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Insuffisance respiratoire chronique :


place du médecin généraliste
pour la prise en charge
(traitement au long cours)
C. Andréjak, V. Jounieaux

L’insuffisance respiratoire chronique (IRC), qui correspond au stade terminal d’une maladie respiratoire
chronique, est responsable d’un handicap respiratoire. Trois grands types physiopathologiques d’IRC
doivent être distingués : l’IRC obstructive, la plus importante en terme de fréquence, essentiellement liée à
la bronchopneumopathie chronique obstructive, l’IRC restrictive et l’IRC par troubles de la diffusion. Dans
tous les cas, le sevrage tabagique est essentiel et doit être systématique. Une partie de la prise en charge
est commune à ces trois types d’IRC : vaccinations, éradication des foyers infectieux nasosinusiens et prise
en charge psychologique. Certains médicaments, en particulier les dépresseurs respiratoires, sont contre-
indiqués chez ces patients. L’autre volet de la prise en charge est spécifique de la maladie causale. Ainsi,
dans l’IRC obstructive, le traitement repose essentiellement sur l’oxygénothérapie de longue durée alors
que les patients en IRC restrictive bénéficient d’une ventilation non invasive. Les patients ayant des
troubles de la diffusion secondaires à une fibrose pulmonaire nécessitent le plus souvent le recours à la
transplantation pulmonaire. Tous ces traitements ne visent qu’à améliorer la qualité de vie. Un diagnostic
précoce de la maladie causale est la pierre angulaire de la prise en charge pour le médecin généraliste.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Insuffisance respiratoire chronique ; Bronchopneumopathie chronique obstructive ;


Pathologies neuromusculaires ; Fibroses pulmonaires ; Sevrage tabagique ; Oxygénothérapie ;
Ventilation non invasive ; Transplantation pulmonaire

Plan Ventilation non invasive 7


Ventilation invasive sur trachéotomie 7
Traitements chirurgicaux 7
¶ Introduction 1
Surveillance 7
¶ Définitions 1
¶ Traitement spécifique de l’insuffisance respiratoire restrictive 8
Insuffisance respiratoire chronique obstructive 2
Insuffisance respiratoire chronique restrictive 2 ¶ Traitement spécifique de l’insuffisance respiratoire chronique
Insuffisance respiratoire chronique par troubles de la diffusion 3 par troubles de la diffusion 8
Cœur pulmonaire chronique postembolique 8
¶ Physiopathologie 3 Insuffisance respiratoire chronique sur fibrose pulmonaire 8
Histoire naturelle de la bronchopneumopathie obstructive et
¶ Conclusion 9
physiopathologie de l’insuffisance respiratoire chronique obstructive 3
Classification du Global initiative for chronic Obstructive Lung
Disease 3
Physiopathologie de l’insuffisance respiratoire chronique restrictive
Physiopathologie de l’insuffisance respiratoire chronique par
3
■ Introduction
troubles de la diffusion 3 L’insuffisance respiratoire chronique (IRC), responsable d’un
¶ Traitements communs des insuffisants respiratoires chroniques 3 handicap respiratoire, touche de plus en plus de patients,
Sevrage du tabagisme 4 compte tenu d’une exposition tabagique qui reste importante
Vaccinations et autres mesures de prévention 5 dans la population française. Le médecin généraliste a une place
Décompensations respiratoires 5 de choix dans le diagnostic et la prise en charge de cette
Médicaments à proscrire 6 pathologie, mais aussi dans le diagnostic précoce des maladies
Prise en charge psychologique 6 causales et leur prise en charge.
¶ Traitement spécifique de l’insuffisance respiratoire chronique
obstructive
Dépistage
6
6
■ Définitions
Médicaments 6 L’IRC correspond au stade terminal de toute pathologie
Oxygénothérapie de longue durée 6 respiratoire chronique. Ce stade est caractérisé par l’existence de
Réhabilitation respiratoire 7 troubles de l’hématose (hypoxémie chronique avec une PaO2

Traité de Médecine Akos 1


6-0845 ¶ Insuffisance respiratoire chronique : place du médecin généraliste pour la prise en charge (traitement au long cours)
VEMS (% des valeurs à l’âge de 25 ans)

100
90
80
70 Sujet non fumeur
60
50
Ex-fumeur
40
30 Invalidité
respiratoire
20
10 Fumeur
Décès
0
25 35 45 55 65 75 85
Âge (en années)
Figure 1. Courbes illustrant l’impact du tabagisme sur le déclin annuel
du volume expiratoire maximal par seconde (VEMS), ainsi que les béné-
fices de l’arrêt définitif de l’intoxication tabagique.

Figure 3. Scanner thoracique en coupe parenchymateuse obtenue


chez le même patient. Noter la présence d’une destruction emphyséma-
teuse du parenchyme pulmonaire.

