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La reconversion des thermes de Dioclétien à Rome:

un exemple historique comme paradigme pour l’actualité.


Alessandro Bianchi

Les cas complexes de reconversion et de reconstruction partielles des bâtiments anciens dans
les lieux historiques témoignent d'un état de l'art bien plus ample et problématique qu'on pourrait le
penser à première vue, surtout en Italie. La situation d'apparente stagnation dans laquelle verse la
théorie de la restauration aujourd'hui est compréhensible, étant donnée la prégnance des arguments
qui sont avancés par les différents courants de pensée. Les conservateurs philologiques voudraient
une restauration pour ainsi dire "scientifique" visant la reconstitution du bâtiment "comme il était et
où il était", en adaptant les fonctions modernes aux structures existantes; par contre les archéologues
les plus radicaux tentent de répandre leur sphère d'influence aux bâtiments historiques plus récents
(début XXeme siècle), en modifiant par conséquence l'idée de "restant architectural" en celle de "pièce
archéologique", inviolable par nature théorique; finalement les architectes tout-court, sans préjugés
par formation, voudraient agir avec la liberté la plus ample, selon le principe qui fut celui de
l'architecte italien E. N. Rogers "conserver est un acte créateur".

A. Chastel, disciple et héritier du courant révisionniste de H. Focillon, soutenait que depuis


toujours l'art italien est marqué par de la reconversion critique de la ville et le changement des
formes qui la constituent. Ainsi immeubles, églises et monuments sont connotés par une
manipulation continue qui a déterminé sur eux des stratifications structurales et décoratives. Chastel
écrivait : "Si nous pouvons parler d'abus dans la tradition en Italie, il est au champ de l'art que nous devons
regarder, pour expliquer l'inclinaison à travailler toujours dans les mêmes lieux et sur les mêmes bâtiments
[…] mais avec le nouveau sentiment d'une distance historique qui invite les créateurs à ne pas s'inspirer à
l'ancien qui pour l'égaliser, peut-être pour le dépasser"1. Alors nous assistons à l'éventualité de pouvoir
reconstruire l'histoire d'un bâtiment par voie analytique à travers la lecture des manières de bâtir qui
se superposent par "concrétion" dans les édifices, en rappelant l'attention des chercheurs scrupuleux
sur l'approche logique et symbolique d'une société vers son propre paradigme de représentation. À
travers ces processus, aujourd'hui nous reconnaissons les signes d'une époque qui nous a précédés:
ainsi nous pouvons affirmer paradoxalement qu'un observateur inconscient pourrait aussi délinéer
l'histoire architecturale et artistique de la ville seulement en observant et en classifiant les éléments
qui se conservent, comme si elle était un "livre de texte"2. Les architectes ne peuvent pas oublier que
le dialogue avec la ville est inéluctable, car il constitue vraiment la racine de leur existence culturelle
en elle. À titre d'exemple, on peut rappeler que la figure de l'architecte se sépare de celle de l'artisan
pour devenir une figure noble avec la Renaissance, au même moment que la ville renaît, et il
s'habille de nouvelles manières qui dérivent de la tradition romaine et grecque. Dans cette
acception, la ville à laquelle nous nous référons n'est pas entité abstraite et réalisable partout, parce
que la ville a un sens quand elle révèle une mémoire: la ville est, en cet exemple, elle-même un
bâtiment commémoratif macroscopique3.

Michel-Ange4 aussi - et nous en venons au sujet de cette présentation - avec le restauration


de l'église de Sainte-Marie des Anges à Rome située dans le tepidarium des Thermes de Dioclétien,
démontre un profond respect de l'ancien bâtiment à travers la discrétion des ouvrages qui exaltent la
spatialité des thermes anciens. Avec des additions modestes, la grande salle à la croisée a été
transformée en une place liturgique à croix grecque répondant parfaitement aux idéaux de la
Renaissance. En tant que “contemporain”, Michel-Ange intervient sur une architecture réalisée au
IVeme siècle après J.C. : lui-même - le “divin Michel-Ange”, comme Gian Lorenzo Bernini le
définit - affronte le problème du réemploi de l'ancien : sa solution est encore un modèle valide,
malgré toutes ses particularités, pour évaluer les traits distinctifs d'un artiste qui a caractérisé
l'histoire de l'architecture occidentale. L'exemple de Michel-Ange est sûrement un paradigme de
comparaison approximatif, souvent inapproprié aux bâtiments sur lesquels nous nous trouvons à
opérer; cependant, il peut aussi être considéré comme type, c'est-à-dire comme modèle intellectuel
et culturel de comparaison par rapport aux thématiques de la conversion architecturale actuelle.

