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DILEMMES DE LA RÉFORME RÉGIONALE TUNISIENNE

Analyse spatiale et territoriale des propositions de réorganisation du maillage


administratif

Ali Bennasr, Myriam Baron, Sophie de Ruffray, Claude Grasland, France Guérin-Pace

Armand Colin | « Revue d’Économie Régionale & Urbaine »

2015/5 Décembre | pages 853 à 882


ISSN 0180-7307
ISBN 9782200930134
DOI 10.3917/reru.155.0853
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-d-economie-regionale-et-urbaine-2015-5-page-853.htm
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&
Dilemmes de la réforme régionale
tunisienne

Analyse spatiale et territoriale des propositions de


réorganisation du maillage administratif

Dilemmas of Tunisian regional reform

Spatial and territorial analysis of proposals to


reorganize administrative network

Ali B ENNASR
Université de Sfax, Laboratoire de Recherche Syfacte
abennasr@hotmail.fr

Myriam B ARON
UPEC, Université Paris Est, Lab’Urba EA 3482
myriam.baron@u-pec.fr
Auteur correspondant
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Sophie D E R UFFRAY
Université de Rouen, UMR 6266 CNRS IDEES
sophie.deruffray@univ-rouen.fr

Claude G RASLAND
Univ Paris Diderot, Sorbonne Paris Cité, UMR 8504 CNRS « Géographie-cités »
claude.grasland@parisgeo.cnrs.fr

France G UERIN -PACE


INED, UR12
guerin@ined.fr

Mots-clés : appartenances, cohésion, intégration, maillages, Tunisie

Keywords : belonging, cohesion, integration, territorial divisions, Tunisia

rticle on line 2015 - N° 5 - pp. 853-879 Revue d’Économie Régionale & Urbaine 853
Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

Classification JEL : C150, C180, R100, R120, R580


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A. B ENNASR , M. B ARON, S. D E R UFFRAY, C. G RASLAND , F. G UERIN -PACE

Résumé
La question des inégalités territoriales en Tunisie est ancienne et a fait l’objet de nombreux travaux
de recherche menés par les économistes spatiaux et les géographes-aménageurs. Notre contribution
a pour objectif de discuter les arguments opposant deux découpages régionaux : les six régions de
planification héritées du schéma national d’aménagement du territoire (SNAT) de 1985 et les cinq
régions proposées dans le Livre Blanc en 2011. Nous appliquerons une méthode d’analyse territoriale
multiscalaire des inégalités en prenant comme variable cible l’indicateur composite de développement
« régional ». Nous proposerons un modèle de simulation des migrations nettes de population induites
par les inégalités de développement régional pour illustrer les enjeux des projets de régionalisation.
Plutôt que d’établir d’emblée un découpage fixe en régions ayant des frontières figées et un centre
unique, il serait possible d’imaginer un espace régional composé de noyaux multiples et comportant
des marges ou interstices reconnues comme telles.

Abstract
Territorial disparities in Tunisia are studied for a long time by Spatial Economists, Geographers and
Developers. Our paper deals with two different regional divisions: on the one hand, 6 planing Regions
inherited from National Planing Schema of 1985; on the other hand 5 Regions defined in the “Livre
Blanc” published in 2011. A multiscalar territorial analysis of inequalities is applied to a composite
indicator about regional development. A simulation model of net population migrations induced by
inequalities of regional development is proposed to highlight issues of regionalization projects. Rather
than establishing fixed cutting areas with fixed boundaries and a single center, it would be possible to
imagine a regional space composed of multiple cores and with margins or interstices recognized as
such.
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Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

-1-
Introduction
1.1. Pourquoi Sidi Bouzid ?
Qui aurait pu prévoir que le point de départ des événements, qui allaient emporter
la dictature de Ben Ali, partirait de l’une des régions les plus isolées et les moins
développées de Tunisie, Sidi Bouzid ? On aurait pu parier sur Tunis, capitale politique
macrocéphale, ou bien sur le bastion ouvrier et syndical de Gafsa. Mais précisément
parce que tous ces points de départ potentiels de la révolution tunisienne étaient
prévisibles, ils étaient placés sous haute surveillance par le gouvernement Ben Ali. Il
fallait donc que ce soit Sidi Bouzid.

Les différences économiques et sociales sont remarquables entre la région de Sidi


Bouzid qui a vu surgir la révolte tunisienne et la capitale Tunis qui l’a vu aboutir
(cf. Figure 1). À tel point que l’on serait tenté de parodier le titre de l’ouvrage de
GRAVIER sur la France au début des années 1950 Tunis et le désert tunisien. Mais une
telle vision serait un peu simpliste car l’opposition n’est pas uniquement entre la
capitale et la province, mais aussi et surtout entre le littoral et l’intérieur. D’un côté,
de riches régions côtières ouvertes sur l’économie mondiale, de l’autre des régions
intérieures pauvres mais jeunes – au moins dans la partie médiane du pays – qui
fournissent les migrants nécessaires aux industries touristiques et manufacturières
de la côte (KARRAY et DRISS, 2009 ; AYADI et al., 2007). La Tunisie illustrerait ainsi la
tendance mondiale à une métropolisation-littoralisation, qui concentre croissance
et créativité dans les grandes villes, abandonnant les régions déshéritées à leur sort
de simple réservoir de main-d’œuvre non qualifiée.
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1.2. Les régions en Tunisie, un enjeu constitutionnel
Il n’est donc pas étonnant, dans un tel contexte, que les questions relatives au
développement, à l’aménagement du territoire et à la régionalisation ont constitué
une des principales préoccupations nationales et soient au centre des débats. Parmi
les mesures d’urgence prises par le gouvernement de transition en 2011, signalons la
décision d’affecter 80 % des fonds prévus par la loi de finances aux régions intérieures.
La même démarche a été reconduite en 2012 : 70 % des ressources ont été consacrées
au développement des gouvernorats de l’intérieur (BENNASR, 2012).

