été trahi. Mais le dieu des désastres n’avait guère de temps à consacrer aux regrets. Il était entouré de toutes parts par une pression écrasante de métal en fusion, de feu et de roche. La Bête déchaîna sa rage sur le tissu planaire, fit de l’air avec de la terre, transforma le feu en eau et se creusa un vaste antre dans la pierre. Rovagug finit par se créer un espace suffisant où il se sentit en sécurité et la faim se mit à le tenailler. Sans âmes à consumer, il dévora des montagnes cachées et les arrosa avec du magma et du fer en fusion. Il creusa la terre et, pendant un an, il grignota de nouveaux tunnels et de nouvelles cavernes dans les profondeurs. Et alors que les couloirs s’effondraient, il connut à nouveau la joie de la destruction. Pourtant, cela ne le rapprocha pas de sa vengeance. Il lui fallait plus d’yeux, plus de pattes, plus de griffes. Le dieu n’avait jamais envisagé de créer des rejetons mais cette solution s’imposait à présent. Il puisa dans l’essence des pierres et des bêtes les plus viles et ainsi naquirent ses enfants. À ces rejetons impies, il offrit des carapaces d’adamantium, des griffes capables de déchirer la terre et des corps qui rampaient et se tordaient. Il en envoya six, dans toutes les directions, et aucun ne revint. Il en envoya six autres, puis encore six autres, sachant qu’un jour, leurs tunnels atteindraient sûrement la surface ou un portail. Mais au fil du temps, il comprit qu’il ne pouvait pas en envoyer trop car chacun d’eux l’épuisait. Ainsi les rejetons de Rovagug se firent moins nombreux, même si la Bête les imprégna tous du besoin urgent de trouver un chemin pour sortir de sa prison. Certains parvinrent à atteindre le monde de la lumière et, ayant hérité de la sauvagerie de leur créateur, ils se mirent en devoir de tuer tous les vivants qu’ils trouvèrent. Mais aucune de ces monstruosités ne revint jamais dans les profondeurs car elles étaient aussi colériques que leur père et, dans leur abandon meurtrier, elles oublièrent que Rovagug cherchait à se libérer.