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Asperguide
Asperguide
Ce livre est dédié à tous les autistes Asperger et à tous ceux qui
désirent en savoir plus sur cette différence neurologique, que ce
soit par simple curiosité, par désir d’aider un proche ou
simplement parce qu’ils se sentent interpellés par cet état
neurologique qu’est le syndrome d’Asperger.
Aussi, pour mon grand garçon Loik qui m’épate tous les jours. Ta
différence représente mon espérance.
Ce livre sympathique introduit un dialogue et crée un rapprochement.
Tanya Izquierdo, une femme Asperger, parle aux autres Asperger et elle
parle aux neurotypiques. Elle est à l’aise avec l’un et l’autre groupe. Elle
leur parle en même temps et ensemble, dans la même langue. Son discours
émouvant construit le pont qui réunit deux rives. Sa voix porte, le message
retentit, vibrant car il tient du témoignage vécu et devient un ferment de
proximité humaine à son exemple.
Le livre n’est pas un ouvrage de science et il contient possiblement des
inexactitudes. Peu importe, l’énorme vérité que l’exposé sert, à savoir que
la condition Asperger se décline comme une forme vive et familière de
pensée et de sentiment, tient d’une valeur supérieure. Les inexactitudes ne
m’ont pas convaincu de refuser l’invitation à préfacer l’ouvrage, au
contraire j’y vois une contribution utile, une aide à mon travail d’éveil et de
confirmation, à mon travail d’accompagnement surtout, car il faut que les
Asperger nouvellement identifiés, nouvellement parvenus à l’étapeoasis de
leur quête identitaire, soient rassurés. Le but de l’auteure étant de réunir et
de convaincre, ce n’est pas tant d’instruire de façon savante. D’autres écrits
s’en chargent. Le but pour Tanya est de faire aimer une forme de vie tout
humaine, l’autisme de haut niveau, le profil Aspie, voisine d’une autre,
souvent inhumaine: le monde ordinaire. Ce livre rassure, il annonce de
bonnes nouvelles à des gens trop facilement éprouvés. L’ignorance est leur
pire ennemi.
Tanya a voulu présenter son travail comme un guide, un asperguide. J’y
vois un guide de survie, pour l’Asperger, opérant en neurotypie; j’y vois un
guide pour le neurotypique côtoyant un frère, une sœur Aspie. Même
famille, mais des ethnies multiples et finalement croisées, plurielles.
Les Asperger viennent d’une transformation de l’humanité. Ce qu’ils en
font dépend d’eux, de leurs talents, mais dépend aussi des autres, les
nontransformés par l’autisme résiduel que portent leurs frères. Les fruits de
leur transformation dépend de l’accueil qu’elle reçoit. Ces frères Aspies,
ces amis et proches, sont des géants aux pieds d’argile. Avec d’énormes
moyens. Je rêve, en période de lassitude, de lever une armée d’Asperger
pour aider l’humanité souffrante, l’humanité en difficulté. Et de m’en
remettre à leur leadership. Ils le peuvent. Ils le feront peut-être. Entre-
temps, je retiens ce mot sublime d’Antoine de Saint-Exupéry, des paroles
que me citait un homme d’affaires brillant, Asperger.
«La pierre n’a point d’espoir d’être autre chose que pierre. Mais de
collaborer, elle s’assemble et devient temple.»
Que le lecteur ne se méprenne point sur le sens de ces mots. Les
Asperger ont beaucoup de cœur. Ils ont l’émotion forte. Mais courte. Mais
dans un monde de chaos émotionnel, de foisonnement débridé et exacerbé,
ils se cherchent, pataugent. Le livre de Tanya apportera confiance à ceux
qui doutent, et apaisement à ceux qui souffrent.
— Tanya Izquierdo
À NOTER QUE…
Tout Asperger est autiste de haut niveau, mais tout autiste de haut
niveau n’est pas nécessairement Asperger.
SAVIEZ-VOUS QUE…?
Un fait très intéressant qui vient mettre en perspective l’autisme en
général est l’origine du mot autisme. Ce mot a été forgé par le
psychiatre suisse Eugen Bleuler à partir du terme grec soi-même.
Alors, comme le dit le dérivé du mot, il s’agit d’une condition où les
gens qui sont sur le spectre de l’autisme sont plus repliés sur eux-
mêmes, contrairement au neurotypique qui, lui, est généralement
beaucoup plus ouvert aux gens autour de lui dans sa vie de tous les
jours.
DÉFINITION
Quand on parle ici de handicap et de personne handicapée, il est
implicite que cela entend que la personne en question vit une difficulté
par rapport à certains aspects de sa vie. On peut être handicapé par
des bruits stridents, par exemple, ou être handicapé par les relations
sociales difficiles. Handicapé est seulement le terme qui désigne une
difficulté avec laquelle on vit et avec laquelle on doit apprendre à
vivre de façon non naturelle. Un neurotypique, par exemple, pourrait
être handicapé par une peur des abeilles. Il y a aussi plusieurs
niveaux d’intensité de handicap.
• Troubles de la communication
La façon de communiquer est très différente chez un autiste Asperger et
un neurotypique, et c’est en partie ce qui crée le «trouble». En fait, ce n’est
pas un trouble en soi, mais le problème apparaît quand on essaie de
communiquer avec une personne qui n’est pas comme nous. C’est un
trouble qui se manifeste lorsque nous additionnons une seconde variante
(un interlocuteur neurotypique). Si nous étions tous Asperger, il n’y aurait
aucun problème.
• Troubles de socialisation
Encore, la socialisation est un concept difficile à maîtriser pour un autiste
Asperger étant donné la différence sur le plan de la communication en
général. Tout comme les «troubles» de la communication, le problème
survient lorsque l’Asperger est en contact avec un ou des neurotypiques.
• Atteintes neurosensorielles
Chez les personnes Asperger, les sens sont souvent surdéveloppés. Il
arrive aussi que certains sens soient sous-développés (hyposensibilité).
Ceux ayant des sens surdéveloppés – ce qui est le cas de la majorité des
Asperger –, c’est-à-dire ceux ayant des hypersensibilités sensorielles au
son, à la lumière, à l’odorat ou au toucher, deviennent très vulnérables à une
surcharge sensorielle, ce qui vient systématiquement affecter la socialisation
et la communication.
SAVIEZ-VOUS QUE…?
Hans Asperger a effectué la majorité de ses travaux sur les enfants
autistes, pendant la Deuxième Guerre mondiale. Bien que ses
recherches sur l’autisme et le syndrome d’Asperger aient été très
positives, l’ambiance à cette époque, elle, était loin de l’être. Les nazis
avaient comme but ultime d’éliminer les «maillons faibles» de la
nature – et les autistes profonds faisaient partie de cette catégorie à
leurs yeux. Les autistes profonds présentant un handicap très visible et
incontestable, il était impossible de les dissimuler, et essayer de
convaincre les nazis de leur intérêt aurait certainement enlevé de la
crédibilité à Asperger. Il avait également à sa clinique plusieurs
enfants qu’il avait identifiés comme étant autistes Asperger. Pendant
ces mêmes années, il a fait des conférences et a milité pour tenter de
démontrer aux nazis que même s’ils étaient différents, ces enfants
autistes de haut niveau étaient une force de la nature et non une
faiblesse. Ceci dans le but ultime qu’ils ne soient pas euthanasiés.
Témoin de l’exécution de six médecins qui refusaient de collaborer
avec le gouvernement nazi, le Dr Asperger n’a eu d’autre choix que de
se conformer aux mesures extrêmes mises en place par les nazis,
malgré ses tentatives d’éviter que l’irréparable se produise. Pour lui,
refuser de remettre les enfants lourdement handicapés aux nazis pour
qu’ils se fassent euthanasier impliquait que non seulement il se ferait
exécuter, mais que TOUS les enfants de sa clinique seraient
potentiellement éliminés. Des preuves irréfutables ont récemment fait
surface (dans le livre In a Different Key-The Story of Autism écrit par
John Donvan et Caren Zucker), démontrant que Hans Asperger a
effectivement signé une entente avec les nazis et qu’il a dû faire le
terrible choix de remettre aux forces nazis des enfants, notamment les
plus lourdement handicapés, afin de pouvoir sauver des centaines
d’autres enfants de leurs griffes. Il est évident que lorsqu’une
personne se trouve dans une telle situation, quel que soit le choix qu’il
fera, des critiques fuseront de toutes parts. Ce qui me frappe chez le
docteur Asperger, c’est que cet homme qui militait pour faire
reconnaître la diversité neurologique a continué, sous le règne nazi, à
faire des conférences pour sensibiliser la population au fait que les
enfants autistes Asperger étaient un atout pour la société plutôt
qu’une nuisance, même si à cette époque tenir ce type de propos le
plaçait dans une position précaire tant pour la poursuite de ses
travaux que pour sa propre vie.
Par quoi le syndrome d’Asperger est-il causé?
Tout Asperger s’est déjà demandé s’il venait d’une autre planète.
Cependant, je n’aborderai pas le sujet ici étant donné le peu de preuves qui
expliquent cette possibilité, et étant aussi pleinement consciente que mes
rêves ne constituent pas des faits.
Il existe plusieurs théories sur la provenance de l’autisme. Parmi ces
théories, il semble demeurer que la source initiale serait l’hérédité.
Héréditaire
Depuis la fin des années 70, plusieurs études ont démontré une
corrélation flagrante entre l’autisme et l’hérédité. Nous ne savons pas
encore quels gènes sont à la base de ce transfert héréditaire, mais nous
savons que plus d’un gène en serait responsable. Les études les plus
fructueuses pour démystifier le syndrome d’Asperger sont celles menées
auprès de jumeaux monozygotes (jumeaux identiques, provenant de la
division d’un seul œuf fécondé) et dizygotes. La première étude à
démontrer une corrélation héréditaire fut celle de Susan Folstein et Michael
Rutter, en 1977. L’étude a été menée auprès de 11 jumeaux identiques et 10
jumeaux non identiques, dont au moins un était autiste. Bien que l’étude
soit d’ordre plutôt minimal, elle fut en mesure de générer le premier indice
sérieux que l’autisme pourrait être génétique. Depuis cette étude pionnière,
plus d’une douzaine d’études ont été menées sur des jumeaux et ont
confirmé cette observation innovatrice. Des études ont aussi révélé que les
gènes liés à l’autisme corrèlent fortement avec ceux liés au talent de
comprendre des systèmes complexes: les physiciens, mathématiciens et
ingénieurs, par exemple, ont une forte tendance à avoir un ratio élevé
d’autisme parmi leurs proches.