La réforme territoriale devrait conduire à un redécoupage du territoire tunisien


en trois à huit régions, qu’il s’agit de créer en fusionnant ou redécoupant les vingt-
quatre anciens gouvernorats. Cette nouvelle vision des régions a été avancée dans
un Livre Blanc (Ministère tunisien du développement régional, 2011), élaboré
par le ministère du Développement Régional de l’ancien gouvernement provisoire,
et semble être adoptée dans les programmes des principaux partis politiques. Ce
document esquisse pour la première fois une nouvelle vision du développement
régional, fondée sur la capacité de chaque région tunisienne à définir et à bâtir
son propre développement économique et social tout en limitant les disparités
régionales. Selon cette approche, cinq régions économiques ouvrant toutes sur le

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Figure 1 – Développements en Tunisie


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Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

littoral ont été proposées à la réflexion de l’Assemblée Constituante. Chacune est


composée de gouvernorats économiquement complémentaires – donc hétérogènes –
afin d’assurer la viabilité de toute la région et sa capacité de redistribution interne.
Des travaux empiriques récents (KARRAY et DRISS, 2014) éclairent le dilemme de la
politique régionale tunisienne et permettent de mieux comprendre les hypothèses
sous-jacentes aux propositions du Livre Blanc : en créant des régions nouvelles qui
intègrent littoral et intérieur dans un même cadre politique et administratif, on
peut espérer maximiser les synergies entre les forces spontanées du marché et les
impulsions données par l’action publique.

Le choix ainsi opéré de regrouper au sein de nouvelles régions des territoires de


niveaux de développement différents posait un problème de mesure synthétique
du développement, qui a été confié exclusivement à des économistes. Influencés
par les travaux de SEN (2010), ces derniers ont privilégié une mesure directement
inspirée de l’Indicateur de Développement Humain (IDH) baptisée Indicateur de
Développement Régional (IDR). Calculé dans un premier temps au niveau des vingt-
quatre gouvernorats, l’IDR impliquait que les régions fussent un simple agrégat du
principal niveau antérieur. Mais la décomposition ultérieure de l’IDR au niveau des
264 délégations a changé la donne en autorisant une remise en cause plus radicale des
découpages territoriaux du pays (cf. Encadré). C’est pourquoi, après avoir explicité la
construction de l’IDR, nous procéderons dans un premier temps à une exploration des
inégalités territoriales en Tunisie, au niveau des 264 délégations, en mettant en regard
les valeurs de cet IDR – dont les variations sont expliquées en partie (57 %) par leur
appartenance aux différents gouvernorats – avec les mobilités qui les caractérisent.
Les délégations permettent d’apprécier plus finement les écarts de développement
territorial mais aussi les zones de transition ou de marge, à cheval sur plusieurs
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gouvernorats (CATIN et HAZEM, 2012 ; DIDELON et al., 2011). De plus, à la différence
d’une approche par les gouvernorats, celle par les délégations permet de mieux cerner
le fait urbain en Tunisie et de s’affranchir en partie de l’arbitraire des définitions
officielles de ce dernier (BARON et al., 2010). Dans un second temps, le rôle des villes
dans la structuration des inégalités territoriales en Tunisie et dans l’organisation des
migrations de populations peut être mieux mis en évidence. Une régionalisation
est proposée en fonction des profils de mobilité potentielle entre les délégations,
calculés à partir d’un modèle de simulation des migrations induites par les inégalités
de développement régional. Cette approche est enfin l’occasion de mettre en regard
le découpage régional proposé dans le Livre Blanc (2011) avec celui adopté depuis
1985 dans le Schéma National d’Aménagement du Territoire (SNAT), qui repose
sur la définition de régions homogènes. Cette comparaison permet d’aller au-delà
des dimensions économiques et sociales (CATIN et HAZEM, 2012) et de s’interroger
sur la prise en compte des représentations et des mobilités des populations dans la
définition de telles entités territoriales, mais aussi sur les pratiques de l’État tunisien
depuis l’indépendance face à de telles entités (DLALA, 1995).

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MAILLES DE SAVOIR, MAILLES DE POUVOIR ET MAILLES LÉGITIMES EN TUNISIE


Les différents découpages qui existent en Tunisie jusqu’à présent obéissent bien à la
différenciation mailles de savoir/mailles de pouvoir. Les vingt-quatre gouvernorats actuels,
tout comme les 264 délégations, constituent des mailles de pouvoir dans la mesure où les
personnes qui étaient à la tête de ces mailles étaient, jusqu’à la révolution de 2010-2011,
nommées par le pouvoir central tunisien. Ce sont également des mailles d’observation voire
de savoir puisque, jusqu’au recensement de population de 2004, il s’agit des niveaux à partir
desquels l’Institut National de la Statistique (INS) de Tunisie diffuse l’ensemble des résultats
du Recensement général des Populations et de l’Habitat. Les gouvernorats et délégations se
différencient des six régions définies dans le cadre du Schéma d’Aménagement du Territoire
(SNAT) de 1985, qui sont uniquement des mailles d’observation et de savoir.
Les mailles de pouvoir que sont les gouvernorats et les délégations se différencient des
mailles légitimes que sont les communes (urbaines). Ces dernières ont une particularité :
elles ne correspondent pas à la fusion de plusieurs délégations. Non seulement les périmètres
des délégations et ceux des communes ne coïncident pas, mais les représentations au sein
de ces dernières dépendent de résultats électoraux. Il serait abusif voire erroné de ne
considérer que les oppositions deux à deux de ces différents types de mailles. Les pratiques
des habitants, leurs perceptions et les images véhiculées, comme les cartes, contribuent
à donner à de simples mailles d’observation comme les régions définies en 1985 une
matérialité, voire une réalité.

-2-
Inégalités territoriales en Tunisie : état des lieux
L’objectif de cette première section est de mettre en évidence les inégalités
territoriales en Tunisie, telles qu’elles pouvaient être observées par les décideurs
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au moment de la rédaction du Livre Blanc au printemps 2011. En effet, leur
démarche visait à limiter les disparités entre les régions tunisiennes et se fondait sur
« des règles d’efficience, de fonctionnalité, d’accessibilité, d’effet d’entraînement, de
proportionnalité et d’équilibre ». Deux des principes, fonctionnalité et proximité,
reposent sur les mouvements migratoires et l’intensité des échanges de biens et de
services, d’une part entre les gouvernorats, d’autre part autour des grandes villes.
C’est pourquoi nous tiendrons compte à la fois du taux de mobilité et de l’indicateur
de développement régional tel qu’il a été mis au point par les économistes tunisiens
(ITCEQ, 2012), dans la mesure où ils constituent un état des lieux du moment.

