Livre du Joueur
Table des matières
Présentation du Jeu .................................... 3
Introduction ............................................... 3
La planète Alma......................................... 4
Un monde horrible et merveilleux ........... 4
L’Entremont............................................. 5
La vie d’humain sur Alma ....................... 6
Les activités des PJ .................................... 7
Résoudre des problèmes… ...................... 7
… surprenants et exotiques...................... 8
Éviter le pire, créer le meilleur ................ 8
Le plaisir de l’insécurité…....................... 9
… et celui de la facilité !.......................... 9
L’adversité ............................................. 10
Des PJ fragiles… ................................... 10
… et des joueurs efficaces ..................... 10
Des PNJ contrariants.............................. 10
… à tuer avec modération...................... 11
… en évitant de combattre ..................... 11
Les charmes du voyage.......................... 12
Améliorer le monde… ........................... 12
… et le comprendre…............................ 12
… au fil de PJ successifs........................ 13
Création des Personnages ........................ 14
GÉNÉRALITÉS .............................................. 14
Introduction ............................................. 14
Point de vue et style de réaction ............ 14
Préférences, émotions et choix .............. 15
Une interface compétente… .................. 15
… et adaptable en jeu............................. 15
Choisir vos spécificités ............................ 16
Apprécier sa seconde peau..................... 16
Équipe ou conglomérat .......................... 16
Un socle sans détails .............................. 16
Les moyens utiles................................... 16
Les moyens inutiles ............................... 16
Les moyens accessoires ......................... 18
Intégrer ses moyens ............................... 18
Et les défauts ? ....................................... 19
Actes positifs, motifs… variés............... 19
PEUPLES ....................................................... 20
Introduction ............................................. 20
Description des peuples........................... 21
Athiles Nithia......................................... 21
Edriwan.................................................. 22
Esh Fangei.............................................. 22
Fereshteh................................................ 23
Halima.................................................... 23
Ilian ........................................................ 24
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Ilker Ilinith .............................................24
Kergandai ...............................................25
Lain Liriel ..............................................25
Lotsheven ...............................................26
Lycomènia..............................................26
Mjenogoï ................................................27
Reia Tidjani............................................27
Rig Shaanlek ..........................................28
Shakyeno ................................................28
Vargeeld .................................................29
Vesnejhian..............................................29
Zelvani ...................................................30
Peuples et motivations ............................. 30
OCCUPATIONS .............................................. 31
Concept ..................................................31
Quelques idées de métier .......................31
MOYENS ........................................................ 32
Liste des moyens ...................................... 32
Les aptitudes psychiques......................... 32
L’instinct de survie.................................32
La compensation ....................................33
La maîtrise de soi ...................................33
Le savoir ................................................... 33
Mystères et raretés..................................33
Les langues.............................................34
Le combat ................................................. 34
Les soins.................................................... 36
La médecine ...........................................36
La psychiatrie.........................................36
Les dons .................................................... 36
L’Intégration............................................ 37
Le Rêve Chatoyant .................................. 39
FINITIONS ..................................................... 39
L’apparence............................................39
Les possessions ......................................40
Déroulement du Jeu ..................................41
Introduction.............................................. 41
Avant le jeu............................................... 42
Raconter ses actes .................................... 43
Utiliser vos moyens................................44
Subtilités d’action...................................45
Soigner l’ambiance.................................46
La souplesse du récit ..............................46
Des sens aux émotions ...........................47
Quelques dialogues de jeu ....................... 48
Déroulement d’une partie ....................... 50
 PRÉSENTATION DU JEU
Introduction
Alma est un jeu de rôle, c’est-à-dire un jeu de socié-
té durant lequel plusieurs participants assis autour
d’une table incarnent chacun un personnage, et
créent une histoire par le biais de dialogues expri-
mant ce que le personnage veut percevoir, com-
prendre, faire, et ce qu’il dit. Le but n’est pas de ga-
gner, mais de collaborer pour que tous les partici-
pants vivent un moment agréable. Pour s’en assurer,
de nombreuses activités plaisantes leur sont propo-
sées : ils interprètent un rôle, comme un acteur, ils
ressentent des sentiments, découvrent des pays exo-
tiques, fréquentent des gens savoureux, élucident
des mystères, inventent des solutions, et ils s’enri-
chissent de vécu au fil des parties. Chacune devrait
leur laisser de bons souvenirs, ce qui ne veut pas
dire que les personnages se seront amusés tout du
long, mais que les joueurs auront apprécié les diffi-
cultés qu’il aura fallu surmonter ensemble. Bien en-
tendu, toute difficulté devenant ennuyée à surmonter
est considérée comme réglée et le jeu continue.
Le jeu de rôle permet des expériences impossibles
dans la réalité. Il est l’occasion de vivre des aventu-
res palpitantes sans risquer sa vie, d’accomplir des
actes valorisants irréalisables par le joueur, ou de
commettre des actions réprouvées dont les consé-
quences seraient ennuyeuses à assumer ; de ren-
contrer des êtres haineux, étranges, malsains, per-
vers, sans en être profondément affecté ; d’être ad-
miré, embarrassé, ridicule, pitoyable, terrifié, mé-
chant, insupportable, sans ruiner sa réputation ; et de
disposer d’un terrain illimité sur lequel tester des
comportements, sans aucun risque réel.
Bien sûr, un film vous permet tout cela… mais vous
vous contentez de regarder ; dans le jeu de rôle,
vous êtes l’acteur, et vous contribuez également au
scénario. Cela vous demande pour tout matériel du
papier et un crayon, mais nécessite un peu de tra-
vail : avant de pouvoir jouer, il faut que tous les par-
ticipants lisent le Livre du Joueur, et qu’ils décident
lesquels seront joueurs, et lequel sera Passeur. Les
joueurs devraient être entre deux et quatre. Au-delà,
il est difficile de prendre en compte suffisamment
les contributions de chacun à l’histoire.
Le Passeur lit le Livre du Passeur, qui explique
comment faire jouer une partie d’Alma et qui décrit
la planète de façon plus détaillée, disant ce qui y est
possible ou impossible. Il assimile ensuite un scéna-
rio, c’est-à-dire une histoire dans laquelle les per-
sonnages des joueurs ont un rôle à tenir. Le scénario
est une suite d’évènements qui ont pour but de pro-
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voquer des réactions chez les joueurs et de les ame-
ner à s’impliquer. Le Passeur lit également la des-
cription du pays dans lequel le scénario se passe,
afin de pouvoir bien le décrire, ainsi que ses habi-
tants.
Une partie consiste à faire coopérer le Passeur et les
joueurs pour exploiter les ressources du scénario,
celles ajoutées par le pays, et les apports des
joueurs, de façon à vivre ensemble l’histoire la plus
gratifiante possible.
Les joueurs se créent chacun un personnage, qui se-
ra leur alter ego sur la planète Alma. Un tel person-
nage est un PJ, pour personnage joueur, par opposi-
tion aux personnages joués par le Passeur, qui sont
des PNJ (non joueurs). Le Passeur prend connais-
sance de tous les PJ, afin de pouvoir tenir compte
leurs opinions et moyens dans ses descriptions. En
outre, s’il ne voit vraiment pas comment gérer un
PJ, il coopère avec le joueur pour modifier le PJ
jusqu’à ce qu’il les satisfasse tous deux.
Après cela, il est temps de jouer. Il faut prévoir un
lieu tranquille pour éviter que l’histoire ne soit inter-
rompue, et l’ambiance, cassée, et disposer de quatre
à huit heures.
Le Passeur décrit alors la première scène de son
scénario, telle qu’elle est perçue par les PJ. Il dé-
peint les lieux autour d’eux, les PNJ visibles, au be-
soin en montrant des illustrations si les joueurs n’ont
aucune base pour visualiser l’environnement étrange
qu’ils doivent imaginer. Le Passeur laisse ensuite
aux PJ le temps de découvrir plus en détail l’endroit
et ses habitants, en interprétant tous les PNJ aux-
quels les PJ décident de s’adresser. Il les improvise
à la demande, sauf quand ils sont décrits dans le
scénario, ce qui n’est pas un exercice aisé. Imagi-
nez-vous à sa place, soyez indulgent… et n’hésitez
pas à lui glisser des idées si vous trouvez les siennes
fades ou limitées. Quand il sera plus compétent, les
joueurs ne verront plus la différence entre un élé-
ment prévu dans le scénario et un élément improvi-
sé.
Puis le Passeur décrit un premier évènement qui im-
plique les PJ, et il demande s’ils réagissent, et com-
ment. Aux PJ, et non aux joueurs, car désormais, le
Passeur leur parle directement, pour mieux rester
dans l’ambiance. S’il parle au joueur, il le signale en
utilisant le prénom du joueur et non celui du per-
sonnage.
Chacun des joueurs répond en parlant comme s’il
était son personnage, et explique comment il vou-
drait réagir. Le Passeur décrit ensuite comment les
PJ réagissent effectivement, car il connaît les lieux,
les gens qui les habitent, et le scénario, et cela lui
permet de décider ce qui est possible d’une part, et
ce qui est souhaitable d’autre part compte tenu du
fait qu’il doit permettre aux PJ de jouer la suite de
l’histoire. Mais surtout, il se demande s’il est plus
amusant pour la totalité des participants, lui com-
pris, qu’une proposition soit incluse dans l’histoire
ou qu’elle soit exclue, et qu’une action réussisse ou
qu’elle échoue.
En tous les cas, ce que décrit le Passeur doit être
stimulant pour les joueurs, même si ce n’est pas tout
à fait, voire pas du tout, ce qu’ils espéraient. Les PJ
lui décrivent ce qu’ils font à présent, et l’histoire se
tisse ainsi, par un dialogue continu dans lequel le
Passeur anime le monde, tous ses habitants et tous
les évènements qui s’y passent, sauf les personnages
des joueurs.
Peu à peu, les PJ comprennent de quoi il est ques-
tion dans ce scénario, quel rôle ils sont supposés y
jouer, et quels sont leurs objectifs. C’est à eux de
voir comment ils les atteignent… Mais leur capacité
à modeler l’histoire ne s’arrête pas là : ils peuvent
exprimer des craintes, des espoirs, des désirs et des
hypothèses. Le Passeur prend en compte toutes cel-
les qui l’inspirent, afin que le jeu soit plus gratifiant
pour tous les participants, mais il ne le dit pas aux
joueurs, sinon, où serait le suspense ?
Ne pas déflorer le jeu
Le joueur gagne à rester ignorant des scénarios qu’il
jouera, ainsi que des lieux et des PNJ. Aussi, même
si vous avez téléchargé la totalité du matériel dispo-
nible pour Alma, ne le lisez que si vous êtes Pas-
seur. Sinon, vous vous priveriez du plaisir de faire
certaines découvertes en jeu, au cours de scénarios
écrits pour ménager du mystère et doser les révéla-
tions. Or, il est beaucoup moins drôle de redécouvrir
que de découvrir… ne gâchez pas votre plaisir.
Une convention ludique
Dans le reste de ce Livre, je m’adresserai indiffé-
remment à vous, le joueur, et à vous, le PJ, sans pré-
ciser auquel je parle, car le contexte le précisera suf-
fisamment. Bienvenue parmi ceux qui possèdent
une seconde peau !
La planète Alma
Un monde horrible et merveilleux
Alma est un monde dépaysant et divers. Horrible,
car il s’y trouve des créatures, des modes de vie et
des projets terrifiants ou répugnants. Merveilleux,
car il recèle des splendeurs et des personnalités atta-
chantes. Étrange, car ce qu’on y trouve naturel ne
vous le semblera pas toujours. Fantastique enfin, car
même dans ce monde si différent, chacun s’attend à
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ce que la vie continue telle qu’elle s’est déroulée
jusque-là. Seulement, vous semblez avoir un don
précieux : où que vous alliez, un changement se
produit, plus ou moins rapide, plus ou moins impor-
tant ; au pire, rien ne se passe plus comme cela de-
vrait, la réalité semblant décidée à diverger indéfi-
niment à moins… à moins que vous ne trouviez une
solution pour la ramener à la normale. Voici quel-
ques informations pour appréhender celle-ci.
Vue générale
Vue de l’espace, Alma est une succession de mers
vierges et de milieux naturels intacts, des forêts im-
menses couvrant la majorité des terres émergées.
Certes, un mont immaculé semble toucher le ciel
tant il est élevé, la cime d’un arbre caresse les nua-
ges, et dans les ténèbres éternelles du Pôle Nuit se
dresse une citadelle étrange que coiffe un anneau
d’étoiles glacées ; mais ces lieux sont mythiques
même pour les Alemdar, le nom général des habi-
tants d’Alma.
Alma ne possède pas de soleil. Pourtant, une bonne
part de sa surface est illuminée par le front de jour,
qui jaillit du sol et se diffuse dans l’atmosphère pour
y imiter presque parfaitement la clarté offerte par un
astre, si ce n’est qu’elle est plus variée. L’aube est
un enchantement, un mur de lumière ondulant et iri-
sé qui s’approche, épousant les reliefs. Ce jour venu
des profondeurs change de nature selon les lieux, et
un pays au climat chaud peut jouxter un climat
froid.
La densité de population est faible, les villes sont ra-
res, et les routes qui les relient, peu nombreuses et
peu visibles. Sur les mers voguent quelques navires
très différents les uns des autres, car chaque peuple
les bâtit à son idée et à ses goûts ; dans les airs, au-
cun trafic régulier, mais un certain nombre de créa-
tures étranges sont parfois aperçues, ainsi que des
vitraux de lumière pure passant à grande vitesse en
tournant sur eux-mêmes. Les zones cultivées sont
exceptionnelles, aucune mine n’est visible, non plus
que des infrastructures de production technologique.
À y regarder d’encore plus près, Alma semble une
réserve naturelle couvrant un monde, parsemée de
villes qui sont autant de chefs-d’œuvre architectu-
raux. Chacune est typée, unique à sa façon, et rien
n’a été bâclé, car les habitants ont disposé de tout le
temps et de tous les moyens nécessaires. Les meu-
bles, objets domestiques et vêtements ont bénéficié
du même soin. Et ce n’est pas une particularité des
citadins… au fond des forêts, les chasseurs-
cueilleurs ont sculpté et peint leurs villages, et sur
les grandes plaines, les coiffes des femmes nomades
resplendissent de couleurs. Survivre dans un taudis,
vêtu de haillons, ou se faner dans une usine, ne fait
pas partie du lot des Alemdar, et chacun d’entre eux
peut se vanter, à raison, d’être unique et précieux, et
de vivre dans un écrin à sa mesure, qu’il peut amé-
liorer au fil de son épanouissement personnel.
L’explication est simple : la planète est habitée par
une Déesse nommée Alma, elle aussi, qui considère
que le monde est son corps, et les Alemdar des
joyaux mobiles. Elle se montre extrêmement désa-
gréable avec ceux qui menacent sa splendeur, et
charmante avec ceux qui la respectent. Elle est le sol
sous vos pieds et sa volonté fait loi, sans que vous
vous sentiez opprimé, car elle use de moyens plus
subtils que la contrainte.
L’Entremont
Voilà pour les généralités. Tournons-nous mainte-
nant vers l’Entremont, qui occupe environ 5 % de la
surface planétaire, et tire son nom du fait qu’il est
entouré de toute part de montagnes. Certaines sont
si élevées qu’elles excluent tout passage, d’autres
sont plus basses, mais elles mènent à la banquise.
Trois larges bandes de terre, celle du levant, celle du
septentrion et celle du couchant, entourent l’Entre-
mer. Le sud est occupé par Grande Île, une structure
irrégulière qui barre l’accès aux mers lointaines.
L’humanité
L’Entremont est le territoire des humains. Ils ont été
conçus par Alma elle-même, et ils sont ses favoris,
enfin, elles, enfin, ils sont tous capables d’assumer à
volonté un sexe ou l’autre, pour être selon les mo-
ments les ravissantes filles de la Déesse, ou des
hommes séduisants parmi lesquels elle choisit par-
fois un amant. Elle les a installés dans un paradis,
bien séparés et bien protégés des territoires des car-
gues, qui sont des peuples puissants servant chacun,
dès la naissance, un autre dieu qu’Alma.
Les dieux sont des créatures extrêmement puissantes
qui interfèrent assez souvent avec l’existence des
mortels, causant des résultats diversement appré-
ciés. Pour en savoir plus sur eux, intéressez-vous à
la théologie, et tenez-vous prêt à la controverse, car
les dieux divisent et sont divisés.
La mission des humains, et ils la relèvent haut la
main, est de vivre heureux dans l’insouciance pour
rendre jaloux les cargues qui, eux, doivent se rendre
utiles ou mourir. Aussi leur cadre de vie a-t-il été
dénué de toute contrariété majeure : pas de catastro-
phes géologiques ou climatiques, pas de famines,
pas de maladies, pas de mort en couches et pas de
vieillissement. Un amant impuissant ou décati n’in-
téresse évidemment pas la Déesse… un amant mort
lui est indifférent, elle choisit le, pardon, les sui-
vants.
Cette qualité de vie et cet objectif apparemment fa-
cile n’ont pas rendu les humains mous ou inactifs,
car ils n’ont aucun besoin de l’adversité ou de la dif-
ficulté pour être entreprenants. Voyez-les comme
des individus libres d’épanouir leur potentiel ; des
artistes bénéficiant d’une rente généreuse offerte par
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un mécène ; des artisans qui savent que rien ne les
empêchera d’atteindre l’excellence ; des hédonistes
qui peuvent raffiner leurs loisirs et plaisirs ; et des
bâtisseurs qui savent qu’aucun vandale ne viendra
détruire leur œuvre, mais qu’ils la modifieront uni-
quement si elle ne les satisfait plus, car elle ne s’use
pas plus qu’eux-mêmes.
Les humains ont bâti les civilisations qui leur
convenaient, sans être limités par des ressources in-
suffisantes, ni par des voisins hostiles, car la Déesse
déteste être ravagée par une guerre et voir ses bijoux
s’entredétruire au mépris de sa beauté… si cela se
produit, elle les achève elle-même et en fabrique de
plus jolis et de moins idiots.
Chaque peuple humain a évolué, définissant de très
nombreuses manières de s’amuser, choisissant un
territoire et un habitat en accord avec ses goûts, et
allant souvent jusqu’à remodeler son apparence
physique pour correspondre à ses préférences. En
outre, chacun naît avec de petits pouvoirs surnatu-
rels qui permettent de rendre la vie encore plus
confortable et agréable, et peut en développer
d’autres aussi longtemps qu’il vit.
Vous avez la chance d’appartenir à l’un de ces peu-
ples, plus précisément à l’un des dix-huit dont sont
issus les PJ, et qui sont présentés plus en détail sous
la rubrique « Peuples », page 20.
Des brèches dans l’idéal
Vous avez bien failli pouvoir vous contenter de vi-
vre heureux, avec pour toute tâche de vous amuser
aujourd’hui et, si vous êtes entreprenant, de vous
demander comment vous pourriez vous amuser en-
core plus demain. Mais les dieux ont très peu appré-
cié le pied-de-nez d’Alma, et ils ont fait de leur
mieux, dans le désordre et l’initiative personnelle,
pour détruire ce paradis et changer les humains en
outils dociles et dépendants, comme les cargues.
Rassurez-vous : le succès est mitigé. Les humains
ne sont certainement plus tels qu’Alma les créa ja-
dis, mais ils sont très loin d’être tous malheureux.
Certains pays ont été plus ou moins corrompus,
mais pas assez pour que vous ne viviez plus dans la
conviction que vous êtes un favori de la Déesse et
que tout va et ira au mieux pour l’éternité.
Les points de corruption les plus évidents sont deux
pays prosélytes qui envoient leurs navires ennuyer
les autres humains, tenter de les convertir, et les tuer
s’ils refusent.
L’un est Demlyvein, qui considère que seule
l’application de la discipline et de l’ordre peut sau-
ver l’humanité, ce qui correspond au credo de La
Confluence, faction divine qui pense que les mortels
sont incapables de s’en sortir sans l’aide des dieux.
Demlyvein a réussi l’exploit de réinventer l’oppres-
sion, la technologie, la pollution, la paranoïa, et au-
tres détails absolument indispensables à la vie dans
un paradis. L’espérance de vie des Deleíny est la
plus faible de l’Entremont et la démotivation de
leurs soldats est réputée. Néanmoins, ils évitent de
déserter en masse pour des questions de nostalgie du
pays et de famille retenue en otage.
L’autre est Mainwar, considéré comme stupide pour
avoir choisi de servir les desseins d’un panthéon
chaotique dont les dieux ne le rétribuent pas, alors
que les croyants d’Alma ont l’habitude de recevoir
de la puissance des dieux qu’ils vénèrent, pour de-
venir plus aptes à relayer leur influence parmi les
mortels. Ce manque de moyens divins n’empêche
pas les Mainwarigen d’être organisés, efficaces, mo-
tivés, et, malgré leur nombre inférieur, ils tiennent
tête aux Deleíny. Cette qualité indéniable ne suffit
pas à empêcher qu’ils soient peu appréciés dans tout
l’Entremont, parce qu’ils procèdent à des rafles ; en
outre, ils inquiètent les plus sages, car leur influence
réelle peine à être évaluée puisqu’ils préfèrent avoir
des alliés occultes que des fidèles bêlants bien visi-
bles.
Rigueur et intelligence n’ont pas à surprendre de la
part de chaotiques. Les idées semant le désordre
sont l’apanage des dieux du Dédale, qui considèrent
que les mortels sont beaucoup, beaucoup trop sages
quand ils ne sont pas aidés, et qu’ils font un usage
bien trop raisonnable de moyens dont ils pourraient
abuser et mésuser. Le Dédale promeut efficacement
le mensonge, la cupidité, l’égoïsme, le gâchis, l’op-
pression, les meurtres passionnels, les guerres ; mais
aussi l’originalité, les surprises plus ou moins bon-
nes, les révolutions et l’humour. Bref, tout et n’im-
porte quoi tant que cela rend le monde imprévisible
et incontrôlable, du moins pour la majorité de ses
habitants, ce qui explique que le Dédale puisse met-
tre en place des dictatures où tout le monde est
confronté à l’arbitraire 1.
Le Dédale est redoutablement efficace parce que ses
serviteurs les plus dangereux pensent en termes
d’objectifs, et non de méthodes chaotiques. Peu leur
importe qu’il faille travailler dix ans consciencieu-
sement, si le résultat en vaut la peine ; toutes les mé-
thodes sont bonnes si elles mènent au désordre. Or,
les Mainwarigen sont effroyablement bien organi-
sés, et cela fait bien plus de dix ans qu’ils travail-
lent… Heureusement, les humains chéris d’Alma
savent bien qu’elle ne laisserait pas l’Entremont se
changer en un Enfer 2, et ils ne s’inquiètent pas.
L’attitude des cargues
Les cargues savent que leurs dieux n’aiment pas les
humains, et puisqu’ils les servent, ils devraient trou-
ver le moyen de leur nuire ; mais les cargues n’ou-
blient pas qu’ils habitent sur Alma, et que son cour-
1
Hi, hi, elle est bien bonne ! Vous n’aimez pas ? Pas
grave, je vais adorer pour plusieurs.
2
Un Enfer est une zone sur laquelle un dieu exerce un
contrôle absolu.
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roux peut suffire à les éliminer. Ils ennuient donc les
humains avec modération. Cependant, ils visitent
l’Entremont, ce qui n’inquiète pas les humains, car
ceux-ci savent que les cargues sont des formes de
vie inférieures qui, si elles sont sages, sont autori-
sées à visiter le paradis, afin de se donner le courage
de devenir si bonnes qu’à leur mort, elles seront ré-
incarnées en humains.
Certains hallucinés prétendent avoir vu des cargues
soupirer en entendant ce qu’ils considéraient comme
un mensonge bien trouvé 3, mais la majorité sait
qu’il n’en est rien, puisque c’est plus confortable
ainsi et que justement, ils vivent dans un paradis.
La vie d’humain sur Alma
Vous verrez en détail en jeu comment vit un humain
sur Alma ; mais sachez déjà qu’il est normal que :
…chacun produise la totalité de la nourriture qui lui
est nécessaire dans un bac plein de terre, les plantes
émulant même le gigot ; et que le recours à des four-
nisseurs soit une question de goût pour leurs pro-
duits, mais jamais de besoin.
…des humains respirent sous l’eau, volent ou tra-
versent les murs ; qu’ils puissant créer des verres à
cocktails pleins, deviner ce qu’ils pourraient vous
vendre, ou dormir confortablement dans un pierrier.
…des esprits tiennent des plats au chaud ou trans-
portent des charges en annulant la gravité, que
d’autres appellent les nuages, qu’une maison
connaisse un microclimat, que le jour puisse surgir
du sol pour éclairer une petite fête nocturne et
qu’une bonne bouteille de nuit permette de dormir
en paix une fois qu’elle est débouchée, et tant pis
s’il fait grand jour ailleurs.
…des tâches qui demanderaient de nombreux ou-
vriers pour être effectuées manuellement soient as-
surées par un seul individu pourvu des dons adé-
quat : ainsi, un seul Ravaleur peut rendre à une mai-
son son état neuf.
…le matériel soit souvent inutile : aucun apiculteur
ne porterait de masque, puisqu’un don fait de lui un
ami des abeilles ; un peintre peut déposer mentale-
ment la peinture sur la toile qu’il a matérialisée
grâce à un autre don, comme il peut créer l’œuvre
terminée si c’est sa préférence, mais cela demande
de s’être entraîné à une parfaite visualisation men-
tale.
…personne ne se repose sur un objet compliqué qui
peut se détraquer n’importe quand, ou être volé,
laissant démuni. Mieux vaut avoir acquis des pou-
voirs qui permettent d’effectuer la tâche sans maté-
riel.
3
Vous pouvez avoir étudié les cargues tant dans les livres
qu’en interrogeant ceux qui sont passés dans l’Entremont.
Ils sont très divertissants, et, si on sait s’en faire des amis,
ils sont même divertissants longtemps.
…chacun puisse changer de sexe de par sa seule vo-
lonté, aussi aisément qu’il tend le bras ; qu’un en-
fant naisse liquide puis prenne sa forme définitive,
et qu’un guérisseur relève les morts qui désirent en-
core vivre.
…l’on puisse envoyer de l’amour à un ami pourtant
situé à l’autre bout du monde, et qu’il réponde à
l’instant ; qu’on voie uriën, la force de vie soutenant
les êtres et coulant entre eux constamment, atten-
dant de pouvoir faire naître des existences.
…les dieux soient parfois présents physiquement
parmi les hommes, et en particulier la Déesse Al-
ma ; que les croyants possèdent des moyens plus ef-
ficaces que les dons, que certains temples disposent
d’une puissance propre, et que la prière puisse obte-
nir des résultats.
…la mer contienne des êtres qui font couler les ba-
teaux, que des ombres volent dans la forêt et mena-
cent les bûcherons, que des nains pâles aux yeux
immenses se promènent sous les fondations.
… la connaissance soit répandue et aisée à obtenir,
et la stupidité rarissime, mais certains la cultivent
avec un grand succès.
…la superstition, la crainte et le mysticisme soient
rares et présents seulement chez des individus per-
turbés. Une Déesse Terre, c’est n’est pas surnaturel,
c’est maman, voilà tout.
…l’angoisse quant à l’avenir soit rarissime chez des
humains chéris par leur Déesse, et qu’ils n’aient pas
tenté de comprendre le monde pour mieux le maîtri-
ser, puisqu’il est là pour permettre leur bonheur. Ils
ont confiance en Alma, et vivent comme les petits
oiseaux, profitant de leur chance. De ce fait, la
science ne s’est pas développée, au sens d’une ana-
lyse approfondie et quantifiée de la réalité. Cette
ignorance n’est pas handicapante, car ce qui est utile
à la vie quotidienne est connu par un usage direct
des sens. Ainsi…
…personne n’a de montre, chacun se moque de
l’heure exacte, mais peut apprendre à savoir s’il lui
reste le temps de faire ce qu’il souhaite. Un paysan
n’a pas besoin de calendrier, il sait que s’il plante
maintenant, sa production aura le temps de mûrir.
…personne ne connaît les distances, mais seulement
les durées de voyage, et sait s’il peut atteindre
l’étape avant la nuit, ou s’il est temps de commencer
à camper.
…personne n’a dénombré quoi que ce soit, et les
humains ignorent combien ils sont, quelle est la su-
perficie de leur territoire, ou combien de maisons
compte une ville.
…personne n’a établi de chronologie du passé ; et
seuls les évènements agréables à raconter sont
conservés, par exemples les exploits de certains hé-
ros dont le prestige rejaillit sur leur pays.
…conclusion : tant que vous obtenez les résultats
qui vous intéressent, vous êtes content, et vous le
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faites par des dons plutôt que par la science ou la
technique. Peu vous importe le fonctionnement de
vos pouvoirs, tant qu’ils ont l’effet désiré.
Les activités des PJ
Résoudre des problèmes…
Maintenant que vous avez une idée plus précise du
paradis dans lequel vous vivez, il me reste à vous
rappeler que tester les chaises longues n’est pas vo-
tre occupation principale. En effet, tous les scéna-
rios impliquent que vous prenez conscience d’un
problème qui affecte une région plus ou moins vaste
du monde, et un nombre variable de ses habitants. Il
peut être ancien, comme il peut survenir à l’instant
dans des lieux jusque-là tranquilles. Autrement dit,
un scénario peut être un « péril en paradis », c’est-à-
dire que tout allait bien jusqu’à la survenue du pro-
blème ; ou un « c’est l’enfer, mais on entrevoit une
embellie » quand vous réalisez qu’un endroit est in-
vivable.
Soit vous êtes directement affecté par la perturba-
tion, soit elle touche un ami ou un bien que vous
chérissez, soit elle ne vous a encore rien fait, mais
vous vous mettez dans les ennuis jusqu’au cou en
allant voir de quoi il s’agit. Vous vous débrouillez
pour survivre au problème le temps d’enquêter et de
comprendre ce qui le cause, vous évitez qu’il
n’empire si c’est là sa tendance, et finalement, vous
le résolvez.
En général, et même si le problème a des manifesta-
tions physiques, sa cause première est un PNJ. Vous
ne l’affrontez jamais par la force, car soit il est trop
puissant pour être tué, soit trop charmant pour que
de tels sévices lui soient infligés ; mais vous trouvez
un moyen d’éviter qu’il ne perturbe les lieux.
La mise au point de ce moyen implique de combiner
les ressources présentes dans le scénario, que ce
soient des PNJ dont vous allez réussir à obtenir la
coopération ou l’alliance, des pouvoirs qui pour-
raient être appliqués différemment, ou des objets
que personne avant vous n’avait songé à utiliser
dans ce but.
Vous avez souvent à vaincre l’incrédulité quand
vous tentez de prouver à vos interlocuteurs que la
cause que vous avez identifiée est bien la source du
problème ; et à apaiser la peur en démontrant que la
solution que vous proposez permet effectivement
d’améliorer la situation, et non de déclencher une
catastrophe de plus.
Cela fait, le problème est résolu, que sa source soit
devenue aimable, ou neutralisée, partie ou emmenée
par un autre PNJ ; et le monde est revenu non seu-
lement à sa situation d’origine, mais il a été amélio-
ré par votre intervention. Il vous reste parfois à re-
construire ce qui n’aurait pas dû être abîmé et à as-
sister certains PNJ dans leur convalescence, dans le
cas où vous n’êtes pas monopolisé par la vôtre, car
vous ressortez parfois traumatisé de certains scéna-
rios. Heureusement, vous avez tout le loisir de vous
remettre avant l’ennui suivant, et de jouir pleine-
ment des récompenses prévues pour vous.
Vous avez la satisfaction d’avoir réussi, ce qui est le
but de tous les scénarios et le souci constant du Pas-
seur, qui vous a assisté et soutenu dans cette tâche.
Vous avez survécu à la visite de lieux dangereux et
à la fréquentation de personnes agressives, et ce
n’était pas évident. Vous pouvez être fier de l’am-
pleur de la catastrophe que vous avez évitée, et de
l’amélioration que vous avez apportée ; comparer
l’avant et l’après et songer que le monde a de la
chance de vous avoir. Parfois, vous avez aidé un
seul individu, parfois, c’est l’état politique d’une ré-
gion qui s’est amélioré.
Vous avez laissé des souvenirs émus chez ceux que
vous avez aidés, et apprécié leur gratitude. Vous
avez de nouveaux amis, qui habitent des lieux en-
chanteurs, et chez lesquels vous êtes le bienvenu ; et
peut-être des ennemis qui ajouteront quelques péri-
péties à votre vie ou vous procureront une mort inté-
ressante, si vous deviez vous lasser de l’existence.
En outre, le scénario a pu vous inspirer l’invention
de petits pouvoirs amusants qui vous rendent encore
plus intéressant à fréquenter.
Votre capacité à résoudre des problèmes s’est cer-
tainement améliorées, et vous avez peut-être ren-
contré des PNJ qui pratiquent également cette oc-
cupation délicate et gratifiante. Désormais, vous
jouissez du réconfort de n’être pas le seul à vous
demander pourquoi, mais pourquoi, vous vous êtes
encore mis dans de pareils ennuis, ni pourquoi vous
recommencerez dès le prochain scénario.