Cela dit, il y a effectivement une corrélation flagrante entre le syndrome
d’Asperger et les facteurs génétiques; cependant, le pattern génétique
régissant cette corrélation est toujours inconnu à ce jour.
SAVIEZ-VOUS QUE…?
Les études scientifiques sont bien entendu primordiales pour
comprendre les liens entre les facteurs génétiques régissant l’autisme.
Il n’empêche qu’un fait remarquable que l’on ne peut ignorer est que
plusieurs adultes commencent à se questionner sur une possibilité
d’autisme chez eux lorsqu’ils commencent à apercevoir des signes
d’autisme chez leurs enfants biologiques.
Biologique
Plusieurs facteurs et indices biologiques font l’objet d’études depuis
longtemps. Le développement du cerveau est en fait l’aspect biologique qui
intéresse le plus les scientifiques. Ces derniers essaient de trouver les
différences entre certaines régions du cerveau des personnes autistes et des
neurotypiques qui pourraient expliquer les comportements autistiques. Les
comportements complexes cognitifs, langagiers et sensoriels des autistes
rendent la tâche d’autant plus compliquée, car il devient difficile de pointer
une partie du cerveau spécifiquement. Il y a de plus en plus d’évidences
suggérant que le cerveau des personnes autistes, pendant les deux premières
années de vie, se développerait différemment de celui des neurotypiques. Il
existe une multitude d’études confirmant cette corrélation. Dont celle
effectuée par Heather Cody Hazlett, Ph. D., Michele D. Poe, Ph. D. et
Guido Gerig, Ph. D., qui se nomme Surcroissance précoce du cerveau chez
les autistes associée à l’augmentation de la surface corticale avant l’âge de
2 ans (Early Brain Overgrowth in Autism Associated with an Increase in
Cortical Surface Area Before Age 2). Ils ont observé un élargissement
généralisé du cortex cérébral avant l’âge de 2 ans chez les individus du
spectre de l’autisme, comparativement aux enfants neurotypiques.
Bien que ceci puisse expliquer biologiquement l’autisme, il demeure que
l’hérédité serait la source du développement atypique cérébral.
Environnemental
Pendant les dernières décennies, plusieurs études substantielles ont révélé
que certains facteurs de l’environnement peuvent contribuer à l’autisme.
Cependant, aucun facteur environnemental précis n’a encore confirmé cette
hypothèse. Une observation intéressante est que ce ne sont pas tous les
individus exposés aux facteurs environnementaux ciblés qui développeront
de l’autisme. Cela pourrait s’expliquer par le bagage génétique de deux
personnes qui ferait en sorte que leur corps répond différemment à un même
facteur environnemental. La personne qui naît autiste peut ainsi être plus
vulnérable que le neurotypique à certains facteurs environnementaux.
Psychologique
Durant les années 1960, il était de croyance populaire que l’autisme et le
syndrome d’Asperger, par association, étaient le résultat d’un
comportement maternel froid. La théorie de «la mère froide» a été décrite
en premier lieu par le psychanalyste autrichien Bruno Bettelheim, fidèle
disciple de Sigmund Freud. Entre autres, il avançait que les mères d’enfants
autistes étaient froides, distantes et qu’elles adoptaient un comportement de
rejet envers leurs petits, privant ainsi leurs bébés d’avoir la chance de
«s’attacher adéquatement». Vous pouvez imaginer la souffrance que les
mères d’enfants autistes de cette époque ont dû endurer à cause de cette
théorie extrêmement dévalorisante, et surtout fausse, qui voulait expliquer
l’autisme à une période où si peu d’études avaient été menées. Enfin, vers la
fin des années 1970, cette théorie ainsi que son souteneur furent discrédités
et l’attention fut réorientée vers les facteurs génétiques au lieu des facteurs
psychologiques, grâce à une étude menée par Susan Folstein et Michael
Rutter, en 1977, auprès de jumeaux. Grâce à leurs travaux sur le sujet,
l’autisme passa d’un trouble psychologique provoqué par des facteurs
environnementaux familiaux à l’enfance à un des troubles psychologiques
les plus héréditaires de l’époque (Infantile Autism: A Genetic Study of 21
Pairs).
RÉSUMÉ
Points à retenir
• Être autiste Asperger, c’est être un humain comme un autre,
simplement programmé différemment sur le plan neurologique.
• Les autistes Asperger sont avant tout des êtres humains régis par
une individualité indépendante du syndrome d’Asperger.
Gens célèbres
Albert Einstein et Sir Isaac Newton
Dans l’article nommé «Scientifiques singuliers», écrit par Ioan James de
l’université d’Oxford, l’auteur a évalué les traits de personnalité d’Albert
Einstein et d’Isaac Newton afin de voir s’ils présentaient les caractéristiques
clés du SA. Dans cet article, Ioan James affirme s’être entretenu avec
Simon Baron-Cohen, professeur de psychopathologie du développement
attaché à l’Université Cambridge, qui, lui aussi, semble convaincu quant à
la présence des caractéristiques du SA chez Einstein et Newton.
Dans cet article édifiant, voici, entre autres, ce que Ioan James déclare:
«Les personnes autistes éprouvent un profond sentiment d’être seules dans
le monde. Par exemple, l’enfance d’Isaac Newton a été décrite comme étant
solitaire et sans amour. Einstein aussi était un solitaire: “Je ne suis pas
beaucoup avec les gens”, a-t-il déclaré. Enfant, il était timide, solitaire et
retiré du monde. Un de ses biographes remarqua qu’il n’avait jamais
vraiment besoin de contacts humains. Il s’est délibérément libéré de plus en
plus de toute dépendance émotionnelle pour devenir entièrement
autosuffisant.» (Professor I. M. James de l’Institut mathématique de
Oxford, J R Soc. Med. 2003 Jan; 96(1): 36–39.)
Tanya Izquierdo
Je ne suis pas une célébrité… mais pour ma défense, je suis Asperger et
j’ai déjà rêvé que j’étais célèbre.
Daniel Tammet
Savant autiste Asperger et auteur de plusieurs livres de non-fiction,
Daniel Tammet a fait un passage à l’émission Tout le monde en parle en
2016. C’est la mémoire exceptionnelle de cet homme qui est à la base de sa
célébrité. Il possède le record mondial pour la récitation du nombre pi
(3,1416…) de mémoire et a été en mesure de réciter sur un laps de temps de
cinq heures 22 514 chiffres après la décimale du nombre 3 du fameux pi. Il
est sans doute un des savants autistiques les plus accomplis et connus de
notre époque.
Susan Boyle
Chanteuse écossaise qui est apparue le 11 avril 2009 au programme TV
Brittain’s got talent en chantant «I dreamed a dream» des Misérables, Susan
Boyle a vu naître son premier album en 2009; il est devenu un best-seller en
2009. C’est en 2012 que son diagnostic fut posé et elle en a fait part au
monde entier lors d’une entrevue à la chaîne BBC en décembre 2013. Les
analyses ont démontré qu’elle possédait une intelligence supérieure à la
moyenne et qu’elle était en effet bel et bien Asperger.
Satoshi Tajiri
Plusieurs ont confirmé que le fondateur de Pokémon, Satoshi Tajiri, est
Asperger. Bien que lui-même ne semble pas l’avoir confirmé, ses tendances
solitaires et ses comportements excentriques poussent plusieurs
psychologues à croire qu’il est Aspie. Jeune, il était obsédé par les insectes,
il les prenait en captivité et quand il a constaté qu’ils s’entretuaient une fois
en captivité, il a mis fin à ce loisir. Il était aussi tellement obsédé par les
jeux vidéo qu’il en séchait ses cours pour se consacrer à cette passion.
Bill Gates
Depuis un certain temps, ce pionnier des ordinateurs modernes est
soupçonné d’être autiste Asperger à cause de son manque de compétences
sociales, de sa difficulté à regarder les gens dans les yeux, de sa tendance à
se balancer en avant en arrière et de son obsession des technologies.
D’ailleurs lors de son apparition en cour en 1998 pour le dossier «Microsoft
Antitrust Lawsuit», nous pouvons observer Bill Gates se balancer de façon
évidente. Selon moi, ce comportement agissait comme un mécanisme pour
contrer son anxiété dans un moment où il se trouvait dans une position
extrêmement précaire quant à l’avenir de son empire.
Dr Sheldon Cooper
Le Dr Sheldon Cooper, dans The Big Bang Theory, joue le rôle d’un
génie scientifique qui fait de la recherche dans une université en tant
qu’astrophysicien théorique. Bien que son personnage soit très caricatural,
il illustre très bien certains aspects des personnes Asperger. Je dis bien
certains aspects. Sheldon Cooper est très maladroit socialement, a tendance
à devenir obsessif et à focaliser sur les détails. Il adopte un comportement
très rigide quant à son besoin de routine. Évidemment, les producteurs de
l’émission soutiennent que le Dr Cooper n’est pas Asperger, mais l’acteur
lui-même, Jim Parsons, mentionne dans plusieurs entrevues que, oui,
beaucoup de caractéristiques de son personnage sont en effet autistiques.
Que le Dr Sheldon Cooper soit devenu un personnage si louangé partout
dans le monde et qu’il soit reconnu comme présentant plusieurs traits des
autistes Asperger, voilà qui contribue à sensibiliser à l’autisme et qui peut
aider les gens Asperger à se reconnaître et ainsi à se sentir moins seuls.
Cela dit, il est évident qu’il s’agit d’un personnage fictif qui ne représente
pas de façon réaliste l’autiste Asperger. Premièrement, le fait que le Dr
Cooper possède un QI de 187 est évoqué pour donner du punch à
l’émission. Sans oublier qu’il possède une mémoire eidétique – il est
capable de mémoriser tout ce qu’il voit –, ce qui est extrêmement rare.
Ainsi, il faut savoir faire la part des choses.
Les caractéristiques autistiques qui, selon moi, sont relativement bien
représentées sont le besoin de routine, la systématisation et la difficulté à
faire des câlins et à se laisser toucher et aussi à gérer la proximité corporelle
avec ses amis et même sa copine. Une chose qui selon moi ne cadre pas est
l’aspect social de sa vie: le Dr Cooper est constamment entouré de ses amis,
on le voit rarement seul, ce qui va à l’encontre du besoin de solitude des
personnes Asperger.
