paramètres tels que la teneur en matière en suspen- duction de celui d’élimination des déchets à une vision intégrée, qui
sion qui peut être modifiée par un prétraitement, il existe trois prin- consiste à rechercher les économies et la réduction des impacts tout
cipaux facteurs affectant la possibilité du traitement d’un mélange au long d’une chaîne de production, faisant de l’eau et de l’air dépol-
de solvants par distillation : lués des produits à part entière du processus.

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