2.1. Distribution du taux de mobilité et de l’indicateur de


développement régional au niveau des délégations
Compte tenu de l’importance de la composante migratoire dans l’organisation
territoriale de la Tunisie, la représentation du taux de mobilité interne1 par délégation
permet d’identifier celles à partir desquelles s’opèrent les redistributions de popu-
lations tunisiennes, relativement à leur population totale. La Figure 2 permet ainsi
d’identifier les « plaques tournantes » d’une partie des dynamiques démographiques
actuelles tunisiennes. Sans grande surprise, celles-ci correspondent peu ou prou aux
délégations associées aux plus grandes villes du littoral (Tunis, Sousse-Monastir,

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Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

Sfax) mais aussi à celles constituant les chefs-lieux de gouvernorats (Gafsa, Kasserine,
Sidi Bouzid, etc.).

L’identification de ces délégations, passages obligés d’une partie importante des


migrants tunisiens, mérite d’être confrontée à la distribution de l’IDR. En tenant
compte des critiques du PIB par habitant – difficulté de mesure à l’échelle locale,
absence de prise en compte de la dimension environnementale et sociale (GRASLAND,
2005 ; DE RUFFRAY, 2009) –, l’objectif a été de construire un indicateur synthétique qui
intègre un grand nombre de variables disponibles au niveau des délégations. L’intérêt
est d’approcher la réalité du développement dans les gouvernorats en tenant compte
des disparités intrinsèques ; d’orienter les décisions en matière d’aménagement
du territoire et d’établir une « veille » pour constituer une forme d’observatoire
de développement à une échelle fine. Au-delà des limites méthodologiques de sa
construction (une normalisation des valeurs après plusieurs analyses en composantes
principales successives), l’IDR est construit autour de quatre domaines identifiés
comme majeurs dans la définition des inégalités régionales : le savoir, la richesse et
l’emploi, la santé et la population, et enfin la justice et l’équité en lien avec le genre.
Les variations de l’IDR s’inscrivent dans un intervalle de mesure, borné par deux
délégations : la moins développée est celle d’Hassi Ferid, dans le gouvernorat de
Kasserine (cf. Figure 1) et la plus développée, celle de Bab el Bahr, dans le gouvernorat
de Tunis. Par construction, la valeur de cet indice composite est comprise entre 0
et 1, puisqu’elle est normalisée par les valeurs de l’indice correspondant aux deux
délégations de référence. La distribution des valeurs de l’indice de développement
régional des délégations est assez nettement dissymétrique à gauche avec une médiane
égale à 0,31 et la moitié des valeurs comprises entre 0,19 (correspondant au premier
quartile) et 0,42 (correspondant au troisième quartile). Les valeurs les plus élevées
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(supérieures à 0,69) se concentrent exclusivement dans les délégations des quatre
gouvernorats – Tunis, Ariana, Manouba et Ben Arous - qui constituent le Grand
Tunis.

La distribution de l’IDR (cf. Figure 1) par délégation met en évidence une très forte
autocorrélation spatiale, traduisant le jeu de plusieurs facteurs d’organisations fondés
sur des appartenances à des entités urbaines de différentes tailles et sur des gradients
de différentes portées. Elle illustre la profondeur des inégalités régionales opposant
le littoral et l’intérieur mais aussi l’existence de forts contrastes à l’intérieur même de
l’agglomération de Tunis, et surtout l’existence de pics relatifs de développement dans
les zones intérieures du pays. Deux logiques contradictoires expliquent cet héritage
de la période antérieure à la révolution de 2011. D’un côté, le tournant libéral
du pays à partir des années 1990 a favorisé la concentration des investissements
sur la côte, en particulier autour des grandes plateformes portuaires ouvertes sur
l’international (Bizerte, Tunis, Sousse, Sfax...) et dans les zones touristiques desservies
par des aéroports internationaux (Djerba, Monastir, Nabeul). D’un autre côté, le
pouvoir a maintenu un contrôle étroit sur le territoire à travers le maillage en
vingt-quatre gouvernorats, qui ont vu leurs chefs-lieux concentrer les équipements
publics (hôpitaux, lycées, etc.). Cette carte montre ainsi très clairement l’écart de
développement entre les délégations appartenant à ces chefs-lieux des gouvernorats
de l’intérieur (Kasserine, Sidi Bouzid, Béja, Kairouan, etc.) et les espaces ruraux

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Figure 2 – Mobilités en Tunisie


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Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

environnants. La structure spatiale opposant littoral et intérieur n’est cependant


pas figée et des effets de spillover positifs sont mis en évidence, notamment dans
la région du Sahel ou en périphérie de Tunis, au profit de gouvernorats tels que
Zaghouan ou Kairouan. Si ces effets de diffusion sont confirmés, ils pourraient
conduire à revoir la politique régionale afin d’utiliser précisément « les effets de
synergies de proximité entre les gouvernorats de l’intérieur et leurs voisins du littoral
afin d’impulser une migration partielle des activités intensives en main-d’œuvre
vers les régions défavorisées. Ces dernières devraient alors connaître une première
phase d’optimisation de la spécialisation existante suivie par une seconde phase de
diversification » (KARRAY et DRISS, 2014).

2.2. Indice de développement régional et hiérarchie urbaine


Les deux premières cartes confortent l’hypothèse selon laquelle les inégalités de
développement entre délégations peuvent se lire en fonction de leur appartenance
à une agglomération urbaine et de la position de cette dernière dans la hiérarchie
urbaine tunisienne, dont on sait qu’elle a joué un rôle croissant depuis le tournant
libéral des années 1990. Sont alors privilégiées les analyses des espaces en croissance
et de leur environnement. Il ne s’agit pas de régions en tant que telles mais de villes
polarisant des aires d’influence.

La difficulté vient ici du fait que la définition officielle de la ville en Tunisie,


à savoir la commune urbaine, ne coïncide pas avec le découpage en délégations
car cette définition résulte d’une décision politique (BEN REBAH, 2008). La relation
entre niveau de développement (IDR) et taux d’urbanisation « officiel » restitue alors
très imparfaitement les inégalités de développement régional entre les délégations
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tunisiennes. Pour rendre compte véritablement des logiques de polarisation, de
marché et ici de développement territorial, il convient d’utiliser une source alternative
constituée par la base de données MENAPOLIS2 , reposant sur la prise en compte du
critère morphologique de continuité du bâti pour définir l’urbain, et conçue comme
une étude prospective sur l’extension urbaine et les dynamiques démographiques
dans les villes méditerranéennes. Les populations des différentes villes ainsi définies
sont estimées en tenant compte de l’extension urbaine visible sur l’imagerie satellitale.

