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Niveau de technicité :
Introduction
Après avoir acheté un cardiofréquencemètre et appris à l’utiliser à cheval, il est indispensable de savoir analyser
précisément une séance de galop par l’enregistrement de la fréquence cardiaque (FC) en continu.
Cette fiche s’adapte à tous les types d’entraînement. Chaque entraîneur ou cavalier peut y trouver son style
habituel et choisir, parmi les paramètres proposés, les indicateurs qui lui sembleront les plus adaptés à ses
séances.
Quelques rappels
Graphique 1. Schéma de Howald (1974) représentant la proportion entre les 3 filières énergétiques suivant l’intensité et la durée
de l’effort et le positionnement des différentes activités équestres du galop au trotting
La fréquence cardiaque du cheval évolue entre 30 BPM au repos à 240 BPM pour un effort maximal.
Classiquement, on considère la relation « Fréquence cardiaque/Vitesse » comme linéaire, avec un coefficient
directeur (pente) qui est personnel à chaque cheval et peut varier avec l’entraînement.
Cette large plage (30-240 BPM), beaucoup plus étendue que chez l’Homme, couvre toutes les activités équestres :
les valeurs courantes observées vont du trotting (100 BPM) au galop (160 à 220 BPM). Il est utile que le cavalier
connaisse ces références et celles de son cheval afin de suivre, par exemple, sa récupération au trot.
Généralement, plus le travail est intense, moins le facteur émotionnel (environnement) perturbe l’enregistrement.
Les valeurs moyennes sont pertinentes et représentent bien la sollicitation du métabolisme aérobie.
Graphique 2. La droite « Fréquence cardiaque /Vitesse » et les plages de fréquences pour chaque activité équestre :
respectivement au boxe, promenade au pas, trotting, dressage, saut d’obstacles, galop, cross en compétition, galop de
course
Dans le premier cas, le cavalier maintient la vitesse quel que soit le vallonnement. La fréquence cardiaque suit
avec un léger décalage à chaque début de montée (inertie de la réponse du métabolisme aérobie) et un retour
plus ou moins tardif dans la descente (délais de récupération). Dans le second cas, à intensité constante, le
cavalier ralentit dans les montées et accélère dans les descentes pour garder une fréquence cardiaque
relativement stable.
Les entraînements modernes privilégient les variations d’intensité, que cela soit sous forme de séance de type «
fartlek » ou par intervalles ; le cheval sollicite alors successivement les deux filières énergétiques, comme un
moteur « hybride » de voiture. Dans une séance de travail autour du seuil anaérobie, une variation de 20 BPM
permet généralement de passer de l’un à l’autre.
L’entraînement vs la compétition
En compétition, le cheval sur le cross atteint des fréquences cardiaques entre 200 et 220 BPM, en suivant une
courbe qui oscille, répondant encore aux variations de la sollicitation (ralentissement, renvoi du cavalier,
montée…). Elle monte progressivement avec l’accumulation de la fatigue. Une courbe qui atteindrait un
maximum et plafonnerait serait un signe d’inaptitude ou d’entraînement inadapté.
Lors des séances de galop à vitesse sensiblement moins élevée (400-450 m/min), la fréquence cardiaque oscille
entre 160 et 180 BPM. Les phases plus sollicitantes sont aisément identifiées, notamment les vallonnements. La
séance d’entraînement au cross se situe entre les deux. La fréquence cardiaque est alors un peu supérieure
suivant le train adopté, les sauts et la sollicitation du cavalier sur les obstacles. Les phases de récupération sont
encore bien identifiables pendant la séance.
Graphique 4. Comparaison entre les sollicitations d’un cheval lors d’une séance de galop, un entraînement en cross et deux
compétitions (niveau Elite : CCE1 à Saumur en début de saison et CCE2 à Pompadour)
Cette différence n’est qu’un des paramètres de l’entraînement à prendre en compte et ne veut pas dire que le
cheval 1 est meilleur du point de vue foncier que le cheval 2. Elle permet juste d’adapter l’intensité de la séance à
chaque cheval. Seuls les cas extrêmes - cheval qui ne monte pas sa fréquence cardiaque (droite FC/Vitesse
presque horizontale) ou cheval incapable de monter sa lactatémie - seraient à évaluer par un vétérinaire
spécialiste de médecine sportive pour envisager leurs réorientations.
