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Le Cadre européen commun de référence
pour les langues
Un manuel
Il est destiné à être utilisé dans le cadre de la formation (continue) des enseignants de
langue impliqué dans le Plan « Trentino trilingue ». Il présente, de manière délibérément
très succincte, les utilisations du CECR dans l’organisation des enseignements de langues.
2017
Jean Claude Beacco
Sommaire
Présentation générale
4 Le CECR a-t-il été inventé pour créer des tests et des examens ?
22 Il CECR et CLIL/EMILE
Conclusion
Présentation générale
C’est à une relecture fidèle et sereine qu’invite le présent texte. Il est avant
tout destiné à guider des utilisations légitimes du CECR, c’est-à-dire, entre
autres, à délimiter les domaines dans lesquels son emploi est particulièrement
approprié.
Ce retour aux sources, en quelque sorte, est rendu plus indispensable encore
aujourd’hui par la réalisation en cours du Plan Trentino Trilingue. Les autorités
politiques de la Province autonome de Trente ont décidé de considérer que les
politiques linguistiques éducatives constituaient une dimension importante des
politiques publiques et ils ont concrétisé ces chois stratégiques dans le Plan
Trentino Trilingue. https://www.vivoscuola.it/trentino-trilingue
Ce Plan est fondé sur certains principes européens relatifs aux politiques
linguistiques. Mais l’élargissement qu’il organise de l’enseignement des
matières en langue étrangère (EMILE/CLL) tout au long du curriculum rencontre
des difficultés de réalisation, en particulier en ce qui concerne ses modalités de
réalisation méthodologique en classe. On y cite le CECR, mais il ne semble pas
que celui-ci soit sollicité autant qu’il pourrait l’être. Un des objectifs de ce
manuel est ainsi d’examiner en quoi l’utilisation du CECR serait en mesure de
rendre plus claire la mise œuvre du Piano Trentino Trilingue, non seulement
pour les enseignements EMILE/CLIL mais pour ceux de langue, d’italien et des
disciplines, c’est-à-dire finalement de toutes les matières, puisque qu’elles sont
toutes linguistiques.
Pour une bonne lecture du CECR et pour éviter des malentendus fréquents, il
importe de commencer par donner des informations élémentaires et
factuelles. Il faut aussi clarifier certaines idées reçues à son propos. Ces mises
au point sont présentées dans les fiches suivantes auxquelles on a donné
l’allure de réponses à des questions fréquentes, comme : Qu’est que le Conseil
de l’Europe ? Est-il obligatoire d’ « appliquer » le CECR ? Le CECR est-il un
programme européen pour les langues ? Le CECR a-t-il été inventé pour créer
des tests et des examens ?
Ne vous contentez pas de ce que vous avez entendu dire du CECR. Allez vérifier
vous-mêmes, car on fait dire beaucoup (trop) de choses à ce document.
Lisez-le ou, mieux, apprenez à le connaître et familiarisez-vous avec lui, car c’est
un instrument de travail.
Les questions reliées aux langues constituent une très petite partie de ses
activités. Mais celles-ci y sont abordées depuis plus de 60 ans dans le cadre de
son Unité des politiques linguistiques. Pour un résumé de ses activités, voir :
Les langues pour la démocratie et la cohésion sociale. Diversité, qualité, équité.
Soixante ans de coopération européenne. 1
3
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Source/Source2014/RecCM-(2014)5_LangScol_It.pdf
insuffisamment préparée ou expliquée et le QCER est ressenti par les
enseignants comme un instrument technocratique qui leur est étranger ou
qu’ils peuvent même considérer comme dommageable pour
l’enseignement/apprentissage des langues. De plus, on a laissé croire ou l’on a
cru que ce document proposait des réponses à toutes les questions que pose
l’organisation des enseignements des langues. C’est loin d’être le cas, en
particulier pour ce qui concerne les activités d’enseignement elles-mêmes et
leur organisation en séquences (voir section III).
4
C’est nous qui soulignons.
FICHE 3
Pour comprendre son rôle, il ne faut pas perdre de vue qu’il présente beaucoup
de points communs avec les référentiels de compétences utilisés dans le monde
économique. Ces documents ont pour fonction de décrire, de manière aussi
précise que possible, les compétences qui définissent et qui caractérisent un
emploi ou une fonction donnée. Ils se présentent comme un ensemble de
compétences hiérarchisées et classifiées en catégories. Chacune de ces
compétences doit être repérable à un indicateur, qui est le plus souvent
constitué par les résultats tangibles et observables que produit cette
compétence. Ils sont destinés à permettre le pilotage et l’adaptation au
changement des ressources humaines.
Le CECR a-t-il été inventé pour créer des tests et des examens ?
Le CECR est victime de son succès, car les thématiques qui ont assuré sa
diffusion ont aussi contribué à en donner une fausse image.
Le CECR a été réalisé pour des groupes d’utilisateurs différents, allant presque
des ministres ayant en charge l’éducation aux étudiants de niveau avancé. Et,
pour ces utilisateurs, des Guides spécifiques ont été élaborés : le QERC n’offre
pas les mêmes ressources aux différents utilisateurs, évaluateurs et testeurs
compris, parce qu’ils n’ont pas les mêmes besoins. On peut immédiatement
remarquer que le sous-titre du CECR est : apprendre, enseigner, évaluer.
L’évaluation vient en dernier et n’est traitée qu’en une douzaine de pages dans
le chapitre 9 et dernier du document.
Mais ses premiers utilisateurs ont été les instances privées ou les organismes
publics ou semi-publics responsables des certifications en langues étrangères.
Cela s’explique par le fait que des enseignements de langues étrangères et des
certifications en langues sont proposés, dans de nombreux pays, en dehors du
système éducatif. La demande sociale de certifications est grandissante,
puisque les langues sont désormais considérées comme faisant partie du
capital professionnel de chacun. Or les examens scolaires (baccalauréat
français, maturità italienne, par exemple) ne caractérisent pas les compétences
en langues étrangères sur la base de critères clairs, transparents et
standardisés.