En 1561 Michel-Ange reçoit la charge du Pape Pio IV pour transformer le Tepidarium des
Thermes de Dioclétien en église, l'Église de Sainte Marie des Anges, sur l'idée précédente du prêtre
sicilien Antonio del Duca du 1550. La raison de la reconversion est la même: l'année du jubilé. Del
Duca obtient du Pape Giulio III la charge de traduire un édifice d'origine païenne en un consacré,
opération pour longtemps impensable durant tout l'arc temporel médiéval, car l'hybridation du lieu
liturgique n'était pas admise avec un milieu contaminé – pour origines – du païennetée. Pour un
autre courant de pensée, “bien que les mécènes humanistes – dit J. S. Ackerman – aient déshabillé les
ruines de chaque marbre et chaque colonne autant qu’il fût possible de transporter, leur respect pour les
anciens était si grand qu'ils n'osèrent jamais provoquer une comparaison ouverte en adaptant les bâtiments
classiques aux usages chrétiens”5. Et c'est le même profond respect qui s’infiltre dans le domaine
ecclésiastique aussi (cause la philosophie platonicienne qui se répand en âge de la Renaissance en
chaque cadre de la société), pour l'Ancien (il se voie la lettre pour main de Raffaello Sanzio et
Baldassarre Castiglione adressée au Pape Giulio II sur l'Ancien6), à affaisser chaque perplexité sur la
permission de la reconversion. “Del Duca – dit Bruno Zevi – n'était pas un architecte et il n'allait pas
pour le mince: il voulait quatorze autels et il les aurait partout rangés […] Il choisit une directrice enfin:
l'entrée arrivait de la rue Pia, c'est-à-dire de nord-ouest; les pèlerins traversaient les constructions
périmétrals des thermes, puis le gymnase qui servait de portique, en pénétrant finalment dans la nef
constituée en planimétrie par sept carrés; à droite et à gauche, files de chapelles: la ronde sud-occidentale
avait été destinée à la sacristie”7.

Michel-Ange, fils de la mûre saison classique romaine, à la fin de sa vie, il avait besoin d'une
trame classique pour la disjoindre et la décomposer (aujourd'hui nous dirions pour “la de-bâtir”).
Les thermes se prêtent à son opération – le sujet est classique – mais sa main s'arrête devant la
volonté d'un geste exubérant, bouleversant, comme celui-là trempé succesivement par l’architecte
Luigi Vanvitelli. Michel-Ange est incertain entre deux hypothèses: a) entrée du rond-point, et c'est-
à-dire de l'axe inférieur, qu'elle apparaît plus respectueuse du monument; b) entrée de l'axe le plus
grand, comme avait suggéré d’abord Del Duca, mais contrairement à lui, avec la double entrée,
comme si la nef du Tepidarium dût devenir une rue intérieure de la ville. La solution, en définitive,
est une synthèse des deux positions: le maître, dans la tentative de cacher le moins possible
l'ancienne architecture et de la rendre le plus possible urbaine en ne limitant pas les entrées, il
adopte les trois entrées en fondant une sorte de croix grecque, dont le troisième bras est fermé par
l'autel. Dépourvu de décorations, le projet de Michel-Ange considère à faire vibrer les voûtes
blanches puissantes. Il dit Tolnay: “Voûtes qu'ils semblent des voiles gonflées au-dessus de l’espace,
seulement retenues par les arbres des colonnes. Donc elles n'apparaissent pas comme formes statiques, mais
presque elles fussent créées par le regonflage vers le haut et de l'action des colonnes qui tirent vers le bas”8.

À la suite de la mort de Michel-Ange, le programme architectural de la reconversion des


Thermes en église continua par moments avec des réticences et reprises jusqu'à le 1572, an dans
lequel avec Pape Gregoire XIII les travaux furent acheminés à une activité fiévreuse en vue de
l'Année Saint 1575. Mais il dit encore Zevi, le programme de Michel-Ange fut si corrompu:
“1. construction de six chapelles le long de la directrice rond-point-autel;
2. élimination graduelle de l'église du jeu spatial de quatre chappelles angulaires couvert à voûtes;
3. changement du choeur en tribune absidée qui en rétrograde le maître-autel et en décorant la zone du
presbytère;
4. fermeture des entrées au nord-ouest et au sud-est, préludes aux destinations à chapelles de deux espaces
latérales”9.

