Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
com
Retrouver ce titre sur Numilog.com
EXÉGÈSE ET
HERMÉNEUTIQUE
Retrouver ce titre sur Numilog.com
XAVIER LÉON-DUFOUR
Les Évangiles et l'histoire de Jésus, 1963.
XAVIER LÉON-DUFOUR
Études d'Évangile, 1965.
CHARLES HAROLD DODD
Conformément aux Écritures, 1968.
WILLIAM DAVID DAVIES
Pour comprendre le Sermon sur la montagne, 1970.
GÜNTER STEMBERGER
La Symbolique du bien et du mal
selon saint Jean, 1970.
Retrouver ce titre sur Numilog.com
EXÉGÈSE
ET
HERMÉNEUTIQUE
Parole de Dieu
ÉDITIONS DU SEUIL
27, rue Jacob, Paris VI
Retrouver ce titre sur Numilog.com
AVANT-PROPOS
SIGLES
Ac
Am
Actes des Apôtres
Amos
J1 Joël
Jn Évangile selon Jean
Ba Baruch Le Évangile selon Luc
I Co 1 aux Corinthiens Lv Lévitique
Dn Daniel Mc Évangile selon Marc
Dt Deutéronome Mt Évangile selon Matthieu
Ex Exode Pr Proverbes
Ez Ezéchiel Ps Psaumes
Ga Épître aux Galates Qo Qohélet (Ecclésiaste)
Gn Genèse Rm Épître aux Romains
Is Isaïe Sg Sagesse
Jb Job Si Siracide (Ecclésiastique)
Retrouver ce titre sur Numilog.com
Retrouver ce titre sur Numilog.com
PRÉSENTATION
Ce n'est pas sans difficultés qu'a pris forme le Congrès dont nous
présentons les Actes. Sa préhistoire est significative pour en com-
prendre le déroulement et la portée.
Enseptembre 1967,auterme dupremier Congrèsdel'A.C.F.E.B.
les exégètes français ont pris une conscience plus nette qu'il ne leur
suffisait plus de se documenter sur les points chauds de l'exégèse,
mais qu'il leur fallait sans tarder se renouveler dans leur manière
de lire et de présenter les textes bibliques. En effet une certaine
désaffection se fait sentir en divers milieux à l'endroit du texte ins-
piré : pourquoi revenir encore à ces vieux textes, dont le langage
est devenu pour nos contemporains à peu près inintelligible? La
cause de cette inappétence ne proviendrait-elle pas pour une grande
part dela manière dont les exégètes et les prédicateurs lisent le texte,
àsavoir commeunmonumentdupassédont onrépète les affirmations
et non comme une Parole qui vient me trouver aujourd'hui dans
mon propre langage? Ainsi se manifeste une tension entre l'enquête
historique et l'actualisation herméneutique. Il a donc été décidé de
lancer un Congrès sur Exégèse et herméneutique.
Or, durant sa préparation, deux courants se sont fait jour parmi
les exégètes eux-mêmes, selon que prédominait l'intérêt à la méthode
historique ou l'attention à l'exigence herméneutique. Ecoutons parler
les uns et les autres.
1. La Résurrection du Christ et l'exégèse moderne, par P. de SURGY,P. GRE-
LOT, M. CARREZ, A. GEORGE,J. DELORMEet X. LÉON-DUFOUR,Lectio divina
n° 50, Le Cerf, Paris 1969.
Retrouver ce titre sur Numilog.com
L'exégète n'est pas seul de son espèce. Pour sortir de son ghetto, il
doit regarder commentles autres travaillent. C'est ainsi que l'analyse
structurale a attiré notre attention, commeune méthode qui permet
de mieux déterminer le rapport des éléments du récit. Les méthodes
d'analyse psychologique ont aussi leur mot à dire : qu'est-ce que le
sujet interprétant? En quel sens est-il conditionné? Enfin, couvrant
le tout, il s'agit de poser les conditions de toute interprétation en
recourant au philosophe.