Rain Man
Dans ce long-métrage qui fût le premier à aborder le thème de l’autisme,
Dustin Hoffman incarne un savant autistique. Rain Man, cependant, nous
livre une image extrêmement caricaturale de l’autisme et ne représente pas
la grande majorité des personnes autistes. Selon moi, Rain Man est aux
autistes ce que Marilyn Monroe est aux femmes et ce qu’Elvis Presley est
aux hommes. Je ne crois pas avoir besoin d’expliquer ces comparaisons…
Dr House
Dr House est un médecin spécialiste qui cherche un réconfort dans sa
discipline, la médecine. Il a peu d’intérêts pour les émotions des gens et il
présente une grande persistance à la systématisation. Dr House évite les
relations sociales et n’a pas peur de blesser les gens en citant des faits
observables. Cette tendance à dire la vérité en étalant des observations
logiques, sans se soucier de la réaction des gens, corrèle effectivement avec
le syndrome d’Asperger. Encore un personnage caricatural, mais qui peut
rappeler l’autisme Asperger, entre autres, à cause de sa persistance à la
systématisation, sa tendance à dire la vérité, son obsession marquée pour sa
profession et sa rigidité quant à ses valeurs et opinions.
Juliet Madyson
Juliet Madyson est le personnage principal du roman Les confessions de
Juliet Madyson, qui est en fait le roman que j’ai écrit en 2015 en
m’inspirant de mes traits Asperger et de ma personnalité atypique. Parfois
caricatural, certes, mais aussi grandement réaliste en ce qui a trait au tronc
commun des personnes autistes Asperger. En voici des exemples:
RÉSUMÉ
Points à retenir
• Il faut demeurer vigilant lorsque nous regardons des personnages
fictifs à la télévision; il faut savoir faire la part des choses pour ne
pas créer de confusion quant aux réelles caractéristiques des
personnes Asperger.
Les autistes Asperger ont un tronc commun qui représente leur différence
par rapport aux neurotypiques. Ce tronc commun est défini par plusieurs
caractéristiques. Chaque autiste Asperger étant différent, ces
caractéristiques, bien que présentes, peuvent se manifester de façon
différente selon l’intensité et, simplement, la forme.
Par exemple:
Personne 1: 5 + 45,37265 = 50,37265
Personne 2: 5 + 64,94593 = 69,94593
Le résultat ne sera jamais identique.
Troubles sensoriels
L’hypersensibilité sensorielle
Le filtre du cerveau des gens neurotypiques est représenté par une porte-
fenêtre en verre; les autistes Asperger, eux, n’ont qu’une moustiquaire pour
filtrer les stimuli de l’environnement.
— Tanya Izquierdo
Beaucoup d’autistes Asperger voyagent dans la vie sans filtre sensoriel.
Ils entendent tout, voient tout, ressentent tout, sentent tout, et ce, à
l’extrême. Les sens peuvent être surdéveloppés de façon variée d’un
Asperger à l’autre. Certains peuvent être handicapés par les odeurs, le bruit
ou la lumière, tandis que d’autres peuvent l’être par le toucher. Cette
hypersensibilité sensorielle devient un réel handicap et une surcharge
sensorielle envahit rapidement la personne Asperger. Socialement, cela
représente un vrai défi, puisque plus il y a de stimuli autour, moins on arrive
à les gérer et à en faire abstraction. Il devient alors plus difficile de
socialiser, de communiquer, de se concentrer et même simplement… d’être.
Pendant que les parents applaudissent, les enfants sont tout fiers lors de leur spectacle de
finissants. Remarquez le petit à droite, les mains sur les oreilles. Petit Aspie de 5 ans (Loik), il
est agressé par les applaudissements et les cris et il se bouche les oreilles parce que le bruit lui
fait mal.
Les émotions
Nous, Asperger, avons une palette d’émotions beaucoup plus étroite que
celle des neurpotypiques, qui ont une grande quantité de nuances quant aux
émotions qu’ils vivent couramment. C’est comme les couleurs. Des nuances
de couleurs, il y en a des milliers, mais il n’y a que trois couleurs primaires.
Magenta, cyan et jaune. Pour nous, il en est ainsi des émotions. Ce n’est pas
que nous n’en avons pas, c’est simplement que la gamme d’émotions est
plus restreinte et que nous les vivons différemment. Ce n’est pas non plus
parce que nous ne reconnaissons pas les émotions que nous ne les vivons
pas. Je crois fermement que les neurotypiques non plus ne sont pas aptes à
reconnaître toutes les nuances d’émotions qu’ils ressentent. Quand on passe
sa vie à penser rationnellement et à systématiser, on est beaucoup moins
enclins à développer une variété d’émotions et, pour cette raison, il devient
un défi que de reconnaître et d’apprivoiser nos émotions. En ce qui me
concerne, il est rare que je sois très joyeuse ou que j’aie un gros sourire
simplement parce que je suis heureuse. Soit je suis très heureuse
momentanément puisque, par exemple, je viens d’apprendre une bonne
nouvelle ou, inversement, je suis très triste ou très en colère pour une raison
spécifique à un moment spécifique. Il faut comprendre que ce n’est pas
signe que nous ne sommes pas des êtres heureux, mais simplement que
notre ressenti par rapport aux émotions est différent. Pour nous, la
rationalité prend souvent le dessus, notre tête est quasiment toujours en
contrôle. Nous avons la capacité de ressentir, sauf que nous ressentons
différemment. Par exemple, quand quelqu’un me demande «ça va?» et que
je réponds «bah… oui…», ça ne veut pas dire que «ça pourrait aller mieux»
ou que «je me sens ordinaire». Non, ça veut juste dire que ça va, et je suis
bien ainsi, je n’ai pas besoin de plus pour être heureuse, comme on dit. La
définition du bonheur m’apparaît très irrationnelle. Pour moi, être heureux,
tel que je le perçois dans ma vie et la façon dont moi j’aspire à être
heureuse, c’est tout bonnement d’être bien, épanouie et libre. Ça ne signifie
pas de sauter de joie constamment et de sourire chaque fois que je croise
quelqu’un. La notion d’être heureux telle qu’elle est perçue et définie dans
notre société est, selon moi, illusoire et superficielle. D’ailleurs, je suis
d’avis que ceux qui sourient le plus sont les plus malheureux.
L’hypersensibilité émotionnelle
Nous, Asperger, n’avons souvent, comme mentionné précédemment, pas
de filtre pour les aspects sensoriels et il en est souvent de même pour les
émotions. Cependant, il y a une nuance entre ressentir une émotion et la
reconnaître. Je crois que plusieurs Asperger sont vulnérables aux émotions
et que, pour cette raison, ils tentent de les éviter, puisqu’ils ont peut-être une
capacité plus grande à ressentir de fortes émotions. C’est mon cas. En
regardant quelqu’un dans les yeux, nous ressentons l’émotion de l’autre,
mais souvent il s’agit d’une émotion que nous ne comprenons pas. Notre
cerveau capte l’émotion de l’autre à cent milles à l’heure, mais notre
cerveau n’étant pas nécessairement familier avec l’émotion en question,
nous avons du mal à en comprendre le sens et à l’assimiler. Ce qui fait peur
et devient envahissant socialement. C’est quelque chose de très intime pour
moi que de regarder dans les yeux, autant que de toucher quelqu’un.
Parallèlement, certaines situations qui peuvent sembler banales pour un
neurotypique nous affectent beaucoup plus émotionnellement. Par exemple,
les injustices dans ce monde nous perturbent à un point assez
extraordinaire. Enfants, nous avons été étiquetés comme dramatiques et
nous le sommes parfois encore à l’âge adulte. Cependant, dire que nous
sommes dramatiques nous porte préjudice. Ces émotions fortes, nous les
ressentons réellement, nous les vivons et il y a une raison derrière chaque
émotion. Certaines situations nous frappent à 100 km/h, tandis que pour
d’autres, ça les frappe à 10 km/h. Moi, par exemple, j’évite de lire les
journaux et d’écouter les nouvelles, puisque lorsque j’y vois une injustice
(que ce soit de la violence mentale ou physique faite aux humains ou même
aux animaux), cela me perturbe pendant des jours, jusqu’à en faire des
cauchemars. Les neurotypiques peuvent en être affectés, mais pas au point
de les perturber et d’hypothéquer leur qualité de vie. Il y a toujours cette
nuance d’intensité qui définit la normalité versus la marginalité, c’est-à-dire
l’Asperger comparé au neurotypique.
Décalage émotionnel
Il y a souvent un décalage sur le plan émotionnel chez les personnes
Asperger. Étant donné que nous ne vivons pas une grande variété
d’émotions dans la vie de tous les jours, il est difficile d’apprendre à les
gérer. Quand on ressent une émotion, c’est souvent à l’extrême, puisque ce
qu’il y a entre les extrémités pour nous, ce n’est que se sentir normal, ni
plus ni moins. Quand nous ressentons une émotion, elle est souvent
extrême, alors comme nous ne gérons pas nos émotions autant qu’un
neurotypique (qui le fait une centaine de fois par jour), il nous faut plus
d’efforts et de temps pour apprendre à le faire. Cela dit, je réitère que les
Asperger sont tous des individus à part entière et ceux qui font beaucoup
d’introspection, comme moi-même, sont en mesure d’apprendre à mieux
gérer et repérer les émotions, et ainsi nous en sommes moins handicapés.
Socialisation
Quand on est Asperger, on a tendance à dire… la vérité. Pour nous, elle
n’est jamais mauvaise à dire. Alors, on peut vexer les gens sans le vouloir et
ça devient angoissant de socialiser, en partie à cause de cela. Évidemment,
il faut faire la nuance entre dire des choses pour blesser, porter des
jugements et simplement dire des choses que l’on l’observe. On peut aussi
poser des questions embarrassantes, un peu comme un enfant le ferait, sans
réaliser que c’est inapproprié selon les codes sociétaux, puisque pour nous
ces règles ne sont pas les mêmes que pour les neurotypiques. Mais les
Aspies n’ont pas de mauvaises intentions, loin de là, alors ça devient
perturbant pour nous de constater que nous pouvons offusquer des gens
sans vraiment comprendre pourquoi. Ainsi, il arrive que des Asperger
évitent les situations sociales justement parce que leurs valeurs et leurs
perceptions leur apparaissent trop divergentes de celles établies par la
société.