Les organismes certificateurs, qui proposent aussi des cours de langue, comme
les examens de Cambridge pour l’anglais langue étrangère ou l’Istituto
Cervantes (pour l’espagnol langue étrangère) ont certaine indépendance qui les
rend généralement plus réactifs à la demande sociale. Et les professionnels du
domaine sont très organisés au niveau national et international, par exemple, à
travers l’Association des testeurs en langues européens (ALTE
http://www.alte.org ).
Dans ce contexte, il est assez naturel que l’on ait utilisé le CECR pour réaliser
des tests, lui qui redonne de la visibilité à la notion de compétence, après 30
ans d’approche dite communicative de l’enseignement des langues. L’approche
de l’enseignement par compétences, définies et identifiées par des
performances, permet de caractériser les formes de la maîtrise d’une langue
étrangère. On peut ainsi définir des points de référence ou des standards de
performance explicites et identiques d’une langue à l’autre. Cela permet
d’augmenter la qualité et la fiabilité des certifications en langues, en particulier,
à partir des niveaux de référence et des descripteurs correspondants du
chapitre 4 du CECR. Les seuils fonctionnels d’apprentissage mis au point par
ALTE à partir des descripteurs du CECR figurent dans l’annexe D du document
(Les spécifications de ALTE).
La notion de niveau ne figure pas dans les concepts principaux du CECR (2.1),
mais elle en est devenue la catégorie la plus connue et la plus diffusée, sous le
formes compactes (A1, A2, B1, B2, C1, C2) qui sont désormais omniprésentes.
En fait, c’est une notion ancienne utilisée depuis longtemps dans
l’enseignement des langues avec ses catégories : débutant, faux débutant,
moyen, avancé… Mais il n’était pas possible de décrire de manière très précise
les « compétences » correspondantes (concept non utilisé alors) autrement
qu’en termes grammaticaux, spécifiques donc à chaque langue et avec de
fortes variations d’une définition à l’autre.
Cet étagement en niveaux est justifié parce qu’il « rend plus concret ce qu’il est
approprié d’attendre » à chaque étape. Et il autorise « l’organisation en unités
d’enseignement qui tiennent compte de la progression » (2.2). Les 6 niveaux
principaux peuvent être dédoublés et cela permet de dessiner des progressions
plus souples (3.5) ou même multiples (progression spécifique par compétence).
On peut dire qu’un apprenant se trouve à telle ou telle étape de son parcours
d’apprentissage si les textes (oraux et écrits) qu’il produit sont conformes à
tous les critères (c’est-à-dire à tous les descripteurs) qui spécifient celui-ci et
non à quelques-uns (par exemple, ceux du chapitre 4 du CECR).
FICHE 6
D’autres instruments de référence ont précédé le CECR, mais ils ont surtout
proposé des inventaires de contenus à enseigner. Très tôt, en effet, en
didactique des langues, des travaux ont porté sur les critères ou les enquêtes à
mener pour sélectionner les éléments des langues à enseigner et pour les
répartir graduellement dans le temps de l’apprentissage (par ex. Mackey 1965
ou Stern 1984).Cela a abouti à des inventaires lexicaux et grammaticaux
comme le Basic English (M. Ogden & M. Richards) ou comme Le Français
fondamental, élaboré entre 1951 et 1954 (Gougenheim et al. 1967) qui a servi
de base à l’élaboration des méthodes audio-visuelles pour le français langue
étrangère de cette période.
On peut aujourd’hui encore utiliser ces relevés inventaires que sont les
Niveaux seuils du Conseil de l’Europe, soit par exemple :
pour l’anglais :
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Waystage_CUP.pdf
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Threshold-Level_CUP.pdf
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Vantage_CUP.pdf
pour le français : Coste D. et al. Un niveau-seuil (1976).Paris. Didier.
pour l’allemand : Baldegger M., Müller, M. & Schneider, G.
(1981). Kontaktschwelle Deutsch als Fremdsprache. Langenscheidt.
Ceux-ci ont souvent servi de base à l’élaboration des Descriptions des niveaux
de référence du CECR par langue (DNR, voir fiche 10)
Il ne pouvait pas non plus être très novateur sur le fond, puisqu’il est supposé
convenir à 47 états membres dont les traditions éducatives sont multiples. Il
met certes l’accent sur certains aspects de la réflexion didactique, comme le
montre sa bibliographie générale. Mais il est demeure, malgré tout, un plus
petit commun dénominateur qui ne se singularise pas par des options
théoriques en nette rupture avec l’existant. Ce qui est vraiment novateur est en
fait la synthèse qu’il parvient à construire en articulant entre eux des éléments
connus (comme compétence, niveau, texte ...). D’une certaine manière, il
constitue comme le modèle sous-jacent qui a manqué aux différents Niveaux
seuils réalisés langue par langue.
Références
Les inventaires de compétences, qui se sont révélés être les plus les plus
utilisés, figurent au chapitre 4, qui est consacré aux formes d’utilisation de
langue dites activités langagières. Celles-ci sont orales ou écrites, interactives
ou non interactives, de réception, de production ou de médiation, soit 8 séries,
subdivisées elles-mêmes en sous éléments et étagées en niveaux de référence.
Moins connues mais tout aussi fondamentales sont les descriptions des
stratégies qui rendent possibles ces activités, stratégies d’apprenants/de
locuteurs qui pourraient aussi servir de base à des stratégies d’enseignement.
La fin du chapitre (4.6) est consacrée à la notion de texte, à travers des
catégories comme de types et de genres de textes. Mais celle-ci semble
s’appuyer encore assez peu sur les acquis de l’analyse du discours et la notion
de genre n’est pas utilisée ensuite dans la spécification de la compétence
discursive (5.2.3.1) (voir fiches 13 et 14).
Le CECR est surtout connu pour ses échelles à 6 niveaux qui servent à décrire ce
qu’est apprendre et connaître une langue. Il en compte 54 dont nous
reproduisons ici le titre (version anglaise).