10
Débit
8
Bricanyl®
6

-2

-4

-6

-8

Figure 2. Radiographie thoracique de face chez un patient tabagique Volume


-10
avec bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) de stade IV 0 1 2 3 4 5 6
selon la classification du Global initiative for chronic Obstructive Lung Figure 4. Courbe débit-volume obtenue chez le même patient. Noter
Disease (GOLD). Noter la distension thoracique avec élargissement des l’amputation de la partie supérieure de la courbe correspondant aux
espaces intercostaux, aplatissement des coupoles diaphragmatiques et débits expiratoires sans amélioration après aérosol bronchodilatateur
raréfaction vasculaire. traduisant le caractère non réversible du trouble ventilatoire obstructif
(valeurs fonctionnelles : volume expiratoire maximal par seconde/
capacité vitale forcée [VEMS/CVF] = 35,9 % avec un VEMS = 0,83 l soit
inférieure à 70 mmHg associée ou non à une hypercapnie,
29 % des valeurs théoriques).
objectivée de façon chronique et en état stable). Sur le plan
physiopathologique, trois grands types d’IRC sont distingués :
l’IRC obstructive, l’IRC restrictive et l’IRC par troubles de la anomalies anatomiques (distension des espaces aériens distaux
diffusion. avec rupture des cloisons interalvéolaires). Ces deux pathologies
souvent associées sont toutes deux secondaires à l’exposition
Insuffisance respiratoire chronique obstructive tabagique (Fig. 2–4). D’autres pathologies, comme les dilatations
des bronches ou l’asthme à dyspnée continue (stade IV du
L’IRC la plus fréquente est de nature obstructive (obstruction GINA [Global INitiative for Asthma]) peuvent aboutir à un stade
bronchique irréversible avec mécanique respiratoire conservée) d’IRC obstructive. L’IRC obstructive se définit par une PaO2
compliquant le cours évolutif des bronchopneumopathies inférieure ou égale à 55 mmHg sur deux gaz du sang réalisés en
chroniques obstructives encore appelées « BPCO ». Celle-ci se état stable et à au moins 3 semaines d’intervalle.
caractérise par une diminution permanente des débits aériens
expiratoires (volume expiratoire maximal par seconde [VEMS]/
capacité vitale forcée [CVF] < 70 %) [1] et une accentuation du
Insuffisance respiratoire chronique restrictive
déclin annuel du VEMS (Fig. 1). Sous le terme de BPCO, on La deuxième grande catégorie d’IRC est l’insuffisance respira-
regroupe la bronchite chronique dont le diagnostic est clinique toire restrictive (altération de la mécanique respiratoire avec
(toux et expectoration pendant plus de 3 mois par an sur deux poumons sains). Elle peut être secondaire à des pathologies très
années consécutives) et l’emphysème qui est défini par des variées parmi lesquelles on retrouve des pathologies d’origine

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Insuffisance respiratoire chronique : place du médecin généraliste pour la prise en charge (traitement au long cours) ¶ 6-0845

neurologique centrale (séquelles d’accident vasculaire cérébral, se mettre en place : sécrétion accrue d’érythropoïétine induisant
hypoventilation centrale congénitale, tétraplégie post- une polyglobulie qui augmente le transport en O2 et vasocons-
traumatique, sclérose latérale amyotrophique, séquelles de triction hypoxique favorisant la redistribution du flux sanguin
poliomyélite...) ou neuromusculaires périphériques (paralysies artériel pulmonaire vers les zones les mieux ventilées, malheu-
phréniques, myopathies, maladie de Steinert, sclérose en reusement au prix d’une hypertension artérielle pulmonaire
plaques...). Il peut s’agir également de pathologies liées à une néfaste responsable à long terme du cœur pulmonaire chroni-
anomalie pariétale ou pleurale telle que la cyphoscoliose, que. L’oxygénothérapie au long cours permet de pallier
l’obésité (actuellement de plus en plus fréquente), la spondyl- l’hypoxémie en corrigeant la PaO2 par augmentation de la PAO2
arthrite ankylosante, les séquelles bacillaires pleuroparenchy- au niveau des territoires les mieux perfusés.
mateuses ou de pleurésie purulente. L’IRC restrictive se définit
par une hypoventilation alvéolaire avec PaCO2 supérieure à « Complications » : hypoventilation alvéolaire
45 mmHg. et hypercapnie
Plus tard encore peut apparaître une hypoventilation alvéo-
Insuffisance respiratoire chronique laire (la distension thoracique majeure finissant par induire des
par troubles de la diffusion troubles de la mécanique ventilatoire) responsable d’une
Le dernier groupe d’IRC est représenté par les pathologies hypercapnie.
responsables de troubles de la diffusion comme les fibroses
pulmonaires ou les séquelles d’embolie pulmonaire (altération Classification du Global initiative
de l’échangeur pulmonaire avec mécanique respiratoire conser- for chronic Obstructive Lung Disease (Fig. 5)
vée). Elles se définissent par un trouble de la diffusion (capacité
de transfert du CO ≤ 80 % des valeurs théoriques) responsable La stadification établie par le Global initiative for chronic
d’une hypoxémie (PaO2 ≤ 70 mmHg). Obstructive Lung Disease (GOLD) classe la BPCO en différents
stades de gravité définis sur des valeurs spirométriques [1]. Le
stade 0, dont le principal intérêt est d’identifier les patients à
■ Physiopathologie risque afin de mettre en place des mesures préventives pour
limiter la survenue de cette maladie, correspond à la présence
Histoire naturelle de symptômes cliniques à type de toux chronique ou d’expec-
torations chez un patient ayant une exposition tabagique sans
de la bronchopneumopathie obstructive anomalie spirométrique. Dans tous les autres stades, il existe un
et physiopathologie de l’insuffisance trouble ventilatoire obstructif irréversible dont la sévérité
respiratoire chronique obstructive s’accroît du stade I au stade IV (Fig. 5). Le stade IV, défini par
un VEMS inférieur à 30 % des valeurs théoriques ou inférieures
« Stades préparatoires de l’insuffisance à 50 % Th avec anomalies gazométriques, peut être assimilé au
respiratoire chronique obstructive » : trouble stade d’IRC obstructive. Cette classification théorique permet de
ventilatoire obstructif et déclin accru du volume codifier le traitement des patients souffrant de BPCO dont
expiratoire maximal par seconde l’évolution n’est pas linéaire et reste variable d’un patient à
l’autre [4].
La BPCO est la conséquence d’une agression chronique des
voies aériennes par la fumée de tabac. Le premier stade est lié à
une inflammation globale des voies aériennes inférieures Physiopathologie de l’insuffisance
associée à une hypersécrétion de mucus et à une altération de respiratoire chronique restrictive
la clairance mucociliaire [2]. S’il n’y a pas de trouble ventilatoire
L’IRC restrictive est secondaire à une défaillance de la pompe
au début de la maladie, la dégradation du VEMS est accélérée
ventilatoire qui se solde par une hypoventilation alvéolaire.
avec un déclin annuel du VEMS beaucoup plus rapide chez le
Celle-ci est caractérisée par une augmentation de la PaCO2
patient fumeur (> 60 ml/an) que chez le non-fumeur (environ
proportionnelle à la diminution de la PaO2. Cela est facilement
30 ml/an) [3] (Fig. 1). La seule « thérapeutique » permettant de
observé sur les gaz du sang où l’équation suivante est conser-
normaliser ce déclin du VEMS, c’est-à-dire de retrouver la
vée : PaO2 + PaCO2 = 120 mmHg (à l’inverse de l’effet shunt et
diminution normale du VEMS liée à l’âge, réside dans l’arrêt du
des troubles de la diffusion). Sur le plan thérapeutique, il suffit
tabagisme tout en sachant que ce qui a été perdu ne pourra être
de restaurer la ventilation alvéolaire pour normaliser aussi bien
récupéré. Le sevrage tabagique obtenu, le déclin annuel du
la PaO2 que la PaCO2.
VEMS se normalise et la courbe de l’ex-fumeur redevient
parallèle à celle du non-fumeur. La seule mesure efficace pour
arrêter l’évolution de la pathologie est donc l’arrêt du tabac. Physiopathologie de l’insuffisance
Seul cet arrêt précoce du tabagisme peut éviter au patient respiratoire chronique par troubles
d’arriver au stade d’IRC obstructive.
À un stade plus évolué, l’intoxication tabagique entraîne des de la diffusion
modifications anatomiques des voies aériennes inférieures L’IRC par troubles de la diffusion est secondaire à une
(anomalies de la microcirculation pulmonaires et lésions diffuses altération du poumon profond au niveau de sa membrane
des voies aériennes proximales et distales) avec constitution avéolocapillaire responsable de troubles de diffusion des gaz
progressive d’une obstruction bronchique irréversible. Par entre l’alvéole et le capillaire pulmonaire. Le CO2 étant plus
ailleurs, l’hypersécrétion bronchique favorise la survenue diffusible que l’O2, l’IRC, par troubles de la diffusion, se traduit
d’infections bronchiques dont la répétition majore aussi le dans un premier temps par une hypoxie puis par une hypoxie-
déclin annuel du VEMS. hypercapnie. L’oxygénothérapie permet de pallier transitoire-
ment l’hypoxémie.
« Stade de l’insuffisance respiratoire chronique
obstructive » : anomalies des rapports
ventilation/perfusion avec hypoxémie ■ Traitements communs
L’obstruction bronchique est hétérogène et se solde d’altéra-
tions hétérogènes des rapports ventilation/perfusion (V/Q) :
des insuffisants respiratoires
perfusion de territoires non ventilés. Lorsque ces inégalités V/Q chroniques
sont majeures, elles résultent en un effet shunt caractérisant la
BPCO avec hypoxémie qui marque le tournant vers l’IRC Au stade d’IRC, le patient ne peut bénéficier que de théra-
obstructive. Des mécanismes compensateurs de l’hypoxie vont peutiques visant à améliorer sa qualité de vie. Le médecin