La relation entre l’indice de développement régional et l’appartenance des


délégations aux agglomérations morphologiques est beaucoup plus intéressante
que la définition officielle de la ville pour évaluer l’effet de la métropolisation et de
la hiérarchie urbaine. Grâce à un travail réalisé par un étudiant de master (SAUQUES,
2013), nous disposons d’une variable qualitative croisant les 264 délégations
tunisiennes et l’aire d’extension des agglomérations morphologiques définies par
MORICONI (1994). De cette manière, il est possible d’attribuer à chaque délégation
une appartenance territoriale3 à une aire urbaine selon six classes de population (cf.
Figure 3).

Même si une légère incertitude demeure sur l’appartenance de certaines déléga-


tions aux différents niveaux de la hiérarchie urbaine, le résultat apparaît particulière-
ment convaincant sur le plan statistique, puisque nous parvenons par l’utilisation

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de cette seule variable à expliquer 60 % de la variance de l’indice de développement


régional, soit un niveau explicatif supérieur à celui caractérisant l’appartenance à
un des vingt-quatre gouvernorats. L’analyse détaillée de ces résultats (cf. Figure 3)
montre nettement l’existence de deux seuils décisifs de population, autour de 10 000
habitants, d’une part, et 100 000 habitants, d’autre part. Les plus faibles niveaux de
développement régional (inférieurs à 0,2) s’observent dans les délégations dépour-
vues d’agglomération de plus de 10 000 habitants. Il n’apparaît pas ensuite de
différences significatives entre les délégations appartenant à des agglomérations
de taille comprise entre 10 000 et 100 000 habitants : celles-ci se caractérisent par
des valeurs moyennes d’IDR comprises entre 0,25 et 0,35. Au-delà de ce seuil, on
observe un accroissement brutal de l’IDR, supérieur en moyenne à 0,4, mais guère
de différences entre les délégations situées dans les grandes agglomérations du lit-
toral (Sousse, Sfax...) et celles situées dans l’agglomération millionnaire de Tunis.
Ce constat, validé par le critère d’information d’Akaike (AIC), conduit à proposer
un découpage de la variable de niveau urbain en trois classes dans les analyses
ultérieures : moins de 10 000 habitants, de 10 000 à 100 000 habitants et plus de
100 000 habitants.

Figure 3 – Niveau d’urbanisation morphologique et développement


régional
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Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

-3-
Inégalité de développement régional, accessibilité et
polarisations multiscalaires
Si le poids démographique des villes et autres agglomérations urbaines s’accom-
pagne d’écarts significatifs des valeurs d’IDR, c’est en raison du lien entretenu avec les
différents types de fonctions et de services, dont les rayonnements ont des portées
plus ou moins importantes. C’est pourquoi l’appartenance des délégations à une
agglomération d’une taille donnée doit être complétée par la prise en compte de
gradients de développement, fonctions de la distance aux pôles structurants, écono-
miques ou administratifs, de l’espace tunisien. On peut en effet poser l’hypothèse
que ces gradients de développement s’expliquent par l’accessibilité différentielle
des habitants des délégations à des espaces plus ou moins étendus et offrant des
opportunités plus ou moins nombreuses. Le lien statistique très fort, observé entre
niveaux de développement et de mobilité, s’expliquerait alors par une inégalité
d’accès aux ressources exogènes autant que par un déficit endogène.

3.1. Une vision multiscalaire des accessibilités pour mieux


comprendre les inégalités
L’accessibilité à l’international des délégations tunisiennes peut être définie
comme leur facilité d’ouverture économique au marché mondial, conditionnant
leur capacité à exporter ou attirer des investissements étrangers. On peut en fournir
une estimation pertinente en calculant la distance minimale d’une délégation à l’un
des sept grands ports internationaux de Tunisie (Bizerte, Tunis, Sousse, Sfax, etc.).
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Cette mesure est préférable à la simple distance au littoral qui agrège des effets aussi
différents que ceux liés aux activités productrices exportatrices du pays, ceux liés au
développement du tourisme balnéaire, etc. Cet indicateur restitue remarquablement
bien les inégalités fondamentales du territoire tunisien4 . Le fait d’inclure ou d’exclure
les délégations du Grand Tunis ne change pas significativement le résultat (cf.
Figure 4).

L’accessibilité nationale des délégations tunisiennes peut être définie comme leur
facilité d’accès à la capitale politique du pays, fondamentale dans un pays fortement
centralisé par les actions menées durant les périodes Bourguiba et Ben Ali. On
peut prendre comme estimation de ce facteur la distance euclidienne entre chaque
délégation et le palais présidentiel situé dans la délégation de Carthage, symbolisant
le cœur du pouvoir. Bien que le calcul effectué en distance euclidienne ne restitue
pas parfaitement l’inégalité réelle d’accès à la capitale, la variable rend compte d’une
inégalité structurale bien réelle et significative malgré un pouvoir explicatif plus
faible que celui de l’accessibilité internationale5 .

Enfin, l’accessibilité locale des délégations tunisiennes peut être envisagée comme
leur éloignement d’un pôle de services publics et de commerces, susceptible de
satisfaire l’essentiel des besoins courants de la population. Dans le contexte tunisien,
comme dans celui des pays socialistes d’Europe de l’Est avant 1989 ou de la France

864
A. B ENNASR , M. B ARON, S. D E R UFFRAY, C. G RASLAND , F. G UERIN -PACE

du XIXe siècle, c’est le niveau administratif principal, à savoir le gouvernorat, qui


assure cette fonction à travers son chef-lieu. La relation entre l’IDR et la distance entre
le centre de chaque délégation et le centre du chef-lieu de gouvernorat devrait donc
aussi restituer une part importante de l’inégalité de niveau de développement entre
les délégations sièges des chefs-lieux de gouvernorat, au nombre de vingt-quatre,
et les 239 autres. Cette hypothèse est confirmée par l’introduction de l’accessibilité
locale qui explique 40 % des variations de l’IDR en incluant les délégations du Grand
Tunis, et 32 % sans ces dernières (cf. Figure 4).

Au-delà de ces effets considérés successivement, il convient de s’interroger sur les


interactions de l’accessibilité définie à différents échelons territoriaux pour expliquer
les variations de l’IDR. Ces accessibilités de portées et de logiques différentes ont-elles
des effets cumulatifs (cf. Tableau 1) ?