Communicative Activities
1. Overall Listening Comprehension
2. Understanding Interaction between Native Speakers.
3. Listening as a Member of a Live Audience
4. Listening to Announcements & Instructions
5. Listening to Radio & Audio Recordings
6. Audio/Visual Watching TV & Film
Communication Strategies
Dans une étude publiée en 1997 (alors que le CECR n’existe encore qu’en
version provisoire), D. Coste (un des auteurs du CECR), D Moore et G. Zarate
publient un texte intitulé : Compétence plurilingue et interculturelle. On y pose
l’existence d’une compétence sociale de communication verbale plurielle et, en
particulier, non limitée à des échanges dans une seule langue :
On désignera par compétence plurilingue et pluriculturelle, la compétence à
communiquer langagièrement et à interagir culturellement possédée par un
locuteur qui maîtrise, à des degrés divers, plusieurs langues et a, à des degrés
divers, l’expérience de plusieurs cultures, tout en étant à même de gérer
l’ensemble de ce capital langagier et culturel. L’option majeure est de
considérer qu’il n’y a pas là superposition ou juxtaposition de compétences
toujours distinctes, mais bien existence d’une compétence plurielle, complexe,
voire composite et hétérogène, qui inclut des compétences singulières, voire
partielles, mais qui est une en tant que répertoire disponible pour l’acteur
social concerné (Coste, Moore et Zarate, 1997 : 12)7.
Cette description du locuteur (de type sociolinguistique) figure au début du CECR
(1.3) : distinguée du multilinguisme (défini comme la présence de plusieurs
langues dans un même espace), l’éducation plurilingue est présentée comme
une modification profonde des finalités des enseignements dans une section
6
Le concept « pluriculturel » sera remplacé dans les textes important produits ensuite par le Conseil de
l’Europe par « interculturel ».
7
Coste, D., Moore, D., & Zarate, G. (1997). Compétence plurilingue et pluriculturelle. Vers un Cadre Européen
Commun de référence pour l’enseignement et l’apprentissage des langues vivantes, Strasbourg, Éditions du
Conseil de l’Europe. Disponible en ligne: http://www. coe. int/t/dg4/linguistic/Publications_FR. asp.
intitulée « qu’entend –on par plurilinguisme ? (1.3) qui le définit ainsi : « le but
est de développer un répertoire langagier dans lequel toutes les capacités
linguistiques trouvent leur place. » (1.3). La notion de plurilinguisme apparaît de
nouveau à l’ouverture du chapitre 6 : Qu’est-ce que les apprenants doivent
apprendre ou acquérir ? (6.3.1), où l’on retrouve les formulations de l’étude de
1997 et en 8.1, au début du chapitre traitant de la diversification des curriculums
(rédigé par D. Coste).
Cette place réduite faite à cette notion dans le texte du CECR n’empêche pas de
considérer que le plurilinguisme est l’objectif englobant (overarching) de
l’apprentissage des langues. De cette manière, le CECR entend sortir de la
perspective qui fait de la compétence « native » le but atteindre pour tous et la
seule véritable compétence en langue. Et il fait aussi comprendre que le
« bilinguisme » est qu’une forme particulière prise par la compétence langagière
individuelle. La compétence plurilingue et pluriculturelle est à considérer
comme un capital langagier, disponible pour chaque locuteur sous la forme
d’un répertoire de compétences en différentes langues ou variétés de langues,
une réserve de ressources formelles et sociolinguistiques pour les
apprentissages ultérieurs et il est modelé par l’ensemble des expériences
constitutives de la vie personnelle.
- à légitimer les langues des répertoires individuels qui sont minorées d’un
point de vue sociolinguistiques (par ex. parlers familiers, certaines
langues apportées par les migrants…) ;
- -à développer la maîtrise des langues déjà connues (en particulier la
langue de scolarisation utilisées dans les matières scolaires, qui peut être
la langue de la famille de la plupart des apprenants) et en donnant des
compétences, à quelque niveau de maîtrise que ce soit, dans des langues
non encore connues ;
- en diversifiant les répertoires individuels pour qu’ils permettent de
prendre conscience de la variété des systèmes linguistiques (et des
moyens qu’ils ont construit pour exprimer le sens et le monde) et de
répondre aux besoins et aux désirs de chacun.
8
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/guide_niveau2_EN.asp?
langues pour l’éducation disponible sous forme d’un site dédié9 créé en 2009,
proposant des ressources et de instruments de référence. Voici le plan de ce
site :
9
www.coe.int/lang-platform/fr
10
http://www.coe.int/t/dg4/Linguistic/Source/Plurilingual/.pdf
11
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Source/Subjects.pdf
2016 : le Guide pour l'élaboration des curriculums et pour la formation des
enseignants -Les dimensions linguistiques de toutes les matières scolaires.
FICHE 10
Des DNR (english : Reference level descriptions, RLD) ont été réalisées pour
un grand nombre de langues. Voici quelques indications sur les principaux.
For English
http://www.englishprofile.org/
Pour le français
Per l’allemand
The new strategy for the development of RLD was developed first of all for the
German language. On the initiative of the Goethe Institute, Profile
deutsch (Langenscheidt 2005) was drawn up by a tri-national author team. It
identifies the German linguistic elements corresponding to the competence
descriptors of the 6 CEFR levels (A1, A2, B1, B2 and C1, C2). This instrument is
available on CD-ROM and comprises a reference manual, a resource bank and a
data bank, providing an overview of the subject dealt with at each level and the
relevant facts needed for examinations. Profile deutsch was the first reference
level description to cover all 6 levels of the CEFR. For more information: ÖSD :
Austrian Language Diploma Goethe Institute Langenscheidt
Pour l’espagnol
Pour l’italien
L’Università per Stanieri di Perugia ; Centro Valutazione Certificazioni
Linguistiche a réalisé une DNR pour l’enseignement de l’italien comme langue
étrangère disponible sous forme d’ouvrage et de CD
Spinelli B. & Parizzi F. (2010) : Profilo della lingua italiana. Livelli di riferimento
del CECR A1, A2, B1, B2. Milano : La Nuova Italia.
