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Tupac Soulas
© Éditions de la Sorbonne | Téléchargé le 11/05/2021 sur www.cairn.info via Université Hassan II (IP: 196.200.165.13)
ISBN 9791035100254
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-internationale-des-etudes-du-
developpement-2017-3-page-125.htm
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Tupac Soulas
Article lauréat du Prix jeunes auteurs 2016 de la Revue Tiers Monde
MOTS-CLÉS
école de gestion, États-Unis, Chine, enseignement de la gestion, coopération
internationale
RÉSUMÉ
Cet article analyse le rôle des coopérations états-uniennes dans l’émergence
et la structuration de l’enseignement de la gestion en Chine depuis le
début du xxe siècle. Des coopérations successives menées par plusieurs
acteurs états-uniens (évangélisation, puis endiguement du communisme,
et enfin aide au développement économique) ont porté des projets visant à
aider au développement de la Chine. Avec des objectifs et des approches
différentes, ils ont utilisé l’enseignement de la gestion comme un outil
de chacun de leurs projets. En dépit des décennies de communisme
maoïste, ce processus a conduit à l’exportation d’un modèle états-unien
d’enseignement de la gestion d’entreprise qui domine aujourd’hui en
République populaire de Chine.
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Une leçon de soft power : le rôle des coopérations états-uniennes avec la Chine
dans l’exportation de l’enseignement de la gestion
Introduction
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Pendant trente ans, la Chine maoïste a adopté une approche révolutionnaire
du communisme, réprimant les profils étiquetés capitalistes, s’éloignant de
l’influence états-unienne en nouant des liens étroits avec l’Union soviétique,
et axant sa politique économique sur la planification.
La situation actuelle montre que non seulement les acteurs chinois ont
bénéficié d’un soutien extérieur dans le développement de l’enseignement
de la gestion d’entreprise, mais qu’il les a conduits à adopter une certaine
forme de cet enseignement, celle valorisée par le classement du Financial
Times et qui domine aujourd’hui dans le monde occidental : le « modèle
de la business school ». Ce modèle se caractérise par l’offre de programmes
professionnels de type MBA, l’investissement dans les activités de recherche
et l’internationalisation des écoles (Soulas, 2016).
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Hong Kong et de Macao, rétrocédées après 1997.
1. L’évangélisation
Revue internationale des études du développement
de la gestion.
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dans l’exportation de l’enseignement de la gestion
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largement admises à la suite d’une conférence de missionnaires tenue en
1890 à Shanghai. Un grand nombre d’écoles seront créées dans les années
suivantes (Ng, 2009).
Alors qu’elles ont une mission d’évangélisation, pour les élites locales, ces
écoles sont devenues l’incarnation d’une opposition au système traditionnel
d’enseignement. L’abolition du système des examens impériaux en 1905
rend les écoles chrétiennes plus attractives pour les Chinois, encourageant
l’ouverture d’établissements d’enseignement supérieur. Accueillant environ
200 étudiants en 1900, les établissements supérieurs chrétiens en comptent
1 700 dans 16 établissements vingt ans plus tard. Dans les années 1920, ils
se détachent de plus en plus des activités missionnaires, en particulier en
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La plupart de ces universités ou colleges chrétiens sont protestants
et affiliés aux États-Unis. En effet, « l’apogée du mouvement missionnaire
protestant coïncide avec l’altruisme de l’ère progressiste (1890-1914) aux
États-Unis, une période de changement rapide marquée par la prospérité
croissante, l’optimisme, l’ambition et de l’assurance » (Lautz, 2009). Dans ce
contexte, de nombreux volontaires issus des universités états-uniennes iront
dans ces établissements et seront accueillis favorablement par les Chinois
et leurs aspirations progressistes et nationalistes.
1 Cité par Trescott (2007), cette traduction et les suivantes ont été réalisées par
l’auteur.