Peu à peu un accord était établi entre exégètes. Le constat d'où
il faut partir : il ne suffit plus de dire le sens qu'a eu jadis le texte,
il faut interpréter, c'est-à-dire manifester le sens qu'il a aujourd'hui
pour nous, ouplus exactementouvrir ausensquechacun doit trouver
au texte interprété. Des trois dimensions que présente notre activité
dans l'ordre de l'Ecriture Sainte (exégèse, réflexion, pastorale), nous
voudrions insister sur la seconde, sans perdre de vue les deux autres.
En pratique, il s'agit donc de confronter les méthodes de l'exégèse
avec les apports que peuvent fournir des disciplines connexes et des
méthodes apparentées. Ce n'est pas renier la méthode de critique
littéraire et historique à laquelle nous sommes habitués; c'est l'ouvrir
à une efficacité plus grande en nous sensibilisant aux méthodes
actuelles que pratiquent des sciences humaines autres que la science
historique. L'entreprise est courageuse; elle est même traditionnelle,
car l'Eglise n'a cessé de s'assimiler les progrès des sciences.
SOIRÉE PRÉLIMINAIRE
LES TÉMOINS DE LA
' UDITEUR
Durant les quelques heures qui précèdent notre rencontre avec les
spécialistes de diverses méthodes, nous allons nous mettre au contact
de l'auditeur, de celui qui entend parler le prédicateur, qui écoute
le professeur d'exégèse, qui lit les ouvrages des exégètes. Ce n'est
point là occupation vaine, mais mise en disposition fondamentale
d'accueil. En effet le risque est grand pour nous, professeurs et écri-
vains, de nous estimer satisfaits lorsque nous avons communiqué une
science péniblement acquise, sans nous soucier davantage de savoir
si nous avons été entendus, si notre langage était accessible à nos
contemporains. En écoutant les témoignages émanant de tel ou tel
milieu, nous sentirons se creuser plus profondément en nous l'appel
à un renouvellement de notre métier. Sans doute les témoins vont-ils
nous décerner quelques éloges, mais je suis convaincu qu'ils ne vont
pas ménagerla critique à l'endroit denotre méthode, denotre travail,
de nos productions. Ainsi naîtra en nous une exigence pastorale qui
nous rendra plus accueillants à la requête herméneutique.
Nous espérons donc entendre l'écho de plusieurs milieux. Tous
n'ont pu répondre à notre demande. En particulier, font défaut les
séminaristes et les cercles bibliques. Par contre, le milieu ouvrier, le
milieu scientifique et la catéchèse sont représentés. Il leur a été
demandé de se situer à deux niveaux. D'abord en montrant où le
témoin en est lui-même ainsi que son milieu (ses acquisitions, ses
déficiences, ses déceptions à notre endroit...). Ensuite en manifestant
le stade où lui apparaît le prêtre (témoignage direct ou indirect
d'après les sermons ou les cercles entendus), fruit de l'enseignement
des biblistes; en apportant enfin des exemples d'une interprétation
qui a été reçue au séminaire et n'a pu passer dans le public (une
Retrouver ce titre sur Numilog.com
ment compte que ce langage est trop pauvre pour exprimer des
expériences esthétiques ou des faits de la vie profonde et qu'il faut
avoir recours au langage symbolique. Afin d'éviter tout malentendu
sur ce mot souvent employé à tort et à travers, j'évoquerai, pour le
définir, des réminiscences de Paul Ricœur : j'entends par langage
symbolique celui où un sens premier renvoie à une série de sens
seconds, par ondes de choc successives; c'est un langage qui diverge
vers des évocations, au lieu de converger vers une expression.
Vous me direz que ces deux langages n'ont rien à voir entre eux,
et en effet c'est bien ce qui gêne les scientifiques. Je crois qu'une des
raisons du succès de Teilhard est d'avoir réussi à jeter un pont entre
les deux, à passer d'un langage scientifique à une poésie qui ouvre
sur une vision du monde, infiniment dense de significations, sans
s'éloigner trop de l'univers scientifique. Bien sûr, il ne faudrait pas
être dupe de cette facilité à se retrouver en pays connu, mais on ne
peut qu'être reconnaissant à Teilhard de cette tentative. Je me
demande d'ailleurs si l'on tire assez parti de la richesse symbolique
du monde technique. Avez-vous vu cette photo du débarquement
sur la lune où il n'y a que l'ombre du LMet des traces de pas? Il y a
de quoi rêver longuement; cette prise de possession de l'homme sur
une planète marquée par l'empreinte de l'homme dans toute sa
stature verticale qui est un de ses attributs : non plus le pied nu que
Robinson Crusoé découvrait sur son île déserte, mais une empreinte
ronde, striée par le harnachement qui lui donne pouvoir sur la nature
tout en le séparant d'elle...