Fonctions cognitives-linguistiques
Pour EMILE/CLIL, on peut imaginer de créer des inventaires comparables pour
les fonctions cognitives-linguistiques Celles-ci sont les représentations verbales
d’opérations cognitives (comme décrire, énumérer, comparer, déduire…), telles
que réalisées, de manière conventionnelle, dans les textes scientifiques A partir
de recensement des réalisations d’une fonction dans ces textes, il est possible
de recenser des formes linguistiques.
Par exemple, en français, une définition peut être formulée au moyen :
d’un verbe : on appelle X... ; X se définit comme… ;
d’une simple juxtaposition (entre parenthèses ou non) ;
de c’est-à-dire… ;
d’une proposition avec qui que… Par ex. : La rétine est constituée de deux
sortes de cellules sensibles à la lumière. Les bâtonnets sont… Les cônes
permettent… ;
de l’emploi de termes généraux (caste = catégorie sociale dans laquelle on
naît) ;
d’un exemple ou d’une série d’exemples ;
d’une ou plusieurs comparaisons ;
d’une opposition ;
d’une paraphrase ;
de l’étymologie ;
par une description des caractéristiques ;
[…]
Une caractéristique importante de ces inventaires de fonctions cognitives-
linguistiques pourrait être que leurs réalisations verbales sont enaprtie
communes dans au moins une partie des matières enseignées (y compris la
langue de scolarisation comme matière) ; cela assurerait des transversalités qui
sont indispensables à tous les enseignements langagiers (voir fiche 17).
FICHE 11
Fonction cognitive-linguistique : terme utilisé ici (mais d’autres termes ont été
proposés comme opérations discursives, opérations cognitives ....) pour
désigner des opérations intellectuelles et leurs réalisation verbales comme
conclure, déduire, expliquer, donner un exemple, citer… Ces réalisations
verbales ne sont pas le reflet de ces opérations intellectuelles mais les formes
sous lesquelles celle-ci sont exprimées par le langage, d’autant qu’elles n’ont
pas d’existence avant leur verbalisation, sauf dans les sciences qui utilisent des
systèmes sémiotiques spécifiques comme la chimie, la physique ou les
mathématiques. Comme les fonctions communicatives, elles sont désignées
par des mots du vocabulaire courant, qui peuvent être flous ou redondants
(expliquer, donner des raisons, des causes). Ces mots sont, de plus, sont
variables d’une langue à l’autre. Ce qui rend complexe leur identification. Leurs
réalisations dépendent des genres de discours. C’est par elles que l’on peut
caractériser l’academic discourse ou rhétorique de la connaissance. Le CECR les
nomme macro fonctions ; elles servent à « l’utilisation fonctionnelle » du
discours (5.2.3.2), notion qui n’est guère explicitée.
Niveau A2
Peut comprendre des phrases isolées et des expressions fréquemment utilisées en relation
avec des domaines immédiats de priorité (par exemple, informations personnelles et
familiales simples, achats, environnement proche, travail). Peut communiquer lors de tâches
simples et habituelles ne demandant qu'un échange d'informations simple et direct sur des
sujets familiers et habituels. Peut décrire avec des moyens simples sa formation, son
environnement immédiat et évoquer des sujets qui correspondent à des besoins immédiats.
Niveau B1
Peut comprendre les points essentiels quand un langage clair et standard est utilisé et s'il
s'agit de choses familières dans le travail, à l'école, dans les loisirs, etc. Peut se débrouiller
dans la plupart des situations rencontrées en voyage dans une région où la langue cible est
parlée. Peut produire un discours simple et cohérent sur des sujets familiers et dans ses
domaines d'intérêt. Peut raconter un événement, une expérience ou un rêve, décrire un
espoir ou un but et exposer brièvement des raisons ou explications pour un projet ou une
idée.
Dans le CECR, ces points de repère sont définis par d’autres descripteurs plus
spécifiques par compétence de communication, par stratégies, par compétence
formelle…
B2
B1
A2
A1
Compre- Compre- Inter- Produc- Produc-
hension hension action tion tion
écrite orale orale écrite orale
Il importe de connaître le profil de compétences de chaque locuteur, de
manière à identifier ses besoins et à ajuster l’enseignement en définissant les
objectifs en termes de profil de compétences et non de niveau homogène.
Répertoire (individuel) de langues : il est constitué par les langues que chaque
locuteur a à sa disposition. Celles-ci ne sont pas nécessairement maîtrisées au
même niveau, utilisées pour les mêmes compétences ou pour les mêmes
fonctions (dans la famille, sur le lieu de travail, dans vie sociale ordinaire…).
Certaines ont une fonction identitaire/de marqueur d’identité. Elles varient
dans le temps. Le rôle de l’école est de légitimer et de valoriser les langues des
répertoires des enfants, de développer celui-ci et de le diversifier.
Nous nous interrogerons dans la section III sur les apports du CECR du point de
vue des méthodologies d’enseignement, puisqu’on lui attribue volontiers une
approche actionnelle/par tâches, dont il serait le promoteur, apport qu’il
convient de relativiser.
FICHE 12
Ces processus ne sont pas nécessairement menés par les mêmes acteurs et les
décisions ne sont pas prises au même niveau:
Les choix mis en avant par le CECR ne penchent pas pour l’une ou l’autre de ces
options : ils ont une allure très fonctionnelle dans les descriptions de son
chapitre 4. Mais elles concernent aussi globalement l’éducation plurilingue et
interculturelle (1.3 et 8.1) (voir fiche 8) :
A1 90-100
A2 180-200
B2 500-600
C1 700-800
C2 1000-1200
total
A1 60-80 h
A2 100-160 h 160 -240 h
B1 150-180 h 310 - 420 h
B2 180-250 h 490 -670 h
C1 250-300h 740-970 h
En général, le volume horaire attribué aux langues en Europe (pour la première
langue enseignée) est de l’ordre de 3 heures hebdomadaires soit 90-100
heures par an ; celles-ci sont proposées en enseignement extensif, ce qui en
diminue certainement l’efficience.
Comme on peut s’y attendre, le CECR se garde bien de donner quelque
indication que ce soit dans ce domaine.