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Stade I Stade II Stade III Stade IV


BPCO Stade 0 Insuffisance
(léger) (modéré) (sévère)
respiratoire

• Exposition aux • VEMS/CVF < 70 % • VEMS/CVF < 70 % • VEMS/CVF < 70 % • VEMS/CVF < 70 %
facteurs de risque

• Spirométrie • VEMS ≥ 80 % Th • 50 % Th ≤ VEMS • 50 % Th ≤ VEMS • VEMS < 30 % Th


normale : < 80 % Th < 50 % Th ou
VEMS/CVF ≥ 70 % VEMS ≤ 50 % Th
avec
PaO2 ≤ 55 mmHG

Arrêt du tabac ( et/ou autres facteurs de risque)


Toujours
Vaccinations antigrippale/antipneumococcique

⊕ Bronchodilatateurs de courte durée d'action à la demande

⊕ Traitement de fond par au moins un bronchodilatateur de longue


durée d'action
⊕ Réhabilitation à l'effort

⊕ Corticothérapie inhalée en cas


d'exacerbations répétées

• ⊕ Oxygénothérapie
au long cours si
PaO2 ≤ 55 mmHg
• Envisager options
chirurgicales

Figure 5. Classification des patients en bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) selon le Global initiative for chronic Obstructive Lung Disease
(GOLD) avec propositions thérapeutiques en fonction des stades. VEMS : volume expiratoire maximal par seconde ; CVF : capacité vitale forcée.