Mais je m'arrête et j'en reviens à la Bible. Bien sûr, il y a un
certain dépaysement de l'homme moderne devant le langage biblique,
d'abord à cause du texte lui-même et aussi à cause des conditionne-
ments qu'une catéchèse plus ou moins adroite a déposés en lui.
L'homme moderne a l'impression que la Bible lui parvient à travers
un brouillard d'interprétations plus ou moins bizarres, emboîtées les
unes dans les autres au cours des siècles, et réservées à des initiés
dont il ne fait pas partie. Il souhaite retrouver un vrai contact avec
le texte.
Il est important de dépasser ce sentiment d'étrangeté, car autre-
ment cette étrangeté risque, en ce qui concerne le Nouveau Testa-
ment, d'être projetée sur l'époque évangélique elle-même : elle trace
une sorte d'univers décalé, comme celui des contes de fées, et l'on
Retrouver ce titre sur Numilog.com
ont le souci que les textes religieux soient abordés avec le même
sérieux, et même plus de sérieux, que les questions profanes qui
les intéressent. C'est pourquoi le scientifique attache beaucoup d'im-
portance à l'existence des exégètes, au sérieux de leurs travaux. Il
souhaite prendre connaissance de ces travaux par des livres, des
articles; ce travail intellectuel gratuit lui sera une base vers laquelle
retourner dans sa vie de foi. Il souhaite que les exégètes lui ensei-
gnent une méthode de travail pour les moments où il aura le loisir
d'approfondir unequestion,commele fait le livre duP. Léon-Dufour,
Etudes d'Evangile. Il souhaite que ce genre d'apprentissage fasse
partie de la catéchèse des adolescents. Enfin, il utilisera des livres
pour répondre à un certain nombre de bêtises qui ont cours dans
certains domaines, commedes outils polémiques entre lui et d'autres,
ou même pour une polémique à l'intérieur de lui-même. Mais il
sait que l'exégèse est un domaine de spécialistes et que son accès à
cette science sera toujours limité.
En outre le rapport primordial à l'Evangile est un rapport spiri-
tuel. L'Evangile n'est vraiment lu qu'à partir d'une question vitale,
non d'un souci historique. La foi ne se situe pas dans le passé et le
laïc est certainement sensible à cette idée deBultmann selon laquelle
l'historicité est la capacité de conditionner ma propre histoire. Lire
la Bible, c'est se trouver en présence de questions qui nous inter-
pellent, et les mots et les faits sont évacués par l'enjeu de cette
interpellation.
Ceci sans passer par les dédales de la Formgeschichte pour voir quel
est le Sitz im Leben. Ils le vivent.
INTRODUCTION AU CONGRÈS
DU CONFLIT
A LA CONVERGENCE DES MÉTHODES
EN EXÉGÈSE BIBLIQUE
2. Le modèle sémiologique
Ce nouveau venu dans le champ exégétique est à vrai dire d'ori-
gine étrangère. Autant la méthode historico-critique est congénita-
lement liée à l'histoire des sciences bibliques, autant ce nouveau
modèle lui est par essence étranger. C'est d'abord en linguistique
que ce modèle s'est constitué et plus précisément dans la partie de
la linguistique consacrée aux systèmes phonologiques de base des
langues naturelles. Ces nouveaux modèles se sont étendus de proche
en proche à la sémantique lexicale, puis à la théorie du récit et plus
largement à la théorie de l'écriture, pour constituer une théorie
générale des signes ou sémiologie. Ils commencent seulement à
entrer en contact avec les sciences bibliques, soit indirectement, par
le détour de leur application au domaine mythologique (générale-
ment dans d'autres champs culturels que l'ancien Moyen-Orient),
soit plus directement, à la faveur d'une théorie générale du récit,
chez les théoriciens formalistes du conte russe ou les analystes
français du récit.