L’apport important du CECR est que des objectifs d’enseignement peuvent être
spécifiés de manière très fine, au moyen de sa typologie de compétences et de
ses échelles de compétences (ou de sous-compétences) (voir fiche 5), c’est-à-
dire de l’ensemble de ses descripteurs.
B2
B1
A2
A1
Compre- Compre- Inter- Produc- Produc-
hension hension action tion tion
écrite orale orale écrite orale
Une telle approche conduit à une élaborer une forme de pondération entre les
compétences à enseigner ; celle-ci permet à son tour d’estimer le volume
horaire à consacrer à chacune d’entre elle et elle autorise une certaine
planification/organisation dans le temps des activités en classe.
Cette flexibilité (on utilise le terme souplesse dans le CECR 3.5) permise par le
CECR est de nature à rendre possible des enseignements de langues plus
diversifiés. Par exemple, pour une langue 2, qui est enseignée moins
longtemps, on pourrait mettre fortement l’accent sur les compétences
réception et d’interaction orale (A2) qui constituent des objectifs plus réalistes.
Passé ce stade d’élaboration des programmes, on en vient à une détermination
plus fine des contenus d’apprentissage pour laquelle le recours au CECR est
moins immédiatement pertinent, puisque celui-ci a été élaboré en dehors de
toute langue particulière.
FICHE 13
13
Beacco J.-C., Bouquet S. & Porquier R. (2004) : Niveau B2 pour le français, Didier, Paris.
Les textes retenus dans le CECR sont plutôt identifiées au moyen de catégories
très larges (correspondance, films), parfois proches des types de textes
(description, argumentation…) et elles concernent rarement les genres
discursifs précis (interview, rapport, journal télévisé…). Le CECR propose ailleurs
(en 4.6.2) un inventaire ouvert de « types et genres » de textes écrits et oraux,
qui correspondent effectivement à des genres (entretien d’embauche) ou qui
sont très larges (magazines, journaux).
14
Beacco J.-C. & Petit G. (2004) : « Lexique ordinaire des noms du dire et les genres discursifs », dans Beacco J.-
C. (dir) : Représentations métalinguistiques ordinaires et discours, Langages 154, p. 87-100.
15
Adam J.-M. (1999) : Linguistique textuelle. Des genres de discours aux textes, Nathan Université, Paris.
FICHE 14
Pour descendre au plus près de la forme des textes à faire lire ou produire (et
donc au plus près des activités concrètes à organiser avec les apprenants), il est
indispensable de pouvoir analyser les textes. Cette démarche s’appelle, dans le
domaine francophone, l’analyse du discours. Les faits de langue que l’on choisit
de traiter avec les apprenants dans un texte ne le sont pas un peu au hasard de
ce qui se trouve dans un texte, mais en fonction des caractéristiques, stables et
récurrentes, du genre dont il relève et que met en évidence l’analyse du
discours. Il est important que les enseignants aient une certaine familiarité
avec cette démarche et de ses résultats.
La « forme » de chaque genre est constituée par les points communs des textes
qui en relèvent : elle est à « reconstituer » à partir de ceux-ci et elle en est, en
quelque sorte, le modèle abstrait. Le rôle de l’analyse du discours est de
caractériser la forme linguistique des genres. Autour des années 1975, en
didactique des langues, les genres ont fait l’objet, pour des textes en français,
en anglais, en allemand…, d’analyses linguistiques de cette nature, précisément
parce que l’on a pensé que la connaissance des caractéristiques des genres
pouvait permettre de mieux fonder des démarches d’enseignement.
La variation des genres de textes
Il faut noter au préalable que les genres de textes sont variables suivant les
langues et les cultures, ceci même dans les domaines scientifiques.
D’autre part, certains genres sont très contraints et les textes correspondants
ne présentent que des écarts limités. C’est le cas des bulletins météorologiques
de la presse quotidienne, les formules de souhait figurant sur les cartes
d’anniversaire ou les « nouvelles brèves » sportives…
D’autres genres présentent des régularités moins nombreuses ou moins
marquées. Les formes alternatives « équivalentes », en un point donné des
textes correspondants, sont diversifiées : le développement d’une phrase ou
d’un paragraphe devient moins prévisible, mais on peut toujours avancer des
hypothèses sur la forme qu’il pourrait recevoir. Ces hypothèses de forme et de
sens ne sont pas trop « ouvertes » : elles sont encore utilisables pour guider la
compréhension et constituer un cadre pour la production.
Les textes appartenant à un même genre ont des points communs que
l’analyse peut mettre en évidence, même si chaque texte est toujours unique.
Ces ressemblances sont d’un texte à l’autre sont utilisables d’un point de vue
pédagogique.
16
Gruppo di lavoro : « Non sola DSA » (GISCEL) (2016) : Tutto chiaro ? Materiale e percorsi perla
comprensione di testi. Percorso 1 per le ultime classi delle scuola primaria e leprime classi della scuola
secondaria di 1°grado.
Décisions ultérieures à prendre pour la construction des programmes
Si les programmes vont jusqu’à indiquer les formes à enseigner, le CECR ne
peut être d’une grande aide, puisqu’il ne concerne aucune langue en
particulier. L’identification des formes devra s’effectuer en combinant la
description des textes retenus (quand elles existent dans les travaux de
linguistique et de didactique des langues) et les référentiels par langues (DNR,
(voir FICHE 10) qui dérivent du CECR. D’ailleurs certaines DNR (pour l’italien, le
français) font une large place aux genres pour établir les inventaires de
ressources linguistiques réputées nécessaires pour communiquer à un niveau
de maîtrise donné de langue-cible
Le processus d’élaboration des programmes ne s’arrête pas là puisque, en
général, ceux-ci comportent aussi des indications sur les manières d’organiser
l’enseignement (les méthodologies) et sur la forme à donner aux séquences
d’enseignement/unità didattica) ainsi que sur la progression (étalement dans le
temps des activités destinées à conduire aux objectifs fixés).