Pour des temps au tour comparables, il est possible de gérer le travail différemment, soit en « gommant » les
montées (ralentissement dans les montées, accélérations dans les descentes) soit en accentuant les phases de
sollicitation (maintien de la vitesse ou légère accélération dans les montées, récupérations lentes dans les
descentes et les intervalles).
Graphique 7. Exemple de deux types de séance : séance 1 en réduisant les variations de la sollicitation et
séance 2 en les amplifiant, en forçant dans les montées
Dans la séance 1 (sollicitations amorties), la vitesse décroit dans la montée et la fréquence cardiaque monte
modérément, tandis que dans la séance 2 (sollicitations amplifiées), dès l’effet d’inertie passé, la fréquence
cardiaque monte fortement avec le maintien ou l’élévation, même légère, de la vitesse dans la montée. Cette
plus forte sollicitation a également pour conséquence d’augmenter la durée du retour à une fréquence cardiaque
de récupération et de réduire les temps faibles parce que la prochaine montée suivante est restée à la même
distance. On observe alors dans la séance 1, des durées de récupérations sensiblement identiques à celle des
répétitions, tandis que dans la séance 2, la durée des récupérations ne représente plus que la moitié de la durée
de l’effort précédent.
En conclusion, plus que la vitesse moyenne (temps au tour) ou la fréquence moyenne, il faut s’attacher à analyser
la durée et l’intensité des temps forts par rapport au temps plus faibles de récupération.
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[1]
: 1980 m, 30 m de dénivelés cumulés, avec de courtes pentes (315m à 3% ; 144m à 4,4% ; 190m de 9% à
4,7%)
Ces deux enregistrements (en sable profond 6x1 min et 4x1 min) ont été effectués dans un esprit différent. Dans
le premier, les phases dures sont en terrain profond et bien que la vitesse soit plus faible, le cheval accumule de
la fatigue : on observe des temps de récupération effectifs de plus en plus courts (20 à 45 sec) et une montée
progressive de la fréquence cardiaque au fur et à mesure des phases de récupération, au point que la dernière
est occultée. Dans la seconde séance, le cheval va moins dans le lourd pendant les phases dures et bien que la
vitesse soit plus élevée, la séance apparait moins dure avec une lactatémie plus basse ; les phases de
récupération sont complètes et la durée égale à celle attendue (1 min). L’entraîneur doit être conscient qu’un
travail de x répétitions de 1 min intense pour 1 min de récupération, peut, dans la réalité, compte tenu du temps
que mettra la fréquence cardiaque à redescendre, devenir 1min 30 pour moins d’une minute de récupération.
Dans notre application, une fréquence seuil (généralement 165 BPM) déclenche le début des phases « dures », et
le retour sous cette limite pendant plus de 10 secondes, le début de la phase de récupération.
Les indicateurs
Objectiver une séance est indispensable pour suivre un entraînement programmé. Les indicateurs « cardio »
permettront d’évaluer la charge de la séance (indicateur de charge) et de mettre en comparaison le
comportement du cheval (indicateur de réponse à l’effort et de récupération).
D’autre part, cette quantification, avec des valeurs numériques, permet de comparer les séances entre elles. Elle
contribue à aider à anticiper le sous-entraînement en positionnant la séance et son objectif dans une
programmation. Par contre, il est toujours préférable de limiter la comparaison à des séances d’un même cheval
pour que les réponses individuelles n’interfèrent pas.
Le suivi des indicateurs peut contribuer à se prémunir du surentraînement en détectant les signaux avant-coureur
d’une séance mal acceptée par le cheval. En sommant les quantités de travail, il est possible de se fixer une
limite par cycle ou par séquence. L’expérience permet de fixer des seuils maximaux que l’on considère comme
acceptables par son cheval.
Sur des séances individuelles, il y a peu d’intérêt et de pertinence à comparer des chevaux entre eux, car chaque
séance se doit d’être individualisée. La comparaison par rapport à une réponse moyenne ne peut servir qu’à faire
ressortir un cheval réellement inapte sur lequel il n’est pas utile d’investir.
Graphique 9. Indicateurs globaux de distance ou durée et vitesse et fréquence cardiaque moyenne et maximale
Plus précisément et si la piste le permet, l’entraîneur peut suivre la réponse du cheval par tour. Il peut alors
comparer à chaque passage la vitesse et la fréquence cardiaque moyenne, et éventuellement repérer une
évolution sur le dernier tour si le cheval fatigue. Dans l’exemple ci-contre, le cheval va moins vite au deuxième
tour (447 vs 428 m/min) avec une fréquence cardiaque égale voire supérieure (139 vs 145 BPM).