Votre intervention a peut-être été remarquée par des
PNJ qui décideront de vous confier des informations
confidentielles vous permettant de mieux compren-
dre le monde dans lequel vous vivez, de prendre
plus de risques en y survivant, et de vous voir char-
gé de missions délicates réservées aux émissaires de
confiance, ayant fait leurs preuves.
Devinez qui le président appelle quand il a besoin
d’un agent discret, efficace, et dont la bienfaisance
n’est plus à démontrer ? Et devinez aussi qui n’a pas
commis l’erreur de s’en vanter, pour ne pas être
éliminé préventivement par les semeurs de troubles.
… surprenants et exotiques
Vous êtes donc un enquêteur qui ne se contente pas
de comprendre ce qui se passe et de faire un rapport,
mais qui apporte lui-même des solutions satisfaisan-
tes au problème identifié, en se faisant aider si né-
cessaire parce que vous n’êtes pas tout-puissant et
que vous ne risquez pas de le devenir prochaine-
ment. Alors autant s’habituer à coopérer…
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En outre, non seulement vous aurez à identifier le
véritable responsable d’une perturbation, qui s’est
évidemment caché, mais tant celle-ci que son auteur
pourront être surnaturelles, et totalement inconnues
de vous, même si vous êtes très érudit.
Peu à peu, vous réaliserez que l’occulte est inépui-
sable, mais qu’il vous est possible de survivre à ces
surprises répétées, et que cela deviendrait presque
confortable. Il sera temps alors d’aller enquêter non
plus dans le pays qui vous est maintenant familier,
mais à l’étranger, où les gens pensent et réagissent
différemment, et où la définition même du normal et
de l’anormal est différente.
Vous deviendrez un enquêteur confirmé, mais vous
n’aurez quand même jamais vu ça et vous serez tou-
jours dépaysé, vous trouverez tôt ou tard que vos
nouvelles connaissances sont… vraiment bizarres.
Vous serez devenu coutumier de ce genre de dialo-
gue :
– Ça existe, ça ?
– En théorie, non. Mais nous l’avons sous le nez, et
ça mord. Qu’est-ce qu’on fait, maintenant ?
Ou pour vous le dire façon Sherlock Holmes :
« Lorsque vous avez éliminé l’impossible, ce qui
reste, aussi improbable que cela paraisse, doit être la
vérité. » Alma vous garantit des solutions très im-
probables et pas toujours recommandables, ce qui
explique que vous ne racontez pas forcément vos
aventures, ou très expurgées, ou comme œuvres de
fiction ; et en tous les cas, seulement à des oreilles
averties. Car même dans un monde merveilleux, le
fantastique reste anormal et les surprises, déran-
geantes !
Hors des sentiers battus
Pour mieux vous étonner, le surnaturel dans Alma
n’est pas conventionnel. S’il y a de nombreux peu-
ples non humains, ils ne sont pas ceux que vous
avez déjà découverts. Même s’ils en portent parfois
le nom, fées, elfes, dragons… ils ne sont pas ce que
vous attendez. Si vous connaissez bien leurs équiva-
lents terrestres, vous pourrez au mieux vous croire
en terrain familier et vous faire avoir, ce qui sera
très amusant pour tout le monde.
Éviter le pire, créer le meilleur
Afin de mieux comprendre ce que j’entends par
« problème » et « problème qui empire », voici un
exemple qui pourrait vous arriver si les règles
d’Alma s’appliquaient dans la réalité :
Imaginez que, ce matin, toutes les portes de votre
appartement ne bougent plus. Si elles sont ouvertes,
le problème n’est peut-être même pas remarqué.
Mais… comment allez-vous sortir de chez vous ? Et
comment réagissez-vous en réalisant que les portiè-
res de votre voiture, comme celles du bus, ne
s’ouvrent pas non plus ?
 En plus, votre estomac gargouille atrocement. Il n’a
pas été question d’ouvrir le frigo, ni le placard, et le
petit déjeuner a été frugal. Vous le saviez bien, vous,
que vous n’auriez pas dû tout ranger !
Vous manquez trébucher sur une petite créature poi-
lue. Vous la fixez le temps de l’insulter, et vous ré-
alisez qu’elle n’est pas seule. D’ailleurs, ces dégoû-
tantes ont le nez qui coule. Elles laissent des ta-
ches… Une substance très collante, comme votre
doigt l’indique. Maintenant, comment le retirez-vous
du goudron où il reste collé ?
Collé… ces choses auraient-elles quelque chose à
voir avec tout cela ?
À voir… mais pourquoi vos paupières ne s’ouvrent-
elles plus ?! Et cette sensation d’oppression dans
vos poumons…
Non, vous ne vous réveillez pas, car Alma est un
cauchemar éveillé. Mais rassurez-vous, ce ne seront
pas toujours des dérives aussi saugrenues, cela peut
également être une simple tentative d’instaurer une
dictature à la place de cette démocratie qui vous
amollit, ou de vous engager dans une bonne petite
guerre. Rasséréné ? Non ? Parfait !
Rappelez-vous pourtant que le but étant de vous
amuser, votre niveau de stress ne dépassera jamais
ce qui vous paraît stimulant.
Un problème est donc une anormalité dans le fonc-
tionnement usuel des choses, et parfois des gens. Si
le problème ci-dessus s’était arrêté aux portes,
c’aurait été un exemple de problème qui n’empire
pas, qui se contente d’être là et de déranger jusqu’à
ce qu’il soit résolu. Mais il a empiré… Dans un scé-
nario, la réalité divergera de plus en plus fortement
et de manière apparemment incontrôlable, jusqu’à
ce que vous trouviez une solution pour ramener la
situation à la normale, dont vous percevez soudain
l’incroyable confort. Une solution qui pourra s’avé-
rer aussi bizarre que le problème était anormal, mais
vous êtes là pour être surpris.
Le scénario ne se contente pas de vous faire ramener
le monde à son état précédant ; tant qu’à avoir tout
mis sens dessus dessous, il vous permet toujours
d’améliorer la situation. De la même manière, si vo-
tre maison s’écroule, vous pouvez la reconstruire à
l’identique, ou en profiter pour corriger ses défauts.
Tous les scénarios disponibles comportent des épi-
sodes dangereux, angoissants ou horribles, mais ils
laissent toujours une chance de survivre et d’amé-
liorer les lieux et la situation des gens.
Le plaisir de l’insécurité…
Alma est un jeu d’insécurité et de surprise. Des per-
turbations peuvent survenir n’importe où, n’importe
quand et sous n’importe quelle forme. Aucun en-
droit n’est à l’abri, même la plus souriante des civi-
lisations peut devenir le théâtre d’évènements sinis-
tres. Aucun PNJ, aussi anodin qu’il paraisse à priori,
ne peut être garanti sans danger. Et même ce sol qui
semble si solide… pourrait devenir le vide et vous
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engloutir. Cela ne vous condamne nullement à la
méfiance perpétuelle, car vous avez confiance en
vos moyens, et vous savez bien que vous aurez le
temps (fût-ce une fraction de seconde) de survivre à
ce nouvel ennui. Si quelqu’un doit mourir pour dé-
montrer que la réalité diverge, ce seront des PNJ ;
vous, vous êtes là pour éviter de finir comme eux.
… et celui de la facilité !
Tout cela vous paraît peut-être compliqué et pas très
amusant ; rassurez-vous !
Vous n’avez pas besoin d’être un enquêteur de gé-
nie, car les scénarios sont écrits de manière à ce que
trouver les indices soit amusant et non pénible.
Vous n’êtes pas égaré sur de fausses pistes, mais
vous découvrez peu à peu la vérité au cours de scè-
nes palpitantes. Tout est prévu pour que résoudre
des problèmes ne soit pas ennuyeux ou compliqué,
mais amusant et gratifiant ; l’invention et la création
de solutions sont drôles ; et la gratitude des PNJ sera
sincère et agréablement manifestée.
Vous n’êtes pas rembarré ou déçu par ceux que
vous tentez d’aider ; vos effort sont récompensés
d’effets positifs, même s’ils portent parfois moins
que vous ne l’espériez, car le Passeur sait que la si-
tuation est plus complexe et pire qu’il n’y paraît à
vos yeux encore ignorants.
Vous êtes confronté à du danger, mais vous êtes as-
sisté par votre instinct de survie, un sens que vous
pouvez consulter à tout moment, et qui vous indique
non seulement si vous êtes menacé, mais si l’action
que vous vous apprêtez à faire vous rapproche de la
sécurité ou de la mort.
Quant à l’exploration de pays lointains et inconnus,
elle vous demandera de la prudence et de l’adapta-
bilité, mais cela restera ludique. Même s’il faudra
comprendre comment une civilisation fonctionne,
cela serait fait aisément, et non par une étude longue
et fastidieuse. Il y a toujours un PNJ agréable pour
vous apprendre ce qui doit l’être ; et en attendant,
votre ignorance a pour but de vous faire commettre
des impairs amusants. Le plus souvent, vous n’aurez
pas besoin de devenir un spécialiste vous-même,
mais seulement de vous assurer la coopération d’un
PNJ compétent.
Vous n’aurez pas à lire une ligne de texte juridique
avant de trafiquer le code de loi d’un pays, mais
simplement à gagner l’amitié d’un avocat… c’est
tellement plus agréable.
Et quand vous devrez vous rendre dans les lieux les
moins hospitaliers, ce sera avec un sauf-conduit,
avec une escorte de gens avertis, ou en profitant
d’une aide impromptue.
Autrement dit, dès lors que le monde sera trop dan-
gereux pour vous, des PNJ d’escorte se présente-
ront ; moyennant un peu d’habileté, vous saurez
bien les disposer à votre égard. Ils vous serviront
d’interface, de médiateurs, avec un milieu hostile ou
inconnu. De ce fait, ils diminuent votre angoisse
éventuelle, et vous apporteront des connaissances de
façon à vous laisser une autonomie décisionnelle ;
ils pourront en outre aider à l’exécution de vos
choix. Bref, ils sont facilitateurs et sécurisants.
L’adversité
Vous savez déjà que vos adversaires seront trop
puissants pour être affrontés en force. Cette puis-
sance peut être due à leur nature : Alma est une
Déesse, elle n’est pas l’unique dieu qui agit sur le
monde, et même si vous avez affaire non au dieu,
mais à l’un de ses serviteurs, les dieux peuvent être
généreux avec ceux qui servent leurs intérêts, ce qui
fait que les croyants sont des adversaires redouta-
bles. Elle peut également être due au fait qu’Alma a
des goûts très précis, préférant le savoureux et le
beau au banal et au laid, et qu’elle s’oppose aux per-
turbations. Aussi, ceux qui veulent semer le désor-
dre, ou instaurer un ordre qui diffère de celui choisi
par la Déesse, veillent à prévoir des moyens impor-
tants. Ces opposants ne sont pas forcément mons-
trueux, terrifiants, ou abjects. Au contraire ! L’ab-
solue majorité des PNJ dangereux sont attrayants et
souvent sympathiques, mais leurs buts peuvent im-
pliquer souffrance et mort pour d’autres, et leur
splendeur être teintée d’une perversité qui fait soup-
çonner que leur véritable visage ferait préférer le
suicide.
D’autres opposants seront trop précieux pour être
brutalisés, ou trop appréciés par leur communauté
pour qu’il soit raisonnable de leur nuire ; et ils ne
vont pas non plus arrêter leurs bêtises juste parce
que vous le leur demandez. Il faudra les convaincre,
non les contraindre. En outre, certaines perturba-
tions sont dues à de bonnes idées qui ont mal tourné,
et votre rôle consistera à réaliser le projet original,
ou, s’il est irréalisable, à aider son inventeur à en
faire son deuil.
Des PJ fragiles…
Quant à vous, vous êtes un humain normal, sans
dieu pour vous assister et sans communauté pour
vous protéger, à part les amis que vous vous serez
fait en cours de scénario. Vous pouvez être blessé,
tué, emprisonné, avoir des ennuis avec la justice ou
être massacré quand vous transgressez un interdit à
l’étranger. Vous évoluez dans des sociétés com-
plexes qui ont toutes prévu des moyens bien à elles
pour rester stables, et donc éliminer ceux qui mena-
ceraient leur pérennité, alors vous évitez d’être
considéré comme un criminel (même si c’est ce que
vous êtes).
Ce n’est pas grave, puisque vous n’allez pas agir en
force. Vous êtes un levier qui peut aller s’exercer au
bon endroit et au bon moment. Vous êtes un éclai-
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reur, un médiateur, et bien souvent, un appât, parce
que personne n’est assez fou pour le faire à votre
place. Vous avez le courage d’aller explorer des
lieux que tout le monde a fuis depuis qu’ils sem-
blent dangereux, en sachant très bien que vous
n’êtes pas plus solide qu’un autre.
Et vous avez bien de la chance ! En étant quasiment
l’être intelligent le plus faible qui existe sur Alma,
vous ne pouvez pas résoudre les problèmes par la
force, en disant : « Voilà, ils sont morts, qu’est-ce
qu’il y a d’autre dans ce scénario ? » Non, vous êtes
obligé de comprendre ce qui se passe et comment
les lieux et sociétés fonctionnent au lieu de foncer
dans le tas ; puis d’inventer des solutions nouvelles
et appropriées plutôt que d’utiliser toujours les mê-
mes moyens. Vous pouvez être astucieux et original
plutôt que simplement brutal et répétitif.
… et des joueurs efficaces
Votre force, c’est votre joueur. Il éprouve vos sen-
timents, mais continue à penser suffisamment clair
pour préserver votre vie ; il réprime son envie de
fuir le temps de pouvoir utiliser son sens de l’ob-
servation pour repérer les signes d’un problème et
identifier des indices. Il stresse parce qu’il est un
éclaireur qui aurait bien besoin de la cavalerie vu
l’ampleur de ce qu’il a découvert… et il se demande
où vous cacher ou comment fuir maintenant que
vous avez été repéré.
Il analyse la situation, il trie le normal de l’anormal
sur la base de ce qu’il sait du monde et de ses habi-
tants, il émet des hypothèses quand aux causes du
problème, et il les teste. Il s’adresse aux PNJ pour
les mettre en confiance ou les pousser au lapsus afin
de recueillir des informations ; il les convainc de
coopérer avec vous. Il est très doué pour aborder des
inconnus, et se débrouiller pour entamer une
conversation qui dépasse le stade de « Beau temps,
n’est-ce pas ? » Il invente des solutions en utilisant
ce qu’il a compris du perturbateur pour lui proposer
une activité de remplacement, ou il machine pour le
neutraliser. Et bien sûr, sa présence d’esprit lui per-
met de prendre les bonnes décisions au bon mo-
ment. Décidément, vous pouvez être fier de lui.
Des PNJ contrariants
Amender plutôt qu’éliminer
Les PNJ qui causent des problèmes ne sont pas des
ennemis ou des coupables à punir, mais des person-
nes dont les objectifs vous contrarient. La question
est de savoir comment vous allez les amener à ces-
ser, et la réponse varie selon les cas.
Parfois, le PNJ serait très fréquentable, mais il a été
amené à se comporter désagréablement, soit parce
qu’il a été meurtri au point de s’engager dans des
activités nuisibles (je ne vous inflige rien qui ne
m’ait été infligé, tout est donc normal), ou qu’il a
été élevé dans l’idée que c’était la chose à faire
(dans la famille, on est tous bourreaux), ou qu’il y a
été obligé (je me fiche de ce que tu voudrais faire, tu
seras général en chef comme papa). Il vous reste à
engager le dialogue pour comprendre ses motiva-
tions et lui proposer une activité de remplacement
qui vous dérangera moins ou pas du tout, ou qui
vous arrangera franchement. Bien sûr, vous n’y ré-
ussirez qu’après avoir été suffisamment contrarié
par le PNJ, car c’est son rôle dans le scénario.
Un groupe de PNJ avait suivi les PJ et s’était instal-
lé dans la région, faisant disparaître peu à peu les
villageois qu’ils utilisaient et comme aliment, et
comme matériau pour leurs œuvres d’art. Informé
de ce fait, un PNJ pria les PJ non pas de priver leurs
amis de tout aliment et de tout moyen d’expression
artistique, s’ils ne pouvaient vraiment pas s’en pas-
ser… mais de trier leurs victimes pour n’éliminer
que les gens dont la survie lui importait peu.
… et se défouler pour rester calme
Même si ces PNJ ne doivent pas être maltraités, ils
vous énervent quand même et il est légitime que
vous ayez envie de leur taper dessus, pour peu que
la vie vous ait appris à répondre à la violence par la
violence (on parie ?), en baptisant éventuellement
votre réaction « punition bien méritée ».
Les scénarios incluent donc et des scènes qui vous
irritent, et des scènes de détente, qui peuvent être
d’avoir une activité relaxante ; mais également de se
défouler sur un PNJ tête-à-claques aimablement
fourni par le Passeur. Un tel PNJ est trop insuppor-
table pour que quiconque se soucie de l’améliorer,
alors décrivez gaiement ce que vous lui infligez.
Ainsi, vous pourrez arriver calme, détendu et effi-
cace pour aider le PNJ valable.
C’est très utile quand un PNJ a une fausse bonne
idée, décidant d’améliorer le monde, mais négli-
geant quelques détails, et que l’opération tourne à la
catastrophe. Ce n’est pas de la méchanceté, seule-
ment de la bonne volonté, et elle n’est punissable
qu’en lui hurlant qu’il est une andouille. Heureuse-
ment, il y a toujours un méchant dans le paysage
pour exploiter ce genre de plan naïf et celui-là pour-
ra servir à vous défouler.
… à tuer avec modération
Dans d’autres cas, le PNJ ne désire absolument pas
changer et soit il se moque que ses activités vous
dérangent, soit c’est exactement le but qu’il recher-
che. Il vous faut le neutraliser, voire l’éliminer.
Vous ne procédez jamais en le défiant et en l’af-
frontant vaillamment en combat singulier, car votre
instinct de survie vous le déconseille fermement ;
seule l’agression de certains PNJ secondaires n’est
pas une erreur stratégique mortelle. Au contraire,
vous usez de moyens détournés, d’une légalité par-
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fois douteuse et d’une loyauté… ah, vous n’êtes pas
un saint et votre vie n’a pas à servir d’exemple, sauf
pour ceux qui veulent survivre à leur engagement
héroïque. À vrai dire, tous les moyens sont bons,
tant qu’ils ne causent pas de souffrance aux PNJ
auxquels tient l’un des participants, Passeur inclus.
Autrement dit, vous vous engagez dans une machi-
nation. Vous enquêtez pour identifier un point faible
du PNJ à éliminer, et par exemple qu’il a un ennemi
qui le hait, mais qu’il faut encore convaincre de col-
laborer. Vous affaiblissez votre cible, vous l’isolez,
vous concevez une embuscade, vous l’attirez dans
un piège en servant éventuellement d’appât, sauf
quand le Passeur vous permet de manipuler un PNJ
pour qu’il le fasse à votre place, mais il est en géné-
ral plus drôle de vous décrire dans ce rôle. Votre
discrétion évite que le PNJ ne vous voie venir et ne
vous contre ; vous n’avez donc pas à vaincre ses dé-
fenses, mais à les contourner. Idéalement, vous
poussez le PNJ à la faute pour qu’il se neutralise lui-
même, et vous retournez ses moyens contre lui ;
plus il est puissant, plus le résultat est amusant…
Vous tenez compte du fait que votre cible possède
elle aussi un instinct de survie, et qu’elle ne se met-
tra pas en danger à priori ; mais quelles bêtises ne
fait-on pas dans l’urgence ou lorsqu’on est troublé
par des sentiments… induits vos manœuvres.
… en évitant de combattre
Vous ne combattez donc pas souvent, et c’est tant
mieux, car le combat dans Alma ne correspond pas
à la vision faussée que vous en donne le cinéma, qui
met en scène des combats chorégraphiés destinés à
ravir le spectateur, et à durer. Le combat tue, blesse,
et laisse handicapé en quelques instants ; même un
adversaire avec un tout petit couteau peut vous tuer
en un coup, tranchant une artère vitale et vous lais-
sant vous vider de votre sang. Un Alemdar qui atta-
que vise à se débarrasser de quelqu’un, et il agit vite
et bien pour ne pas risquer de riposte.
Vous évitez donc le combat, sauf dans les quelques
cas où il est la solution la plus ludique, auquel cas le
Passeur le rend amusant et peu dangereux. Il vous
suffit alors d’empoigner une arme improvisée pour
assommer un agresseur incompétent qui fait partie
d’une scène relaxante, ou vous défouler sur un PNJ
tête-à-claques ; le but est que vous vous amusiez à
décrire ce que vous lui infligez.
En outre, il arrive qu’il faille assommer quelqu’un,
ou infliger une estafilade en guise d’intimidation, et
cela demande d’avoir pratiqué le combat offensif.
Sans cela, et peu importe l’arme que vous avez en
main, vous ne blesserez personne, sauf peut-être
vous-même ou un passant. Vous pourrez décrire
tous les coups que vous voudrez, mais aucun d’entre
eux ne portera, et l’adversaire apprendra très vite à
ne pas prendre la peine d’éviter vos attaques, puis-
qu’elles sont sans effet et que son instinct de survie
lui confirme que ce n’est pas une feinte habile, mais
de l’incompétence.
Même si vous ne savez ni tuer, ni blesser, mais seu-
lement neutraliser, vous avez pratiqué le combat dé-
fensif. Vous savez survivre à un combat, éviter un
coup, vous mettre en sécurité et si nécessaire filer
quand cela tourne mal, car vous savez que vous ré-
solvez mieux les problèmes en étant un fuyard en
vie qu’un héros mort. C’est vital, car vous serez
confronté à des PNJ belliqueux et pris dans des
rixes, et vous devrez parfois résister à un assaut pour
rester sur les lieux intéressants pour le scénario.
Les charmes du voyage
Vous allez voyager Or, chaque peuple possède sa
propre vision du monde et sa culture, ce qui vous
garantit le dépaysement. Vous ne restez pas étranger
dans un hôtel pour étrangers, mais vous vivez avec
les gens et vous comprenez un peu de leurs valeurs
et mœurs, ce qui est enrichissant, mais parfois très
perturbant. Vous détestez certains pays, dont la
culture vous paraît choquante et inacceptable, et
quand le Passeur est du même avis, le scénario vous
demande justement d’y changer quelque chose.
Moins vous aurez aimé, plus vous serez motivé…
Un voyage peut s’avérer très aventureux, car les
manières de vivre heureux ne sont pas toutes com-
patibles entre elles. Cela pourrait être imprévu, car
certains peuples sont très mal connus, et d’autres le
sont très bien, mais à travers des légendes remar-
quablement inexactes. En outre, les personnages les
plus livresques découvrent vite qu’il y a loin de la
connaissance théorique à la vie parmi des gens très
différents.
Connaître les mœurs des spectres de Kerth ne pré-
pare guère à une nuit d’angoisse passée à se blottir
sous son duvet en espérant que leurs hululements
plaintifs et avides s’apaiseront avant l’aube, que les
fenêtres sont étanches et ne laissent pas passer leurs
souffles glacés qui volent leur vie aux dormeurs
soudain transis. Ce froid dans votre dos…simple
peur… ou est-ce déjà l’existence qui vous fuit ?
Un voyage est l’occasion de rencontres, pas toujours
agréables à priori ; mais tenter de changer en ami un
être qui vous voit plutôt comme un jouet ou un ali-
ment est une expérience stressante, mais gratifiante :
plus un monstre est usuellement impitoyable et né-
gligent de la vie d’autrui, plus les égards qu’il a
pour vous sont précieux, même si sa présence aux
cocktails fait frissonner les autres invités.
Vous deviendrez un grand voyageur, voire un très
courageux explorateur, mais jamais un conquérant,
car aucun peuple n’est assez fragile pour être sou-
mis par un autre. Si vous vous montrez désagréable,
vous risquez surtout de quitter en courant un village
lointain, poursuivi par des guerriers furieux, et avant
d’avoir pu renouveler vos provisions. Vous appren-
drez donc très vite, si vous l’ignorez lors du premier
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scénario, comment vous montrer plus diplomate et
comment survivre en pleine nature parce qu’il y a
loin entre deux villages… ou que vous ne supportez
pas les indigènes, ou l’odeur de leur cuisine, ou
leurs goûts en matière de décoration. Vous êtes cer-
tainement tolérant… mais vous avez vos préféren-
ces !
Améliorer le monde…
Vous passez donc votre vie à permettre des amélio-
rations, en agissant toujours localement. Mais cer-
tains de ces petits actes accomplis au bon endroit et
au bon moment changent globalement le monde.
Parfois, vous avez une vision claire de l’étendue des
conséquences ; parfois, l’ampleur de votre impact
vous reste insoupçonnée… jusqu’à un scénario ulté-
rieur où vous découvrez avec surprise à quel point
votre action a été utile.
C’est possible parce que l’histoire du monde a laissé
de nombreuses séquelles, par exemple Demlyvein et
Mainwar, et que son devenir dépend en bonne partie
de certains personnages-clés, comme Alma elle-
même, dont la personnalité peut évoluer. Or, cer-
tains de vos actes permettent justement de résorber
peu à peu ces problèmes, d’effacer les pires aspects
du monde, de changer un individu perturbé en un
acteur efficace de l’avenir, de faire évoluer un pays
et un peuple handicapants pour le reste de la planète
en un lieu sûr habité par de précieux alliés.
Ce statut globalement meilleur permet la résolution
d’autres problèmes, si dangereux qu’il valait mieux
les éviter jusque-là, faute de moyens et de havres.
Pièce après pièce, vous restaurez et assemblez un
monde meilleur, le vôtre. Vous comprenez peu à
peu qu’aussi imparfaite que soit la situation actuelle,
le paradis terrestre est au bout du chemin.
Ce ne sera pas simple, et souvent terrifiant ou im-
monde, mais… mais le bilan sera toujours positif. Si
une partie vous laisse une impression douce-amère,
c’est que vous reviendrez un jour pour améliorer
encore la situation. Il serait naïf de croire que tout
peut être réparé tout de suite, mais pertinent de pen-
ser que tout le sera, un jour.
… et le comprendre…
Quand vous commencez à jouer à Alma, et quels
que soient votre âge et vos intérêts, votre vie s’est
déroulée sans qu’aucune aberration ne vienne la
troubler. Vous pouvez n’avoir jamais voyagé, et
ignorer que la civilisation voisine fonctionne très
différemment de la vôtre. Si vous vous êtes intéressé
aux cargues ou aux dieux, c’était par pure curiosité.
Par contre, à mesure que vous vivrez bizarrerie sur
étrangeté, vous acquerrez des informations passa-
blement inconfortables quant à ce qui existe déjà sur
Alma et ce qui peut encore y advenir. Et vous en
soupçonnerez bien plus… en silence. En effet, ce
genre de savoir ne se met pas par écrit, et ceux qui
le détiennent n’en confient que des bribes à des in-
terlocuteurs qu’ils pensent fiables, capables de se
taire, et aptes à résister à une telle révélation.
Vous serez changé par ce que vous aurez appris, et
vous pourriez préférer retrouver votre vision du
monde précédente, confortable et lisse ; et peut-être
même quelques préjugés nationalistes, comme
croire qu’il existe des meilleurs et que c’est nous.
Vous pourriez aussi tenter d’en savoir plus, et peut-
être également d’en devenir plus, et d’en faire plus.
Pour citer Vega Chayirca, un très vieux général que
vous rencontrerez un jour :
Les plus grands fléaux nous oppressent encore,
Les plus grands combats restent à mener,
Les plus grandes victoires sont devant nous ;
Et je mourrais ?
Pas avant eux.
Pas sans eux.
Et de préférence, je leur survivrai,
Pour voir le monde que nous aurons bâti.
… au fil de PJ successifs
Même si Vega tient à le faire, vous ne vivrez peut-
être pas la totalité de l’avenir du monde. L’essentiel
est seulement que vous possédiez un alter ego qui
vous permette de vivre chaque étape en retirant un
maximum de plaisir de l’expérience, et cela peut
impliquez de changer de PJ. Ne le tuez pas, mais
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annoncez votre intention au Passeur. Vous raconte-
rez alors où, quand et comment vous vous installez
pour commencer à mener une vie de PNJ. Désor-
mais, le Passeur dispose de vous, et cet alter ego
passé croisera peut-être le chemin de son succes-
seur.
Le passage à l’état de PNJ peut se faire même si
vous restez satisfaisant à jouer. Cela peut arriver
quand vous trouvez un endroit où vous vous sentez
bien, et que vous n’avez plus envie de quitter, fût-ce
pour améliorer le monde. Ce sera votre droit. Vous
y resterez, et la suite de l’aventure sera laissée à vo-
tre successeur. Néanmoins, vous pouvez également
choisir lequel de vos PJ vous jouez pour un scénario
donné, et il cessera d’être un PNJ le temps néces-
saire. Parfois, ce sont les vieux habits qui semblent
les plus tentants ; rien ne vous empêchera de les por-
ter à nouveau.
Comme votre capacité à agir sur le monde dépend
principalement de votre savoir, puisque seul un pro-
blème bien compris peut être intelligemment résolu,
vous n’avez pas à oublier tout ce que vous savez
quand vous créez un nouvel alter ego. Vous pouvez
décider que celui-ci a beaucoup discuté avec son
prédécesseur, ou avec un autre PNJ bien informé. Si
vous préférez retrouver votre innocence quant à
Alma et tout réapprendre des autres PJ, c’est égale-
ment possible. Si cela vous lasse, annoncez simple-
ment que vous avez appris le reste lors de conversa-
tions qui ne seront pas jouées.
 CRÉATION DES PERSONNAGES
GÉNÉRALITÉS
Introduction
Maintenant que vous avez compris quelles sont vos
activités usuelles, il est temps de décrire les qualités
qu’elles requièrent, et que vous possédez forcé-
ment ; puis de se demander qui vous êtes, et ce que
vous savez faire d’autre. Vous choisirez dans quel
pays vous êtes né, ce qui type votre apparence et dé-
termine votre mode de vie et vos goûts, même s’ils
ont pu évoluer par la suite. Ensuite, vous réfléchirez
à quelques mots qui résument votre identité, votre
caractère, vos buts, vos préférences.
Vous élirez une profession qui vous permet de vi-
vre, et qui peut être exercée en tant qu’itinérant. Une
description des occupations des Alemdar vous y ai-
dera. En effet, vous n’êtes pas tout le temps en train
d’enquêter au fin fond des ennuis ; et même quand
vous y êtes, vous portez sur eux un regard typé par
votre activité usuelle.
Un peintre pourra trouver les taches du sang sur les
vêtements très esthétiques, un cuisiner se demandera
si cette étrange créature qu’il a fallu tuer est comes-
tible, un tanneur serait intéressé par sa peau, un
zoologue occupé à la répertorier en regrettant qu’il
n’ait pas été possible de la ramener au zoo. Mais
peut-être qu’un œuf traîne aux environs ?
Cela fait, vous prendrez connaissance des moyens
supplémentaires qui vous sont accessibles et vous
choisirez lesquels vous utilisez pour agir. Cette façon
de faire a l’avantage d’être réaliste, car un étudiant ne
mémorise réellement que les moyens qui servent ses
buts ; vous serez plus cohérent, plus aisé à interpréter
et plus vivant que si vous étiez un amas de moyens
sur lesquels il faudrait coller une personnalité.
Ensuite, vous finaliserez de votre apparence, car
vous la décrirez aux autres joueurs lorsque vous
vous rencontrerez leurs personnages et qu’il serait
plus agréable qu’elle ne se limite pas à : « Yeux bof,
cheveux indéterminés, peau tiède, taille moyenne,
vêtements : oui, aucun signe particulier, nom usuel :
Monsieur, surnom : Normal ».
Un exemple
Prenons l’exemple de Nerio. Il peut se résumer en
un mot :
Nerio est un impresario.
Mais ce mot n’est pas sans conséquences :
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Donc, Nerio est un impresario iliani, car qui d’autre
aurait l’idée saugrenue de vendre un spectacle ?
Cependant, Nerio ne peut être compris qu’en raffi-
nant un peu sa description :
Nerio est un impresario iliani, qui sait et mentir
pour cacher les défauts de sa marchandise, et dire la
vérité quand elle est bonne à vendre. Il a quitté son
propre pays parce qu’il méprise la cupidité de ses
pairs, et que leur concurrence le fatigue. Il explore
le monde, et, détestant être contrarié, il est heureux
de pouvoir soigner ceux qu’il tient à garder en vie,
mais aussi de tuer ceux qu’il a assez vus. Intelligent,
il montre peu de patience avec les imbéciles et en-
core moins avec ceux qui font preuve de mauvaise
volonté. Peintre, il est toujours disposé à immortali-
ser les situations les plus belles, et aussi les plus
embarrassantes. Son action est en général positive,
mais il se camoufle sous un masque caustique et
railleur ; il adore prétendre qu’il est irresponsable,
même s’il est très constructif.
Bref, Nerio est le genre de compagnon dont on ne
comprend pas au premier abord pourquoi on l’a en-
core sauvé. Peut-être parce que son esprit d’analyse
et sa fabuleuse compréhension des (autres) fripouil-
les aide à survivre ? Peut-être parce que sa tarte
aux pommes est exquise, et sa mère si accueillante ?