Comme on l’a déjà noté, dans une première version, le CECR se terminait sur le
chapitre 8 intitulé : Diversification linguistique et curriculum. L’objectif premier
de ce document est bien de rendre possible l’éducation plurilingue et
interculturelle en termes de diversification de l’offre en langues de systèmes
éducatifs, de manière à ce que ceux-ci se conforment au moins aux attentes
formulées par la Commission européenne : « langue maternelle + 2 ».
L’augmentation du nombre de langues proposées dans certains états n’est pas
une caractéristique générale et la connaissance de l’anglais continue à être une
priorité très répandue.
L’utilisation du CECR pour dessiner des parcours d’apprentissage des langues
sur toute la durée de l’enseignement rend possible cette diversification.
Cela est rendu possible par la prise de conscience de ses propres stratégies
telle que la permet le Portfolio européen des langues qui est issu du CECR. Ce
dernier, dans ses sections 4.5.1 et 4.5.2, identifie des éléments de ces
compétences stratégiques pour la réception et l’interaction ; celles –ci sont
développées dans les sections 4.4.1.3 : Stratégies de production, 4.4.2.4 :
Stratégies de réception et 4.4.3.3 Stratégies d’interaction et 5.1.4 : Savoir
apprendre. On s’y reportera.
L’existence des « niveaux de référence » du CECR signifie par ailleurs que toute
compétence, si minime soit-elle, peut être décrite et évaluée et donc qu’elle
est légitime et digne de respect. Tous les apprenants n’ont pas à rechercher
C2 ; cela dépend de leurs projets et des utilisations envisagées de la langue
cible. Nul n’est tenu à la « perfection ».
Dans les parcours d’enseignement des langues organisés par l‘école, on peut
aussi créer de variété les formes de présence des enseignements de langues
dans les parcours d’enseignement. Ceux-ci peuvent être :
proposés à titre expérimental ou pilote dans l'enseignement secondaire ou
obligatoire ou limités à certains établissements (par région, en fonction de la
demande sociale…). Il peut, en particulier, s’agir d’une forme d’introduction
de l’enseignement d’une nouvelle langue, qui sera ensuite généralisée mais
aussi d’un dispositif permanent ;
proposés comme option « pure » : l’enseignement n’est pas validé (ou
partiellement) et, il est à choisir entre différentes disciplines ou entre
différentes langues ;
proposés comme enseignement obligatoire mais à option, à choisir entre
différentes disciplines ou uniquement entre différentes variétés
linguistiques. C’est une solution classique, commode mais qui introduit de la
tension entre les variétés linguistiques, puisqu'on doit renoncer à certaines
d'entre elles. Elle peut conduire à dévaloriser les enseignements de langues,
quand ils sont proposés en même temps que des disciplines réputées plus
séduisantes ou plus faciles (en fonction de notes que l’on compte obtenir)
ou à s’acquitter à bon compte de demandes de diversification des
enseignements de langues. Mais rien n’empêche de fixer à l’étude de la
langue proposée en un second temps des objectifs supérieurs à ceux prévus
pour celle qui a été proposée au début des enseignements ou de doter son
enseignement d’un volume horaire plus important ;
disponibles comme enseignement d'appui ou complémentaire, facultatif ou
obligatoire, pour certains apprenants, pour certaines variétés linguistiques
(les langues premières des migrants) ou pour certaines catégories d’élèves
(ceux qui sont en difficulté ou qui recherchent une spécialisation) ;
obligatoires, sans choix possible, c’est-à-dire intégrée au cursus comme bien
d’autres contenus disciplinaires. La présence de l’enseignement d’une (ou
de plusieurs) variété(s) linguistique(s) peut être prévue tout au long de la
scolarité primaire, secondaire obligatoire et secondaire (et parfois même
universitaire) ou pour certains cycles seulement (avec possibilité de
poursuivre ou de commencer l’apprentissage d’une nouvelle variété en fin
de cycle). Ce caractère obligatoire ne doit pas prêter à confusion de la part
des apprenants concernés. Il ne s’agit pas nécessairement d’un refus
antidémocratique de prendre en charge la demande sociale, puisque
l’opinion publique n’est pas toujours consultée sur l’intérêt collectif qu’il y
aurait à introduire ou à supprimer de l’enseignement telle ou telle matière
scolaire. Des choix de ce type doivent être l’aboutissement de négociations
entre toutes les parties sociales et aboutir à des organisations globales
tenant compte des exigences des groupes, des besoins nationaux/régionaux
et des finalités éducatives.
Ces formes de présence différenciées sont propres aux systèmes éducatifs et
elles ne préjugent pas des apprentissages ultérieurs, qui risquent de se
présenter sous des formes moins exclusives les unes des autres. Elles peuvent
être retenues successivement pour la même variété linguistique (qui
d’obligatoire deviendrait optionnelle, par exemple), de manière à étendre
l’offre plurilingue des systèmes éducatifs.
Des scénarios curriculaires
On peut, de plus, considérer que l’on peut atteindre les objectifs fixés pour
l’anglais au moyen de périodes intensives y compris en ne l’enseignant pas
comme langue introduite la première dans les programmes, dans la mesure où
son acquisition par des adolescents/jeunes adultes peut bénéficier de la
conscience qu’ont ceux–ci de l’utilité recherchée/présumée de cette langue et
qu’ils peuvent s’appuyer sur une expérience de la communication sociale
effective.
Cela conduit à des formes de cloisonnement coûteux, car on est amené refaire
dans une matière ce que l’on a déjà fait dans une autre. Et la charge de créer
des relations revient finalement aux seuls apprenants. Tout ceci alors que la
compétence de communication par le langage est considérée comme une du
point de vue neurobiologique.
Nous nous en tiendrons dans ce qui suit à l’apport du CECR aux transversalités
entre enseignements des langues vivantes étrangères.