– Albert Einstein
Ce qui me rend le plus perplexe est que, pourtant, ces choses que les
Aspies disent sont preuve de leur intégrité. En fait, ce que j’observe, c’est
que le problème réside dans la perception de la personne qui se sent vexée
par un propos. Souvent, les gens entendent ce qu’ils veulent au lieu
d’entendre ce que l’on dit réellement. Pour nous, c’est perturbant de
constater à quel point, pour vivre en société, il faut apprendre à mentir et à
cacher la vérité même quand cette vérité explique la réalité.
Oui, c’est vrai, nous posons beaucoup de questions. Que ce soit en réponse
à un commentaire, à une blague, à une directive ou même… à une question!
Pourquoi? Pour plusieurs raisons. Mais il est important de mentionner que
nous nous posons des questions encore plus que nous en posons aux autres.
Premièrement, les autistes Asperger sont des personnes insécures et
anxieuses dans ce monde imprévisible et, pour ma part, on dirait que plus
j’en sais, mieux je me sens, plus je me sens en contrôle et plus mon niveau
d’anxiété diminue. Par exemple, un rendez-vous chez le médecin peut être
assez pénible pour le docteur – il sera bombardé de questions! – et ce sera
pire pour le commis au rayon électronique chez Best Buy.
Tout semble ambigu à nos oreilles étant donné qu’il y a tellement de sens
possibles à tous les mots, à tous les ensembles de mots. Pour que les choses
aient du sens, je dois tout savoir, tout comprendre, sinon il m’est impossible
de réellement analyser ce que l’on me dit. Nous avons des fixations sur les
détails, et chaque mot, chaque virgule est analysé, alors lorsque nous
écoutons quelqu’un, nous avons du mal à entendre la phrase entière; elle est
plutôt entendue de façon décousue, un mot à la fois, une virgule à la fois et
pour chacun de ces aspects, il y a plusieurs avenues possibles. Nous avons
peur de la généralisation d’un concept, car ça nous laisse croire que l’on
pourrait manquer un détail important.
De plus, il semble que la phase de questionnement que chacun traverse
étant enfant n’ait pas de cesse chez les Asperger. En fait, notre soif de
savoir s’amplifie au lieu de s’atténuer. Chaque question que nous posons,
nous la posons parce que nous voulons réellement savoir. Nous avons
besoin de savoir, même si ça peut sembler inutile de poser telle ou telle
question aux yeux des neurotypiques. Pour nous, chaque détail est
important. Quand je parle aux gens, souvent ils ne comprennent pas
l’importance de connaître tous ces détails… Mais pour moi, c’est normal!
Je dois connaître chaque variable de l’équation afin de bien l’assimiler. Il
est intolérable pour moi de me faire lancer une information sans qu’elle
s’accroche à d’autres concepts dans mon cerveau. Un peu comme un casse-
tête, je dois être en mesure de caser le morceau à sa place pour me sentir à
l’aise avec l’information que je viens de recevoir.
ANALOGIE
Notre façon de traiter l’information reçue est comparable à la façon
dont on traite des équations algébriques. C’est-à-dire que si
l’information représente une variable A faisant partie de l’équation A
+ AB + C = X, eh bien, nous devons savoir ce que représentent les
variables B et C afin d’arriver à la conclusion qui est X. Nous ne
pouvons pas nous contenter de connaître la réponse X et une seule
variable, à moins que nous soyons en mesure de procéder par
déduction grâce à un nombre suffisant de variables connues.
MISE EN SITUATION
Par exemple, si je parle à une connaissance et qu’elle me dit que son
oncle est décédé, je lui demanderai: «As-tu pleuré?» Pourquoi je pose
cette question? Parce que cette information démontre le genre de
relation qu’elle avait avec son oncle, ça démontre comment elle se sent
par rapport à sa mort, ça démontre aussi comment moi je dois réagir
considérant le niveau de peine qu’elle ressent. Si je ne connais pas ces
détails importants, je suis laissée au dépourvu. Comment est-ce
possible de bien réagir si je ne connais pas sa relation avec son oncle
décédé? Impossible. Simplement impossible.
La fameuse routine
La routine, pour les personnes Asperger, agit comme mécanisme contre
l’anxiété. L’autiste ressent un réconfort dans sa routine et c’est ce qui lui
permet de demeurer sain d’esprit. Elle lui permet de se sentir en contrôle
dans un monde qui lui est imprévisible. Pas surprenant que nous ayons
beaucoup de difficulté à gérer les changements de plans de dernière minute.
La routine est pour nous ce que la «doudou» est à un enfant en bas âge.
Alors, changer les plans serait comparable à arracher la doudou des bras
d’un enfant qui est sur le point de s’endormir.
Cette routine est nécessaire pour la personne autiste Asperger: c’est ce
qui crée un équilibre chez elle.
Les stéréotypies
Comme pour le besoin de routine des autistes Asperger, les stéréotypies
agissent comme mécanismes pour contrer l’anxiété. Ces mouvements
répétitifs (ex. taper des mains ensemble) qui peuvent se manifester
différemment d’un autiste à un autre, viennent l’aider à se recentrer, à
équilibrer son être en contrant l’angoisse. Ces mouvements ont donc un
effet calmant sur sa personne. Ce phénomène est comparable à une
personne qui fait de la méditation. Seulement l’autiste, lui, le fait
couramment et sporadiquement étant donné l’anxiété qu’il vit sans arrêt
dans sa vie de tous les jours. Il est tout à fait normal que les mécanismes
pour contrer l’anxiété chez une personne soient présents de façon
proportionnelle à la quantité d’anxiété qu’elle vit.
RÉSUMÉ
Points à retenir
• Bien que l’on partage tous un tronc commun, une individualité nous
est aussi propre, et chaque autiste Asperger représente une forme
d’autisme différente.
Croire que l’autiste Asperger n’a pas d’empathie, c’est être illusionné par
le fonctionnement complexe des autistes Asperger, c’est être mystifié par la
véridique définition de l’empathie et de toutes ses composantes.
— Tanya Izquierdo
– Tanya Izquierdo
Ce mythe est l’un des plus courants à notre égard. Je peux comprendre
puisque la notion d’empathie, pour plusieurs, est beaucoup plus complexe
qu’il n’y paraît de prime abord. Je vais décortiquer le concept de l’empathie
chez les autistes Asperger afin d’y voir plus clair et de démontrer pourquoi
il s’agit effectivement d’un mythe.
Il y a l’empathie telle qu’elle est définie par la croyance populaire et la
définition plus intégrale de l’empathie.
Définition courante: avoir des sentiments, sentir de la peine pour les
autres, se mettre à leur place et les faire se sentir mieux…
Réponse:
— Eh bien, moi… euh… J’ai rencontré une femme un moment donné et
elle avait de beaucoup plus gros seins que toi. Es-tu certaine d’être une
femme?
Commentaire:
— Mais tu sembles si normale!
Réponse:
— Euh… Oui, oui, en effet, j’ai deux yeux, une bouche; je sais parler,
écrire, manger et me laver. Je sais même faire des blagues et je pense la
même chose que toi de Donald Trump.
Commentaire:
— Alors, t’es comme Rain Man!?
Réponse:
— Euh… Non… non, je ne suis pas comme Rain Man…
Commentaire:
—Ah, de nos jours, on dirait que tout le monde veut une étiquette!
Réponse:
— Si ce que tu dis est pertinent dans le contexte actuel et que tu me
mentionnes que tu es une femme, alors je peux te répondre et tu seras
d’accord avec moi: tout le monde semble vouloir une étiquette de nos jours!
Pourquoi veux-tu absolument te catégoriser?
Commentaire:
— Mais serions-nous tous… euh… un peu autistes?
Réponse:
(Ce commentaire me fait littéralement mal au lobe pariétal.)
— NON… non… non, mais NON! Si ton raisonnement est bon, alors les
hommes ont des yeux et des oreilles et du poil sur les jambes, alors moi
aussi j’ai des yeux et des oreilles et j’ai même du poil sur les jambes! Alors,
euh… ben, je suis peut-être un peu un homme?
Commentaire:
— Mais voyons, t’as qu’à essayer de bloquer les bruits au lieu de les
écouter, bah moi non plus, tu vois, je n’aime pas le bruit…
Réponse:
— Moi, j’ai mal dans le dos de temps en temps, mais je n’ai pas des
maux de dos chroniques comme certaines personnes. Ce que tu viens de
dire est l’équivalent de moi qui dirais à une personne qui a des maux de dos
chroniques: «Mais voyons, moi aussi, j’ai mal au dos; il faut juste essayer
de ne pas y penser et de penser au côté positif de la vie!» C’est
incomparable et établir des relations aussi impertinentes, ça banalise
extrêmement la souffrance de la personne autiste qui est intolérante aux
bruits.
Commentaire:
—Arrête de faire des montagnes avec de la poussière, tu te prends la tête
pour rien!
Réponse:
— Tout est une question de perception. À tes yeux, cette montagne
représente un rien, mais à mes yeux, ce rien représente une montagne. Je ne
te dirai jamais: «Arrête de ne faire rien d’une montagne.»
Pour terminer la section des mythes et commentaires (que je ne dirai pas
stupides), j’aimerais souligner l’importance de se rappeler à quel point
l’autisme peut varier d’un autiste à un autre. Rappeler qu’il peut toujours y
avoir des exceptions à la règle et que pour justement tenter de radier ces
mythes et d’éviter que de nouveaux ne soient créés, il faut comprendre que
bien que nous ayons tous un tronc commun, comme on l’a vu au premier
chapitre, la forme de l’autisme telle qu’on la perçoit chez les Asperger peut
varier énormément d’une personne à une autre. C’est du cas par cas.
RÉSUMÉ
Points à retenir
• Il ne faut pas croire tout ce qu’on entend ni tout ce qu’on lit sur le
syndrome d’Asperger.
DÉFINITION DE
LA NORMALITÉ
La normalité est une question de perception. Ne pas être normal n’est
pas du tout négatif à la base. Tout ce que cela indique est que quelque
chose sort de la norme. Par exemple, le talent de Roger Federer ou de
tous ceux qui se trouvent au haut du classement international au
tennis constituent des talents hors-normes. Seule la perception qu’ont
les gens d’une caractéristique anormale peut la rendre négative. Le
problème à la base n’est jamais que quelque chose ou quelqu’un n’est
pas normal. La nuance entre la perception de la normalité et la
définition de la normalité est très importante ici.