Tableau 1 – Modélisation de l’effet des trois types d’accessibilité en


Tunisie

Coefficients

Estimate Standard Error t value Pr (>ItI)

Intercept 0,902 0,0256 35,358 < 0,001***

Accessibilité globale -0,092 0,0074 -12,437 < 0,001***

Accessibilité nationale -0,026 0,0053 -4,948 < 0,001***

Accessibilité locale -0,034 0,0052 -6,664 < 0,001***


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Analyse de variance

Df Sum Sq Mean Sq F value Pr(>F)

Accessibilité globale 1 3,870 3,870 487,494 < 0,001***

Accessibilité nationale 1 0,224 0,224 28,235 < 0,001***

Accessibilité locale 1 0,353 0,353 44,410 < 0,001***

Résiduels 259 2,056 0,008

L’analyse statistique confirme que les trois formes de gradients ont des effets
indépendants qui tendent tous à renforcer de façon cumulative l’inégalité entre les
délégations. Une délégation aura donc un indicateur de développement régional
d’autant plus élevé qu’elle sera à la fois proche d’un port international ET proche de
Tunis ET proche du chef-lieu de son gouvernorat. Si le premier effet est de loin le plus
important (démontrant que l’enclavement est le cœur du problème des inégalités
régionales en Tunisie), les deux autres facteurs ne sont pas pour autant négligeables.
La réforme constitutionnelle du découpage régional devra en particulier tenir le
plus grand compte des centralités locales, héritage de quarante ans d’administration
centralisée sous les présidences Bourguiba et Ben Ali. La politique de transports est

2015 - N° 5 Revue d’Économie Régionale & Urbaine 865


Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

Figure 4 – Gradients d’accessibilité et inégalités régionales en Tunisie


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susceptible de jouer un rôle majeur dans la réduction des écarts de développement,


surtout si l’on considère que la démarche suivie dans notre analyse, en utilisant une
distance euclidienne, a minoré l’effet de certains gradients qui auraient été encore
plus importants si nous avions pu recourir aux temps de déplacement routiers ou
ferroviaires.

Il reste à vérifier que l’effet dit de « hiérarchie urbaine », dans la mesure où il


lie la valeur élevée d’IDR d’une délégation à son appartenance à une agglomération
urbaine de grande taille, est redondant ou non avec les trois mesures d’accessibilité
définies antérieurement (cf. Tableau 2). Tous les effets demeurent significatifs et
agissent dans le même sens que précédemment. La prise en compte de la taille de
l’inscription urbaine des délégations ajoute donc une dimension irréductible aux
inégalités d’accessibilité et permet d’obtenir un modèle structurel rendant compte
de 75 % des variations des inégalités de développement en Tunisie.

Tableau 2 – Modélisation des facteurs structurels d’inégalité de


développement régional en Tunisie

Coefficients

Estimate Standard Error t value Pr (>ItI)

Intercept 0,662 0,039 17,159 < 0,001***

Accessibilité globale -0,069 0,007 -9,170 < 0,001***

Accessibilité nationale -0,020 0,005 -4,035 < 0,001***


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Accessibilité locale -0,017 0,005 -3,439 < 0,007***

Petites villes (10-20 000


0,058 0,017 3,473 < 0,001***
hab.)

Villes intermediaries
0,083 0,014 5,803 < 0,001***
(20-100 000 hab.)

Grandes agglomerations
0.137093 0.017422 7.869 < 0,001***
(plus de 100 000 hab.)

Analyse de variance

Df Sum Sq Mean Sq F value Pr(>F)

Accessibilité globale 1 3,870 3,870 610,812 < 0,001***

Accessibilité nationale 1 0,224 0,224 35,377 < 0,001***

Accessibilité locale 1 0,353 0,353 55,644 < 0,001***

Taille des villes 3 0,434 0,145 22,839 < 0,001***


Residual standard error: 0.07959 on 256 degrees of freedom
Multiple R-squared: 0.7506,Adjusted R-squared: 0.7447
F-statistic: 128.4 on 6 and 256 DF, p-value: < 2.2e-16

2015 - N° 5 Revue d’Économie Régionale & Urbaine 867


Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

3.2. Une simulation des migrations nettes de population


induites par les inégalités de développement régional en
2010-2020
Après avoir montré les relations entre les variations de l’indice de développement
régional (IDR) et le taux de mobilité, qui ont permis d’identifier des « plaques tour-
nantes » démographiques, le rôle joué par l’accessibilité des territoires et l’inscription
au sein de la hiérarchie urbaine, l’objectif est de présenter un modèle de simulation
de répartition de la population au moyen de transferts de population qui seraient
induits de façon tendancielle par les inégalités de développement régional observées
au cours des prochaines années. Au-delà de l’effet de taille de villes et du positionne-
ment par rapport au littoral tunisien, ce modèle de redistribution construit au niveau
des délégations ne prend pas en compte volontairement les effets d’appartenance
territoriale aux gouvernorats (GRASLAND, 2012).

La cartographie des résultats (cf. Figures 5 et 6) peut être effectuée de deux


façons différentes, selon que l’on veut mettre en valeur les polarisations urbaines
(cf. Figure 5) ou produire une régionalisation fondée sur les proximités des déléga-
tions en matière de bassins d’attraction (cf. Figure 6).

La première approche montre, pour chacune des délégations, le solde migratoire


attendu ainsi que le premier flux net de migrants envoyé vers une autre délégation
(cf. Figure 5). Comme il peut arriver que ce premier flux ne représente qu’une petite
partie des migrants nets, on a également ajouté l’ensemble des flux nets supérieurs à
vingt migrants. Les premiers flux nets permettent de dessiner une hiérarchie des flux
dominants de migrations conforme à la méthode de NYUSTEN et DACEY (1961) d’où
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l’on peut déduire des polarisations exploitables dans le choix des centres principaux
et secondaires des futures régions. Les autres flux permettent de repérer les espaces
où se produiraient potentiellement les transferts nets les plus importants en volume.
En rapport avec les projets de régionalisation discutés jusqu’à présent, dont celui
proposé dans le Livre Blanc, ces flux nets simulés peuvent être considérés soit comme
des mouvements à contrecarrer pour permettre aux habitants de disposer d’un
accès équitable au territoire tout en conservant leur résidence (développement des
délégations répulsives, dans une logique sociale), soit de mouvements migratoires
qu’il faudrait encourager par un renforcement des délégations attractives, dans une
logique économique de type libérale.