Confrontés au précédent groupe de méthodes que nous avons placé
sous le signe de l'historique, les modèles ici considérés ont un
caractère nettement anti-historique. La séparation saussurienne de
la langue et de la parole a pour corollaire la séparation de l'orga-
nisation synchronique et des transitions diachroniques. Cette sépa-
ration signifie beaucoup plus qu'un simple partage de compétences
selon les exigences de la division du travail; elle implique, philo-
sophiquement, la priorité du synchronique sur le diachronique; et
cette priorité est une priorité dans l'ordre de l'intelligibilité; ce que
l'on comprend d'abord, ce sont les arrangements de signes dans une
tranche de présent, dans une couche de simultanéité, dans un état
de langue; si l'on a présente à l'esprit la comparaison saussurienne
entre le langage et le jeu d'échecs, on dira que l'intelligibilité va
d'abord à la règle du jeu; un «coup » n'est pas autre chose que
le passage d'un état de partie à un autre état de partie.
Second corollaire de la séparation de la langue et de la parole :
dans la synchronie les éléments n'ont aucune valeur absolue, aucune
signification propre; ils tirent leur sens de leur position dans le
Retrouver ce titre sur Numilog.com
système et de leur opposition aux autres termes; leur valeur est donc
seulement négative, différentielle, oppositive. Dans la langue, disait
Saussure, il n'y a que des différences.
Troisième corollaire : la langue doit être considérée comme un
système, c'est-à-dire comme un ensemble clos d'éléments dans un
état de dépendance mutuelle : le système n'a pas de dehors, mais
seulement un dedans; il ne se rapporte pas au monde; il ne fait
référence à rien en dehors de lui-même; toutes les relations lui sont
internes.
Les implications philosophiques de ce modèle sont considérables.
La subordination du point de vue historique au point de vue systé-
matique l'éloigne des considérations évolutives ou évolutionnistes
et donc des apories de l'historicisme. L'accent est mis bien plutôt sur
les possibilités combinatoires de l'esprit humain, sans souci histo-
rique. C'est vers l'idéal leibnizien d'une «caractéristique universelle»
que la méthode structurale fait retour.
Anti-historiciste, la méthode n'est pas moins anti-psychologiste.
Cette pointe anti-psychologique est présente dès le dédoublement
de la langue et de la parole. Si la parole est l'exercice de la langue
par un sujet parlant dans une communauté donnée, la langue est le
code non-psychologique de tous les emplois psychologiques. Ces
considérations, étendues des codes de langue aux codesmis enœuvre
dans un texte, inclineront à mettre entre parenthèses toute considé-
ration du sujet, tant comme destinataire que commeauteur. Le texte
sera érigé en objet absolu, considéré pour lui-même et en lui-même.
Laméthode structurale ne sera pas moins méfiante à l'égard de tout
traitement du texte comme expression d'une mentalité individuelle
ou collective. Toute psychologie de locuteur, d'auteur, de mentalité
individuelle ou collective sera à éliminer comme extra-linguistique.
Cette décision méthodologique est capitale pour le destin de la
notion de «sens»: le sens ne saurait être l'intention de l'auteur,
sous peine d'imposer à l'interprétation la tâche impossible de se
transférer dans un psychisme étranger à jamais inaccessible. Lesens
sera plutôt à chercher dans le jeu mutuel des éléments, comme cir-
culation interne ou comme intersignification de ces éléments eux-
mêmes. Cet anti-psychologisme de méthode trouve un renforcement
dans l'anti-psychologisme philosophique, issu aussi bien de la critique
psychanalytique des illusions du sujet que des critiques marxiste
Retrouver ce titre sur Numilog.com
Cette édition numérique a été réalisée à partir d’un support physique parfois ancien conservé au
sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.
Elle peut donc reproduire, au-delà du texte lui-même, des éléments propres à l’exemplaire
qui a servi à la numérisation.
Cette édition numérique a été fabriquée par la société FeniXX au format PDF.
*
La société FeniXX diffuse cette édition numérique en accord avec l’éditeur du livre original,
qui dispose d’une licence exclusive confiée par la Sofia
‒ Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒
dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012.