RÉSUMÉ
Points à retenir
• Le syndrome d’Asperger se manifeste différemment d’une personne
à l’autre et parfois il est invisible de l’extérieur.
• Ce n’est pas parce que le syndrome d’Asperger est invisible chez
une personne qu’il est moins important ou souffrant que chez une
autre qui manifeste plus de caractéristiques aux yeux des
neurotypiques.
15. Vous ne vous êtes jamais vraiment vue comme une «femme»; vous
vous voyez comme une personne, mais ne vous associez pas
nécessairement à la féminité en ce qui à trait à vos processus
cognitifs.
16. Vous avez tendance à mieux vous entendre avec les hommes, c’est
plus simple.
17. Tout est compliqué à vos yeux, même la plus simple des blagues ou
le plus simple des commentaires ou questions.
18. Vous éprouvez un grand besoin de justice, que ce soit envers vous-
même, votre voisine ou le lapin de compagnie du frère de votre
enseignante.
19. Vous avez une soif incommensurable de savoir dès qu’un sujet vous
passionne.
20. Les câlins et la bise sont vos pires ennemis. Si vos parents vous
avaient annoncé que vous déménagiez aux Pays-Bas, là où la norme
est trois bisous sur les joues, vous auriez certainement fugué.
21. Vous avez des phobies.
22. Les choses ambiguës vous rendent fou et, en plus, presque tout l’est,
à vos yeux.
23. Quand on vous interrompt pendant que vous accomplissez une tâche
ou que vous parlez, cela vous irrite au plus haut point.
24. Vous êtes brillant (pas dans le sens de brillance lumineuse).
25. Vous avez la capacité de tomber amoureux aussi rapidement que vous
perdez tout intérêt pour la relation.
26. Vous avez été victime d’intimidation ou l’êtes encore.
27. Vous vous êtes toujours senti «pas à votre place», même parmi un
groupe d’amis.
28. Socialiser est toujours demandant, c’est rarement naturel pour vous.
29. Vous avez appris à socialiser et à communiquer adéquatement grâce à
des lectures, à l’imitation et à l’observation depuis l’enfance.
30. Vous préférez être seul la majorité du temps.
31. Après un long moment de socialisation, vous avez besoin d’un
certain temps pour vous en remettre, pour reprendre le dessus.
32. Vous avez peu d’amis, souvent par choix.
33. Quand vous vivez des émotions intenses, vous avez besoin d’être seul
et surtout que personne ne vous touche, car vous êtes déjà en
surcharge et tout stimulus vient aggraver votre état.
34. Vous avez des fixations sur des détails.
35. On vous dit que vous êtes condescendant ou que vous parlez aux
gens comme à des idiots.
36. On vous accuse de dramatiser depuis que vous êtes tout jeune.
37. Vous avez besoin de conversations profondes et pointilleuses, et vous
êtes incapable de faire du small-talk.
38. Vous posez des questions pouvant gêner l’interlocuteur.
39. On vous reproche d’être trop direct.
40. Enfant, vous vous habilliez comme un tom boy avec des vêtements
lousses puisque c’est ce qui était le plus confortable.
41. Vous avez du mal à porter certaines textures sur votre corps (la laine,
le jeans, etc.).
42. Vous n’avez qu’un nombre restreint de chandails, pantalons, culottes
que vous portez en boucle.
43. Vous peinez à vous adapter à des changements de plans de dernière
minute; ces derniers vous bouleversent totalement.
44. Vous avez beaucoup de mal à gérer les changements dans votre
routine (ex.: nouveau boulot, nouvel horaire d’école).
45. Il est très difficile pour vous de communiquer de vive voix par
moments. Vous avez des trous de mémoire, vous bégayez et
l’angoisse prend le dessus. Vos pensées semblent désorganisées et
trop compliquées à exprimer.
46. Les travaux d’équipes et exposés oraux à l’école ont toujours été
extrêmement difficiles pour vous.
47. On vous dit que vous êtes intense, probablement quand vous parlez
de ce qui vous passionne ou faites ce qui vous passionne.
48. Vous avez du mal à accepter et à comprendre que les gens puissent
agir méchamment ou injustement.
49. Votre cerveau n’a pas de filtre, vous ressentez tout, entendez tout,
voyez tout, ce qui vous mène rapidement à une surcharge sensorielle
lorsque vous n’êtes pas seul.
50. Vous détestez les cadeaux, votre fête, etc. L’effet surprise n’est pas
fait pour vous.
51. Vous détestez les événements comme Noël, les anniversaires et la
Saint-Valentin; vous sentez que ces tendances sont superficielles et
vous ne comprenez pas l’excitation des autres face à ces lubies
sociales.
52. Peu importe vos responsabilités (enfants, famille, boulot, etc.), vous
ne vous sentez pas comme un adulte. Vous êtes juste vous et cette
étiquette qui est censée représenter un état d’âme ou d’esprit vous
rend mal à l’aise, puisque vous constatez que vous n’êtes pas comme
un adulte typique.
53. Votre enfant est autiste Asperger ou présente des signes d’autisme, de
même pour vos parents.
54. Vous réagissez parfois comme un enfant lorsque vous êtes envahi par
une émotion intense.
55. Vous avez des manies qui agissent comme des mécanismes de
défense pour contrer l’angoisse (ronger vos ongles, taper des mains,
etc.).
56. Plus jeune, vous étiez extrêmement naïf: vous ne compreniez pas que
les gens pouvaient agir méchamment et injustement, ce qui a pu
contribuer au fait que vous étiez une cible pour les intimidateurs.
57. Vous avez une mémoire phénoménale pour tout ce qui vous intéresse,
que ce soit une conversation que vous avez eue, un événement que
vous avez vécu ou simplement des informations (paroles de
chansons, numéros de téléphone, dates de fête, etc.).
58. Pour vous, l’intégrité est non négociable.
59. Vous avez du mal à discuter avec quelqu’un qui parle sans connaître
son sujet, cela vous irrite.
60. Plus jeune, vous changiez de boulot comme vous changiez de paire
de bas l’hiver. Il n’est pas rare pour un Asperger d’avoir déjà eu une
trentaine d’emplois différents à l’âge de 25 ans, et pas parce qu’il se
fait mettre à la porte.
RÉSUMÉ
Points à retenir
• Cocher une liste de caractéristiques ne garantit rien quant au
diagnostic du SA, mais vous aidera sans doute à voir s’il vaut la
peine d’aller plus loin dans votre quête sur le SA si vous croyez en
présenter les caractéristiques.
Analogie
L’évolution du syndrome d’Asperger peut être comparée à l’évolution de
la femme. Un bébé fille est destiné à être de sexe féminin, cependant le
bébé ne devient une femme qu’à l’âge de la puberté vers 11 ans. Le
développement de sa féminité est dit évolutif. Lorsqu’un bébé fille vient au
monde, elle ressemble à peine à une fille et plus le temps avance, plus son
visage prend les traits d’une fillette jusqu’à ce qu’elle devienne une femme.
Pour le syndrome d’Asperger, c’est semblable. Le bébé naît autiste
Asperger, mais ce n’est qu’à l’âge où le contexte de la socialisation et de la
communication est plus présent dans la réalité de l’enfant que nous
commencerons vraiment à observer les signes du syndrome d’Asperger.
Plus l’aspect social prendra de la place dans la vie de l’enfant, plus les
signes seront apparents. Par exemple, un enfant de 4 ans qui va se faire
diagnostiquer pourrait à ce moment précis se retrouver dans une zone
mitoyenne entre l’autisme et le profil Asperger étant donné qu’il n’est pas
tout à fait rendu à la fin du processus d’apparition du syndrome d’Asperger.
Inévitablement, l’enfant y arrivera.
La rapidité de ce processus d’évolution dépend de plusieurs facteurs, des
facteurs parfois contrôlables.
1. Regard fuyant.
2. Retard de langage ou langage très développé pour son âge.
3. Hypersensibilités sensorielles/hyposensibilités sensorielles.
4. Conversations unilatérales.
5. Si absorbé par ses activités qu’il semble parfois avoir des problèmes
d’audition.
6. Mémoire phénoménale pour ce qui le passionne, pour les faits et les
événements.
7. Grand besoin de routine.
8. Insécurité dans les nouvelles situations, mais capable de s’adapter avec
le temps.
9. Difficulté à comprendre les codes sociaux, par exemple comment
approcher un enfant pour jouer avec lui.
10. Parle de ses sujets favoris tel un petit professeur.
11. Se bouche les oreilles quand il y a beaucoup de bruit.
12. Capable de se concentrer de longs moments sur ce qui le passionne.
13. Il est brillant.
14. Semble parfois dans la lune ou dans «sa bulle» – ils ont tout un monde
intérieur.
15. Crée des liens complexes entre les concepts qu’il connaît et les
nouvelles informations qu’il reçoit.
16. N’a pas une grande variété d’expressions faciales: soit il est normal, très
fâché, très content ou très triste.
17. Motricité globale maladroite.
18. Aime que tout soit à sa place, surtout dans son environnement personnel
(sa chambre).
19. A tendance à avoir des fixations sur certaines parties d’objets, par
exemple les roues de ses petites autos.
MISE EN SITUATION
Loik était passionné et fasciné par les turbines d’avions, il
voulait tout savoir à propos de leur fonctionnement. À 4 ans, il
regardait des vidéos conçues pour les adultes sur leur
fonctionnement.
RÉSUMÉ
Points à retenir
• Le syndrome d’Asperger chez les enfants est évolutif, ce qui veut
dire que bien qu’un enfant naisse autiste Asperger, l’intégralité des
caractéristiques du SA n’apparaîtra que lorsque l’aspect social
prendra une plus grande ampleur dans sa vie. Ce moment varie
d’un enfant à l’autre.
DÉFINITION DU MOT
HANDICAP
La loi du 11 février 2005 définit le handicap comme «toute limitation
d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans
son environnement par une personne en raison d’une altération
substantielle, durable ou définitive, d’une ou plusieurs fonctions
physiques, sensorielles, mentales, cognitives […]».
Attention à l’autodiagnostic!