Les formes possibles de la convergence entre les enseignements de langues
- l’emploi de la catégorie genre discursif, qui est présente dans toutes les
matières, pour spécifier les programmes. On a vu le profil communicatif
visé par l’enseignement peut être défini par l’inventaire des genres de
textes qu’un apprenant doit être en mesure d’utiliser, en réception et/ou
en production ;
- la typologie des compétences du CECR (compétences générales et
compétences à communiquer langagièrement), croisée avec celle des
activités de communication ;
- les principes pour l’approche des dimensions culturelles et
interculturelles des enseignements des langues, à savoir l’apprentissage
d’une gestion sereine et critique des relations à l’altérité (voir FICHE 21) ;
- la réflexivité dans l’apprentissage des langues : celle-ci vise le
développement de la capacité des apprenants à réfléchir sur toutes les
dimensions de la langue et de la communication (pour chaque langue en
particulier ou dans la perspective de leur comparaison) ; elle a trait aux
stratégies métacognitives permettant à l’apprenant de contrôler la
gestion de son activité langagière (par exemple la gestion consciente de
son propre processus de lecture ou de ses stratégies d’apprentissage) ;
- la variabilité des formes de la langue de l’école et des genres selon les
disciplines, celle des langues (étrangères, de la migration, etc.) implique
de créer chez les apprenants une prise de conscience des formes de
cette variabilité les différentes langues et du rôle de ces variations.
- […]
Avant d’aller plus loin, il est essentiel de rappeler que le CECR est un document
consensuel et non prescriptif, ce qui en a fait précisément un instrument
commun. Cette position est explicitement répétée en ce qui concerne les
options méthodologiques pour l’enseignement (2.3.2 et 6.4). On reproduit ci-
après littéralement les textes correspondants, qui sont sans ambiguïté aucune :
« En accord avec les principes fondamentaux d’une démocratie plurielle, le
CECR se veut aussi exhaustif que possible, ouvert, dynamique et non
dogmatique. C’est pour cela qu’il ne peut prendre position d’un côté ou de
l’autre dans les débats théoriques actuels sur la nature de l’acquisition des
langues et sa relation à l’apprentissage ; pas plus qu’il ne saurait préconiser une
approche particulière de l’enseignement »17(2.3.2).
Cette affirmation est reproduite sans détour dans la section 6.4 intitulée :
Quelques options méthodologiques pour l’enseignement et l’apprentissage des
langues : « A l’heure actuelle, les façons d’apprendre et d’enseigner les langues
vivantes sont nombreuses. Pendant de longues années, le Conseil de l’‘Europe
a encouragé une méthodologie fondée sur les besoins communicatifs des
apprenants et l’adoption de méthodes et de matériels appropriés à leurs
caractéristiques et permettant de répondre à ces besoins. Cependant […] le
CECR n’a pas pour vocation de promouvoir une méthode d’enseignement
particulière mais bien de présenter des choix ».
Cet extrait laisse dans le vague « la » méthodologie que le Conseil de l’Europe
aurait privilégiée et qu’il s’interdit de promouvoir dans un instrument comme
le CECR. Mais il est assez clair qu’il s’agit de l’ensemble des approches dites
communicatives qui se sont constituées dans les années 1975-1980 (le terme
communicatif figure dans la citation supra) et, plus généralement des
approches actives des apprentissages Quoi qu’il en soit il n’y a pas de
méthodologie d’enseignement selon le CECR.
17
C’est nous qui soulignons.
ressources cognitives, affectives, volitives et l’ensemble des capacités que
possède et met en œuvre un acteur social « (CECR 2.1).
18
Van den Branden, K. (Ed.). (2006). Task-based language education: From theory to practice. Ernst Klett
Sprachen.
FICHE 19
Les liens entre des activités constitutives d’une séquence peuvent être très
divers :
Le CECR met assez discrètement en relief une autre possibilité d’organiser les
séquences, celle de les structurer autour des compétences de communication
par le langage et des stratégies correspondantes.
Une autre manière de « donner du sens » à des activités et des tâches, dans les
contextes de type scolaire, est de les faire contribuer à la réalisation d’un
projet. Celui-ci doit idéalement naître du groupe-classe et avoir pour finalité la
réalisation collective et effective d’un produit, langagier ou langagier en partie
19
On reproduit ici une partie de la page scenario du site Intégration linguistique des migrants adultes (ILMA).
seulement. Cette dynamique, bien connue dans les méthodes actives de
l’enseignement, vise à réduire les découpages disciplinaires et à renoncer à
l’enseignement organisé à l’avance par le seul enseignant. Adopter une
approche de type projet conduit à focaliser l’effort sur l’accomplissement des
activités nécessaires à sa réalisation, sur l’apprentissage systématique des
stratégies qui permettent d’y parvenir, sur la démarche des apprenants et leur
parcours personnel durant ce processus. Cette mise en pratique d’un
enseignement largement autogéré, est commandée par la réalisation concrète
d’un produit, par ex. du côté de la langue : produire un dépliant touristique
quadrilingue sur sa ville, une vidéo documentaire réalisée à partir de la visite de
la classe à l’étranger, organiser une Fête des langues...
Les projets se réalisent en dehors d’un programme général fixé à l’avance, dont
les contenus ne correspondent pas nécessairement aux besoins d’un projet
particulier : les contenus à utiliser sont découverts à mesure des activités à
assurer. L’enseignant est alors personne ressource et « chef de chantier », mais
il continue à accompagner les stratégies des apprenants activité par activé,
c’est-à-dire situation de communication après situation de communication et
compétence après compétence. Et là encore, à l’évidence, le projet est une
tâche multiple.
De la sorte, on évite les suites d’activités portant sur des compétences
différentes réalisées à partir d’un même support par ex. lire un texte puis
discuter, écouter un enregistrement puis écrire un texte. Dans ce cas, si la
première séquence prend appui sur un support (le texte à lire ou à écouter) les
secondes (discuter, produire un texte) sont des activités supplémentaires qui
prolongent les précédentes. Or, elles requièrent d’être traitées dans une
séquence en bonne et due forme, sinon elles ne prennent appui sur rien et sont
au mieux des occasions d’utiliser les connaissances déjà acquises par les
apprenants mais probablement pas des moments d’acquisition. Dans ce cas, les
relations entre les activités ne sont pas suffisamment assurées : on peut
discuter à partir d’un texte si l’on donne aux apprenants des supports
permettant de gérer une discussion (exprimer une opinion, exprimer le
désaccord), ce qui revient à articuler des séquences entre elles, une séquence
de réception de l’écrit avec une séquence d’interaction orale, chacune
organisée suivant la méthodologie qui lui est propre.