généraliste doit donc tout mettre en œuvre pour ne pas laisser de l’intention à l’action. En effet, chaque fumeur passe par
le patient se dégrader vers ce stade ultime que représente différents stades que sont l’indétermination, l’intention, la
l’insuffisance respiratoire chronique. préparation au sevrage, l’action et la consolidation [6]. Il existe
malheureusement également le stade de rechute, où le généra-
Sevrage du tabagisme liste doit absolument dédramatiser les choses. Lorsque le patient
se sent prêt au sevrage, plusieurs armes sont à la disposition du
Quelle que soit la pathologie respiratoire considérée, l’intoxi-
médecin.
cation tabagique doit être combattue. L’arrêt du tabagisme,
préventif à un stade précoce, est également le seul traitement
curatif permettant d’améliorer le déclin annuel du VEMS Évaluation de l’état psychologique
(Fig. 1). Cela permet de retarder, voire d’éviter l’apparition du Avant de commencer le sevrage proprement dit, il est néces-
stade d’IRC. Le sevrage du tabagisme représente donc la pierre saire d’estimer l’état psychologique du patient, notamment de
angulaire de la stratégie thérapeutique. dépister des troubles anxieux ou dépressifs. Cela peut se faire
Conseil minimal par des tests simples de type test de Beck ou HAD et il est
indispensable de prendre en charge tout état dépressif avant de
Si ce sont les médecins généralistes qui sont en première démarrer un sevrage, la cigarette étant utilisée par le patient
ligne pour susciter l’arrêt du tabac, tout acteur de santé, médical comme antidépresseur (Fig. 6).
et paramédical, doit évoquer avec le fumeur le problème du
tabagisme car des mesures simples peuvent être mises en place
Substituts nicotiniques
par tous. En consultation, tout médecin doit évaluer le taba-
gisme, non seulement en termes de paquets-années, mais En dehors de la thérapie cognitivocomportementale, qui doit
également en durée, principal facteur de risque de cancer être systématique, il est souvent nécessaire, lorsqu’il existe une
bronchique. dépendance physique (test de Fagerström supérieur ou égal à 5)
La simple question « fumez-vous ? » suivie d’un conseil de de proposer les substituts nicotiniques [7] (Tableau 1). En effet,
sevrage permet d’obtenir 2 à 6 % d’arrêt. Ce conseil minimal a les manifestations « physiques » du sevrage sont essentiellement
été recommandé par la conférence de consensus sur le sevrage liées à la baisse de la nicotinémie. Il existe différentes formes
tabagique en 1998 [5]. Pour tout fumeur actif, il faut savoir si galéniques : on peut utiliser soit un substitut transdermique
celui-ci envisage un sevrage. Dans les cas où la réponse est sous forme de timbres qui permet un apport continu de
négative ou lorsque le sevrage n’est envisagé que dans le long nicotine, soit des substituts par voie orale sous forme de
terme, il faut « motiver » le patient, l’aider à voir les côtés gommes à mâcher ou de tablettes à sucer pris ponctuellement
.
négatifs du tabac que ce soit sur le plan de la santé, du prix, du lors d’« envies » de fumer. La durée habituelle du traitement par
regard des autres... Il faut faire pencher la balance motivation- substituts nicotiniques est environ de 3 mois. Le suivi médical
nelle vers l’arrêt du tabac. par le médecin généraliste est essentiel chez ces patients car
beaucoup d’entre eux rechutent en raison de doses inadaptées
Thérapie cognitivocomportementale des substituts (doses insuffisantes : symptômes de manque, ou
On peut ensuite l’aider tout le long du sevrage par la thérapie surdosage : nausées, hyperactivité, sommeil haché). Le succès
cognitivocomportementale qui consiste en une aide pour passer d’une première tentative de sevrage est au mieux de 20 à 25 %.

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Tableau 1. nombreuses contre-indications de ce médicament : troubles


Test de dépendance (Fagerström). convulsifs évolutifs ou antécédents de convulsions, tumeurs du
1. Quand fumez-vous votre première cigarette après votre réveil ?
système nerveux central, sevrage alcoolique ou aux benzodiazé-
pines, anorexie ou boulimie, insuffisance hépatique sévère, etc.
Moins de 5 minutes 3
En moyenne, le bupropion est mis en place pour une durée de
Entre 6 et 30 minutes 2 8 semaines à la posologie de 150 mg les 6 premiers jours puis
Entre 31 et 60 minutes 1 de 300 mg j–1. Enfin, les patients dont le sevrage est difficile
Plus tard 0 peuvent toujours être adressés en consultation de sevrage
2. Avez-vous du mal à ne pas fumer lorsque c’est interdit (cinéma, tabagique spécialisée.
salle d’attente, église, bibliothèque, etc.) ?
Oui 0 Vaccinations et autres mesures
Non 1 de prévention
3. Quelle est la cigarette que vous détesteriez perdre le plus ? En dehors de l’arrêt du tabagisme, qui est primordial, il est
La première le matin 1 nécessaire de mettre en place un certain nombre de mesures
Une autre 0 chez l’ensemble des patients. Pour lutter contre les infections
4. Combien de cigarettes fumez-vous par jour ? des voies aériennes inférieures, il est utile de vacciner annuelle-
10 ou moins 0 ment les patients contre la grippe et contre le pneumocoque
tous les 3 à 5 ans. Tous les foyers infectieux nasosinusiens
11 à 20 1
devront être éradiqués. Les immunostimulants sont retirés du
21 à 30 2
marché (efficacité non documentée). Lorsque l’encombrement
31 ou plus 3 bronchique est majeur, on peut adjoindre une kinésithérapie de
5. Fumez-vous davantage les premières heures après le réveil que drainage bronchique (technique d’accélération passive du flux
pendant le reste de la journée ? expiratoire, clapping et expectorations dirigées) afin de réduire
Oui 1 le recours à l’antibiothérapie injustifiée.
Non 0
6. Fumez-vous, même si vous êtes malade ou alité une partie de la Décompensations respiratoires
journée ?
Lors d’une exacerbation respiratoire, le plus souvent d’origine
Oui 1 infectieuse, il est important de repérer les signes cliniques de
Non 0 gravité. Ils sont de trois types. Au niveau respiratoire, il faut
Faites le total rechercher une dyspnée de repos, une polypnée (fréquence
respiratoire ≥ 25/min), la mise en jeu des muscles respiratoires
Au-dessous de 4 : non dépendant ; entre 4 et 5 : dépendance faible ; entre 6 et 7 :
dépendance moyenne ; 8 et plus : forte dépendance.
accessoires, une respiration abdominale paradoxale, la cyanose,
une toux inefficace. Sur le plan cardiovasculaire, les signes de
gravité sont la tachycardie (fréquence cardiaque [FC] ≥ 140/
min), l’hypotension (pression artérielle systolique [PAS] ≤
Bupropion
90 mmHg), les marbrures, l’apparition récente d’œdèmes des
En cas d’échec de sevrage avec un traitement nicotinique membres inférieurs et l’existence de troubles du rythme. Sur le
bien suivi, le bupropion (Zyban®), antidépresseur noradrénergi- plan neurologique, il faut s’inquiéter si le patient est confus,
que et dopaminergique, reste une possibilité sous réserve des obnubilé, agité, comateux ou s’il présente un asterixis. Devant

Figure 6. Stratégie du sevrage tabagique.