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grandes villes côtières où se concentrent les activités missionnaires sont en
effet, à cette époque, le lieu du développement d’une bourgeoisie capitaliste
florissante (Bergère, 1986). Pour dispenser les enseignements, la Fondation
Lingnan, basée à New York, finance l’envoi de professeurs des universités
états-uniennes. De même, comme de nombreuses universités protestantes
états-uniennes, Lingnan fut un marchepied pour nombre de Chinois partant
étudier à l’étranger. Ainsi, dès 1904, plusieurs étudiants obtiennent des bourses
pour aller étudier aux États-Unis. En 1912, il y a ainsi vingt-sept anciens
étudiants de Lingnan aux États-Unis. Certains d’entre eux sont envoyés par
la direction de l’université dans le but d’enrichir le corps enseignant à leur
retour (Corbett, 1963).
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2. L’endiguement
Les forces militaires communistes prennent le pouvoir en Chine
en 1949, persécutant un grand nombre de catégories de personnes, comme
les entrepreneurs privés, mais aussi les missionnaires et leurs établissements
d’enseignement, forcés à fermer en 1952. Dans un contexte international de
début de guerre froide, ces formateurs exilés, qui avaient des liens privilégiés
avec les États-Unis, ont alors bénéficié d’importantes aides pour poursuivre
leurs activités d’enseignement à Hong Kong.
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disciplinaire vers le commerce et la gestion, alors même que la HKU n’offre
pas ce type de formation. Ainsi, en 1962, les départements de commerce
et gestion des trois principaux colleges accueillent 12 % de leur millier
d’étudiants (Fulton, 1963).
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Hong Kong (CUHK). Comme les collèges à l’origine de sa création, CUHK
se positionne très clairement comme une université « américaine » dans ses
échanges et son fonctionnement. Cette proximité avec les États-Unis est
d’autant plus facile que la diaspora états-unienne est très puissante dans la
colonie britannique à partir des années 1950, au point de menacer l’autorité
de l’administration coloniale (Mark, 2004). En plus d’une dotation publique,
un grand nombre de fondations états-uniennes apportent des contributions
financières et logistiques à la consolidation de la nouvelle université. Parmi
les différentes aides, notons la mise en place d’un « Staff Development
Programme » en 1965 grâce au financement de la Fondation Ford (Ng, 1994).
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Jusqu’au milieu des années 1970, le soutien des fondations philanthropiques
états-uniennes a permis de développer l’enseignement de la gestion à
Hong Kong, en s’appuyant sur les exilés du continent. Le gouvernement
états-unien organise à l’époque ces coopérations en vue de lutter contre la
propagation des idées communistes. Cette vision est explicite dans l’action de
certains acteurs, comme la Fondation Ford, qui établit un lien direct entre le
renforcement des compétences managériales et la lutte contre le communisme
soviétique (Khurana, 2007) et qui mène des actions de promotions similaires
en Europe de l’Ouest (Gourvish et Tiratsoo, 1998). Pendant toute cette période,
la CUHK est la seule université à offrir des formations supérieures en gestion
et elle recrute un grand nombre de jeunes Chinois formés en Amérique du
Nord. Lors de l’ouverture de la Chine continentale, à la fin des années 1970,
elle contribue également à former de nombreux professeurs des universités
du continent.
3. L’aide au développement
À partir de la fin des années 1970, le gouvernement de la RPC,
sous la direction de Deng Xiaoping, décide d’ouvrir à nouveau la Chine
continentale, avec un double objectif : moderniser le pays (politique des
« quatre modernisations », adoptées en 1978) et le développer sur la base
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responsables chinois sont méfiants à l’égard de l’influence états-unienne et
souhaitent multiplier les coopérations internationales avec différents pays
afin de ne pas importer un modèle unique (Hayhoe, 1989b). Dès le milieu
des années 1970, de nombreux fonctionnaires chinois s’imprègnent des idées
et expériences de leurs homologues au sein de l’Unesco et de la Banque
mondiale, associant le développement économique à celui de l’éducation,
multipliant les demandes de projets de coopérations éducatives (Bastid,
1986). Une grande variété d’initiatives est entreprise dans le domaine de
l’enseignement supérieur. La Banque mondiale pilote de nombreux projets
visant principalement des « disciplines orientées vers le développement »
(Hayhoe, 1989a). D’autres sont également organisés en coopération bilatérale
avec plusieurs agences nationales d’aide au développement.
car elle représente un domaine nécessaire pour mener à bien les réformes
économiques voulues par le Parti communiste, mais aussi du point de vue
des États-Unis, cet enseignement permettant d’intégrer la Chine dans l’ordre
économique capitaliste. Les acteurs états-uniens sont ainsi en première ligne
dans ce domaine.