Voyageant depuis un certain temps dans la communauté Asperger, j’ai
constaté qu’il existe une certaine tendance à l’autodiagnostic. Ceci peut
représenter un enjeu sur plusieurs plans, soit pour la compréhension de la
société envers la personne Asperger ainsi que pour la personne
autodiagnostiquée. En fait, selon moi, le problème vient principalement du
fait que beaucoup d’articles sur le web vulgarisent l’autisme Asperger au
point que plusieurs lecteurs se sentent automatiquement Asperger, sans
l’ombre d’un doute. Certains vont même jusqu’à se proclamer autistes
Asperger haut et fort, après la lecture de ces informations et après avoir
passé quelques tests disponibles sur le web. Seulement, être diagnostiqué
d’autisme Asperger, c’est beaucoup plus délicat et complexe que cocher oui
ou non sur une liste de caractéristiques données et obtenir un score qui
«confirme» l’autisme à un test amateur en ligne. Ce qu’il faut réaliser, c’est
que de se sentir interpellé par ces ouvrages et résultats de tests est ni plus ni
moins représentatif d’une possibilité de présence du syndrome d’Asperger.
Rien d’autre. Bien que ces listes et articles soient très utiles et importants
pour donner une idée préliminaire d’un possible diagnostic d’Asperger, il
faut faire attention, car en aucun cas il n’est possible d’établir un véritable
diagnostic avec ces tests.
La tendance actuelle de se proclamer Asperger autodiagnostiqué
provoque des problèmes. Ils sont nombreux. Peut-être que pour la personne
qui s’autodiagnostique, cela semble anodin, mais en réalité, voici les enjeux
qui s’y rattachent:
Diagnostic différentiel
Le diagnostic différentiel est une méthode de diagnostic où l’on
considère plus d’un diagnostic afin d’éliminer le plus d’incertitudes
possible quant aux résultats obtenus. En fait, pour le syndrome d’Asperger,
beaucoup de caractéristiques peuvent se chevaucher: la douance, le trouble
de déficit de l’attention, la dyspraxie, la dysphasie, les troubles de
l’alimentation, le trouble d’anxiété généralisée, le trouble de la personnalité
obsessionnelle-compulsive, etc.
Par exemple, les surdoués et les autistes Asperger partagent entre
autres:
• une tendance solitaire;
• une tendance à se sentir seul et incompris;
• des hypersensibilités sensorielles;
• une hypersensibilité émotive;
• un décalage émotionnel;
• des émotions extrêmes;
• une soif de savoir;
• des intérêts intenses pour certains sujets;
• des symptômes de TDAH;
• des symptômes du syndrome de l’imposteur.
Bref, la liste est longue et ces symptômes rendent les deux diagnostics
voisins l’un de l’autre, et c’est pourquoi ils coexistent aussi souvent
ensemble. D’autres diagnostics peuvent se chevaucher, comme le TDAH et
la douance. Évidemment, c’est une autre histoire, mais cela explique aussi
que beaucoup d’enfants surdoués auront de faux diagnostics de TDAH.
Cela dit, les symptômes de plusieurs diagnostics peuvent se chevaucher
et peuvent coexister collatéralement. Bref, il est important d’utiliser le
processus de diagnostic différentiel, car plus le diagnostic sera précis et
certain, plus les ressources seront adaptées au patient.
TRANCHE DE VIE
Depuis mon diagnostic, j’ai appris à accepter certains aspects de ma
personnalité qui auparavant me troublaient au point de me faire
souffrir. Par exemple, ma sensibilité aux injustices. Dernièrement,
j’étais au restaurant avec mon mari et des émotions intenses ont refait
surface. Des émotions reliées à une situation injuste que j’avais vécue
des mois auparavant. L’injustice en question est probablement l’une de
celles m’ayant le plus troublée dans ma vie entière. Ne pouvant plus
contenir les émotions intenses qui remontaient en moi, je suis partie en
pleurant, bouleversée. Auparavant, j’aurais été fâchée contre moi-
même de ne pas avoir été capable de contrôler ces émotions si
intenses. J’aurais été fâchée de me sentir ainsi, je n’aurais pas
compris et j’aurais été en fait encore plus bouleversée par ce refus
d’accepter ma grande sensibilité et même de me juger moi-même si
sensible. Par contre, cette fois-là, c’était différent. Dans la voiture,
j’attendais mon mari et je pleurais, mais j’avais de la compassion
pour moi-même, je comprenais pourquoi je pleurais et surtout
j’acceptais que l’injustice que j’avais vécue des mois auparavant me
bouleverse encore autant. Je pleurais, mais, ironiquement, de façon
saine, et j’acceptais de pleurer et de me sentir vulnérable. Aussi, au
lieu de focaliser sur les variables de cette situation que je ne
contrôlais pas, j’ai canalisé mon énergie sur ce que je peux contrôler,
c’est-à-dire ma vision des choses et mes sentiments. J’ai accepté que
certaines personnes puissent agir méchamment et réalisé que leur
réaction n’a en fait rien à voir avec moi. Cela n’a à voir qu’avec eux-
mêmes et leur perception du bien et du mal. Sachant ceci et
l’acceptant, bien que je sois encore sensible, je suis maintenant en
mesure de m’accepter et de travailler avec moi-même au lieu travailler
contre moi.
1. Lisez des blogues en ligne, des livres et des témoignages sur le SA.
2. Allez consulter des forums de personnes Asperger sur Face-book et
sur le web, il y en a plusieurs.
3. Passez l’Aspie-Quiz en ligne. Ce test est utilisé de façon purement
personnelle et non professionnelle afin de voir s’il vaut la peine
d’aller chercher plus loin. La référence est à la fin du livre.
Deuxièmement
Ça y est, vous êtes prêt. Vous avez décidé de continuer votre quête pour
savoir si vous ou votre enfant présentez réellement un syndrome
d’Asperger.
Pronostic
Le pronostic pour le syndrome d’Asperger est généralement très positif,
mais ceci est très subjectif, exactement pour la même raison que certains
neurotypiques peuvent avoir de la difficulté dans la vie en général. Le
syndrome d’Asperger étant une forme d’autisme dite hautement
fonctionnelle, cela rend cette idée implicite, en fait. Pour être Asperger, il
faut être hautement fonctionnel, ça va de soi.
En fait, le pronostic de la personne Asperger est grandement influencé
par la perception des gens qui graviteront autour d’elle. C’est triste, mais
c’est la réalité actuelle. Je suis persuadée que si plusieurs Asperger
souffrent autant aujourd’hui, c’est en raison d’un manque de compassion
envers leur différence, et ce, depuis le plus jeune âge.
Voici les aspects de la vie d’une personne autiste Asperger qui
pourraient jouer sur le pronostic:
• le diagnostic;
• l’environnement familial;
• l’environnement à l’école;
• la perception des gens gravitant autour de l’Asperger.
Comorbidité
La comorbidité, c’est la coexistence de plusieurs diagnostics chez une
même personne. Le syndrome d’Asperger se trouve souvent en comorbidité
avec d’autres diagnostics. C’est pourquoi il faut faire attention aux faux
diagnostics. Comme on l’a vu précédemment, plusieurs symptômes de
plusieurs diagnostics se chevauchent. Certains professionnels, s’ils ne
connaissent pas bien le syndrome d’Asperger et ne sont pas assez ferrés
pour le reconnaître, pourraient être responsables du fait que des enfants ou
des adultes reçoivent un mauvais diagnostic. C’est pourquoi la méthode de
diagnostic différentiel est très pertinente dans le cas des symptômes du
syndrome d’Asperger.
Par exemple, comme mentionné précédemment, beaucoup de symptômes
communs caractérisent le syndrome d’Asperger et la douance, le trouble du
déficit de l’attention, la dyspraxie, la dysphasie, le trouble de l’alimentation,
le trouble d’anxiété généralisée, etc. Autant ils peuvent se chevaucher,
autant ils peuvent être co-présents chez la même personne.
Dans le cas de mon fils, un léger retard de langage s’explique par sa
dyspraxie verbale. Les autistes Asperger n’ayant souvent pas de retard de
langage et même parfois un vocabulaire beaucoup plus élaboré que les
enfants de leur groupe d’âge, le diagnostic différentiel était de mise,
puisque mon fils a effectivement reçu un diagnostic d’autisme Asperger,
tandis que le retard de langage s’expliquait plutôt par la dyspraxie verbale.
Voilà pourquoi la méthode de diagnostic différentiel est de mise quand on
pense présenter des signes du syndrome d’Asperger, et il en est de même
pour les enfants.
TRANCHE DE VIE
Pour vous donner un exemple concret, je vais vous raconter mon
cheminement diagnostique. En 2013, j’ai consulté une psychiatre dans
le secteur public; elle a pris le DSM et, en une heure, elle a posé le
diagnostic de trouble de la personnalité obsessionnelle-compulsive
accompagné d’un trouble d’anxiété généralisée (TAG). Elle m’a dit
que ces diagnostics combinés à mon haut potentiel intellectuel
pouvaient contribuer à mes difficultés sur le plan social. Elle m’a
prescrit des antidépresseurs pour contrer mon anxiété, soit des
rehausseurs de sérotonine. De prime abord, son diagnostic semblait
bien et, ne connaissant pas encore le SA, j’ai commencé à prendre la
médication; mais plus le temps avançait, plus je réalisais que cela
n’améliorait pas mes relations sociales ni la compréhension de ma
personne et de mes difficultés. En fait, ça expliquait mon
comportement obsessionnel et mon anxiété, mais le reste demeurait un
mystère irrésolu. C’est à ce moment que j’ai commencé à faire des
recherches et, alors, m’attribuer le syndrome d’Asperger devenait de
plus en plus logique; sa description s’appliquait concrètement à ma
vie en général, depuis l’enfance jusqu’au moment présent. J’avais
d’ailleurs lu qu’il était commun que des femmes Asperger obtiennent
un diagnostic de trouble de la personnalité obsessionnelle-compulsive,
tandis qu’elles étaient Asperger. En réalité, ce n’est pas que la
psychiatre n’était pas bonne, mais elle n’était pas ferrée pour
reconnaître le syndrome d’Asperger, surtout chez la femme. Et pour ce
qui est du trouble d’anxiété généralisée, elle avait raison – le TAG
accompagne toujours le SA. Après avoir reçu mon diagnostic de
syndrome d’Asperger, j’ai arrêté les antidépresseurs et, depuis ce
moment, j’ai appris à accepter qui je suis. Ceci est un exemple parfait
de faux diagnostic posé par une psychiatre non spécialiste du SA. Si je
n’avais pas fait mes recherches, je serais encore à prendre des
antidépresseurs, puisque je n’aurais pas obtenu mon réel diagnostic
ainsi que tous les bienfaits venant avec lui.