Peut-être parce que son égoïsme est libérateur ? Ou
peut-être pour tout cela à la fois…
Nerio est vêtu de diverses pièces de vêtements qu’il
a sélectionnées parmi les peuples qu’il a visités, et
qui ont presque complètement supplanté son mo-
deste costume de voyage de cuir noir.
Un tel résumé décrit Nerio après plusieurs parties. À
sa création, Nerio était iliani, apte à nuire par les
mots et par les armes, à soigner ceux qu’il ne voulait
pas perdre et à gagner sa vie par le commerce de
l’art, puis il s’est développé au fil du jeu.
Le matériel nécessaire
Il vous faut un crayon, une feuille de papier, et un
ordinateur si vous voulez dactylographier la descrip-
tion du personnage et l’imprimer. Ceci dit, dès que
vous vous connaîtrez assez bien, vous jouerez sans
support papier.
Point de vue et style de réaction
En tant que PJ, vous possédez deux traits essentiels :
une vision du monde et une manière de réagir qui
vous sont propres. De ce fait, vos opinions, actions,
réactions, commentaires, choix de vie et peut-être
créations sont intéressantes.
Quand vous découvrez un nouvel élément du jeu,
pays ou PNJ, votre manière de le percevoir diffère
de celle des autres participants. Si vous l’exprimez,
elle enrichit le récit, et le Passeur s’amuse à redé-
couvrir à travers vos yeux ce qu’il a lu dans la des-
cription du pays, qui est aussi neutre que possible.
Vous ne l’êtes pas du tout, et c’est votre charme.
Une scène change totalement selon l’éclairage
qu’on porte sur elle, et c’est ce que vous êtes : un
regard particulier. L’histoire est améliorée par ces
multiples points de vue personnels.
Quand le scénario vous amène à agir ou réagir, votre
style évite que le Passeur écoute plusieurs fois la
même description. Comme vous êtes un enquêteur
travaillant en équipe, vos traits particuliers vous per-
mettent de vous engager dans les mêmes activités que
les autres PJ, mais en les accomplissant à votre façon.
Vous ne faites pas cavalier seul, mais vous n’êtes pas
non plus une simple copie des autres PJ. Autrement
dit, tous différents, mais tous compatibles.
Préférences, émotions et choix
Vous aimez certaines choses ou êtres, et vous en
appréciez très peu d’autres. Ce genre de préférences
peut être clair dès que vous avez choisi un pays
d’origine et une occupation, comme il peut le deve-
nir en jeu, mais en tous les cas, il est précieux. Au
cours des scénarios, ces préférences seront délibé-
rément ignorées, et le déplaisir, l’indignation ou la
colère que vous éprouverez vous aideront à agir
malgré la peur, la douleur ou le dégoût.
Vous vous impliquerez pour éviter de subir une
contrariété, comme perdre un être cher ou laisser dé-
molir la ville où vous résidez, ou pour y mettre fin,
que ce soit en renversant un dictateur ou en échap-
pant à l’indélicat qui vous a réduit en esclavage. Vos
sentiments seront votre plus puissante motivation.
Une interface compétente…
Vous êtes une interface permettant d’agir efficace-
ment. Vous n’êtes pas handicapé physiquement, car
vous devez échapper au danger en fuyant rapide-
ment par vos propres moyens. Grimper, ramper, se
faufiler, s’abriter rapidement, ça va vous connaître.
Vous parlez des langues alemdar, vous survivez en
pleine nature, du moins dans les milieux qui vous
sont familiers. Vous savez vous cacher, et être dis-
cret, mais c’est le joueur qui doit mentir et jouer la
comédie par votre bouche, c’est à lui de raconter des
énormités avec aplomb et réussir à convaincre qu’il
est ce qu’il n’est pas, ou qu’il n’est pas ce qu’il
semble pourtant bien être (par exemple, comestible).
Vous êtes autonome, et vous vous intéressez de
vous-même à ce qui vous entoure. Vous n’avez pas
besoin d’attendre les ordres de quelqu’un d’autre,
sans quoi vous seriez déjà mort. Vous savez survi-
vre à un combat, neutraliser un adversaire, et peut-
être le blesser ou le tuer.
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Vous connaissez certains aspects du monde, que vous
avez étudiés à titre de loisirs, mais vous n’avez pas à
lire quoi que ce soit : le Passeur vous fournira les in-
formations que vous êtes supposé connaître à chaque
fois qu’il les pensera utiles au récit. Vous pourrez
également lui poser des questions dans vos domaines
de compétence, et, s’il pense que la réponse améliore
l’histoire, il vous répondra, mais pas forcément la vé-
rité, puisqu’une erreur basée sur une information er-
ronée peut être plus amusante qu’un succès.
Aptitudes relationnelles
Vous passez votre vie à rencontrer de nouvelles per-
sonnes et à coopérer avec elles, vous évitez donc
d’être repoussant ou terrifiant, sauf quand vous le
désirez. Vous pouvez être un asocial et détester les
contacts humains, mais vous êtes capable d’en avoir
quand il le faut, et de bonne qualité. Vous n’êtes pas
insupportable, car il est difficile d’aider un PNJ qui
refuse de vous fréquenter ; ni agressif, car personne
ne croirait que vous aller l’aider, mais plutôt que
vous cherchez un moyen de le détruire encore plus ;
ni inutilement blessant, pour ne pas froisser des PNJ
prompts à tuer leurs offenseurs.
Vous savez rester effacé tant que vous n’avez pas
encore compris quelles sont les mœurs à respecter là
où vous vous trouvez. Votre intelligence est mani-
feste, et c’est tant mieux, car les PNJ ne sont pas du
genre à se confier à un abruti, ni à accepter une solu-
tion mise au point et proposée par un crétin ignare.
Cela ne vous empêche pas de passer délibérément
pour un con quand votre plaisir est d’abuser vos in-
terlocuteurs, mais vous choisissez de faire semblant,
ce qui diffère d’être condamné à la stupidité et
l’incompétence.
De ce fait, vous êtes bien accueilli et bien traité.
C’est essentiel pour enquêter, mais aussi parce que
la quasi-totalité des moyens et du savoir sont possé-
dés par des individus, et non par des bibliothèques
ou des constructions technologiques. Les autorisa-
tions légales, l’attitude compréhensive des forces de
l’ordre, l’aide s’obtiennent ainsi. D’autre part, toute
connaissance importance ne peut être apprise que de
la bouche d’un PNJ, en dialoguant avec lui, et il faut
encore que vous lui ayez donné envie de parler, et,
quand il est du genre taciturne, que vous lui ayez
posé les bonnes questions.
… et adaptable en jeu
Sur votre initiative
Il pourrait arriver en cours de jeu que vos capacités
vous paraissent insuffisantes, et vous aimeriez bien
avoir pratiqué une technique ou acquis un savoir. Il
suffit d’annoncer que vous la possédez. Si cela para-
ît logique au Passeur, vous l’avez ; sinon, il vous
demande comment vous l’avez appris. Si votre récit
sent le vécu et cadre avec vous, c’est bon ; sinon, il
va falloir essayer autre chose.
La question n’est pas de savoir si le moyen ou le sa-
voir est utile à l’histoire, mais s’il vous a intéressé
suffisamment pour que vous le pratiquiez ou l’étu-
diez. Si l’expression de votre intérêt ne convainc pas
le Passeur, il peut considérer que vous ne savez rien,
ou que vous avez appris quelques éléments superfi-
ciels, ou pire, il peut vous donner de fausses infor-
mations. Après tout, vous n’êtes pas assez motivé
pour avoir pris la peine de vérifier ce qu’elles va-
laient par une étude minutieuse, n’est-ce pas ?
Sur l’initiative du Passeur
Le Passeur peut également décider de vous faire
posséder un moyen si c’est utile dans l’histoire que
vous construisez ensemble. Il vérifie si c’est bien le
genre de domaine auquel vous vous êtes intéressé, et
vous pouvez parfaitement répondre que vous n’êtes
pas du genre à vous pencher sur un sujet si en-
nuyeux. Le Passeur se débrouillera pour qu’un PNJ
ait eu cette patience ; vous, vous n’êtes pas là pour
utiliser des moyens qui ne vous plaisent pas.
Choisir vos spécificités
Apprécier sa seconde peau
Votre personnage peut être très différent de vous,
mais il est essentiel que vous puissiez l’interpréter
de façon vivante et ressentir ses sentiments. Il ne
doit pas être un carcan, une limite, mais quelqu’un
dans la peau duquel vous aimez vous glisser. Vous
allez raconter sa vie, il faut qu’elle vous intéresse,
qu’elle vous permette de vous amuser et d’amuser
les autres participants. Cela ne veut pas dire que
vous allez jouer un bouffon, mais quelqu’un dont ils
auront plaisir à suivre les aventures, eux aussi.
Équipe ou conglomérat
Vous n’avez pas à vous soucier des personnages dé-
jà existants ou de ceux que créent les autres joueurs.
Vous êtes là pour créer l’Alemdar qui vous
convient. Vous allez connaître des péripéties en
compagnie d’autres PJ, mais vous êtes un être à part
entière et non un rouage destiné à en compléter
d’autres. Vous êtes né, vous avez choisi ce que vous
vouliez devenir, vous avez des projets et des goûts
qui vous rendent unique et qui vous conviennent.
Quand vous rencontrerez les autres PJ au début de la
partie, vous serez libre d’en penser ce que vous
voudrez, et de devenir ou non leur allié, non parce
que ce sera logique ou pas, mais parce que vos sen-
timents vous y pousseront. Rien n’exclut que vous
soyez énervé par d’autres PJ, ce sera à vous de voir
comment communiquer néanmoins, et peut-être ar-
rondir les angles pour s’accommoder de l’autre.
Alma - Livre du Joueur.doc - Page 16 - 27.03.2009
Puisque vous êtes tous là pour jouer à la même table
et au même jeu, il sera nécessaire de trouver com-
ment s’entendre.
Un socle sans détails
Le but n’est pas vous décrire en détail, mais d’avoir
une base pour vous construire au cours du jeu, autre-
ment dit un socle qui vous inspire. Rien ne vous em-
pêche de fouiller votre description, mais vous n’avez
jamais mis les pieds sur Alma et vous ignorez com-
ment vous vous y sentirez. Attendez de mieux
connaître le monde pour décider comment vous vous
comportez, d’autant que certains aspects de votre
personne ne vous sembleront intéressants à dévelop-
per qu’après avoir vécu certains évènements.
C’est bien joli de décider avant de jouer que vous
êtes pacifiste, et de réaliser à la première contrarié-
té que vous voudriez tellement casser la figure de
votre interlocuteur…
Si certains des éléments que vous avez choisis avant
de commencer la partie ne vous conviennent en fait
pas, vous pouvez les modifier en tout temps. Le but
est toujours que votre personnage vous permette de
vous impliquer agréablement dans une partie.
Les moyens utiles
Vous pouvez tout à fait omettre de vous demander
quels sont vos moyens. Vous savez déjà que ce qui
importe, c’est ce que vous avez compris du scéna-
rio, quels PNJ sont devenus vos amis, ce que vous
pouvez imaginer comme solution et qui vous pou-
vez calmer et convaincre de coopérer. Pour cela,
vous n’avez pas besoin de plus que ce que vous pos-
sédez déjà. Néanmoins, des moyens supplémentai-
res sont une bonne manière de vous typer, n’hésitez
pas à en prendre… mais pas n’importe lesquels.
Les moyens inutiles
Pour vous éviter des déconvenues, passons en revue
les moyens qui vous sont totalement inutiles.
Comme vous n’avez besoin que de vous-même et
de votre liberté pour faire ce qui vous plaît, vous
n’avez pas l’usage du statut social, de l’argent et des
biens matériels. Quand le Passeur vous logera dans
un palais, vous apprécierez probablement, le luxe
fait partie des charmes du jeu ; seulement, ce n’est
pas un dû lié à votre rang social ou à vos ressources
financières, mais un choix des PNJ de vous traiter
ainsi parce que vous leur avez plu.
Vous pouvez également vous plaindre de tous ces
chichis, et demander où il reste un coin de terre
pour que vous puissiez dormir confortablement, sous
un arbre de préférence, mais pas un arbre en pierres
précieuses ! Un vrai, avec des feuilles, tout tordu,
qui sent bon le vécu. Cracher dans la soupe est aussi
un plaisir… tant que cela ne fait pas mal au Passeur
qui s’est fatigué à vous créer un hôtel de luxe en es-
pérant vous faire un cadeau.
Le statut
Les sociétés alemdar sont faiblement hiérarchisées,
et même quand elles le sont, le respect du supérieur
n’est pas automatique. Ce peut être le plaisir d’un
fermier que de laisser un arrogant bien habillé dor-
mir dehors le ventre creux, parce qu’il n’aime pas sa
tête. Rien ne sert d’espérer obtenir des privilèges en
arborant un titre et de grands airs. En outre, dès que
vous voyagez, votre statut perd toute valeur. Peu
importe à votre gouvernement que vous ayez été
dépecé dans le pays voisin, ce sont les risques du
voyage. Seuls des amis puissants pourraient interve-
nir, mais vous vous les ferez en cours de jeu.
L’argent
L’argent n’a aucune importance. Il vous suffit de dire
ce qui vous plairait, et le Passeur verra si ça l’amuse
de raconter comment vous l’obtenez. En tous les cas,
ce ne sera pas en disant que vous dépensez de
l’argent, mais en résolvant un problème ou en
convainquant un PNJ. De toutes manières, aucun
Alemdar ne vend du matériel rare ou puissant, il est
toujours mérité en s’attirant la reconnaissance et la
confiance de son possesseur. Vous ne pouvez pas non
plus acheter du savoir, un pouvoir, ni louer quelqu’un
qui fera le scénario à votre place, car personne n’est
assez pauvre pour se charger de vos ennuis ; et les of-
ficiels ne sont en général pas corruptibles ainsi.
Mais si vous trouvez amusant de disposer de fonds
importants, demandez-vous comment vous les avez
obtenus et comment vous continuez à les recevoir. Il
suffit que le moyen soit pittoresque, vous n’avez pas
besoin d’entrer dans le détail.
Les oriels
L’unité monétaire de l’Entremont est l’oriel. Ce sont
de petites pièces plates, en général rondes, qui possè-
dent une fenêtre bien pratique pour les enfiler sur une
ficelle ou le coudre. Les oriels sont petits et légers,
aussi une simple bourse peut-elle contenir une fortune.
Le matériel
Le matériel importe peu, et n’est évoqué par le Pas-
seur que quand sa description rend l’histoire plus
pittoresque :
Ça, c’est le crochet qui permet de retirer le cerveau
par le nez, sans abîmer la tête. Remarquez la courbe
particulière, et le mouvement savant du poignet.
Mais ! Mais vous vomissez sur mon client ? Quel
manque de respect ! Hors d’ici, sauvage !
Ou quand il est l’objet d’une péripétie :
Mais oui, la tente s’est envolée. Elle t’a été arrachée
des mains par une rafale plus violente qu’une autre.
C’est fou ce que tu es maladroit, quand tes doigts
sont gelés. Au fait, vous êtes à flanc de montagne,
dans la neige jusqu’à mi-cuisse, et il va faire nuit. Et
je ne sais pas si vous avez remarqué, mais s’il ne fait
déjà pas chaud le jour, la nuit, il fait vraiment froid.
Vous faites quelque chose ou vous mourez debout ?
Alma - Livre du Joueur.doc - Page 17 - 27.03.2009
Vous avez en votre possession tout ce qui est habi-
tuellement utile à votre mode de vie, et pour le
reste… un outil spécifique est disponible quand
l’histoire a plus de sens avec lui, et absent quand cet
obstacle est stimulant. S’il est présent, vous allez le
trouver en cherchant bien ou dialoguer avec les PNJ
pour le mériter, car il est plus intéressant d’interagir
avec eux que de fouiller votre paquetage. S’il est ab-
sent, vous inventerez une solution de fortune, in-
cluant parfois l’usage inédit d’un autre objet. Le
seul charme du matériel, c’est que vous pouvez en
faire d’imprévu. Crocheter une porte avec du maté-
riel de crochetage… quel ennui ! Il n’y a que quand
le Passeur n’a pas envie de raconter la scène que
vous pourrez le faire.
Quand vous partez en voyage, il est entendu que
vous prenez tout le nécessaire pour survivre en
pleine nature et dormir confortablement sans hôtel.
Si la situation tourne à l’absurde, vous ne pouviez
pas prévoir quel matériel invraisemblable serait
utile, et vous ne l’avez bien sûr pas emmené. Mais
ce n’est pas grave : vous pouvez mourir d’un man-
que d’imagination ou de répartie, mais jamais
d’avoir quitté votre domicile sans préciser que vous
emportiez votre collection de tournevis.
En plus de tout ce qui va de soi, vous pouvez décrire
un objet que vous avez emmené. Si le Passeur
trouve sa présence étrange, vous lui expliquez
comment vous l’avez acquis ou du moins pourquoi
vous avez pensé à le prendre. Si l’anecdote est
bonne, il est présent ; sinon, il est absent et vous in-
ventez une autre manière de réaliser l’action.
Vous n’êtes bien sûr pas tout nu, mais le matériel
que vous portez est là pour vous donner un style et
vous amuser. C’est le cas des dotations typiques de
votre peuple, qui sont passablement pittoresques.
Pour le reste, vous pouvez parfaitement omettre de
vous demander quel matériel vous possédez. De
toute manière, vous avez l’essentiel : vous-même.
Les compagnons
Pour réussir un scénario, vous n’avez jamais besoin
de compagnons fidèles ou d’alliés préexistants, cha-
que problème se présentant accompagné des PNJ
qui pourront vous aider à le résoudre. Le tout, c’est
de trouver quel PNJ est là pour vous aider à résou-
dre quel problème, ce qui n’est pas toujours simple
puisque certains coupables sont aptes à sembler vos
meilleurs amis. En outre, vous aurez bientôt des
compagnons : les autres PJ, et ils seront bien suffi-
sants. Mais si vous tenez absolument à avoir un
compagnon, décrivez-le au Passeur, car c’est lui qui
l’incarnera si cela l’inspire. Il décidera s’il est là, ou
parti faire un tour ; si votre proposition d’activité
l’intéresse, ou s’il préfère s’occuper de ses affaires ;
et il choisira aussi tous les détails que vous n’avez
pas songé à prévoir.
 Dëkhan est un courageux Visehrein, mais sa petite
taille le chagrine parfois. Il s’est donc associé à
Sloth, un énorme tigre blanc intelligent, qui lui sert
de monture. Perché là-haut, Dëkhan domine enfin la
situation. Mais Sloth a sa vie propre : il s’intéresse à
la sociologie, qui lui permet de savoir qui il peut
manger sans encourir de sanction, et quand il est en
chasse dans les bas quartiers, peu lui importe que
Dëkhan ait besoin de lui. En outre, Sloth est parfai-
tement amoral, et il se moque volontiers de son ami,
trop limité par sa vision du héros sans peur et sans
reproche. Finalement, Dëkhan s’est fait des cheveux
blancs le jour où Sloth a pris un petit raccourci par
un monde peuplé uniquement des esprits-maîtres des
félins, dont les seuls rugissements ont suffi à terrori-
ser le petit humain. Comme quoi il n’est pas tou-
jours possible de mélanger ses amis sans en décolo-
rer quelques-uns.
La technique et la science
Vous n’aurez jamais besoin de connaître le détail
des lois qui sous-tendent le monde, donc la science
vous est inutile ; ni de fabriquer un objet matériel
compliqué, donc peu vous importe la technique. Si
un tel objet est utile, un PNJ se chargera de le réali-
ser une fois que vous lui aurez expliqué ce que vous
voulez, et surtout convaincu d’agir. Vous raconterez
alors comment vous vous servez de cet outil pour
faire avancer le récit.
La question « Comment ça marche ? » ne fait pas
partie de vos priorités, qui sont plutôt : qu’est-ce qui
cause cet effet, comment y survivre, et comment y
remédier ? Ou : d’où sort ce truc et comment faire
pour l’y renvoyer ou pour le démolir ? Les réponses
et les moyens sont toujours inclus dans le scénario.
Cette manière de faire permet plus de liberté au Pas-
seur qui peut inventer des manifestations étranges
en n’ayant pas besoin de se demander comment ça
marche ; il s’en moque, lui, tout ce qui l’intéresse,
c’est de savoir si ça fait une bonne péripétie dans
l’histoire. « Comment ça marche ? » équivaut à de-
mander à voir les coulisses pendant la pièce de théâ-
tre, alors même que vous êtes acteur sur la scène et
que votre boulot est de participer au spectacle. Si le
sujet vous intéresse, gardez votre question pour plus
tard, et laissez le Passeur se dédier à la seule mise en
scène, sans le couper dans son élan.
Bien entendu, plus vous jouerez à Alma, mieux
vous comprendrez le fonctionnement du monde,
mais vous le ferez quand le récit s’y prête, et que
vous aurez trouvé un PNJ qui puisse vous répondre,
ou mis au point une méthode pour investiguer vous-
même. Cependant, le Passeur peut vous répondre
qu’il n’en sait rien, qu’il n’a pas choisi une cause, et
qu’il ne le fera pas parce qu’il s’en moque.
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Les moyens accessoires
Les moyens accessoires ne sont pas indispensables à
la réussite du scénario, mais ils peuvent vous per-
mettre d’imaginer des manières inhabituelles de ré-
soudre les problèmes, ou d’autres façons de s’im-
pliquer dans le scénario. Comme ils n’auront d’effet
que si vous pouvez les inclure dans des descriptions
d’actions intéressantes, ne prenez que ceux qui vous
inspirent.
Le fait que vous soyez un excellent combattant ne
vous permettra jamais de vaincre un lapin, même
grabataire, si la description de ses défenses est plus
savoureuse que celles de vos attaques. Le fait que
vous soyez plus grand, plus fort et armé n’a aucune
importance, ce lapin vous tient en échec, et il se
pourrait même qu’il trouve le temps de rigoler.
Vous pouvez aussi les acquérir parce que leur sim-
ple possession vous plaît, même si vous ne vous en
servez presque pas.
– Je suis psychiatre, moi, monsieur.
– Mais tu ne soignes jamais personne !
– Bien sûr ! La psychothérapie, c’est long et fati-
gant ; mais pour tomber les filles, pardon !
– Ça valait vraiment la peine d’apprendre la psy-
chiatrie pour ça ?
– Non, mais je fais ce que je peux pour rentabiliser
mes études.
Souvenez-vous que quand le scénario vous placera
devant un danger inhabituel, ce sera pour que vous
inventiez une manière d’y survivre, pas pour que
vous relisiez votre feuille en quête d’une solution
toute prête. Alors, prenez ce qui vous plaît, non ce
qui vous semble utile. L’utile, vous l’avez déjà.
Les moyens à votre disposition sont décrits la rubri-
que « Moyens », page 32.
Intégrer ses moyens
Vous pouvez posséder autant de moyens que vous le
désirez, à condition que vous soyez en mesure de :
• faire ressortir la possession de chacun dans vo-
tre comportement global, car chaque moyen in-
flue sur son possesseur. Rien ne sert d’accumu-
ler les moyens d’un tueur si vous ne savez pas
vous comporter en tueur, ou même tueur ayant
étudié pour rien.
• créer une personnalité qui reflète la présence de
la totalité de ces moyens, et qui reste pourtant
homogène et crédible. Cela n’empêche pas de
juxtaposer deux moyens rarement associés,
mais cela doit vous ajouter du charme et de la
cohérence, et non en ôter.
La plupart des personnages de film ou de roman ne
possèdent que peu de moyens, car ils suffisent à les
typer. Dès lors, leurs actions sont convaincantes.
Plus un personnage a des moyens divers, plus il est
délicat de les unir tous dans une personnalité
convaincante… à vous de trouver un équilibre.
 Un bon personnage n’est pas une liste de moyens,
mais une personne bien vivante, ressentie dans son
unicité par le reste des joueurs. Si vous ne pouvez
être confondu avec personne d’autre, si on peut dire
d’un de vos actes que c’est bien de vous, ça… vous y
êtes. Pour ce qui est de vos moyens surprenants, que
diriez-vous de : « Ah, il n’y a vraiment que toi pour
avoir appris ce truc ! T’as de ces dadas… »
Souvenez-vous : peu importe que vous ayez peu de
moyens, vous êtes venu pour participer à une his-
toire, et le Passeur fera en sorte que vous puissiez y
caser ce que vous possédez. La modestie d’une
contribution n’a rien à voir avec le plaisir qui est en
retiré.
Et les défauts ?
Si vous tenez à ajouter des défauts à ceux que vous
avez déjà, pensez seulement à les choisir de façon à
ne pas diminuer vos chances de réussir le scénario.
Vous êtes le héros, vous êtes là pour atteindre vos
objectifs. Si vous aimez les erreurs, rassurez-vous,
le scénario vous en fera commettre, aussi doué que
vous puissiez être, et il sera intéressant de voir
comment vous les réparerez.
Actes positifs, motifs… variés
Vous passez une partie importante de votre vie à ré-
soudre des problèmes. Si vous le désirez, vous pou-
vez vous demander pourquoi vous agissez ainsi plu-
tôt que de jouir de la vie comme tout le monde.
Quelques motifs
Bien sûr, vous pouvez être profondément bienveil-
lant, mû par la compassion, la générosité ; mais il
existe d’autres motifs, et par exemple :
• c’est amusant d’être gentil, alors que vous
voyez très bien comment empirer la situation.
• nuire, c’est trop facile, c’est bon pour les autres.
Améliorer le monde est la seule tâche digne de
votre génie.
• papa/maman vous a dit de devenir maître du
monde/de nuire à votre prochain et vous ne leur
avez jamais obéi. Vous n’allez pas commencer
maintenant, il est bien plus amusant de gaspiller
son temps à aider des péquenots.
• détériorer le monde fait plaisir aux dieux et à
tout un tas de malfaisants… c’est agréable de
les contrarier tous.
• vous aimez l’état de paix et le bonheur qu’il
permet, et vous ne laisserez personne en priver
les Alemdar.
• il y a bien assez de malfaisants comme cela,
vous, vous serez le Juste qui compensera tous
les péchés du monde.
• vous n’avez pas été sauvé / vous avez beaucoup
souffert… et vous avez décidé d’épargner cela à
autrui.
Alma - Livre du Joueur.doc - Page 19 - 27.03.2009
• vous voulez être fier de vos mérites, vous savoir
supérieurs à tous ces gens qui ne savent que
laisser faire ou partir en courant pour préserver
leur vie. Lâches, incompétents, aveugles !
• les problèmes sont là pour être résolus, sinon, à
quoi serviraient-ils ?
• c’est votre destin, sinon ça arriverait à quel-
qu’un d’autre.
• le paradis, ça se gagne ! Vous sautez donc avec
gratitude sur tous les problèmes qui croisent vo-
tre chemin. C’est dangereux et pénible ? Tant
mieux, c’est meilleur pour votre âme.1
• ma maman me préfère quand je suis un bon
garçon, et je ne désire pas faire de la peine à ma
maman (quelle chance elle a !)
• mon conjoint idéal a décidé qu’il n’épouserait
qu’un héros. Je me demande parfois s’il n’est
pas temps de changer de fiancé.
• oh, j’y crois pas, dis ! le monde en est au point
où il a besoin d’un type comme moi ? C’est trop
drôle pour ne pas en être !
• encore ? encore moi ? Bon, j’y vais, juste pour
voir comment ce sera cette fois, et puis, ça
m’amuse de voir combien de temps ça durera.
Ils ne peuvent pas engager quelqu’un d’autre ?
Je devrais faire des enfants, pour voir si je peux
leur fourguer cette tuile.
• un motif ? Un seul ? Jamais de la vie ! Je pré-
fère inventer un prétexte boiteux à chaque fois
que je dois sauver le monde ; de toute manière,
c’est pas comme si j’essayais d’être crédible :
tout le monde sait bien qu’il faut avoir une case
en moins pour sauver le monde, surtout à répéti-
tion.
Caser la méchanceté
Vous aurez remarqué que certaines de ces motiva-
tions sont celles de personnalités plutôt malveillan-
tes. Cela ne pose aucun problème tant que vous res-
tez capable de réussir les scénarios, que vos nuisan-
ces amusent le reste des joueurs, et que vous les
gardez en vie pour les raisons qui vous plairont, par
exemple parce qu’ils sont vos témoins préférés, ou
que vous adorez leur manière d’être choqués, ou
qu’ils vous font rire avec leur comportement héroï-
que et leurs valeurs ridicules. Les cinglés possèdent
un charme bien à eux, pourquoi ne pas en jouir ?
1
Mais oui, même un Alemdar peut en tenir une couche,
vous n’êtes pas immunisé à tout, quand même !
PEUPLES
Introduction
Contenu
Cette section comporte de brèves descriptions de
dix-huit peuples humains. Ce sont des extraits du
matériel disponible pour le Passeur, qui est plus
complet afin que vous puissiez être surpris même si
le scénario se passe dans votre pays. Votre igno-
rance relative a aussi l’intérêt d’être réaliste, car
quelle proportion des habitants d’un pays peut en
faire un descriptif qui dépasse les généralités ?
Choisir un pays
Choisissez une origine qui vous inspire. Sélection-
nez un peuple en fonction de vos affinités avec lui,
de l’affection qui vous fait chérir ses valeurs et ap-
précier la vie sur ses terres, ou du dégoût qui vous a
amené à le quitter en espérant ne jamais revenir.
Dans ce cas, vous pourriez faire d’énormes efforts
pour cesser de ressembler à vos compatriotes, mais
ce n’est pas forcé : vous pouvez trouver agréable de
vous comporter comme eux… mais pas de les su-
bir !
Si vous avez déjà une idée de concept ou de carac-
tère, vous ne lirez les peuples que pour savoir lequel
y correspond le mieux.
Ajuster peuple et point de vue
Votre point de vue personnel sur la vie peut corres-
pondre à celui de votre peuple, ou avoir été bâti en
réaction, ou être celui d’une minorité. L’essentiel est
que vous puissiez d’une façon ou d’une autre relier
votre manière de voir le monde à celle du lieu où
vous avez vécu, car cela vous donne des racines et
vous insère dans le monde. Les divers peuples hu-
mains ne se fondent pas les uns dans les autres jus-
tement parce qu’ils ont différents points de vue sur
la vie, associés à différentes manières d’agir, et
qu’ils y tiennent.
Apprendre en incarnant
Pour bien faire ressortir votre origine ethnique, vous
vous baserez d’abord sur les traits fournis dans cette
section. De plus, selon les situations rencontrées au
fil du jeu, le Passeur vous glissera quelques détails.
Il vous dira par exemple :
– Toi, tu trouves cela étrange, parce que chez toi…
Il précise ensuite en quoi ce que vous percevez dif-
fère fortement de votre vécu, que ce soit une mé-
thode, un loisir, un choix artistique, le contenu
d’une assiette ou la définition d’une chambre à cou-
cher.
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Un Venejhian s’étonnera que les fruits ne soient pas
salés. Un Fereshen trouve curieux que les gens ne
connaissent rien aux mondes étrangers, ou aient
peur des Chimères du Rêve. Un Iliani est choqué
quand il voit des denrées offertes et non vendues, un
Hayel ne comprend pas pourquoi vous ne mangez
pas les noix de coco avec leur coque dont les poils
lui rappellent tant des cheveux, et ainsi de suite (ne
cherchez pas, les Hayel sont des cargues…)
Une saveur, non un carcan
Le peuple n’est pas un carcan rigide, alors ne vous
demandez pas si vous faites bien, ne soyez pas coin-
cé. Il est là pour enrichir votre jeu. Si vous n’êtes
vraiment plus typique, le Passeur vous expliquera
comment vous pourriez vous comporter pour l’être
plus. Et si cela ne vous convient pas… vous aurez
changé depuis votre départ, voilà tout, c’est l’un des
effets secondaires du voyage que de faire évoluer
peu à peu votre culture, la rendant plus cosmopolite.
Apports dus au peuple
Chaque origine apporte un certain nombre d’élé-
ments à recopier sur la feuille de personnage ou à
mémoriser :
• des habitudes, des préférences, une certaine vi-
sion du monde, un mode de vie, qui inclut des
activités pratiquées avec aisance.
Les Iliani savent tous vous vendre quelque chose
que vous serez heureux d’avoir acheté, et s’il
faut vous inventer un besoin, ils le feront ; aucun
Visehrein n’ignore comment rougir quand un
membre du sexe opposé dénude un petit bout de
chair en trop, ni comment danser sur une table
une fois ivre.
• un Don de Sang, qui est un pouvoir surnaturel
que possède toute personne portant le sang de
ce peuple. Voici quelques exemples :
Les Gandraki ne sont pas agressés par les ani-
maux ; leurs femmes détectent les métaux et les
pierres précieuses. Les Iliani savent que vous
vendre. Les Fangayi accumulent uriën dans les
végétaux ; les Ashakin flottent ; les Fadirans sa-
vent si vous pouvez leur apprendre quelque
chose.
• de l’équipement, parfois très particulier. Ces do-
tations sont des objets typiques, souvent en-
chantés, et ne pouvant usuellement pas être
trouvées dans un autre pays.