Telles opérations ne comprirent absolument la valeur qui Michel-Ange avait attribué aux
thermes, et en base à laquelle s'était apprêté à transformer la destination du monument. Et c'est-à-
dire qu'une structure thermale, par importance et ampleur, n'est pas assimilable à un bâtiment isolé
et individuellement identifié, et que donc ne peut pas etre traiter comme telle. Les thermes ont la
propre caractéristique de “partie de ville” (tout ce qui se voie écrit par Aldo Rossi en L'architecture de
la ville10), avec les propres rapports intérieurs, mais surtout avec la trame serrée de relations avec le
tissu urbain environnant. Et en définitive, l'installation thermale, une “ville dans la ville”, avec ses
propres espaces intérieures et extérieures, rues et places, lieux publics et privés: en transformant les
destinations de quelques espaces aussi (dans le cas spécifique le Tepidarium en Église), Michel-
Ange avait compris que telles connexions urbaines n'allaient pas perdues, dissoute, plutôt elles
devaient être prises au modèle pour la reconversion entière. Ainsi le traçage des murs intérieurs –
peu nombreux d'autre part, de forme cohérente – il suit ce dessin général de projection de l'escalier
architectural urbain aux exigences distributives pures d'un bâtiment qu'il change d’usage mais pas
valeur spatiale. Michel-Ange avait conçu par intuition dans ce cas là qu’il devait reduire sa creativité
artistique: pensons seulement à la richesse compositive qu'il montre dans le vestibule de la
Bibliothèque Laurenziana à Florence ou à la splendeur des dessins pour les Fortifications florentines
qu'il devait reculer pour faire resplendir de nouvelle lumière le volume puissant des thermes
romains.

Il est nécessaire peut-être afin d’avoir un compréhension exact du probleme, de jeter au


moins deux ponts de liaison entre l'âge de la Renaissance tardif et le débat culturel contemporain, en
ligne avec les buts d'un congrès d'études qu'il veut analyser les potentialités opérationnelles du XX
siècle. Les assemblages qui suivront n'ont pas et ils ne veulent pas avoir un caractère personnel. Ce
n'est une référence en la capacité intellectuelle et architecturelle personnelle des acteurs qui nous
intéresse – l'analyse ouvrirait en effet à une comparaison qui pour le moment et avec les ressources
historiographiques et critiques actuelles, apparaîtrait paradoxale aussi – plutôt la valeur de chaque
oeuvrage sur l'étage des contenus de relation avec la réalité urbaine contextuelle: ce dernier rapporte
de parenté entre les architectures peut en effet souligner une continuité historique dans les
intentions - en le faire architecture à travers le dialogue avec ce qu'il existe plutôt qu'avec des
modèles abstraits – et il devient l'endroit réel de l'enquête.

L'architecte Carlo Scarpa d’abord, en Italie, avec la restauration créatrice et en même temps
respectueux de Castel Vecchio11 (Verona-Italie, 1957-1964), et de l'architecte Jean Nouvel après,
avec la même sans préjugées restauration moderne mais au même temps bien assemblé de l'Opera
de Lyon12 en 1993. Tous les deux acceptent la thèse que l’extérieur soit inviolable et pas aggredibile:
la règle est violée là où – sur l'extérieur du bâtiment – le volume de la nouvelle conception assume
un aspect, pour ainsi dire, “classique” (on voie la voûte à tonneau de Lyon). Scarpa redessine
l'intérieur du bâtiment intégralement en ne modifiant pas la morphologie des murs principaux,
pendant que Nouvel s'exprime d’un manière plus radicale par une démolition complete de la
machine théâtrale néoclassique à laquelle il remplace la sienne, une sorte de coque noire suspendue
dans la boîte de maçonnerie. L'un cependant, Scarpa, intervient sur un bâtiment médiéval, un
château, l'autre, Nouvel, agit sur un bâtiment du dix-neuvième siècle: proportionnellement à la
disposition temporelle des monuments et à la nature de la restauration, on peut affirmer que les
deux architectes interviennent avec la même conscience créatrice et contemporaine, on ce qui
concerne l’architecture du monument. Les projets sont imputables donc à la troisième catégorie
supposée en introduction, et c'est-à-dire note “au conserver comme acte créateur”, tandis que le
projet de restauration ne se limite pas à rendre un organisme “mort” car conservé scientifiquement et
pas re-fonctionnailizé selon un programme de reusage moderne. Ce pourquoi, en beaucoup
d'exemples, il se réalise une restauration de la première catégorie, la restauration soi-disant
“scientifique” ou “philologique” et la destination unique que le bâtiment restauré sera un musée, qui
n’aura pas changé pas le rangement fonctionnel de l'organisme architecturel à travers des nouveaux
partages ou le réinvention des espaces intérieures (d'une manière compatible avec la structure
morphologique du monument).