Je tiens à mentionner que j’avais tenté de revoir cette psychiatre afin
de rediscuter du diagnostic qu’elle avait posé et de parler de la
possibilité de la présence du SA chez moi. Elle a catégoriquement
refusé de me rencontrer. J’ai alors décidé de me prendre en main et,
après de longues recherches effectuées dans le but de ne pas perdre
mon temps en prenant le risque d’obtenir un autre faux diagnostic, je
suis allée voir un spécialiste redoutable du syndrome d’Asperger chez
la femme, le Dr Normand Giroux de la clinique Autisme & Asperger
de Montréal.
RÉSUMÉ
Points à retenir
• Chez une personne Asperger, il est commun que plusieurs
diagnostics coexistent. C’est ce qu’on appelle la comorbidité.
— Tanya Izquierdo
La fameuse bulle
«La bulle des autistes est leur atelier de création, un lieu où ils sont libres
d’imaginer et de créer, librement sans aucune distraction. C’est leur temps
à eux, le seul temps où ils ne sont pas envahis par les milliers de stimuli qui
les entourent.»
— Tanya Izquierdo
La bulle des autistes Asperger fait partie intégrante de leur neurologie et
de leur intelligence différente. Cette bulle, qui de prime abord peut donner
une impression illusoire «d’être dans la lune», est en fait un moment
privilégié que l’autiste Asperger vit avec lui-même. C’est le moment où la
création commence. Doctor Who est une émission du Royaume-Uni qui
met en vedette le Dr Who, un homme incroyable qui voyage dans le temps
à l’aide de son vaisseau qui n’est en fait qu’une boîte bleue ancienne
normalement utilisée pour mettre à l’abri un téléphone public. Ce vaisseau
crée une illusion: les gens pensent que ce n’est qu’une boîte de téléphone,
mais en fait, quand on ouvre la porte, un immense espace se trouve à
l’intérieur avec des machines complexes de tout bord tout côté, un univers
fascinant qui n’est aux yeux des gens qui passent à côté rien de plus qu’une
boîte bleue. Eh bien, la bulle des autistes, vue de l’extérieur, est semblable à
l’extérieur du vaisseau du Dr Who, et l’atelier de création imaginaire dans
lequel l’autiste se retrouve lorsqu’il est dans sa bulle, comparable à
l’intérieur du vaisseau du Dr Who.
— Tanya Izquierdo
Les Asperger constituent un genre unique, je suis même portée à dire
qu’ils ont leur propre culture, qu’ils soient nés au Québec, en France ou au
Mexique (je ne nommerai pas tous les pays). Comme on l’apprend en
psychologie, les tests de QI sont très subjectifs à plusieurs égards, dont la
culture.
Selon moi, les résultats obtenus par beaucoup d’autistes aux tests de QI
normalisés représentent un des indicatifs les plus parlants quant au fait que
l’autisme est une autre intelligence. Bien qu’il ne faille pas généraliser
puisque ce n’est pas le cas de tous les Aspies, la corrélation demeure
présente et très pertinente en soi. Un point commun qu’ont les autistes
Asperger est un QI difficilement interprétable en utilisant les tests
normalisés conçus pour la population en général. Par exemple, le WAIS-4
pour les adultes et le WPSII-4 pour les enfants. Certains Asperger auront un
QI simplement impossible à interpréter et d’autres un QI difficilement
interprétable, un résultat discutable si on peut le dire ainsi.
Bref, ce résultat atypique est souvent présent chez les Asperger de tout
âge. Les tests de QI étant divisés en plusieurs sous-tests, cette situation a
lieu lorsque les résultats des sous-tests présentent une grande hétérogénéité
(résultats qui manquent d’uniformité). C’est-à-dire que dans certains sous-
tests, la personne Asperger peut atteindre les 99,7 percentiles et dans
d’autres, à peine les 50 percentiles. Plus le facteur d’hétérogénéité est
grand, plus le QI devient difficilement interprétable. Les neurotypiques
ayant habituellement des champs d’intérêt plus généraux, leurs
connaissances et leurs aptitudes se développent de façon plus linéaire et
homogène. Prenons comme analogie quelqu’un qui s’entraîne: s’il ne
travaillait que les muscles de ses cuisses, eh bien, il y aurait un grand
facteur d’hétérogénéité comparativement au développement des autres
parties de son corps. À l’opposé, quelqu’un qui s’entraîne de façon plus
générale présentera une homogénéité du développement global de ses
muscles. L’autiste Asperger est comme l’athlète qui n’entraîne qu’une
partie de ses muscles, donc il possède une autre intelligence, une
intelligence marginale où ses talents, son savoir et ses aptitudes spécifiques
sont souvent très développés, et ce, de façon souvent impressionnante, bien
qu’ils soient moins diversifiés. Je réitère l’importance de l’idée que chaque
autiste est différent, c’est-à-dire qu’un autiste Asperger pourrait être doué
dans quatre ou cinq domaines et qu’un autre pourrait l’être dans deux ou
trois, et doué à différents niveaux aussi.
En fait, les tests de QI conçus pour la population en général sont souvent
inadaptés pour un bon nombre d’autistes. Dans le passé et encore
aujourd’hui, cette situation a porté et porte préjudice à beaucoup de
personnes autistes, puisque les tests normalisés sous-estiment souvent leur
potentiel intellectuel, à cause du manque de considération du
fonctionnement de leur intelligence différente générée par leur
neurodiversité.
Comme l’ont démontré les spécialistes Isabelle Soulières, Michelle
Dawson, Morton Ann Gernsbacher et Laurent Mottron dans leur article The
Level and Nature of Autistic Intelligence II: What about Asperger
Syndrome?, il existe des tests plus adaptés au fonctionnement neurologique
atypique des personnes autistes, par exemple le test d’intelligence qui se
nomme les Matrices Progressives de Raven (RPM) créé par le docteur John
C. Raven en 1936. Ce test englobe entre autres le raisonnement et les
capacités de résolution de problèmes, ce qui serait, selon les spécialistes,
beaucoup plus efficace pour évaluer leur intelligence adéquatement.
RÉSUMÉ
Points à retenir
• Les tests de QI normalisés peuvent porter préjudice aux personnes
autistes en sous-estimant leur potentiel intellectuel.
Les Aspies sont les œuvres d’art de Mère Nature, tout comme les grands
artistes ont créé leurs œuvres magistrales. Différents, parfois choquants,
mais d’un genre certainement innovateur muni d’un énorme potentiel.
— Tanya Izquierdo
Les autistes Asperger sont des gens fascinants, pour qui l’intégrité est
primordiale et l’honnêteté aussi essentielle que l’air pur. Voilà des humains
passionnés qui ne s’arrêteront devant rien pour poursuivre leurs passions et
leurs ambitions. Ce qui est représenté comme «intérêt restreint» dans les
caractéristiques des gens Asperger est, selon moi, une de leurs plus grandes
qualités ou aptitudes, une de leurs plus grandes forces. Oui, c’est cela, la
capacité à se concentrer sur un sujet qui les fascine est une aptitude. Avoir
une telle concentration est en réalité une aptitude, celle d’être en mesure
d’absorber tant de données sur un sujet qui les fascine.
Donc, la raison pour laquelle ils sont capables d’accomplir de
grandes choses consiste en une combinaison de deux facteurs:
1. Les personnes Asperger sont des êtres passionnés de leurs champs
d’intérêt.
2. Les Asperger ont une capacité incommensurable de se concentrer sur un
sujet jusqu’au point d’en devenir des pionniers.
Ces deux points, entre autres, forgent l’intelligence différente des autistes
Asperger. Cependant, ils font aussi partie des difficultés présentes chez
nous, puisque le premier nous handicape dans la vie de tous les jours étant
donné que le champ d’intérêt en question prend la majorité de notre temps
et de notre énergie, et il en est de même pour le deuxième point…
Ce phénomène s’observe également chez le neurotypique, mais de façon
inverse. Souvent, le neurotypique met moins de temps et d’énergie sur un
défi donné, ce qui fait que sa vie sociale est plus équilibrée, mais sa mission
intérieure plus stagnante. Estce qu’il faudrait lui demander de changer? Ou
faudrait-il l’obliger à consacrer plus de temps à sa passion pour qu’il
atteigne un résultat plus rapidement? Je ne crois pas. Tout est une question
de priorités et de perception, et il est primordial de respecter ces deux
éléments tant pour les neurotypiques que pour les autistes Asperger. Ce qui
importe est de s’efforcer de donner le plus de ressources possible aux êtres
humains, qu’ils soient Asperger ou non, afin qu’ils deviennent des êtres
équilibrés et épanouis dans leur vie de tous les jours selon leur perception
individuelle.
Ce n’est pas que je suis plus intelligent qu’un autre, c’est que je demeure
sur le même problème plus longtemps.
— Tanya Izquierdo
Les plus grandes faiblesses des autistes Asperger sont souvent aussi leurs
plus grandes forces.
Leurs obsessions, par exemple, les rendent plus rigides en ce qui
concerne la communication, leurs occupations et leur besoin de routine,
mais cette même tendance devient une aptitude pour l’apprentissage de
nouveaux concepts et la capacité à devenir de grands innovateurs, créateurs
et visionnaires.
Comme Diane Kennedy, auteure et militante pour le syndrome
d’Asperger, a déjà évoqué: «Ils sont nos visionnaires, scientifiques,
diplomates, inventeurs, chefs, artistes, écrivains et musiciens. Ils sont les
vrais penseur originaux, ceux qui même dans un environnement corporatif
demeurent créatifs. Ils sont de grands penseurs et une force dans notre
culture.» (The ADHD-Autism Connection, P. 147 (2002) Diane M.
Kennedy)
La fixation sur les détails peut rendre la communication difficile et les
tâches plus complexes, mais cette fixation fait d’eux des observateurs
inestimables capables de découvrir des patterns et des choses qu’un
neurotypique aurait peine à comprendre même si on les lui pointait du
doigt.
Dire la vérité, que la vérité, rien que la vérité rend la socialisation parfois
conflictuelle et difficile pour la personne Aspie, mais cette tendance
témoigne aussi de l’intégrité de son caractère.
Les hypersensibilités sensorielles peuvent sans doute nuire à la qualité de
vie de la personne Asperger, mais c’est aussi grâce à elles que son cerveau
demeure vigilant et alerte aux stimuli de l’environnement. S’il y a une fuite
de gaz, les Asperger seront les premiers à réagir; si un aliment est pourri,
même chose.