Les Fereshen possèdent un tapis de sable au-
dessus duquel le climat est celui de leur désert, et
une théière qui leur permet de boire en compa-
gnie de presque n’importe quelle créature, aussi
agressive qu’elle soit à priori. C’est une excel-
lente manière de lier la conversation. Les Venej-
hian ont des lunettes aux verres colorés qui leur
permettent de varier leur vision du monde ; les
Visehrein des pipes idéales pour obtenir de
beaux motifs de fumée, ainsi qu’un gilet blindé
pour survivre aux duels qu’ils tendent à provo-
quer dès qu’ils sont offensés.
• un aspect typique, du physique comme du cos- demanderez.
tume
• des noms impossibles à confondre avec ceux
Modifier ses acquis
d’autres peuples Si vous souhaitez jouer un membre atypique d’un
peuple, vous pouvez modifier son don, ainsi que son
• une langue natale, et, si ce peuple parle fré-
mode de vie, mais prenez garde au fait que vous êtes
quemment aux étrangers, une langue de com-
considéré comme un marginal par ses compatriotes.
munication entre humains, le tzasivo.
Demandez-vous si cela vous plaît.
Ces éléments sont disponibles dans les descriptions
des peuples que possède le Passeur ; quand vous au-
rez choisi l’origine de votre personnage, vous les lui

Carte des pays mention

mentionnés dans le texte
Cadres jaunes :
pays de PNJ

Sarys
Kerth

Demlyvein

Shakyeno
Cadres fuchsia :
Vargeeld Reia Tidjani les pays de la Ligue
Nalith (ou Kerdith Langei)

Rig Shaanlek Ilker Ilinith

Ledesma Ilian

Edriwan Lotsheven
Mainwar
Fereshteh
Esh Fangei
Halima Lain Liriel
Mjenogoï Athiles Nithia Kergandai
Vesnejhian
Zelvani Lycomènia

Grande Île

peints de volutes ; des encres chatoyantes, des doru-

Description des peuples
Athiles Nithia
Athiles Nithia se situe au couchant, sur la côte de
l’Entremer, juste au-dessus de Lycomènia. Ses habi-
tants, les Pridannia sont des artisans remarquable-
ment habiles, surtout dans le domaine du papier et
de la reliure. Ils créent des papiers incluant des plan-
tes, des fleurs, des filigranes de métal ; d’autres
res, des cuirs veloutés aux teintes fascinantes, si
doux que l’on voudrait en faire sa propre peau. Ils
tissent des cordons pour faire des marque-pages, ou
les taillent dans de fines lames de bois poli.
Mais ce ne sont que les prémisses : leur spécialité,
c’est le livre, qui allie en lui toutes ces merveilles, et
d’autres encore, car ils n’hésitent pas à prendre des
dons pour améliorer leurs œuvres ou, pour les plus sé-
dentaires d’entre eux, à maîtriser eloreth, la plus puis-
sante des magies. Ils créent ainsi des livres enchantés,

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pleins d’histoires et d’images changeantes, ou de pages
blanches qui noteront d’elles-mêmes les mots qui leur
seront dictés, voire les dessins ou les pensées.
Ils vendent tous les formats, tous les styles, pour
tous les contenus : carnets pour notes de voyages,
que nulle pluie n’effacera ; petits secrets indéchif-
frables par les curieux ; journaux précis et plus
concis que celui qui les a remplis ; lettres choisis-
sant d’elles-mêmes les tournures qui conviennent ;
albums dans lesquels le regard émerveillé copie le
paysage, magnifié. Ils font également les livres de
comptes si utiles en Ilian. Plus généralement, ils
fournissent tout l’Entremont en papier. Ce n’est pas
que les autres humains ne savent pas faire des pa-
piers simples pour leurs besoins simples, mais les
papiers particuliers sont leur apanage. Qui donnerait
mots à son amour d’une plume charmée sur le pa-
pier même qui emballe le poisson ? L’amant d’une
sirène achetée au kilo à la halle voisine ?
Ils échangent leurs produits contre des histoires qui
leur donnent envie de créer des livres écrins pour les
héberger ; contre des pétales ou des parfums qui mé-
ritent l’abri des pages ; contre le cuivré parfait d’un
métal qui ne demande qu’à embellir le vert profond
d’une reliure ; ou contre n’importe quoi qui les ins-
pire, car ils vénèrent la créativité.
Ils ont organisé leur pays de manière à ce que cha-
cun puisse quitter son lieu de travail s’il a une idée.
Ainsi, les étrangers sont surpris de la quantité de
personnel dans les restaurants ; mais également de
voir des Pridannia décoiffés, nus, maculés de pig-
ments jusqu’aux cuisses pour avoir pataugé dans
une cuve, et les cheveux tachés de peintures diver-
ses. Ils ne le sont pas moins quand ils les revoient
propres, maquillés, coiffés et vêtus lors des innom-
brables vernissages qui permettent à chacun de pré-
senter ses dernières réalisations.
Chaque maison abritant un artiste, elle possède un
grand jardin pour accueillir les invités. Il ne s’y voit
aucun auvent, aucun abri contre la pluie, car Athiles
Nithia est surnommée les Brumes du Sud, pour
n’être arrosée que par les brumes nocturnes et les
torrents puissants qui descendent des montagnes.
Edriwan
Edriwan est un pays au climat délicieux, où la terre,
l’eau et la végétation se mêlent. Les fleuves qui des-
cendent des collines de Fandrayil s’élargissent, mê-
lent leurs multiples bras, laissant quelques îles fixes,
mais surtout des îles flottantes, entourées de flots à
l’insondable fond. Les Deriawin y jouissent d’une
vie souriante. Ils ont bâti leurs maisons sur pilotis ou
sur radeaux, et ils voguent nonchalamment parmi la
végétation abondante, qu’elle soit terrestre ou flot-
tante. Ils embellissent les lieux, peignant le bois de
leurs œuvres, créant des arrangements de fleurs et
de pâtisseries qu’ils laissent partir sur de petits ra-
deaux, et semant les lieux de fenêtres pour le plaisir
Alma - Livre du Joueur.doc - Page 22 - 27.03.2009
de donner des cadres à la beauté naturelle, pour va-
rier les points de vue.
L’eau leur est aussi agréable que l’air, et ils plon-
gent volontiers, ou descendent quelques marches
pour s’y engloutir. Ils y nagent à leur gré, ondulant
parmi les tiges et les feuilles, leurs bijoux dorés
scintillant froidement, verdis par les flots, et les flot-
teurs attachés à leurs cheveux voguant au-dessus
d’eux comme une flottille de joyaux.
Parmi leurs fleurs et leurs jardins flottants, leurs ar-
ches végétales toutes décorées de corolles et de
feuilles, et leurs bois sculptés, ils vivent paisibles et
sereins. Ils sont réputés ne jamais perdre leur calme,
ce qui les rend assez mauvais pour les nerfs de cer-
tains excités… et pour leurs corps aussi, car s’il faut
agir froidement pour éliminer une contrariété, ils le
font. Tout ce qui trouble la paix des lieux finit par
sombrer dans la noirceur des flots, et ne jamais re-
monter… sauf si un regret leur vient assez tôt, et
que quelques bulles signalent une résurgence.
Comme l’eau qui coule sur la chair enflammée, ils
sont toujours d’avis d’apaiser, de consoler, et d’adop-
ter. Ils savent que le monde n’est un lieu de paix que
s’il n’est habité que par des amis, et leurs présents sou-
riants ne donnent aucune envie de se priver de leur
gentillesse. Certes, ils pourraient être volés, mais il
manquerait le charme avec lequel ils savent offrir.
Esh Fangei
Esh Fangei est une vague d’or couvrant une vallée
qui descend en pente douce vers la mer, seulement
entrecoupée d’arbres fruitiers aux troncs couverts de
plantes grimpantes, et entourés de fruits et de légu-
mes. Cet or est celui des blés, car les Fangayi sont
des cultivateurs qui excellent à capturer les énergies
qui parcourent le monde et, quelle que soit leur na-
ture, à les changer en dernier lieu en de l’uriën, la
force de vie. Ils la concentrent et l’accumulent dans
leurs récoltes, en particulier dans les grains de blé,
qu’il soit le blé doré d’été ou le blé d’argent de
l’hiver. De ce fait, ces aliments sont les plus nour-
rissants de l’Entremont.
Ils ne réalisent pas vraiment ce qu’ils font, mais ils
trouvent légitime de trouver un havre, un réceptacle
à ces forces errantes. Aussi leurs doigts chérissent-
ils les petits grains dorés du blé et du maïs, les fruits
qui rendent leurs couleurs aux joues et aux lèvres,
les haricots qui donnent vigueur et endurance, car ils
sont tous les berceaux d’uriën.
Ils adorent leur pays et leurs plantes, et possèdent
une sagesse tranquille qui mêle les mœurs des hu-
mains et des plantes. Ils aiment tisser leurs objets
quotidiens, de perles ou de végétaux, et jusqu’à
leurs maisons, dont les murs sont faits de rotin colo-
ré natté pour obtenir des motifs compliqués, des
damiers et des bandes encadrant leurs fenêtres. Ils
rappellent ainsi que l’uriën est tissée à la matière. Ils
ont cependant quelques bâtiments de pierre, qui da-
tent des anciennes guerres, et qu’ils trouvent très
pratiques, car leur solidité leur permet de supporter
le poids de très nombreux pots.
Ils n’aiment pas la mer, qui dévore les corps et les
esprits, et ne rend pas leur vie, et s’en tiennent écar-
tés. Ils trouveraient dommage que la vie qu’ils ac-
cueillent dans leur pays choyé coule et disparaisse
dans des flots hostiles. Par contre, ils commercent
volontiers, vendant leurs productions aux humains
désireux de bien se nourrir, de savoir enfin quel ré-
confort amène un véritable repas.
Fereshteh
Les Fereshen résident dans une vallée brûlante en-
vahie de sables et hantée de Rêves, de Chimères et
d’images montrant les autres Rivages. Elle est close
d’une Muraille bâtie par la Kerdith voisine, Feril
Melkerdith, qui apprécie peu l’idée que les sables de
Mens et ses armées colorées envahissent leur pays
en dunes silencieuse. Mais les Fereshen ne se sen-
tent pas brimés, car leur vallée est diversifiée par les
apports du Rêve, et ils s’y sentent si bien qu’ils ne la
quittent que rarement. Ils partent pourtant parfois,
pour le plaisir d’aller savourer la différence entre ré-
cit et vécu, toucher le monde du doigt.
Ils résident dans une oasis au pied de la Muraille, où
l’eau venue du Rêve nourrit leurs dattiers, leurs
fruits, leurs légumes. Ils y sont à l’ombre, et y pas-
sent leur vie à discuter, à rire, à s’aimer. Ils adorent
leurs enfants, dont ils savent pouvoir combler la
curiosité, et ils les partagent au point que chaque pe-
tit sait avoir autant d’oncles et des tantes, d’alliés af-
fectueux, que l’oasis compte d’adultes.
Ils quittent le couvert des arbres pour s’aventurer
dans le reste du désert, plus inhospitalier, mais telle-
ment séduisant. Car c’est là qu’ils voient les autres
Rivages et qu’ils croisent des Chimères venues des
Méandres du Rêves, qu’ils savent amadouer en leur
offrant quelque boisson ou mets enchanté. Ils y ap-
prennent parfois aussi à matérialiser leurs rêves, in-
carner leurs désirs, pour survivre à l’aridité croissante
du Désert Profond. Plus ils s’enfoncent, et plus ils
doivent la développer. S’ils en reviennent, ils usent
du rêve même auprès du mur, pour agrémenter leur
vie. Mais certains ne reviennent jamais, ou bien plus
tard, et, souvent, ils sont devenus différents, remode-
lés par la puissance du Seigneur du Rêve.
Mais qu’importe aux Fereshen ? Ils savent parfaite-
ment qu’ils sont en bonne partie des Chimères dès
leur naissance, de par leur sang même, et ils regar-
dent, amusés, celles d’entre elles qui sont pourvues
d’ailes survoler la Muraille et ses gardes dépités
pour aller visiter les Kerdith apeurées.
Alma - Livre du Joueur.doc - Page 23 - 27.03.2009
Halima
Les Halewan ont pour occupation majeure de prendre
du plaisir sans gâcher celui d’autrui. Ils résident sur
Halima, une île au climat agréable, qu’ils ont sa-
vamment aménagée pour qu’elle permette au mieux
une vie idyllique. Halima est un petit paradis : toutes
les plantes désirables y poussent, le climat et les gens
y sont à la fois d’une exquise douceur et d’un charme
pétillant. Les plaisirs y sont pratiqués avec délica-
tesse, d’une cuisine plus que raffinée à la simple
contemplation de la mer, de la jouissance de la sieste
à celle de la chair, car les amours sont nombreuses et
sans douleur ; du plaisir de nouveaux vêtements à ce-
lui de découvrir le domicile d’autrui, car ils ont choisi
les arcades plutôt que les murs, pour partager leurs
terrasses et leurs jardins. Il s’y ajoute les plages, les
terrasses innombrables, les pique-niques entre amis
parmi les forêts épaisses et odorantes de l’arrière-
pays. Et les ekballein, des végétaux dont les fruits
bondissent à travers le pays en quête d’un lieu où se
semer, et offrent au promeneur des poignées des déli-
ces. Ils poussent l’amour du plaisir jusqu’à découvrir
et vulgariser les moindres qualités des cultures hu-
maines, sachant les faire aimer même aux plus
échaudés ; et à importer et accommoder toutes celles
qu’ils désirent pratiquer à domicile.
Leur amour de la douceur de vivre ne les aveugle
pas ; ils restent conscients du fait que tout bonheur
est fragile, et ils consacrent de leur temps à éviter
que des fâcheux ne viennent perturber leur paradis.
Jadis, cela demandait de s’organiser en armée et de
refouler de leur territoire les Mainwarigen et les De-
leíny, car ils ne sont pas protégés par les Rig Shaan-
lek. Mais actuellement, les Halewan ont développé
une solution nettement plus élégante, qui leur
convient parfaitement : Halima est protégée par les
Maisons du Silence, des groupements d’assassins
aux techniques de commando, qui ruinent les plans
d’invasion en éliminant les généraux chargés de les
appliquer, directement à domicile.
Les assassins, avec l’accord du gouvernement, veil-
lent également à éliminer certains politiciens ou reli-
gieux étrangers qui menaceraient la douceur de vivre
dans l’Entremont, et par répercussion à Halima. Ils ne
considèrent pas cela comme une intrusion dans la po-
litique intérieure d’autrui, mais comme un minimum
d’hygiène de vie, et aucune remarque furieuse ou
fielleuse ne les a empêchés de continuer à préserver
leur paradis des folies nées sur d’autres terres. Ils ne
voient pas pourquoi ils vivraient dans la crainte alors
qu’il est si simple de mettre fin à une menace.
Les assassins sont très bien vus, étant des membres
honorables des familles, et ils sont aussi prompts au
plaisir que les autres Halewan. Ils ont en sus celui,
très doux, de savoir qu’ils assurent la survie du pa-
radis, en contrariant des monceaux d’imbéciles in-
capables de s’amuser. Un pur bonheur…
Ilian
Les Iliani sont divisés en deux groupes : les citadins
et les autres. Les citadins ont le don de voir où est
leur intérêt, et de le servir, ce qu’on appelle ailleurs
être égoïste au plus haut point. Pour stabiliser leur
société, ils ont eu le bon sens de décider que le bien
le plus désirable pour un égoïste cupide est l’estime
de ses pairs, et leurs villes sont des chefs-d’œuvre
où chacun montre tout ce qu’il peut offrir avec ce
qu’il a accumulé, par des moyens pas forcément
honnêtes, mais tant qu’ils ne dérangent pas ceux qui
bénéficient de ses largesses, peu importe.
Aussi, les Iliani sont obsédés par la réussite sociale,
et ils recourent à n’importe quel moyen pour réussir
leur ascension. Leur idéal est le Prince Marchand,
qui règne sur un empire ; ou à défaut de posséder
seul l’envergure nécessaire, la Guilde, qui fait aussi
bien, mais à plusieurs. Cupides, menteurs, assassins,
ils ont pour qualité majeure de ne pas nuire à leur
réputation de vendeurs fiables, afin de ne pas faire
fuir le client, car le début de bonheur est pour eux
d’avoir trouvé ce que l’acheteur voulait acheter,
d’avoir comblé un besoin, même s’ils l’ont d’abord
créé de toute pièce… et d’avoir été payés pour cela.
Les autres, du banlieusard à l’habitant des campa-
gnes les plus reculées, sont presque totalement dé-
nués de ce bon sens élémentaire. Ils partagent leurs
surplus au lieu de les vendre, ils accueillent les
étrangers comme des frères au lieu d’ouvrir des au-
berges. Ils vont même jusqu’à offrir sans calcul, ce
qui est absolument répugnant.
Les citadins évitent de fréquenter les tarés, qui pour-
raient être contagieux. Ces derniers ne voient pas
l’intérêt de fréquenter les citadins, et chacun vit sa
vie en laissant l’autre en paix, même si les citadins
médisent des campagnards. Ceux-ci s’en moquent,
et ricanent doucement, car les citadins sont les ci-
bles favorites de Mens, le Dieu Bleu. Ils le mépri-
sent tant, ils l’ont si bien combattu, qu’il ne résiste
pas au plaisir de venir faire muter leur progéniture,
ruinant ainsi le précieux investissement qu’est tout
enfant. Ils n’en ont cure : ils ont mis au point des dé-
fenses très efficaces contre lui, la preuve, c’est que
la situation pourrait être pire et ne l’est pas.
Du fait de la propension de ses citadins à tenter
d’être plus estimés, plus riches, plus réputés, Ilian
est l’un des pays les plus connus. Sa capitale, Me-
lian, est célèbre comme lieu de plaisirs à travers tout
l’Entremont, et son simple nom fait rougir les Vise-
hrein. Cependant, ils viennent également la visiter,
car Ilian sait aussi offrir des plaisirs délicats aux être
pudiques. En fait, Ilian sait fournir n’importe quoi,
tant que le client a de quoi payer. En plus de ces
services souhaités, elle se mêle de tout, au mépris de
tout, tant que cela lui rapporte plus que cela ne lui
nuit. Elle tente même de vendre sa propre culture,
mais personne, pour l’instant, ne s’est porté acqué-
reur. Peu importe, elle persévère, convaincue que
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c’est une bonne affaire, qu’il ne faut pas brader,
mais savoir faire apprécier et envier.
Malgré la division très nette qui scinde leur popula-
tion, les Iliani n’ont pas choisi de nom pour désigner
séparément les citadins et les autres, car avant tout,
ce sont tous des Iliani : ils aiment les mêmes pom-
mes, ont la même larme à l’œil devant un verger et
surtout devant les ondulations verdoyantes de leur
pays à eux et rien qu’à eux. Ils échangent donc avec
un bonheur toujours renouvelé les pommes, poires,
coings, farines, crèmes, raisins, épices, et autres
denrées absolument indispensables à la vie civilisée.
C’est tout dire : ils n’en vendent que le surplus, car
il faut bien avouer que l’argent qu’ils gagneraient
n’égalerait jamais le plaisir de leurs sens, et celui
d’être seuls à jouir de si fabuleux produits.
Bref, les Iliani sont parfaitement fréquentables tant
qu’on a de quoi être leur client plutôt que leur victime,
pardon, l’objet de leur tentative pour nous rentabiliser.
Ilker Ilinith
Les Ilithin se sentent totalement dépossédés quand ils
donnent quelque chose, même si c’est petit, même si
c’est misérable : c’est à eux. Même l’idée de prêter,
de partager, leur fend le cœur. Ils sont d’un égoïsme
quasiment suicidaire, refusant toute concession à au-
trui, même au nom de la survie de leur société.
L’intérêt commun ne les concerne pas. S’ils doivent
mourir parce que nul ne leur doit rien, ils sont prêts à
payer ce prix. De toutes manières, celui qui paie de sa
vie a fini de se plaindre. Cependant, ils savent
qu’Ilian, leur plus proche voisine, se passerait bien
d’eux, et chacun d’entre eux étant capable de rester
en vie rien que pour priver autrui du plaisir de les voir
mourir, ils sont toujours là. Priver autrui est encore un
peu plus doux que de ne rien lui donner.
Les Ilithin ne sont pas de grands commerçants, car
ils ne tiennent pas à thésauriser. Tout avoir pour
eux-mêmes ne les intéresse pas, de toutes manières,
cela équivaudrait à être volé en permanence, à
moins de tuer tous les Alemdar. Non, ils veulent
seulement ne jamais rien donner à autrui. Jamais.
Même par calcul, ou alors uniquement s’ils sont cer-
tains que cela lui coûtera assez cher pour que ce soit
gratifiant. Ils détestent investir, ils n’aiment guère
risquer de perdre, ils préfèrent rester sobres, impos-
sibles à lier par le désir ; mais surtout, ne rien pos-
séder, c’est ne rien risquer de partager.
Ils vivent aux alentours d’un sommet appelé la Cou-
ronne, situé dans l’arrière-pays d’Ilian. Les Iliani
prétendent que les Ilinith leur doivent un loyer, et
les Ilinith rétorquent que la taxe sur l’eau qui des-
cend de leurs montagnes n’a toujours pas été acquit-
tée. Leurs relations incluent le commerce bien pen-
sé, l’humiliation, et des tentatives d’exploitations
aussi complètes que possible.
Quant aux étrangers… Ilker Ilinith déploie une
énergie considérable pour leur extorquer des droits
de passage, des taxes pour avoir respiré son air, pié-
tiné son herbe, déplacé ses cailloux, humé le parfum
de ses fleurs. Peu importe que cette technique ne
leur rapporte presque rien : c’est pour le principe, il
ne sera pas dit qu’ils ne se seront pas battus pour ré-
colter leur juste dû. C’est à eux, tout de même, ban-
des de voleurs ! Ah, quel travail pour faire de cha-
cun un honnête homme ! Et on dit que les humains
vivent dans un paradis ? Quelqu’un a dû oublier de
regarder les tarifs.
Kergandai
Kergandai est une immense plaine aux couleurs va-
riées, parfois verte, parfois jaune, parfois rousse ou
même rouge, herbeuse, moussue, buissonnante.
Rien ne vient y arrêter le regard, sous la voûte bleue
du ciel. On y voit de très loin les vastes nuages d’un
soir, à la large base grise striée de blancheur, au
sommet moutonneux plus éblouissant que neige. On
ne peut y manquer les fronts sombres, presque noirs,
les murs de pluie vastes comme l’horizon.
Là, les Gandraki nomadisent paisiblement, en com-
pagnie d’animaux qu’ils aident et qui les assistent
en retour. Ils ne se voient pas comme des éleveurs,
mais comme des gens heureux de pouvoir jouir
d’une agréable compagnie. Les hommes y excellent
à s’allier les animaux, même échaudés, même bles-
sés, car rien en eux n’évoque l’ennemi. Ils savent
également leur parler, malgré leurs différences. Cer-
tes, ils ne feront pas de philosophie éthérée, mais
pour les concepts simples, famille, honneur, patrie,
sens de l’existence, cela suffira bien.
Les femmes sont responsables de la production de
biens, et de leur accumulation à titre de réserves. El-
les ont un coup d’œil exceptionnel, qui leur permet
de distinguer parmi les mottes les moindres pépites
ou pierres précieuses. Elles en forgent des coiffes
imposantes qu’elles portent avec légèreté, car la ri-
chesse utile ne leur pèse jamais.
Passé l’essentiel, les Gandraki ne songent plus aux
biens matériels, ils se contentent du ciel, de l’herbe
qui ondule jusqu’à l’infini, de la reconnaissance des
animaux ravis de la manière dont leurs cornes ont
été tressées, et du plaisir de se rencontrer. S’ils no-
madisent par petits groupes, ils se réunissent régu-
lièrement pour revoir leurs amis et croiser l’âme
sœur, dans ce qui a été nommé les Villes Fantômes,
car hors les périodes de rencontres, seuls des murets
en marquent l’emplacement. Mais lors des réunions,
chacun fiche ses mâts en terre, et bâtit une maison
de feutre. Alors, les femmes rencontrent les curieux
et les marchands et elles se tiennent au courant des
affaires du monde. Si elles sont la patience de parler
aux petits encore écervelés, elles sauront bien parler
à ceux des humains qui ont confondu culture et
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complication, raisonnement et cercle vicieux, Sa-
voir-vivre et folie. Les hommes, eux, les évitent.
Si la plupart des Gandraki se contente de cheminer,
certains ont pris exemple sur le vent, et ils font la
course aux nuages, soit en courant eux-mêmes, soit
en s’étant alliés à des coursiers réels ou surnaturels.
Pour eux, l’horizon est devenu un voisin, et ils ser-
vent de messagers, quand la communion des cœurs
ne suffit pas. Leurs rires triomphants ne troublent pas
leurs pairs, il y a de la place pour tous sous le ciel
immense… ou presque : s’il vient un étranger dont
les pensées de meurtre ne s’en vont pas avec le vent
courant, les Gandraki s’installent sur les tertres qui
parsèment la plaine, et sur lesquels l’eau reflète le
bleu du ciel. Là, ils s’asseyent et ils méditent, deman-
dant que l’intrus devienne « poussière dans le vent,
brin vert dans la prairie, goutte aussitôt bue, qu’il soit
solitaire comme le fantôme de ceux qui n’ont pas eu
le temps de se raffermir de liens ». Et l’intrus perd
alors son existence physique, du moins à Kergandai,
où il ne perçoit plus rien de vivant. Il foule des terres
désertes, celui qui veut détruire… mais il est libre de
quitter le pays et de retrouver sa chair.
Lain Liriel
Les Elerin habitent à flanc de montagne une région
verdoyante qu’ils ont nommée Lain Liriel, ou les
Jardins du Dieu. Ils l’ont aménagée en un immense
jardin où les fruits côtoient les fleurs, les pierres et
les ruisseaux tourbillonnant de marmite en marmite.
Si sa beauté est grande pour celui qui s’y promène,
sa splendeur n’apparaît pleinement que vue des ci-
mes lointaines de la montagne. En effet, les Elerin
sont convaincus que ces sommets hébergent la my-
thique Daï Loriel, où résident les plus grands des
Alemdar servant Graeyven, le Dieu de Bonté. Ils
n’ont pas le courage d’aller regarder eux-mêmes sa
splendeur en face, craignant d’être choqués par leur
imperfection soudainement révélée par la comparai-
son ; mais ils espèrent pouvoir le soutenir néan-
moins, en offrant à ses serviteurs le plaisir d’une vue
sur les beautés de leur jardin. Ils disent que le dieu
lui-même parcourt parfois les crêtes, souriant devant
la merveille qu’ils ont patiemment générée, heureux
de voir que des mortels songent à lui avec amour.
Dans leurs rapports avec les humains, les Elerin
choisissent également le soutien et la modestie, non
dans leur investissement, mais dans leur comporte-
ment. Ils cultivent patiemment des plantes médici-
nales qu’ils envoient à ceux qui en ont besoin, celles
qui apaisent la douleur, celles qui calment les ter-
reurs, et tant d’autres. Elles portent en elles
l’efficacité surnaturelle des Aubes de leur jardinier,
et leurs corolles rayonnent une lueur délicate qui
s’étend sur le patient, apportant le soulagement.
En cas de problème à l’étranger, ils rappellent com-
bien ceux qui souffrent étaient chéris, ils poussent à
agir pour les sauver plutôt que d’entamer leur deuil
sans avoir rien tenté ; et ils offrent leurs conseils
pour résoudre les problèmes de logistique. S’il leur
est reproché de n’être que des jardiniers retirés du
monde, ils pointent un doigt vers le ciel, en souriant,
car ils sont les seuls humains à avoir poussé l’art du
modelage végétal au point de créer des dirigeables
dont le tonnage leur permet aisément de ravitailler
les zones de l’Entremont en difficulté. Ils savent se
donner les moyens d’aider.
Les Elerin tiennent à leur terre, à leur tranquillité,
mais ils ne considèrent pas que cela implique de fuir
le monde. Ils le gardent dans leur cœur, et aident qui
en a besoin. Ils se voient comme les petites mains de
Graeyven, cheminant très lentement sur la voie de la
sagesse et de la bonté, sans chercher l’illumination.
Ils préfèrent évoluer à leur rythme, et si la lumière
éclôt en eux, ils ne l’éteindront pas.
Ils pensent que le Dieu de Bonté n’est pas un ingrat,
car il leur semble bien que les pires ennuis évitent
leur pays, que les extrémistes du Dédale et de La
Confluence les laissent en paix. La nuit venue, ils cé-
lèbrent leur joie d’avoir si bien vécu un jour si parfait
en traçant des chemins de feu coloré à travers le pays,
et en illuminant le ciel de feux d’artifice immenses et
florissants. Pour eux, l’amour est une couleur, la gra-
titude un arc-en-ciel, et ils en peignent la nuit.
Lotsheven
Les Tshaven vivent dans la Face Rousse, une monta-
gne couverte d’une forêt de mélèzes, sèche et chaude.
Elle semble inhabitée, à l’exception de lanternes de
pierre, d’escaliers et de sources aménagées ; mais elle
est parsemée d’habitations savamment camouflées.
Certaines abritent un solitaire, d’autres une famille,
d’autres enfin des groupes organisés. Toutes incluent
un atelier et des lieux d’entraînement, car les Tshaven
adorent épater et être épatés, par les techniques de
combat, l’acrobatie, les jeux de lumière et les effets
spéciaux en tout genre.
De ce fait, ils préparent chaque année leur contribu-
tion au Tournoi du Lac Gelé. L’idée est d’inventer
une nouveauté qui émerveillera le public, tout en se
cachant pour éviter le plagiat ; les groupes profitent
de leur nombre pour préparer des spectacles choré-
graphiés avec soin. S’ils manquent d’idées, ils se
rendent tout au couchant de leur pays, à la falaise
qui surplombe Fereshteh, et ils observent les mani-
festations du Rêve jusqu’à être inspirés.
Même s’ils n’ont rien trouvé, ils viennent pour le
plaisir d’être stupéfaits par les réalisations de leurs
pairs, et s’en inspirer pour l’année suivante. Leur in-
capacité à participer ne les attriste pas, ils ont eu le
plaisir d’expérimenter et cela leur a suffi, car ils sa-
vent s’amuser aussi bien de la qualité de leur succès
que de l’ampleur de leur échec. À défaut d’être épa-
tés… ils sont hilares devant les résultats de leur ten-
tative, ou de celle du voisin qui vient de démolir sa
maison. En effet, leurs recherches sont parfois dé-
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raisonnables, mais ils peu leur importent les consé-
quences, tant qu’ils peuvent appeler assez d’uriën et
de matière pour réparer eux-mêmes et la nature ; et
tant qu’elles n’impliquent pas les dieux, car ceux-ci
ne savent pas rigoler : comment s’amuser avec des
gens qui vous forcent à les servir plutôt que de vous
laisser gambader et n’agir que selon votre fantaisie ?
Ils voyagent volontiers, en quête d’inspiration et
d’étonnement. Ils sont stupéfaits de voir des confor-
mistes fiers de l’être, et ils restent perplexes face à
ceux qui se vantent d’obéir à un maximum de règles
et de les appliquer scrupuleusement. Cependant, ils
n’y changent rien, chacun est responsable de vivre li-
bre ou englué dans une société. Ils ne font que passer,
curieux et furetant, et même si la situation tourne
mal, ils restent de bonne humeur, car quoi qu’il
puisse advenir, ils trouveront un moyen de s’amuser.
Et s’ils doivent se faire tuer, ils espèrent que ce sera
par quelqu’un dont les compétences les épateront.
Lycomènia
Les Lycomènes sont des gens sérieux et responsables
qui s’impliquent tous dans les affaires de leur pays,
pour assurer à chaque citoyen le bien-être. Ils nom-
ment cela la Réalité ; c’est un socle indispensable pour
pouvoir goûter à la paix, car tous les éléments inquié-
tants sont réglés. En fait, ils font cela si efficacement et
si rapidement que nul ne les connaît pour cela.
Car tout le reste de leur temps est consacré à la Fan-
taisie : insatiables curieux, ils aiment regarder le
monde, prélever les éléments qui les inspirent, puis
broder tout autour pour obtenir un récit savoureux
qu’ils partagent avec leurs pairs. Leur but n’est pas
d’abuser, mais de divertir ; et si le public, bien que
cultivé, ne voit plus la frontière entre le matériau ré-
el et les ajouts, ils en sont ravis. Ils ne sont nulle-
ment des menteurs, mais des sauveurs : si un van-
dale a permis au monde d’être ennuyeux, grâce à
leur tri et leurs ajouts, voilà que tout ce qu’ils ra-
content est brillant et bien trouvé. Enfin, l’auditoire
est sauvé de l’ennui et de la déception.