Ce qui importe plus cependant dans le cas de ces deux projets – en rappelant la leçon de
Michel-Ange de la reconversion des Thermes de Dioclétien dans l'Église de Sainte Maria des
Anges – soit Carlo Scarpa que Jean Nouvel (peut-être aussi pour une série d'empêchements
normatifs d'instruments urbanistiques) est la non modification du rangement urbain des
architectures, car métabolizée maintenant dans la structure citadine: ils comprennent en effet qu'en
dénaturer le rangement urbain signifie dénaturer le rôle qui a historiquement assumé pour la ville.
Ils se limitent enfin – si on peut parler de limitations en interventions comme ceux-ci – à en
dessiner le ventre, en citant un film célèbre du metteur en scène-architecte Peter Greenaway Le
ventre de l'architecte. Un ventre qui est un dialogue actuel avec l'architecture de la spatialité
intérieure, en laissant inaltérée la trace de l'architecture dans la morphologie urbaine.

1
A. Chastel, Storia dell’arte italiana, Roma-Bari, 1993.
2
Cfr. G. C. Leoncilli Massi, La composizione/Commentari, Venezia 1985.
3
Cfr. A. Bianchi, Disegno e simbolo nei monumenti alla memoria, Tesi di dottorato, Firenze 2001, avec un extract sur
“Arte Cristiana” n° 803, Milano 2001.
4
Pour une vision générale sur l’artiste se voie Michelangelo architetto, par les soins de G.-C. Argan/B. Contardi, Milano
1990.
5
J.-S. Ackerman, L’architettura di Michelangelo, Torino, 1968, pp. 105-109.
6
Cfr . l’appendice de Raffaello Architetto, par les soins de C.L. Frommel/S. Ray/M. Tafuri, Milano 1984.
7
B. Zevi, Santa Maria degli Angeli, en Michelangiolo architetto par les soins de P. Portoghesi/B. Zevi, pp. 763-798,
Torino, 1964.
8
Cfr. les notations par C. de Tolnay en I disegni di Michelangelo nelle collezioni italiane/Michelangelo Buonarroti, Firenze
1975.
9
Zevi, Ov. Cit. p. 767.
10
Cfr. A. Rossi, L’architettura della città, Milano 1966.
11
F. Dal Co/G. Mazzariol (par les soins de), Carlo Scarpa-Opera completa, pp. 159-166, Milano, 1984, et puis S.
Marinelli, Carlo Scarpa: il museo di Castelvecchio, Milano 1996.
12
O. Boissiere, Jean Nouvel, pp. 79-85, Paris 1996. Et du même auteur, Jean Nouvel: Jean Nouvel, Emmanuel Cattani et
Associes, Zurich 1992.
La reconversion
des thermes de Dioclétien
à Rome:
un exemple historique
comme paradigme
pour l’actualité
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LES THERMES DE DIOCLETIEN, avant le project de reconversion - (Gravure de D. CARTARO


- XVI Siècle)
8

LES THERMES DE DIOCLETIEN, avant le project de reconversion - (de LANCIANI)


9

LES THERMES DE DIOCLETIEN, avant le project de reconversion - (Gravure de S. DUPERAC -


XVI Siècle)
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LES THERMES DE DIOCLETIEN ET SES DIRECTRICES LE TRAçAGE DES MURS


INTERIEURS PAR MICHEL-ANGE
(Dessin de B. ZEVI) (Dessin de J.-S. ACKERMAN)
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COUPE DES THERMES DE DIOCLETIEN, après le project de reconversion - (Gravure de G. A.


DOSIO - XVI Siècle)
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COUPE DES THERMES DE DIOCLETIEN, après le project de reconversion - (Gravure de G. A.


DOSIO - XVI siècle)
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PROJECT: DEL DUCA PROJECT: MICHEL-ANGE PROJECT: VANVITELLI


(Dessin de B. ZEVI) (Dessin de B. ZEVI) (Dessin de: B. ZEVI)
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Plan de project
PROJECT: DEL DUCA - (Dessin de B. ZEVI - 3D: A.
BIANCHI)
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Plan de project
PROJECT: DEL DUCA - (Dessin de B. ZEVI - 3D: A.
BIANCHI)
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Plan de project
PROJECT: MICHEL-ANGE - (Dessin de B. ZEVI - 3D: A.
BIANCHI)
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Plan de project
PROJECT: MICHEL-ANGE - (Dessin de B. ZEVI - 3D: A.
BIANCHI)
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Plan de project
PROJECT: VANVITELLI - (Dessin de B. ZEVI - 3D: A.
BIANCHI)
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Plan de project
PROJECT: VANVITELLI - (Dessin de B. ZEVI - 3D: A.
BIANCHI)
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PROJECT POUR CASTEL VECCHIO, Verona - (architecte C.


SCARPA)
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COUPES DE PROJECT POUR L’OPERA DE LYON -


(architecte J. NOUVEL)
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Bibliographie de la proposition - (Arch. A. BIANCHI - Ph.D. )

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