ATCD : antécédents ; TCC : thérapies
Patient prêt à l'arrêt cognitivocomportementales ; IRS : inhibi-
teurs de la recapture de la sérotonine.
Évaluation terrain psychique
(HAD, Beck)

Dépression Absence de
dépression

Toujours TCC
Dépression ATCD de dépression dans
actuelle : l'année précédente :
prise en charge reprise des IRS à demi-doses
(dépression lors d'un Évaluation de la dépendance
psychiatrique et physique
antidépresseurs sevrage : discuter bupropion)
(Fagerström)
(type IRS)

Dépendance physique :
Absence de
- Patchs nicotiniques ±
dépendance physique :
substituts ponctuels
substituts par prises
- Éventuellement
ponctuelles (gommes,
buproprion en cas
tablettes)
d'échec

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l’existence de critères de gravité ou lorsqu’il n’y a pas d’amélio-


ration de l’exacerbation après 48 heures de traitement, il est
nécessaire d’adresser le patient à l’hôpital pour contrôle
biologique, gazométrique et radiologique.

Médicaments à proscrire
Un certain nombre de classes thérapeutiques sont interdites
chez les patients avec IRC. Tous les médicaments antitussifs sont
contre-indiqués en présence d’une hypersécrétion bronchique. Il
faut également éviter les médicaments dépresseurs respiratoires,
notamment les morphiniques, les neuroleptiques et surtout les
benzodiazépines, largement prescrites dans l’insomnie. Pour le
traitement de celle-ci, la zopiclone peut être prescrite chez ces
patients. Dans le cadre des médicaments à visée cardiologique,
il faut manier avec prudence les diurétiques de l’anse qui
favorisent une alcalose métabolique pouvant aggraver une
hypoventilation alvéolaire préexistante. Il faut également éviter
les b-bloquants, surtout les non-cardiosélectifs, en cas de trouble
ventilatoire obstructif.

Prise en charge psychologique


La prise en charge psychologique de ces patients souffrant
d’IRC est primordiale. En effet, des études menées en Angleterre
ont objectivé la présence d’une anxiété et/ou d’une dépression
chez 90 % de ces patients. Rares sont ceux qui bénéficient d’une
prise en charge spécialisée à l’inverse des patients souffrant de
cancer bronchique où une aide psychologique est mise en place Figure 7. Exemple d’appareil de mesure PiKo-6 utilisable au cabinet du
dans 30 % des cas [8]. Le retentissement sur la vie affective de médecin généraliste pour détecter l’existence d’un trouble ventilatoire
la maladie chronique doit être évoqué avec le patient et la prise obstructif chez un patient tabagique.
en charge psychologique est aussi importante en termes de
qualité de vie que les mesures médicamenteuses et moins une forme de longue durée d’action pour maintenir
instrumentales. l’effet sur tout le nycthémère. Les b-2-mimétiques de longue
durée d’action sont utilisés en deux prises par jour, les anticho-
linergiques en une seule prise quotidienne. Leurs effets sont
■ Traitement spécifique similaires sur la réduction de la dyspnée ou sur la tolérance à
l’exercice [10]. La théophylline a également un effet bronchodi-
de l’insuffisance respiratoire latateur mais doit être réservée aux stades d’IRC (stade IV du
chronique obstructive GOLD) en association aux autres bronchodilatateurs car, seule,
son effet est inférieur aux b-2-mimétiques et aux anticholiner-
Dépistage giques. Compte tenu de l’existence d’une inflammation bron-
chique, les corticostéroïdes par voie inhalée ont récemment
En termes de fréquence, l’IRC obstructive complique le plus trouvé leur place dans le traitement de la BPCO. Ils ne permet-
souvent la BPCO, troisième cause de mortalité par maladie dans tent pas de réduire la vitesse du déclin du VEMS, mais dimi-
les pays industrialisés. Les médecins généralistes sont en nuent le nombre d’exacerbations. Les corticostéroïdes inhalés ne
première ligne pour assurer son dépistage qui doit être le plus sont recommandés qu’à partir du stade III de la classification du
précoce possible. Celui-ci est fondé sur la spirométrie qui doit GOLD. Les corticoïdes par voie générale au long cours doivent
être réalisée chez tout patient tabagique. Il ne faut pas réserver être, si possible, évités dans le traitement de la BPCO, même au
ce dépistage aux patients présentant une dyspnée d’effort qui stade d’insuffisance respiratoire chronique.
traduit déjà une pathologie évoluée. La BPCO se caractérise par
un trouble ventilatoire obstructif irréversible nécessitant la Oxygénothérapie de longue durée
pratique d’une exploration fonctionnelle respiratoire en milieu
spécialisé. À l’heure actuelle, des outils sont développés pour L’oxygénothérapie de longue durée (OLD) est le seul traite-
estimer de manière simple le trouble ventilatoire obstructif. ment ayant fait la preuve de son efficacité sur la survie de l’IRC
Ainsi, le rapport VEMS/VEM6, dont les résultats sont compara- obstructive par BPCO [11]. De plus, elle améliore la qualité de vie
bles au rapport VEMS/CVF, peut se faire à l’aide de dispositifs de en favorisant la reprise d’un certain degré d’activité physique.
type Piko-6, utilisable au cabinet du médecin généraliste Celle-ci doit être prescrite si la PaO2 diurne est inférieure à
(Fig. 7) [9]. Il est souhaitable que cette technique se diffuse 55 mmHg sur deux gaz du sang effectués à au moins 3 semaines
largement lors des consultations de médecine générale car, d’intervalle chez un patient stable bénéficiant d’un traitement
actuellement, seul un patient BPCO sur deux bénéficie d’une optimal, à distance de tout épisode de décompensation (stade
mesure objective de son trouble ventilatoire obstructif. IV du GOLD) (Fig. 8). Lorsque la PaO2 est comprise entre 55 et
59 mmHg, l’OLD peut également être prescrit en présence d’au
moins un des éléments suivants : hypertension artérielle
Médicaments pulmonaire (HTAP) (définie par une pression artérielle pulmo-
Au stade d’IRC, les patients doivent bénéficier d’un traite- naire moyenne ≥ 20 mmHg ou systolique ≥ 30 mmHg), désatu-
ment bronchodilatateur maximal, introduit de façon progressive ration nocturne significative (≥ 30 % de la nuit avec SaO2 ≤
pendant l’histoire de la maladie (Fig. 5). Parmi eux, on retrouve 90 %), polyglobulie, et/ou signes de cœur pulmonaire chroni-
en première ligne les bronchodilatateurs dont les deux types que. En théorie, l’OLD ne doit être prescrite que si le tabagisme
principaux sont les anticholinergiques et les b-2-mimétiques. est sevré et doit être utilisée au moins plus de 15 heures par
Ces deux classes thérapeutiques existent sous forme de courte et jour. Il existe différentes sources d’oxygène. En première
de longue durée d’action. La voie d’utilisation à prescrire est la intention, il faut utiliser des concentrateurs, qui représentent la
voie inhalée. Les formes de courte durée d’action sont indiquées forme la plus économique d’oxygène. Si les débits sont supé-
pour une utilisation ponctuelle symptomatique dès le stade I du rieurs à 5 l/min et/ou si le malade déambule plus de 1 heure par
GOLD. Chez le patient BPCO au stade II, il faut y associer au jour, il faut proposer une oxygénothérapie liquide (source fixe