Graphique 10. Exemple d’un galop en deux tours où le cheval présente une fatigue au deuxième tour illustrée par une fréquence
cardiaque supérieure pour une vitesse plus faible
Un calcul détaillé par minute est surtout utilisé lors d’une séance de galop en continu ou lors d’un enregistrement
en compétition. Il est possible de visualiser une évolution de la vitesse de course au cours du cross et sa réponse
en fréquence cardiaque.
Graphique 11. Exemple d’un enregistrement sur un galop en continu où le cheval garde sa fréquence cardiaque constante alors
que sa vitesse diminue en deuxième moitié de parcours
Ces mesures qui restent « globales » montrent rapidement leurs limites lors de séances par intervalle car elles ne
peuvent refléter ce qui s’est réellement passé entre les répétitions (temps fort/temps faible).
Plus spécifiques, les indicateurs suivant s’intéressent au rapport entre les phases dures et les phases de
récupération. Le nombre de répétitions et leur intensité (vitesse et fréquence cardiaque), ainsi que l’intensité de
la récupération, sont des éléments très pertinents pour suivre le niveau de récupération suite à la demande à
l’effort. Le rapport entre les durées cumulées des récupérations sur le temps total de sollicitations permet
d’évaluer la réponse réelle du cheval lors de la récupération. Un rapport théorique de 1 (1 min de travail pour 1
min de récupération) peut devenir en réalité ½ (1’20 de travail pour 40 sec de récupération) transformant une
récupération presque complète en une récupération très partielle. La comparaison entre l’enchaînement des
répétitions, prévu et effectif, est très important pour analyser la réalité de la séance.
Graphique 13. Détermination du cumul des durées des phases dures et de récupération au cours des répétitions, ainsi que des
vitesses et des fréquences cardiaques moyennes pour chaque phase
Enfin, il est possible de s’attacher aux valeurs de vitesse et de fréquence cardiaque pour chaque répétition lors de
la phase intense et lors de la récupération intermédiaire. Il est possible de détecter à partir de quelle répétition le
cheval commence à accuser de la fatigue, illustrée par une élévation des valeurs moyennes de récupération ou
l’absence de réelle récupération entre deux phases intensives.
Graphique 14. Détermination des fréquences cardiaques et des vitesses moyennes pour chaque phase de répétition - en bleu
clair et vert clair les phases de récupération vs en couleur plus foncée les phases dures
Une séance de galop doit d’abord être calibrée (nombre de répétitions, nombre
de tours, durée et intensité des phases « dures » et des récupérations, stable au
seuil ou en variation d’intensité) en fonction d’un objectif correspondant au cycle
en cours, au sein de sa programmation de l’entraînement.
Un galop doit être enregistré au moins par un cardiofréquencemètre (de qualité)
disposant d’une fonction vitesse (GPS) et si possible de suivi du vallonnement.
L’analyse de l’enregistrement doit d’abord permettre de vérifier le respect du
format prévu au projet initial, puis à partir des indicateurs choisis :
• Par les durées cumulées dans les plages de fréquence cardiaque, de qualifier
la séance en intensité et en durée effective ;
• De pondérer la sollicitation globale, en évaluant les temps de récupération et
en estimant le niveau de sa complétude ;
• D’observer la réponse au cumul des efforts par l’existence de toutes les
phases de récupération et par l’évolution des fréquences cardiaques au cours des
phases de récupération ;
• D’évaluer la récupération après l’effort par un des indicateurs proposés.
L’écriture de ces données dans le cahier d’entraînement permet de suivre la
progression et le respect dans les cycles du rythme en pyramide (3 séances de
développement en progression + 1 séance de récupération) tel qu’il est décrit
dans la fiche Planifier l’entraînement du cheval.
Patrick GALLOUX IFCE - Phd, BEES 3 Équitation, ancien Écuyer du Cadre noir de Saumur, Inspecteur de la Jeunesse et des
Sports (HC)
Bibliographie
GALLOUX P. et BESSAT G., 2018. L’entraînement du couple cheval de sport / cavalier. Ifce, 252 pages.
GALLOUX P., 2011. Concours Complet d’Equitation. Belin, 234 pages.