Ils aiment leurs pieds, qui leur permettent de courir
le monde, et leurs yeux qui leur dévoilent les lieux
et les mœurs. Ils aiment leur peau dorée comme le
miel et douce comme le satin, qui leur ouvre les
cœurs, les lits et les archives. Ils aiment les boucles
de leurs cheveux, qui les gardent du feu du jour. Ils
aiment leur nez, qui amène jusqu’à eux les senteurs
intenses de leur pays de buissons odorants et de
baies savoureuses. Ils aiment leurs doigts qui récol-
tent les raisins dont ils feront un vin qui libère cha-
cun de sa timidité. Mais la parole est leur bien le
plus précieux, et ils ont pris toutes les mesures pour
que chacun puisse se cultiver et devenir un conteur
passionnant, qui remplira les Cercles de Parole qui
parsèment leur pays.
Et c’est le charme majeur de la compagnie que de
permettre de commenter et de partager toutes ses
expériences, que ce soit la vue des monstres qui
hantent les mers bordant l’une de leurs péninsules,
les vers épars qui parsèment les rues de leur ville-
poème, ou le parfum d’une galette semée d’herbes
et d’olives. À quoi bon vivre, si personne ne se ravi-
ra du récit de nos jours ?
Mjenogoï
Les Negejii chérissent par-dessus tout le fait d’être li-
bres d’aller où bon leur semble et de regarder le monde
comme il leur plaît. Ils détestent être assignés à rési-
dence, respecter une frontière, expliquer ce qu’ils font
là, et s’abaisser devant quiconque. Ils ont matérialisé
cet amour en devenant d’excellents éleveurs et de par-
faits cavaliers. Ils ne se sont pas cantonnés aux espèces
connues, mais ont dressé tout ce qui pouvait l’être dans
leur pays, avec douceur et intelligence, car l’animal est
un allié, non un esclave. Puis ils ont échangé leurs sur-
plus de montures contre des variétés venues d’autre
pays. Ils n’ont pas hésité à traiter avec les cargues et
avec les croyants pour étendre encore leur assorti-
ment ; et ils procèdent à des croisements audacieux, au
point que certains d’entre eux sont devenus des centau-
res, pour que leurs propres pieds, changés en sabots,
fassent chanter le sol quand ils courent.
Ils aiment chevaucher, mais également pratiquer la
voltige, mêlant en un seul être le coursier et l’oiseau, le
vent et leur rire. Ils parcourent Hai Keraishii, la grande
plaine qui s’étend dans leur arrière-pays, jusqu’aux
montagnes lointaines.
Ils se sont également installés à Ka Sirgah, un plateau
de haute montagne où ils connaissent une autre forme
de liberté, cachés sous des amoncellements de neige
dans lesquels ils forent des galeries pendant que la
tempête hurle.
Finalement, certains d’entre eux vivent dans le Denlis,
des terrasses côtières au climat humide et doux, qu’ils
parcourent accompagnés d’arbres qu’ils dressent
comme d’autres des campements. Sur les écorces sui-
vent en grappes les plantations maraîchères, les pi-
ments pendant des branches, les poivrons colorés vau-
trés parmi les racines.
Ils voyagent parfois, pour aller vérifier si une rumeur
d’existence d’une monture inconnue est une réalité ;
mais également pour punir ceux qui auraient maltraités
la monture negejii qu’il aurait achetée. Leurs animaux
sont considérés comme des enfants, un peu demeurés,
mais si beaux, et leur possession n’inclut jamais le
droit de les maltraiter.
Reia Tidjani
Les Redza ont l’immense chance d’habiter Reia Tidja-
ni, une île artificielle que leur a offerte Aurys, Hiérar-
que de l’Économie, garant de la juste distribution des
biens. Ils en ont fait le centre financier de l’Entremont,
conjonction des prêts les plus généreux, des coffres les
plus sûrs, et entrelacs savamment disposé de boutiques
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fabuleuses où sont disposés de parfaite manière tous
les biens souhaitables. Leur art de l’emballage, de la
marque convoitée pour sa rareté, font préférer leurs
magasins à ceux d’Ilian – même s’ils sont livrés par les
navires des Princes Marchands.
Malheureusement, la sérénité des Redza n’est pas par-
faite, car leur caractère n’appartient pas uniquement à
Aurys : il est soumis, au moins autant, à l’influence de
Danakin, Écho du Profit, adversaire mortel d’Aurys.
Conscients de ces deux tendances totalement oppo-
sées, les Redza tentent de les faire cohabiter sans frois-
ser irrémédiablement l’un de leurs encombrants pro-
tecteurs divins.
Leur tactique favorite est de rester en excellents termes
avec Alma, la Déesse Terre, leur Mère à tous. Ils veil-
lent à la compter parmi leurs clients privilégiés, et ils y
parviennent, car ils savent réunir et présenter toutes les
fanfreluches qui la font rêver, et qu’ils sont très doués
pour complimenter une cliente quant à la perfection de
ses choix. Elle leur fait la grâce de signaler à leurs
deux parasites divins que toute désorganisation de son
magasin favori aurait des conséquences graves.
L’autre, qui leur semble à raison plus délicate et moins
efficace, est de ménager le Hiérarque et l’Écho. Ils ten-
tent de contenter Aurys en supervisant le développe-
ment des nations les plus arriérées, ou la reconstruction
de celles qui ont subi un assaut divin. Ils sont très
doués pour rendre une zone improductive apte à géné-
rer des richesses ; ils savent optimiser les méthodes
pour offrir l’aisance à chacun, et mieux, dégager un
surplus qui pourra être consacré à leur acheter des
biens.
Quant à servir Danakin… c’est facile, c’est gratuit, il
suffit de céder à ses pulsions profondes, et d’une fan-
taisie, perdre sa fortune sur un risque de trop. C’est
presque irrésistible : l’affaire la plus tentante est tou-
jours la suivante, d’autant plus qu’ils ne stigmatisent
jamais leurs amis qui ont fait faillite : l’essentiel n’est
pas ce qu’on possède, mais la vitesse à laquelle on re-
fera fortune. Celui qui sait s’enrichir n’a plus de raison
de s’inquiéter, il fermera bientôt sa friterie pour retrou-
ver sa place dans la haute finance.
Un record national est Nerandzi, un puissant adorateur
de Danakin devenu Cardinal d’Aurys, parce qu’il pen-
sait être plus en sécurité ainsi. Il n’est plus sûr que cela
ait été une bonne idée, mais il n’a pas trouvé de moyen
de démissionner, il est plébiscité élection après élec-
tion pour sa carrière exemplaire, qui symbolise la dua-
lité des Redza, l’appétit féroce qui les anime ; et pour
sa capacité à ne pas devenir totalement fou malgré
qu’il soit pris entre deux dieux hostiles. De toutes ma-
nières, il commence à prendre goût au bon et au mau-
vais usage de sa puissance, et sait assez bien ménager
la chèvre et le chou (ne lui demandez pas lequel cor-
respond à quel dieu, il ne veut pas d’ennuis).
Les Redza sont donc assez contradictoires, mais
qu’importe ! Faire et défaire, c’est toujours du travail,
le tout est d’être payé. Et puis, si on se contre soi-
même, on n’est pas surpris comme si c’était un indéli-
cat qui sabotait notre affaire. On se dit seulement
qu’on aurait tellement aimé craquer… juste un peu
plus tard.
Rig Shaanlek
Les Rig Shaanlek sont un archipel qui forme un arc au
large de la côte langayi, s’étendant d’Ilian à Esh Fan-
gei et ne laissant à découvert que Nalith et Halima. Les
îles sont fortifiées et habitées par les Dagornim, ou
Chevaliers de l’Archipel, qui se sont voués à la dé-
fense des Kerdith Langei contre les Mainwarigen et les
Deleíny. Les Rig sont le Rempart des Kerdith, les
Chevaliers sont considérés comme des Héros Natio-
naux, et tout Langayi sait reconnaître leurs cheveux
bleus et le grand manteau pourpre qui leur sert
d’uniforme.
Les Chevaliers forment une hiérarchie militaire et reli-
gieuse, car une parfaite organisation et le soutien des
dieux sont indispensables pour repousser des croyants
fanatiques. Ils peuvent être mariés, parents et grands-
parents ; et ils vivent en compagnie de civils qui for-
ment avec eux une société où tout a été fait pour en-
courager la solidarité, la fidélité, la fiabilité, le dyna-
misme, le respect de la vie et le courage de mourir si
c’est indispensable. De ce fait, chaque Dagornim peut
avoir confiance en tous ses pairs.
Leur architecture permet aussi bien la défense efficace
qu’une vie agréable, car ils savent se ménager pour du-
rer : plus l’effort demandé est important, plus la vie
doit être attachante, plus les loisirs doivent réparer, re-
poser, rendre l’énergie. Ils ne se voient pas comme des
chandelles que l’adversité consume, mais comme des
chênes dont l’écorce se renforce, la ramure s’étend, et
qui tiendront bon face à des vents de plus en plus puis-
sants. Certains meurent, mais leur souvenir survit chez
leurs amis et le rouge de leur sang versé est rappelé
dans chaque manteau. Mourir précocement ne les at-
triste pas, car c’est un prix qu’ils ont accepté de verser
si nécessaire, et qu’ils ont la joie de savoir que leur
mort permet la vie paisible des Dagornim civils et de
tous les autres Langayi.
Les Rig Shaanlek accueillent les jeunes Langayi les plus
turbulents, et une carrière de Chevalier leur permet de
satisfaire leurs envies de combat tout en étant utiles à
leur patrie. Ce ne sont pas les seuls renforts, car leur
mode de vie séduit d’autres esprits en quête d’une vie
plus dure, mais plus unie ; même s’ils ne sont pas atta-
chés aux Kerdith, les Rig elles-mêmes méritent d’être
sauvées, parce qu’elles ne comptent ni tricheur, ni profi-
teur, ni lâche, ni menteur. Tous sont libres de quitter les
Rig si une vie plus calme les tente, même s’ils y sont
nés, et des Chevaliers arborant fièrement leurs cheveux
bleus et leur grand manteau pourpre peuvent s’être ins-
tallés hors des Rig. En cas de besoin, ils peuvent se sou-
venir de leur vie martiale, et prêter main-forte.
Les autres Kerdith sont conscientes du prix de leur
tranquillité ; elles ont coopéré pour que les Rig Shaan-
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lek soient aussi bien conçues que possible, et qu’elles
le restent. Chacune fournit au Rempart ce qui peut le
soutenir au mieux, et Ilian se fait un point d’honneur
de livrer ce ravitaillement en y joignant le sien, voire
de remplacer les produits qu’elle juge insuffisants ou
de les compléter. Bien sûr, elle s’en vante, mais les
Dagornim s’en moquent, car ils ne se font pas
d’illusions sur ceux qu’ils protègent.
Shakyeno
Les Ashakin sont profondément irrités par les imbéci-
les qui ne savent pas se contenter de vivre heureux
comme chouchous d’Alma, et qui tentent d’ennuyer
leurs voisins pour se croire puissants. Comme ils ne
sont pas du genre à rester chez eux et à se plaindre sans
rien faire, même s’ils savent insulter avec un talent in-
déniable, ils forment la cavalerie de l’Entremer. Ils
quadrillent les flots et coulent sans devis préalable tout
navire qui empêche autrui de voguer comme il
l’entend, c’est-à-dire les Mainwarigen, les corsaires
deleíny et même les envahisseurs venus d’Outrerivage,
s’ils se risquent à leur portée. Cette activité leur
convient parfaitement, car ils aiment contrarier, et ils
adorent la mer, qu’ils côtoient autant que possible, au
point d’avoir appris à flotter, pour ne plus jamais
craindre de couler. Ils préfèrent de loin s’ouvrir une
boîte de pâté sur le ventre et la déguster tranquillement
que de nager courageusement en attendent les secours.
Sachant qu’ils affrontent des fanatiques, ils sont passés
maîtres dans l’art de la sculpture blasphématoire. As-
sistés de leurs psychologues et de leurs théologiens, ils
ont décoré leurs vaisseaux de guerre de portraits de
dieux si immondes qu’ils suffisent à choquer leurs
adorateurs et les laisser immobiles le temps que les
Ashakin les fendent en deux d’un bon coup de hache.
D’autre part, leur style iconoclaste dissuade de véné-
rer, en retirant tout sacré : il est très difficile de conti-
nuer à nommer sans rire un dieu qu’on a vu si ridicule,
même en effigie. Ils traduisent en nausée esthétique et
physique la nausée morale que les dieux causent aux
gens sains d’esprit. Grâce à eux, leur aspect est aussi
laid que leur âme, le portrait est enfin honnête.
Dans l’éventualité où un fanatique n’aurait pas la
chance de les croiser en mer, il pourrait se rabattre sur
leur pays, car ils ont décoré de la même manière tous
leurs ports, afin de bien accueillir leurs visiteurs les
plus crispés. L’intérieur de leurs villes et de leurs mai-
sons, lui, montre que leur art de la sculpture ne se li-
mite pas à causer des états de choc, mais sert égale-
ment à embellir les lieux, à réjouir les cœurs par un feu
d’artifice de couleurs. Et pour ceux qui seraient plus
délicats, les Ashakin fabriquent eux-mêmes des mou-
les, dans lesquels ils coulent de la gelée délicatement
parfumée de violette ou de rose. Ils aiment voir la
forme d’une danseuse du ventre trembloter comme ils
dansent, leur assiette à la main, parmi les cris de joie,
les chansons satiriques, et les meuglements des buffles
géants que les petits derniers ramènent en les traînant
par la queue, en guise d’entraînement. C’est qu’il en
faut du muscle pour fendre proprement un crâne de
croyant !
Vargeeld
Les Visehrein habitent Vargeeld, une île située dans
la Douce Enlacée, une mer intérieure protégée des
importuns par la cavalerie des mers. Profitant de
cette paix, ils se sont voués à l’essentiel, à savoir
aménager leur île jusqu’au dernier recoin et la chan-
ger en parc géant où chaque point de vue est un ra-
vissement. Ils ont aplani les reliefs trop rudes, ils ont
modulé la pousse des arbres pour que leurs formes
soient attachantes, et ils ont privilégié les espèces
ravissantes dépourvues d’épines et dont le parfum
léger n’incommode aucunement. Ils ont supprimé
les irrégularités du sol pour pouvoir flâner sans re-
garder ses pieds de crainte de trébucher. Ils ont clô-
turé les parterres les plus délicats pour bien signifier
que rien n’est supposé être piétiné, et ils ont tous
appris à manier la rapière pour traduire les instruc-
tions à ceux qui ne comprennent que la violence.
Comme il serait inconvenant de ronfler sur un banc
dans un si joli parc, ils bâtissent des maisons aux fa-
çades magnifiques, cascades de végétaux, fantaisies
de pots vernissés et sculptés, et dentelles délicates
voilant les fenêtres, car ils tiennent beaucoup à leur
intimité. S’ils n’ont pas de quoi achever une maison
entière, ils commencent toujours par la façade, pour
ne pas déparer leur pays, quitte à vivre sous tente
derrière et à utiliser une échelle pour sembler arroser
par les fenêtres, en bons voisins respectueux des
mœurs.
Ils sont petits, blonds, tendres, et pudiques au point
de se couvrir pour d’autres raisons que la tempéra-
ture un peu fraîche, ce qui est très étrange. Ils au-
raient décidé que certaines zones de leur corps ne
doivent pas être montrées, et ils rougissent si fort
quand on songe à les voir qu’ils restent en général
chastes à l’étranger. Par ailleurs, ils font une fixation
sur la propreté, mélangeant les éléments naturels qui
tachent et les tendances vicieuses dans le caractère :
quelqu’un qui ne nettoie pas ses ongles n’a sûre-
ment pas pris la peine de purger en lui la convoitise,
la haine, la concu, la cucul, enfin bref le désir in-
convenant pour la femme de son voisin. Enfin, que
les fleurs soient cueillies par leurs propriétaires et
tout se passera bien !
Heureusement, leur honnêteté n’est pas froissée par la
vue de criminels, car ceux d’entre eux qui auraient
quelques tendances peu convenables émigrent par res-
pect pour la beauté de leur pays natal. Ils s’engagent
même à ne pas rappeler, dans l’exercice de leurs fonc-
tions asociales, qu’ils sont des Visehrein.
C’est que ce n’est pas tout d’avoir embelli les lieux,
de les avoir parsemés de maisons fleuries, d’avoir
travaillé dur pour créer des intérieurs chaleureux et
des recettes savoureuses qui ravissent les ventres et
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rosissent les joues : il fallait encore mettre sur pied
un consensus social pour que leur œuvre dure dans
les siècles des siècles, car travailler pour assister à la
destruction du résultat ne les intéresse nullement. En
plus, ce serait humiliant, il faudrait encore supporter
les moqueries des indélicats. Comme si le fait d’être
petit et timide ne suffisait pas !
Malgré leur crainte d’être ridiculisés, ils accueillent
très volontiers les étrangers désireux de venir admi-
rer leurs fleurs, leurs dentelles et leurs broderies ; et
rougir eux aussi quand les femmes battent des cils,
ou jurent abondamment parce qu’un abruti enivré de
genièvre a marché sur leur beau plancher fraîche-
ment nettoyé. C’est qu’ils sont convaincus que la
douceur et le courage s’apprennent par l’exemple et
par l’admiration des résultats obtenus par leur bon
usage. Ce serait peut-être vrai s’ils bégayaient moins
après toute remarque choquante, par exemple :
comment font les escargots pour éteindre la lumière
avant de faire l’amour ? ; et s’ils ne se vexaient pas
quand ils ont l’impression qu’on se moque d’eux.
Allons donc ! Qui taquinerait un peuple dont les su-
jets de conversation préférés sont le meilleur âge
pour un premier mariage et la composition exacte
du terreau pour tulipes ?
D’ailleurs, ceux qui les connaissent et les supportent
n’en disent que du bien. À défaut de donner leur
corps à tout autre que leur fiancé (sauf usage déloyal
d’aphrodisiaques et s’il vous plaît, d’un trou de
mémoire pour qu’ils ne meurent pas de honte), ils
vous apportent volontiers leur aide, leur courage in-
flexible et leur fidèle épée, pour peu que votre cause
soit juste et qu’elle ne les choque pas.
Vesnejhian
Les Venejhian ont, comme tous les Langayi, com-
battu jadis Mens, le Seigneur du Rêve. Mais ils l’ont
fait comme éclaireurs, car ils ont tant aimé ses cou-
leurs qu’ils ont désiré le voir autant que possible. Ils
ont été loués pour leur courage, alors qu’ils étaient
simplement fous d’admiration. Ils ont, autant que
possible, laissé fuir les Chimères capturées, ne leur
demandant qu’un peu des fabuleuses soieries dont
elles étaient vêtues.
Quand la guerre a été gagnée et les Chimères pétri-
fiées, ils ont pleuré, car la beauté était vaincue, étouf-
fée sous la pierre. Ils ont cherché comment la garder
auprès d’eux, car la vue de Mens leur avait laissé une
affection irrépressible pour les couleurs saturées.
Ils ont trouvé : ils sont devenus capables de tisser les
soies chatoyantes qui vêtaient les Chimères, de les
plisser à leur gré pour embellir leurs reflets, de les
broder d’or. Ils ont appris à créer les pigments les
plus divers, et des méthodes parfaites pour les fixer à
l’étoffe. Ils ont entouré leurs villages de murets lisses
entourant une mosaïque de bains de tentures, et ils
décorent leurs villages clairs des soieries qu’ils ont
créées. Ils parcourent sur des échasses, masqués
comme d’étranges oiseaux, les croûtes et les flaques
de la Mer Salée qui occupe leur pays, et ils récoltent
les sels dont ils ont besoin pour teinter leurs étoffes.
Ils ne se lassent jamais, car à mesure que leur palette
s’étend, ils y discernent mieux les vides : ne manque-
t-il pas un bleu, légèrement plus mauve, à côté de ce-
lui-ci ? Ne pourrait-on pas imaginer un fuchsia qui se
marierait mieux à l’orange ? Et n’y a-t-il pas encore
un canal à creuser pour porter dans la ville cette fleur
de cire parfumée qu’ils viennent juste d’allumer ?
Certes, même s’ils sont certains parfois d’avoir
plongé la main jusque dans les réserves de couleur
du Seigneur du Rêve, ils ne jouissent plus d’une
splendeur aussi fabuleuse que jadis. Mais ils com-
plètent ces expériences par le goût des saveurs in-
tenses, une aversion pour le fade et le dilué.
Et leur vie s’écoule dans leur plaine blanche illumi-
née de jour, bercée par la danse de l’air surchauffé,
rythmée des craquements de la croûte de sel.
Zelvani
Les Zelvani considèrent qu’Alma est une incapable
et que son œuvre, l’humanité, est la plus ratée des
créations divines qu’ils aient eu le malheur de voir.
Ils ne prétendent pas que n’importe quel cargue vaut
mieux, mais ils sont certains que beaucoup sont bien
plus réussis. Ils ont donc travaillé pour devenir di-
gnes d’un dieu plus valable que la Déesse, et ils ont
été remarqués par Lankshatka, le Seigneur du Men-
songe, seul détenteur de la Vérité et donc seul à
même de juger réellement de la valeur des Çandir. Il
les a accueillis, et ils se sont remis à son grand sa-
voir pour qu’il les améliore, les élevant au-dessus de
la médiocrité et l’inefficacité dans laquelle croupit
l’humanité débile de naissance. Ils ne sont pas de-
venus des cargues, non ; mais ils ont enfin un but et
les moyens et méthodes de l’atteindre.
Ils ont appris que Lankshatka possédait déjà un
peuple, les Siriadan, qui lui servaient de collecteurs
d’information. Ils n’avaient donc pas besoin de
s’atteler à cette tâche monotone. Ils ont donc eu la
joie de se voir confier une autre mission, bien plus
intéressante : bâtir toute une société où chacun ex-
cellerait à mener sa vie tout en produisant un maxi-
mum de mensonges. Ils adorent cette expérience
collective, et mesurent hardiment quelle proportion
de mensonge une société peut assumer avant d’avoir
d’énormes problèmes. Ils observent avec intérêt les
dysfonctions locales et les incidents causés par ceux
qui pensaient en savoir assez, et ils sont passés maî-
tres dans l’art de corriger le tir très rapidement, ainsi
que de limiter la casse.
Ils sont considérés comme fous par la majorité des
autres humains, mais l’opinion des ignorants leur
importe peu. Ils savent ce qu’ils valent, et aucun
humain qui n’a pas ressenti avec leur lucidité
l’ampleur de sa nullité ne sait de quoi ils parlent.
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Peu désireux d’être importunés par des fanatiques
ou des crétins honnêtes qui ne comprennent pas la
grandeur de leur projet social, ils se sont installés
sur une île située très au sud, près de Grande Île et
de la Terre du Levant. De plus, ils l’ont aménagée
de façon à ce que la vie y soit difficile pour tout au-
tre qu’eux : l’île est le cratère partiellement détruit
d’un volcan, et son flanc le plus élevé est le Miroir
de Zifaniel, lisse et redoutable, car il darde des
rayons mortels, que nul œil ne discerne. Les Çandir
se sont enrobés d’une chair moelleuse et résistante,
qui les en protège quelques instants, mais les étran-
gers grillent vifs, changés en torches grésillantes.
C’est hélas la seule approximation de la clarté de
pensée qu’ils auront découverte.
Sombres, amusés et dissimulés, les Çandir peuvent
donc poursuivre en paix leur projet social, et affûter
leur esprit pour savoir ce qu’ils peuvent bien croire
des mots de leurs voisins, de leurs parents et de
leurs maîtres. En théorie, rien, car la vérité nue se-
rait insultante, elle n’est bonne pour les imbéciles.
Mais en pratique, il y a des bribes à identifier dans
ce langage qu’ils ont compliqué pour le plaisir de
mieux dissimuler et d’induire en erreur.
Ils rient aux éclats quand ils réalisent qu’ils ont été
abusés avec panache, que toute leur vision du monde
est fausse, car ils sont heureux d’avoir enfin compris.
Et ils progressent, savourant le jour où ils pourront à
leur tour abuser ceux qui furent plus malins qu’eux.
Peuples et motivations
motivations
Vous connaissez déjà quelques motivations ; voici
quelques exemples de celles que vous pouvez avoir
simplement parce que vous appartenez à un peuple.
Ashakin : les gens comme ça méritent d’être
contrariés et d’échouer. Je ne voudrais pas les priver
de leur juste récompense, je suis honnête, moi !
Çandir : ce nuisible sournois pense vraiment pou-
voir mentir mieux que moi, et me rester dissimulé ?
Allons donc ! Je vais le trouver et le massacrer, oui !
Dagornim : Est-ce parce que vous êtes un civil que
vous vous croyez tout permis ? Permettez-moi de
vous apprendre que, dans ma forteresse comme en
voyage, je ne laisse pas faire de genre de choses.
Deriawin : quels vilains remous ! Ils troublent la sé-
rénité et la beauté du monde, et il semble qu’ils ne
tiennent pas à se résorber seuls. Bon… j’y vais.
Elerin : Graeyven ne serait pas content, non, il ne
serait pas content. À défaut de feu d’artifice, je sens
que je vais lui faire plaisir autrement. Mais com-
ment réparer cette platebande, pardon, ce pays ?
Fangayi : Pauvre uriën… elle a eu peur, avec tout
ça. Je vais tout remettre en ordre et puis je lui ferai
signe qu’elle peut revenir.
Fereshen : Beuh… quel est l’imbécile qui laisse
traîner des Cauchemars partout ? Mens ? Hé,
Mens ? Ah, ce n’est pas des Cauchemars… bon…
eh bien, si je veux rêver tranquille ce soir, va falloir
me lever de mon beau tapis et bouger un peu…
Gandraki : Regardez-moi ces horreurs, elles fe-
raient tourner le lait à une vache. Pauvre bête ! Elles
sont si sensibles ! Je crois que je vais me débrouiller
pour qu’elles ne voient jamais ça, elles.
Halewan : Tôt ou tard, les ennuis s’étendent et at-
teignent notre île, autant les supprimer directement.
Et puis, je déteste que mes séjours à l’étranger
soient gâchés par des importuns, je voulais visiter
encore une boulangerie, moi !
Iliani : les pauvres et les malheureux ne peuvent se
payer que l’essentiel… et nous vendons du luxe !
Voulez-vous bien vous consacrer tout de suite à des
activités enrichissantes, ou faut-il vous réduire en
esclavage d’abord ?
Ilithin : Cessez tout de suite de perturber mon exis-
tence, ou alors, mettons-nous d’accord immédiate-
ment sur le montant de ma compensation !
Lycomènes : Ça, c’est une belle péripétie ! Ça, ça
vaudra la peine d’être raconté ! Le tout, ça va être de
survivre ; comment, peu importe, j’embellirai !
Negejii : Marrant… j’ai l’impression que vous ne
vous êtes pas soucié de vous demander si ça allait
m’ennuyer… permettez-moi de vous donner un
exemple des conséquences de vos actes, d’accord ?
Mais ne courez pas comme ça, je suis instructif
quand on m’a poussé à bout !
Pridannia : Mais ? J’ai peur ? Mais ? Je laisse des
traces de sueur froide sur mon beau livre en daim ?
Et je parie que je ne réussirais même plus à me cal-
mer assez pour profiter d’une inspiration. Bon… va
falloir nettoyer l’atelier !
Redza : comment voulez-vous développer un pays
si tout le monde s’enfuit en hurlant ? Je parie même
que l’économat n’a pas renouvelé sa commande de
gants en chevreau !
Tshaven : sauver le monde ? Oh oui ! Ça en vaut
vraiment la peine : je suis toujours épaté par le genre
d’ennuis qu’il subit ! Ça, c’est du spectacle ! Je me
demande juste d’où vient cette habitude de taper sur
le public ?
Venejhian : j’aimais mieux les couleurs avant… là,
je les trouve pâles, verts, et ce revêtement dégouli-
nant, larmes, sueurs froides… ça n’améliore rien.
Visehrein : ce n’est pas civique, ni respectueux…
imaginez ce que des gens comme ça feraient aux
fleurs de ma maman ! Et… gulps… à ma maman
elle-même. Fidèle rapière, allons-y ! Sus aux vanda-
les ! Perçons-les comme des tonneaux de gin !
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OCCUPATIONS
Concept
Votre profession demande très peu d’investissement
en temps et en matériel, et elle autorise un contact
positif avec les PNJ, que ce soit être payé, accueilli
ou admiré, ce qui vous permet de passer une étape
agréable et de poursuivre votre voyage dans de bon-
nes conditions. De ce fait, si vous désirez vivre des
objets que vous créez, prenez des dons pour les gé-
nérer. Et quelle que soit votre activité, vous devez
pouvoir la décrire, prestations ou objet, de manière à
donner envie de l’acquérir ; pour ne pas lasser le
Passeur, évitez des activités dont la description est
toujours identique.
Vasar peut fabriquer par la seule force de son esprit
de charmants récipients de verre coloré décorés
d’incrustations dorées, et les remplir de boissons
qu’il imagine à son gré. Ayant découvert tardive-
ment le charme des soirées, il a appris à rendre les
boissons faiblement lumineuses et il les vend égale-
ment comme lampes. Enfin, il les vend… il les troque
bien plus souvent contre ce dont il a besoin, par
exemple la libre disposition du buffet, un lit et de la
compagnie pour la nuit.
Vasar décrit toujours l’aspect unique de sa nouvelle
œuvre, la manière dont elle s’intègre dans les lieux
et se marie à l’ambiance du moment, et le goût, la
couleur et les propriétés de son contenu.
Quelques idées de métier
Pour choisir ce que vous faites, il est utile de savoir
quel genre d’activités est possible dans l’Entremont.
Produire et transformer
Il existe des producteurs et collecteurs : cueilleur,
horticulteur, cultivateur, chasseur, pêcheur, éleveur,
bien que beaucoup d’humains soient végétariens,
étant entendu que la courge steak est une invention
déjà ancienne, tout comme l’arbre à moules, et tant
d’autres manières de cueillir des protéines.
Puis ceux qui traitent les denrées alimentaires : cui-
sinier, pâtissier, boulanger, charcutier, barman, bras-
seur, et n’importe quoi d’autre qui donne de l’appé-
tit à autrui. Vous pouvez être tailleur de légumes
pour décorer les banquets, tisseur de serviettes, ré-
dacteur de menus, gastronome spécialisé dans les
descriptions qui donnent faim.
D’autre part, certains produisent ou récoltent les ma-
tériaux de construction et de décoration, ou ils maté-
rialisent directement les produits finis. Vous pouvez
donc être artisan, mais que fabriquez-vous ? Des vê-
tements, des bijoux, de la décoration ? Il vous est
également possible de fournir des plans, en étant ar-
chitecte par exemple ; ou faire votre part dans une
œuvre plus vaste, en fabriquant les vitraux, les doru-
res, des tesselles, ou autres éléments.
Prendre des risques
Certains ont des métiers qui mettent en danger la vie
d’autrui : assassin, voleur, saboteur, kidnappeur ;
d’autres sont des parasites, mendiants, gourous, et
autres. Si vous choisissez ce genre de métier, com-
bien le reste de l’équipe gagnera-t-il en vous livrant
à vos victimes avides de vengeance ? Comment
avez-vous échappé au courroux de ceux que vous
avez lésés ? D’autres tentent de contrer ce genre de
personnes, en étant garde du corps, policier, détec-
tive, justicier itinérant. Vous pouvez également ris-
quer votre vie chroniquement en étant explorateur
de lieux méconnus ou étranges, espion, ou enquê-
teur… si vous aimez cumuler.
Promouvoir
Il vous est possible de commercer comme prospec-
teur, marchand ambulant, impresario ; ou être am-
bassadeur d’une culture à l’étranger, que vous ten-
tiez de lui recruter des alliés, de vendre ses produc-
tions, ou simplement de lui faire une bonne réputa-
tion (ce qui n’est pas toujours évident).
Séduire
Vous pouvez être artiste. Un conteur peut vivre de
récits, un chanteur de musique, un peintre d’une
toile. Dans tous ces cas, le Passeur vous demandera
de décrire vos œuvres, au moins dans leurs grandes
lignes, et parfois d’en interpréter des extraits.
Peut-être vivez-vous de vos charmes, étant le rayon
de soleil pour lequel il est normal de sortir une
bonne bouteille et les meilleurs plats.
Découvrir
Les érudits voyagent également, car il faut bien que
quelqu’un de méthodique et de courageux aille ré-
colter les données qui seront enseignées plus tard à
ceux qui se contentent de seconde main. Et puis il y
a un tel charme à être le premier à déflorer une civi-
lisation inconnue !
MOYENS
Liste des moyens
Ce chapitre décrit en détail les moyens que vous
possédez déjà, ainsi que les moyens accessoires.
Ce sont :
• des aptitudes psychiques, telles que l’instinct de
survie.
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• des connaissances peu répandues et générale-
ment totalement inutiles pour vivre en paix dans
l’Entremont.
• le combat : la capacité à neutraliser, blesser ou
tuer autrui ; et celle d’éviter de l’être.
• les soins, physiques ou psychiques.
• les dons, qui sont des propriétés surnaturelles,
comme modeler la pierre ou émettre du parfum.
• l’Intégration, une façon particulière de s’immer-
ger dans son environnement, de le ressentir, de
communiquer avec lui, d’en être aidé et de
l’aider. Elle permet de mieux le comprendre,
mais elle limite la liberté d’en disposer de façon
destructrice. Les Intégrés sont une part du
monde et le monde est une part d’eux ; leur res-
pect est réciproque, ou une rupture se produit.