6 Traité de Médecine Akos


Insuffisance respiratoire chronique : place du médecin généraliste pour la prise en charge (traitement au long cours) ¶ 6-0845

Figure 8. Différents types d’insuffisance respira-


toire chronique et leur prise en charge globale.
Insuffisance respiratoire chronique

Obstructive Restrictive Troubles de la diffusion

PaO² ≤ 55 mmHg PaCO² ≥ 45 mmHg Traitement médical

Oxygénothérapie au Ventilation non invasive


long cours • Respirateur volumétrique
• Débit : 2 à 3 l/min • FR = 20 cycles/min
Transplantation
• Durée ≥ 15h/ j • VT = 13 ml/kg
pulmonaire
• Par lunettes nasales • I/E = 1/1,2
• Durée : 8 à 12 h/nuit

et portable autorisant l’oxygénothérapie lors de la déambula- ballonnet gonflé. La phonation n’est pas compatible avec une
tion). Le but de cette oxygénothérapie est d’obtenir une PaO2 ventilation mécanique et se fera avec une canule de phonation,
supérieure à 60 mmHg au repos et/ou une SaO2 supérieure à ballonnet dégonflé.
90 %. La surveillance doit être régulière avec contrôle des gaz
du sang sous oxygène et en air ambiant. Classiquement, le débit Traitements chirurgicaux
d’O2 doit être augmenté à l’effort (+ 1 l/min) et au cours du
sommeil. Il est toutefois préférable de titrer cette augmentation La chirurgie de réduction de volume pulmonaire peut être
du débit par une épreuve de marche de 6 minutes et par une proposée aux patients emphysémateux et dont l’état respiratoire
oxymétrie nocturne. et la qualité de vie s’aggravent malgré un traitement médical
maximal. Le but est de réduire la dyspnée induite par la
distension thoracique et d’augmenter la tolérance à l’effort.
Réhabilitation respiratoire Cette chirurgie ne doit pas être proposée à tous les patients. Son
bénéfice est transitoire (2 à 3 ans) et maximum chez les patients
La réhabilitation respiratoire doit faire partie intégrante de la
ayant un emphysème évolué (stade IV du GOLD) localisé au
prise en charge du patient BPCO [12] . Si celle-ci doit être
niveau des sommets avec capacité limitée à l’effort après
proposée dès le stade II du GOLD, l’IRC obstructive au stade de
réhabilitation [13].
l’oxygénothérapie au long cours n’est pas en elle-même une
La transplantation pulmonaire peut être proposée dans les
contre-indication à sa prescription. Il faut proposer la réhabili-
IRC obstructives terminales essentiellement chez le patient
tation aux patients dyspnéiques, intolérants à l’effort malgré un
emphysémateux avec ou sans déficit en a1 antitrypsine, supplé-
traitement bronchodilatateur optimal. Ce traitement n’est
menté ou non (taux ≤ 0,8 g/l) en l’absence de comorbidités
indiqué que chez le patient motivé. Il a pour but de diminuer
évolutives. Ce sont le plus souvent des transplantations mono-
la dyspnée, d’améliorer la tolérance à l’effort, de diminuer le
pulmonaires, parfois indiquées après une chirurgie de réduction
nombre des exacerbations et d’améliorer la qualité de vie.
de volume pulmonaire. La transplantation améliore la qualité
de vie de ces patients [14].
Ventilation non invasive
Actuellement, l’indication de la ventilation non invasive est Surveillance
absolue dans les épisodes de décompensations respiratoires Le suivi doit être régulier et fait de manière conjointe par le
aiguës hypercapniques. En revanche, elle peut se discuter chez médecin généraliste et le spécialiste. Il doit permettre une
le patient IRC obstructif stable en association avec l’oxygéno- évaluation clinique et fonctionnelle, une adaptation du traite-
thérapie s’il existe une hypercapnie (PaCO 2 ≥ 55 mmHg) ment, et une prévention des complications avec surveillance
associée à des signes cliniques d’hypoventilation alvéolaire régulière de la gazométrie. La question du tabagisme doit être
nocturne et/ou d’hospitalisations répétées pour décompensa- systématiquement abordée. Le rythme du suivi dépend du
tions respiratoires. Cette ventilation non invasive sera faite de patient et va d’une fois par trimestre à une fois par an. Rien
manière préférentielle la nuit. n’est établi. L’évolution est émaillée d’exacerbations qui
doivent, en l’absence de critères de gravité, être traitées en
Ventilation invasive sur trachéotomie ambulatoire. On parle d’exacerbation de BPCO devant l’aggra-
vation d’un ou plusieurs symptômes de la maladie (expectora-
Elle est le plus souvent mise en place au décours d’un épisode tions, toux, dyspnée). Chez les patients BPCO au stade d’IRC,
d’insuffisance respiratoire aiguë hypercapnique ayant nécessité les exacerbations ont un risque important d’évolution vers la
le recours à la ventilation mécanique endotrachéale avec un décompensation respiratoire, surtout si les patients sont âgés,
échec de sevrage. Il est souhaitable que la poursuite de la dénutris, hypercapniques et avec des comorbidités associées. La
ventilation invasive sur trachéotomie soit décidée en accord présence de nombreux épisodes d’exacerbations dans l’année
avec le patient et sa famille. Une éducation thérapeutique sera et/ou d’une colonisation par des germes multirésistants est de
importante. Ces patients pourront bénéficier d’une ventilation pronostic défavorable. En cas d’exacerbation chez l’IRC obstruc-
mécanique supplémentée en oxygène sur la canule de trachéo- tif, l’antibiothérapie doit être mise en place devant toute
tomie en essayant de conserver un certain degré d’autonomie purulence des expectorations. L’association amoxicilline-acide
respiratoire et de phonation. Il existe divers types de canule de clavulanique à la dose de 3 g j–1 est généralement efficace sur
trachéotomie, avec ou sans ballonnet. Lors des phases de les germes rencontrés dans ce contexte. La Société de pneumo-
ventilation mécanique, il est nécessaire d’avoir une canule avec logie de langue française (SPLF) autorise également le recours