3.2.1. Explications du modèle


Les flux nets de migrants sont obtenus à partir d’un modèle d’équilibre où les
déplacements de migrants se font des zones les moins développées vers les zones les
plus développées, proportionnellement à la quantité de population à « déplacer »
(POPi) pour équilibrer l’IDR de la zone de départ (i) et de la zone d’arrivée (j). La
quantité d’opportunités de déplacement de i vers j (OPPij) est donnée par l’Équation
1:

OPPij = (IDRi&j – IDRj ) . POPi (1)

868
A. B ENNASR , M. B ARON, S. D E R UFFRAY, C. G RASLAND , F. G UERIN -PACE

Figure 5 – Flux dominants


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2015 - N° 5 Revue d’Économie Régionale & Urbaine 869


Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

Figure 6 – Régionalisation fonctionnelle


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870
A. B ENNASR , M. B ARON, S. D E R UFFRAY, C. G RASLAND , F. G UERIN -PACE

Ce volume théorique de migrants va toutefois subir deux contraintes spatiales


relatives : d’une part à la saturation foncière de la zone d’accueil (SATj) et, d’autre
part, à l’éloignement entre les zones de départ et d’arrivée (DISTij) qui réduit la
probabilité d’interaction (INTij). Le paramètre de saturation reflète le caractère
dissuasif induit simultanément par le manque d’espace constructible et le prix du
foncier (Équation 2) approché par des seuils de densité de population (DENj)
compris entre 2 000 et 20 000 hab./km2 retenus après observation empirique pour
la période 1994-2004 :

SATj = 1 si DENj < 2 000

SATj = [log(20 000) – log (DENj) ] / [log(20 000)-log(2 000)] si


(2)
DENj > 2 000

Pour la distance (DISTij), une fonction puissance (PARETO) d’exposant 2 est


paramétrée pour avoir une probabilité de relation (INTij) égale à 1 pour une
distance nulle et une probabilité de 0,5 pour une distance euclidienne de 40 km, qui
correspond en moyenne à une heure de temps routier. On pourra évidemment faire
varier cette portée de 40 km dans des modèles de simulation futurs, ou bien changer
l’exposant de la distance, fixé ici à 2, pour restituer les comportements généraux.

INTij = 1 / (1+(DISTij / 40)2 ) (3)

Le modèle final qui rend compte du solde net des échanges entre i et j (Fij-Fji)
assemble les trois hypothèses dans un modèle unique auquel on ajoute un paramètre
de vitesse de convergence (v), défini comme le nombre total de migrations nettes
divisé par la population totale. On a choisi ici arbitrairement un paramètre de
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vitesse (v) tel que le volume de transferts nets entre délégations soit égal à 1 % de la
population tunisienne.

Fij-Fji = v . OPPij . SATj . INTij (4)

La méthode mise au point par NYUSTEN et DACEY possède toutefois l’inconvénient


de se référer uniquement au premier flux et d’introduire un biais qualifié de MAUP
(Modifiable Area Unit Problem) à l’échelle des délégations (BARON et al., 2010).
En effet, une métropole découpée en plusieurs délégations (cf. Encadré) voit son
attraction minorée par l’emploi de cette méthode.

Une analyse complémentaire consiste à calculer l’intensité de la relation entre


les profils migratoires des délégations puis à les classer de façon à identifier des
ensembles de délégations ayant les même profils de départ ou d’arrivée. On aboutit
ainsi à la définition de grandes régions à l’intérieur desquelles des semi-périphéries
et des périphéries plus ou moins lointaines peuvent être identifiées (cf. Figure 6). Du
Nord au Sud, on distingue une première région organisée en fonction de l’attraction
vers la capitale, Tunis, allant jusqu’à la frontière avec l’Algérie ; une seconde région
correspondant à la zone d’influence des villes du Sahel (Sousse et Monastir) et qui
comprend les zones organisées autour de polarités secondaires vers Kasserine, Gafsa
et Tozeur ; enfin, une troisième région construite autour de la polarisation de Sfax

2015 - N° 5 Revue d’Économie Régionale & Urbaine 871


Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

se prolonge vers le sud-est par des zones de polarisation secondaire vers Gabès,
Médenine ou Djerba.

Ce découpage théorique offre un cadre de réflexion très ouvert pour le débat


constitutionnel. Tout en confirmant la logique d’un découpage en régions hétéro-
gènes associant le littoral et l’intérieur, il suggère la possiblité de mobiliser plus
efficacement les polarités secondaires des régions périphériques, par exemple en
renforçant les pôles de Gafsa, Kasserine, Jendouba ou Gabès et en les reliant par des
infrastructures de transport rénovées aux pôles principaux du littoral. Cette carte
montre aussi les enjeux de quelques zones interstitielles (notamment des délégations
situées dans les gouvernorats de Sidi Bouzid ou de Siliana) qui pourront jouer un
rôle particulièrement stratégique dans les rééquilibrages internes des futures régions.

-4-
Conclusion
Découpage régional et débat constitutionnel
Les résultats de nos analyses permettent d’éclairer dans une certaine mesure le
dilemme du découpage régional auquel doit faire face l’Assemblée Constituante
tunisienne, et que l’on peut symboliser par deux propositions en apparence contra-
dictoire (cf. Figure 7) : le SNAT de 1985, qui crée six régions de poids démographiques
et surtout de niveaux de développement inégaux ; le Livre Blanc, qui met à part le
Grand Tunis et propose quatre régions hétérogènes associant le littoral et l’intérieur,
avec des populations sensiblement plus égales.
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Le découpage dit du Schéma National d’Aménagement du Territoire en six
régions demeure significativement marqué par de fortes inégalités, même après
avoir pris en compte l’ensemble des facteurs structurels (cf. Figure 7a). On note en
particulier un net avantage de la région du Centre-Est, toutes choses égales quant
aux facteurs précédemment analysés, et un désavantage inverse du Centre-Ouest. Le
Nord-Est demeure caractérisé quant à lui par une très grande diversité de situations
résiduelles. En tout état de cause, un découpage régional de ce type impliquerait des
actions spécifiques en faveur de certaines régions, indépendamment des politiques
nationales globales. Le découpage du Livre Blanc en cinq régions apparaît en revanche
beaucoup plus neutre en matière de distribution des facteurs résiduels (cf. Figure
7b). Il n’impliquerait pas de politique spécifique en faveur de l’une ou l’autre des
régions, mais pourrait se contenter de chercher dans chacune d’entre elles à agir sur
les quatre facteurs structurels dégagés précédemment. Il serait en quelque sorte plus
neutre vis-à-vis de facteurs spécifiques aux effets régionaux, précisément parce qu’il
mélange des territoires très différents sur le plan économique mais aussi historique
et culturel.