• le Rêve Chatoyant permet de passer ses nuits
non dans sa tête, mais sur les Méandres du
Rêve, un monde parallèle animé par Mens, Sei-
gneur du Rêve, dieu généreux et chaotique. Le
Rêve étant malléable, mais non contrôlable, il
n’a guère d’applications pratiques, mais c’est un
loisir délicieux.
Les aptitudes psychiques
L’instinct de survie
L’instinct de survie est possédé par tout Alemdar,
mais son usage est négligé par ceux qui tiennent à
croire qu’ils vivent en sécurité dans un monde gen-
til. En revanche, il vous est très utile, car vous évo-
luez dans des lieux dangereux et au beau milieu
d’intrigues visant souvent à vous éliminer.
Vous l’utilisez en posant des questions telles que :
« Est-ce que je me sens en danger ? », « Suis-je in-
quiet ? », « Semble-t-il raisonnable de courir sur ce
toit mouillé ? », « Suis-je rassuré à l’idée de goûter
cette boisson ? » et ainsi de suite. La réponse peut al-
ler du léger malaise à une peur viscérale pour votre
existence, ce qui peut provoquer une crise de pani-
que. En tous les cas, vous savez si vous êtes menacé
ou non, et si un acte que vous vous apprêtez à faire
augmente ou diminue le danger. De ce fait, vous
pouvez choisir la solution la moins risquée. Cepen-
dant, l’instinct de survie ne vous dit pas ce qui vous
met en danger ; c’est à vous d’identifier la menace.
Il vous y aide en qualifiant le danger en intensité :
faible, fort, mortel ; et précise s’il est effectif ou po-
tentiel, c’est-à-dire qu’il surviendrait si… mais il ne
nomme pas le déclencheur. Il perçoit également les
dangers distants, causés par exemple par la mise sur
pied d’une agression future ; et les dangers cachés,
comme le poison, les pièges camouflés, et les
Alemdar eux-mêmes. Mais s’il y a plusieurs sources
de danger, il ne donne qu’une sensation globale.
Il n’est pas une sauvegarde absolue. D’une part, vos
objectifs vous amènent souvent à vous diriger vers
le danger plutôt que vers la sécurité. D’autre part,
l’assassin intelligent prévoit deux sources de danger,
l’une assez aisée à identifier, et lui-même.
Quand vous dormez, vous ne pouvez l’utiliser cons-
ciemment, mais vous avez pu vous en aider pour
choisir un lieu de sommeil propice. Le Passeur peut
décider que le danger est tel que vous vous réveillez
en sursaut, l’estomac noué et le front trempé de
sueur. À vous de comprendre assez vite que ce n’est
pas un cauchemar, mais que la réalité vous menace.
La compensation
C’est l’habitude de continuer à agir normalement
même si l’un des vos sens n’est plus utilisable. Cela
peut être la vue, ce qui permet de se déplacer pres-
que normalement dans le noir, ou un autre.
La maîtrise de soi
Concept
Le Passeur peut décider que vous ressentez une im-
pulsion, et vous faire accomplir une action en vous
jouant lui-même. Cela s’appelle céder à ses envies,
être impulsif. Si cette possibilité vous dérange, vous
avez peut-être appris à vous maîtriser.
Si vous êtes impulsif, vous agissez en suivant vos
envies ; votre comportement pourrait vous paraître
surprenant, par moments, mais vous n’avez pas la
prétention de vous prévoir parfaitement. Quand le
Passeur décrit l’acte que vous exécutez, vous êtes
incapable de vous retenir d’agir ; ce qui ne vous
empêche pas d’être dérangé par les conséquences et
de les corriger dès que vous redevenez maître de
vous. Si vous aimez cela, vous pouvez vous jouer
vous-même sous l’emprise de la pulsion, exprimant
les aspects refoulés de votre personnalité.
Si vous êtes réfléchi, vous n’agissez pas sans raison.
Quand vous ressentez une impulsion, vous l’analy-
sez. Pour ce faire, le Passeur vous dit plus ou moins
clairement ce que vous êtes tenté de faire ; à vous
d’en apprendre plus. Ensuite, il vous reste à expli-
quer pourquoi vous êtes en mesure de ne pas céder à
l’impulsion. Si vous convainquez le Passeur, c’est-
à-dire, si vous argumentez mieux qu’il ne le fait en
jouant votre impulsion, vous résistez, restant seul
maître de vos actes.
Pour donner plus de charme à ces scènes de lutte
contre soi-même, tous les joueurs peuvent interve-
nir, qui appuyant l’impulsion et qui la conscience,
comme il leur plaît. Ils peuvent également proposer
eux-mêmes des envies, qui doivent correspondre au
caractère habituel de l’impulsif.
Faites-vous à l’idée que si le Passeur sait à quel
point un acte est important pour le récit, il va insis-
ter. Considérez que plus vous avez l’habitude de
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contraindre autrui, sans lui laisser de choix, plus il
sera aisé de vous contraindre, car vos méthodes sont
au service de tous les aspects de votre personnalité.
Bien entendu, vous pouvez être assez lucide pour
identifier vos impulsions, mais assez joueur pour y
céder avec délectation.
Est-il utile d’être réfléchi ?
Des biais de comportement sont assez courants sur
Alma, mais ceux qui les vivent ne les remarquent
pas forcément, et s’ils le font, ils n’en sont pas tou-
jours mécontents. Ils peuvent être dus à des conseils
donnés par des PJ ou des PNJ, et qui vous trottent
dans la tête ; à vos habitudes, à vos moyens qui veu-
lent être utilisés, ainsi qu’à toutes les folies qui
pourraient vous affecter un jour ou l’autre, voire aux
malédictions infligées par un dieu facétieux. Sans
parler des préférences du Passeur quant à votre
comportement dans la suite du récit…
Le savoir
Mystères et raretés
Se cultiver, un choix
La plupart des humains vivent en ne connaissant
que ce qui est utile à leur bonheur parmi les leurs.
Un esprit éveillé soupçonne qu’il y a beaucoup à
découvrir, et celui qui a affronté fût-ce un seul mys-
tère sait qu’il est utile de bien connaître le monde
pour trier ce qui est normal de ce qui ne l’est pas.
Mais le savoir n’est pas indispensable pour débuter
dans le jeu. Vous pouvez commencer à voyager
sans rien connaître du monde, et vous montrer assez
prudent pour survivre et apprendre au fil de vos dé-
couvertes. Vous pouvez aussi vous être cultivé, mais
rien ne vous y forçait : votre vie était remplie de
plaisirs, et c’est à vous d’expliquer pourquoi vous
auriez préféré vous plonger dans des livres ou poser
des questions aux cargues, ces créatures inférieures.
Ce sont eux qui viennent pour apprendre de l’hu-
manité, pas l’inverse.
À vous de voir ce que vous préférez, sachant que les
deux solutions ont leur charme. En vivant les scéna-
rios, vous en apprendrez forcément plus sur le
monde. Avant cela, vous pouvez vivre de nombreu-
ses péripéties justement parce que vous êtes igno-
rant. Souvenez-vous : le but n’est pas de réussir un
sans-faute, mais de s’être amusé.
Les domaines du savoir
Voici quelques sujets qui ont pu vous intéresser :
• les légendes : il y a tellement d’histoires étran-
ges qui se racontent. Évidemment, il est délicat
de se prononcer sur leur authenticité.
• les peuples humains : qui sont-ils, où sont-ils,
comment vivent-ils ? Très pratique pour savoir
qu’une fondue, malgré les fils qu’elle produit,
n’est pas un culte rendu à une divinité tisse-
rande.
• les peuples cargues : permet de savoir qu’il y a
quelque chose au-delà de l’Entremont, et
d’avoir quelques idées sur ce que c’est.
• les pouvoirs : bien sûr, tout le monde est déjà al-
lé chez un aldander, qui pratique aldareth, la
magie d’altération, pour se faire pousser des
branchies afin d’aller faire de la plongée, et tout
le monde possède des dons. Mais sont-ce vrai-
ment les seuls pouvoirs existants ?
• la théologie, pour en savoir plus sur les dieux,
leurs temples, leurs adorateurs. Et par exemple :
existent-ils vraiment, ou sont-ils inventés par
ceux qui croient en eux ?
• les célébrités : permet d’en savoir plus sur les
individus qui se sont fait remarquer.
Vous n’avez pas besoin de vous être intéressé à tout
un domaine ou d’être resté au sein d’un domaine.
Vous pouvez par exemple avoir étudié uniquement
les légendes concernant la mer, ou la manière de se
marier dans toutes les civilisations, ou les différents
dieux de l’amour, ou l’architecture des villes hu-
maines, ou tous les gens célèbres qui ont les yeux de
la même couleur que vous.
Les limites de la connaissance
Même si vous avez étudié à fond un sujet, vos
connaissances ne peuvent être exhaustives, car cha-
que professeur a ses lacunes, et aucun étudiant ne se
souvient de tout. Le Passeur utilisera ce prétexte
quand un scénario n’est vraiment surprenant que si
aucun PJ ne sait à priori de quoi il retourne, et dans
ce cas, même le meilleur spécialiste restera ignorant.
Les langues
Connaître une langue signifie que votre personnage
s’est suffisamment intéressé à un autre peuple pour
avoir appris son langage, plutôt que de s’être
contenté du tzasivo. Demandez-vous pourquoi.
Le combat
Combat offensif et défensif
Le combat est divisé en combat offensif et en com-
bat défensif. Le combat offensif sert à neutraliser,
blesser ou tuer un adversaire. Chaque combattant at-
teint ce résultat par des moyens de son choix, qu’il
utilise son corps, une arme de contact, des dons ou
qu’il dirige une créature. Sans connaissance du
combat, ces mêmes moyens seraient inutilisables
pour nuire. En connaissant le combat, un seul coup
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peut neutraliser, blesser ou tuer, peu important la
méthode utilisée, qui n’est là que pour vous amuser
et rendre votre description plus savoureuse :
Neutralisé : l’adversaire n’est plus dangereux, mais
il n’a pas subi de dommages graves. Il peut être as-
sommé, aveuglé, pris dans un filet, ou plié en deux
de rire, tout dépend de vos préférences.
Blessé : il peut arriver que cela tue, mais ce n’était
pas volontaire. L’adversaire va devoir se soigner.
Tué : sur le coup, car le combattant sait exactement
où frapper pour provoquer une mort rapide. Cepen-
dant, si l’adversaire est puissant, il faut plus d’un
coup.
– Mais ?! Cela aurait dû le tuer net !
– Ah tiens ? Tu as dû confondre net et brut…
Bien sûr, un combattant qui ne sait que neutraliser
peut assommer son adversaire, après quoi il peut le
jeter par la fenêtre. Il ne peut pas garantir que la
chute soit idéalement calculée pour tuer, puisqu’il
n’est pas un tueur, mais si c’est assez haut, le résul-
tat escompté est obtenu quand même. Cela s’ap-
pelle : profiter des lois de la nature, pour une fois
qu’elles sont arrangeantes.
Symétriquement, vos capacités en combat défensif
peuvent contrer un coup neutralisant, blessant ou mor-
tel. À nouveau, peu importe que ce soit par l’esquive,
la parade, la fuite éperdue ou l’usage d’un bouclier
mobilier ou humain. Tant que vous survivez…
À moins d’être très décidé à mourir, vous avez ap-
pris à esquiver n’importe quel coup. Demandez-
vous cependant si votre entraînement n’a comporté
que des simulacres de coups mortels, ou si vous
avez pris le risque d’être tué en ratant une esquive.
Certes, une mort non désirée n’est pas irrémédiable,
mais l’avez-vous vécue sans en garder de séquel-
les ? À vous de décider.
Les armes
Vous ne maniez que les armes dont vous pouvez
décrire l’usage de façon intéressante. Le Passeur
peut vous demander en jeu une anecdote sur l’ap-
prentissage de chacune. Aucune arme ne fait plus de
dommages que celui qui la manie ; peu importe
qu’elles puissent tuer si vous ne savez que neutrali-
ser ; et si elles sont conçues pour des êtres plus forts
que vous, elles pourraient bien vous échapper des
mains ou vous retomber sur le pied. Il peut d’ail-
leurs être très drôle de jouer quelqu’un de décidé-
ment incapable de nuire efficacement, quoi qu’on
lui mette entre les mains.
Les armures
Les armures sont inutiles pour votre survie. Si vous
tenez à en porter une, demandez-vous pourquoi et
imaginez quel impact elle a sur votre allure, vos dé-
placements, et vos habitudes. Selon les peuples, les
armures peuvent être de différents matériaux, réflé-
chissez à la manière dont elle s’intègre à vos vête-
ment ; elle peut aussi être invisible. Songez égale-
ment que vous vous sentirez tout nu sans elle si
vous devez vous résoudre à l’enlever.
Assumer le combat
De même qu’un artiste peintre observe ce qui l’en-
toure en quête de couleurs et de formes qui stimu-
lent son sens de la beauté, un combattant cherche à
identifier les menaces possibles et à s’en protéger au
mieux, soit en les évitant, soit en les neutralisant s’il
se sent héroïque ou si c’est nécessaire. Il se posi-
tionne de façon à pouvoir combattre au mieux, il est
sensible aux distances de sécurité entre personnes, il
se tient prêt à riposter quand quelqu’un est trop pro-
che de lui. Bref, il vit dans une jungle où qu’il se
trouve, alors même que l’humanité s’est fatiguée à
créer des lieux de vie relativement sûrs.
Il n’est jamais complètement relaxé, car il préfère
être prêt à réagir. Même si son instinct de survie est
inactif, il sait que certains nuisibles le neutralisent,
que d’autres ne l’activent qu’un instant avant de
tuer, et qu’enfin, il peut s’inquiéter pour une autre
cause que celle qui sera mortelle, car le tueur a pris
la peine de camoufler son acte par un autre danger.
Vous aussi, vous consultez régulièrement votre ins-
tinct de survie, enfin, vous devriez ; mais à moins que
celui-ci ne soit très inquiet, vous ne cherchez pas
l’origine du danger. Vous vous fiez à votre chance et
à vos talents relationnels pour survivre, car vous êtes
convaincu que le monde s’efforce de garder en vie
ceux qui l’améliorent. Vous savez que vous pouvez
être tué dans un lieu où les dieux auraient modifié cet
état de fait, mais cela ne vaut pas la peine d’être sur le
qui-vive toute une vie pour ces quelques cas.
En outre, le combattant s’entraîne pour maintenir
son niveau, car sa vie dépend de sa compétence,
chaque engagement pouvant le tuer. Il sait qu’une
mort non souhaitée, ou dobreth, peut aisément être
annulée par un guérisseur ; mais aussi qu’une agres-
sion traumatisante peut pousser quelqu’un qui vou-
lait vivre encore à choisir le néant, et se dissoudre
sous vos yeux de cette mort qu’on appelle urdho-
mië, pour ne jamais reparaître.
Il peut choisir de combattre alors même que le dia-
logue aurait été plus avantageux, mais il avait envie
de pratiquer ; et affronter des combattants réputés
pour savoir ce qu’il vaut face à eux. Finalement, il
arrive que les situations d’agression activent ses ré-
flexes, auquel cas l’action sera décidée par le Pas-
seur. Si vous êtes un tueur, vous pouvez parfaite-
ment occire votre petite cousine qui s’est mise à
jouer à « Coucou, qui est là ? » alors même que
vous vous sentiez menacé par un autre problème. Et
là… que dire à la famille ? Sans parler de la justice,
parfois si pinailleuse. Si vous n’étiez apte qu’à neu-
traliser, la petite en serait quitte pour une grosse
bosse… et vous pour un « Andouille ! » retentissant.
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Afficher votre agressivité
La plupart des Alemdar savent se battre, mais n’uti-
lisent ces moyens que pour se défendre et préserver ce
qui leur est cher. Si vous êtes du genre à chercher la
bagarre, et que vous l’affichez par votre attitude, vos
armes visibles et votre armure, ne vous étonnez pas si
les gens s’écartent de vous, rappellent leurs enfants, et
si les forces de l’ordre vous surveillent. En outre, quel-
ques jeunes gens téméraires viendront peut-être vous
défier et vous permettre de passer un bon moment ;
mais des combattants qui vous surclassent peuvent
aussi décider de se passer les nerfs sur vous.
La nature du combat
Pour combattre, mettez tout scrupule de côté, quelle
que puisse être votre délicatesse ou votre confor-
misme le reste du temps. Oubliez les duels honora-
bles entre gentlemen, ce n’est pas du combat, mais
un rite social où l’on accepte le risque d’être tué et
où l’on préfère jouer le jeu selon les règles, même si
le prix est la mort : cela s’appelle un suicide dégui-
sé. Le combat véritable ne connaît ni règles, ni res-
trictions ; l’unique critère est l’efficacité, le seul but
est de survivre, de préférence intact, et d’avoir tué
les adversaires à éliminer.
Votre bon droit ou la justesse de votre cause ne vous
garantissent jamais la victoire ; ce ne serait le cas
que s’il y avait une justice immanente et que vos
agresseurs étaient incompétents en combat, alors
que c’est souvent leur outil de travail. Vous avez de
bonnes chances de gagner si vous-même êtes effi-
cace et que vous êtes confronté à un délinquant in-
compétent qui vous a pris pour une proie facile ;
mais le bon droit peut aussi bien se solder par une
mort les tripes à l’air dans les ruines de votre mai-
son. Vos chances sont bonnes également quand
vous êtes agressé par un non-combattant que vous
avez poussé à bout et qui décide d’oublier que vous
êtes dangereux, mais méfiez-vous des ressources
que donne la fureur.
Mais ce n’est pas la norme ; en général, celui qui vous
attaque ne le fait que parce que son instinct de survie
lui garantit qu’il a une bonne chance de vous tuer.
Comment mourir en un coup
Vous savez déjà que vous pouvez être tué en un
coup, mais vous pensez peut-être qu’il faut pour ce-
la une arme ou une circonstance particulière ; dé-
trompez-vous : quelqu’un de compétent peut vous
tuer sans matériel et sans vous avoir handicapé. Un
coup sur l’oreille, et vous perdez l’équilibre pendant
un quart d’heure, ce qui laisse bien plus de temps
que nécessaire pour vous achever (oubliez cette idée
qu’on n’achève pas un ennemi à terre… justement
si, pour éviter qu’il ne se relève). Un coup sur l’ar-
ticulation de la mâchoire, et vous vous évanouissez.
Un coup de couteau bien placé, et vous mourez
d’hémorragie ; avant cela, vous perdez l’usage de
votre bras, mais ce sera le cadet de vos soucis. Une
flèche dans l’œil, et c’est la mort.
N’oubliez ni votre fragilité, ni votre instinct de sur-
vie, c’est lui qui vous dira si vous pouvez charger
sans (trop de) risques.
Les soins
La médecine
Pour guérir, il est impératif d’avoir étudié la méde-
cine de façon plus ou moins approfondie :
• un secouriste soigne des contusions, assomme-
ments, déboîtements, etc.
• un généraliste soigne des blessures.
• un spécialiste soigne des blessures mortelles.
Assumer la médecine
Les médecins ont tendance à considérer la mort
comme un adversaire, le handicap comme une in-
sulte, et les malades chroniques comme des clients
ou comme des gens de mauvaise volonté. Ils ont la
manie de s’occuper de la santé des autres et de ten-
ter de l’améliorer ; et en retour ceux-ci ont tendance
à leur parler de leurs misères.
Docteur Miracle
En général, le but n’est pas que le patient meure.
Alors si vous êtes d’humeur à décrire des miracles
de façon pittoresque, ne vous privez pas. Le but
n’est pas d’être réaliste dans vos soins, sauf quand le
Passeur l’exigera pour vous stresser, mais d’être sa-
voureux dans leur description. Même si vous êtes
sous l’eau avec une petite cuillère pour tout outil…
vous trouverez bien un moyen de décrire des soins
appropriés. Opérer avec le bord tranchant d’une
moule, ça doit bien être possible… non ?
Méthodes de soins
Pour soigner, plusieurs voies sont possibles :
• la médecine conventionnelle, un ensemble de
gestes, onguents, pilules. Elle est très répandue
chez les peuples que l’invisible inquiète, et elle
a le mérite de fonctionner quelles que soient les
circonstances et les lieux, ce qui n’est pas le cas
des deux méthodes suivantes.
• Aldareth, la magie d’altération que pratiquent
certains PNJ, permet de remettre quelqu’un en
état à l’aide d’un rituel qui prend une heure, et
qui doit être inspiré du patient, de ses blessures,
et de son futur rétablissement.
• Intégration 1 peut permettre de manipuler uriën,
la force de vie, et de soigner un blessé en quel-
1 2
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ques instants, même s’il était mourant. Elle ne
fonctionne évidemment pas là où uriën manque,
sauf si le soigneur donne une partie de la sienne.
Pour cela, il faudra vraiment qu’il vous appré-
cie !
La psychiatrie
Une divergence du monde peut être très traumati-
sante. Heureusement, les psychiatres sont répandus,
et les asiles quasiment inexistants, car il est aisé pour
un soignant compétent de calmer le patient et de sup-
primer ses séquelles. La psychologie permet de com-
prendre le fonctionnement d’autrui, la psychiatrie
permet de guérir un fonctionnement pathologique.
Dans tous les cas, vous devez vous montrer assez ras-
surant pour être toléré par un traumatisé et savoir
donner à un fou des raisons de cesser de l’être. En ou-
tre, Intégration 2 permet au psychiatre de prêter sa
compétence au patient, ce qui accélère le processus.
Assumer
Un psychologue ou un psychiatre tendent à se deman-
der pourquoi autrui agit comme il agit, à analyser ses
motivations, à se demander quelles sont ses valeurs
culturelles. Un psychiatre, comme un médecin, consi-
dère la folie comme une ennemie qu’il s’agit de re-
pousser pour que le malade puisse à nouveau jouir de
son existence. Un psychiatre perverti poursuit un but
exactement opposé, et la santé mentale le fait soupirer.
Comme si les mortels étaient là pour s’épanouir et être
autonomes plutôt que manipulables !
Les dons
Les dons sont aussi divers que les Alemdar qui les
ont inventés, mais ils ont tous en commun d’accor-
der une propriété inhabituelle ou de permettre d’ob-
tenir un résultat précis sans utiliser d’outil et sou-
vent sans avoir besoin de matière première.
Un don de vol permet de décrire d’impressionnantes
manœuvres aériennes, alors que le reste des person-
nes présentes se bat à pied ; un autre permet de ma-
térialiser des tuiles, et si par hasard il n’y avait pas
de toit dessous… elles pourraient faire un peu mal à
la tête sur laquelle elles s’écrasent. Oups.
Vous possédez déjà un Don de Sang ; vous pouvez
en développer deux autres. Ce peuvent être :
• des Dons de Sang optionnels, non possédés de
naissance, mais répandus au sein de votre ethnie
• des Dons Francs, que vous avez inventés et que
vous êtes peut-être le seul à posséder. Un Don
Franc peut parfaitement aller à l’encontre de vos
dons de naissance.
Cela peut vous paraître peu, mais apprendre à les
caser dans le jeu sera déjà bien assez délicat. Pour
Idem.
les inventer, pensez super-héros, psi, miracle, ou
simplement émulation d’un outil (voler sans ailes,
brûler sans chalumeau, saboter sans outil, créer un
glaçon sans surgélateur, etc.). Votre don n’a pas à
être utile, mais à vous inspirer un récit amusant de
son usage et à vous typer ; s’il est utile en plus, tant
mieux ; s’il ne l’est pas, peu importe.
Nerio sait peler les hérissons sans les mains, depuis
qu’un malin en a glissé un dans son fauteuil. Il n’a
jamais pardonné à ces sales bêtes.
Mevin sait corriger un plateau de fruit de façon à ce
qu’aucune mandarine ne soit un peu trop blette et
que les ananas ne soient ni trop acides, ni trop doux
Medara sait rendre lumineuse uriën, la force de vie,
de façon à créer des effets de lumière quand elle
danse. Accessoirement, elle sait éviter de d’user les
pieds pour rester en piste plus longtemps.
Nedoren sait remercier ceux qui répondent à ses
questions en matérialisant des boîtes de confiseries
assorties ; un talent bien utile pour un fonctionnaire
passant ses journées à enquêter !
Mesfen sait partager son manteau en deux et faire
repousser chaque partie pour obtenir deux man-
teaux complets, mais il n’a pas encore trouvé com-
ment se réconcilier avec les tailleurs.
Un don n’a qu’un seul effet, par exemple voler, ter-
rifier, dissoudre les tissus, avaler un bœuf, disloquer
une armure. Demandez au Passeur ce qu’il pense de
votre idée ; s’il trouve que votre don est trop puis-
sant, soit cela reste un Don Franc, mais il faudra af-
fronter quelques difficultés pour l’obtenir ; soit c’est
un Don Divin, autrement dit une dewadith, et il est
réservé aux seuls croyants. À vous de voir si vous le
désirez au point de traiter avec un culte ou un dieu.
Vous obtiendrez d’autres dons au fil des scénarios,
qui vous seront offerts par des PNJ, ou qui se déve-
lopperont naturellement en vous quand vous décide-
rez de les faire croître. Vous pourrez également dé-
crire comment l’un de vos dons actuels acquiert des
effets plus variés ou plus complexes.
Estan a appris à agrandir son tapis de sable pour
emmener ses amis ; à permettre que chaque passa-
ger puisse régler la température à son gré ; et à se
déplacer non seulement sur le sol, mais sur les murs
pour prendre ses virages plus secs en ville. Après
cela, il a pensé à ajouter un avertisseur pour cesser
de percuter des piétons.
Utiliser ses dons
Rien ne sert de dire « J’utilise tous mes dons » ni
même : « J’utilise ce don » ; il faut décrire l’utilisa-
tion du pouvoir et le résultat espéré.
Estan dit : « Je saute sur mon tapis volant et je tente
de faire un looping au-dessus du début d’incendie. Il
devrait tomber assez de sable pour l’éteindre,
non ? » Le Passeur décide que c’est le cas, et Estan
cherche désormais une petite pelle pour récupérer
son précieux sable tiède et doux. Il songe aussi qu’il
trouverait bien moyen que son tapis régénère son
sable, mais il y pensera plus tard.
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Ou encore :
Nerio possède un don de sculpture qui lui permet de
modeler de l’eau en une forme qui lui plaît, puis de
la geler en une glace aux teintes variées, qui ne fond
pas. Agressé par une poignée de créatures ailées et
acérées, il leur lance un seau d’eau et la fige…
Comme le Passeur n’a pas vraiment envie de le ter,
il accepte sa proposition : les assaillants tombent au
sol, pris dans la glace, avec un bruit très satisfai-
sant. Bien sûr, après quelques instants, la glace fait
entendre de petits craquements comme ils luttent
pour sortir, mais c’est toujours ça de pris, d’autant
que Nerio court vite quand il certain qu’il n’a rien à
vous vendre et tout à perdre.
Cet exemple montre comment vous pouvez choisir
des dons uniquement parce que vous les trouvez
amusants, puis improviser une manière de vous en
servir pour faire avancer le scénario. Comme le Pas-
seur a pour but que vous réussissiez, il peut accepter
les propositions les plus saugrenues, tant qu’elles
vont dans le sens du récit.
L’Intégration
Une vision du monde
Intégration modifie votre insertion dans le monde. Plus
qu’un simple moyen, elle est une nouvelle vision de la
réalité, permettant de prendre conscience que les
Méandres forment un tout parcouru par la force de vie,
uriën, et que chaque être vivant est un élément de ce
tout, un assemblage temporaire d’uriën et de matière,
individualisé, mais relié à ce qui l’entoure.
Imaginez qu’autour de vous, les murs deviennent
transparents, et qu’à travers eux, vous discernez un
monde de flux de lumière courant en volutes autour
d’étoiles de tailles et de luminosité différentes, al-
lant de la pâle lueur diffuse à l’astre étincelant, mais
non éblouissant. Vous êtes en train de regarder l’ur-
iën et la matière libres qui se déplacent et s’attardent
pour former les êtres organiques et inorganiques.
Vous réalisez que même en vous, le flux continue,
un peu de votre uriën vous quittant à chaque instant
pour aller s’installer dans d’autres êtres, un peu
d’uriën arrivant également.
Puis vous changez votre façon de voir, comme vous
le faites pour lire un texte de près alors que vous re-
gardiez un arbre au loin, et les objets redeviennent
opaques. Néanmoins, vous n’oubliez pas, et vous
devinez encore, le flux incessant de la vie autour de
vous. Jamais plus vous ne croirez que vous êtes
seul, inutile, ou indésirable ; vous savez qu’uriën
vous trouve suffisamment important pour s’attarder
en vous, maintenir votre existence et vous donner
les moyens d’agir, alors qu’elle pourrait vous quitter
pour aller animer n’importe qui d’autre. Vous n’êtes
pas le hasard d’une naissance, mais un élément du
monde constamment renouvelé, parce qu’il possède
encore un sens. Et vous savez qu’urdhomië, la mort
définitive, n’est rien d’autre que le moment où ce
que vous étiez n’a plus de raison d’être, et qu’uriën
et matière vous quittent pour ne plus revenir.
Bénéfices
En plus de percevoir les flux de vie, Intégration
permet de communiquer des sentiments à des êtres
aimés, quelle que soit la distance à laquelle ils se
trouvent ; et ils peuvent répondre s’ils sont égale-
ment Intégrés. En ce qui concerne les échanges
émotionnels, Intégration équivaut à supprimer la
distance. Cela permet savoir comment vont nos pro-
ches, s’ils ont besoin de nous, et être ravi de leur
bonheur. Intégration ne transmet que des sensations
et des sentiments, jamais de mots.
En outre, elle permet de se diriger vers des Intégrés
connus, mais pas de savoir exactement où ils se
trouvent, car elle n’est pas une perception précise,
seulement des flux toujours différents.
Limites
Intégration révèle également que certains êtres et lieux
sont exclus des flux de vie, créant des trous dans les-
quels uriën n’entre que peu ou pas du tout. Un posses-
seur d’Intégration est rayonnant d’uriën, elle coule en
lui avec facilité ; ceux qui ne l’ont pas sont animés de
vie, eux aussi, mais plus faiblement, et d’autres per-
sonnes sont vides, sans pourtant être mortes. En outre,
les temples de certains dieux excluent totalement le
passage d’uriën. À proximité de ces trous, la percep-
tion de l’Intégré est fortement perturbée, il ne capte
plus le monde au-delà et n’est plus ou peu capté.
Émettre est épuisant, et le signal est distordu.
Risques
Certains se sentent si proches du tout qu’ils ne
voient pas l’intérêt de continuer à exister sous leur
forme actuelle, et ils relâchent leur uriën et leur ma-
tière dans l’environnement, mourant à leur heure
soudain venue. Ils laissent leurs moyens adopter
n’importe quelle autre forme tout aussi souhaitable
que la leur du point de vue de la totalité des Méan-
dres. Cette dissolution peut également être partielle :
Mais qui est ce nain tenant un tournesol géant à la
main, assis là où dormait mon mari ?
Une bonne maîtrise de lui-même permet à l’Intégré
de conserver une notion plus précise de ce qu’il est
et de ses intérêts.
Exemple
Une première expérience d’Intégration peut être as-
sez étonnante pour des impulsifs :
Deux amoureux qui s’endorment côte à côte peuvent
se sentir plus proches qu’ils ne l’ont jamais été, li-
bérés des limites qui les séparaient. Ils rêvent que
leur main coule vers l’autre, suivie de leur corps, et
qu’une fusion les réunit. Au matin, leur apparence
peut être subtilement différente, par exemple une
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peau un peu plus claire et l’autre plus foncée, ou des
yeux gardant un peu de la couleur de ceux de
l’autre. Le dormeur peut penser avoir retrouvé la li-
quidité de la vie prénatale ; ou interpréter son rêve,
et considérer que le liquide n’était que la traduction
onirique d’un simple échange d’uriën et d’un peu de
matière, qui a suffi à intervertir quelques pigments.
Il peut ressentir un élan de vie et d’être vers celui
qu’il aime… et le retenir pour rester lui-même au
complet.
Après ce genre d’expérience, la tentation peut venir
de ne plus rien faire sans réfléchir aux conséquences.
Assumer Intégration
Intégration décourage de nuire, car la similitude en-
tre autrui et soi-même dissuade d’infliger à autrui ce
qu’on ne s’infligerait pas à soi ; il n’est plus possible
de prétendre appliquer deux poids et deux mesures,
sauf évidemment entre ceux qui sont dans le flux
d’uriën et ceux qui sont dans les trous. Aussi, un
personnage Intégré traite autrui comme lui-même,
qu’il s’agisse d’un gazon, d’un oiseau ou d’un
étranger ; il veille sur les intérêts d’autres Intégrés
comme s’ils étaient les siens, il peut se battre pour
protéger des lieux de vie heureuse. Il ne tue pas plus
à la légère qu’il ne se suiciderait à la légère. Il ne
peut plus refuser certains appels à l’aide, qui lui
semblent émaner de lui-même. Il éprouve un ma-
laise à être coupé du reste des Méandres, par exem-
ple en pénétrant dans un trou, car cela équivaut à
une privation sensorielle et à la disparition subite de
tout son entourage.