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Jordan Baruch était le directeur du Secrétariat du commerce […]. Et Jordan avait
ce truc de vouloir projeter les idées commerciales états-uniennes à l’étranger,
et donc lui, pour une raison ou une autre, était impliqué dans une sorte de
délégation officielle et ils ont rencontré les gens de la Commission de Science
et Technologie du gouvernement chinois, et ça, ce fut le contact. Le gars de
la Commission S&T était un gars du nom de Kang, et ce fut Jordan Baruch
et Kang qui montèrent cette idée [de centre de formation]. Et c’était à la fin
1979, sous Jimmy Carter. Donc cela est parvenu à se lier à partir de je ne sais
quel pouvoir ils avaient et ils ont eu un peu d’argent, et une fois qu’ils ont eu
l’argent, ils ont lancé le programme5.
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Parce qu’à cette époque, ils ne savaient pas ce qu’était le management, ok ?
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Qu’est-ce que le comportement organisationnel ? Donc à cette époque, je
pense que l’école ou le département de l’éducation essayait d’accroître ce genre
d’échanges. Et aussi les États-Unis avaient ce genre de programme d’échange.
Nous avions un centre de formation de l’université de Dalian. À cette époque,
en 1984, il était déjà en place. […] Certains des enseignants ont étudié la
gestion là-bas. Nos enseignants, […] ces personnes avaient une formation
d’ingénieur, donc ils devaient apprendre ce qu’était la gestion. Donc ils sont
allés là-bas pour étudier7.
6 Notons que les villes de Canton (dans le Sud) et Dalian (dans le Nord-Est) sont
situées à plus de 2 000 km l’une de l’autre.
7 Entretien réalisé et traduit par l’auteur (2013).
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1989 marque le début d’une remise en cause des collaborations des pays
développés avec la RPC. Le durcissement du régime entraîne la fin de la
coopération sino-états-unienne à Dalian en 1991. La coopération universitaire
sino-canadienne en gestion, dans le cadre du CCMEP, se termine en 1996. Aux
États-Unis, la publication du « Rapport Cox » en 1999 change également le
regard sur les collaborations transpacifiques. Ce rapport fait état de nombreuses
fuites de technologies vers la Chine et critique la politique d’ouverture
états-unienne envers la RPC (Cox, 1999). De plus, la croissance fulgurante
durant la décennie 1990 contribue à améliorer la situation économique
chinoise, la RPC étant de plus en plus perçue comme un concurrent pour
les pays développés. Au début des années 2000, le pays sort de la liste des
« pays à faible revenu » bénéficiaires de l’aide au développement définie par
l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)8.
La Commission européenne a ainsi réorienté son financement vers d’autres
pays. Le centre de formation sino-européen transformé en école de gestion
doit désormais compter sur ses frais de scolarité pour se financer.
8 Jusqu’en 2002, la Chine était classée dans la catégorie « pays à bas revenu » par
le Comité d’aide au développement de l’OCDE. Elle est ensuite passée dans la
catégorie « à revenu intermédiaire, tranche inférieure ».