FICHE 20
sollicitées
Compréhension Contexte Connaissance Iconographie, mise en
globale du monde et page, typographie...
Cotexte
de la
Mots reconnus
Texte communication
Compréhension Paragraphe(s) Connaissance Articulateurs de toute
ou autre des genres de nature, entre phrases et à
médiane
unité discours et des l’intérieur des phrases
élémentaire textes
Mots reconnus
de la
structuration
du texte
Compréhension Phrase(s) Connaissance Morphosyntaxe des
locale de la langue groupes (nominal, verbal)
cible et de la phrase
Mots reconnus
En général, les activités de réception sont une fin en soi et leur finalité est
d’améliorer les stratégies de réception (mais on peut aussi lire un texte pour en
écrire soi-même un autre ou écouter pour prendre des notes ou apprendre par
cœur). Elles constituent surtout une forme d’exposition à la langue cible
rentable par elle-même, sans besoin de systématisation formelle lourde, de
manière à ne pas les dénaturer par rapport aux pratiques sociales réelles.
La production écrite
Ce type de séquence est centré sur des activités spécifiques conçues pour
entraîner à la production de textes écrits. Des textes utilisés comme modèles
ou points de référence correspondent à des genres de textes présents dans la
vie sociale et identifiés, pour la plupart, dans les échelles du CECR. Ils sont
donnés à lire (lire pour écrire), « analysés » (repérage de leurs éléments
constitutifs) dans leur structure et dans leurs formes, au moins en partie, pour
que l’on puisse repérer et s’approprier certains moyens verbaux nécessaires à
leur réalisation. Les activités d’« analyse » et de compréhension des textes
modèles sont réalisées par des questions à choix multiple, des activités de
déduction du sens, de complétion de tableaux récapitulatifs, etc.
Les apprenants doivent ici produire des textes comparables à celui/ceux qui ont
été donnés à lire pour servir de cadre à la production. La production
proprement dite portera d’abord sur des éléments particuliers du texte à
produire, que l’on entraînera à rédiger séparément, puis sur la totalité du
texte. On veillera à reconstituer, dans la mesure du possible, les conditions
sociales habituelles de la production des textes : recours à des ouvrages de
référence, texte élaboré à plusieurs, versions successives et relectures. L’on
évitera absolument de transformer cette séquence d’activité en évaluation. Ces
activités d’élaboration ont tout avantage à être réalisées de manière
collaborative par des tandems d’élèves.
20
Morin E. (2004). Éthique.-La méthode. Paris: Seuil.
FICHE 22
https://rm.coe.int/a-handbook-for-curriculum-development-and-teacher-
training-the-languag/16806af387 , disponible aussi en français
Ce texte est disponible aussi en français et publié sous forme d'un volume
papier comportant des études comme :
- Items for a description of linguistic competence in the language of
schooling necessary for teaching/learning history (end of obligatory
education); An approach with reference points. Jean-Claude Beacco
- Items for a description of linguistic competence in the language of
schooling necessary for teaching/learning sciences (end of compulsory
education). An approach with reference points. Helmut Vollmer
- Items for a description of linguistic competence in the language of
schooling necessary for teaching/learning literature (end of compulsory
education). An approach with reference points. Irene Pieper
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/langeduc/BoxD2-OtherSub_en.asp
Le recours à ce genre de supports est motivé par le fait qu’il donne du sens à
l’apprentissage scolaire des langues, souvent trop formel/grammatical, et qu’il
implique davantage les apprenants qui y voient un alors un certain intérêt. Il
est surtout centré sur l’acquisition de la terminologie de la matière dans une
autre langue, sur le retour/la révision de faits de langues de la langue cible et il
met en jeu, en principe, des méthodes d’enseignement plus actives (par travail
de groupe, activités pratiques, projet…) qui seraient trop peu utilisées dans les
enseignements des langues vivantes étrangères. Si cela était le cas, ce faible
recours à des méthodologies actives tiendrait à des formes d’inertie des
cultures éducatives et non à la didactique des langues étrangères qui en
recommande l’emploi depuis des décennies.
Une partie (ou la totalité) des cours d’une matière sont gérés en langue
étrangère par des enseignants spécialistes de la matière, qui ont des
compétences, variables, dans la langue étrangère concernée mais qui ne
connaissent pas de l’enseignement des langues. Ils peuvent être organisés en
coprésence, avec l’intervention d’un enseignant de langue. Ces cours alternent
avec des cours de la matière en langue première, gérés par les mêmes
enseignants.
Mais il n’est pas avéré que les méthodologies communicatives soient le plus
proches de leurs représentations de ce qu’est ou devrait être l’enseignement
des langues. On peut constater que, par prudence ou par habitude acquise
(quand ils étaient eux-mêmes apprenants de langue) qu’ils sont portés à s’en
tenir à des approches grammaticales-lexicales traditionnelles, qui leur sont sans
doute plus familières. Ils créent alors de la motivation par des activités de
groupes élaborées et considérées ludiques, d’ailleurs très présentes dans la
didactique anglo-saxonne de l’anglais, langues qui est principalement
concernée par les enseignements EMILE/CLIL en Europe. Le risque est que,
pour « habiller »les activités, la créativité des enseignants s’exerce surtout à
imaginer des formes de jeux ou autres activités de groupe plaisantes mais qui
portent sur des contenus linguistiques et sur des apprentissages traditionnels.
Ces activités très élaborées dans leurs modalités pratiques n’ont probablement
plus beaucoup en commun avec les stratégies d’apprentissage des langues, car
ces stratégies des activités ludiques, passablement artificielles ou gratuites, ne
correspondent pas nécessairement aux modalités effectives de gestion de la
communication verbale.
Elle nous semble aussi avoir fait justice des conceptions selon lesquelles on
trouverait dans le CECR toutes les réponses aux questions et aux choix qu’il
convient d’opérer pour organiser les enseignements de langues : leurs finalités,
leurs contenus, leurs progressions, leur organisation en séquences
méthodologiques.