Quand éviter Intégration
Intégration devrait être évitée si vous désirez que
votre personnage puisse disposer d’autrui et de
l’environnement sans jamais songer aux conséquen-
ces, voire en prétendant qu’elles n’existent pas ou
qu’elles sont minimes. Sans elle, vous pourrez vous
imaginer libéré de toutes les lois de la nature et
fausser tous les équilibres subtils qui permettent une
vie heureuse sur Alma. Vous pourrez également bâ-
tir une personnalité torturée par la solitude et le
manque, et y inventer tous les remèdes qu’il vous
plaira, comme une vie vouée à des valeurs creuses, à
des dieux néfastes, ou à bâtir un monde technologi-
que à la place de celui que tissent uriën et matière.
Développer son Intégration
Intégration permet de développer bien d’autres capaci-
tés. Vous pourrez le faire en jeu à mesure que vous
vous demanderez ce que peut vous permettre le fait
d’être si proche des autres êtres vivants des Méandres.

Le Rêve Chatoyant
Définition
Le Rêve est la capacité de ne pas se contenter de rê-
ver dans sa propre tête quand on dort, mais à proje-
ter son double onirique sur les Méandres du Rêve,
un monde parallèle au monde des mortels, créé, en-
tretenu et animé par Mens, Seigneur du Rêve, dieu
généreux et chaotique.
Le rêveur n’est pas le maître du rêve, il est un créa-
teur qui a la possibilité de modeler lui-même et ce
qui l’entoure, en compagnie des autres rêveurs. Son
œuvre est toujours une réussite, car il bénéficie de
l’aide invisible de Mens, assistant efficace et sans
limites, d’où la qualité d’émerveillement que lais-
sent certains rêves. Mens est assez compétent pour
ravir n’importe quel mortel, et même des millions
d’entre eux chaque nuit. Ce ne sera pas au Passeur
de vous divertir, mais à vous de décrire ce que vous
apportez au Rêve ; alors seulement, il pourra embel-
lir votre apport de son mieux. Aidez-le à s’améliorer
en lui décrivant ce qui vous plaît le plus, en l’aidant
à comprendre vos goûts.
Les risques du Rêve
Mens ne rend pas toujours les créateurs qu’il pré-
fère, car il déteste qu’urdhomië l’en prive, et elle est
si fréquente dans les Méandres ! Un Rêveur poli est
toujours prié de s’endormir une dernière fois juste
avant de mourir, et de poursuivre son existence sur
les Méandres du Rêve, comme Chimère de Réalité.
Par ailleurs, tout rêveur est une porte entre le Rêve
et les Méandres, et il arrive qu’il serve de porte et
ramène de son voyage une Chimère du Rêve, qui
n’est pas forcément inoffensive 1. Mais, en général,
les Chimères n’abîment pas les portes qui ne les en-
nuient pas, ne serait-ce que pour inviter des amies.
Apprendre le Rêve
Les Rêveurs sont assez répandus, et ils ont pu vous
expliquer comment vous rendre sur les Méandres du
Rêve. Vous vous y êtes retrouvé, seul. À vous de
voir quel genre d’endroits vous avez cherché à visi-
ter, car le Rêve inclut aussi bien des démons que des
merveilles, des rêves bleus que des cauchemars ; et
quel genre d’activités vous y avez eu.
Des Rêveurs discrets
Du fait que les Rêveurs ne reviennent pas toujours,
et que les Chimères s’invitent parfois, ceux qui se
promènent dans les Méandres du Rêve ne s’en van-
tent pas forcément, d’autant que Mens ayant tenté
1
Et même quand elle est inoffensive, elle fait désordre
dans l’Entremont, moins fantaisiste que les Méandres du
Rêve. Un serpent-chat à poils angora couleur d’arc-en-
ciel, qui mange les boules de pétanque, ça peut froisser.
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d’envahir les Kerdith Langei, beaucoup d’humains
en ont gardé un assez mauvais souvenir.
Assumer le Rêve
Un Rêveur ne se réveille pas simplement reposé le
matin, prêt pour une nouvelle journée, il revient
d’un voyage merveilleux ou terrifiant, et il désire
souvent en parler. Il se couche avec joie, prêt à
continuer ses explorations, à aller recevoir les pré-
sents suivants de Mens. Il guette chez autrui, dans
les mots, les regards, les œuvres, la trace de l’ou-
verture sur ces contrées fabuleuses ; et plus généra-
lement, il respecte l’imagination et l’art, du moins
celui au service de l’originalité. Il peut développer
une intolérance à l’ennui, au morne, et au banal.
FINITIONS
L’apparence
L’impact de l’origine ethnique
Votre apparence est déterminée par votre peuple.
Cependant, certains d’entre eux possèdent une
gamme de teintes possibles pour les cheveux et les
yeux, ainsi que des variations quant à la pilosité
(barbe, moustache, et bien sûr coupe de cheveux). À
vous de choisir. En outre, vous pouvez avoir fait al-
térer votre apparence, par exemple en choisissant
une couleur inhabituelle parmi vos pairs.
En tous les cas, vous restez agréable à regarder pour
plaire à la Déesse. Vous êtes probablement beau, mais
également typé, car une joliesse lisse et stéréotypée fe-
rait de vous une simple copie d’un modèle répandu.
Vous avez déjà vu des gens repoussants ou inquié-
tants, non pas du fait de la laideur, d’un handicap ou
d’une séquelle, mais de ce que leur apparence révélait
de leurs mœurs et de leurs intentions. Vous n’avez
pas suivi leur exemple, car vous trouvez important de
pouvoir mettre des inconnus en confiance.
L’âge
Votre âge n’a aucune importance, car les humains
ne vieillissent pas. Ils meurent, repus de la vie, entre
cent et cent-vingt ans. Ceux qui le désirent peuvent
altérer leur apparence pour que leur peau semble pa-
tinée, voire ridée, mais l’immense majorité n’en voit
pas l’intérêt. Une personne âgée se détecte plutôt en
tentant de repérer les gens qui montrent une aisance
liée à une très longue pratique, ou l’air entendu de
celui qui en comprend plus que les autres… sauf
quand ils ont aussi pris la peine de devenir bons
comédiens parce qu’ils tiennent à leur incognito.
Le sexe
Il s’agit du sexe que vous assumez le plus fré-
quemment : mâle, femelle, neutre. Vous pouvez
également choisir de mélanger des attributs mâles et
femelles, ce qui est moins courant. La plupart des
sociétés d’Alma ne sont pas sexistes, choisissez ce
qui vous plaît. Vous pouvez réfléchir aux change-
ments de costume ou de coiffure qu’implique peut-
être votre changement de sexe.
Le style
La puissance des Alemdar n’est pas affichée. Les
possesseurs de pouvoirs évitent de porter un cos-
tume qui les identifie comme tels, sauf s’ils sont des
professionnels désirant être reconnus comme tels ;
quant aux combattants, plutôt que d’imaginer un
barbare disparaissant presque sous ses armes et son
armure, pensez à certains maîtres d’arts martiaux :
ils passent inaperçus, mais peuvent vous vaincre ai-
sément. D’une part, la force physique ne s’accom-
pagne pas de protubérances musculaires, même si
certains peuples sont plus grands et larges que d’au-
tres ; il serait donc maladroit de se fier à la carrure
pour jauger de la dangerosité d’un être. Ce serait
oublier en outre que de nombreux être tuent en usant
de leurs dons, et que leur apparence ne le précise
pas. D’autre part, les armes et les armures peuvent
être camouflées de façon à ne pas sembler ce
qu’elles sont, voire à être totalement invisibles. Pas
besoin donc de vous demander quelle carapace vous
portez, si ce n’est pour des questions esthétiques.
Une belle arme est un ornement comme un autre, si
ce n’est qu’il est, en sus, mortel.
Ne pas montrer sa puissance est la meilleure façon
de pouvoir se promener tranquillement parmi la po-
pulation. Seules certaines personnes montrent leur
puissance, au détriment de leur discrétion ; les au-
tres se contentent de révéler une part de leurs
moyens quand ils désirent intimider pour dissuader,
ou pétrifier l’adversaire de terreur le temps de
l’anéantir. Le reste du temps, ils sont autant à leur
place que vous sur la terrasse de ce restaurant, et
vous n’avez aucun moyen de deviner qu’ils sont en
mesure de raser la ville. Tant mieux, vous n’en
mangerez que plus tranquillement.
Les vêtements
Les vêtements luxueux, colorés, sont la norme. Ils
sont pour une bonne part illusoires, et de ce fait, ils
peuvent comporter des matériaux très fragiles,
comme des perles, des plumes, des broderies, des
fils de métal très fins ou des voiles translucides ; ou
très encombrants, comme des capes, des lunettes,
des masques sans trous pour les yeux, des manches
plus longues que les bras, des écharpes, des ceintu-
res sur lesquelles on devrait pourtant marcher, des
robes qui n’auraient pas dû vous permettre de sprin-
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ter. Chaque peuple a son propre style, demandez
plus de détails au Passeur pour profiter de ces spéci-
ficités. À part chez les Visehrein, les vêtements
n’ont pas pour fonction de ménager la pudeur, ils ne
sont donc pas là pour cacher quoi que ce soit, mais
pour vous embellir. Faites-vous plaisir.
Exemples
Estan est caractérisé par le fait que son corps soit
couvert de tatouages, bien visibles sous une chemise
translucide aux reflets opalins ; ainsi que par sa che-
velure rousse et sa queue de renard.
Nerio se vêt usuellement de cuir, et il est très fier de
son gilet en peau de dersazyi, car ces serpents de
mer sont la forme temporaire qu’adoptent les Dan-
seurs Bleus morts avant leur résurrection. Or, les
Danseurs Bleus sont des cargues combattants qui ne
tolèrent pas les lâches. En portant ce gilet, Nerio se
garantit d’être tué s’il faillit. C’est un risque idiot
comme il les aime.
Vasar est vêtu de soieries vivement colorées et bro-
dées d’or, aux plis impeccables. Elles ont été fabri-
quées dans son pays, comme le lui rappelle leur
grain délicieusement irrégulier, la profondeur de
leurs teintes et leurs reflets intenses. Effleurer les
broderies et les sentir légèrement râpeuses, c’est re-
trouver le sel séché sur les rives de la Mer Salée,
près de laquelle il a grandi. Il n’y remettrait pas les
pieds… mais il ne voit pas pourquoi il se priverait
de ce que son pays peut offrir de meilleur.
Les possessions
Préciser le pittoresque
Vous avez déjà tout ce qui est nécessaire à votre vie
courante, à l’exercice du métier qui vous permet de vi-
vre quand vous voyagez, et au voyage lui-même. En ou-
tre, vous avez les dotations typiques de votre peuple.
Mais vous pouvez réfléchir à ce qui pourrait vous typer.
Exemples
Vasar possède un bâton dont le bout est décoré de
pendeloques métalliques qui tintent gaiement quand
il marche, et sur lequel il s’appuie quand il prend
une pose méditative.
Les lunettes de Teshebka sont d’un beau rose, formant
un charmant contraste avec ses cheveux verts et sa
peau cannelle. Elles lui donnent un air très juvénile qui
contribue à faire sous-estimer son âge et ses moyens.
À la ceinture de Nerio pend un sabre voriad, dont il ap-
précie et la courbe, qui évoque un sourire particulière-
ment pervers et cruel, prometteur de douleurs raffinées
et insoutenables, et l’éclat glacial. Comme il déteste
perdre son énergie dans des affaires mineures, il aime
les adversaires qui meurent de peur à sa seule vue.
 DÉROULEMENT DU JEU
Introduction
Ce chapitre vous explique plus en détail comment se
déroule une partie, qui ne sera bonne que si vous
collaborez avec tous les autres participants. Le Pas-
seur dispose d’un scénario, qui est un réservoir
d’opportunités d’actions et de PNJ pittoresques, et il
essaie de vous le présenter de son mieux ; vous le
vivez avec votre PJ et votre imagination ; et la quali-
té du résultat dépend de celle de votre relation.
Coopérer entre PJ
Vous avez besoin des autres PJ. Si vous ne vous en-
traidez pas, la plupart des scénarios vous tueront, car
vos adversaires sont assez habiles pour exploiter à
leur avantage des dissensions entre PJ. Cela ne si-
gnifie pas que vous devez vous forcer à supporter un
PJ ou un joueur qui vous énerve. Si vous n’aimez
pas la manière de jouer d’un autre participant, dites-
le lui et tentez de trouver une solution ; si votre PJ
ne supporte pas le sien, discutez-en entre PJ. Ne
vous entretuez que si c’est tout ce qui reste à faire,
et sachez que vous décevez les PNJ : c’était leur tra-
vail de vous menacer, et vous étiez censés leur sur-
vivre. Ils peuvent donc détruire le monde en toute
tranquillité, mais c’est moins drôle.
Coopérer avec le Passeur
Le Passeur est votre allié. Même s’il est en mesure de
vous tuer, ce n’est pas son but. Il est venu pour
s’amuser, et n’y réussira que s’il peut vous amuser. Il
a fourni un travail important pour prendre connais-
sance du monde et du scénario, et il se réjouit de vous
faire partager tout cela, de voir comment vous réagi-
rez aux péripéties, quels sentiments vous éprouverez,
ce que vous inventerez comme solutions, comment
vous finirez par réussir, et quel plaisir vous retirerez
des récompenses qu’il pourra vous donner. Il compte
sur vous pour être des acteurs impliqués, inventifs, et
tolérants pour ses erreurs comme il sera pour les vô-
tres ; il espère aussi que vous venez pour apprécier
les ressources du scénario, et non pour le saboter.
Bien sûr, vous allez par moment le trouver très
contrariant. Mais faites-lui confiance : s’il décide
que votre action échoue, ce n’est jamais par mé-
chanceté, mais parce qu’il pense que l’histoire est
plus savoureuse ainsi. S’il vous ment, c’est pour
préparer un coup de théâtre ou ménager un mystère,
pas pour vous voir sadiquement échouer, il n’y ga-
gnerait rien de plus que d’avoir préparé un scénario
pour rien. Et quand certaines scènes vous feront an-
goisser, souvenez-vous que le scénario n’a pas pour
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but de vous tuer, et qu’il existe forcément une issue.
Vous ne mourez que si vous prenez des risques ex-
cessifs ou que vous vous comportez de manière à
saboter l’histoire. Dans ce cas, le Passeur vous éli-
minera plutôt que de voir capoter son scénario ;
mais avant cela, il vous aura demandé si vous tenez
vraiment à vous comporter ainsi, et si vous ne vou-
driez pas plutôt aller dans le sens du récit. Là en-
core, mourir sera votre choix.
Améliorer la partie
Si vous ne vous amusez pas, dites-le au Passeur. Ex-
pliquez clairement ce qui vous déplaît, ce que vous au-
riez préféré à la place, afin qu’il puisse comprendre
peu à peu quels sont vos goûts, car pour l’instant, il ne
peut que vous donner ce qu’il pense être amusant. Si
vous ne parvenez décidément pas à vous amuser,
n’hésitez pas à aller jouer avec d’autres personnes, à
devenir Passeur vous-même, ou à essayer un autre jeu.
De même, si le Passeur ne s’amuse plus parce qu’il
échoue à gérer un joueur, il expose son problème aux
participants afin de trouver une solution.
Améliorer votre jeu
Jouer est une compétence que vous ne possédez
peut-être pas encore, et qui ira s’améliorant. Même
s’il a un bon scénario en main, votre Passeur n’est
peut-être pas un narrateur efficace, et même si Alma
est un monde riche et pittoresque, il n’excelle peut-
être pas dans les descriptions. Quant à vous, même
si votre PJ est parfait sur le papier, peut-être n’êtes-
vous encore ni un très bon acteur, ni capable d’im-
proviser des réactions appropriées ou des dialogues,
ni de remarquer des indices quand vous enquêtez, ni
de créer des solutions applicables, ni de vous faire
des amis. Mais tout cela s’apprend au fil des par-
ties ; acceptez les remarques des autres joueurs et du
Passeur, n’hésitez pas à en faire vous-mêmes, et
joueur sera un plaisir croissant.
Vous aider à vous exprimer
Si prendre la parole en public n’est pas votre activité
de prédilection, vous pourriez être inquiet à l’idée
que votre succès dépend totalement de la qualité de
votre narration, mais il n’y a rien à craindre. Le but
n’est pas de vous juger, mais de vous aider, afin que
vous réussissiez à enrichir l’histoire. Le Passeur et
les joueurs qui le désirent peuvent vous aider à vous
exprimer, en proposant des manières de compléter
votre proposition tronquée. Vous choisissez ce qui
vous convient, et vous le dites à votre manière. Ils
peuvent également vous souffler des idées de réac-
tion pour que vous ne restiez pas sans rien faire.
Profitez de leurs conseils pour devenir autonome et
réussir un jour à les épater par vos contributions. En
attendant, il vaut toujours mieux bredouiller une
proposition imparfaite que de ne rien dire, car c’est
la seule manière pour que vous existiez et que vous
ayez un impact sur le scénario.
Avant le jeu
Le matériel de jeu
Vous n’avez besoin que de votre feuille de person-
nage, d’un crayon et de papier brouillon si vous ai-
mez prendre des notes. Mais Alma n’est pas un
exercice de mémorisation, de résumé et de prise de
notes, et le Passeur vous redonnera les informations
que votre PJ connaît quand elles seront nécessaires à
la suite du récit. Bien sûr, il peut commencer par
vous demander en souriant si vous n’oubliez pas
quelque chose… mais il finira par vous rafraîchir la
mémoire si vous ne trouvez pas vous-même. Vous
serez parfois surpris de voir à quel point il est facile
d’oublier l’essentiel quand on est stressé.
Endosser le personnage
Il est temps d’entrer dans votre PJ, afin de voir le
monde comme lui, de ressentir les émotions liées au
récit, et de réagir à sa manière. Pour faciliter cela,
vous ne dites pas ce que fait votre PJ, mais vous
parlez comme si vous étiez lui. Cela vous en rap-
proche énormément.
Comparez : « Mon personnage boit un verre » et par
exemple : « Je consulte la carte du bar, et je choi-
sis… mm… un peu d’azur étoilé. C’est un cocktail
que je n’ai jamais goûté ! À propos, je crois bien
que je vais demander à la serveuse si elle ne veut
pas le boire avec moi… Mademoiselle ? »
Vous venez d’inventer un cocktail et une charmante
compagnie ; si le Passeur tient à vous contrarier, il
dira que vous avez mal lu et que, quand la serveuse
se retourne, elle est renfrognée. De si beaux cheveux
sur un si laid rictus ! Sinon, il vous décrit cette mer-
veilleuse boisson et il joue la serveuse… à vous de
voir jusqu’où vous allez, en espérant que votre Pas-
seur n’est pas trop coincé.
D’autre part, vous oubliez ce que vous savez en tant
que joueur, et vous tentez de voir le monde à travers
les connaissances et les goûts de votre PJ.
Si vous êtes marin dans la réalité, mais que votre al-
ter ego n’a jamais mis les pieds sur un bateau, tentez
de vous rappeler quelles erreurs vous commettiez
quand vous n’y connaissiez rien… car vous allez les
revivre si le Passeur les connaît, et sinon, vous pouvez
les ajouter de vous-même si cela vous amuse de les
revivre, et de les faire partager aux autres PJ s’ils ne
sont pas marins non plus. Si le Passeur vous trouve
plus compétent que votre PJ, il demande simplement :
Comment tu sais ça, toi ? C’est le moment de répon-
dre qu’ah, euh, désolé, en fait vous n’en savez rien.
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Accepter les émotions
Acceptez les émotions que le récit fait naître en
vous. Il serait dommage de minimiser ce que vous
vivez, en disant : « Bah ! Je suis bien assis sur ma
chaise, pas en train de ramper dans du sang séché
sans me faire voir des Dévoreurs », ni : « Tant pis
s’il meurt, ce n’est qu’un PNJ… ».
Si vous avez peur, vous n’en trouverez que plus fa-
cilement des solutions pour vous en sortir ; et si
vous vous êtes attaché à un PNJ, vous serez motivé
à le sauver. L’idéal est de pouvoir dire : « Moi,
quand je suis mon PJ et qu’on me fait ça, ou que
j’assiste à ça, je ressens ça et ça me donne envie
d’agir ainsi… ». Votre PJ, lui, dira seulement :
« Mais je ne suis pas d’accord ! Je vais te me lui pé-
ter la gueule à celui-là ! »
Vous vous débarrassez plus efficacement d’un fléau
qui vous inspire haine et dégoût parce qu’il vous a
personnellement fait mal, peur, et donné la nausée
tellement il viole votre notion de ce qui est sain et
raisonnable. Vous êtes furieux d’avoir subi ça, vous
n’avez aucune envie de le revivre, vous voulez tuer
ce monstre, mais vous savez qu’il va falloir utiliser
des méthodes subtiles parce que votre instinct de
survie vous hurle qu’un assaut direct vous coûterait
la vie, et c’est un prix que vous n’êtes pas décidé à
payer. Quand vous décidez que ça suffit comme ça !
et qu’il est absolument exclu que cela continue, que
vous allez agir pour que ça cesse, vous êtes un hé-
ros : vous préférez vous impliquer que de supporter
l’idée que cela se passe ainsi. Oui, vous pourriez
faire demi-tour, et dans certains cas, vous le ferez,
parce que vous ne pouvez rien changer pour l’ins-
tant… mais ils ne perdent rien pour attendre !
Garder une place pour la raison
Éprouver un sentiment ne veut pas dire que vous
cessez de penser. De même que vous pouvez avoir
envie de frapper quelqu’un dans la réalité, et que
vous ne le faites pas, vous ressentez ce qu’éprouve-
rait votre PJ, mais vous choisissez de le faire agir en
respectant l’intérêt de l’histoire et en veillant à ne
pas gâcher le plaisir des autres participants. Cela ne
signifie pas qu’il ne faut jamais contrarier leurs PJ,
mais qu’il faut le faire d’une manière qui divertit les
autres joueurs. Sinon, comme dans n’importe quel
autre jeu, il serait normal de quitter la partie et
d’aller jouer avec des gens plus amusants.
Si vous paniquez ou que vous commencez à vous
énerver, souvenez-vous que c’est un simple jeu, et
que rien ne sert de boxer le Passeur. Dites que ça ne
va pas et prenez le temps de vous relaxer ; les autres
vous attendront pour reprendre le jeu.
Utiliser des accessoires
Certains aiment avoir des accessoires pour camper
leur PJ, comme une pipe, un bâton, un éventail, un
gilet ; ne vous privez pas.
Raconter ses actes
Proposer une action
Quand le jeu commence, le Passeur décrit le lieu où
vous vous trouvez, et il demande : « Vous faites quelque
chose ? » Si vous désirez agir, décrivez l’action que
vous entreprenez, ou l’information que vous recherchez.
Alors comme ça, il y a des terrasses sur le front de
mer ? Et si je lis bien les affiches, le premier repas
est offert ? Je longe la côte en regardant ce que les
gens mangent, et en respirant les odeurs de cuisine.
Dès que j’ai un coup de cœur… je m’installe ! À
quoi ressemblent les plats servis ?
Le Passeur vous laisse le temps de prendre connais-
sance du lieu, et les PNJ qui s’y trouvent, puis il
propose un évènement auquel réagir. Si vous désirez
attendre sans rien faire, c’est votre droit, mais ne
venez pas vous plaindre si vous mourez. Si le Pas-
seur est gentil, il souligne la gravité de la situation.
Je comprends tout à fait que tu n’aies pas envie de
bouger ; mais tiens-tu vraiment à rester immobile en
regardant approcher le taureau qui te charge ? À
voir comment ton cœur vient d’accélérer et le genre
de peur qui te tord les tripes, ton instinct de survie
n’a pas l’air d’apprécier l’idée d’un choc frontal
avec cet animal…
Si vous voulez agir, décrivez votre action.
Pour éviter le taureau : Un taureau ? En pleine rue
marchande ? Ça ne va pas, non ? Je grimpe à toute
vitesse sur le balcon, et je me fiche complètement
qu’il me faille marcher sur des confiseries. Au pire,
je me lécherai les pieds, ça me calmera ! Et au fait…
je regarde ce qu’il fait, parce que c’est quand même
drôle, un taureau qui fait voler des petits fours.
Supposons cette fois que vous soyez en filature, et
que vous désiriez être discret :
Je suis trop visible, là ! Et comme je connais ce
gars, il va sûrement vérifier s’il est suivi. Je profite
des buissons de ce parc pour me cacher, tout en fai-
sant mine de chercher un objet que j’aurais perdu,
parce qu’il pourrait y avoir d’autres témoins.
Vous pouvez décrire aussi bien des actions simples
que compliquées, cela n’a aucune importance, le
tout est qu’elles soient intéressantes ; de même, leur
impact peut être mineur comme important ; dites
seulement ce que vous voulez accomplir. Si la pro-
position d’un joueur s’exprimant après vous prive la
vôtre de sens, vous pouvez l’annuler et décrire ce
que vous faites à la place ; vous pouvez aussi chan-
ger d’avis après avoir entendu les propositions des
autres, et les avoir trouvées plus appropriées, car
vous avez l’habitude d’agir rapidement et d’ajuster
votre comportement.
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Accepter ou refuser une action
Le Passeur écoute les propositions de tous les
joueurs, et il se demande dans quelle mesure elles
sont réalisables. Il décide seul si une action est pos-
sible ou non, si une ressource est disponible, si un
PNJ est atteignable. Cela devrait être une opération
rapide, qui prend en compte les aspects suivants :
• est-il inspiré par cette proposition ? Il va devoir
décrire sa réalisation, ses conséquences, et les
PNJ nécessaires ; s’il n’a pas d’idée, l’action n’a
pas d’effet. Mieux vaut passer directement à la
suite du scénario que de se forcer à raconter une
scène ennuyeuse.
• s’il est inspiré, l’action réussie est-elle plus
amusante et plus apte à créer une péripétie que
l’action ratée, ou moins ?
• cette proposition risque-t-elle de gâcher le plai-
sir des autres participants ? Si oui, elle n’a pas
d’effet ; mais si elle leur complique la vie de fa-
çon amusante, elle est retenue.
• est-elle compatible avec le scénario ? Aucune
proposition qui empêcherait de jouer la suite de
l’histoire ne peut être acceptée.
Moduler le résultat
Le Passeur retient que ce qui l’inspire dans chaque
proposition ; il diminue ou au contraire augmente
les effets espérés, et il raconte le résultat. Il ne
donne pas d’explications, il suffit de savoir qu’il
existe de nombreuses raisons pour que les choses se
passent mieux ou moins bien que prévu ; dans un
monde où les pouvoirs existent depuis des millénai-
res, les contre-pouvoirs ont eu le temps d’être déve-
loppés. Si deux désirs sont opposés, le Passeur les
traite comme toutes les autres propositions, non
dans un souci d’équité, mais d’amusement des par-
ticipants et de qualité de l’histoire.
Écarter en douceur une bonne idée
Si le Passeur doit écarter une bonne idée pour in-
compatibilité avec le scénario, il cause un tort au
joueur qui a fait de son mieux, et qui méritait de ré-
ussir. Le joueur ne pouvait pas savoir qu’il nuisait à
l’histoire, puisqu’il ne connaît pas le scénario. Dans
ce cas, soit le Passeur signale que l’idée est excel-
lente, mais qu’il ne peut malheureusement pas la ré-
aliser ; soit il décide qu’elle échoue, mais qu’elle
procure pourtant un bénéfice au joueur qui l’a pro-
posée. Ce peut être une défaite honorable, qui lui
vaut l’estime d’un adversaire, ou un contretemps qui
affecte un PNJ qu’il n’aime pas, ou tout autre petit
plaisir qui puisse tenir lieu de prix de consolation.
Le but est que le joueur prenne presque autant de
plaisir à voir son idée écartée qu’à la voir acceptée,
ce qui évite qu’il ne soit frustré.
Gérer l’ignorance
Même si le Passeur connaît bien Alma, vous pouvez
poser une question dont il ignore la réponse, par
exemple en demandant si un objet existe dans un
pays donné, alors que ce n’est pas précisé dans la
description des lieux. Peu importe ! Le Passeur se
demande seulement s’il préfère que cet objet soit là
ou pas, et si cela lui semble important, il le rajoute
dans la description du pays, pour la prochaine fois,
ou il considère qu’un marchand a pu l’amener.
Réagir au choix du Passeur
Si le Passeur est compétent, le résultat qu’il décrit
devrait vous amuser et vous encourager à inventer
l’action suivante. Mais si son choix vous frustre ou
vous ennuie, dites-le. Même s’il a écarté votre pro-
position pour préserver le scénario, il peut apprendre
à le faire sans vous gâcher le plaisir.
Accepter ses limites
L’échec d’une de vos actions n’est pas une défaite,
mais une péripétie qui enrichit l’histoire. Un récit
intéressant ne se construit pas seulement sur les suc-
cès du héros, mais également sur ses échecs, car ils
sont une excellente manière de devoir inventer des
solutions nouvelles, de faire monter le suspense, ou
de se retrouver dans une situation intéressante. La
victoire continuelle n’a pas ce charme. Faites-vous à
l’idée que vous serez par moment incapable ou
ignorant ; vous n’en mourrez pas, et vous pourriez
même apprendre à savourer ces échecs lamentables
au même titre que les grands succès.
Les décisions du Passeur ne seront pas la seule rai-
son pour laquelle vos actions échoueront. Comme
dans la vie réelle, vous n’êtes pas toujours au mieux
de votre forme, et il peut arriver que vous manquiez
des indices, que vos déductions soient fausses, et
que vous n’ayez pas pris les bonnes décisions au
bon moment. En outre, les scénarios sont conçus de
manière à éveiller vos émotions, comme si vous vi-
viez réellement ces scènes. De ce fait, vous serez
parfois trop énervé pour ne pas froisser les PNJ, ou
trop paniqué pour choisir des solutions intelligentes.
Finalement, le Passeur vous induira en erreur à cha-
que fois que ce sera nécessaire, car son but est de
vous faire vivre des péripéties, et s’il doit pour cela
vous cacher des indices, il le fera. Dans les films,
combien de fois le héros doit-il commencer par
manquer les évidences pour s’enfoncer assez pro-
fondément dans les ennuis, puis devenir bril-
lant parce qu’il est vraiment motivé ?
Et si aucun PJ ne réussit une action, ou ne comprend ce
qui se passe, le Passeur fera intervenir un PNJ dont le
savoir ou la compétence permettra la suite du scénario.
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Utiliser vos moyens
Typer vos interventions
Les actes que vous pouvez décrire dépendent des
moyens que vous possédez. Ainsi, seul un combat-
tant parle des combats comme autre chose qu’une
bonne raison de cohabiter avec un lapin dans le pro-
chain terrier, et seul un tueur fait sauter une tête
d’un vif mouvement du poignet. Seul un acrobate
traverse une rue d’un bond fluide sans choir et
s’écraser ; et seul un médecin s’extasie devant les
splendides boyaux des blessés, si joliment luisants
dans cette lumière, avant de chercher comment les
rassembler. Cela ne signifie pas qu’autrui ne sera
pas intéressé par ce plat de tripes, mais il n’aura au-
cune chance de ranger celles-ci dans un ordre com-
patible avec la survie du patient.
Utiliser un moyen
Pour utiliser un moyen, il suffit de l’inclure dans la
description de votre action.
Je me sens seul, là, et perdu. Je m’assieds contre le
mur le plus chaud, je ferme les yeux, et j’utilise Inté-
gration pour tenter de percevoir uriën. Même si elle
est très loin, très faible, comme des étoiles quand
vient l’aube, ça me rassurera de savoir qu’elle est
encore là, que je l’ai juste perdue de vue.
Ou : Ah l’andouille ! Il a marché sur ses propres
boyaux et il en a arraché des morceaux ! Il a de la
chance que je tienne à l’interroger, parce que
d’habitude, je ne soigne pas les gens qui se négli-
gent ! Bon, j’enlève les morceaux qui n’ont rien à
faire là-dedans et je remets les autres à peu près en
place ; je recouds tout ça juste assez bien pour qu’il
ait une chance de parler.
Ou plus simplement, alors que vous évoluez entre
des monstres occupés à ronger le dobreth 1 d’un voi-
sin : « Eh, je suis discret… » Comme cela va de soi,
le Passeur ne vous demande pas plus que cet élé-
mentaire bon sens. C’est le cas également quand vo-
tre instinct de survie vous annonce un danger, et que
vous dégainez.
Ou : Oh que la hache de ce type est grosse. Oh qu’il
a l’air agressif. Oh que j’aimerais avoir moins bu et
être en état de filer. Mais en attendant… hic !… avec
tous les fêtards qui ont renversé leur verre sur le
sol… n’y a-t-il pas une petite chance qu’il
s’étale avant de m’atteindre ? Et qu’il s’assomme ?
Hic ! Oui ? Bon, je prépare un entonnoir et je lui
faire boire l’alcool le plus raide que je trouve, parce
qu’un adversaire bourré sera plus dans mes moyens.
Dans ce dernier cas, vous avez utilisé un moyen
bien particulier : votre connaissance des possibles,
et vous avez simplement rappelé au Passeur que la
situation elle-même pourrait bien vous arranger. Le
fait d’y avoir pensé est une action en soi.