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Un professeur de marketing dans l’une des plus prestigieuses universités de
Shanghai explique ainsi le parcours des maîtres à penser de sa discipline :
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années 2000, cette dynamique n’est plus portée par les gouvernements et
tend à disparaître. Les écoles ont pris le relais et recrutent aujourd’hui des
professeurs à l’étranger. Ces recrutements sont également marqués par ces
références symboliques et la proximité avec les États-Unis : les professeurs
sont le plus souvent des Chinois formés dans ce pays, car ces profils sont
bien plus nombreux en raison des échanges passés. Cette orientation se
retrouve, même lorsque cela est contradictoire avec le positionnement de
l’école. Dans l’école sino-européenne héritière de la coopération avec la
Commission européenne, les Chinois formés aux États-Unis sont également
surreprésentés dans les recrutements d’enseignants. C’est ce qu’explique un
de ses responsables :
Les écoles moins prestigieuses ne sont pas toujours attractives pour ces
profils, mais elles se tournent alors vers les candidats issus des universités
de Hong Kong, où les docteurs en gestion sont essentiellement des
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Tout comme Stanford et Berkeley ont joué un rôle clé dans la création de la
Silicon Valley, nous avons pour objectif d’être les prochains Stanford et Berke-
ley de Chine pour aider au développement du delta de la rivière des Perles12.
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le projet des responsables chinois de solliciter l’aide étrangère en diversifiant
les sources d’influence pour éviter d’importer un modèle unique a échoué.
La raison réside dans l’action de coopération internationale des États-Unis
dans le domaine de la gestion tout au long du xxe siècle. Cette coopération
peut être analysée par les vagues successives d’acteurs portant l’enseignement
de la gestion dans leur action en Chine (évangélisation, endiguement, aide
au développement). Sa réussite réside dans la synergie de trois dimensions :
la formation délivrée en Chine, la formation de Chinois aux États-Unis et,
enfin, l’exportation de l’enseignement de la gestion vers d’autres pays qui
sont devenus des partenaires de la Chine.
en Chine continentale, mais les États-Unis ont continué à former des Chinois
dans leurs universités et, surtout, ont exporté la vision de l’enseignement de
la gestion à Hong Kong (Soulas, 2016) et en Europe occidentale (Gourvish et
Tiratsoo, 1998). Ainsi, lors de la sollicitation d’aide au développement de la
part de pays étrangers, l’appel à différents gouvernements pour diversifier
les sources d’influences ne pouvait conduire à importer plusieurs modèles
d’enseignement de la gestion. De plus, les échanges antérieurs facilitant le
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Qu’ils se tournent vers leurs professeurs locaux, vers leur diaspora, vers
Hong Kong ou les autres pays, les Chinois retrouvent aujourd’hui la référence
au même modèle, celui désigné en introduction par le modèle de la business
school. Ce dernier s’affirme progressivement comme une référence à l’échelle
internationale, mais est aujourd’hui devenu une évidence pour les acteurs
chinois de l’enseignement de la gestion.
Conclusion
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Le cas de l’enseignement de la gestion en Chine invite à élargir le spectre
des analyses sur le rôle de la coopération dans la circulation internationale
des idées. Élargir dans le temps long est ici incontournable. Même s’il
peut paraître saugrenu de revenir un siècle en arrière pour comprendre les
écoles de gestion d’aujourd’hui, il est clair que la situation actuelle ne peut
se comprendre que si l’on considère ce qu’était l’éducation et l’économie
chinoise d’avant Mao Zedong. En ce sens, l’approche de Marie-Claire Bergère,
décrivant le « retour du vieil homme » pour évoquer la résurgence des valeurs
pré-maoïste dans la Chine des années 1980, est très pertinente (Bergère, 1984).
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Times valorisant les écoles les plus proches du modèle de la business school,
l’émergence de cette concurrence peut aussi être perçue comme la réussite
de l’exportation de ce modèle.
L’AUTEUR
Tupac Soulas
Sinologue et docteur en sociologie, il est spécialiste des relations internationales
des organisations d’enseignement supérieur et de la Chine. Chercheur associé
au Laboratoire interdisciplinaire Sciences Innovations Sociétés (LISIS), Tupac
Soulas a soutenu en 2016 une thèse à l’université Paris-Est intitulée « Business
Schools made in China : l’émergence des écoles de gestion chinoises ».
Revue internationale des études du développement
A récemment publié
Soulas T., « Du modèle nord-américain à une évaluation “made in China”.
L’exemple des écoles de gestion en Chine », dans Barats C., Bouchard J.,
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