Étant donné que je ne pouvais écrire un livre sans faire allusion au moins
une fois à l’univers de la physique, l’univers le plus logique qui soit, je vous
présente une petite comparaison avec la troisième loi de Newton qui est la
suivante:
Bref, voici ce que je dis à mon fils dans cette situation particulière:
«Loik, je sais que tu as du mal à regarder dans les yeux et c’est correct. Moi
non plus, je n’aime pas ça. Mais il faut tout de même que tu sois capable de
reconnaître comment l’autre se sent, sinon tu auras de la difficulté avec tes
amis et tes professeurs. Moi, ce que je fais et ce que tu pourrais faire toi
aussi, c’est de regarder le visage de l’autre en face, regarder son nez, son
front, ses lèvres et parfois ses yeux. Ainsi, tu es capable de saisir comment
il se sent et, en même temps, tu n’es pas déconcentré puisque tu ne le
regardes pas directement dans les yeux.»
Ainsi, je respecte sa difficulté, son malaise et je lui donne un outil qui est
adapté à son fonctionnement neurologique individuel.
Ceci est une technique adaptée pour l’enfant autiste Asperger qui ne vient
pas brimer d’autres aspects de sa personne. Chaque outil que l’on donne à
ces enfants devrait être développé et pensé selon les critères de la troisième
loi de Newton appliquée ici. D’ailleurs, il devrait en être de même pour les
autistes Asperger au niveau collégial, universitaire et pour ceux qui sont sur
le marché du travail.
Il ne faut pas tenter de rendre conforme, mais bien offrir des outils
adaptés. Les besoins des neurotypiques sont égaux à ceux des autistes
Asperger. L’équité l’exige, selon moi. Si les neurotypiques ont droit à un
enseignement adapté à leur fonctionnement, eh bien, on y a aussi droit.
L’idée est de créer un équilibre entre ces caractéristiques à double
tranchant afin de maximiser le potentiel des autistes Asperger en tant
qu’êtres humains. Il est important de ne pas étouffer les différences des
autistes Asperger. C’est pourquoi il ne faut pas tenter de les guérir.
Il s’agit de déterminer ces forces et ces faiblesses et d’aider l’autiste
Asperger à les marier afin de maximiser le développement de son potentiel.
Dès leur enfance, les Asperger deviennent absorbés par leurs passions,
obsédés. Et bien qu’enfant cela puisse devenir handicapant sur plusieurs
plans, plus tard, à l’âge adulte, si on leur montre à gérer et à s’adapter ainsi
qu’à apprivoiser cette passion, ils peuvent devenir des pionniers de leurs
domaines, des visionnaires, des innovateurs. Ils peuvent changer le
monde… littéralement. Il ne faut pas étouffer cette différence, mais
simplement donner les ressources aux enfants autistes Asperger afin qu’ils
puissent apprivoiser leurs forces. Leur potentiel est un peu comme un
pouvoir qui pourrait être destructif ou devenir des plus positifs. Je ne
prétends pas que les Aspies ont des dons et qu’ils sont des êtres supérieurs
et magiques, capables de faire bouger un crayon immobile avec leurs yeux.
C’est simplement une analogie pour représenter le couteau à double
tranchant de l’intensité de leurs intérêts. S’ils n’apprennent pas à
apprivoiser leurs obsessions, cela pourrait devenir un problème, mais si
l’enfant est fonctionnel au point de pouvoir utiliser ces ressources et de les
appliquer, cette force pourrait faire une différence dans le monde ou
simplement une différence très positive dans sa vie. Mais encore faut-il
travailler avec l’enfant, l’aider, lui donner des ressources pour le laisser
accéder à cette option.
Les difficultés de l’autiste Asperger sont souvent une illusion créée par
les normes sociales établies par des neurotypiques. Il serait temps de
reformuler les normes sociales en considérant la neurodiversité. Oui, les
difficultés sont bien présentes et plus encore chez certains, mais les
difficultés sont déterminées en comparant le cerveau neurotypique avec le
cerveau neurologiquement différent. C’est une difficulté directe, influencée
par une variable. Seulement, étant donné que ceux qui représentent les
autres facettes de la neurodiversité sont minoritaires, ils sont perçus comme
si c’était eux et non les neurotypiques qui avaient une difficulté.
Le système scolaire actuel a été pensé et créé par des neurotypiques pour
des neurotypiques. Il est temps d’unir nos intelligences et de reformuler
l’enseignement en considérant la diversité neurologique comme étant une
partie intégrante, et non à part, de notre société.
— Tanya Izquierdo
TRANCHE DE VIE
Pour mon garçon Aspie, j’ai pris plusieurs mesures préventives dès
son plus jeune âge pour favoriser une évolution maximale en
considérant ses besoins particuliers. Dès que j’ai constaté sa
différence, j’ai commencé à m’informer, à essayer de comprendre en
premier lieu d’où venait cette différence. Plus je prenais de
l’expérience, plus je pensais et je l’observais, plus je réalisais à quel
point il n’avait pas besoin d’être changé, mais simplement d’être
outillé pour faire face au monde. Je n’avais pas l’intention de
l’envoyer à la garderie, mais c’est à contrecœur que j’ai décidé de le
faire lorsqu’il avait 3 ans. Cela, dans le but de l’aider à s’ouvrir au
monde avant l’entrée à l’école. Je l’ai inscrit à la gymnastique à l’âge
de 2 ans, au patin à 3 ans, pour qu’il travaille sa motricité globale.
Finalement, pour ce qui est du diagnostic, je suis passée par le
système médical public au début, mais les délais étant si ridiculement
longs et les démarches plutôt compliquées et pénibles non seulement
pour moi, mais pour Loik aussi, j’ai décidé de couper dans les
dépenses et d’aller au privé pour obtenir un diagnostic officiel afin
que son entrée à l’école se déroule le mieux possible. Je refusais que
les professeurs passent l’année à se demander pourquoi il était
différent et que Loik soit encore plus angoissé par des rencontres avec
le psychologue et d’autres spécialistes pendant cette première année
d’école qui est déjà assez éprouvante en soi. Je voulais qu’il ait la
chance d’avoir une expérience positive dès l’entrée à la maternelle.
— Tanya Izquierdo
Le savoir, c’est tout ce que l’on sait, que l’on a appris au courant de notre
vie. Le potentiel intellectuel, c’est la capacité, l’aptitude à apprendre et à
comprendre les choses telles qu’elles sont. La capacité à créer des liens
entre les concepts et ainsi à saisir des idées complexes. Aussi, surtout, la
capacité d’être créatif.
La personne autiste Asperger vient au monde avec un potentiel immense
étant donné sa nature passionnée et son intelligence différente.
Parce que, comme vous le savez, j’aime les analogies et la physique, en
voici donc une autre. Utilisons l’exemple du pendule qui démontre le
concept de l’énergie potentielle et de l’énergie cinétique en physique.
Si nous prenons une bille, la suspendons à un fil et que nous la laissons
là, suspendue sans lui donner un élan, elle ne bougera pas. Cependant, si
nous la levons vers le haut tout en gardant une tension dans le fil et que
nous la laissons tomber, nous enclenchons le processus d’utilisation de son
énergie potentielle qui devient de l’énergie cinétique. Si nous ne donnons
pas un élan à la boule, son énergie potentielle ne se générera pas. Le
concept de potentiel chez l’autiste Asperger fonctionne de la même façon,
c’est-à-dire qu’il faut que les conditions dans lesquelles il vit soient
propices au développement de son énergie potentielle. Les conditions
représentent l’élan que l’on donne pour que la bille utilise son énergie
potentielle.
Évidemment, l’autiste ne naît pas avec un savoir impressionnant et hors-
normes. Afin que ce potentiel soit développé et qu’il devienne utile,
l’autiste doit d’abord et avant tout apprendre à utiliser son potentiel. Or,
pour être apte à développer ce potentiel au maximum, plusieurs facteurs
doivent coexister.
Dès le plus jeune âge, on doit faire comprendre à l’enfant autiste que sa
différence est un atout qu’il doit apprendre à maîtriser, et c’est pareil pour
les adolescents et les adultes.
— Tanya Izquierdo
— Tanya Izquierdo
Autisme Montréal
www.autisme-montreal.com
Autisme France
www.autisme-france.fr
Prévention du suicide
Suicide action Montréal
1-866-277-3553
www.suicideactionmontreal.org
Diagnostic
ASPIE-QUIZ
www.rdos.net/fr
KENNEDY, Diane M.
The ADHD-Autism Connection: A Step Toward More Accurate Diagnoses
and Effective Treatment P. 147 (2002)
LIRATNI, M. et PRY, R.
Profils psychométriques de 60 enfants à haut potentiel au WISC IV
Laboratoire de psychologie, université Montpellier III, route de Mende,
34199 Montpellier MPEA Peyre Plantade, 34295 Montpellier, France.
DE LA MÊME
auteure
IZQUIERDO, Tanya. Les confessions de Juliet Madyson. Éditions La
Semaine.
Je désire d’abord exprimer toute ma reconnaissance au Dr Normand
Giroux, qui m’a diagnostiquée personnellement et qui a aussi diagnostiqué
mon fils. Un spécialiste pionnier passionné du syndrome d’Asperger, pour
qui j’ai un immense respect et une grande admiration du fait qu’il voue sa
carrière à améliorer les connaissances sur l’autisme. Je serai à jamais
reconnaissante de l’impact positif que ma rencontre avec lui a généré dans
ma vie.
Merci à Annie Tonneau, directrice des Éditions La Semaine, pour sa
confiance et à Nathalie Castonguay, neuropsychologue, pour son
témoignage substantiel.
Je souhaite témoigner ma reconnaissance envers mes parents, Nathalie et
Javier, qui m’ont toujours appuyée dans mes projets, même les plus fous, et
qui, en plus d’être des piliers dans ma vie, me sont une grande source
d’inspiration chacun à sa façon.
Finalement, merci infiniment à mon conjoint Steve de m’accepter telle
que je suis, avec mes forces, mes faiblesses et mes excentricités, et surtout
de m’avoir soutenue jusqu’au bout dans l’écriture de ce livre. Mes enfants,
Ana et Loik, vous êtes ma plus grande fierté.
Tanya Izquierdo
Préface
Remerciements
Définitions
Introduction
Ressources
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LES ÉDITIONS LA SEMAINE
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