1
Dobreth désigne aussi bien la mort non désirée que ce
qu’elle laisse, à savoir un corps inanimé sans fonctions
vitales apparentes.
Une action peut parfaitement impliquer plusieurs de
vos moyens ; le tout est qu’elle reste intéressante
plutôt que laborieuse.
Je lui saute dessus depuis la poutre où je me tenais,
et je lui plante mon épée dans les reins tout en usant
de celui de mes dons qui trouve les points faibles
dans les armures. Elle est peut-être dure, mais elle
est pleine de trous… Je t’en foutrai, moi, des protec-
tions ! Il croyait m’impressionner, avec son gros tas
de bronze clinquant ? Il apprendra à me connaître
mieux que ça !
Dépasser ses limites
Si vous faites une très bonne description qui dépasse
ce que vous pouvez espérer obtenir avec ce moyen,
le Passeur peut parfaitement l’accepter parce qu’elle
améliore le récit. Nous avons tous nos moments de
grâce, et nous sommes tous là pour rigoler, alors
parfois, peu importe le réalisme, seule compte la sa-
veur. À d’autres moments, vous réussirez aussi,
mais attendez-vous à une surprise…
S’ajouter des moyens ou en accepter
Souvenez-vous que vous êtes une interface adaptable
qui peut s’ajouter des moyens en jeu, en décrivant
comment vous les avez acquis ; ou accepter ceux dont
le Passeur pense la présence utile, s’ils vous plaisent.
S’aventurer en terrain inconnu
Vous pouvez aussi décider d’agir dans un domaine
que vous n’avez jamais pratiqué jusque-là, en in-
cluant vos erreurs et maladresses de débutant. S’il
s’agit d’une connaissance, vous avez une vue gros-
sière mêlant vérités et bêtises. En général, les pre-
miers résultats sont très mitigés. Peu à peu, le Passeur
les améliore et vous fait remarquer que vous êtes bien
moins maladroit à présent, ou que vous déduisez ai-
sément certains aspects de sujets qui vous échap-
paient totalement. C’est au Passeur de sentir à quelle
vitesse vous faire progresser ; dès qu’il est lassé des
récits de débutant, et que les récits de compétent
semblent prometteurs, il les laisse venir.
Subtilités d’action
Imaginer librement…
Quand le Passeur décrit un PNJ ou un lieu, chaque
joueur le visualise à sa manière. Aucun effort n’est
fait pour uniformiser ces visions, mais seulement
pour de se mettre d’accord sur des bases qui permet-
tront à chacun de réagir.
Peu importe qu’un joueur imagine un escalier droit,
et l’autre en colimaçon. Tant qu’ils pensent tous les
deux à s’en servir pour s’enfuir, le but est atteint.
Il peut être intéressant de comparer vos perceptions
avec celles des autres PJ, vous aurez parfois l’im-
pression de ne pas vivre la même histoire. Personne
n’a raison ou tort, mais c’est enrichissant, et cela
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peut vous aider à trouver des qualités à un PNJ ou
un lieu qui vous a fait mauvaise impression.
Choisir d’échouer
Même si vous voyez très bien comment surmonter
une difficulté, rien ne vous empêche de décider que
vous échouez et de décrire comment vous le faites.
Comme toutes les propositions d’action, le Passeur
décide s’il l’accepte.
Animer un PJ à plusieurs
Vous aurez souvent des choix à faire. Certains se-
ront rapides, d’autres vous feront hésiter. Même si
votre PJ réfléchit seul, exprimez ses pensées à haute
voix. Ainsi, le Passeur et les autres joueurs peuvent
à la fois vous aider en vous glissant des suggestions,
et tenter d’influencer votre décision ou vous pousser
à commettre certains actes qui les amusent. Ils ne le
font par la bouche de leurs personnages, mais en in-
carnant de petites voix nées dans votre esprit fertile
(c’est fou ce que votre esprit est malin et bavard !).
Vous argumentez contre ces voix, ou vous vous
laissez convaincre, à votre choix, car peu importe
d’où vient une idée, quand elle est bonne. C’est une
excellente manière de prendre des risques et de ra-
conter ce qui en résulte, et ce n’est pas suicidaire,
puisque le Passeur n’aurait pas accepté votre propo-
sition si elle ne l’avait pas inspiré.
Rappeler sa personnalité à autrui
Un joueur qui connaît bien le personnage d’un autre
joueur peut lui faire remarquer qu’à son avis, il ré-
agit à la situation de telle ou telle manière, autre-
ment dit, il propose une action naturelle pour l’autre,
qui décide si elle lui correspond ou non. Parfois, il
faut plusieurs têtes pour penser à tout ; n’hésitez pas
à accepter l’aide de celles des autres joueurs !
Gérer les surprises
Une action préparée discrètement n’a pas forcément
de signes précurseurs, et les témoins peuvent ne rien
remarquer. Si vous êtes inquiet, vous pouvez an-
noncer que vous vous tenez sur vos gardes ; le Pas-
seur considère qu’en cas d’agression par surprise,
vous pouvez réagir immédiatement plutôt que de
rester stupéfait quelques instants. Si ce qui vous ar-
rive est trop étrange, vous serez néanmoins figé
d’étonnement… dans un premier temps.
Si vous ne vous êtes pas méfié, vous subirez le dé-
but de l’agression sans pouvoir vous défendre, puis
vous vous protégerez ; mais si le premier coup vous
a tué, cela dérange peu votre agresseur.
Quelqu’un qui semble jouer aux cartes paisiblement
peut blesser son adversaire d’un coup de poing dans
la gueule, sans sommation. Il est également aisé de
pousser quelqu’un dans les escaliers sans qu’il ait la
moindre chance de voir qui a commis ce vilain délit.
Évidemment, il reste parfois des témoins indiscrets
et perceptifs, sans quoi ils n’auraient rien vu non
 plus ; il faut maintenant les acheter ou les éliminer,
selon que vous préférez les aider à gagner leur vie
ou exercer un peu vos talents d’assassin.
Soigner l’ambiance
Agir en équipe
Le temps ne vous est compté que dans certaines
scènes stressantes ; dans le reste du récit, il est inu-
tile de répartir les tâches entre PJ pour aller plus
vite. Vous pouvez donc vivre toutes les scènes du
scénario en compagnie des autres PJ, mais cela ne
vous empêche pas de vous occuper de vos affaires à
certains moments, ou de vous séparer parce que vos
loisirs sont différents. Même si vous êtes distant des
autres PJ et incapable de communiquer avec eux,
tous les participants restent à table et continuent à
décrire leurs actions à haute voix. Cela épargne des
résumés et des absences durant lesquelles certains
s’ennuient en attendant que l’histoire reprenne.
C’est aux autres joueurs d’assumer qu’ils ne savent
pas encore ce qui vous arrive, mais ils peuvent tou-
jours prétendre avoir un mauvais pressentiment ou
trouver une raison logique pour venir vérifier ce qui
vous arrive, par exemple que ça fait longtemps que
vous êtes parti, ou qu’ils aimeraient que vous leur
rendiez le chapeau que vous leur avez emprunté. Et
si un PJ décide qu’il ne raconte pas ce qui lui est ar-
rivé, les autres joueurs font semblant de l’ignorer.
Laisser une place à chacun
Chaque joueur a le droit d’expliquer comment il ré-
agit à chaque proposition du Passeur. Il n’y a pas
deux catégories de joueurs, les bons et les faire-
valoir, tous ont droit à de l’espace pour pratiquer. Si
un joueur peine à se faire entendre, le Passeur peut
faire taire les autres pour qu’il puisse s’exprimer.
Sachez reconnaître que vous avez coupé la parole à
un autre joueur, ou que vous prenez un peu trop de
place… et attendez votre tour. L’équipe est bonne
quand chacun apprécie les contributions des autres
participants et rebondit dessus pour enrichir son
propre récit ; écoutez-les donc. Il n’y a pas que le
scénario qui puisse vous donner envie de réagir.
Éviter le one-man show
Même si vos contributions sont très bonnes, elles
n’annulent pas le point ci-dessus. Aussi merveil-
leuse que soit votre prestation théâtrale, elle ne sera
jamais aussi amusante pour les autres joueurs que la
possibilité de s’impliquer eux-mêmes.
Éviter le favoritisme
Si vous avez l’impression que le Passeur ne prend
pas assez en compte vos propositions alors qu’elles
vous semblent valoir autant que celles des autres, di-
tes-lui franchement que cela gâche votre plaisir.
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La souplesse du récit
La gomme à passé
Même si Passeur tente de trier les propositions des
joueurs pour que l’histoire soit bonne, il ne peut pas
prévoir toutes les conséquences de ses choix. De ce
fait, il peut arriver que le récit devienne ennuyeux
ou mène à une impasse. Dans ce cas, il peut utiliser
sa gomme à passé, avec l’accord des joueurs ou sur
leur proposition. Peu importe que cela ait été joué et
vécu, cela n’a jamais eu lieu. C’est une manière
simple et efficace de reculer jusqu’à un moment où
l’histoire pourra repartir dans une autre direction,
qui amuse tout le monde. C’est également bien utile
pour considérer qu’un PJ n’a en fait rien dit… à un
PNJ qui le tuerait s’il l’avait fait.
Un scénario élastique
Le scénario n’est pas une donnée statique qui doit
être jouée à la virgule près. Même s’il est très détail-
lé, il est prévu pour être adaptable et laisser place à
de larges pans improvisés. Vous n’avez donc pas à
vous limiter à son contenu, vous pouvez proposer
des péripéties supplémentaires, par exemple en fai-
sant des hypothèses quant à la suite du récit, en ten-
tant de deviner l’identité du perturbateur, et en ex-
primant vos craintes. Si elles inspirent le Passeur, il
les inclut dans le récit, car elles empirent la situa-
tion, ou au contraire la rendent plus drôle. Certes,
cela équivaut à vous compliquer la vie, mais une pé-
ripétie bien présentée vaut toujours la peine d’être
vécue ; et d’autre part, vous aurez bien plus peur des
monstres qui correspondent à vos terreurs person-
nelles que des créatures génériques, alors pourquoi
vous priver ? Bien sûr, ces ajustements doivent tou-
jours permettre de jouer la suite du scénario… un de
ces jours. Vous n’êtes pas du tout pressés.
Vous pouvez aussi choisir des objectifs secondaires
compatibles avec l’objectif principal du scénario ;
ainsi, même si vous passez du temps sur ces objec-
tifs supplémentaires, vous pouvez revenir au scéna-
rio et le continuer.
À l’inverse, si un obstacle proposé dans le scénario
ne vous inspire pas, dites-le au Passeur. Si la scène
amuse les autres participants, ils la jouent sans
vous ; vous pouvez profiter de ce délai pour vous
demander si le problème était bien la scène, ou le
fait que vous ne saviez pas comment vous y impli-
quer. Si vous trouvez, dites-le, et réintégrez le jeu.
Vous pouvez aussi la jouer dans la peau d’un PNJ
plus apte à l’apprécier que votre PJ.
Doser les difficultés
Le Passeur dose les difficultés de façon à ce qu’elles
disparaissent quand elles ne sont plus un stimulant
pour les joueurs, mais qu’elles les découragent ou
les démotivent ; et il exauce ceux des souhaits des
joueurs qui lui inspirent un bon récit dès qu’il pense
que les PJ les ont bien mérités. Vous aidez beau-
coup le Passeur en exprimant à voix haute ce que
vous inspirent les péripéties que vous vivez : vous
en voulez encore, vous avez la migraine, vous en
avez marre, vous souhaitez souffler un peu, etc. Ce-
la permet au Passeur de faire avancer le récit à un
rythme qui vous convient ; n’étant pas devin, il ne
peut pas deviner ce que vous ne dites pas.
Actes et scènes simplifiés
Les scènes ne sont pas toutes jouées en détail ; cer-
tains objectifs peuvent être atteints sans détailler le
processus, dès lors que vous avez exposé un plan
valable. Cela peut avoir pour but de vous faciliter le
jeu si vos propositions sont bonnes, mais que vous
n’êtes pas encore très à l’aise ; le Passeur simplifie
certaines étapes nécessaires à leur accomplissement,
pour en arriver plus rapidement à la description de
leur résultat. Autrement dit, la difficulté est dosée
pour qu’elle vous convienne. Cela a aussi pour but
de raccourcir le récit de longs voyages ou des tâches
répétitives qui se déroulent sans incidents.
Des sens aux émotions
Stimuler vos sens
Dans votre vie quotidienne, vous appréhendez le
monde à travers vos sens, et vos sentiments vous in-
diquent aussi bien votre humeur que l’impact qu’ont
sur vous lieux et gens. Le scénario et le Passeur ten-
tent de vous stimuler d’une manière similaire, même
s’ils ne peuvent pas utiliser des images, des odeurs,
des contacts, des pertes d’équilibre et certains sons.
Essayez d’imaginer ces ressentis sur la base des
mots, des intonations et des mimiques du Passeur,
car ils font naître des émotions.
Des réactions légitimes
Le Passeur ne sait pas comment vous réagirez, il va
obtenir des effets prévus et d’autres, imprévus ; ne
faites aucun effort pour vous ajuster, votre réaction
est légitime quelle qu’elle soit, tant qu’elle respecte
le but du jeu : que tous les participants puissent
s’amuser. Vous avez le droit d’interpréter votre pa-
nique, votre fureur, votre profonde lassitude, en vé-
rifiant du coin de l’œil que les autres participants ne
s’ennuient pas. Comme tous les autres effets du jeu,
c’est à vous de cesser quand vous lassez. Il n’y a pas
de honte à ça, même un comédien professionnel
peut faire un bide, le tout, c’est d’avoir l’élégance
de passer à la suite. Votre PJ se calme, voilà tout, ou
change d’avis quant au comportement adéquat.
Gérer les relations humaines
Les scénarios demandent que les PJ soient capables
de manifester de la compréhension, du soutien, de
l’encouragement, d’apporter de l’aide, de coopérer,
de résoudre des problèmes en respectant les senti-
Alma - Livre du Joueur.doc - Page 47 - 27.03.2009
ments d’autrui et ses choix, de convaincre et moti-
ver plutôt que contraindre. Ce ne sont pas les PJ qui
le feront, mais vous… entre deux pétages de
plombs. Le scénario vous permet d’agir pour le
meilleur, mais aussi d’exprimer votre imperfection,
d’agir sous le coup de la honte, la peur, l’envie, la
colère, la rancune, la jalousie.
Si vous avez été stressé par le scénario, le Passeur
vous laissera vous défouler sans autres. Mais par-
fois, il vous interprétera les conséquences pour les
PNJ et cela pourrait vous donner envie de changer
vos méthodes maintenant que vous avez une idée de
leur impact. Beaucoup des PNJ que vous affronterez
ne seraient jamais devenu des monstres s’ils avaient
rencontré plus de bons côtés chez ceux qu’ils ont
côtoyés avant vous. Si vous êtes la suite des nuisan-
ces, ils vous traiteront comme tel et ce sera légitime.
Reconnaître comme tel l’impact négatif de vos ac-
tions et restaurer la qualité de votre relation à un
PNJ peut approfondir celle-ci : il sait désormais,
pour l’avoir subi lui-même, que vous n’êtes pas par-
fait, mais que vous savez reconnaître vos torts et que
vous avez à cœur de faire de votre mieux pour les
réparer. Bref, vous êtes un ami, ou du moins une
personne fréquentable, et il vous traitera comme tel,
et non comme un défouloir dont les souffrances lui
sont indifférentes, comme vous l’étiez aux siennes.
Gérer les émotions
Tout héros sait bien qu’il met sa vie en danger…
mais ça, c’est la théorie. Certaines scènes vous fe-
ront ressentir intensément le fait que vous allez
mourir, que vous n’en avez pas la moindre envie, et
vous ferez n’importe quoi pour vous en tirer, et ce à
quoi vous tenez avec vous (si possible, parce que ce
sera bien assez dur de se remettre de ce trauma-
tisme-là sans en plus y ajouter des deuils).
Le marine américain retrouvé inconscient près de 38
adversaires tués… ne voulait pas mourir ; la mère
qui vous massacre parce que vous menacez ses pe-
tits… ne voulait pas faire le deuil de ce à quoi elle
tenait. Il vous reste à découvrir de quoi vous êtes
capable, vous, quand vous êtes menacé.
Certains joueur diminuent leur niveau de stress en
mangeant, alors n’hésitez pas à poser de la nourri-
ture sur la table de jeu. Vous n’avez jamais englouti
du pop-corn pour vous calmer pendant un film
d’horreur ? Non ? Alors vous n’avez jamais trouvé
un film capable de vous faire vraiment peur.
Supporter l’horreur
Les scénarios ne vous maltraitent jamais en vain. Si
un sentiment négatif est éveillé en vous, c’est parce
que vous allez pouvoir changer quelque chose, ou
comprendre pourquoi certains PNJ, confrontés à cette
nuisance, sont entrés en résistance, mais ont besoin
d’aide, de votre aide bien sûr (sinon, que feriez-vous
là ?). Néanmoins, si un endroit vous est pénible, di-
tes-le au Passeur. Il suffit parfois d’un PNJ sympathi-
que, d’un lieu qui vous touche et vous sert de refuge,
pour que cela redevienne supportable.
Ménager sa sensibilité
Certains scénarios incluent du burlesque ou de la sa-
tire. S’ils touchent des sujets avec lesquels vous-
même préférez ne pas rigoler, ignorez-les ou modi-
fiez-les. Mais rappelez-vous toujours que ce jeu
vous parle d’Alma, et non de la Terre. Quand vous
êtes Alemdar, tout ce que vous avez laissé derrière
vous ne devrait plus avoir la moindre signification.
Mais en attendant qu’une telle distanciation soit
possible… ou que votre humour s’étende… triez.
Quelques dialogues de jeu
Recevoir des informations
Seul le Passeur lit le matériel du jeu, et il fournit aux
PJ des informations utiles en cours de scénario, s’ils
ont une chance de les connaître. Si un PJ a étudié les
cargues, cela donnera par exemple :
PASSEUR : Toi, tu as l’impression que cette petite
personne pâle avec de grandes oreilles pointues te
dit quelque chose.
PJ : Il est vrai que comme je me suis intéressé aux
cargues étranges, je n’ai certainement pas manqué
ce peuple… avec la tête qu’il a, je n’ai pas pu rater
l’illustration, et j’ai sûrement lu quelques lignes au-
tour. Qu’est-ce que je sais à leur sujet ?
Le Passeur fournit quelques informations générales.
Elles peuvent aussi être particulières, par exemple :
PASSEUR : Toi, tu n’es pas très chaud pour couper un
arbre quand il y a ce genre d’ombres dans la forêt…
PJ : Et pourquoi ?
PASSEUR : Parce que ce sont des Ailes-en-Faux, et
que rares sont les têtes qui restent sur les épaules
quand un arbre est mutilé en leur présence.
Dans le cas où une information est nécessaire, mais
qu’aucun PJ ne s’y est intéressé, à charge du Passeur
de pallier à leur inculture en respectant le cadre :
PASSEUR : Toi, tu as l’impression que cette petite
personne à la peau blanche avec de grandes oreilles
pointues te dit quelque chose.
PJ : Moi ? Ben non, je ne m’intéresse qu’aux peu-
ples aux couleurs marrantes ! Ce n’est pas drôle,
juste blanc…
PASSEUR : Bon… (intense réflexion). Comme tu es
observateur, tu remarques que le responsable de
l’économat est crispé à la vue de cette créature.
PJ : Ah ? Eh bien, je vais lui demander pourquoi Je
ne savais pas qu’un nain blafard pouvait être une
menace pour un économat. Mais avant…
PASSEUR : Oui, avant ?
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PJ : Je planque ma bourse et mon matériel. On ne
sait jamais...
PASSEUR : Je ne vois pas du tout pourquoi tu
t’inquiètes.
PJ, HORS JEU : Vraiment ? Alors, tu gagneras au-
tant que moi à écouter ce que dira le responsable de
l’économat. Bon, qu’est-ce qu’il m’apprend ?
Trouver des indices
PJ : Je fouille la pièce. Qu’est-ce que je trouve ?
PASSEUR : Qu’est-ce que tu cherches, au juste ?
PJ : J’aimerais savoir si l’assassin a laissé des traces.
PASSEUR : Quel genre de traces, et où les cherches-tu ?
PJ : Je vois mal comment il a pu se déplacer sans
laisser des empreintes dans ce gros tapis moelleux.
Et puis, toutes les fenêtres étaient fermées, donc il a
pu laisser une trace en les ouvrant. Finalement,
c’était boueux hier, il y a peut-être une empreinte
dans la platebande.
PASSEUR : C’était une très bonne idée d’ouvrir la
fenêtre et de jeter un coup d’œil.
PJ : Ah oui ? Pourquoi ?
PASSEUR : Il y a un cadavre sur le sol.
PJ : Hé hé… il ne ressemblerait pas à un assassin,
par hasard ?
PASSEUR : À quoi reconnais-tu un assassin ?
PJ : Je sais reconnaître un collègue, tout de même !
PASSEUR : C’est bien vrai. D’accord, c’est bien un
assassin. Et à voir les traces sur la façade, le pauvre
a dû glisser en descendant.
PJ : Tant mieux. Eh, le guérisseur, tu viens ? Il y a
du dobreth à ranimer, j’aimerais bien l’interroger.
GUÉRISSEUR : Mais gentiment, alors. Je ne les re-
colle pas pour que tu les casses.
PJ : Promis, promis. Je ne voudrais pas que la pro-
fession se dépeuple, je pourrais finir surmené.
Attaquer
Pour décrire une action de combat, ne dites pas « Je
le tue », cela ne fonctionne jamais ; ni « Je le frappe
avec mon épée ». Pensez que le combat est une rela-
tion humaine destructrice, et non un simple mouve-
ment. Décrivez les sentiments qui nous animent, vos
envies de meurtre ou de survivre à tout prix, la mé-
chanceté de certaines attaques ; plus c’est choquant,
violent, barbare, vicieux ou méprisant la vie, et plus
cela donne un récit intéressant. Un exemple :
PJ : Celui-là, je l’ai assez vu. Je prends ma dague,
tu sais, la petite, effilée, celle dont le pommeau est
un sourire de nourrisson. C’est de circonstance, puis
qu’on dit qu’on revoit toute sa vie quand on y passe,
et moi je m’en vais lui offrir ce beau spectacle…
PASSEUR : Ça, c’est gentil. Comment t’y prends-tu ?
PJ : Je m’approche de lui l’air de rien… comment
réagit-il ?
PASSEUR : Il a l’air absolument ravi de te voir. Il te
pose une de ses mains potelées et maculées de graisse
sur l’épaule, et il te propose de boire un verre.
PJ : Mais comment donc ! Je lui enfonce la tête
dans son assiette, puisqu’il aime tant le gras, et je lui
plante ma dague juste dans le creux sous l’occiput,
droit dans le cerveau. Enfin, en espérant que c’est
un organe vital chez lui…
PASSEUR : Allons, allons, c’est un organe vital chez
les lapins, pourquoi pas chez lui ? La preuve, il se
tord dans quelques convulsions…
PJ : J’esquive les débris de nourriture, la trace de
ses mains me suffit comme tache.
PASSEUR : … et il finit par s’immobiliser. Les au-
tres clients te regardent. Que fais-tu ?
PJ : Je dis : « Excusez-moi du dérangement, c’était
un défi : j’avais parié que je pourrais le changer en
combattant. Ça y est presque, il est devenu le four-
reau d’une dague. »
PASSEUR : Il y a un silence. Et puis l’un d’entre eux
se lève et demande si ton fourreau a l’usage de ses
bagues, ou si sa décoration t’importe peu.
PJ : Je les laisse piller le cadavre et j’en profite pour
repartir.
PASSEUR : Avec ou sans ta dague ?
PJ : Avec !!! Je veux bien donner le repos éternel,
mais pas mon matériel !
PASSEUR : C’est bien de savoir mesurer sa généro-
sité… ce serait triste de souffrir de pauvreté par ex-
cès de bonté !
Survivre à une agression
PASSEUR : Tu entends un bruit derrière toi.
ESTAN : Je jette un coup d’œil discret… ne me dis
pas que…
PASSEUR : Hé si… il semblerait bien qu’une ci-
trouille sauteuse t’ait repéré. Elle te fonce dessus
avec beaucoup de détermination.
ESTAN : Je me trouve un arbre avec une branche basse
et je grimpe de mon mieux. Oh là là, je le savais bien
que j’aurais dû faire le mur plus souvent ! Heureuse-
ment qu’il ne pleut pas, si c’était mouillé en plus…
NERIO : Moi, je suis déjà dans un arbre. Je l’avais
bien dit qu’il était idiot d’y aller par le sol. Et je me
demande si je vais sortir une épée pour l’aider ou
mes pinceaux pour immortaliser la scène… au fond,
ça pourrait être la dernière fois que je vois mon
brave compagnon.
VASAR : J’aide ce pauvre Estan à monter. Par ail-
leurs, je crains bien que ce faisant, je ne pousse un
peu Nerio et ses pinceaux… il pourra voir la ci-
trouille de plus près.
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ESTAN, essoufflé, à Nerio : Tu n’as jamais dit que
c’était idiot ! Tu es seulement monté sur cet arbre
pour épier l’atelier du peintre voisin !
NERIO : Et alors ? Tu ne veux pas que je crie sur les
toits que je fais de l’espionnage artistique, non ?
PASSEUR : Nerio, tes pinceaux viennent de se casser.
NERIO : Ah bon ? Pourquoi ?
PASSEUR : Oh, probablement parce qu’ils n’étaient pas
conçus pour résister à l’assaut d’une citrouille. C’est fou
ce que vous êtes moins attentifs quand vous vous en-
gueulez. À propos : vous faites quelque chose ?
Influencer un PNJ
Le Passeur ne peut pas dire ce que fait un PJ (sauf
quand une impulsion ou un PNJ en prend le
contrôle), et les joueurs ne peuvent jamais dire ce
que fait un élément du monde ou un PJ autre que le
leur ; mais chacun peut proposer. Ainsi dans le dia-
logue suivant, chacun module la situation sans pour-
tant rien imposer :
PASSEUR : Tu tiens à rester à découvert ?
JOUEUR : Euh ? Pourquoi ?
PASSEUR : Les archers ont bandé leurs arcs, et ton
instinct de survie pense que tu es en passe de te
changer en pelote d’épingles. Et à propos…
JOUEUR : Oui ?
PASSEUR : Grosses, les épingles.
JOUEUR : Oups… c’est vrai que je suis un peu suici-
daire, mais je préfère les manières agréables de mou-
rir. Alors… ai-je un endroit où me cacher ? Je sais
bien qu’il fait plat, par ici, mais je suis sûr qu’un des
gros lourdauds qui nous accompagnent est assez
large et protégé pour que je me cache derrière lui.
PASSEUR : Et pourquoi accepterait-il ?
JOUEUR : Mais parce que je vois bien que la sueur
coule sur sa nuque ! Le pauvre, comme cela doit le dé-
ranger. Et moi, j’ai justement des lingettes à la citron-
nelle, tu sais, je les ai volées à l’hôtel en partant…
PASSEUR : Comme d’habitude.
JOUEUR : Ah ! Je ramasse toujours ce qui traîne…
il faut laisser sa chambre propre quand on en sort,
maman me le disait toujours.
PASSEUR : Ça marche ! Il est bien content que tu lui
rafraîchisses la nuque.
JOUEUR : Brave pignouf. Les archers pourraient me
dire merci.
PASSEUR : Pourquoi ?
JOUEUR : Sans moi, les pointes de flèche auraient
pu rouiller. Avec toute cette sueur…
PASSEUR : Ben voyons. Tu penseras à leur deman-
der une petite contribution, je me réjouis de voir ça.
JOUEUR : À propos, les copains, j’aime bien vous
voir poitrine offerte à l’adversité… mais ne pensez-
vous pas que vous seriez tout aussi jolis derrière
d’autres hommes murailles ?

Déroule
Déroulement d’une partie
En résumé
Vous arrivez là où le Passeur voulait vous faire aller,
vous découvrez ce qui peut vous plaire ou vous dé-
plaire en ce lieu et vous motiver à le préserver ou
l’améliorer ; vous identifiez les problèmes que le scé-
nario met à votre portée, puis les ressources disponi-
bles ; vous créez une solution et vous l’appliquez.
Puis vous attendez impatiemment l’ennui suivant,
tout en goûtant un repos bien mérité.
Découvrir un pays
Dans certains cas, le scénario commence par vous
faire partir en voyage et découvrir un nouveau pays,
ou un lieu inconnu dans votre propre pays. Le Pas-
seur vous laisse le temps de vous familiariser avec
celui-ci, en jouant des scènes qui vous permettent de
vous sentir un peu moins dépaysé, et d’établir un
contact avec les habitants, voire de vous faire quel-
ques premiers amis.
La perturbation
Le Passeur introduit ensuite les éléments qui vont
perturber votre existence. Ce peut être un rôle qui
vous est dévolu, par exemple garde du corps d’un
suicidaire, ou une déviation de la normalité que
vous devriez résorber si vous ne tenez pas à être ba-
layé par un désordre croissant.
Comprendre
Vous tentez de comprendre ce qui se passe, plutôt
que de d’agir sur la base d’une impression ou d’une
hypothèse non vérifiée, parce qu’une solution choi-
sie en toute méconnaissance de cause ne peut pas
être efficace. Or, le problème est généralement mor-
tel, d’où l’intérêt de ne pas (trop) se tromper. Vous
êtes une sorte de pompier, et si vous tenez à affron-
ter un feu sans eau ou en y ajoutant de l’essence…
mes condoléances.
Tous les scénarios contiennent suffisamment d’indi-
ces pour se faire une idée claire du problème sans
être égaré sur des dizaines de fausses pistes. En ef-
fet, le nombre de causes possibles est si grand à Al-
ma que le souci du Passeur est de vous aider à trou-
ver la bonne, pas à vous balader… sauf quand
l’adversaire a pris la peine d’attribuer ses méfaits à
quelqu’un d’autre, ce qui est sage de sa part ; mais
vous finirez par identifier le vrai coupable, quelques
péripéties plus tard.
Vous avez tout intérêt à nouer des relations amicales
avec les PNJ présents, qui ne vous parleront de ce
qu’ils ont remarqué ou de ce qui les préoccupe que
s’ils sont en confiance, car personne ne fait des
confidences à des inconnus, surtout s’ils ne sont pas
rassurants ou ne semblent pas compétents. Vous
n’avez pas besoin d’être célèbre, aucun Alemdar ne
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se fie à une réputation ; mais votre comportement
lors des rencontres doit jouer en votre faveur.
Par ailleurs, comme la suite du scénario pourrait
vous réserver des catastrophes supplémentaires, il
vaut mieux avoir le plus d’alliés possible. Cela ne
signifie pas que vous passez votre temps à cultiver
votre carnet d’adresse ; cela ne servirait à rien, car la
plupart des Alemdar n’ont que faire des amitiés in-
téressées. Avoir un bon contact avec eux et se de-
mander ce qui pourrait leur faire plaisir suffit.
Observer
Quand vous vous rendez sur les lieux d’une étrange-
té, votre capacité à observer est fondamentale. Cer-
tes, un PNJ est toujours prévu pour remarquer les
indices importants à votre place si vous les man-
quez, mais n’est-il pas un peu frustrant d’être assis-
té ? Vous posez toutes les questions auxquelles vous
souhaitez une réponse, et le Passeur vous dit si
celle-ci peut être déduite ou non, quitte à vous de-
mander comment vous obtenez cette information.
Dans certains cas, il ne sera pas possible de tout
comprendre. Le Passeur vous laisse également faire
toutes les hypothèses que vous voudrez, puisqu’il
peut choisir d’intégrer certaines craintes au scénario.
Par ailleurs, visiter la scène d’une manifestation
anormale peut s’avérer dangereux si les propriétés
du monde sont altérées ou si un être néfaste s’y dé-
chaîne. Vous ne devriez jamais hésiter à courir pour
vous mettre en sécurité, et revenir quand vous aurez
trouvé le moyen de vous protéger, d’amadouer la
menace, ou de résoudre le problème.
Élaborer un plan
Une fois que vous avez compris (ou pensez avoir
compris) les tenants et aboutissants d’un problème,
vous élaborez un plan permettant de le résoudre. En
général, tous les moyens et personnes nécessaires
sont disponibles dans le scénario, et il n’est pas utile
d’aller chercher des solutions hors de son cadre. Une
erreur de votre part peut mener à un échec et à la né-
cessité d’improviser très vite un plan de secours.
Mais le but du Passeur n’étant pas de vous tuer, à
moins que vous n’accumuliez les erreurs grossières et
les prises de risque inconsidérées, il améliorera par-
fois vos propositions de solutions. Par ailleurs, le
Passeur peut rappeler l’existence votre l’instinct de
survie quand vous vous dirigez tout droit vers la mort
dans la joie et l’insouciance. C’est un très bon moyen
pour signaler que certaines situations sont désespé-
rées… pour le moment ; ou que vous n’avez peut-être
pas réglé le problème, finalement, puisqu’il est en-
core en mesure de vous menacer.