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6-0845 ¶ Insuffisance respiratoire chronique : place du médecin généraliste pour la prise en charge (traitement au long cours)

aux nouvelles fluoroquinolones (lévofloxacine, moxifloxacine),


aux C3G orales (cefotiam-hexétil, cefpodoxime-proxétil) ou aux
C2G orales [15]. “ Points forts
Seul l’arrêt de l’intoxication tabagique permet de
■ Traitement spécifique de normaliser le déclin annuel du VEMS.
l’insuffisance respiratoire Un conseil minimal multiplie par quatre les chances d’arrêt
du tabagisme.
restrictive Le dépistage précoce d’un trouble ventilatoire obstructif
est indispensable.
Le traitement de l’IRC restrictive diffère de celui de l’IRC
obstructive. Chez ces patients, l’oxygénothérapie seule est L’oxygénothérapie de longue durée, pratiquée ≥ 15 h/j,
contre-indiquée parce qu’elle risque d’aggraver l’hypercapnie par représente la clé de voûte du traitement de l’IRC
perte du stimulus hypoxique. Le traitement de référence pour ce obstructive lorsque la PaO2 ≤ 55 mmHg est en état stable.
type de patient est la ventilation non invasive. .
Le traitement de l’IRC restrictive repose sur la ventilation
L’initiation de ce traitement est envisagée lorsque l’hypoven- non invasive nocturne. L’oxygénothérapie de longue
tilation alvéolaire devient symptomatique (céphalées matinales, durée seule est contre-indiquée.
asthénie, hypersomnolence diurne, cauchemars, dyspnée, cœur
pulmonaire chronique) et/ou lorsqu’elle est responsable d’ano-
malies gazométriques (PaCO2 diurne ≥ à 45 mmHg ou désatu-
ration nocturne avec SaO2 inférieure à 88 % pendant plus de
5 minutes). Chez les patients neuromusculaires, on peut ajouter
des critères fonctionnels respiratoires : CVF inférieure à 50 % “ Glossaire
des théoriques et des pressions inspiratoires maximales (Pimax)
inférieures ou égales 60 cmH2O [16]. L’interface à privilégier est BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive.
le masque nasal. Chez ces patients, la ventilation se fait le plus C2G : céphalosporines de 2e génération.
souvent en mode volumétrique durant le sommeil [17] (Fig. 9). C3G : céphalosporines de 3e génération.
Il existe certaines contre-indications à la mise en place d’une CPC : cœur pulmonaire chronique.
ventilation non invasive, comme une toux inefficace, des CVF : capacité vitale forcée.
troubles de la déglutition, une hypersécrétion bronchique
FC : fréquence cardiaque.
excessive, une dépendance quasi continue à la ventilation, une
absence de coopération ou de compréhension du patient, une GOLD : global initiative for chronic obstructive lung disease.
faible motivation du patient. Lorsque la toux est inefficace ou HTAP : hypertension artérielle pulmonaire.
lorsque la ventilation non invasive est continue (absence de IRS : inhibiteur de recapture de la sérotonine.
ventilation spontanée efficace), il faut passer à une ventilation IRC : insuffisance respiratoire chronique.
mécanique invasive sur trachéotomie. Les indications de cette OLD : oxygène longue durée.
ventilation invasive doivent être réfléchies car la trachéotomie PaO2 : pression artérielle en oxygène.
chez ces patients est le plus souvent définitive. Dans ces PAO2 : pression alvéolaire en oxygène.
conditions, la ventilation en mode volumétrique est pratiquée PAP : pression artérielle pulmonaire.
en adaptant les paramètres qui diffèrent totalement de ceux PiMax : pressions inspiratoires maximales.
requis pour la ventilation non invasive (Fig. 8). Cette ventila-
TCC : thérapie cognitivocomportementale.
tion se fera le plus souvent plus de 18 heures par jour. Les
patients ayant une IRC restrictive d’origine neuromusculaire TCO : transfert du CO.
doivent bénéficier d’une kinésithérapie de désencombrement SPLF : société de pneumologie en langue française.
devant des efforts de toux souvent insuffisants. Il faut noter VEMS : volume expiratoire maximal par seconde.
qu’une maladie neuromusculaire évolutive est une contre- VEM6 : volume expiratoire maximal en 6 secondes.
indication absolue à la transplantation. V/Q : ventilation/perfusion.