Fortement centralisé, le découpage territorial en Tunisie avait pour finalité


d’asseoir l’autorité de l’État central et de combattre les velléités régionales et tribales.
Cet objectif s’est concrétisé par une partition artificielle, tant le partage des « arch » et

872
A. B ENNASR , M. B ARON, S. D E R UFFRAY, C. G RASLAND , F. G UERIN -PACE

Figure 7 – Évaluation de la capacité de deux propositions de découpage


régional de la Tunisie à prendre en compte les écarts résiduels de
développement régional
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Explication : les croquis ci-dessus montrent les résultats d’une analyse de la variance effectuée
sur les résidus du modèle expliquant l’IDR par les facteurs structurels (niveau urbain, acces-
sibilité). L’objectif est de vérifier pour chaque découpage régional s’il tend à regrouper des
délégations caractérisées par des forces ou faiblesses spécifiques.

2015 - N° 5 Revue d’Économie Régionale & Urbaine 873


Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

tribus sur plusieurs entités administratives entérinait la dissociation entre territoire


administratif de rattachement et identité territoriale (GUÉRIN-PACE et FILIPPOVA, 2008 ;
GUÉRIN et GUERMOND, 2006)). S’il existe un relatif consensus autour d’une nécessaire
nouvelle approche de la régionalisation, il n’est plus possible aujourd’hui de « faire
du passé table rase », en sous-estimant l’importance des gouvernorats et surtout de
leurs chefs-lieux dans la structuration de l’espace tunisien, comme l’a bien montré
l’exemple des pays d’Europe centrale et orientale après la chute du Mur de Berlin dans
leurs multiples transformations pour intégrer l’Union européenne (REY et al., 2005 ;
REY et SAINT-JULIEN, 2005). Quelle que soit la rationalité des découpages proposés
par les experts, il est indispensable d’insister sur le fait que le découpage adopté ne
saurait être conçu sans l’adhésion des populations concernées. « Le développement
régional implique la présence d’un ancrage territorial dans la région qui constitue
un espace de vie et un espace d’action pour les acteurs régionaux au point de devenir
un espace identitaire et un espace de projection future à la fois » (BELHEDI, 2012). La
conception d’un nouveau projet territorial ne saurait se réaliser sans une démarche
consensuelle dépassant les solidarités tribales ou régionalistes. D’autant plus que,
depuis janvier 2011, face à l’affaiblissement de l’autorité de l’État, de nombreuses
villes et localités rurales ont été épisodiquement secouées par des troubles liés à
des conflits tribaux et claniques. On a connu ce scénario dans le bassin minier,
à Sidi Bouzid, à Sbeitla et à Gafsa. Ces remous latents, souvent étouffés sous les
régimes de Bourguiba et de Ben Ali, ont retrouvé de leur vigueur après la révolution.
Parmi les nombreux conflits dont le territoire est l’objet, on peut citer la population
de Makhtar fière de son histoire millénaire (Makhtaris), qui n’a jamais accepté le
rattachement à la ville de Siliana, désignée comme siège du gouvernorat (un petit
centre créé en 1910) à leur insu ou, à l’inverse, la population de Mezzouna, située à
la périphérie de la plaine de Sfax, qui souhaite se détacher du gouvernorat de Sidi
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Bouzid et réintégrer celui de Sfax.

La solution pourrait résider dans l’articulation de plusieurs niveaux territoriaux


remplissant des fonctions différentes et jouant sur des mécanismes différents de
solidarité et de développement :

La création de grandes régions économiques en nombre limité (quatre à six)


semble indispensable pour coordonner le jeu des investissements productifs, soit en
s’appuyant sur un mécanisme de péréquation et de solidarité (hypothèse SNAT), soit
en favorisant les mécanismes spontanés de diffusion en renforçant l’accessibilité des
zones intérieures aux zones littorales et en créant une solidarité de fait à travers le
choix d’un découpage en bandes (hypothèse Livre Blanc).

Le maintien provisoire d’un niveau intermédiaire de service public ou privé


fondé sur une carte des gouvernorats rénovée avec possibilité de référendums locaux
pour revoir les appartenances de certaines délégations à l’aide de référendums
d’initiative locale.

La généralisation d’un niveau communal de gouvernance à l’ensemble du


territoire en abolissant la distinction héritée du régime de Ben Ali entre espaces
communaux (urbains) et non communaux (ruraux). Il s’agirait ici de mettre en

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A. B ENNASR , M. B ARON, S. D E R UFFRAY, C. G RASLAND , F. G UERIN -PACE

cohérence le découpage des délégations d’une part et celui des communes d’autre part,
afin de doter l’ensemble du pays d’un maillage cohérent d’élus locaux responsables.

La rationalité voudrait sans doute que l’on s’affranchisse à terme du niveau


intermédiaire correspondant aux actuels gouvernorats (à l’instar du projet de
suppression des départements en France) mais ce serait sans doute une erreur
de le faire trop rapidement, tant que les deux autres niveaux n’auront pas trouvé leur
cohérence et prouvé leur efficacité en termes économiques (régions) et en termes
politiques (communes). Comme l’a montré il y a longtemps LAURENT (1991) à propos
du cas français, les maillages territoriaux de différentes échelles forment système
et on ne peut changer un échelon territorial sans tenir compte des polarisations
existantes et sans avoir en tête les effets induits sur les polarisations aux niveaux
supérieurs et inférieurs.

Annexe
Inégalités d’accessibilité routière entre les
gouvernorats de Tunisie
Afin d’évaluer le biais introduit par l’utilisation des distances euclidiennes dans
notre modélisation des interactions entre les 264*264 délégations, nous avons
calculé pour l’ensemble des 24*24 gouvernorats les temps et les distances routières
à l’aide d’une application R mise au point par GIRAUD (UMS RIATE CNRS 2414),
permettant d’interroger de façon interactive Google Maps. Bien que la procédure ne
soit pas généralisable sur une matrice de grande taille pour des raisons de temps, de
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calcul et de copyright, elle permet d’évaluer assez précisément les écarts introduits
par l’usage de la distance euclidienne par rapport aux temps réels.

