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Maryan LORCET
Anne-Sophie RAMA
Introduction
Initialement placée au sein de la direction générale des douanes et droits directs (DGDDI),
la cellule de renseignement financier française est devenue un service à compétence
nationale depuis le 6 décembre 2006. Elle est actuellement sous l'autorité du Ministère de
l'Action et des Comptes publics.
Service d’enquête administrative, TRACFIN un maillon essentiel reconnu dans la lutte contre
le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme pour le traitement du renseignement
financier. Certaines professions sont assujetties à une obligation de lui signaler les sommes
ou les opérations qui peuvent sembler d’origine illicite. La vigilance exigée des professions
assujetties à cette obligation de déclaration est sélective car elles doivent transmettre les
mouvements financiers susceptibles de présenter des éléments atypiques. TRACFIN reçoit
ces déclarations, les analyse, les enrichit puis les transmet principalement aux autorités
concernées.
1
Loi n°90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre
le blanchiment des capitaux provenant du trafic de stupéfiants
Quelques données chiffrées
I - Organisation
A) Les départements
Dans ce département, trois officiers de liaison y ont été intégrés : la Direction Générale des
Finances Publiques (DGFIP), l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) et
l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS).
Au sein de ce département figurent cinq divisions qui gèrent les investigations approfondies
nécessaires au traitement des affaires. Chaque division comporte une cellule spécialisée :
dans le secteur des jeux, des circuits financiers non-bancarisés, prédation économique et
financière, montages juridiques complexes et cybercriminalité financière.
Il a pour mission d’apporter son expertise et son appui juridique et judiciaire sur les dossiers
relevant de sa compétence.
Le conseiller juridique qui travaille en son sein est chargé de donner un avis consultatif
indépendant du directeur sur la caractérisation des faits susceptibles de constituer
l’infraction de blanchiment.
- Police nationale
- Gendarmerie nationale
- Office central de répression de la grande délinquance financière
- Douane
Elle exploite les informations disponibles afin d’identifier des tendances en matière de
blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.
Les fonctions supports sont assurées par le département des affaires administratives et
financières (DAAF).
Au 31 décembre 2019, le service était composé de 175 agents dont 7 agents de liaison mis
à disposition de TRACFIN par leur administration d’origine.
B) L’évolution de l’effectif
L’année 2019 a été marquée par une poursuite de la croissance des effectifs avec 175
agents le 31 décembre 2019, TRACFIN a poursuivi sa croissance (5,4% d’augmentation des
effectifs en 2019).
Depuis 2014, les effectifs ont ainsi augmenté de 68,2%. Le service accorde une attention
particulière à l’accompagnement des nouveaux agents, tant sur le plan de leur intégration
que de leur formation. L’origine administrative des agents nouvellement recrutés en 2019
confirme la tendance observée depuis plusieurs années du point de vue de la diversité des
profils et compétences venant enrichir le service.
Sur les 43 agents nouvellement recrutés en 2019, très majoritairement de catégorie A, près
de 28% sont contractuels, 23,2% proviennent d’administration centrale, 20,9% sont
originaires de la DGFiP et 16,2% sont des agents douaniers. Cela porte la répartition des
effectifs de TRACFIN à une prédominance toujours forte de la DGFiP et de la DGDDI,
puisque respectivement 26% et 27% des agents du service sont originaires de ces
directions. La part des agents contractuels se stabilise à 19% alors que la part d’agents
originaires d’administration centrale est passée de 19% à 22% entre 2019 et 2020. Les
femmes représentent 40% des effectifs contre 60% pour les hommes. La moyenne d’âge est
de 42 ans2.
● Intégrer l'information
Dans un premier temps, TRACFIN va recevoir des informations sur des flux financiers, dont
la licéité est estimée douteuse, par les professionnels assujettis au dispositif LCB/FT. Il est
important de préciser que le service ne peut s’autosaisir ni traiter des dénonciations
anonymes.
TRACFIN va ainsi intégrer dans une base de données sécurisée les déclarations de
soupçon ainsi que les informations reçues. Dès lors qu’un professionnel suspecte que des
fonds sont le produit d’une activité criminelle ou d’une fraude aux finances publiques, il est
tenu de les déclarer à TRACFIN. En principe, cette déclaration doit intervenir avant
l’exécution ou la réalisation de l’opération. Outre les déclarations de soupçon, TRACFIN
reçoit également des informations transmises par les différents organismes publics ou
chargés d’une mission de service public tels que les administrations d’État ou les
collectivités territoriales.
Les informations reçues par TRACFIN font, dans un second temps, l’objet d’un
rapprochement avec d’éventuelles données préexistantes. En effet, le service conserve
pendant 10 ans les informations reçues, délai prorogé de 10 ans en cas de transmission à
l’autorité judiciaire.
L’orientation est le premier acte d’analyse d’une information. Elle débouche sur une enquête,
ou sur une mise en attente lorsque l’information semble potentiellement inexploitable ou le
soupçon peu clair, ou, après enquête, lorsque le doute est levé.
● Enrichir l’information
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Tracfin - Rapport d’activité 2019, page 104
ou encore l’interrogation d’autres services de renseignement. Enfin, les agents recueillent et
analysent, par l’exercice du droit de communication, tout document utile auprès des
professionnels assujettis. Ainsi, en 2019, le service a réalisé 90 860 actes d’investigations
dont 41 478 consultations de fichiers, de bases ouvertes et interrogations de services
institutionnels.