■ Traitement spécifique
ment médical adapté (Fig. 8). Dans l’attente de la greffe,
de l’insuffisance respiratoire l’oxygénothérapie et la ventilation non invasive peuvent être
chronique par troubles proposées. Ces thérapeutiques ne sont que des solutions
d’attente dont l’efficacité n’est pas validée. La transplantation
de la diffusion est proposée lorsque l’estimation de l’espérance de vie post-
Ces pathologies graves, essentiellement représentées par la transplantation apparaît supérieure à l’espérance de vie sponta-
fibrose pulmonaire et les séquelles d’embolie pulmonaire, née attendue (en tenant compte de la durée moyenne d’attente
nécessitent une prise en charge précoce adaptée à l’étiologie. Au sur la liste de greffe). Globalement, elle est à proposer pour les
stade d’IRC, peu de traitements ont une efficacité reconnue. fibroses pulmonaires lorsque le patient est hypoxique et
hypercapnique au repos ou lorsque la capacité vitale (CV) est
inférieure à 60 % des valeurs prédites et/ou le transfert du CO
Cœur pulmonaire chronique postembolique (TCO) inférieur à 50 % des valeurs prédites. Il peut être intéres-
Dans les cœurs pulmonaires chroniques (CPC) postemboli- sant d’adresser précocement les patients à un centre de trans-
ques, il faut évoquer la possibilité d’une thromboendartériecto- plantation pour une première évaluation dès l’existence
mie chirurgicale avant de se contenter de l’association au long d’altérations fonctionnelles. Les contre-indications absolues à la
cours oxygénothérapie/anticoagulation par les antivitamines K transplantation chez ces patients sont les mêmes que pour les
(AVK). autres pathologies : insuffisance rénale chronique avec une
clairance inférieure à 50 mg ml–1 min–1, infection au virus de
Insuffisance respiratoire chronique l’immunodéficience humaine (VIH), néoplasie évolutive,
hépatites B ou C chroniques. Les candidats à la transplantation
sur fibrose pulmonaire doivent être sevrés depuis au moins 6 mois du tabac, de l’alcool
Seule la transplantation pulmonaire est efficace dans les cas et/ou d’autres substances stupéfiantes [14]. L’état nutritionnel est
d’IRC sur fibrose pulmonaire n’ayant pas répondu à un traite- également à prendre en compte.

8 Traité de Médecine Akos


Insuffisance respiratoire chronique : place du médecin généraliste pour la prise en charge (traitement au long cours) ¶ 6-0845

■ Conclusion [8] Gore JM, Brophy CJ, Greenstone MA. How well do we care for patients
with end stage chronic obstructive pulmonary disease (COPD)? A
L’insuffisance respiratoire chronique est le stade terminal comparison of palliative care and quality of life in COPD and lung
cancer. Thorax 2000;55:1000-6.
d’une maladie respiratoire. Tout doit être mis en place pour
[9] Rosa FW, Camelier A, Perez-Padilla R, Menezes AM, Jardim JB.
empêcher l’évolution vers ce stade ultime. Pour cela, le sevrage Analysis of the FEV1/FEV6 ratio compared to FEV1/FVC ratio in
tabagique est le seul traitement capable d’améliorer le déclin predicting obstruction: validation in a population-based sample study
annuel du VEMS. Le deuxième point essentiel est le dépistage [abstract]. Proc Am Thorac Soc 2005;2:A32.
de la BPCO permettant une prise en charge la plus précoce [10] Donohue JF, van Noord JA, Bateman ED, Langley SJ, Lee A,
possible de la maladie. Ensuite, seul un traitement symptoma- Witek Jr. TJ, et al.A6-month, placebo-controlled study controlled study
tique adapté au type d’insuffisance respiratoire pourra être mis comparing lung function and health status changes in COPD patients
en place. treated with tiotropium or salmeterol. Chest 2002;122:47-55.
[11] Medical Research Council Working Party. Long-term domiciliary
oxygen therapy in chronic hypoxic cor pulmonale complicating chronic
.

bronchitis and emphysema. Lancet 1981;1:681-6.


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1978;3:235-41. adep.asso.fr/patient/traitement.htm.

C. Andréjak (andrejak.claire@chu-amiens.fr).
V. Jounieaux (jounieaux.vincent@chu-amiens.fr).
Service de pneumologie et unité de réanimation respiratoire, centre hospitalier universitaire Sud, 80054 Amiens cedex 1, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Andréjak C., Jounieaux V. Insuffisance respiratoire chronique : place du médecin généraliste pour la prise
en charge (traitement au long cours). EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de Médecine Akos, 6-0845, 2007.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


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