Le tracé des routes semble introduire peu de différences en matière d’accessibilité


puisque l’indice de sinuosité est en moyenne de 1,25 et varie entre 1,18 (Sfax) et 1,33
(Béja). Il dépend principalement des conditions physiques (présence de montagnes,
tracé de la côte, contournement des chotts, etc.). Il semble en tous les cas peu corrélé
avec les inégalités socio-économiques.

La vitesse sur route apparaît en revanche beaucoup plus discriminante puisque


la valeur moyenne de 78,1 km/h recouvre des écarts notables entre des gouvernorats
métropolitains bien reliés aux autres par des autoroutes ou voies rapides (Ariana :
85,6 km/h) et les gouvernorats de l’intérieur ne disposant que de voiries de niveau
inférieur (Siliana : 69 km/h).

L’indice de performance globale du réseau routier qui combine les deux


indicateurs précédents reflète clairement l’opposition entre le littoral et l’intérieur
mais avec des nuances puisque les gouvernorats côtiers soumis aux sinuosités de la
côté ont des vitesses à vol d’oiseau moins importantes que prévues. Les écarts varient
de 68,6 km/h (Sfax) à 55,8 km/h (Sidi Bouzid).

2015 - N° 5 Revue d’Économie Régionale & Urbaine 875


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876
Tableau 3 –

Distance Distance Indice de Performance


Temps routier Vitesse sur route
GOUVERNORATS euclidienne routière sinuosité globale
(3) 60*(2)/(3)
(1) (2) (2)/(1) 60*(1)/(3)
Tunis 4 017 5 069 3 573 1,26 85,1 67,5

Ariana 4 167 5 326 3 732 1,28 85,6 67,0

Ben Arous 3 984 5 034 3 543 1,26 85,3 67,5

Mannouba 4 015 4 989 3 778 1,24 79,2 63,8

Nabeul 4 051 5 069 3 708 1,25 82,0 65,6

Zaghouan 3 577 4 500 3 507 1,26 77,0 61,2


Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

Bizerte 4 952 6 401 4 393 1,29 87,4 67,6

Béja 4 263 5 677 4 407 1,33 77,3 58,0

Jendouba 4 398 5 514 4 532 1,25 73,0 58,2

Le Kef 4 234 5 222 4 246 1,23 73,8 59,8

Siliana 3 559 4 395 3 824 1,23 69,0 55,8

Sousse 3 627 4 509 3 419 1,24 79,1 63,7

Monastir 3 808 4 904 3 825 1,29 76,9 59,7

Mahdia 4 157 5 362 4 136 1,29 77,8 60,3

Sfax 4 445 5 253 3 887 1,18 81,1 68,6

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Tableau 3 – (suite)

Kairouan 3 372 4 082 3 226 1,21 75,9 62,7

Kasserine 4 153 5 300 4 178 1,28 76,1 59,6

Sidi Bouzid 3 780 4 883 3 975 1,29 73,7 57,1

Gabès 5 296 6 532 5 000 1,23 78,4 63,5

Medenine 6 472 8 062 6 181 1,25 78,3 62,8

Tataouine 7 364 9 150 7 033 1,24 78,1 62,8

Gafsa 4 893 5 838 4 621 1,19 75,8 63,5

2015 - N° 5
Tozeur 6 331 7 634 6 096 1,21 75,1 62,3

Kebili 5 873 7 624 5 884 1,30 77,7 59,9

TUNISIE 108 786 136 329 104 704 1,25 78,1 62,3

Revue d’Économie Régionale & Urbaine


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Dilemmes de la réforme régionale tunisienne

Remerciements
Les réflexions, recherches et résultats exposés dans cet article ont été menés dans
le cadre d’un programme soutenu par le ministère des Affaires étrangères français
et le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche tunisien : CMCU
n° 13GO401 « Complexités et enjeux des mailles territoriales : Approches franco-
tunisiennes par les mesures ». Ces travaux sont approfondis dans le cadre d’un
programme soutenu par le CNRS et le MESR tunisien : PICS n° 234722 « Approches
comparatives des réformes régionales au Nord et au Sud de la Méditerranée ».

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Notes
1 - Le taux de mobilité apparaît plus pertinent que le solde migratoire comme révélateur des
inégalités de développement en Tunisie car, dans le cas des soldes négatifs, il évite de
confondre les situations d’exode rural des régions intérieures avec celles de redistribution du
cœur des métropoles vers leurs périphéries. En matière de mobilité, un centre métropolitain
demeure un hub majeur d’arrivée et de départ des populations alors qu’une région
intérieure désavantagée se caractérise par l’isolement et l’absence d’échanges.
2 - Le programme MENApolis vise à développer un outil statistique et cartographique
permettant d’évaluer, suivre et prévoir les dynamiques de l’urbanisation des pays de
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l’aire MENA (Moyen Orient et Afrique du Nord) de 1950 à 2010, avec une projection à
l’horizon 2030.
3 - Le niveau urbain d’appartenance d’une délégation est déterminé selon une régle de majorité
du territoire de la délégation à l’aire urbaine.
4 - Cet indicateur, calculé par la distance à vol d’oiseau au port international le plus proche,
rend compte à lui seul de 60 % de la variance de l’IDR, si on lui donne la forme adaptée
(décroissance exponentielle).
5 - Le facteur explicatif ne rend compte en effet que de 35 % de la variance de l’indicateur
de développement régional voire seulement 13 % si on retire les délégations du Grand
Tunis (cf. Figure 4). Il aurait évidemment été préférable d’utiliser pour ce calcul et les
autres mesures d’accessibilité une distance fonctionnelle en temps routier. Mais le niveau
d’analyse (264*264 délégations) rend le calcul prohibitif voire impossible en l’absence
d’un SIG routier fiable à cette échelle détaillée. Nous avons toutefois vérifié par le calcul
des distances et des temps routiers entre les centres des 24*24 gouvernorats que l’erreur
de mesure ainsi introduite demeure supportable et ne biaise pas de façon excessive les
résultats obtenus (cf. Annexe 1).

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