● Diffuser l’information
Enfin, lorsque les investigations réalisées mettent en évidence des faits susceptibles de
relever du blanchiment d’une infraction punie d’une peine privative de liberté supérieure à un
an, TRACFIN saisit le procureur de la République par une note d’information3. Celui-ci est
également informé lorsque les investigations conduisent à mettre en évidence un crime ou
un délit. Ainsi, en 2019, 954 notes ont été adressées par TRACFIN à l’autorité judiciaire.
A) Missions
Aux termes des articles D.561-33 à D.561-35 du Code monétaire et financier (ci-après CMF)
renvoyant à l’article L.561-23 dudit code, Tracfin est donc la cellule de renseignement
financier national, qui concourt au développement d’une économie saine en luttant contre
les circuits financiers clandestins, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.
3
Article L.561-30-1 du Code monétaire et financier
4
Directive (UE) n°2018/843 du 30 mai 2018
Le contrôle et la sanction sont dévolus à des autorités distinctes telles que l’Autorité des
marchés financiers pour les sociétés de gestion de portefeuille ou les conseillers en
investissements, l’Autorité de contrôle et de résolution prudentiel (ACPR) pour les banques
et les compagnies d’assurance, les Chambres des Notaires ou encore le Conseil de l’ordre
pour les avocats.
B) Pouvoirs
IV - Cas Pratique
TRACFIN a été appelé sur une demande de virement d’un montant de 4 000 000 €
effectuée auprès d’un établissement étranger par un ressortissant français, M. X, ayant déjà
fait l’objet d’investigations de la part du service.
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Article L.561-24 du code monétaire et financier
● Les investigations de Tracfin
Les investigations précédemment menées par TRACFIN avaient permis d’établir que M. X
disposait d’importants avoirs financiers dans les pays A et B. Ces avoirs auraient pu
notamment résulter, à hauteur d’environ 10 000 000 €, d’une commission que M. X aurait
perçue d’une société (pays C) pour son intervention personnelle auprès d’un dirigeant d’un
pays étranger (pays D). En outre, la situation fiscale de M. X posait question notamment au
regard de sa domiciliation.
Les fonds détenus par M. X dans les pays A et B avaient ensuite été rapatriés en France
avec le concours de ses proches. Les mouvements observés entre M. X et un de ses
proches, M. Y, illustraient la méthode employée: M. X a cédé à une SCI contrôlée par M. Y
la propriété de sa résidence principale, d’une valeur d’environ 4 000 000 €, il a également
transféré à M. Y la somme de 8 000 000 €, la moitié de cette somme permettant de
souscrire un contrat d’assurance-vie en garantie du prêt octroyé à la SCI, l’autre moitié
permettant ensuite de rembourser le prêt lui-même. Au terme de l’opération, l’origine
frauduleuse des fonds n’était plus apparente pour les établissements financiers, puisque
ceux-ci procédaient désormais de cessions immobilières et de rachats de contrats
d’assurance-vie.
Le groupe de joueurs incriminé est composé d’étudiants sans revenus déclarés. Leurs
comptes bancaires fonctionnent principalement grâce aux fonds en provenance de sites de
jeux en ligne agréés par l’ARJEL, pour un montant de 500 000 €. En revanche, les
mouvements débiteurs sur les comptes bancaires sont déconnectés des
approvisionnements enregistrés sur les comptes joueurs.
L’étude des opérations enregistrées sur les comptes joueurs a permis de mettre en
lumière les manœuvres de ce groupe de per- sonnes pour dissimuler l’origine des fonds
injectés : les comptes joueurs sont approvisionnés massivement grâce à des codes pré-
payés et des mouvements de fonds sont effectués en dehors de toute opération de jeu. Les
codes prépayés ont été achetés dans des points de vente physiques répartis sur l’ensemble
du territoire français et, principalement, dans un point de vente situé dans une ville
européenne. Ces codes prépayés ont eux-mêmes été achetés pour la plupart en espèces.
Au regard de l’environnement marqué par l’utilisation de codes prépayés, par l’importance
des espèces utilisées pour l’achat de ces codes, par la difficulté d’identifier l’origine des
espèces et par le caractère international du réseau, le Service a mis en œuvre des
techniques de renseignement. L’objectif était d’apporter un éclairage sur les modalités
d’acquisition des codes prépayés, et notamment de vérifier si les titulaires des comptes
joueurs s’étaient eux-mêmes déplacés dans les différents points de vente pour l’achat des
codes prépayés.
L’analyse des communications a permis de relever des appels vers ou depuis deux pays
situés hors de l’UE. Elle a également permis de mettre en évidence des trajets (routiers,
aériens...) qui confirmaient que les joueurs ne se sont pas procurés eux-mêmes les codes
prépayés.
Ce dossier a fait l’objet d’une transmission judiciaire pour blanchiment par le biais, en
particulier, des sites de jeux en ligne, sans préjudice de la commission d’une fraude fiscale
et de son blanchiment, les flux suspects n’étant pas déclarés.
BIBLIOGRAPHIE
Sites Internet
➢ Site de TRACFIN
https://www.economie.gouv.fr/tracfin
➢ Rapport annuel d’activité TRACFIN 2019
https://www.economie.gouv.fr/files/2020-09/web-ra-analyse-tracfin-19-20-v26_0.pdf
Dispositions législatives
Articles de doctrine